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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule no 72 - Témoignages du 20 juin 2018


OTTAWA, le mercredi 20 juin 2018

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 18 h 45, pour étudier les questions qui pourraient survenir occasionnellement concernant les prévisions budgétaires du gouvernement en général, notamment les comptes publics, les rapports du vérificateur général et les finances publiques, puis à huis clos, pour l’étude d’une ébauche de rapport.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Je m’appelle Percy Mockler. Je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et je suis président du comité. Je souhaite la bienvenue à toutes les personnes présentes dans la salle et à tous les téléspectateurs, d’un bout à l’autre du pays, qui nous regardent à la télévision ou en ligne.

Maintenant, chers collègues, je vous demanderais de vous présenter.

La sénatrice Eaton : Nicky Eaton, de l’Ontario.

La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.

La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.

La sénatrice Jaffer : Mobina Jaffer, de la Colombie-Britannique.

[Français]

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.

La sénatrice Moncion : Lucie Moncion, de l’Ontario.

Le président : J’aimerais également vous présenter la greffière du comité, Mme Gaëtane Lemay, ainsi que nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, M. Alex Smith et M. Sylvain Fleury qui, ensemble, soutiennent les travaux du comité.

[Traduction]

Nous accueillons aujourd’hui le greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet, Michael Wernick. Merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation à répondre à nos questions. Il ne fait aucun doute que votre opinion et votre point de vue seront les bienvenus.

[Français]

Honorables sénateurs, il est accompagné par M. Peter Wallace, secrétaire du Conseil du Trésor. Merci d’être présent parmi nous aujourd’hui.

[Traduction]

Sur ce, chers collègues, je mentionne pour le compte rendu que votre comité de direction a donné suite à la suggestion de l’un de vous d’inviter M. Wernick à comparaître devant le comité. Nous pensons qu’il est bien placé pour répondre à certaines de nos questions récurrentes, par exemple à propos de Phénix, des indicateurs de rendement et de la disponibilité des renseignements financiers, et pour citer des études qui portent sur des questions soulevées par le Comité des finances, y compris les comptes publics, les rapports du vérificateur général et les finances publiques.

On m’a indiqué que M. Wernick n’a pas d’observations préliminaires pour l’instant.

Michael Wernick, greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet, Bureau du Conseil privé : Je serai bref, monsieur.

Mesdames et messieurs les sénateurs, merci. Je me suis presque fait bousculer par des députés et des sénateurs qui se dirigent vers l’aéroport, puisque les deux Chambres sont ajournées pour l’été. Comme il est tard dans la session et que nous sommes tous un peu fatigués, j’ai pensé vous dispenser d’une déclaration liminaire. Et si vous me permettez de donner une ou deux longues réponses, nous pourrons ensuite discuter. J’en serais satisfait.

La sénatrice Marshall : Je vais commencer par les observations préliminaires de notre président.

Nous accueillons des fonctionnaires de différents ministères et organismes. Il nous arrive souvent de demander des renseignements financiers ou des indicateurs de rendement. Il est parfois difficile d’obtenir ces renseignements, et il arrive que nous les demandions à plusieurs reprises, mais sans succès. Les indicateurs de rendement n’ont souvent aucun sens ou ils ne sont pas disponibles. Ils semblent tout simplement mauvais. Ils sont parfois qualitatifs alors qu’ils semblent être quantitatifs.

Pouvez-vous tous les deux nous dire quelle est la relation avec les sous-ministres? Je sais qu’ils ne relèvent pas de vous, mais il doit forcément y avoir une certaine relation. Par exemple, je sais que le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada contrôle l’argent, ce qui signifie qu’il y a une sorte de contrôle, voire des rapports.

Quel est votre lien avec les sous-ministres? M. Wernick pourrait peut-être commencer, et nous écouterons ensuite M. Wallace.

M. Wernick : Il y a beaucoup de sujets à aborder, et je vais donc tenter d’être bref. Si je ne réponds pas à votre question, vous pouvez la poser de nouveau.

Vous avez raison : je n’ai aucun pouvoir exécutif par rapport aux sous-ministres. Je ne suis pas comme le chef d’état-major de la Défense ou le commissaire de la GRC. Les sous-ministres administrent les comptes pour les ressources de leur ministère, et ils soutiennent les ministres. Mon rôle est celui de sous-ministre du premier ministre.

La sénatrice Marshall : Oui. J’en suis consciente.

M. Wernick : Je suis chargé de recommander des nominations aux sous-ministres — des promotions, des mouvements de personnel et des licenciements —, ce qui signifie que ce rôle de cadre supérieur me donne une certaine influence sur mes collègues. J’agis un peu comme le président de la communauté. Je préside plusieurs comités de sous-ministres, et nous avons une rencontre toutes les semaines. J’essaie d’assurer une certaine cohésion dans la communauté. La moitié de mon travail est probablement liée aux cadres supérieurs, aux mouvements de personnel et au renforcement de la communauté. Je suis donc heureux de parler de la façon dont les sous-ministres sont choisis, affectés à un poste et évalués.

Pour ce qui est de la mesure du rendement — et Peter va me corriger si je digresse —, cela renvoie essentiellement au pouvoir de l’exécutif de demander de l’argent à l’Assemblée législative. Pour ce faire, chaque dollar doit être affecté par le Parlement ou au moyen d’une loi. Les ministères et les organismes — et il y en a plus de 300 — présentent tous au printemps un rapport — il a pris différentes formes et a été renommé au fil des ans — pour exposer leurs plans. On tente ainsi de dire ce qu’on essaie d’accomplir et qu’elles seront les sommes nécessaires.

Au fil des décennies, on a tenté plusieurs fois de mettre au point des indicateurs de rendement de l’argent utilisé. À l’automne, vous recevrez un rapport de rendement ministériel, qui porte habituellement sur le cycle précédent et ainsi de suite.

La sénatrice Marshall : En tant que greffier du Conseil privé, consultez-vous cette information pour ensuite dire aux sous-ministres que ce sont de bons indicateurs de rendement? Vous arrive-t-il de dire à un sous-ministre que ce sont de piètres indicateurs de rendement et qu’il doit faire mieux?

M. Wernick : Oui, cela arrive tout le temps dans le rôle de chef du personnel.

Une fois de plus, au risque d’empiéter sur la sphère de Peter, le Conseil du Trésor est le conseil de gestion du gouvernement. Il établit les politiques qui gouvernent l’ensemble des entités de compétence fédérale d’une façon ou d’une autre. Au fil des ans, il a mis au point différents outils pour mesurer l’efficacité des ministères et des organismes.

Celui que nous utilisons actuellement s’appelle le cadre de responsabilisation de gestion, que vous connaissez probablement. Il permet de répartir certaines choses pour tenter de les mesurer. Ces rapports sont publiés tous les ans sur Internet, et on peut voir le rendement d’un ministère augmenter et diminuer selon les indicateurs. Les observations provenant du cadre de responsabilisation de gestion sont non seulement transmises directement par Peter et ses collaborateurs du ministère ou de l’organisme, mais elles comptent aussi pour beaucoup dans notre plan de gestion du rendement des sous-ministres.

Ce que j’essaie de déterminer, c’est la valeur ajoutée grâce aux sous-ministres. Font-ils des progrès? Essaient-ils de prendre les bonnes mesures? Ils ont peut-être hérité d’un ministère mal en point. On veut savoir ce que les sous-ministres font pour améliorer leur ministère.

La sénatrice Marshall : Faites-vous un suivi?

M. Wernick : C’est extrêmement important.

La sénatrice Marshall : En tant que greffier du Conseil privé, comment participez-vous aux grands projets, comme ceux de Kinder Morgan et de Trans Mountain? Je sais que vous ne jouez pas de rôle de bas niveau dans les ministères, mais dans le cas des grands projets à risque élevé, comme Kinder Morgan, Trans Mountain et même Phénix à l’heure actuelle, continuez-vous de faire un suivi des principales questions?

M. Wernick : C’est une bonne question, car je suis sous-ministre du premier ministre et secrétaire du Cabinet, soit essentiellement un autre greffier. Je m’assois dans un coin aux réunions du Cabinet et je suis responsable des intrants et des extrants du Cabinet et de la suite de décisions prises par ces 30 hommes et femmes.

La différence, c’est essentiellement que je travaille dans la sphère politique, par exemple pour ce qui est de décider si on achète ou non un oléoduc. Habituellement, c’est le conseil de gestion qui se charge ensuite de l’exécution et de la mise en oeuvre.

La sénatrice Marshall : Vos conseils seraient très utiles, car une grande partie des propositions ou des décisions politiques doivent passer par le Cabinet. Par conséquent, en tant que greffier et sous-ministre du premier ministre, vous exercez une influence, n’est-ce pas? J’essaie de me faire une idée.

M. Wernick : Le poste donne de l’influence — je ne le nie pas —, mais le Cabinet est essentiellement un groupe de ministres. Je pense qu’on exagère un peu le rôle des sous-ministres et des greffiers. Ce sont les ministres qui prennent les grandes décisions.

La sénatrice Marshall : J’ai une dernière question pour M. Wallace.

Quand nous avons parlé de Phénix avec M. Brian Pagan, il a dit que vous faisiez une certaine évaluation ou un certain calcul des coûts du système, y compris ceux engagés par les ministères. On nous a dit que ce serait fait d’ici le mois de mai. Est-ce terminé? Pouvez-vous faire le point?

Peter Wallace, secrétaire du Conseil du Trésor, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Ce n’est pas terminé. Nous travaillons encore là-dessus. Je crois que nous n’en avons plus pour longtemps. Nous avons les calculs de base et nous nous assurons d’avoir les dernières données de Services publics et Approvisionnement Canada.

La sénatrice Marshall : Est-ce que cela comprend tous les ministères touchés par Phénix?

M. Wallace : Oui. L’information passe par Services publics et Approvisionnement Canada.

La sénatrice Marshall : Pourrons-nous obtenir une copie du document lorsqu’il sera terminé?

M. Wallace : Tout à fait, oui.

La sénatrice Marshall : Merci.

Le sénateur Pratte : Monsieur Wernick, à propos de Phénix, vous étiez grandement en désaccord avec le vérificateur général, au sujet de ce que vous avez appelé son article d’opinion sur la culture de la fonction publique, qu’il a semblé décrire comme étant généralisée. Il ne l’a pas décrite de manière précise, mais il a semblé indiquer que le problème est généralisé.

Ce qui me frappe avec le cas de Phénix, c’est le fait qu’il a semblé y avoir de nombreuses occasions pour différentes personnes de signaler à quel point la situation était catastrophique, et il n’y a apparemment personne qui en a profité pour dire qu’il fallait attendre, parce que quelque chose ne tournait pas rond.

Différentes réunions ont eu lieu dans lesquelles de nombreux ministres ont apparemment été avertis, et le Conseil du Trésor a pris connaissance du rapport Gartner et ainsi de suite. Il semble que beaucoup de monde était au courant, mais, on ne sait trop comment, les trois cadres n’ont pas communiqué une partie de l’information, et nous savons ce qui a fini par se produire.

La culture décrite par le vérificateur général n’est peut-être pas généralisée, mais ce n’était manifestement pas un problème qui se limitait à quelques personnes, car il y a eu de nombreuses occasions de mettre fin au projet, et personne ne l’a fait. Qu’est-ce qui est suffisamment répandu pour que personne n’ait signalé le problème dans le but de freiner le projet?

M. Wernick : C’est une question importante, monsieur le sénateur.

Il ne fait aucun doute que le travail de l’équipe du vérificateur général sur le système de paye a été utile. Il y a eu deux rapports distincts, un à l’automne et l’autre au printemps. Pour autant que je sache, on pourrait vouloir approfondir d’autres questions lorsqu’on se penche sur la méthodologie d’un audit, qui est grandement définie, et lorsqu’on se fie aux données probantes. C’était un conseil du vérificateur général concernant ce qui pouvait être fait au sujet du système de paye. C’est une importante contribution au Parlement et aux Canadiens.

Ce qui m’a posé problème, c’est le commentaire, l’article d’opinion — peu importe le nom qu’on lui donne —, le chapitre zéro, car il généralise la situation en parlant de « culture déficiente » et donne aux Canadiens l’impression que la fonction publique est totalement erronée et contredite par les faits. On a une des meilleures fonctions publiques au monde, et je peux vous donner beaucoup de preuves en ce sens.

Je pense que l’article d’opinion du vérificateur général, et je ne cherche pas à en faire un terme péjoratif...

Le sénateur Pratte : J’ai rédigé des articles d’opinion pendant 30 ans, et j’espère donc que vous pensez que c’est une profession noble.

[Français]

M. Wernick : J’ai lu avec intérêt plusieurs de ces commentaires. Il y a un rôle pour les commentaires.

[Traduction]

Je pense que la fonction du vérificateur général — et je sais que j’aurai des ennuis pour l’avoir dit — a été créée pour s’assurer à l’aide d’un audit que les états financiers sont en ordre. L’équipe du vérificateur général joue un rôle important en matière de contrôles financiers et de gestion des finances pour que nous ayons l’un des meilleurs systèmes gouvernementaux de gestion financière au monde. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes aussi bien cotés.

On est un peu passé à l’optimisation de l’argent dépensé, ce qui renvoie souvent à la décision politique de faire ou non quelque chose. La décision d’avoir un pont à péage est une décision politique que les cabinets et les assemblées législatives ont le droit de prendre.

Par contre, les articles d’opinion tombent dans la catégorie des conseils généraux offerts par un consultant en gestion ou un expert de la gouvernance, et je ne crois tout simplement pas que le Bureau du vérificateur général est le bon endroit pour exprimer ce genre d’opinions.

Le sénateur Pratte : Je ne suis pas en désaccord avec vous, mais je crains que, entre les articles d’opinion et le point de vue injuste et généralisé de la fonction publique, ainsi que l’attention très limitée accordée à ce qu’ont fait trois fonctionnaires, ce qui serait à la base du problème, il y a peut-être quelque chose au milieu.

M. Wernick : Tout à fait. J’aimerais discuter avec les Canadiens de la façon d’améliorer leur fonction publique, qui est déjà bonne et peut même l’être davantage. Dans les rapports que j’ai présentés au Parlement et dans plus de 40 discours sur mon site web, on peut constater que je ne verse aucunement dans la complaisance quand je parle de la fonction publique, de son rendement ou de sa culture. J’ai dit publiquement que nous devons nous montrer plus souples, plus créatifs et plus agiles, et accorder moins d’attention à la procédure et plus d’attention aux résultats. Vous pouvez consulter mes déclarations.

Nous devons améliorer la culture organisationnelle. La raison pour laquelle l’article d’opinion me pose problème, c’est que je crois qu’il met injustement dans le même panier 300 organismes distincts. Certaines parties de la fonction publique sont créatives et souples. Je peux vous en donner de nombreux exemples. D’autres ne le sont pas. Il y a des milieux de travail très sains et d’autres qui ne le sont pas. La forme d’art à laquelle Peter et moi nous adonnons consiste à distinguer les deux.

M. Wallace : Si je peux me permettre d’approfondir très brièvement la question, le vérificateur général soulève ces problèmes, et je pense qu’ils sont importants. Le rapport et une partie de ses commentaires publiés après le rapport révèlent quelque chose et en parlent. C’est dans la portée de l’audit. Ces contrôles n’ont pas été mis en oeuvre et ont peut-être même été négligés. Ils ont été appliqués dans la forme, mais pas dans le fond.

Une partie de notre défi, de ce que nous cherchons à accomplir à long terme, consiste non seulement à nous assurer que nous implantons dans la fonction publique le besoin de percevoir ces contrôles comme des vérifications, mais aussi à y implanter le fond et la forme et, à vrai dire, à provoquer ce changement dans le corps de l’organisation afin de ne plus jamais nous retrouver dans une position où trois cadres peuvent prendre des décisions relatives à des projets qu’ils contrôlent, afin que l’information soit diffusée et que la reddition de compte se fasse à plus grande échelle.

Le sénateur Pratte : Merci. J’ai un dernier point à aborder. Au Comité des comptes publics de la Chambre, monsieur Wernick, on vous a demandé s’il y avait selon vous assez de conséquences lorsque le rendement est mauvais dans la fonction publique et ce qu’on pouvait faire à ce sujet. Vous avez répondu qu’il n’y en a pas assez. Je me demandais si cette réponse s’applique également aux personnes responsables du système de paye Phénix.

M. Wernick : Je ne crois pas être en position de faire des commentaires sur les personnages de ce roman. C’est une question qu’il vaudra la peine de vider. Mes observations visaient l’ensemble de la fonction publique.

Je distingue les sous-ministres et la plupart des autres titulaires de poste nommés par le gouverneur en conseil, qui n’ont ni sécurité d’emploi, ni contrat de travail, ni indemnité de départ et le reste des fonctionnaires. Peter et moi n’avons aucune sécurité d’emploi, mais le reste de la fonction publique est régie par la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. Je vais sûrement m’attirer des ennuis pour l’avoir dit, mais il est extrêmement difficile de congédier un fonctionnaire. Je ne crois pas que ça soit très souvent nécessaire, mais je pense que les deux Chambres pourraient étudier la question et se demander si ce régime favorise le bon rendement dans l’organisation. Ce serait une grosse tâche, très salissante et très controversée, mais, d’après moi, les Canadiens devraient peut-être s’y engager.

Le sénateur Pratte : Merci.

La sénatrice Eaton : Messieurs Wernick et Wallace, peut-être qu’après nous avoir entendus, vous pourriez nous donner des conseils ou communiquer nos observations aux sous-ministres que nous convoquons.

Nous trouvons que c’est extrêmement irritant. Nous sommes tous assez politiquement avertis pour reconnaître les réponses vides à nos questions raisonnables. En voici un exemple.

Un témoin de la SCHL que je questionnais sur un élément du Budget principal des dépenses de 119,6 millions de dollars m’a répondu : « Merci pour votre excellente question. Je ne peux pas vous répondre précisément sur la ventilation de ce montant. Je m’informerai et je vous communiquerai la réponse. » Eh bien, je n’ai pas obtenu de réponse.

Ensuite, sur un autre élément budgétaire de 4 millions, pour mettre fin à la discrimination dans le logement public, aux obstacles qui entravent l’accès au logement, j’ai dit : « C’est très intéressant. Avez-vous fait de la recherche sur le racisme dans le logement public? » Sa réponse : « Non, c’est anecdotique. » Je lui demande alors : « Comment allez-vous rendre compte de ces 4 millions? » Sa réponse : « Je ne sais pas. » Vous pouvez deviner notre extrême irritation.

Je pense que les deux ministères les plus irritants sont la Défense nationale et Affaires autochtones et du Nord.

La semaine dernière, avec la sénatrice Marshall, je conversais avec un cadre militaire canadien à une conférence de la Défense nationale. Une conversation tranquille. La semaine avant, nous avions recueilli le témoignage de fonctionnaires de ce ministère, sur des navires ravitailleurs. Il m’a dit : « Vous savez, pour les deux côtes, il nous en faudrait six. » Je réponds : « C’est intéressant, parce que je pense que, actuellement, votre ministère nous dit qu’il essaie d’en obtenir trois. L’un d’eux est en service, les deux autres à venir. Pourquoi ne nous l’avez-vous pas dit? Pourquoi dire trois quand vos besoins réels sont de six pour les deux côtes? » Sa réponse : « Eh bien, nous n’en avons pas besoin. Nous demandons seulement ce que nous croyons que nous pourrions obtenir. »

Qu’en pensez-vous, tous les deux? Il m’a dit que les témoins convoqués par le Congrès américain devaient prêter serment. Ne serait-il pas utile à ceux qui comparaissent devant le Comité sénatorial des finances, qui essaie de faire rendre des comptes ou de suivre l’argent ou de déterminer l’efficacité d’un programme, de prêter aussi serment et de ne pas penser seulement à ce qui est politique?

M. Wernick : Non. Je ne crois pas que ce genre d’audiences inquisitoires, peuplées d’avocats, légalistes, correspond à l’esprit de la variante canadienne de la démocratie de Westminster. Les rôles des ministres, des sous-ministres et des dirigeants d’organismes sont distincts. Ils sont tous exposés dans le document intitulé Pour un gouvernement ouvert et responsable.

Vous me donnez l’occasion de préciser qu’il est impossible pour les fonctionnaires de demander plus de ressources. Chaque dollar est demandé par les ministres au Conseil du Trésor, par des présentations signées par eux.

La sénatrice Eaton : Mais qu’en est-il de la reddition des comptes? D’accord, nous ne pouvons pas nous offrir six ravitailleurs, mais qu’en est-il de la simple obligation de reddition de comptes des témoins de la SCHL? Pourquoi ne pas connaître la destination des 119 millions? Pourquoi ne pas se renseigner, au préalable, sur la façon dont seront dépensés les 4 millions?

M. Wernick : Ayant comparu devant votre comité plusieurs fois en ma qualité de sous-ministre, je dois dire qu’il est très exigeant de connaître la réponse à toutes les questions qui pourraient porter sur tous les éléments budgétaires qu’on pourrait connaître. Parfois, il faut relancer les témoins. Vous posez là une question sérieuse.

Je pense que, au fil du temps et des gouvernements successifs, nous avons essayé d’être beaucoup plus transparents, ce qui m’amène à vous recommander la consultation de la base de données InfoBase du gouvernement du Canada, pour connaître la destination de l’argent.

La sénatrice Eaton : Monsieur Wernick, nos témoins sont souvent le sous-ministre d’un ministère et ses adjoints, qui sont habituellement une dizaine, assis dans la tribune. Je suis obligée de penser que s’ils viennent pour répondre de leur tranche du budget, deux pages, ils pourraient me dire à quoi ils consacrent 119 millions. Ce montant n’est peut-être rien, mais, pour la plupart des Canadiens, il est significatif.

M. Wernick : Je vous recommande donc de consulter InfoBase, créée pour tenter d’informer les Canadiens sur la destination de chaque dollar et les indicateurs correspondants de rendement.

La sénatrice Eaton : J’ai terminé. Comme la sénatrice Marshall l’a dit, la dernière fois que nous avons reçu des représentants du Conseil du Trésor, les objectifs de rendement étaient inaccessibles pour un ministère après l’autre, année après année.

M. Wernick : Mais un site web présente les indicateurs de rendement de chaque dollar.

La sénatrice Eaton : Pourquoi ne sont-ils pas dans le cahier?

M. Wernick : Ils sont dans l’InfoBase. On y trouve à pleines pages des indicateurs de rendement pour tous les éléments budgétaires. Il est très difficile d’obtenir la ventilation exacte, vu la formulation des questions qui proviennent aussi de tous les côtés.

L’amélioration des rapports faits au Parlement et aux Canadiens est un chantier permanent. On peut faire mieux, on pourrait faire davantage, et je suis convaincu que les réactions des parlementaires seraient très utiles.

L’une de nos réalisations, cette année, avec le concours du gouvernement, et vous le reconnaîtrez, a été de faire coïncider le budget et le budget des dépenses.

La sénatrice Eaton : Oui, et je pense que M. Brison fait de l’excellent travail.

M. Wernick : Nous nous présentions devant les comités parlementaires armés de documents sur le Budget principal des dépenses qui ne correspondaient pas aux mesures budgétaires. Je suis sûr que c’était une source d’irritation pour vous. Maintenant, vous obtenez des chiffres fidèles à la plupart des mesures budgétaires.

La sénatrice Marshall : Je voudrais faire une observation sur les indicateurs de rendement, et c’est la raison pour laquelle je demandais quel était votre rôle en ce qui les concerne. Par exemple, les fonctionnaires du ministère de l’Environnement que je questionnais à leur sujet m’ont énuméré huit endroits où je pouvais les obtenir. Je leur ai demandé : « Ne pouvez-vous pas tous les publier au même endroit, sur le site web du gouvernement? » La consultation présente toujours des difficultés. Même avec InfoBase, il reste difficile d’obtenir des renseignements financiers et de connaître les indicateurs de rendement. Voilà pourquoi je vous demande quel était votre rôle.

M. Wernick : Chaque fois qu’on s’adresse aux ministres du Conseil du Trésor pour demander de l’argent à telle fin et obtenir des crédits pour tel ministère, il faut habituellement présenter d’abord une analyse de rentabilité pour l’argent, mais toujours préciser les risques qui l’encadrent et encadrer le tout de mesures de rendement. Voilà la marche à suivre pour soutirer de l’argent au Conseil du Trésor.

L’InfoBase est peut-être un outil imparfait, mais c’est une tentative visant à permettre à tous les Canadiens qui naviguent sur l’Internet de questionner en tout temps une base de données sur les dépenses et les mesures de rendement du gouvernement. Bien sûr, elle est perfectible.

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie tous les deux d’être ici. Nous étudions ce qui s’est produit avec Phénix. Nous pouvons discuter tant que nous voulons du passé, mais, dans le temps dont nous disposons, je suis très désireuse, particulièrement grâce à vous, monsieur Wallace, de connaître ce qui s’en vient. Notamment, les appels à la suppression de Phénix, à son remplacement, m’inquiètent. D’après moi, ce n’est pas parfait, mais je tiens à savoir ce qui viendra ensuite. Quelles sont nos prochaines étapes?

M. Wernick : Je l’interromps une seconde pour dire que le vérificateur général, dans son rapport d’automne, n’a pas préconisé la mise au rancart du système, mais d’essayer de le stabiliser et de le rendre fonctionnel.

La sénatrice Jaffer : Est-ce aussi votre opinion?

M. Wallace : Oui. Les ministres Brison et Qualtrough ont rédigé pour le Comité des comptes publics une réponse détaillée aux recommandations du vérificateur général, en y exposant clairement, et je vous en recommande la lecture, la succession détaillée de toutes les mesures prises par le gouvernement du Canada, centralement à Services publics et Approvisionnement Canada, au Conseil du Trésor et, particulièrement, dans les ministères, pour stabiliser le système qui, actuellement, se trouve dans une situation inacceptable, et continuer de l’améliorer.

Il importe au plus haut point de noter que nous tirons des leçons fondamentales de Phénix, et le rapport technique du vérificateur général en expose un certain nombre. Nous nous assurons d’avoir mis en place un grand nombre de mesures supplémentaires pour mieux gérer les technologies de l’information. Nous avons modifié la marche à suivre des grands projets centraux. Nous avons mis en place un conseil d’examen de l’architecture d’entreprise qui, en fait, offre un niveau distinct de gouvernance et évite de faire relever les grands projets de la surveillance de seulement une poignée de fonctionnaires.

Nous avons amélioré la mobilisation du Secrétariat même du Conseil du Trésor.

Nous avons consacré une quantité énorme de ressources à la stratégie de gestion des projets et à nombre d’autres aspects, y compris à la formation.

Cependant, je tiens à souligner que ces mesures sont inutiles si nous ne faisons pas nôtres les valeurs. Nous poursuivons donc le dialogue, et je réponds ainsi aux observations du sénateur Pratte. Nous poursuivons le dialogue pour que ce ne soit pas seulement des cases qu’on coche, mais aussi des contrôles efficaces, concrets, ayant un impact direct et provoquant les transformations nécessaires.

La sénatrice Jaffer : Qui supervise tout cela?

M. Wallace : Le Conseil du Trésor. Toutefois, honnêtement, nous ne pouvons pas nous reposer sur lui. Il faut intégrer ce travail dans l’organisation, et nous y travaillons. C’est notre quotidien : améliorer les politiques, la connaissance des politiques, leur application et, de temps à autre, franchement, célébrer les réussites. Comme le greffier du Conseil privé l’a dit, nous réussissons un certain nombre de coups importants.

Dorénavant, la priorité est absolument de stabiliser Phénix et nous, au Secrétariat du Conseil du Trésor et dans toute l’administration fédérale, travaillons à épauler nos groupes à Services publics et Approvisionnement Canada dans cet effort essentiel.

Nous comprenons que le budget est clair et que nous devrons élaborer une stratégie de sortie de Phénix. Nous examinons systématiquement et rigoureusement diverses pistes et, franchement, nous nous assurons notamment d’avoir retenu les leçons de Phénix. Ça signifie la gestion des projets, de meilleurs canaux et de meilleurs examens, grâce à notre comité d’examen de l’architecture et à tous les autres éléments. Nous avançons de manière systématique dans l’élaboration d’un nouveau système de paye.

La sénatrice Jaffer : À son passage ici, la ministre Qualtrough a dit, et j’espère la citer fidèlement, que le mieux qu’elle puisse faire était de stabiliser le système. Je pense que vous l’avez aussi dit. Est-ce que ça signifie que, ensuite — je tiens seulement à comprendre — vous envisagerez un autre système? Ou travaillerez-vous avec celui qui existe?

M. Wallace : Je pense que, au fond, nous comprenons que nous devons pouvoir rémunérer nos employés ponctuellement et exactement. C’est absolument l’objectif. Nous voulons nous assurer aussi que nos outils qui permettront de le faire seront compatibles avec la gouvernance moderne et avec les technologies modernes de l’information, qu’ils communiqueront efficacement avec d’autres systèmes, qu’ils prendront en charge notre système de pensions et qu’ils répondront à toutes les exigences.

Jusqu’ici, Phénix n’a pas répondu à ces exigences. Bien sûr, nous examinerons d’autres outils qui nous permettront de posséder toute la gamme de fonctionnalités. Grâce au rapport du vérificateur général, nous savons bien, notamment, que les fonctionnalités de Phénix sont insuffisantes. Nous visons donc à stabiliser le système, à régulariser la rémunération, à répondre aux exigences de base d’une fonction de rémunération, mais nous voulons aussi nous assurer d’être économiquement efficaces, de travailler dans un environnement moderne et de bien protéger tous les renseignements personnels, financiers et autres.

La sénatrice Jaffer : Ma prochaine question allait porter sur les fonctionnalités. Si j’ai bien compris — peut-être que c’est maintenant réglé —, ceux, par exemple, qui faisaient du travail posté, à différentes heures, ont éprouvé des difficultés. Le versement de salaires rétroactifs était également impossible. Phénix est notamment incapable de ces fonctions. Est-ce que c’est réparé? Est-il possible de le réparer? Comment cela fonctionnera-t-il?

M. Wallace : Si j’ai bien compris, les fonctionnalités dont Phénix est privé sont irrécupérables rétroactivement, mais mes homologues de Services publics et Approvisionnement Canada pourraient peut-être mieux répondre à cette question que moi. Par exemple, les modules de paie qu’on introduit sont exactement un mécanisme visant à s’assurer l’exactitude et la ponctualité de la rémunération et de la paie de chacun, peu importe les mécanismes pour lesquels on les produit, que l’information soit ponctuelle ou qu’elle porte sur du travail posté ou d’autres caractéristiques, en fait, on a l’occasion de rémunérer les employés exactement et ponctuellement.

La sénatrice Jaffer : À sa comparution, la ministre Qualtrough nous a tous impressionnés par sa transparence, son honnêteté et sa reddition de comptes. Sa sincérité nous a paru évidente. Vous me faites ressentir, tous les deux, la même impression.

La question avec laquelle je me débats et mes collègues aussi, je pense, c’est pendant combien de temps on peut ne pas rémunérer convenablement les employés. Quelle est la limite? Quand allons-nous remonter la pente?

M. Wallace : Je pense que l’échéancier dépendra du niveau d’expérience et du suivi de l’information par nos collègues de Services publics et Approvisionnement Canada. Ils rendent l’information accessible de façon régulière, droitement et avec un grand sens des responsabilités.

En réalité, la situation reste inacceptable. Nous faisons des progrès. Les files d’attente de la rémunération sont stables. La situation n’empire pas, mais il subsiste un important arriéré et des problèmes individuels encore inacceptables. C’est à cause de l’absence de fonctionnalités et de la file d’attente qui s’est constituée au début du processus.

Dans toute l’administration, on consent un effort très considérable au règlement de ces problèmes, et je crois que nous reconnaissons la gravité de la situation. Nous collaborons avec nos collègues de l’agent de négociation de tout le gouvernement pour procurer de la stabilité et un règlement énergique de ces problèmes.

Nous le disons non pas pour nous défendre, mais, honnêtement, en reconnaissance de la gravité du problème et de la nécessité de le régler.

La sénatrice Jaffer : Y a-t-il un système de versement d’acomptes sur salaire? L’employé qui ne reçoit pas son chèque de paie peut-il espérer l’aide d’un tel système? Je ne peux imaginer à quel point ce peut être difficile.

M. Wallace : Absolument. Je ne veux pas passer beaucoup de temps à parcourir la longue liste de solutions que nous avons apportées, mais nous avons mis en place une large gamme de systèmes dans les centres d’appels et d’autres éléments qui permettent le versement d’acomptes sur salaire, des interventions en souplesse et toutes sortes de solutions auxquelles on s’attendrait raisonnablement de la part d’un employeur pour tirer d’embarras des employés qui n’y sont absolument pour rien.

Nous travaillons de façon systématique à la résolution du problème. C’est, dans une mesure considérable, une fonction, aussi, du Conseil du Trésor, et nous essayons beaucoup de faire de notre mieux pour bien réagir aux difficultés qu’affrontent nos employés.

M. Wernick : Cela revient à la question de savoir si j’exerce une influence sur les sous-ministres, comme le demandait la sénatrice Marshall. Je peux leur demander de nous informer de ce qu’ils font. À quelques reprises, j’ai demandé à tous les sous-ministres de m’écrire ce qu’ils font pour leurs employés; je pense à la formation, aux avances d’urgence, à tout ce qu’on peut faire avec ces pouvoirs. Ils m’ont tous fait parvenir leurs lettres, et elles sont publiées sur Internet, pour que d’autres puissent en tirer des leçons.

Je ne voudrais pas partir sans mentionner très clairement que personne n’est plus peiné par ce que nos fonctionnaires vivent depuis quelques années que les hauts fonctionnaires. Ces hommes et ces femmes font des choses extraordinaires pour les Canadiens. Bien souvent, leurs histoires passent sous silence, parce qu’on met l’accent sur ce qui ne va pas bien. J’essaie d’utiliser mon rapport annuel pour faire connaître leurs réalisations, et il faut leur rendre justice en leur versant leur juste salaire, en temps voulu.

Je vous recommande à tous le rapport de l’automne du vérificateur général, qui contient des recommandations très claires. Il écrivait que si l’on soumettait les mêmes règles de RH complexes et le même système de RH extrêmement complexe aux mêmes fournisseurs, dans le cadre du même processus d’approvisionnement, il serait fort peu probable que le résultat soit bien différent.

Le président : Merci.

[Français]

La sénatrice Moncion : J’aimerais ajouter quelque chose, sans toutefois parler de Phénix pour le reste de la réunion. En 2009, IBM avait été la seule entreprise soumissionnaire à répondre à tous les critères énoncés dans l’appel d’offres. Le gouvernement n’avait donc pas beaucoup de choix.

Vous avez dit que vous mettez en place une panoplie d’outils complémentaires pour soutenir Phénix et le système de paie. J’aime beaucoup cette idée. Cela m’amène à suggérer que les composantes qui ne fonctionnent pas dans le système Phénix en soient retirées. Il faudrait que ces composantes soient examinées sur une base individuelle. Les parties du système Phénix qui fonctionnent pourraient demeurer. Un jour, vous serez peut-être en mesure de stabiliser le système Phénix. Vous disposerez alors d’outils complémentaires et peut-être d’autres systèmes de paie qui pourront répondre à une partie des problèmes qu’éprouvent certains groupes. Je présume que vous examinez ces aspects dans le cadre de votre travail.

M. Wernick : Oui. Notre réflexion et nos conversations se sont amorcées dès le lancement du système et dès que les premières difficultés se sont manifestées.

Je devrais laisser mes collègues de Services publics Canada l’expliquer plus en détail. Toutefois, je peux dire qu’on a examiné toutes les possibilités, en retournant aux obligations du ministère quand il le fallait, pour ajouter des modules au logiciel, retirer certaines composantes et regrouper les ministères. Nous avons exploré toutes les pistes de solution qui nous ont été ouvertes. Nous avons engagé d’autres consultants pour trouver des solutions. Comme le vérificateur général l’a dit dans son rapport de l’automne dernier, on peut stabiliser le système et payer nos employés, mais ce ne sera jamais un excellent système.

La sénatrice Moncion : Les systèmes de paie ont toujours besoin d’être vérifiés, même lorsqu’ils sont automatisés.

M. Wernick : Oui.

La sénatrice Moncion : Ma question s’inscrit davantage dans le cadre du projet de loi C-74. Elle concerne particulièrement l’article 199 qui traite d’un dirigeant principal de l’information, soit d’une personne qui s’occupera des TI et qui relèvera du Secrétariat du Conseil du Trésor. Pourriez-vous nous expliquer les fonctions et pouvoirs de cette personne et le type de gestion de projet qu’elle aura à assumer dans son nouveau rôle en matière de technologie de l’information?

M. Wernick : Un des rôles du greffier est de recommander au premier ministre les changements en termes de gouvernance, à savoir qui fait quoi au sein de notre système. Le résultat d’une de ces discussions se trouve dans le projet de loi de mise en œuvre du budget et il implique la création d’un poste de dirigeant de l’informatique. L’objectif était de donner le même poids aux questions liées à la technologie de l’information qu’on a donné, par le passé, aux questions financières. Un contrôleur général travaille pour M. Wallace. Un sous-ministre est responsable de toute la gestion financière. En termes de technologie de l’information, il y avait un sous-ministre adjoint, mais on veut augmenter le profil, l’autorité et l’impact de ce poste.

[Traduction]

M. Wallace : Je vous ferai simplement observer que c’est la raison pour laquelle nous accueillons ce dialogue très positivement, parce qu’il y a beaucoup de leçons à en tirer, notamment que nous avons besoin de meilleurs pouvoirs et de meilleurs outils. Notre acharnement sur certains aspects de l’administration publique et les modèles d’autres gouvernements nous a peut-être menés à ne pas bien comprendre le rôle essentiel que l’information et sa gestion jouent dans une entreprise moderne et à ne pas investir suffisamment dans l’information.

L’une des idées qui ressort, qui est actuellement à l’étude, est celle de la création d’un poste de dirigeant principal de l’information. La création de ce poste — et je vais faire le lien avec les réponses fournies un peu plus tôt — nous permettrait de respecter nos valeurs. Nous sommes donc en train d’établir de nouveaux éléments de gouvernance de base, qui orienteront nos grands projets intersectoriels d’une façon différente et qui mèneront à l’établissement de nouveaux pouvoirs.

Par exemple, le conseil d’examen de l’architecture de l’entreprise dont j’ai parlé un peu plus tôt travaillera avec le dirigeant principal de l’information pour mettre en place les ressources nécessaires afin d’examiner les projets déterminants pour l’entreprise.

Nous avons toujours examiné les projets déterminants sous l’angle financier, parce qu’ils sont financés à même le Trésor. Nous évaluerons maintenant la technologie et les applications numériques de la même façon, de la même perspective.

C’est exactement ce qui se fait dans le secteur privé, donc nous lui emboîterons le pas, et je pense que pour un gouvernement, ce sera un modèle de reconnaissance du rôle absolument fondamental de l’information, de la technologie de l’information et de la prestation des services. On n’analysait pas l’infrastructure des TI de la même façon, avant. Nous utiliserons désormais l’information comme un atout stratégique et nous exercerons une gouvernance institutionnelle dans nos projets pour en assurer la pertinence et veiller à ce que tous les éléments aient été pris en compte.

C’est la fonction première du dirigeant principal de l’information, ce qui ressemble beaucoup à la fonction comparable qu’on trouve dans la plupart des grandes entreprises du secteur privé. Pour réagir à ce que disait le greffier, ce sont là des mécanismes de gouvernance transversale très forts ou des pouvoirs horizontaux.

[Français]

La sénatrice Moncion : Afin de préciser, vous me dites que, pour cette personne, ce n’est pas la machine qui est importante, mais l’information et ce qu’elle en fera pour la rendre encore plus stratégique.

M. Wallace : Ce sont les deux.

[Traduction]

En général, avant, on mettait l’accent sur l’infrastructure des TI, sur les machines elles-mêmes. On observe aujourd’hui une transformation en profondeur du nuage, le logiciel est devenu un service et toutes sortes d’autres choses. On voit, dans les entreprises, que les gens appuient leur stratégie d’entreprise sur une stratégie d’intégration de l’information. Nous créons la fonction du DPI pour pouvoir continuer notre travail avec nos collègues des autres ministères, afin d’améliorer l’utilisation de l’infrastructure, de la rendre plus efficace et faire le meilleur usage possible de l’argent des contribuables, comme on s’y attend de nous. Cela dit, l’information et la fonction d’information sont des éléments stratégiques fondamentaux de la prestation de services aux Canadiens; elles sont essentielles à la bonne gestion de nos projets, dans une perspective horizontale, pour éviter le cloisonnement des divers ministères.

Par exemple, cela signifie qu’avant, si nous avions besoin de bases de données, nous avions tendance à créer chacun de notre côté des bases de données qui ne se parlaient pas. Il n’y avait pas d’interopérabilité. Nous sommes donc en train de créer des normes qui nous permettront d’exploiter des données interopérables, dans le nuage. Cela conférera beaucoup plus d’agilité et de souplesse au processus d’approvisionnement, parce qu’il y aura une norme commune à l’échelle du gouvernement du Canada.

La sénatrice Moncion : D’accord. Merci.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie d’être ici. C’est une conversation importante, dans les deux sens, que nous avons aujourd’hui.

J’aimerais revenir rapidement à une chose qu’a mentionnée la sénatrice Jaffer. Monsieur Wallace, vous avez parlé de leçons à tirer ou des prochaines étapes, pour rectifier le tir, faire mieux. Vous avez dressé toute une liste de choses, qui comprend la gestion de projet, les pouvoirs aussi, je crois, l’autonomie, la culture. Vous avez mentionné toutes sortes de choses. Bien franchement, vous avez à peine effleuré la question de la collaboration interfonctionnelle verticale et horizontale.

J’essaie donc de comprendre la portée de tout cela au-delà de ce projet. On semble très versé dans le sujet au Canada, mais l’idée, c’est d’être payé, et cela fait les manchettes. Alors on se rend compte assez vite que le système ne fonctionne pas.

J’essaie simplement de réfléchir à ce que vous avez dit — et vous avez dit beaucoup de choses —, à la façon dont ces apprentissages peuvent prévenir d’autres problèmes ou contribuer à la croissance ailleurs dans l’organisation, dans le travail organisationnel. Comment aidons-nous tout un chacun à s’améliorer?

M. Wallace : Permettez-moi de répondre d’abord à la première question. Il y a l’aspect de la gouvernance fondamentale. Nous en comprenons les leçons. Cela signifie qu’il faut établir des pouvoirs et des responsabilités et veiller à ce que la gouvernance ne se limite pas à ceux qui dirigent ou supervisent les projets et qui peuvent souffrir d’un biais optimiste ou ne pas tenir compte d’informations essentielles, pour toutes sortes de raisons. Nous élargissons les contributions, les responsabilités et la structure.

Nous mettons en place toutes sortes de mécanismes de blocage importants, des mécanismes qui seront efficaces, et nous les intégrons à la culture organisationnelle.

Nous sommes en train de mettre en place des normes communes. Cela facilitera beaucoup le processus, en fait, parce que si nous pouvons mettre en place, par la fonction du dirigeant principal de l’information, une série de normes communes qui rendront essentiellement obligatoire une gestion de projet cohérente et commune, en vertu de normes communes et d’une méthodologie commune de gestion de projet, pour l’accès aux données, l’archivage et tout le reste, nous serons bien avancés pour en forcer l’intégration, bien honnêtement. Nous ne nous retrouverons plus constamment dans la situation décrite plus tôt, ou nous nous y retrouverons moins souvent, où nous n’avons qu’un soumissionnaire conforme. Nous élargirons beaucoup le marché des partenaires potentiels.

Il y a une autre chose très importante que nous n’avons pas encore mentionnée et que je dois mentionner, parmi les leçons acquises, c’est-à-dire que nous n’avons pas fait de tests adéquats, que nous n’avions pas fait tout le travail préalable nécessaire avec nos employés et leurs représentants. C’est une leçon essentielle que nous en tirons. Il faut comprendre le rôle des tests, ne pas laisser tomber les anciennes façons de faire avant d’adopter autre chose, il faut que les tests fassent partie intégrante du processus, qu’ils soient documentés, qu’ils soient au coeur de la planification du projet et qu’ils mettent à contribution les personnes touchées, les employés, de manière raisonnable et rigoureuse.

M. Wernick : Le meilleur exemple en est que vous ne déménagerez pas la semaine prochaine, que vous attendrez jusqu’en décembre, en raison de tous les tests et de toute la formation nécessaires sur les nouvelles installations du Sénat, parce que le Sénat a tiré des leçons de ce projet. Le même ministère a livré le projet de la Cité parlementaire, 20 projets en fait, qui ont été livrés à temps, sans dépassement de coûts et qui sont pleinement fonctionnels, comme vous le constaterez quand vous déménagerez.

M. Wallace : Nous devons absolument tout faire pour que les fonctionnaires ne succombent pas à la tyrannie des attentes auxquelles il faut répondre à tout prix. Nous devons plutôt veiller à avoir suffisamment d’agilité, d’efficacité et de souplesse pour optimiser l’art du possible.

M. Wernick : J’ajouterai très rapidement — et je ne vous donnerai pas ma longue liste à moins que vous ne me posiez une autre question — qu’il est important d’apprendre non seulement des échecs, mais aussi des réussites. Il y a beaucoup de projets gouvernementaux en TI qui sont des réussites, qui sont très fonctionnels et qui aident les Canadiens. Je pourrais en dresser une longue liste, qui figure dans mon rapport annuel, d’ailleurs. Vous pouvez aussi en tirer des leçons.

La sénatrice M. Deacon : Il y a eu des problèmes, qui n’étaient peut-être pas prévus ni intentionnels. Il est légitime d’entretenir des espoirs et de connaître des échecs, mais j’espère vraiment que nous pourrons voir et célébrer la culture de l’état de préparation, de la confiance, de la prise de risque, de l’échec dans un bon environnement, pour vraiment comprendre ce qu’il en retourne, donc tout à fait, j’espère que nous saurons célébrer les réussites, parce qu’elles sont probablement sur le radar de tout le monde en ce moment et qu’elles devraient être mises à l’avant-plan.

La sénatrice Jaffer : Vous avez parlé du projet pilote. Il devait y avoir un projet pilote pour Phénix, n’est-ce pas, mais il n’a pas eu lieu. Est-ce une autre leçon à tirer de tout cela, qu’il faut toujours mener un projet pilote?

M. Wallace : Il y a effectivement bien des leçons que nous tirons de cela, mais il ne suffit pas d’en tirer des leçons théoriques. Elles doivent ensuite teinter les valeurs de l’entreprise.

M. Wernick : Le rapport de Goss Gilroy présente six recommandations très simples, dont la tenue d’un projet pilote ou d’une quelconque forme de test. C’est une très bonne base pour améliorer la gestion de projets.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup.

Monsieur Wallace, j’aimerais connaître votre point de vue sur l’information financière et les indicateurs de rendement.

Qui s’occupe de maintenir l’Infobase du GC? Est-ce le Conseil du Trésor?

M. Wallace : C’est le Conseil du Trésor. Je vous remercie de souligner la mesure du rendement. C’est un domaine en constante évolution dans la structure de gouvernance du secteur public.

En tant que parlementaires, vous avez tout à fait le droit, tout comme vos collègues de la Chambre des communes, d’exiger de l’information de qualité. Vous êtes toujours en droit de vous attendre à cela de quiconque comparaît devant vous.

Les indicateurs de rendement évoluent avec le temps. C’est l’une des raisons à cela. Il y a une chose extrêmement importante — parce qu’il faut vraiment faire attention quand on parle d’incitatifs —, c’est que si nous ne nous satisfaisons pas de données incomplètes, c’est facile. Je pense que nous voulons éviter de n’avoir que des mesures parfaites, parce que la portée en sera trop étroite et que l’on se retrouvera avec des critères excessivement limités trop faciles à satisfaire.

Bien franchement, je pense que nous avons l’avantage de la robustesse d’un système vaste, d’une politique axée sur les résultats et de mesures du rendement très détaillées, conjuguées à toutes les responsabilités découlant du Cadre de responsabilisation de gestion qui sont confiées aux sous-ministres. Je ne cherche pas tant la perfection de chaque résultat ou mesure, parce que dans les faits, toutes ces choses sont extrêmement importantes dans notre façon de gérer et que le système évolue. D’ailleurs, je pense franchement qu’il s’améliore avec le temps.

La sénatrice Marshall : Quand vous analysez les indicateurs de rendement d’un ministère, le Conseil du Trésor dit-il aux sous-ministres : « Vous devez en faire un peu plus ici »? Faites-vous des commentaires? Avez-vous un rôle de rétroaction?

M. Wallace : Tout à fait. Les conversations sur les indicateurs de rendement ne sont pas toutes très agréables. Il ne faut pas oublier que c’est un travail essentiel...

La sénatrice Marshall : Je le comprends bien.

M. Wallace : Nous nous en soucions beaucoup. C’est une responsabilité fondamentale du Conseil du Trésor, et c’est une responsabilité fondamentale que nous prenons très au sérieux, que nos sous-ministres prennent très au sérieux aussi.

Nous avons ce dialogue. Nous voulons des mesures statistiquement robustes et significatives, puis que le ministère s’efforce de les satisfaire.

La réalité est telle qu’il n’y a pas d’indicateurs de qualité pour tous les programmes, donc il y en a, et ils sont importants, mais ils ne répondent qu’à une partie de la question. Je pense que l’alternative n’est pas la perfection, mais l’absence d’indicateurs. Bref, à bien des égards, je préfère de beaucoup des indicateurs imparfaits, parce que l’alternative serait de limiter le nombre d’indicateurs.

Franchement, j’accepterais, de manière générale, une politique fondée sur un grand nombre d’indicateurs, mais dont seulement ceux portant sur les principaux éléments seraient de qualité statistique, et ce sont ces indicateurs qui orienteraient les efforts du ministère au fil du temps.

La sénatrice Marshall : Qui décide quelle information entre dans l’Infobase du GC? La mettez-vous continuellement à jour? C’est le Conseil du Trésor qui l’alimente, n’est-ce pas?

M. Wallace : Nous y entrons l’information des ministères.

La sénatrice Marshall : Exercez-vous aussi une influence sur l’information déclarée et la façon dont elle est déclarée? Est-ce une autre chose qui s’améliore continuellement?

M. Wallace : Nous exerçons une influence, mais nous ne pouvons rien imposer.

La sénatrice Marshall : Merci.

La sénatrice Jaffer : J’aimerais aborder une autre chose complètement.

La sénatrice Marshall et moi faisons partie du Sous-comité sénatorial sur la diversité, donc je parle en nos deux noms. Je suis certaine que vous faites un travail intéressant, particulièrement à l’aide du nouveau formulaire de recensement et de vos gains en effectifs. J’aimerais que vous nous expliquiez tous deux où nous en sommes. Quel est l’objectif et quelle est l’orientation?

M. Wernick : Dans quel contexte?

La sénatrice Jaffer : Dans la fonction publique, pour les quatre groupes que sont les femmes, les Autochtones, les minorités visibles et les personnes handicapées.

M. Wernick : C’est un vaste sujet, et je sais que vous y avez déjà beaucoup réfléchi.

La sénatrice Jaffer : Je ne veux pas vous mettre dans l’embarras.

M. Wernick : Non. Je serai heureux de me mouiller. Je vous renverrai à mon rapport, qui aborde la question de l’inclusion. Je n’utilise plus le mot « diversité ». La diversité au Canada est un fait. En revanche, l’inclusion est un acte volontaire d’intégration. C’est une image que j’utilise beaucoup. Je la tiens peut-être de vous.

Le Parlement nous a donné une structure législative qui établit des catégories aux fins de l’équité en emploi, mais nous travaillons aussi à d’autres aspects de la diversité, comme l’âge, la génération, pour qu’on puisse gérer des baby-boomers comme moi et des milléniaux comme mon fils dans un même environnement de travail. On parle aussi beaucoup de la communauté LGBTQ depuis quelques années. J’étais très fier de lui présenter nos excuses pour la façon dont ses membres ont été traités dans la fonction publique. Il y a constamment des problèmes qu’on pourrait attribuer à l’intersectionnalité.

Je me préoccupe de ces questions à l’échelle de la fonction publique, et ce qu’on peut faire, c’est de se demander qui on recrute, qui on accompagne, qui on promeut. C’est ce qui fera une différence. Notre fonction publique doit être le reflet du pays. Je pourrais vous en parler pendant des heures.

J’assume personnellement la responsabilité du groupe des sous-ministres. C’est moi qui recommande la nomination de ces hommes et de ces femmes au premier ministre. Soyons clairs, je le vois comme un portefeuille, qui comprend entre 70 et 80 personnes. Leur nombre exact varie, au gré de la création ou de la fusion de ministères. Chaque nomination et chaque promotion constituent une chance d’influencer la composition du groupe.

J’ai l’occasion et la responsabilité de le faire. Nous atteignons presque la parité hommes-femmes. Les francophones y sont représentés en bien plus grand nombre.

[Français]

Il y a une diminution dans la représentation de francophones parmi les postes de sous-ministres.

[Traduction]

Il nous reste du pain sur la planche pour inclure ce qu’on appelait les minorités visibles, et il nous reste aussi du pain sur la planche pour inclure les Autochtones, mais les solutions en place dépendent surtout des gestionnaires intermédiaires, des systèmes d’éducation et d’apprentissage et de tout ce qui peut doter les candidats des compétences nécessaires pour être admissibles à une promotion. C’est l’approche par portefeuille. Nous sommes résolument déterminés à favoriser l’inclusion.

Franchement, il nous reste encore beaucoup à faire, nous ne pouvons laisser aucune voix ni aucun talent de côté.

La sénatrice Jaffer : J’ai présidé le Comité des droits de la personne. J’insistais toujours pour que les salaires des sous-ministres dépendent de leur gestion de la disponibilité dans la population active et de l’inclusion.

Ce n’est pas juste, parce qu’il peut y avoir d’autres enjeux, mais je vous invite à y réfléchir.

Il y a une autre chose qui me dérange vraiment, et j’aimerais que vous y réfléchissiez tous les deux : il n’y a pas de formation en français en Colombie-Britannique comme il y en a ici. Les gens qui travaillent pour vous en Colombie-Britannique me disent constamment qu’ils ne bénéficient pas de chances égales, parce qu’ils n’ont pas accès à la même formation.

Je vous invite donc tous deux à réfléchir à cela, parce que je l’entends constamment en Colombie-Britannique.

M. Wernick : Je l’admets, c’est la raison pour laquelle l’école essaie d’offrir le plus de cours en ligne possible; l’outil GC Campus offre un logiciel d’apprentissage des langues gratuit et accessible. Nous comptons même le rendre gratuit pour le public, pour tous les Canadiens. Nous essayons d’utiliser la vidéoconférence et d’autres techniques pour que les gens n’aient pas à se rendre jusqu’à Asticou, à Ottawa-Gatineau, pour recevoir de la formation linguistique. Nous essayons d’interpeller les gens le plus tôt possible, pour qu’ils soient admissibles à des promotions ensuite, parce que nous nous attendons à ce que les directeurs qui supervisent d’autres fonctionnaires se débrouillent dans les deux langues.

Il reste toujours beaucoup à faire, mais il y a une volonté réelle. Environ 60 p. 100 des fonctionnaires travaillent ailleurs que dans la région de la capitale nationale. Ces talents méritent aussi d’être inclus et développés.

Le président : Honorables sénateurs, avec votre indulgence, j’aimerais poser deux questions. si vous souhaitez me répondre par écrit, je l’apprécierai aussi.

Beaucoup de ministères ont fourni au comité le plan d’infrastructure du gouvernement, qui représente des milliards de dollars. Nous avons été étonnés de constater que 2 658 projets sont considérés confidentiels. Je souhaite porter à votre attention que 100 p. 100 des projets soumis par Affaires autochtones et du Nord sont confidentiels, des projets qui représentent au total un investissement de 800 millions de dollars.

Pouvez-vous expliquer au public canadien pourquoi ces projets seraient confidentiels? Ils représentent environ 1,6 milliard de dollars pour l’ensemble du Canada.

M. Wernick : Je ne connais pas bien la situation. Je pourrai vérifier avec le ministère.

Le président : Nous souhaitions porter la chose à votre attention. Merci.

Quelles sont les prochaines étapes dans l’affaire Phénix? Pourriez-vous, par exemple, nous donner une liste des mesures prévues à court terme, à moyen terme, d’ici deux ou trois ans, mettons, et à long terme? Quelle est l’orientation?

M. Wernick : Mon collègue a mentionné une lettre, qui a été envoyée aujourd’hui par les deux ministres au Comité des comptes publics de l’autre Chambre. Nous pouvons la remettre à la greffière pour que vous l’ayez tout de suite. Elle est publique, si je ne me trompe pas. Les presses sont encore chaudes, les deux ministres ont fait une déclaration claire sur les prochaines étapes.

Le président : Je vous prierais de la remettre à la greffière pour que nous puissions la transmettre à tous les sénateurs.

Sur ce, nous vous avions dit que nous vous garderions environ une heure. Nous en sommes à une heure deux minutes. Avant de vous remercier, je vous invite à conclure.

M. Wernick : Je peux bien rester ici jusqu’à minuit, si vous le souhaitez, mais je respecte votre temps.

J’ai trois fonctions, comme je l’ai expliqué : je suis le sous-ministre du premier ministre et le secrétaire du Cabinet. À titre de chef de la fonction publique, je me sens l’obligation de communiquer les histoires des autres fonctionnaires, donc je vous recommande de lire mon rapport annuel et de consulter mon site web. Tout ce que j’ai dit ici est de nature publique, vous le trouverez mot pour mot. Je suis très heureux d’avoir ce dialogue avec l’organe législatif du gouvernement. Je suis greffier du Conseil privé depuis plus de deux ans, et je n’avais jamais été invité avant cette semaine à venir parler de la fonction publique aux comités. Je préférerais avoir davantage l’occasion d’entretenir ce dialogue, parce que nous vivons dans un pays qui jouit toujours, malgré les turbulences mondiales, de la liberté de la presse, de tribunaux indépendants, d’une législature vivante bénéficiant de l’appui d’agents du Parlement et d’une fonction publique impartiale très solide. Ce dialogue entre ceux d’entre nous qui travaillons au sein de l’organe exécutif et ceux d’entre vous qui travaillez au sein de l’organe législatif ne peut qu’être positif pour le pays.

Le président : Monsieur Wallace?

M. Wallace : Je n’ai rien à dire.

Le président : Sur ce, je souhaite remercier nos deux plus hauts bureaucrates de tout ce dont ils nous ont fait part. Si vous avez d’autres renseignements à nous fournir en rétrospective, quand vous lirez la transcription, si vous voulez ajouter quelque chose, n’hésitez pas à nous le transmettre par la greffière.

Sur ce, honorables sénateurs, je vous remercie infiniment. Vous avez su faire preuve de beaucoup de professionnalisme, parce que je sais, de par mon ancienne vie, que les Canadiens sont très respectés partout dans le monde. Sur ce, je vous dis merci.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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