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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule no 60 - Témoignages du 13 février 2018


OTTAWA, le mardi 13 février 2018

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 9 h 30, en séance publique et à huis clos, pour étudier les questions qui pourraient survenir occasionnellement concernant les prévisions budgétaires du gouvernement en général, notamment les comptes publics, les rapports du vérificateur général et les finances publiques, et pour examiner un projet d’ordre du jour (travaux futurs).

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bienvenue à la réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales.

[Traduction]

Je suis le sénateur Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick, président du comité. Je souhaite la bienvenue à tous ceux présents ici dans la pièce et à tous les Canadiens qui nous regardent à la télévision ou en ligne. Je rappelle à nos auditeurs que les audiences du comité sont publiques et accessibles en ligne sur sencanada.ca, le site web du Sénat du Canada.

J’aimerais maintenant demander aux sénateurs de se présenter. Commençons par le sénateur à ma gauche.

[Français]

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Marshall : Beth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.

La sénatrice Eaton : Nicole Eaton, de l’Ontario.

Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique.

Le président : Merci.

Je voudrais maintenant reconnaître la greffière du comité, Mme Gaëtane Lemay, et nos deux analystes, Sylvain Fleury et Alex Smith, qui appuient le comité dans ses travaux.

Aujourd’hui, nous recevons le directeur parlementaire du budget. Nous l’avons invité pour nous entretenir de deux de ses récents rapports, tous deux publiés le 23 janvier 2018. J’aimerais profiter de l’occasion pour remercier M. Fréchette et son équipe. Chaque fois que nous vous avons invités à comparaître devant le comité, vous avez toujours accepté et vous avez toujours participé à nos délibérations et à nos séries de questions.

Le premier rapport s’intitule Suivi économique et financier - Janvier 2018, et il fournit une estimation en cours d’exercice du produit intérieur brut pour l’année 2017 et le solde budgétaire du gouvernement du Canada en 2017-2018 selon les données publiées depuis le rapport Perspectives économiques et financières d’octobre 2017 jusqu’au 12 janvier 2018 inclusivement.

[Français]

Le deuxième rapport s’intitule Comparaison des projections à long terme du DPB et du ministère des Finances Canada. Ce document, qui a été préparé en 2017 par Finances Canada et le directeur parlementaire du budget (DPB), porte sur la comparaison des projections économiques et financières à long terme.

[Traduction]

Nous sommes donc heureux de compter parmi nous pour discuter de ces deux rapports le directeur parlementaire du budget, M. Fréchette. Il est accompagné de M. Mostafa Askari, sous-directeur parlementaire du budget, de Trevor Shaw, conseiller-analyste économique, et de Tim Scholz, conseiller-analyste économique également. Bienvenue. Je vous remercie encore une fois, monsieur Fréchette, d’être là pour répondre à nos questions.

J’ai été informé que vous n’avez pas d’exposé. Nous passerons donc immédiatement aux séries de questions.

La sénatrice Marshall : Merci de votre présence ici ce matin. J’ai plusieurs questions concernant les rapports, mais je voulais tout d’abord poser une question au sujet d’une nouvelle ou d’un communiqué que j’ai vu hier soir. Il semble que vous aurez maintenant accès aux données de l’Agence du revenu du Canada en vue de réaliser des travaux sur l’écart fiscal. Je sais que c’est un projet d’envergure qui est en attente depuis longtemps, et il semble que vous ayez enfin réussi à avoir gain de cause. Pouvez-vous faire le point à ce sujet?

Jean-Denis Fréchette, directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Ma voix... C’est probablement lié aux émotions que j’ai vécues hier après cinq ans d’attente. C’est certainement une bonne nouvelle, surtout pour le sénateur Downe, parce qu’il est à l’origine de ce projet, comme vous n’êtes pas sans le savoir. C’est lui qui à l’origine a demandé une analyse sur l’écart fiscal en 2012. Depuis, mon prédécesseur et moi avons toujours promis au sénateur Downe que nous ne baisserions jamais les bras, et cette longue bataille a pris fin hier.

À la suite d’une rencontre avec des représentants, j’ai envoyé une lettre le 17 janvier pour les informer que ce serait la dernière que je leur enverrais pour leur demander des données sur l’écart fiscal. Il n’est pas nécessaire de lire entre les lignes pour comprendre qu’autrement dit c’était un ultimatum; quelque chose devait se passer.

Nous avons eu de bonnes discussions avec les représentants de l’agence qui étaient disposés à nous fournir certaines données et à nous les fournir comme nous le demandions. Hier, nous en avons eu la confirmation non seulement à la Chambre des communes, mais aussi de la part de l’agence.

Nous avons hâte de recevoir les données. Comme vous le savez, l’analyse nous prendra plusieurs mois, mais nous avons hâte de la soumettre au Parlement et au sénateur Downe, qui en a fait la demande.

La sénatrice Marshall : Dans sa réponse, l’agence affirme-t-elle être disposée à vous remettre toutes les données dont vous avez besoin ou la formulation utilisée vous laisse-t-elle croire que vous n’aurez peut-être pas toutes les données? L’agence affirme-t-elle catégoriquement que vous recevrez tout ce que vous avez demandé?

M. Fréchette : C’est la réponse que nous avons eue, mais je me montre vraiment toujours prudent. Comme je ne suis pas né de la dernière pluie, je sais qu’il nous arrive parfois de ne pas toujours recevoir exactement ce qui a été promis. Je garde espoir, et je suis aussi optimiste. Nous verrons bien. Ce sera certainement un pas dans la bonne direction même si ce n’est pas exactement ce que nous avons demandé.

Hier, le premier ministre, la Chambre des communes et l’agence ont affirmé qu’ils fourniront ce qui a été demandé dans la lettre, soit les données T1, T2 et T3, comme nous le leur avions demandé, sur support électronique. Ce sont des données anonymisées, comme nous l’avons aussi déjà mentionné.

Il semble que nous pourrons avoir le premier ensemble de données vendredi; je serai donc probablement en mesure de vous en donner des nouvelles plus tard la semaine prochaine.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup. C’est une bonne nouvelle.

Ma deuxième question a trait à vos rapports. Je me demande si vous avez réalisé d’autres travaux sur le coût d’emprunt prévu du gouvernement fédéral. Je sais que dans le dernier budget le ministre a fourni des données relativement au coût d’emprunt prévu. Je crois qu’il était question environ de 25 à 30 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. Vous avez fait des commentaires sur l’augmentation des taux d’intérêt et vous avez mentionné que d’autres augmentations sont peut-être à venir. Avez-vous réalisé d’autres travaux à ce chapitre? Le coût d’emprunt prévu m’intéresse énormément, parce que c’est un montant considérable. Pouvez-vous nous dire si d’autres travaux sont en cours?

M. Fréchette : Je vais demander à Trevor Shaw de vous donner des détails à ce sujet.

Trevor Shaw, conseiller-analyste économique, Bureau du directeur parlementaire du budget : Nos deux récentes mises à jour, dont notre rapport Suivi économique et financier que nous avons publié en janvier, vous donnent un portrait actuel de notre opinion sur les frais de la dette publique. Pour ce qui est du moyen terme, nous avons notre rapport Perspectives économiques et financières d’octobre 2017. Nos plus récentes perspectives sur le coût d’emprunt portent sur un horizon de cinq à six ans.

Notre méthodologie au Bureau du directeur parlementaire du budget tient compte de divers aspects des frais de la dette publique. Il y a les frais ordinaires de la dette publique en ce qui concerne les obligations et les bons du Trésor, et ce sont normalement les éléments auxquels nous pensons, mais il y a aussi le coût d’emprunt concernant d’autres aspects comme le régime de retraite, soit le régime de retraite des employés du secteur public, et cetera. Les projections en ce qui a trait aux frais de la dette publique dans notre méthodologie tiennent compte de ces deux groupes d’éléments.

J’aimerais notamment souligner que nous prévoyons une hausse des taux d’intérêt, comme bon nombre d’autres prévisionnistes. L’effet sur les frais de la dette publique n’est pas immédiat, parce qu’il faut attendre le renouvellement des obligations. Par ailleurs, toute la dette publique n’est pas renouvelée la même année; certaines obligations sont renouvelées de manière périodique en fonction du jugement des gens au ministère des Finances et à la Banque du Canada. Il y a des obligations qui n’arriveront pas à maturité avant encore 5 ou 10 ans; elles seront alors renouvelées aux taux d’intérêt du marché. Même si nous prévoyons que les taux d’intérêt augmentent et que cela fait grimper les frais de la dette publique, cela ne se produit pas instantanément. L’augmentation se fait graduellement au fil du temps.

La sénatrice Marshall : Que faites-vous avec vos projections? J’essaie d’y aller de mémoire, mais je crois avoir vu que le Bureau du directeur parlementaire du budget a indiqué s’attendre à une autre hausse des taux d’intérêt cette année. Mettez-vous sans cesse à jour ces données?

M. Shaw : C’est exact. Nos projections économiques sous-tendent toutes nos prévisions financières. Mes collègues, Chris, Tim et Mostafa, sont chargés d’élaborer nos prévisions économiques et de produire les données que vous verrez de nombreux prévisionnistes du secteur public utiliser, y compris la Banque du Canada. Cela alimente ensuite notre modèle pour les prévisions financières qui tient compte de nos prévisions relatives aux taux d’intérêt pour les bons du Trésor à court terme, notamment les bons de 90 jours, et les obligations à long terme, y compris les obligations de 10 ans et plus, qui sont tous les deux des sources de financement pour le gouvernement du Canada. Ce sont ces projections qui dictent nos prévisions en ce qui concerne ce que sera le coût d’emprunt au moment de l’émission.

La sénatrice Marshall : Donc, s’il y a une autre augmentation des taux d’intérêt, vous produirez la prochaine fois automatiquement de nouvelles données.

M. Shaw : Oui. Nous avons établi des projections relativement aux augmentations des taux d’intérêt à moyen terme. Nous prévoyons que les taux d’intérêt atteignent des niveaux plus équilibrés, ce dont mon collègue, Tim, pourrait discuter plus en détail. Si les taux d’intérêt augmentent plus rapidement que nous le prévoyons, nous mettrons à jour notre modèle en conséquence. Si les taux d’intérêt n’augmentent pas aussi rapidement que nous le prévoyons, ce qui arrive parfois, nos prévisions seront revues à la baisse.

La sénatrice Marshall : Monsieur Fréchette, je sais que, dans l’un de vos précédents rapports, vous avez parlé des gouvernements provinciaux et de leur situation financière. Dans l’un des rapports dont nous discutons ici aujourd’hui, vous avez examiné la situation des gouvernements provinciaux, mais le gouvernement fédéral n’en tenait pas compte. Je suis de Terre-Neuve-et-Labrador, et une section dans un précédent rapport portait sur notre mauvaise situation financière. Pourquoi considérez-vous comme important que le gouvernement fédéral tienne compte de cet aspect dans ses prévisions? Quel était exactement le problème que vous aviez en ce qui concerne le gouvernement fédéral?

M. Fréchette : Avant de laisser la parole à Mostafa, je tiens à dire que c’est le vérificateur général du Canada qui en a fait la demande.

La sénatrice Marshall : Oui. Vous avez raison. Je m’en souviens.

M. Fréchette : Voilà un premier élément de réponse. C’est en réponse à la demande du vérificateur général, peu importe d’où il vient. C’est certainement une bonne idée d’avoir de telles projections. Je ne sais pas si Mostafa veut ajouter quelque chose.

Mostafa Askari, sous-directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Le ministère des Finances examine assurément la situation des provinces; il ne publie tout simplement rien à ce sujet. Nous nous sommes toujours dit, en particulier depuis la demande du vérificateur général, que ce serait utile pour la population de savoir ce que pense le ministère des Finances de la situation financière de chaque province, parce que cela influe sur l’élaboration des politiques. Il y a des transferts fédéraux aux provinces, et la situation économique a certainement des répercussions pour les provinces. Il faut donc avoir des données officielles sur ces aspects pour assurer une certaine transparence et la viabilité de l’ensemble de l’économie et de la situation financière gouvernementale.

Voilà l’une des raisons pour lesquelles nous avons fait ce que nous avons fait. Nous avons fourni des détails concernant chaque province, parce que nous estimions qu’il y avait une lacune à ce chapitre et que c’est important pour le Parlement et la population de savoir ce qui se passe dans chaque province.

La sénatrice Marshall : Je ne sais pas si c’est une bonne question à poser, mais je me demande si les gens s’attendent à ce que le directeur parlementaire du budget pense que le gouvernement fédéral devrait peut-être intervenir et offrir une certaine aide financière supplémentaire aux provinces qui éprouvent de graves difficultés financières. Je sais qu’à Terre-Neuve-et-Labrador beaucoup de gens se demandent si le gouvernement fédéral s’en mêlera et leur viendra en aide. Était-ce ainsi que vous voyiez les choses?

M. Askari : Ce n’est pas vraiment notre rôle de fournir de tels conseils stratégiques au gouvernement fédéral, mais il y a, par exemple, des problèmes en ce qui concerne les paiements de transfert. Si nous prenons les paiements de transfert, notamment diverses parties de la péréquation et les transferts en matière de santé, nous pouvons peut-être faire mieux sans nécessairement seulement mettre l’accent sur une province. Le régime n’est peut-être pas bien adapté à la situation actuelle. La péréquation est un système très complexe, et de nombreuses provinces ont des problèmes avec ce système. Un tel rapport met en lumière ces problèmes, et des discussions en découleront peut-être quant à la manière de réformer le système de paiements de transfert.

La sénatrice Marshall : C’est vrai. Cela soulève la question de la formule de péréquation.

Le sénateur Pratte : J’aimerais continuer de parler de la question des paiements de transfert et de l’écart financier. Vous ne le dites pas exactement, mais c’est assez évident que vous établissez un lien entre les deux lorsque vous évaluez l’écart financier tout juste après avoir parlé de la situation des administrations infranationales et des gouvernements provinciaux et territoriaux. Vous avez mentionné qu’il y a un écart financier et que le gouvernement fédéral pourrait diminuer les impôts ou augmenter ses dépenses, en fonction de l’horizon, de 13 milliards de dollars ou même plus, si je ne m’abuse, dans le cas d’un horizon à plus long terme.

Vous avez assurément déjà répondu à cette question par le passé, mais j’aimerais revenir sur le concept de l’écart financier. Cela vise l’ensemble de l’horizon, n’est-ce pas? Donc, si nous présumons que cela se chiffre à 13 milliards de dollars, cela signifie-t-il qu’à partir d’aujourd’hui le gouvernement pourrait investir annuellement 13 milliards de dollars de plus ou réduire les impôts de 13 milliards de dollars? Je présume que, si le gouvernement le faisait, cela chamboulerait toute l’équation, n’est-ce pas?

M. Askari : Je crois, encore une fois, que nous devons examiner l’objectif que nous avons établi dans le rapport. L’objectif ici est de maintenir le ratio de la dette au PIB à la fin du cycle quinquennal. Indépendamment du ratio actuel, nous voulons le maintenir.

Je ne me souviens plus exactement de ce qu’était le ratio, mais cela importe peu. Disons que le ratio est de 25 p. 100. Si nous modifions les dépenses et les revenus de manière à ce que le ratio de la dette au PIB à la fin de l’horizon de 75 ans demeure le même, nous atteignons l’objectif de la viabilité financière. Cela ne signifie pas que vous ne verrez pas de modifications au cours de cette période. La situation financière et la dette fluctueront peut-être à la hausse et à la baisse. Toutefois, à la fin de l’horizon, vous atteignez votre objectif d’avoir maintenu le même ratio de la dette au PIB. Voilà le critère utilisé dans une telle analyse, et nous ne sommes pas les seuls à le faire ainsi. La majorité des pays et des organismes internationaux utilisent ce critère, parce que cela permet d’avoir un aperçu de ce que vous donnera la structure financière actuelle sur un horizon à long terme.

Si vous regardez le profil du ratio de la dette au PIB que nous avons établi, il diminue au fil du temps. Il finira par disparaître. Cependant, en réalité, cela n’arrivera jamais parce que l’élimination de la dette au fil du temps signifie que vous devez enregistrer d’énormes excédents durant un certain nombre d’années, et je pense qu’aucun gouvernement, tous partis confondus, n’accepterait d’enregistrer de tels excédents sur une longue période.

Bref, cela revient à l’idée que vous avez une structure financière qui est actuellement viable, ce qui signifie que votre ratio de la dette au PIB est constant ou diminue, mais vous avez une certaine marge de manœuvre. Même si vous augmentez vos dépenses et que vous réduisez vos revenus, vous pouvez tout de même atteindre la viabilité financière, mais votre profil sera différent.

[Français]

Le sénateur Pratte : Monsieur Fréchette, compte tenu de cette situation, n’auriez-vous pas envie d’étudier cet important dossier en ce qui a trait à la possibilité de modifier le système de transferts aux gouvernements infranationaux?

M. Fréchette : Comme on l’a déjà mentionné, nous pourrions le faire. Par contre, faire des recommandations est une autre chose. Je ne sais pas si votre question fait référence à un examen en vue de faire des recommandations. Nous allons bientôt publier un rapport sur les principaux transferts, mais nous ne ferons jamais de recommandations ou de propositions comme telles.

Le sénateur Pratte : Sur quel sujet portera précisément votre rapport? S’agira-t-il du système de transferts?

M. Fréchette : Il traitera des principaux transferts.

[Traduction]

Le sénateur Pratte : Cela ne se trouve pas dans votre rapport, mais je me demande si vous avez vu quelque chose à court ou à moyen terme au sujet de l’inflation. C’est quelque chose qui en préoccupe plus d’un. Y a-t-il des signes qui laissent croire que le taux d’inflation augmentera d’ici un ou deux ans? Voyez-vous quelque chose dans vos données qui le laissent croire?

Tim Scholz, conseiller-analyste économique, Bureau du directeur parlementaire du budget : En nous fondant sur nos prévisions à moyen terme d’octobre, nous ne prévoyons pas que l’inflation augmente. Nous estimons qu’elle atteindra de nouveau 2 p. 100 vers la fin de l’exercice 2018-2019, mais nous ne pensons pas que l’inflation continuera de grimper par la suite.

Le sénateur Pratte : Je croyais qu’il y avait des signes que les salaires augmentaient et tout le reste. Ces éléments pourraient influer sur l’inflation.

M. Scholz : En nous basant sur nos hypothèses et nos projections économiques, nous présumons que la Banque du Canada continuera d’augmenter les taux d’intérêt dans le cas d’une inflation plus forte dans une économie qui repose sur son potentiel et que cela permettra de freiner l’inflation.

La sénatrice Eaton : Bienvenue, messieurs. C’est toujours un plaisir de vous voir. J’ai vraiment hâte de lire votre analyse sur l’écart fiscal. Ce sera intéressant de voir si cela découle d’un manque d’efficacité de l’Agence du revenu du Canada ou si c’est parce qu’un grand nombre de personnes ne paient pas leurs impôts.

Votre rapport m’intéresse énormément ce matin. Faites-vous vraiment des travaux au sujet de l’ALENA? Trump faisait encore des menaces hier ou ce matin au sujet de la frontière canadienne et il disait à quel point nous étions injustes. Si la survie de l’ALENA est menacée, quel effet pensez-vous que cela aura sur notre croissance et nos exportations? Il menace de taxer les importations. Comment cela pourrait-il perturber notre économie?

M. Askari : C’est très difficile de réaliser des travaux actuellement au sujet de l’ALENA, parce que nous ne savons pas exactement ce que l’avenir nous réserve à ce sujet.

La sénatrice Eaton : Toutefois, cette instabilité doit avoir certaines conséquences.

M. Askari : Il y a certainement de l’incertitude dans l’air, mais nous en avons tenu compte dans nos projections en présumant qu’à l’inverse l’économie américaine affichera de bien meilleurs résultats en raison des réductions d’impôt adoptées.

La sénatrice Eaton : Les réductions d’impôt feront croître l’économie, mais je crois comprendre que le déficit des États-Unis augmente aussi.

M. Askari : C’est exact, mais c’est une question financière. Du point de vue de l’économie et de la manière dont l’économie américaine nous affecte, si l’économie américaine a une croissance plus rapide, ce sera évidemment avantageux pour le Canada. Que l’ALENA existe ou pas, nous devrons commercer avec les États-Unis. Cette situation aura donc un effet positif sur nous.

La manière dont nous en avons tenu compte dans nos projections, c’est que nous présumons que l’effet positif que nous retirons de cette croissance plus forte et d’une situation financière différente aux États-Unis sera compensé par l’effet négatif qu’a l’ALENA, indépendamment des résultats. Nous avons émis des hypothèses très générales en la matière, mais nous ne pouvons pas vraiment en faire beaucoup plus tant que nous ne connaissons pas exactement les détails définitifs de l’ALENA ou que nous ne savons pas si nous nous retrouverons finalement sans accord. Nous devons ensuite évaluer l’effet que cela aura sur l’économie canadienne avant de vous présenter de meilleurs résultats.

Cependant, à l’heure actuelle, nous ne pouvons pas vraiment en faire plus en ce qui concerne nos projections. Il y a certes de l’incertitude dans l’air, et tout le monde le sait. Une partie de cette incertitude se traduit probablement dans certaines données au Canada; nous n’avons qu’à penser aux taux d’intérêt ou aux taux de change. C’est la réalité. Nous devons prévoir ce que l’avenir nous réserve, et c’est vraiment incertain.

M. Scholz : Nous examinons en fait la question. Nous commençons à préparer et à mettre à jour notre rapport sur les perspectives économiques que nous publions normalement en avril. Je crois que nous avons maintenant plus de détails sur les effets que pourraient avoir les réductions d’impôt aux États-Unis. Toutefois, avec l’ALENA, comme Mostafa l’a dit, nous avons des menaces et de beaux discours, mais nous n’avons pas de détails concrets sur la forme que cela pourrait prendre. Nous réexaminerons en avril les hypothèses dont Mostafa a parlé, mais nous n’avons pas encore de données.

La sénatrice Eaton : Certains ont témoigné devant le comité et ont dit que nous n’étions plus concurrentiels sur le plan fiscal; nous sommes devenus de moins en moins concurrentiels sur le plan fiscal étant donné que les États-Unis ont modifié leurs taux d’imposition et que nous avons éliminé des échappatoires fiscales au Canada. Êtes-vous d’accord? Croyez-vous que nous ne sommes pas concurrentiels sur le plan fiscal ou pensez-vous que tout va bien et que nous sommes aussi concurrentiels sur le plan fiscal que nous le devrions? Je m’excuse si cela vous semble une question à saveur politique, mais je sais que vous pouvez utiliser les données économiques pour nous donner une réponse à saveur non politique.

M. Askari : Des pressions s’exerceront assurément sur le Canada en raison des modifications apportées aux taux d’imposition des sociétés et des particuliers aux États-Unis; et cela influera sur la décision des entreprises et des sociétés internationales de s’installer au Canada, mais les taux d’imposition sont un facteur parmi tant d’autres qui influent sur le processus décisionnel de ces entreprises. Bref, c’est vrai que cela nous désavantage un peu, mais cela ne signifie pas pour autant que toutes les entreprises canadiennes plieront bagage et quitteront le pays.

La sénatrice Eaton : C’est un facteur.

M. Askari : C’est l’un des facteurs dont ces entreprises tiendront certainement compte dans leur processus décisionnel, mais cela ne signifie pas que tout est perdu. Ce n’est certainement pas le cas.

La sénatrice Eaton : C’est une réponse à saveur très politique. Merci.

Il a été question de l’infrastructure au comité, et il semble que les fonds destinés aux infrastructures ne sont pas investis comme c’était prévu. Avez-vous des commentaires à ce sujet? Est-ce parce que des ententes n’ont pas été conclues avec les provinces? Qu’est-ce qui achoppe?

M. Askari : Comme vous le savez mieux que moi, il y a toujours des retards dans tout programme d’infrastructure de nature très général, parce qu’il y a différents intervenants, que certains projets ne commencent pas immédiatement et qu’il y a d’autres problèmes. Nous ne connaissons pas exactement les raisons qui expliquent les retards que nous voyons actuellement, mais nous constatons que les retards sont légèrement supérieurs à ce que nous avions prévu à ce chapitre. Je répète que cela ne signifie pas nécessairement que les fonds ne sont pas investis. Ils le seront peut-être plus tard.

La sénatrice Eaton : Cependant, monsieur Askari, pensez-vous que c’est positif que le gouvernement fédéral contrôle la majorité des fonds destinés aux infrastructures, alors que les provinces et les villes construisent 40 et 50 p. 100 des infrastructures? Le gouvernement devrait-il transférer plus de points d’impôt aux provinces et aux villes pour les infrastructures?

M. Askari : C’est vraiment une question de politique. Je ne peux pas vraiment vous dire ce que serait la meilleure approche en la matière. Nous avons la taxe sur l’essence qui est remise aux municipalités. C’est une manière de le faire. Je ne suis pas certain que les retards en ce qui concerne les investissements dans les infrastructures sont causés par le contrôle que détiennent le gouvernement fédéral ou les provinces. C’est la nature de ces projets. Les provinces doivent démarrer ces projets et elles reçoivent ensuite les fonds et l’approbation pour aller de l’avant. Les provinces font leurs propres choses à l’interne, puis le projet se met en branle.

De fait, nous sommes en train d’étudier les données sur l’infrastructure. Nous préparons un rapport sur le suivi des dépenses. Nous espérons le publier dans environ un mois.

La sénatrice Eaton : Ce sera intéressant et très révélateur.

M. Askari : Oui, mais encore une fois, nous ne pourrons pas vous expliquer pourquoi il y a des retards, car les retards à chacun des échelons sont plutôt de nature technique.

La sénatrice Eaton : Or, nous verrons où sont les retards, non?

M. Askari : Oui, vous devriez être en mesure de voir où sont les retards.

[Français]

Le sénateur Forest : La sénatrice Eaton a déjà abordé le secteur des infrastructures. J’ai justement rencontré des gens du monde municipal avant de me rendre ici ce matin. J’ai été interpellé par votre rapport qui indique que le rythme des investissements est au ralenti en 2017-2018. S’agit-il d’investissements ou de sommes engagées par le gouvernement fédéral qui ne sont pas décaissées?À titre d’exemple, si une municipalité ou une ville qui réalise le projet fait la réclamation pour le décaissement, au fur et à mesure que le projet avance, êtes-vous en mesure, en termes clairs, d’identifier ce qui est engagé par rapport à ce qui est décaissé, pour affirmer que les investissements en infrastructure sont un peu plus au ralenti qu’en 2016-2017?

M. Fréchette : Merci de votre question. Si vous avez parlé à quelqu’un de l’Union des municipalités du Québec...

Le sénateur Forest : Je peux vous dire que je n’ai pas parlé à personne de l’Union des municipalités.

M. Fréchette : Dans nos rapports, on regarde les dépenses des provinces. On fait le va-et-vient entre les provinces et le gouvernement fédéral. Les municipalités fonctionnent sur des marges de crédit. Elles commencent les projets avant d’obtenir les approbations. Par la suite, elles peuvent décaisser et obtenir les fonds fédéraux comme tels. Pour ce qui est des fonds fédéraux — et M. Askari y a fait allusion — une fois que le programme est accepté et que l’argent a été approuvé, c’est terminé pour Infrastructure Canada. L’argent n’a peut-être pas été décaissé et utilisé, mais le programme a été utilisé et cela s’arrête là. Pour eux, il n’y a pas nécessairement un suivi qui se fait jusqu’à la fin. C’est peut-être un problème de dichotomie dans le fonctionnement des décaissements entre les municipalités, les provinces — n’oublions pas qu’il y a les provinces entre les deux — et le gouvernement fédéral.

[Traduction]

Avons-nous des données sur l’infrastructure?

M. Shaw : Permettez-moi d’expliquer pourquoi nous sommes d’avis qu’il y a des retards dans l’infrastructure. À l’heure actuelle, il n’existe pas de données précises qui permettent de suivre la mise en œuvre des projets d’infrastructure; le DPB utilise donc diverses sources. Comme Mostafa l’a mentionné, nous publierons, dans les prochains mois, un rapport sur les éléments appartenant au gouvernement fédéral, en fonction des projets.

Nous recueillons également des données comptables des budgets provinciaux mêmes pour tenter de déterminer à quelle vitesse les fonds sont décaissés. Nous comparons ensuite la vitesse à laquelle les fonds sont déboursés durant l’année en cours à celle des années précédentes. Ainsi, c’est en comparant les données de cette année à celles de 2016-2017 et des années précédentes que nous avons constaté l’absence de la hausse des dépenses d’infrastructure à laquelle on s’attendrait pour que les plans énoncés dans le budget de 2016 et dans l’Énoncé économique de l’automne 2016 soient réalisés.

Il y a eu des retards l’an dernier. On pourrait s’attendre à ce que les fonds prévus en 2016-2017 soient dépensés durant l’exercice en cours, mais pour que le gouvernement atteigne ces cibles, il faudrait que les dépenses augmentent considérablement dans les six derniers mois de l’année financière.

Le sénateur Pratte : Je croyais comprendre que le gouvernement fédéral donnait l’argent une fois le travail terminé. Est-ce bien le cas? On pourrait donc entreprendre les projets et commencer la construction, mais le gouvernement fédéral fournirait l’argent seulement à la fin, à la réception des factures. Cela aurait-il une incidence sur les données que vous recueillez?

M. Shaw : Oui, certainement. Ce que je crois comprendre aussi, c’est qu’une municipalité ou une province qui est propriétaire d’un bien peut commencer la construction, elle peut engager des dépenses et elle peut générer de l’activité économique, sans que ce soit nécessairement enregistré dans les livres comptables du gouvernement fédéral. C’est un fait, et c’est généralement la façon dont les choses se passent. Toutefois, c’est aussi la façon dont cela a été fait dans le passé. S’il tend à y avoir des retards de décaissement des fonds cette année, nous devrions constater les mêmes retards les années précédentes. Puisque ces tendances se maintiennent sur de longues périodes, tout porte à croire qu’il continuera à y avoir des retards de mise en œuvre durant l’exercice en cours.

[Français]

Le sénateur Forest : Lorsqu’on amorce un projet, il faut un règlement d’emprunt approuvé à l’échelle municipale. Le décaissement se fait en relais jusqu’au moment où on appliquera le règlement d’emprunt. Ce qui me surprend, c’est qu’on n’arrive pas à évaluer l’impact global. La principale stratégie du gouvernement pour contribuer à la relance économique, c’est de financer des projets en partenariat avec les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux, soit un tiers, un tiers, un tiers. On arrive difficilement à évaluer l’impact économique global et la pertinence de la stratégie. Cela m’étonne. Il y a une partie en partenariat entre les provinces et les municipalités, mais il y a d’importants budgets qui sont approvisionnés parmi les différents crédits des ministères. Êtes-vous en mesure de faire un suivi plus serré? Par exemple, l’an dernier, Pêches et Océans disposait d’environ 318 millions de dollars, mais ces crédits alloués pour les projets d’infrastructure n’ont pas tous été dépensés. Le directeur parlementaire du budget peut-il faire un suivi plus rigoureux? Il n’y a pas d’intermédiaire ou de partenariat dans la chaîne en ce qui concerne les projets.

M. Fréchette : Pour ce qui est des crédits à voter, on fait une mise à jour du cycle budgétaire tous les trois mois. C’est d’ailleurs l’une des façons qui nous permet de voir si certains montants ont été transposés l’année suivante.

Le sénateur Forest : Reportés.

M. Fréchette : On suit tout le cycle budgétaire, notamment en raison des programmes d’infrastructure qui représentent une grande partie du budget. Pour ce qui est de votre question concernant l’aspect économique, c’est probablement la question piège, mais également la question cruciale pour les parlementaires, à savoir si tous ces investissements sont faits en fonction des besoins d’infrastructure qui ont la plus haute valeur ajoutée. Quand on parle d’un train, comme à Ottawa en ce moment, ou du Réseau électrique métropolitain de Montréal, c’est relativement facile. Pour d’autres projets, c’est plus difficile parce que c’est basé sur les besoins des municipalités. Par exemple, pour la ville de Rimouski, avec son parc marin et ses quais, c’est extrêmement important. Est-ce que l’incidence et l’activité économique à long terme sont aussi grandes qu’un train à haute vitesse entre Rimouski, Montréal et Toronto? C’est peut-être une autre histoire. Il ne revient pas à nous de faire ces évaluations. Nous évaluons essentiellement l’utilisation de l’argent et les transferts aux municipalités.

Le sénateur Forest : Est-ce qu’il y a des retombées directes? Avec l’exemple de Rimouski où l’on investit 41 millions de dollars, il y a un tiers, un tiers et un tiers. Toutefois, l’activité globale peut être autour de 64 ou 65 millions de dollars, sauf qu’on n’arrive pas à obtenir ces chiffres lorsqu’on fait une demande pour un projet d’infrastructure.

M. Fréchette : Tout à fait.

[Traduction]

Le sénateur Neufeld : Je serai bref, puisque vous avez déjà répondu à la majorité de mes questions.

Concernant la péréquation et les transferts, évidemment, les opinions diffèrent d’une province et d’un territoire à l’autre. Je viens de l’Ouest canadien. Lorsque vous parlez du changement des transferts aux différentes provinces, lorsque vous examinez notamment les rapports dette-PIB des provinces et lorsque vous faites des suppositions, tenez-vous compte des différents services offerts par les différentes provinces? Par exemple, le Québec finance peut-être beaucoup plus son système d’éducation qu’une autre province. Les frais de scolarité sont considérablement plus bas au Québec que dans ma province d’origine. Cela fait-il partie de votre équation? Tenez-vous compte de tels facteurs ou considérez-vous uniquement les sommes déboursées?

M. Askari : Comme je l’ai déjà dit, la formule de péréquation que le ministère des Finances utilise est très complexe. Le ministère tient compte de la capacité des provinces de lever des impôts et aussi de leurs divers programmes de dépenses. Tout est considéré. Nous utilisons essentiellement le même modèle que le ministère des Finances pour faire nos projections. Nous tenons donc certainement compte de ces facteurs. Or, un des éléments centraux est la façon dont les provinces peuvent faire payer des impôts à leurs citoyens. C’est une partie importante de la formule utilisée.

Pour ce qui est des autres transferts, le transfert en matière de programmes sociaux, par exemple, est fondé sur le nombre d’habitants; on ne tient donc pas vraiment compte du vieillissement de la population dans différentes provinces. Le transfert en matière de santé est établi de la même façon, c’est-à-dire en fonction du nombre d’habitants. Si la population d’une province, comme Terre-Neuve-et-Labrador, est plus âgée, ce qui veut dire que ses dépenses de santé par habitant sont plus élevées, on n’en tient pas compte dans la répartition des transferts.

Je le répète, les formules que nous utilisons pour calculer les transferts sont imparfaites, et il faudra peut-être tenir des discussions sur les modifications qu’elles nécessitent. Cependant, comme je l’ai déjà dit, la formule de péréquation tient compte de la structure des différentes provinces et de la capacité des provinces de recueillir des fonds afin d’être en mesure d’offrir le même niveau minimum de services à leurs citoyens que les autres provinces.

Le sénateur Neufeld : Ma deuxième question porte sur l’ALENA. Je comprends que certains croient que l’abrogation de l’ALENA serait catastrophique pour certaines régions du Canada, surtout dans le secteur de la fabrication.

Vos réponses aux questions concernant l’ALENA m’ont porté à croire que ce ne serait peut-être pas si grave. Alors que certains se demandent où nous serions sans l’ALENA, de votre côté, vous dites que ce n’est pas tellement important. Je comprends que nous continuerons à échanger d’un pays à l’autre, mais vos commentaires m’ont étonné. Du moins, c’est l’impression que j’ai eue, mais j’ai peut-être tort. J’ai peut-être mal compris vos réponses, mais mon instinct me dit que les répercussions seront assez profondes, surtout en Ontario et au Québec.

Aidez-moi à comprendre : cela ne sera-t-il pas aussi grave que les gens le craignent?

M. Askari : Je vais vous donner deux réponses. La première, c’est que même si nous n’avons plus l’ALENA, nous aurons toujours l’OMC. Tous les pays ont l’OMC. Les États-Unis devront toujours respecter les règles relatives aux tarifs douaniers établies par l’OMC; nous ne verrons donc pas de changements considérables dans les tarifs douaniers en général.

C’est sûr que certains secteurs ressentiront de profondes perturbations. Personne ne peut prédire exactement quels secteurs seront touchés et quelles seront les répercussions; cela dépend de critères divers et de nombreuses éventualités.

C’est indubitable qu’il y aura des répercussions négatives sur le Canada, mais je ne peux pas vous dire à quel point le choc sera violent.

La sénatrice Andreychuk : Je vais résister à la tentation de parler de l’ALENA. Est-ce que ce sera un choc ou est-ce que l’incertitude a déjà commencé à avoir un effet sur nos relations, sur les investissements et sur les entreprises? Je ne sais pas si ce sera un choc ou si le changement s’opère déjà, mais je ne vais pas approfondir la question.

Ma question s’adresse à M. Fréchette. Je ne suis pas spécialiste des chiffres, comme vous le savez. Je suis spécialiste des politiques et je comprends que votre domaine n’est pas celui des politiques. Or, quand vous dites que les dépenses sont soutenables et que le budget sera probablement équilibré en 2040 ou en 2050, je vous entends et je me dis que vous parlez comme si vous saviez ce que l’avenir nous réserve.

Les gens réfutent : « Pourquoi vous préoccupez-vous d’un budget équilibré alors que le DPB affirme que tout se placera dans 40 ou 50 ans? » D’autres disent : « Oui, c’est vrai, mais sur le dos de nos enfants et de nos petits-enfants. » Y a-t-il moyen pour vous de faire comprendre aux citoyens inquiets que ce que vous présentez est une projection fondée sur des chiffres et sur les facteurs que vous prédisez?

Dans 40 ans, les gouvernements auront une approche très différente, et il pourrait y avoir de grands chocs, que ce soit par rapport à l’ALENA ou à autre chose. Or, on envoie le message aux gens qu’il existe une zone de confort et que, avec le temps, d’une façon ou d’une autre, tout va se placer. Je suis inquiète que la nature du message que vous envoyez soit politique plutôt que financière.

M. Fréchette : J’ai une réponse très brève. Comme nous et Mostafa l’avons tous dit durant des réunions précédentes, cela n’arrivera pas, car nous sommes de bons prévisionnistes, mais nous ne sommes pas si bons que cela. Notre prévisionniste principal n’est pas ici aujourd’hui, mais ce scénario ne se concrétisera pas.

C’est un scénario que nous imaginons non pas pour nous, mais pour les politiciens et les responsables des politiques, qui prennent une photo à un moment précis : maintenant. Il est basé sur la progression démographique et économique, ainsi que sur ce qui pourrait arriver si l’on maintenait les politiques actuelles sur une très longue période.

Comme Mostafa l’a dit, ce scénario ne se concrétisera pas, mais il est révélateur. S’il commence à y avoir un déséquilibre dès maintenant, les répercussions sur les jeunes et sur les générations futures seront plus grandes. C’est le but de ces projections : informer les responsables des politiques de ce qui pourrait arriver si vous changiez toutes ces politiques maintenant.

La sénatrice Andreychuk : Je pense que c’est là le message que j’aimerais que vous considériez transmettre : si rien ne change, mais il est très peu probable que ce soit le cas. Y a-t-il moyen pour vous de faire comprendre que vos projections ne sont justement que des projections et qu’elles sont basées sur ce que vous savez aujourd’hui? Ainsi, vous ne donneriez pas faussement l’impression que tout va bien aller. Merci.

Le président : Avant d’entamer la deuxième partie de la séance et d’accueillir les représentants de l’ARC, nous allons procéder à notre deuxième série de questions. Il y a trois sénateurs sur la liste. Je vous demanderais de poser des questions brèves et je demanderais à M. Fréchette de donner des réponses concises. Nous vous en serions reconnaissants. Vous pouvez aussi transmettre vos réponses écrites à la greffière.

La sénatrice Marshall : Je pense que je vais poser une question sur l’ALENA. Je sais que la sénatrice Eaton a déjà abordé le sujet et que le sénateur Neufeld l’a approfondi, mais j’ai été surprise que vous écriviez dans votre rapport que le déclin de la croissance au troisième trimestre était principalement attribuable à la diminution des exportations et que vous prévoyiez une reprise des exportations. Votre prévision est-elle toujours la même? Cette affirmation m’a surprise. Je l’ai trouvée courageuse, compte tenu de ce qui se passe aux États-Unis. Cette prévision tient-elle toujours, malgré les événements des derniers jours?

M. Scholz : Oui. Je n’ai pas le chiffre exact en main, mais il y a eu un déclin marqué des exportations dans plusieurs catégories au troisième trimestre, et nous nous attendons toujours à ce que les exportations reprennent, étant donné l’importance du déclin.

Le président : Vous avez dit oui, mais si vous voulez ajouter à votre réponse, je vous prie de transmettre les renseignements à la greffière.

[Français]

Le sénateur Forest : Dans le cadre de notre analyse des modifications au régime fiscal, pour laquelle nous avons parcouru le Canada, nous sommes arrivés à la conclusion que l’ensemble du régime fiscal doit être réévalué afin qu’il soit plus équitable et plus compétitif.

Puisque la réforme fiscale aux États-Unis est extrêmement radicale, envisagez-vous une réforme du système fiscal dans le cadre de vos prévisions à long terme?

M. Fréchette : Oui, c’est quelque chose que l’on envisage.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Allez-vous examiner, par exemple, les répercussions de l’AECG sur le Canada? L’AECG fonctionne-t-il? L’accord de libre-échange avec l’Union européenne fonctionne-t-il, et dans l’affirmative, à quel point fonctionne-t-il?

M. Askari : Il est encore tôt pour évaluer s’il fonctionne ou non. Nous avons fait une estimation des répercussions de l’AECG sur le Canada en général, mais avant d’évaluer s’il fonctionne ou non, nous devons attendre de voir les répercussions.

La sénatrice Eaton : Donc, l’année prochaine?

M. Askari : Nous l’espérons.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Fréchette, et merci à votre équipe. Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes pour accueillir les représentants de l’ARC. Mesdames et messieurs les sénateurs, à la fin de la deuxième partie de la séance, nous poursuivrons à huis clos pendant 15 minutes pour discuter de quelques points dont vous devez être informés.

En deuxième partie de notre réunion, nous recevons des fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada pour donner suite à la comparution du vérificateur général, qui est venu nous parler il y a deux semaines de son deuxième rapport d’automne, qui portait sur les centres d’appels de l’agence.

Nous accueillons les représentants de l’Agence du revenu du Canada : M. Bob Hamilton, commissaire, M. Frank Vermaeten, sous-commissaire, Direction générale de cotisation, de prestation et de service, et Mme Gillian Pranke, directrice générale, Direction des services aux centres d’appels, Direction générale de cotisation, de prestation et de service.

Monsieur Hamilton, on m’a informé que vous aviez une déclaration préliminaire. Après votre déclaration, nous passerons aux questions. Merci encore une fois, monsieur Hamilton, d’être ici pour nous faire part de vos commentaires et de vos opinions.

Bob Hamilton, commissaire, Agence du revenu du Canada : Je vous remercie, monsieur le président, de m’avoir invité à m’adresser au Comité sénatorial permanent des finances nationales en ma qualité de commissaire et de premier dirigeant de l’Agence du revenu du Canada ou l’ARC. Comme vous l’avez dit, je suis accompagné de M. Frank Vermaeten et de Mme Gillian Pranke; ils m’aideront à répondre à vos questions.

Je suis ici aujourd’hui pour faire le point sur les centres d’appels de l’ARC en réponse aux préoccupations soulevées dans le rapport de l’automne 2017 du vérificateur général. La question nous tient à cœur, car les centres d’appels font partie intégrante des services que l’ARC offre à la population canadienne et ils sont aussi un élément important du mandat que le premier ministre a confié à notre ministre.

Pour ce qui touche les recommandations du vérificateur général…

[Français]

... celui-ci a recommandé que l’ARC prenne des mesures pour répondre aux normes de service offertes dans ses centres d’appels, notamment : améliorer l’accessibilité, rehausser la qualité du service, fournir des renseignements exacts et améliorer les évaluations et les rapports en matière de programmes.

[Traduction]

L’agence a accepté les recommandations du vérificateur général et elle s’est engagée à faire mieux. Nous avons présenté un plan d’action pour donner suite à ces recommandations et pour améliorer les services offerts par les centres d’appels de l’ARC.

Permettez-moi de vous assurer que les employés qui travaillent dans nos centres d’appels partout au pays, ainsi que leurs collègues responsables de la technologie de l’information et de l’établissement de rapports, sont déterminés à exécuter ce plan. Moi aussi, je suis déterminé à exécuter ce plan.

Durant mes 18 premiers mois en poste, j’ai eu l’occasion de visiter nos bureaux partout au pays. J’ai vu de mes propres yeux le travail que font nos employés, y compris ceux des centres d’appels. Je suis très fier du travail accompli par les employés de l’ARC, et nous devons absolument leur fournir le soutien et les outils dont ils ont besoin pour jouer leur rôle.

Permettez-moi maintenant de passer en revue les points soulevés par le vérificateur général.

La première question abordée par le vérificateur général concerne le fait qu’il peut être difficile pour les Canadiens d’obtenir les renseignements dont ils ont besoin lorsqu’ils appellent l’ARC. Le rendement à cet égard est mesuré en tenant compte du fait que les appelants réussissent à parler à un agent du centre d’appels ou reçoivent une tonalité de ligne occupée, ainsi qu’en fonction du délai d’attente une fois qu’ils ont réussi à joindre le centre d’appels.

Comme le vérificateur général l’a décrit, notre approche actuelle — qui est en place depuis plusieurs années — consiste à accueillir le plus grand nombre d’appelants dans la file d’attente à condition d’être en mesure de leur répondre dans un temps d’attente raisonnable. Les appelants que nous ne pouvons pas servir dans un délai raisonnable obtiennent une tonalité de ligne occupée ou sont réacheminés à notre système de réponse vocale interactive.

Nous avons lancé diverses initiatives importantes visant à améliorer l’accès aux centres d’appels. Dans le cadre du budget de 2016, l’ARC a reçu un financement de plus de 50 millions de dollars sur une période de quatre ans pour améliorer son programme des centres d’appels. Cela nous a permis d’embaucher plus de personnel afin d’améliorer le niveau de service offert par les centres d’appels.

Nous avons prolongé nos temps d’attente en les faisant passer de deux à cinq minutes pour permettre à un plus grand nombre d’appelants d’être mis en attente au téléphone, ce qui réduit le nombre de lignes occupées. Nous avons également augmenté le nombre d’options de libre-service offertes aux appelants, ce qui aide les Canadiens à accéder aux renseignements disponibles en ligne et libère les agents des centres d’appels pour qu’ils puissent aider les appelants ayant des questions plus complexes.

Grâce à ces changements, les Canadiens obtiennent un meilleur taux de succès lorsqu’ils tentent d’accéder aux lignes téléphoniques des centres d’appels. Par exemple, les Canadiens devront appeler l’ARC environ deux fois avant de pouvoir parler à un agent de la ligne de demandes de renseignements sur l’impôt des particuliers. Il s’agit d’une amélioration par rapport aux trois à quatre tentatives indiquées dans le rapport du vérificateur général. Nous devons maintenant faire mieux, mais je pense que nous avons réalisé des progrès importants jusqu’ici.

La deuxième question soulevée par le vérificateur général portait sur la qualité des renseignements offerts par les centres d’appels. Là encore, l’agence a pris des mesures importantes pour améliorer ce secteur.

Tout d’abord, nous avons commencé à offrir une formation supplémentaire à tous les agents de centres d’appels afin de nous assurer qu’ils peuvent offrir les services sur lesquels les Canadiens comptent de manière efficace. La nouvelle approche en matière de formation fait partie d’un programme qui repose sur le programme de formation actuel de six semaines. Les nouveaux agents des centres d’appels reçoivent désormais du soutien et de l’encadrement tout au long de la période d’orientation, qui dure de 3 à 10 semaines, afin de s’assurer qu’ils possèdent les compétences nécessaires pour mettre en œuvre une approche très fiable, axée sur le client.

Deuxièmement, nous avons mis en œuvre un nouveau processus de contrôle de la qualité. Une équipe nationale d’écoute a été mise sur pied pour faire des appels tests anonymes à la ligne de demandes de renseignements 1-800 pendant la période de production des déclarations dans le but d’évaluer le degré d’exactitude dans l’ensemble du réseau national et, en conséquence, elle a recommandé des améliorations à apporter à la formation et au matériel de référence. L’équipe utilisera les 17 mêmes questions que le vérificateur général a utilisées afin d’être en mesure de comparer les résultats au fil du temps.

La troisième question soulevée par le vérificateur général concerne l’établissement de rapports et la façon dont nous pouvons fournir, dans nos rapports, des renseignements plus précis sur l’accessibilité, l’exactitude et la rapidité des services fournis par les centres d’appels. L’ARC s’est engagée à être plus transparente auprès des Canadiens et à veiller à ce qu’ils connaissent le niveau de service auquel ils peuvent s’attendre de sa part et la façon dont elle répond à ces attentes.

Tout d’abord, au moyen de son rapport sur les résultats ministériels, préparé pour l’exercice 2016-2017, l’ARC a déjà fourni des renseignements complets sur le rendement de ses centres d’appels, y compris le nombre d’appels auxquels un agent a répondu, le nombre d’appels qui ont été traités de façon automatisée, par le libre-service, et le nombre d’appels restés sans réponse.

Afin de mettre les normes de service de ses centres d’appels à jour, l’ARC est sur le point de lancer une recherche sur l’opinion publique auprès des Canadiens pour évaluer son service d’appel. À l’avenir, nous nous assurerons de fournir aux Canadiens des renseignements plus complets au sujet de nos normes de service et du rendement de nos centres d’appels.

Permettez-moi de dire un mot sur la technologie. Notre technologie existante est désuète. Dans le cadre d’une initiative pangouvernementale dirigée par Services partagés Canada, nous travaillons à la mise en place d’une nouvelle technologie. Une fois en place, la nouvelle technologie nous permettra de mieux aligner nos services sur les attentes des Canadiens à cet égard.

Par exemple, elle fournira aux appelants une estimation du temps d’attente pour parler à un agent, une option qui n’est pas disponible avec notre technologie actuelle, et leur donnera la possibilité de demeurer en ligne, de rappeler ou d’utiliser les options de libre-service disponibles. La nouvelle technologie nous aidera également à améliorer la qualité des services en nous fournissant des enregistrements d’appels qui nous permettront de mieux retracer, surveiller et améliorer le rendement de nos agents.

Nous sommes résolus à améliorer les choses aujourd’hui pour les Canadiens qui essaient de communiquer avec nous par téléphone et nous espérons que, dans un proche avenir, la technologie nous aidera à nous améliorer encore plus. Je suis convaincu que, grâce à notre plan d’action, nous pouvons et nous allons faire mieux.

[Français]

Je répondrai avec plaisir à toutes vos questions à propos des réponses de l’agence aux recommandations du vérificateur général ou en ce qui concerne son plan d’action. Merci beaucoup.

Le président : Je vous remercie, monsieur Hamilton.

[Traduction]

Le sénateur Neufeld : Merci à tous d’être ici aujourd’hui. Évidemment, ce fut un audit un peu dur pour l’ARC, et ce, à juste titre. Mais j’aimerais poser quelques questions précises au sujet de l’ARC.

Pourquoi avez-vous déclaré que vous répondiez à la plupart des appels, alors que ce n’était pas le cas? J’ignore si vous utilisez des chiffres qui diffèrent de ceux employés par le vérificateur général, mais le vérificateur général est venu examiner la situation et vous acceptez ses conclusions. Pourtant, ce n’est pas ce que vous aviez indiqué. Pourquoi l’ARC ferait-elle cela? Pourquoi donnerait-elle des renseignements inexacts aux déclarants, qui auraient pu ensuite faire l’objet d’une vérification et avoir de gros ennuis? Pourquoi l’ARC dirait-elle à la population que ses agents répondaient aux appels, qu’ils donnaient des réponses exactes aux déclarants canadiens, alors que l’ARC devait en savoir autant que le vérificateur général? Vous travaillez avec les chiffres. Vous deviez sûrement être au courant de la situation. Pouvez-vous m’aider à comprendre pourquoi une agence aussi importante que l’ARC, qui s’occupe d’un dossier aussi important que la déclaration de revenus pour les Canadiens, agirait ainsi?

M. Hamilton : Permettez-moi de répondre aux deux questions dans l’ordre, d’abord en ce qui concerne la transparence des renseignements et la rapidité avec laquelle nous répondons aux appels, après quoi je parlerai de l’exactitude.

Je conviens que nous devons améliorer notre méthode d’établissement de rapports, mais je voudrais parler un peu de la façon dont le système est établi et de la raison pour laquelle nous avons déclaré de tels résultats dans nos rapports antérieurs. Cependant, je tiens à souligner que nous comptons améliorer grandement les renseignements fournis dans nos rapports à l’avenir.

En ce qui a trait au système téléphonique, lequel est en place depuis plusieurs années, on doit composer avec une capacité limitée, et la question qui se pose est la suivante : que faire lorsqu’on reçoit plus d’appels que ce à quoi on est en mesure de répondre? Il y a différentes approches possibles. On pourrait simplement mettre tout le monde en attente. Notre technologie ne nous permet pas de dire aux appelants pendant combien de temps ils seront en attente. Ce pourrait être une minute comme une demi-heure. On pourrait donc tout simplement les mettre en attente, ou l’autre option est de dire : « Si vous réussissez à parler à un agent, nous nous engageons à répondre à votre appel dans un délai de deux minutes, 80 p. 100 du temps; toutefois, si nous n’arrivons pas à satisfaire à cette norme, vous obtiendrez alors une tonalité de ligne occupée ou vous serez acheminé au système de libre-service. »

Par conséquent, l’agence a pris cette décision — c’était il y a quelques années — en fonction de ce que les clients voulaient, selon elle, ou de la raison pour laquelle ils appelaient. Nous avons donc indiqué dans nos rapports publics comment nous nous en tirons par rapport à notre objectif de répondre aux appels en moins de deux minutes, 80 p. 100 du temps. À mon avis, il faut par ailleurs déclarer le nombre de personnes pour qui la ligne est occupée ou qui ne réussissent pas à joindre un agent. Bref, c’est la principale raison pour laquelle l’agence a choisi d’adopter cette approche pour le traitement des appels et l’établissement de rapports.

Nous avons déjà fait des démarches, à commencer par le rapport sur les résultats ministériels que j’ai mentionné tout à l’heure; ainsi, nous y indiquerons non seulement notre rendement pour ce qui est de répondre rapidement aux appels, mais aussi le nombre de personnes pour qui la ligne est occupée et le nombre de personnes qui sont transférées au système de libre-service. Je crois que ces renseignements permettront de brosser un portrait plus détaillé de la situation. Il est vrai que nous aurons encore le même problème, à savoir la possibilité que la demande soit égale à l’offre. Or, il s’agit de savoir comment les ressources seront attribuées et quels choix seront faits, et nous en assumerons la responsabilité. En tout cas, c’est une amélioration au chapitre de l’établissement de rapports.

À cet égard, une des suggestions faites par le vérificateur général, que nous avions déjà envisagée et mise à l’essai, est de prolonger le temps d’attente établi à deux minutes. Les gens obtiennent une tonalité de ligne occupée si nous prévoyons que le temps d’attente sera supérieur à deux minutes, alors pourquoi ne pas le faire passer à cinq minutes? Les gens devront peut-être attendre un peu plus longtemps pour parler à un agent, mais cela permettra à un plus grand nombre de personnes d’accéder aux files d’attente. C’est l’un des choix que l’on peut faire. Nous avons donc opté pour une attente un peu plus longue, et nous mesurons la satisfaction de la clientèle à ce sujet. Nous verrons ce qu’il en résultera, mais jusqu’ici, cela a permis à un plus grand nombre de personnes d’accéder aux files d’attente.

En ce qui concerne la qualité, je vais y revenir parce que, parmi les questions soulevées dans le rapport du vérificateur général, celle-ci me paraît très importante. Quelle est la qualité des réponses que les gens obtiennent lorsqu’ils appellent à l’ARC? Je dirais que nous recevons deux types de questions. Il y a d’abord les questions de nature générale : quelle est la date limite pour la remise des déclarations de revenus? Quel est le taux d’intérêt? Voilà le premier type de questions. Ensuite, il y a les questions propres au contribuable : j’appelle à propos de ma situation, et pouvez-vous m’en dire un peu plus à ce sujet? Il s’agit, évidemment, de renseignements confidentiels qui ne font pas l’objet de tests; d’ailleurs, le vérificateur général a examiné le premier type de questions.

Nous avons constaté qu’il y avait un certain nombre de réponses, et le pourcentage était très élevé. Le vérificateur général a dit que 30 p. 100 des réponses étaient inexactes. Nous avons donc décidé d’améliorer la formation offerte aux agents et de veiller à ce que la bonne question soit acheminée au bon agent. Nous avons instauré un système dans le cadre duquel nous fournirons, en plus de la formation de 6 semaines, une formation supplémentaire de 3 à 10 semaines; ainsi, les employés passeront du temps ensemble, recevront de l’encadrement et franchiront des étapes pour être en mesure de répondre à des questions plus compliquées. Un agent peut tomber sur une question qu’il n’est vraiment pas prêt à répondre, et nous devons nous assurer qu’il est mieux préparé, mais s’il ne connaît vraiment pas la réponse, il doit réacheminer la question à quelqu’un d’autre. Nous prenons ces préoccupations au sérieux et nous apportons les améliorations qui s’imposent.

Pour en revenir à la technologie, je dirais que si nous parvenons à mettre en marche bientôt la nouvelle technologie, nous pourrons surveiller de façon plus indépendante ce qui se passe à l’interne. En ce moment, nous ne disposons pas d’une fonction d’enregistrement des appels, ce qui signifie que nous ne pouvons pas écouter les appels pour savoir exactement comment la conversation s’est déroulée et s’il y a eu une erreur. La nouvelle technologie nous fournira cette capacité. Pour l’instant, nous faisons des tests; il s’agit de personnes qui travaillent côte à côte dans la région. Toutefois, comme le vérificateur général l’a signalé, ce n’est pas très efficace parce que, parfois, les agents savent qu’on les surveille, ce qui peut les inciter à fournir une réponse différente de ce qu’ils ont l’habitude de donner.

Encore une fois, je pense que la technologie nous permettra d’apporter des améliorations, mais nous devons nous assurer d’offrir dès maintenant aux agents plus de formation et de soutien, ainsi qu’un meilleur matériel de formation. J’espère que nous ferons beaucoup de progrès sur ces fronts dans l’immédiat et à l’avenir.

Le sénateur Neufeld : Ainsi, lorsque le vérificateur général affirme que plus de la moitié des appels étaient bloqués, soit 29 millions d’appels du total des appels que vous recevez, cette situation va changer radicalement, n’est-ce pas?

M. Hamilton : Nous améliorerons certainement cet aspect. Je crois que les chiffres mentionnés dans le rapport du vérificateur général étaient encore pires que cela, si je peux m’exprimer ainsi. Toutefois, nous pouvons dire que, depuis, nous semblons être en mesure de répondre à environ la moitié des appels.

Je n’essaie pas de dire que c’est parfait. Je dis simplement que c’est une amélioration, et nous cherchons des moyens de continuer à nous améliorer. J’estime toutefois que si nous arrivons à mettre en place un système, une technologie ou une plateforme qui nous permet de fournir aux appelants une estimation du temps d’attente, alors ils pourront faire un choix, et nous pourrons peut-être leur permettre de faire une demande de rappel. Or, même en l’absence de cette technologie, nous avons embauché plus d’employés et nous leur offrons une meilleure formation afin d’améliorer les statistiques relatives aux appels que vous venez de mentionner.

Le sénateur Neufeld : J’ai une dernière question. Les primes qui ont été accordées constituent un autre sujet qui me dérange. Si les renseignements fournis étaient erronés dans 30 p. 100 des cas, cela signifie évidemment que certaines personnes — je ne sais pas qui et je ne veux pas le savoir non plus — recevaient des primes très alléchantes et, selon le vérificateur général, c’était plus élevé que la prime standard que reçoivent les fonctionnaires d’autres ministères au Canada. Pouvez-vous me dire pourquoi? Le vérificateur général est venu et il a repéré toutes ces lacunes. Je peux vous dire une chose : je sais d’expérience ce qu’il en est parce que j’ai moi-même fait récemment l’objet d’un audit du vérificateur général. En tout cas, le vérificateur général a décelé toutes ces lacunes et, pourtant, l’ARC continue de verser des primes. L’ARC savait sûrement que certains des renseignements étaient erronés, qu’un grand nombre d’appels étaient bloqués et tout le reste. Les gens n’obtenaient pas la bonne information pour produire leur déclaration de revenus; pourtant, certains fonctionnaires continuaient d’empocher des primes qui étaient supérieures à la moyenne. Pouvez-vous expliquer cela?

M. Hamilton : Oui. D’abord, juste une précision : selon ce qui est indiqué dans un article de journal, les primes de l’ARC seraient plus élevées que la moyenne dans l’ensemble du gouvernement fédéral, mais cette déclaration est, en fait, inexacte. Nous utilisons un système de rémunération au rendement qui est presque identique à celui du gouvernement fédéral. Malheureusement, le journaliste a tenu compte des primes accordées aux cadres du niveau supérieur, et il les a comparées avec les primes versées aux cadres de tous les niveaux dans la fonction publique; c’était donc un peu comme si on comparait des pommes avec des oranges. Or, quand on compare des pommes avec des pommes, c’est-à-dire les cadres de l’ARC par rapport aux cadres de tout le gouvernement, on se rend compte que les primes de l’ARC étaient à peu près équivalentes, voire légèrement inférieures. Il est donc important de clarifier ce point.

Comme vous le soulignez, nous ne pouvons pas parler des primes individuelles ici, mais sachez que l’ARC dispose d’un système très rigoureux afin d’examiner les résultats et d’évaluer la rémunération au rendement à l’avenant.

Je dirais que, dans la mesure où un agent fournit un renseignement erroné, nous faisons de notre mieux actuellement pour détecter et corriger le problème, réagissant à un degré variable. C’est une chose s’il s’agit d’une erreur commise de bonne foi ou par inadvertance. Si nous décelons un problème systémique, par contre, nous prenons un ensemble de mesures différent. Ici encore, toutefois, je dirais que, si nous pouvons instaurer un système nous permettant de mieux surveiller la situation à l’interne, je pense que nous pourrons mieux réagir aux problèmes qui surgissent et les résoudre rapidement.

Le sénateur Neufeld : Ainsi, les gens recevaient et reçoivent encore, je suppose, des primes même s’ils commettent des erreurs. Est-ce exact, ou est-ce que certaines primes ont été remboursées?

M. Hamilton : Les primes pour la période visée ont été versées en fonction du système en place, et elles n’ont pas été remboursées.

Nous avons pris des mesures. Je pense que le rapport nous a incités à nous assurer que nous formons adéquatement nos employés; nous tentons de mieux les surveiller avec la technologie existante et nous avons un plan pour renforcer ce point dans l’avenir. Dans une perspective d’avenir, nous tentons de résoudre le problème et de réagir aux pépins qui ont été détectés, et je suis certain que nous pourrons apporter des améliorations notables à court terme.

Le sénateur Pratte : Monsieur Hamilton, je veux m’attarder un peu plus à la question de la formation afin de comprendre l’origine des piètres résultats enregistrés au chapitre de l’exactitude.

Tout d’abord, selon le vérificateur général, l’ARC avait été alertée par d’autres intervenants avant qu’il ne publie son rapport, que j’ai ici en version française. La division de la vérification de l’ARC a même vérifié la justesse des renseignements fournis par les agents de l’ARC, arrivant à un taux d’erreur de 17 p. 100 en 2013 et de 20 p. 100 en 2016.

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a également vérifié l’exactitude des réponses et en est arrivée à un taux d’erreur de 24 p. 100 en 2013 et de 31 p. 100 en 2017.

L’agence n’avait-elle donc pas la moindre indication signalant un problème d’exactitude des renseignements fournis par ses agents aux contribuables avant la publication du rapport du vérificateur général?

M. Hamilton : Oui, nous avions eu vent de certains problèmes d’exactitude grâce aux études que vous avez évoquées, dont certaines ont été réalisées à l’extérieur de l’agence et reposaient généralement sur le genre de question générique dont j’ai parlé plus tôt. Nous avons alors procédé à un examen interne en 2016, il me semble. Je demanderai à mes collègues de corroborer mes dires.

Nous avions l’impression que nous devions nous améliorer. Nous nous sommes donc demandé quelle serait la meilleure manière de le faire, sachant, ici encore, que nous ne pouvions enregistrer les appels ou recourir aux systèmes qu’utilisent peut-être d’autres centres d’appels. Nous avons alors essayé de renforcer notre programme de formation et de fournir aux agents de meilleures ressources à utiliser. Nous avons aussi instauré le nouveau système de formation que j’ai décrit plus tôt, dans le cadre duquel, outre les six semaines de formation de base que nous offrons aux employés, nous proposons une autre période allant de 3 à 10 semaines au cours desquelles les agents passent du temps ensemble et reçoivent de l’encadrement. Ils doivent montrer qu’ils peuvent satisfaire certaines exigences pour accéder à un niveau d’appel plus élevé et plus complexe. Nous nous efforçons donc d’améliorer le matériel de formation.

Comme je l’ai indiqué, nous effectuerons des tests à l’aveugle semblables à ceux que le vérificateur général a réalisés afin de voir si nous pouvons détecter certains types d’erreurs systémiques. Est-ce qu’un genre d’erreur ressort du lot? Pouvons-nous envoyer des messages pour que les agents comprennent quelle est la date limite de remise des déclarations de revenus ou puissent répondre à une autre question?

Nous faisons donc de notre mieux pour détecter les problèmes, mais l’idéal, ce sera quand nous disposerons de la technologie nécessaire pour écouter les appels à titre anonyme afin de diagnostiquer le problème et d’y réagir directement. Si nous nous apercevons qu’un problème se pose à l’échelle nationale, nous pourrons prendre une mesure de plus grande envergure afin d’améliorer la situation.

Donc, effectivement, le vérificateur général n’était pas le premier à nous signaler le problème. Les chiffres m’ont semblé légèrement plus élevés que prévu, mais nous savions que nous avions un problème, que nous tentions de résoudre de notre mieux. Nous avons redoublé d’efforts à cet égard.

Le sénateur Pratte : Je pense que le vérificateur général fournit quatre ou cinq des questions utilisées pour vérifier la justesse des réponses. Je n’en connaîtrais pas les réponses, mais s’agit-il de questions difficiles ou de questions de base auxquelles les agents devraient être en mesure de répondre aisément?

M. Hamilton : Je n’ai pas ces questions devant moi, mais je pense qu’elles avaient divers degrés de difficulté. Certaines étaient relativement simples et concernaient notamment le délai de remise des déclarations de revenus. Par exemple, un agent a répondu que c’était le 31 avril, alors qu’il n’y a pas de 31 avril. Il faut également tenir compte de la gravité de l’erreur et du contexte où elles sont posées. Certaines questions de base ont pu semer la confusion, car le délai peut-être le 1er ou le 2 mai selon l’année. Je considère qu’il s’agit là d’un renseignement relativement facile que les agents devraient connaître. Nous devons nous assurer de leur fournir les bons renseignements et veiller à ce qu’ils les assimilent. Si ce n’est pas le cas, nous devrons prendre des mesures correctives.

D’autres questions étaient potentiellement plus ardues, portant notamment sur la date à partir de laquelle l’intérêt commence à l’appliquer. J’essaie de me souvenir de certaines questions un peu plus difficiles. Sachez toutefois que nous nous attendons à ce que les agents fournissent les réponses aux contribuables, et s’ils ne la connaissent pas, ils doivent trouver quelqu’un qui la connaît et lui transférer l’appel. Je dirais donc qu’un éventail de facteurs entre en compte.

Je demanderais à Frank s’il souhaite ajouter quelque chose.

Frank Vermaeten, sous-commissaire, Direction générale de cotisation, de prestation et de service, Agence du revenu du Canada : Je peux peut-être ajouter une ou deux observations.

Sachez d’abord que l’amélioration de la qualité est un processus continu. Nous avons commandé une évaluation interne afin de déterminer la qualité des appels effectués pour des comptes précis, car nous voulions nous assurer que nous fournissions des réponses justes. Les résultats nous ont incités à engager immédiatement un consultant pour tenter de voir ce que nous pourrions faire pour améliorer la qualité. Voilà comment nous avons procédé.

Au début de 2017, nous avons embauché un consultant, qui nous a remis un rapport sur les mesures que nous pourrions prendre pour améliorer la qualité. Nous avons alors élaboré le nouveau programme de formation comprenant un volet de collaboration et d’encadrement, que nous avons implanté graduellement. Nous voulions le mettre d’abord à l’essai dans un centre d’appels pour nous assurer qu’il fonctionnait. C’est ce que nous avons fait à l’automne 2017, et cette initiative a vraiment contribué à préparer les recrues à répondre aux appels. Ce programme a eu des résultats très positifs.

Nous avons ensuite offert le programme à l’échelle nationale. Je pense donc que les recrues seront beaucoup mieux équipées pour répondre aux questions au cours de la présente période des impôts. Je suis convaincu que nous prenons les mesures adéquates.

Comme M. Hamilton l’a fait remarquer, nous tentons actuellement d’évaluer l’exactitude d’une manière plus objective en la faisant évaluer à l’administration centrale plutôt que dans les régions, et à distance quand nous le pouvons. Une fois la technologie implantée, je pense que vous observerez une autre amélioration notable de la qualité de nos réponses.

Le sénateur Pratte : Je formulerai juste une très brève observation. J’ai été, bien entendu, étonné qu’un agent puisse répondre qu’il ignore la réponse et proposer de transférer l’appel à un agent supérieur. Est-ce qu’un agent agissant de la sorte s’exposerait à des sanctions? Je suis simplement surpris par le fait que, dans bien des cas, l’agent ne connaissait manifestement pas la réponse, mais n’a pas transféré l’appel à un agent supérieur.

M. Hamilton : Je ne pense pas que nous imposions de sanction. Notre service, notre agence reposent sur la confiance. Les gens doivent se fier à nous pour gérer équitablement le régime fiscal et fournir de l’information. Je ne pense donc pas qu’il y ait le moindre problème si un agent répond qu’il ignore la réponse à une question et déclare qu’il va transférer l’appel à quelqu’un qui la connaît. Nous encourageons toujours les agents à assimiler autant de connaissances que possible et à tenter de répondre aux questions, mais, en cas d’incertitude, ils peuvent transférer l’appel.

L’ennui, c’est que les agents s’efforcent de faire tout ce qu’ils peuvent, pensant peut-être connaître la réponse à une question relativement simple, alors que, en fait, ils ne la connaissent pas. Nous devons donc les encourager à trouver l’information juste ou à transférer l’appel s’ils ne sont pas certains, car il est difficile de dire qu’on ne peut répondre à tous les appels que l’on reçoit. Nous comprenons que nous devons faire des choix et déterminer la meilleure manière de composer avec le système, mais nous devons améliorer la qualité pour que les gens puissent se fier aux renseignements que l’ARC leur fournit.

La sénatrice Marshall : Ma question concerne les normes de services, au sujet desquelles le vérificateur général a formulé des remarques. Selon lui, les normes de service figurant sur votre site web diffèrent grandement de celles qu’il a observées. Quel genre de processus de vérification appliquez-vous avant de publier ces normes sur votre site web? Il me semble que l’Agence du revenu du Canada est un organisme de vérificateurs. Vous vérifiez les renseignements des contribuables et les déclarations de revenus. Qui donc vérifie les renseignements que vous publiez sur votre site web? Il est fort étonnant que ces renseignements soient si erronés, compte tenu de la nature du mandat de l’Agence du revenu du Canada.

M. Hamilton : Comme vous pouvez l’imaginer, nous appliquons un processus très rigoureux pour vérifier les renseignements que nous publions au nom de l’agence.

Il importe de tenir compte des éléments que nous évaluons et dont nous faisons rapport et de les comparer à ceux qu’examine le vérificateur général. Je ne veux pas défendre trop énergiquement la manière dont nous faisons rapport, car depuis mon entrée en fonction, ce point m’a causé quelques problèmes. Je pense que nous pouvons faire mieux, que nous nous améliorons et que nous continuerons de renforcer nos pratiques.

Nous faisons toutefois rapport sur ce que nous appelons « l’accessibilité des appels ». Quel est le taux d’accessibilité pour l’appelant? Il pourrait être de 80 p. 100, juste pour lancer un chiffre. Je pense que ce taux était légèrement plus élevé que cela, en fait. De son côté, le vérificateur général pourrait demander comment nous pouvons affirmer avoir un taux d’accessibilité de 80 p. 100, alors qu’il constate que 60 p. 100 des appels ne reçoivent pas de réponse. D’aucuns pourraient considérer que ce taux est erroné, mais je doute que ce soit le bon terme. Je ne suis toutefois pas certain que le taux de 80 p. 100 soit juste.

Permettez-moi de vous dire en quoi consiste essentiellement l’accessibilité. Ici encore, Frank ou Gillian pourraient me corriger. Essentiellement, nous évaluons la situation pour un seul appelant. S’il appelle quatre fois au cours de la semaine, que la ligne est occupée trois fois et qu’il réussit à parler à un agent la quatrième fois, on peut considérer qu’il s’agit d’accessibilité, car il a parlé à l’agent en l’espace d’une semaine. C’est donc un résultat positif pour nous.

La sénatrice Marshall : Évaluez-vous toujours vos normes de service de cette manière? Je sais que vous avez apporté quelques changements à votre système téléphonique, passant de deux à cinq minutes, mais évaluez-vous vos normes de service de la même manière?

M. Hamilton : Nous sommes en train de modifier nos normes de service. Dans les rapports sur les résultats ministériels publiés cet automne, nous avons fourni tous les renseignements, indiquant le nombre d’appels reçus, le nombre d’appels fructueux et le nombre de personnes pour qui la ligne était occupée. Ainsi, plutôt que d’évaluer un facteur comme l’accessibilité — lequel, sans dire qu’il est trompeur, pourrait être mal interprété —, nous tentons de dresser un portrait plus exhaustif. Je ne veux donc pas dire que le rapport était inexact, car il a bien évalué ce qu’il tentait de mesurer. Je ne pense toutefois pas que ce soit la bonne mesure.

La sénatrice Marshall : Est-ce que les chiffres qui ont fait sourciller le vérificateur général sont encore sur votre site web?

M. Hamilton : Les anciens chiffres pourraient s’y trouver.

La sénatrice Marshall : Ils y étaient il y a plusieurs semaines, quand j’ai vérifié.

M. Hamilton : Je devrai vérifier de nouveau.

La sénatrice Marshall : Vous devriez vérifier les renseignements que vous publiez pour en assurer l’exactitude.

Je sais que, dans votre exposé, vous avez énuméré les mesures que vous prenez pour améliorer les choses, en utilisant le système dont vous disposez actuellement. Cependant, dans votre réponse au vérificateur général, vous évoquez l’initiative de Transformation des centres de contact du gouvernement fédéral, et il semble que vous allez avoir une nouvelle plateforme téléphonique. Dans votre réponse, vous vous engagez à commencer la transition au début de 2018 et à avoir achevé la plus grande partie de l’initiative d’ici la fin de 2018. Pourrez-vous encore respecter ces dates?

M. Hamilton : Nous planifions encore, espérant instaurer le système en 2018. Nous en sommes à l’étape de développement. Comme je l’ai indiqué, il s’agit d’une initiative pangouvernementale sous la houlette de Services partagés, dont nous sommes un des principaux participants avec Service Canada. Nous espérons réussir à implanter le système cette année, et nous en sommes à l’étape de développement et de mise à l’essai. Tout ce que je dirais à cet égard, c’est que nous voulons nous assurer que lorsque nous mettrons le système en œuvre, il fonctionnera. Nous ne ferons donc aucun compromis au chapitre des tests au profit d’une mise en œuvre rapide. Nous devons voir comment nous allons procéder. C’est ce que nous nous employons à faire, de concert avec nos partenaires. Nous espérons implanter la technologie cette année, mais nous effectuerons certainement les tests nécessaires pour nous assurer qu’elle fonctionne quand nous la mettrons en œuvre.

La sénatrice Marshall : Nous tenons également des séances sur le système Phénix; c’est donc à ce dernier que je pense quand vous parlez d’un nouveau système.

Ce qui me préoccupe aussi, c’est que, pendant votre exposé, vous avez indiqué que vous collaborez avec Services partagés. Or, nous avons entendu dire que certains organismes éprouvaient des problèmes de complémentarité avec cet organisme. Il y a donc deux problèmes ici.

Ma dernière question porte sur la nouvelle initiative, la déclaration de revenus par téléphone pour les personnes à faible revenu. Je crois comprendre que vous souhaitez que cette mesure soit en place dès cette année. Si le système téléphonique ne fonctionne pas ou qu’il ne fonctionne pas comme il le devrait, et je sais que vous êtes en train d’essayer de l’améliorer, est-il vraiment raisonnable d’ajouter une nouvelle initiative à tous les autres problèmes que vous devez régler, et croyez-vous vraiment que ce sera un succès?

M. Hamilton : Je pense qu’il faut surtout dire que le nouveau service Produire ma déclaration, qui s’offrira par téléphone, passe par une ligne téléphonique différente.

La sénatrice Marshall : C’est un système différent?

M. Hamilton : Les gens ne tomberont pas sur une ligne occupée pour cela. Le seul moment où les systèmes se recouperont, c’est s’il y a un problème, auquel cas la personne devra utiliser le système général.

Je peux peut-être demander à Frank de vous en parler un peu plus, parce que c’est important. Je pense que c’est une très bonne initiative, et nous sommes confiants d’arriver à la mettre en œuvre grâce à cette ligne téléphonique à part.

La sénatrice Marshall : Vous pourriez peut-être nous dire s’il s’agit d’un système séparé, nouveau, et s’il a été bien testé.

M. Vermaeten : Absolument. Les lettres d’invitation à utiliser le service Produire ma déclaration partiront cette semaine. Quand les gens recevront cette lettre, s’ils sont admissibles au service Produire ma déclaration, ils composeront un numéro de téléphone spécial. Il s’agit d’un système de réponse vocale interactif, un système RVI. Dans la plupart des cas, les gens devront répondre à des questions par oui ou non, et, dans quelques cas, ils pourraient devoir fournir un chiffre ou deux.

Ce système est relié à notre réseau de TI et il est totalement distinct de notre réseau téléphonique. Il a été testé rigoureusement et fonctionne extrêmement bien. Bien sûr, ce sera la première année du service. Nous verrons à l’usage si les gens trouvent que c’est un bon système dans ce genre de situation.

La sénatrice Marshall : Mais il y aura aussi des interactions avec le système existant, n’est-ce pas? Est-ce que j’ai bien compris?

M. Vermaeten : Il n’y a pas d’interaction en tant que telle avec nos centres d’appels quand une personne utilise le système RVI Produire ma déclaration. Comme le commissaire l’a dit, il n’y aura d’interaction avec nos centres d’appels que lorsque la personne a des questions. Par exemple, elle pourrait appeler pour dire : « J’ai reçu une lettre d’invitation, mais je ne suis pas certaine d’être admissible au service. » Ce sont alors nos agents d’appels qui lui répondraient, et ils ont été formés pour répondre à ces questions.

La sénatrice Marshall : C’est un système à part. Pouvez-vous me dire à peu près combien de contribuables pourront se prévaloir de ce service?

M. Vermaeten : Nous avons fait parvenir des lettres d’invitation à environ 973 000 Canadiens.

La sénatrice Marshall : Environ un million.

M. Vermaeten : Oui. Il est difficile de dire combien de personnes l’utiliseront dans les faits. Cela dépend de deux facteurs. Premièrement, les personnes visées sont des personnes dont la situation financière n’a pas beaucoup changé. Nous envoyons nos lettres d’invitation en fonction d’observations recueillies pendant l’exercice précédent, mais s’il y a des choses qui ont changé, si la personne occupe désormais un emploi mieux payé…

La sénatrice Marshall : Si ses revenus ont augmenté.

M. Vermaeten : Oui. La personne ne serait alors plus admissible. Il y a donc des gens comme cela qui n’y seront pas admissibles.

Ensuite, ce sera une question de préférence. Beaucoup de personnes apprécieront ce système et le trouveront très pratique. D’autres préféreront produire leur déclaration de la manière habituelle.

La sénatrice Marshall : Je vous souhaite beaucoup de succès.

[Français]

Le sénateur Forest : Merci d’avoir accepté notre invitation.

Je suis plutôt de nature optimiste et je constate qu’il y a au moins une bonne nouvelle : cela vous donne suffisamment de latitude pour apporter des améliorations, la situation étant tellement difficile.

Selon moi, l’Agence du revenu du Canada est l’une des agences principales où les contribuables établissent un lien de confiance avec le gouvernement. Vous êtes l’endroit où l’on confie notre argent personnel pour le mieux-être de l’ensemble de la collectivité.

Je trouve fort important que vous soyez d’accord avec les recommandations du vérificateur général. Vous nous avez fait part d’une volonté d’apporter des changements. Toutefois, à mon avis, pour que le plan d’action soit vraiment crédible, il faudra mettre en place des indicateurs mesurables en ce concerne le temps d’attente et le nombre d’appels auxquels on a répondu. Par exemple, votre objectif d’ici 12 mois est de faire passer le nombre d’appels qui ont reçu une réponse de 33 p. 100 à 60 p. 100. Il faut présenter un plan d’action sur l’exactitude des réponses, le temps d’attente et le nombre d’appels répondus, et mettre en place des critères et des indicateurs de performance mesurables.

À l’heure actuelle, la technologie ne vous permet pas de le faire. Par contre, il y a quand même des indicateurs qui ont été mesurés par le vérificateur général et qui ont été contre-mesurés par vous. C’est un élément incontournable pour mener à bien votre plan d’action. Compte tenu de la gravité de la situation, vous devez être en mesure de mettre sur papier des cibles mesurables avec des indicateurs du constat de la situation aujourd’hui.

Je pense particulièrement au temps d’attente et à l’exactitude des informations. Est-ce possible d’ajouter ces indicateurs dans votre plan d’action?

M. Hamilton : Oui, c’est possible, et il est important d’avoir des indicateurs. Hier, le Comité des comptes publics de la Chambre des communes a demandé un rapport d’ici quatre mois sur le progrès des statistiques. La nouvelle technologie améliorera le système pour ce qui est du service, mais il est désormais possible d’avoir des statistiques et un rapport sur les statistiques. C’est possible d’avoir un nouveau niveau de transparence. On continuera dans cette voie avec l’objectif d’améliorer la situation pendant les quatre prochains mois et les quatre mois suivants.

Enfin, avec la nouvelle technologie, nous serons en mesure d’avoir de meilleures statistiques. Il est toujours possible d’avoir les statistiques, et l’un des éléments du plan d’action est d’avoir un rapport pour le public qui soit plus transparent et plus compréhensible.

Le sénateur Forest : Merci. En regardant le pourcentage, j’ai été totalement renversé de voir que près de 70 p. 100 des appels étaient bloqués. En Australie, on parle de 4 p. 100. Avez-vous été en mesure de vérifier ce qui se passait en Australie pour en arriver à des résultats et à des façons de faire, à des pratiques qui permettraient d’améliorer la situation? Il faut se placer dans la peau du citoyen canadien qui veut obtenir de l’information parce qu’il paie de l’impôt et des taxes, et que 70 p. 100 des appels sont bloqués. C’est une source de frustration importante. Avez-vous communiqué avec ceux qui ont un meilleur niveau de performance?

M. Hamilton : Oui, j’ai parlé à mes collègues de l’Australie et des États-Unis concernant leurs expériences.

Dans le cas de l’Australie, je vais demander à M. Vermaeten ou à M. Pranke d’apporter des précisions. En Australie, ils ont investi beaucoup de fonds dans le système, dans la technologie, donc c’est possible d’obtenir de meilleurs résultats avec ce système. On verra aussi le système des processus, à savoir s’il y a de meilleurs processus qui nous concernent. En général, l’Australie a un meilleur système que le nôtre. C’est un facteur, mais il y en a d’autres.

Dans le cas des États-Unis, c’est intéressant. Selon moi — et l’on peut vérifier cela —, aux États-Unis, il y a un système où la personne attend pendant une longue période de temps, peut-être 30 minutes pour avoir accès à un agent. Il s’agit d’une autre approche. Notre approche est d’avoir un temps assez court pour la personne qui n’aime pas recevoir un signal occupé. Mais il y a une autre approche selon laquelle tous les appelants attendent en ligne pendant une longue période. On est en train de voir les expériences d’autres pays, de reconnaître les meilleures pratiques et d’apprendre de ces pratiques. En Australie, c’est certainement vrai qu’ils ont dépensé beaucoup plus d’argent pour améliorer la technologie.

Le sénateur Forest : Une dernière question?

Le président : Rapidement; il nous reste 10 minutes.

Le sénateur Forest : En ce qui concerne les sites Internet, les gens ont de la difficulté à naviguer et ils disent que les centres d’appels sont complexes. Est-ce qu’on peut rendre le site web plus convivial? Avez-vous examiné le site Internet? C’est un compromis si le système est facile à utiliser et qu’on peut y trouver les réponses à nos questions. On ne parle pas beaucoup des sites Internet, mais, à mon avis, des améliorations s’imposent et devraient être au cœur de nos priorités.

Le président : C’est un bon commentaire, monsieur Hamilton?

M. Hamilton : J’aimerais ajouter un petit commentaire. Je suis tout à fait d’accord. Le service pour les Canadiens, cela comprend le centre d’appels, le site web et le processus pour régler les problèmes des contribuables. Il est nécessaire d’avoir un système total qui peut réduire le nombre d’appels. Il est important d’avoir une perspective globale du système des services offerts aux Canadiens.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Je serai brève. Je n’ai qu’une observation à faire. Je trouve cela absolument ahurissant, quand je vous écoute comme quand j’ai écouté le vérificateur général. Si vous ne comprenez pas les lois fiscales du Canada, comment pouvez-vous vous attendre à ce que les Canadiens les comprennent? Vraiment. Vous questionnez-vous sur le calibre ou les qualifications des personnes que vous embauchez?

Nous nous sommes rendus un peu partout au Canada, avec le Comité des finances, pour écouter les Canadiens nous parler des nouvelles échappatoires fiscales qui s’en viennent. Nous avons été renversés de constater qu’ils ont bien peu d’espoir d’avoir accès à vous et d’obtenir de bonnes réponses.

Le Bureau du vérificateur général vous a interrogés sur vos normes de service. Il est inutile de tout répéter, mais quand vous attendez-vous à ce que la nouvelle technologie soit prête et fonctionnelle? Faites-vous quelque chose en ce sens? Quelle est votre norme de formation sur les nouvelles échappatoires fiscales pour que les Canadiens, comme les propriétaires de petites entreprises et les médecins qui vous appelleront, obtiennent des réponses justes à leurs questions?

M. Hamilton : Oui. Je pense que nous avons déjà expliqué que nous sommes en train d’améliorer la formation. Je ne nierai pas que…

La sénatrice Eaton : Plus de semaines? Des normes plus élevées d’instruction? Ce n’est que du bla-bla : « Nous sommes en train d’améliorer la formation. » Cela ne veut rien dire pour moi. Que voulez-vous dire exactement? Combien y aura-t-il d’heures de formation de plus? Quelles qualifications exigez-vous des personnes qui répondent aux appels des Canadiens pour leur donner des réponses?

M. Hamilton : Je ne peux pas vous répondre précisément sur leurs qualifications, mais nous avons pris des mesures pour faire en sorte que…

La sénatrice Eaton : Pouvez-vous nous faire parvenir des documents à ce propos?

M. Hamilton : Bien sûr.

La sénatrice Eaton : Je ne veux pas prendre plus de votre temps, parce que je sais qu’il y a deux autres sénateurs qui souhaitent vous poser des questions. Ce serait très bien que nous recevions un petit document dans lequel vous nous décririez exactement comment vous améliorez vos programmes de formation et quelles qualifications vous exigez des personnes qui répondent au téléphone, qui répondent à la population, aux propriétaires de petites entreprises, aux médecins et à n’importe qui d’autre. Quelle est leur formation?

M. Hamilton : Oui. Quelles que soient les normes, je souligne une petite chose : je pense qu’il ne faut pas sous-estimer la valeur de la formation que nous offrons. Elle s’étend sur six semaines. Nous comptons maintenant la prolonger de 3 à 10 semaines pour que nos employés aient toutes les compétences voulues.

La sénatrice Eaton : Combien d’heures de formation reçoivent-ils? Qui leur enseigne et comment la formation se donne-t-elle? J’aimerais bien le savoir, parce que nous avons déjà toutes les réponses du vérificateur général.

Le président : Ce serait bien si vous pouviez nous faire parvenir un tableau, par l’intermédiaire de notre greffière, pour nous montrer exactement ce qui se passait avant et ce qui se passe maintenant et pour répondre à la question de la sénatrice Eaton.

Sénatrice Cools, s’il vous plaît, à vous la parole à titre de doyenne du Parlement.

La sénatrice Cools : Je ne le serai bientôt plus. Quoi qu’il en soit, merci beaucoup. Je remercie nos témoins d’être parmi nous aujourd’hui.

Je suis certaine, monsieur le commissaire, que vous savez très bien que l’ARC est une création relativement récente dans le système de gouvernance canadien. Je pense qu’elle est née il y a une vingtaine d’années, quand l’ancien ministère a perdu son statut de ministère pour devenir une agence, ce qui avait suscité beaucoup d’inquiétudes à l’époque. Je pense, monsieur le président, que ce comité a probablement examiné ce projet de loi à ce moment-là. Je pourrais vérifier pour en être certaine.

Tout cela pour dire que, quelles qu’en soient les raisons et la manière, l’ARC est l’agence à qui a été délégué ce que j’appellerais le pouvoir d’imposition du gouvernement, qui est presque sacré, comme vous le savez sûrement tous très bien, et que cela s’inscrit dans une longue histoire.

Je dois dire deux choses, monsieur le président. Premièrement, il faudrait examiner la possibilité que l’ARC redevienne un ministère dirigé par un ministre. Nous devons étudier cette possibilité.

L’autre question sur laquelle nous devons nous pencher pour avancer, c’est celle du rôle du vérificateur général du Canada, qui revient constamment. Ce comité a réalisé une étude sur le vérificateur général en 1988, et je pense que nous devrions envisager d’inviter un témoin comme la professeure Sharon Sutherland, qui a passé sa carrière à étudier le rôle du vérificateur général. C’est ce que je proposerais. Je suis consciente que nous manquons de temps, donc c’est une conversation que nous devrons reprendre plus tard.

La sénatrice Marshall : J’aimerais poser cette question aux témoins : ils ont mentionné être en train de préparer un rapport pour un comité de la Chambre des communes. Ai-je bien compris? Le cas échéant, pourrions-nous en recevoir copie?

M. Hamilton : Nous avons reçu hier un document du comité des comptes publics. Le vérificateur général et moi avons comparu devant le Comité permanent des comptes publics de la Chambre, qui nous a fait parvenir hier son rapport, dont quatre recommandations à notre intention sur la reddition de comptes. Je peux vous assurer que nous y travaillerons, et je suis persuadé que vous en recevrez copie aussi.

La sénatrice Andreychuk : Vous avez indiqué que vous prolongeriez le temps des appels téléphoniques, parce que, en ce moment, on est redirigé après deux minutes, et vous avez mentionné qu’aux États-Unis on attend en ligne. Je pense que c’est très important. Si l’on regarde les études réalisées sur le comportement humain, on se rend compte que quand une personne est désespérée et qu’elle sent le besoin de parler à un spécialiste des questions fiscales, elle préfère attendre en ligne plutôt que de devoir rappeler quatre fois. Chacun doit trouver du temps pour cela dans son horaire chargé : très bien, je vais téléphoner à 10 heures. Puis quelque chose d’autre arrive et on reporte l’appel à 16 heures. Je pense que beaucoup de gens ont choisi de prolonger la durée des appels pour être certains d’avoir quelque chose au bout du compte pour le temps investi sinon, on reporte constamment. Je pense qu’il faut tenir compte de la psychologie humaine.

Ma question est la suivante : il y a des gens qui appellent et se font donner des conseils qui sont erronés, mais ils ne le savent pas. Ils pensent que c’est la bonne information, puis ils agissent en conséquence. Quelque part dans le système, on les a mal conseillés. Comment peuvent-ils prouver qu’ils ont suivi vos conseils? C’est le renversement du fardeau de la preuve. D’autres systèmes enregistrent les conversations, de sorte qu’on peut vérifier ce qui s’est dit après coup. Dans votre cas, je présume que vous pourrez nous dire combien vous avez reçu d’appels, mais qu’il vous faudra une éternité pour en dresser la liste. Quelle est la planche de salut pour tous ces contribuables, que je considère a priori comme des gens honnêtes? Le système n’est pas conçu pour les fraudeurs. Il y a un article corrélatif sur les fraudeurs, mais le but est de favoriser la confiance. Les contribuables veulent bien payer leur dû, en suivant vos conseils, mais ils sont pénalisés pour cela. Comment pouvons-nous nous sortir de cette impasse, y compris dans les cas d’invalidité?

Le président : Monsieur le commissaire, vous pouvez répondre à cette question tout de suite ou y répondre ultérieurement par écrit.

M. Hamilton : Je vais essayer d’y répondre tout de suite, si vous le voulez bien, ce sera fait. Nous pourrions vous envoyer certaines choses par écrit ensuite. Je demanderai à Frank de définir précisément le mécanisme de recours que vous décrivez. J’ai toutefois deux observations à faire.

Vous avez raison concernant les deux à cinq minutes. C’est une chose assez récente pour nous. Ce sera intéressant de voir comment ce sera accueilli. Nous vérifions la satisfaction des clients : est-ce que les gens aiment cela ou non? Comme je l’ai dit, il y a quelques années, l’agence a déterminé que les gens préféraient obtenir un signal occupé que d’attendre en ligne pendant des heures, pour une durée indéterminée. Nous remettons cette idée en question et essayons de voir ce que nous pouvons faire.

Concernant les recours, si une personne appelle et reçoit de l’information erronée de l’agence, puis suit les mauvais conseils reçus, je sais qu’il y a des recours dont elle peut se prévaloir. C’est un renversement du fardeau de la preuve, comme vous l’avez bien dit, mais nous pouvons examiner la question, réduire les pénalités, et cetera. Je demanderai à Frank de vous répondre plus précisément, mais je vous dirais que la nouvelle technologie nous facilitera la vie quand nous pourrons entendre ce qui s’est vraiment dit.

M. Vermaeten : Très brièvement, nous avons effectivement un programme d’allègement pour les contribuables, qui s’applique au cas par cas quand des personnes pensent, pour toutes sortes de raisons, qu’une situation devrait être corrigée. Ce peut être parce que la personne estime avoir reçu de mauvaises informations du centre d’appels. Nous évaluons chaque plainte au cas par cas. Nous consentons des allègements. Nous évaluons la crédibilité de la plainte. Nous n’avons pas d’enregistrements. Nous aimerions beaucoup avoir accès à tous les enregistrements pour pouvoir évaluer la véracité des affirmations, et nous voulons laisser aux gens le bénéfice du doute. Nous tiendrons donc compte de toutes sortes de choses. Par exemple, nous vérifierons si la personne a déjà demandé des allègements fiscaux plusieurs fois et dans quel contexte elle en a demandés. Nous ferons de notre mieux pour consentir des allègements lorsque c’est possible, et nous le faisons assez souvent.

Le président : Monsieur Hamilton, si vous aviez l’obligeance de réfléchir à la dernière question et de nous envoyer tout supplément d’information pertinent par écrit, ce serait apprécié.

M. Hamilton : Nous le ferons. Je ne suis pas sûr que nous ayons grand-chose à ajouter, mais, le cas échéant, nous le ferons certainement.

Le président : Merci. J’aimerais poser deux questions pour terminer. Je ne veux pas que vous me répondiez verbalement tout de suite, mais que vous nous fassiez parvenir des réponses par écrit.

La sénatrice Marshall a fait allusion à Phénix et au fait qu’il y a plus de 153 000 fonctionnaires touchés, c’est-à-dire plus de 50 p. 100 des fonctionnaires fédéraux au Canada. Premièrement, comment l’ARC traitera-t-elle les relevés T4 erronés qu’ils ont reçus? Deuxièmement, pouvez-vous nous expliquer comment vous gérerez les intérêts et les pénalités liés à ces relevés T4 erronés?

Sur ce, monsieur Hamilton, je vous remercie infiniment de votre comparution devant le Comité sénatorial des finances et de toute l’information que vous nous avez fournie.

Honorables sénateurs, nous poursuivrons nos délibérations à huis clos pour discuter de quelques questions.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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