Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule no 71 - Témoignages du 13 juin 2018
OTTAWA, le mercredi 13 juin 2018
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 18 h 45, pour faire l’étude article par article du projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures, et à huis clos, pour étudier une ébauche de rapport concernant le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2019.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Soyez les bienvenus à cette réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales
Je me nomme Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick et président du comité. Je souhaite la bienvenue à tous ceux qui sont ici présents et aux auditeurs de partout dans le pays qui nous regardent à la télévision ou en ligne. Je demande maintenant à mes collègues de bien vouloir se présenter.
La sénatrice Jaffer : Je suis Mobina Jaffer, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l’Alberta.
Le sénateur Campbell : Larry Campbell, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur D. Black : Doug Black, de l’Alberta.
[Français]
Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.
Le sénateur Day : Joseph Day, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Eaton : Nicky Eaton, de l’Ontario.
La sénatrice Andreychuk : Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.
Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de Colombie-Britannique.
Le président : Merci.
[Français]
J’aimerais également souligner la présence de Mme Gaëtane Lemay, greffière du comité, et nos deux analystes, MM. Sylvain Fleury et Alex Smith qui, ensemble, appuient les travaux du comité.
[Traduction]
Chers collègues, mesdames et messieurs les membres du public, nous commençons bientôt l’étude article par article du projet de loi C-74. Toutefois, avant toute chose, je tiens à rappeler un certain nombre de règles et de conseils à mes collègues.
J’invite le sénateur qui ne sait plus très bien où nous sommes rendus dans l’étude du projet de loi à demander des précisions. Nous saurons ainsi toujours où nous en sommes, dans les deux langues.
Si plus d’un amendement porte sur le même article, la marche à suivre est de procéder suivant l’ordre du passage à modifier. Donc, avant de recevoir un amendement, je vérifierai si un autre amendement visait un passage antérieur. Le sénateur qui a l’intention de proposer un amendement pour un passage antérieur aura la possibilité de le faire.
Pour s’opposer à la totalité de l’article, la bonne marche à suivre, en comité, n’est pas de proposer une motion pour la suppression de l’article, mais de voter contre son adoption.
Certains amendements risquent d’avoir des effets importants sur d’autres parties du projet de loi. La cohérence des décisions du comité est donc très importante dans tout le projet de loi. Comme aucun préavis n’est nécessaire pour proposer un amendement, il se peut évidemment qu’il n’y ait pas eu d’analyse préliminaire des amendements pour déterminer ceux qui peuvent avoir des répercussions sur les autres articles ou leur être contraires.
Si on s’interroge sur le processus ou la régularité de ce qui se passe, on peut invoquer le Règlement. Le président écoutera les arguments, il décidera du moment où il juge la discussion suffisante et rendra une décision. En outre, le comité est le maître suprême de ses travaux, dans les limites que lui a fixées le Sénat, et on peut en appeler d’une décision auprès de tout le comité en lui demandant de la confirmer.
[Français]
À titre de président, je ferai de mon mieux pour m’assurer que tous les sénateurs qui souhaitent prendre la parole pourront le faire en respectant le processus. Cependant, je compte sur votre grande collaboration en vous demandant de vous en tenir aux faits et de parler le plus brièvement possible.
[Traduction]
Sachez aussi que, en comité, on n’a pas besoin d’appuyer une motion. En cas de doute sur le résultat d’un vote par oui ou par non ou d’un vote à main levée, la solution la plus précise consiste à demander un vote par appel nominal, dont les résultats sont clairs. Vous savez aussi que l’égalité des voix entraîne le rejet de la motion.
Enfin, sachez que toute une équipe de fonctionnaires, principalement du ministère des Finances mais, aussi, d’autres ministères, est à votre disposition pour répondre à vos questions sur un article ou une partie du projet de loi. Ils suivent nos délibérations dans la pièce voisine et nous pouvons les appeler à la rescousse pour venir rapidement nous renseigner au besoin.
Chers collègues, avez-vous des questions sur ce que je viens de vous dire?
Le sénateur Neufeld : Je vois beaucoup de nouveaux visages. Pour mon bien et mon édification, monsieur le président, qui a ici le droit de vote?
Le président : Merci. Chers collègues, voici comment vous saurez qui est membre en règle du comité et est autorisé à proposer une motion ou à voter sur une motion. Je demande à notre greffière de lire avec soin et à haute voix la liste à jour de nos membres.
Gaëtane Lemay, greffière du comité : Les membres du comité sont le président, le sénateur Mockler, puis les sénateurs Andreychuk, Black (Alberta), Campbell, Day, Deacon, Eaton, Jaffer, Marshall, Moncion, Neufeld et Pratte.
Le sénateur Mitchell, qui est présent, est membre d’office.
Le sénateur Mitchell : Sans droit de vote.
Le sénateur Neufeld : D’accord.
Le président : Êtes-vous satisfait?
Le sénateur Neufeld : Oui.
Le président : Chers collègues, nous passons maintenant à l’étude du projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures.
Plaît-il au comité de procéder à l’étude article par article du projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures?
Des voix : Oui.
Le président : Merci.
Le titre est-il réservé?
Des voix : Oui.
Le président : L’étude de l’article 1, qui renferme le titre abrégé, est-elle reportée?
Des voix : Oui.
Le président : Vous plaît-il, chers collègues, de grouper les articles selon les six parties du projet de loi et leurs sections décrites dans la table analytique du projet de loi C-74?
Des voix : Oui.
Le président : Chers collègues, nous sommes à la partie 1.
La partie 1, intitulée « Modification de la Loi de l’impôt sur le revenu et de textes connexes » et comprenant les articles 2 à 46, est-elle adoptée?
La sénatrice Marshall : Avec dissidence.
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
Chers collègues, la partie 2, intitulée « Modification de la Loi de 2001 sur l’accise (taxation du tabac) et de textes connexes » et comprenant les articles 47 à 67, est-elle adoptée?
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Le sénateur Neufeld : Avec dissidence.
Le président : La partie 3, intitulée « Modification de la Loi de 2001 sur l’accise (taxation du cannabis), de la Loi sur la taxe d’accise et de textes connexes » et comprenant les articles 68 à 119, est-elle adoptée?
La sénatrice Andreychuk : Avec dissidence.
Le sénateur Neufeld : Avec dissidence.
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Le président : Chers collègues, la partie 4, intitulée « Militaires et vétérans des Forces canadiennes » et comprenant les articles 120 à 185, est-elle adoptée?
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Le sénateur Neufeld : Avec dissidence.
Le président : Adoptée avec dissidence.
La partie 5 maintenant. Les articles 186 à 198, qui comprennent la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, sont-ils adoptés?
Le sénateur Neufeld : Avec dissidence.
La sénatrice Marshall : Avec dissidence.
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Le président : Nous sommes à la partie 6, « Mesures diverses ».
Les sections 1 à 20 de la partie 6, qui comprend les articles 199 à 409, sont-elles adoptées?
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Avez-vous une question, sénatrice Moncion?
La sénatrice Moncion : Quand présentons-nous des observations sur certains de ces articles? À la fin ou en cours de route?
Le président : J’aurai des commentaires sur les observations à la fin de la séance, relativement aux sept autres comités qui ont fait une étude préliminaire du sujet même du projet de loi. À ce moment-là, si vous avez des observations, je vous accorderai la parole.
La sénatrice Moncion : Merci.
Le président : Chers collègues, les annexes 1 à 6 sont-elles adoptées?
La sénatrice Eaton : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?
Des voix : Oui.
Le président : Adopté.
Le titre est-il adopté?
Des voix : Oui.
La sénatrice Eaton : Ça me plaît.
Le président : Le projet de loi est-il adopté?
Le sénateur Neufeld : Non.
Des voix : Oui.
La sénatrice Marshall : Avec dissidence.
Le sénateur Neufeld : Voulez-vous que ce soit avec dissidence ou par appel nominal?
La sénatrice Eaton : Eh bien, nous perdrions une voix.
Le sénateur Neufeld : Ça me va. Je tiens à un vote par appel nominal. Peu importe si je perds, ce ne sera ni la première ni la dernière fois.
Le président : Chers collègues, la question est posée: le projet de loi est-il adopté?
Comme on a demandé le vote par appel nominal, je laisse à notre greffière le soin de s’en occuper.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Mockler?
Le sénateur Mockler : Je m’abstiens.
Mme Lemay : L’honorable sénatrice Andreychuk?
La sénatrice Andreychuk : Non.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Black?
Le sénateur D. Black : Oui.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Campbell?
Le sénateur Campbell : Oui.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Day?
Le sénateur Day : Oui.
Mme Lemay : L’honorable sénatrice Deacon?
La sénatrice Deacon : Oui.
Mme Lemay : L’honorable sénatrice Eaton?
La sénatrice Eaton : Non.
Mme Lemay : L’honorable sénatrice Jaffer?
La sénatrice Jaffer : Oui.
Mme Lemay : L’honorable sénatrice Marshall?
La sénatrice Marshall : Non.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Mitchell?
Le sénateur Mitchell : Je ne peux pas voter.
Mme Lemay : L’honorable sénatrice Moncion?
La sénatrice Moncion : Oui.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Neufeld?
Le sénateur Neufeld : Non.
Mme Lemay : L’honorable sénateur Pratte?
Le sénateur Pratte : Oui.
Mme Lemay : Le résultat du vote est de 7 voix contre 4 et 1 abstention.
Le président : Merci. C’est donc adopté.
Honorables sénateurs, l’autre article d’information est les observations, si vous permettez.
Le Comité des finances a fait son travail sur la teneur du projet de loi C-74, et nous avons fait rapport à la Chambre hier.
J’attire votre attention sur le travail des comités à qui on a demandé de faire une étude préliminaire du projet de loi C-74. Ces sept comités sont: le Comité sénatorial spécial sur l’Arctique; le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce; le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international; le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles; le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense; le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles; et, enfin, le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts.
Je vous rappelle que ces comités ont déposé un rapport au Sénat et ont formulé des observations. Étant donné leur travail approfondi sur le sujet du projet de loi C-74, notre comité, sur le sujet de ce projet de loi particulier, encourage vivement le gouvernement à examiner leurs observations et à leur donner suite.
Sur ce, la sénatrice Moncion a demandé de faire une observation. Je lui demande si c’est suffisant que nous demandions au gouvernement de donner suite aux observations de chacun de ces comités.
J’ouvre maintenant la discussion, pour vos observations.
[Français]
La sénatrice Moncion : Mon observation porte sur les articles 316 et 317 de la partie 6 du projet de loi. Ces deux articles autoriseraient les banques canadiennes à partager ou à vendre les données bancaires personnelles de leurs clients à des compagnies de technologie financière comme Google, Amazon ou Facebook. Le consentement explicite de leurs clients ne serait pas requis puisque, ceux-ci auront déjà donné leur accord à partager leurs données personnelles au moment de l’ouverture d’un compte-chèques, d’une demande de carte de crédit ou d’une demande de prêt personnel.
Non seulement l’institution financière détient des informations personnelles comme le nom, l’adresse et la date de naissance, elle détient aussi le numéro d’assurance sociale. Les institutions financières ont également de l’information sur chaque transaction qu’une personne effectue soit avec sa carte de crédit, sa carte de débit ou son compte-chèques. Bref, les banques possèdent énormément de données sur leur clientèle.
Les articles 316 et 317 du projet de loi C-74 proposent que les institutions financières fédérales obtiennent le droit de partager ou même de vendre des données personnelles sur la base d’un consentement obtenu il y a longtemps, selon la date d’ouverture du compte ou la date des transactions.
Désormais, le ministre des Finances n’aura plus à approuver préalablement ce type de partage d’informations et le gouvernement, quant à lui, délaissera une partie de son rôle essentiel de supervision. Bien sûr, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques s’applique à ce type de transaction. Toutefois, à la suite de l’étude du projet de loi C-50, le commissaire à la protection de la vie privée a conclu que son bureau n’avait aucun pouvoir d’application de la règle. Le renoncement au pouvoir de supervision se fait au détriment de la protection de la vie privée des contribuables canadiens.
C’est pourquoi je propose que l’observation suivante soit annexée au projet de loi :
Le règlement pris en vertu des articles 316 et 317 du projet de loi C-74 devra prévoir des mesures visant à assurer la sécurité et la protection des données personnelles de la clientèle de l’institution financière, spécialement lorsque cette dernière fait affaire avec une compagnie de technologie financière extérieure à son institution.
Et en anglais :
[Traduction]
Regulations regarding articles 316 and 317 of Bill C-74 will have to include measures to ensure the safety and protection of the private information of the banks’ clientele, especially if this bank is sharing or selling this information to an outside fin tech company.
Le président : Merci.
Le sénateur D. Black : Merci, chère collègue, pour cette observation.
Permettez-moi seulement de faire connaître au comité le contexte touchant l’examen des articles 316 et 317 par le Comité des banques. Nous avons tenu nos audiences sur cette question et, comme ces dispositions nous inquiétaient, nous avons ensuite organisé trois séances supplémentaires pour comprendre les éventuels enjeux, auxquels la sénatrice Moncion a fait allusion.
Nous avons entendu les agents responsables de la protection des renseignements personnels des cinq grandes banques. Ils nous ont dit que, d’après eux, elles étaient déjà assujetties à des règlements qui exigeaient le consentement exprès et explicite de leurs clients avant de communiquer tout renseignement.
Le commissaire à la vie privée, venu lui aussi témoigner, a dit que son bureau se demandait si le gouvernement du Canada en avait assez fait.
Nos observations sur les articles 316 et 317 sont très détaillées. Selon elles, s’il y a lieu de s’inquiéter, bien honnêtement le comité l’ignore, les banques se faisant rassurantes, tandis que le commissaire pressent un risque. Vous vous rappellerez que j’ai informé le Sénat que nous avions convoqué des fonctionnaires du ministère des Finances et du Bureau du surintendant des institutions financières pour qu’ils nous expliquent l’enjeu. Ils ont refusé de comparaître, et c’est le sujet d’un autre dossier et d’une lettre que j’ai envoyée au ministre, pour lui faire connaître notre mécontentement.
Nous avons fait remarquer que le gouvernement du Canada doit absolument aller au fond de cette question. Pour s’attaquer à cet éventuel problème, il faut des lois sur la protection des renseignements personnels, non un projet de loi sur le budget. Nous en sommes convaincus.
Cette observation va un peu plus loin que ce avec quoi le Comité des banques serait à l’aise, parce que nous ne savons pas tout à fait si c’est là où on en est, aujourd’hui. Certains nous ont dit que comme nous ne les avions pas aidés à comprendre complètement la situation, c’était ce qu’ils estimaient qu’on devait faire.
Voilà le contexte. En conséquence, cette observation n’est pas particulièrement utile pour comprendre la question. C’est le contexte.
La sénatrice Marshall : Avant que vous n’ayez dit que c’était excessif, j’allais vous demander si vous pensiez que c’était suffisant.
Le sénateur D. Black : Le problème est que nous l’ignorons. Nous avons accueilli un groupe très imposant de responsables de la protection des renseignements personnels des banques. Vous étiez là, je pense, sénatrice Eaton.
La sénatrice Eaton : Ils ont fait de l’excellent travail de relations publiques et de développement d’un argumentaire. Je vous le demande, à tous les deux: pour assurer la sécurité et la protection des renseignements personnels de sa clientèle, après que la banque les a vendus à l’entreprise de technologie financière — peut-être que quelque chose m’échappe — comment peut-elle assurer que l’entreprise n’en divulguera pas par-ci par-là? Comment peut-elle s’assurer que l’entreprise est aussi digne de confiance qu’elle?
Le président : Autre chose?
La sénatrice Eaton : Non, mais j’écoutais la sénatrice Moncion qui dit que les banques ne peuvent pas être certaines de ce que les entreprises de technologie financière feront des renseignements. Question supplémentaire, sénateur: nous nous faisons tous demander, sur nos téléphones, par Rogers ou Google, si nous sommes d’accord pour telle ou telle chose. Et nous acquiesçons, pour obtenir ce que nous voulons.
Quand nous ouvrons un compte, la première question du directeur est-elle si ça nous dérange que sa banque communique ou vende les renseignements nous concernant? Ou la question se trouve-t-elle à la toute fin du contrat, dans un petit recoin, que nous ne voulons pas lire? Vous comprenez?
Le président : Pour l’édification et le bien de tous, je pose la question aux fonctionnaires qui attendent notre appel pour nous donner plus de détails et d’explications.
Le sénateur Neufeld : Je me posais la même question que la sénatrice Eaton — je ne la répéterai donc pas — sur l’observation de la sénatrice Moncion.
Deuxièmement, le Comité des banques a mené une étude à ce sujet et a annexé des observations à son rapport sur ce projet de loi. Ce n’est pas le Comité des finances qui a effectué cette étude. Alors, pourquoi n’acceptons-nous pas simplement les observations du comité qui a réalisé une étude en évitant d’en ajouter une autre de notre cru? Ce n’est pas nous qui avons fait l’étude. Selon moi, les observations des différents comités qui se sont penchés sur la question devraient suffire amplement aux fins de ce projet de loi. Nous ne devrions pas maintenant ajouter de nouvelles observations à celles déjà formulées par ces comités-là. C’est mon point de vue.
Le président : C’est donc un commentaire. Sénatrice Andreychuk, avez-vous un commentaire au sujet de l’observation proposée par la sénatrice Moncion?
La sénatrice Andreychuk : J’espère bien, sans quoi vous allez juger mon intervention irrecevable.
D’un point de vue strictement technique, l’observation proposée ressemble presque à un amendement. Si tel est le cas, je crois que c’est le Sénat qui devrait en être saisi.
Nous avons mené une étude préliminaire. Nous avions alors l’occasion de produire ensemble un rapport. Cette observation n’a pas été proposée à ce moment-là. Je ne me sens pas très à l’aise de le faire à cette étape-ci, car si nous acceptons d’inclure cette observation, j’en aurais moi-même quelques-unes à proposer. J’arrive difficilement à accepter que l’on veuille ainsi revenir sur notre propre rapport et sur le travail du comité. Comme je l’ai indiqué, je ne suis pas certaine qu’il soit vraiment question de protection de la vie privée et de modifications à la Loi sur la protection des renseignements personnels ou à toute autre loi.
Vous avez parlé de convoquer les fonctionnaires. Mais pourquoi donc? C’est à nous de régler cette question. Je ne suis pas sûre que nous devrions remettre le tout sur le tapis en demandant aux fonctionnaires de nous livrer leur interprétation alors même que le Comité des banques a convoqué tous les témoins qu’il jugeait pertinents et que nous avons accepté son rapport. Nous n’avons pas nous-mêmes fait comparaître ces témoins-là pour notre étude.
Notre rapport et le projet de loi sont désormais chose faite. Je veux avoir la possibilité de parler du projet de loi et d’en critiquer les lacunes. Nous procédons en quelque sorte de façon fragmentée, alors que je crois que nous devrions plutôt considérer le projet de loi d’exécution du budget dans son ensemble.
Le président : Y a-t-il d’autres sénateurs qui ont des commentaires?
[Français]
La sénatrice Moncion : J’étais en train de lire le rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce pour voir ce qui a été dit concernant cette portion.
Dans le cas d’Equifax, de l’information appartenant aux banques a été envoyée à Equifax et a été perdue. Lorsqu’on a posé des questions à une association canadienne, les personnes étaient incapables de dire à qui appartenait la relation entre la banque et Equifax. Ainsi, les données qui appartenaient à une clientèle spécifique, qui appartenaient aux banques, se trouvaient maintenant dans une compagnie avec laquelle la banque avait une relation d’affaires. Il y a toujours une zone grise qui fait que l’information privilégiée des gens était...
[Traduction]
Le sénateur D. Black : Je veux réagir à l’excellente question de la sénatrice Eaton. Au Comité des banques, nous n’avons pas manqué de demander aux représentants des différentes banques comment ils s’y prenaient pour assurer le contrôle de l’information une fois que celle-ci quittait leur institution. Ils nous ont bien sûr répondu que c’est impossible pour les banques de le faire, mais qu’elles exercent toutefois un contrôle sur leurs relations avec les autres entités. On nous a indiqué très clairement que les banques établissaient dans tous les cas des modalités contractuelles très rigoureuses prévoyant notamment que la relation prend fin en cas de non-respect des règles.
La sénatrice Eaton : Y a-t-il des sanctions prévues si l’on enfreint les règles et si mon historique de transactions bancaires et mes renseignements personnels se retrouvent entre des mains mal intentionnées? Est-ce que la banque impose alors une sanction? Se contente-t-elle d’inscrire l’autre entité sur sa liste noire et de cesser de lui offrir des contrats pendant un certain temps?
Le sénateur D. Black : Compte tenu de l’importance de la clientèle des banques pour les entreprises en question, on nous a indiqué que l’interruption des relations d’affaires est une mesure suffisamment punitive. Je ne suis pas en train de prendre position. Je vous informe simplement de ce que nous ont dit les représentants des banques.
Toutefois, comme le soulignait la sénatrice Moncion, il va forcément y avoir des dérapages. Equifax en est un parfait exemple. C’est une situation qui préoccupe au premier chef les banques, tout au moins d’après ce que nous ont dit leurs représentants. Est-ce que les mesures en place sont adéquates? C’est justement le sens de notre observation. Nous demandons au gouvernement d’analyser la situation, car nous ne sommes pas certains que les mesures prévues soient à la hauteur. Nous avons cependant déjà tout fait ce qui était en notre pouvoir et je ne crois tout simplement pas que l’observation proposée, malgré tout le respect que je dois à la sénatrice Moncion, ajoute quoi que ce soit au débat. C’est mon impression.
Le président : Sénateur Black, vous aviez convoqué des témoins du ministère des Finances?
Le sénateur D. Black : Et des représentants du Bureau du surintendant des institutions financières. Je peux comprendre que ces gens-là ont des horaires chargés, mais il a fallu les convoquer à trois reprises. Si je ne m’abuse, c’est trois invitations qu’il a fallu leur faire. Nous avons trouvé cela extrêmement contrariant, et j’ai d’ailleurs écrit au ministre pour l’en informer.
Le président : Je veux rappeler aux sénateurs ainsi qu’aux gens qui nous regardent ce que j’ai dit précédemment. Après avoir nommé les sept comités qui ont mené une étude sur la teneur du projet de loi C-74, j’ai ajouté que, compte tenu de l’ampleur du travail déjà accompli par ces sept comités sénatoriaux ainsi que le nôtre à ce sujet, nous encourageons vivement le gouvernement à prendre en compte les observations annexées au projet de loi et à prendre les mesures de suivi qui s’imposent.
Le sénateur D. Black : Est-ce que ces observations seront jointes à l’annexe A? Elles ne seront pas jointes.
Mme Lemay : Le rapport a été présenté au Sénat.
Le président : Compte tenu des échéanciers à respecter, le rapport a été déposé au Sénat, si bien qu’il est maintenant public. De plus, nous allons, au Comité des finances, encourager vivement le gouvernement à donner suite aux observations annexées au projet de loi.
Il faut aussi rappeler que nous recevons ce soir des fonctionnaires du ministère des Finances pour la section sur l’examen des lois régissant le secteur financier.
Honorables sénateurs, à titre de président du comité, je ne crois pas qu’il y ait consensus en faveur de l’observation soumise à notre considération par la sénatrice Moncion.
La sénatrice Eaton : Pouvons-nous voter?
Le président : Juste un instant, s’il vous plaît. Après avoir entendu le président du Comité des banques parler des observations incluses dans le rapport de ce comité qui a été déposé, et comme je ne constate pas qu’il y a consensus à ce sujet, je crois que l’on ne devrait pas tenir compte de l’observation proposée par la sénatrice Moncion. Nous avons indiqué que nous demandons au gouvernement de faire le suivi quant aux observations annexées aux sept rapports déposés devant le Sénat du Canada.
Le sénateur Neufeld : Cela me convient.
Le président : La présidence convient donc qu’en l’absence de consensus, la motion mise de l’avant par la sénatrice Moncion sous la rubrique des observations ne sera pas acceptée.
Êtes-vous d’accord pour que, compte tenu de l’ampleur du travail accompli par les sept comités sénatoriaux ainsi que par le nôtre relativement à la teneur du projet de loi C-74, nous encouragions vivement le gouvernement à prendre en compte les observations qui y ont été annexées et à assurer le suivi nécessaire?
Le sénateur Neufeld : D’accord.
La sénatrice Eaton : Je ne suis pas d’accord. Le Comité des finances avait l’habitude de convoquer tous les présidents de comité pour qu’ils nous fassent rapport de leurs observations. Je n’ai aucune idée des observations annexées par ces sept comités; nous avançons entièrement à l’aveuglette.
Le président : La greffière vient de m’informer de la façon dont les choses se sont déroulées. Tous les rapports ont été déposés au Sénat et distribués aux sénateurs. C’est le comité directeur qui a décidé de ne pas faire comparaître les présidents devant le Comité des finances, mais de leur faire plutôt déposer leur propre rapport.
La sénatrice Eaton : Je ne suis pas d’accord pour que l’on accepte ces rapports, car je ne connais pas leur contenu.
Le président : Je vous rappelle, honorables sénateurs, que les observations ne peuvent pas être mises aux voix. Les commentaires de la sénatrice Eaton sont toutefois bel et bien consignés.
S’il n’y a pas d’autre intervention, nous allons suspendre la séance pour passer au second point à notre ordre du jour.
Avant cela, je cède la parole à la sénatrice Moncion.
[Français]
La sénatrice Moncion : Je veux m’assurer que j’ai bien compris. Si quelqu’un n’est pas d’accord avec les observations parce qu’il ne les a pas vues, elles n’iront pas dans le rapport? C’est ce que vous nous dites?
Le président : Non. On demande au gouvernement de prendre connaissance de toutes les observations des sept comités.
La sénatrice Moncion : D’accord.
Le président : Et qu’il fasse un suivi sur les observations au Comité des finances nationales.
La sénatrice Moncion : D’accord. Je croyais que vous aviez dit que, parce qu’il y avait dissension...
Le président : Non.
La sénatrice Moncion : D’accord.
Le président : Si, en tant que président, je n’ai pas accepté une des observations, les sénateurs ont le droit de donner leur opinion en public comme en privé.
[Traduction]
Nous allons maintenant suspendre la séance avant de passer au second point à l’ordre du jour.
(La séance se poursuit à huis clos.)