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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule no 6 - Témoignages du 5 octobre 2016 (Réunion du matin)


VANCOUVER, le mercredi 5 octobre 2016

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 8 h 2, pour poursuivre son étude sur les défis liés à l'accès aux écoles françaises et aux programmes d'immersion française de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Je vous souhaite la bienvenue à l'audience publique du Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je m'appelle Claudette Tardif, sénatrice de l'Alberta. J'ai l'honneur de présider la réunion ce matin.

Avant de passer la parole aux témoins, j'invite les membres du comité à se présenter, en commençant à ma gauche.

La sénatrice Gagné : Bonjour, je m'appelle Raymonde Gagné, sénatrice du Manitoba.

Le sénateur Maltais : Bonjour, je m'appelle Ghislain Maltais, sénateur du Québec.

Le sénateur McIntyre : Bonjour, je m'appelle Paul McIntyre, sénateur du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Jaffer : Je m'appelle Mobina Jaffer, sénatrice de la Colombie-Britannique. Je vous souhaite la bienvenue.

La présidente : Encore une fois, bienvenue à tous. Aujourd'hui, nous recevons des témoins du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique. Nous avons eu l'occasion de vous rencontrer de manière non officielle lors de nos visites aux écoles Rose-des-vents et Jules-Verne. Ce matin, toutefois, il s'agit d'une rencontre officielle.

À de nombreuses reprises, le comité a entendu parler des défis entourant le manque d'accès à l'apprentissage du français comme langue de la minorité en Colombie-Britannique. Cette problématique touche les écoles françaises de la minorité. Elle soulève des questions au sujet de la reddition de comptes et du financement du gouvernement fédéral dans ces deux secteurs. Bien que cette problématique ne se limite pas à cette province, le comité est d'avis que la Colombie-Britannique représente un cas typique qui mérite un examen approfondi. Nous sommes donc heureux d'être ici ce matin pour vous recevoir.

Nous sommes heureux d'accueillir M. Bertrand Dupain, directeur général, M. Sylvain Allison, secrétaire-trésorier, Mme Johanne Asselin, directrice de l'école Anne-Hébert ainsi que M. Michel Tardif, président du Regroupement des directions francophones et directeur des écoles La Passerelle, à Whistler, et La Vallée, à Pemberton. Bienvenue à vous tous.

Monsieur Dupain, c'est vous qui commencez. Par la suite, les sénateurs vous poseront des questions. Veuillez être aussi bref et concis que possible durant votre exposé tout en transmettant, bien sûr, l'ensemble de votre message. Je vous remercie.

Bertrand Dupain, directeur général, Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique : Je vous remercie, madame la présidente. J'essaierai d'être bref et concis, selon votre souhait.

Tout d'abord, au nom du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique, je tiens à vous remercier de nous avoir invités à comparaître devant votre comité. Comme je vous l'ai déjà mentionné, nous avons parfois été oubliés durant certaines de ces rencontres, pas avec le Sénat, mais avec d'autres organismes provinciaux et fédéraux. C'est extrêmement important pour nous de participer à ces rencontres.

Je ne présenterai pas le personnel du conseil scolaire, puisque vous l'avez déjà fait. Toutefois, j'aimerais me présenter brièvement. Comme vous l'avez sans doute constaté en parcourant ma biographie, je suis issu de l'immigration. Je suis originaire de France; mon épouse est Japonaise. Nous avons choisi le Canada parce qu'il représente pour nous un modèle de société. Nous voulions que nos enfants grandissent au Canada et non dans nos sociétés respectives. Cela nous tenait à cœur tout comme le bilinguisme et la tolérance, qui sont des valeurs canadiennes par excellence.

Je suis enseignant depuis l'âge de 21 ans. J'ai fait partie des premiers enseignants à être engagés par le conseil scolaire, que je chéris particulièrement. Au sein du conseil scolaire, j'ai occupé les postes d'enseignant, de directeur adjoint, de directeur, de directeur général adjoint, et, depuis deux ans et demi, je suis directeur général. J'ai également assuré la vice-présidence du Syndicat des enseignants francophones pendant cinq ans. Voilà pourquoi le conseil scolaire est particulièrement important pour moi.

Mes deux filles fréquentent également une école du Conseil scolaire francophone. Elles seront un jour, je l'espère, trilingues. Il s'agit d'un véritable cadeau de pouvoir élever ses enfants dans une province à majorité anglophone qui donne accès à un programme francophone. C'est un programme qui me passionne beaucoup. C'est pourquoi j'aimerais vous faire part de ma passion pour ce programme.

Le Conseil scolaire francophone entame sa 20e année. Comme je l'ai indiqué dans mon document, le conseil a été fondé par la loi scolaire. J'ai indiqué les références que vous pourrez consulter. Ce conseil est reconnu pour ses différents aspects.

En fait, je souhaite attirer votre attention sur deux points. Nous sommes le seul conseil scolaire francophone de la province, ce qui est un peu différent de l'Alberta ou d'autres provinces. Et nous sommes les seuls habilités à offrir le programme francophone dans l'ensemble de la Colombie-Britannique. Nous possédons 38 établissements scolaires répartis partout dans la province. Vous constaterez que cela pose parfois certains défis.

Les admissions sont régies par l'article 23 et la politique P-30-301 du ministère. Les parents dont les élèves sont inscrits au conseil scolaire sont des ayants droit. Donc, nous respectons scrupuleusement cet article.

Ensuite, il importe de mentionner que le ministère — et vous constaterez que cela aura un impact sur mon exposé — reconnaît notre caractère distinct, c'est-à-dire que notre but est différent du programme d'immersion. C'est extrêmement important pour moi de clarifier cette position pour que vous compreniez que nous sommes un conseil scolaire particulier.

Le conseil scolaire a été créé en 1997. Dans le document que je vous ai transmis, à la page 3, vous remarquerez que les effectifs ont pratiquement triplé au cours des 20 dernières années. Nos effectifs augmentent annuellement. L'année dernière, nous avons connu une augmentation de 4 p. 100. D'après les chiffres que nous avons obtenus il y a quelques jours, les effectifs s'élèveront encore cette année à 4 p. 100. Notre conseil scolaire est en pleine santé, n'en déplaise aux gens qui croient que nous sommes sur le point de disparaître. Nous sommes l'un des seuls conseils scolaires de la province à connaître un taux de croissance aussi élevé, à l'exception d'un ou deux autres. Cette pleine santé dépend de plusieurs choses. Veuillez vous reporter aux pages 4 et 5 du document. Nous abordons tout d'abord les défis auxquels nous sommes confrontés et les solutions que nous souhaitons mettre en œuvre. La présente rencontre est très importante parce que les solutions proposées relèvent principalement du gouvernement fédéral. Bref, nous avons besoin de votre aide.

Premièrement, pourquoi cet engouement pour le Conseil scolaire francophone? J'aurais pu préciser de nombreuses raisons, mais j'ai surtout voulu attirer votre attention sur la qualité de nos programmes. Nous sommes véritablement un conseil scolaire avec un taux de succès très élevé. J'ai voulu présenter ici les résultats du Programme pancanadien d'évaluation de 2013. Comme vous le voyez dans le document, à la page 7, de tous les conseils scolaires francophones, y compris celui du Québec, c'est la Colombie-Britannique qui obtient les meilleurs résultats dans l'examen de sciences de 8e année. Il s'agit d'une évaluation réalisée par cycle. Vous pouvez constater qu'avec le test international PISA en 2013, nos élèves de 8e année ont obtenu un score de 495, alors que celui du Québec était de 485. Vous pouvez également voir les autres résultats. Je pense que les gens connaissent la qualité de notre programme, et cela explique un peu l'augmentation de nos effectifs annuellement.

D'où vient la qualité de ce programme? Tout d'abord, c'est la qualité du personnel qui forme le Conseil scolaire francophone. Nous avons près de 900 employés qui travaillent au Conseil scolaire francophone. Ce sont des gens dévoués et passionnés. J'aimerais saluer Mme Liechtele, la présidente du Syndicat des enseignantes et enseignants du programme francophone de la Colombie-Britannique, que vous rencontrerez tout à l'heure, ainsi que ses membres. Le personnel enseignant et administratif de nos écoles est fabuleux. M. Tardif est le président du Regroupement des directions francophones. Ils ont la passion de la francophonie. Alors, quand on nous a déclarés moribonds — excusez-moi de revenir là-dessus, mais ce sont des propos que je trouve extrêmement choquants —, cela ne rend pas hommage à un personnel extrêmement compétent, dévoué et passionné envers la francophonie. Nous souhaitons également continuer à former ce personnel. J'ai indiqué ci-dessous quelques éléments pour vous montrer les programmes de formation que nous souhaitons réaliser en collaboration avec les syndicats. Nous accordons énormément d'importance au programme de formation du personnel.

Un autre aspect important, que vous trouverez à la page 8, explique la qualité et le succès de notre programme, et c'est la volonté d'avoir recours à des chercheurs scientifiques, avec des données scientifiques. Nous avons créé un partenariat avec deux professeurs internationalement connus, Mme Marie-France Morin, de l'Université de Sherbrooke, et M. Denis Alamargot, de l'Université de Créteil, en France, qui nous aident à mettre en place des stratégies gagnantes.

L'une des grandes raisons de leur participation et de notre partenariat était les tablettes numériques. Nous tentons de déterminer si, comme dans certains pays, on est passé du texte écrit à la tablette numérique. Avant de nous lancer dans ce système, nous souhaitons obtenir l'avis d'experts. Ce projet concerne les élèves de la maternelle à la 1re année. L'an dernier, nous avons entamé une recherche auprès de 140 élèves. Nous souhaitons poursuivre cette recherche au cours des prochaines années pour nous assurer que nous nous dirigeons dans la bonne voie. Cela compte beaucoup pour nous.

Nous avons également une avance technologique. Le conseil scolaire a énormément investi en informatique. Vous comprendrez où je veux en venir. Nous avons une école virtuelle. Je vous expliquerai tout à l'heure les problèmes que cela pose.

Nos enseignants et nos élèves disposent d'ordinateurs. C'est primordial parce que nous voulons qu'ils soient connectés avec l'ensemble de la francophonie. Nous faisons partie de la francophonie la plus éloignée, la plus à l'ouest du Canada. De toute évidence, les nouvelles technologies nous permettent de pallier ce problème. Comme vous le savez, il est de plus en plus question des activités de codage dans les programmes de curriculum. C'est un aspect que nous voulons développer avec nos élèves.

Nous avons de nombreux défis à relever, particulièrement en ce qui concerne l'éducation. M. Allison, qui est secrétaire-trésorier, abordera l'aspect matériel.

L'un des principaux défis auxquels nous faisons face est le pourcentage de français parlé à la maison. Vous pouvez voir quelques exemples à la page 11. Ces données datent de 2013, mais elles montrent, entre autres, la répartition du français parlé à la maison. Comme vous le voyez, 36,4 p. 100 des familles déclarent que le français — ce sont nos élèves à nous et non ceux de la Colombie-Britannique — est la langue parlée à la maison. Je suis moi-même parent, mon épouse parle japonais avec mes filles, je parle français; entre nous deux, nous parlons anglais. C'est une forme de petite tour de Babel. C'est un tour de force. En tant que parent, c'est mon devoir de le faire. Je suis conscient que d'autres parents n'ont pas cette possibilité ni le temps de le faire, mais c'est un fait que nous constatons. Nos élèves sont de moins en moins exposés au français dès leur enfance au sein de leur famille.

De plus, depuis 2009, nous enregistrons une baisse en ce qui concerne le « parler français » à la maison. C'est un défi de taille. C'est pour cette raison que notre partenariat avec la fédération des parents est extrêmement important. Il s'agit d'un défi que nous devons relever.

L'autre problème concerne la rétention au secondaire. En vous reportant au premier tableau sur les effectifs, vous constaterez que nos membres au secondaire sont très faibles par rapport à tous les élèves qui rentrent à la maternelle. La première chose qu'il faut imaginer, c'est que nous n'avons pas des écoles secondaires partout. Et là, je laisserai M. Allison aborder cette question. Nous rêvons d'avoir des écoles secondaires partout. Nous avons près de six écoles dites « homogènes » et quatre ou cinq écoles hétérogènes, c'est-à-dire que les cours sont donnés en français dans des écoles anglophones. Nous n'avons que six écoles homogènes. Je regarde le sénateur Maltais et j'aimerais m'entretenir avec lui plus longtemps à propos de ces six écoles. Donc, cinq de nos écoles sont homogènes, de la maternelle à la 12e année. Personnellement, je trouve que c'est fantastique. Et une seule des écoles que vous avez visitées est de la 7e à la 12e année. Bien que l'autre école à côté soit très proche, vous le savez maintenant. Nous avons donc cinq programmes de la maternelle à la 12e année et, à mon avis, c'est l'une des forces du conseil scolaire. Vous aurez l'occasion d'en visiter une demain.

J'aimerais revenir brièvement sur le secondaire. Dans le graphique que je vous ai transmis, vous verrez que nous connaissons, depuis quelques années, une rétention importante et sensible en ce qui concerne nos effectifs au secondaire. C'est sans doute grâce à l'apport de la qualité de notre programme.

Un autre problème auquel nous devons faire face est la reconnaissance du programme. Le ministère de la Colombie-Britannique — et je parle ici principalement de l'éducation — a du mal à reconnaître notre programme, même s'il y a une politique, même s'il le déclare comme un programme véritablement distinct de l'immersion.

J'ai déjà abordé la question du diplôme. Nous nous sommes battus pendant des années afin que le diplôme porte la mention « programme francophone ». Le même diplôme était le même pour l'immersion et pour les francophones. Nos élèves disaient : « Pourquoi je resterais ici puisque, en fin de compte, si je vais en immersion, j'obtiendrai le même diplôme? » Néanmoins, nous avons gagné cette bataille grâce aux efforts de notre conseil d'administration. Mais cela vous donne une idée du genre de petits détails sur lesquels nous devons nous insister.

Nous sommes actuellement en conflit à propos de l'école virtuelle. Le ministère demande que notre école virtuelle ressemble à toutes les écoles virtuelles. Il y a un programme qui s'appelle « Distributed Learning ». Le problème, c'est que notre situation est différente. C'est un cas qui nous oppose. Aujourd'hui, une lettre a été envoyée au ministère pour essayer de leur expliquer notre position.

Un autre défi important, et je l'ai mentionné en introduction, relève de la répartition de nos écoles dans l'ensemble de la province et des différents coûts. Des petits groupes de francophones sont disséminés un peu partout dans la province à des centaines, voire des milliers de kilomètres les séparant les uns des autres. Vous verrez à la page 13 un exemple de ces différences. Nous avons des écoles qui ont 750 élèves et d'autres qui n'en ont que 13 ou 15. Et nous avons, comme vous pouvez le voir, un coût par élève qui peut aller de 6 512 $ à 25 000 $, parce que c'est évident que c'est presque des écoles qui doivent vivre en autarcie. Et nous devons offrir à ces 15 élèves, répartis à travers la province, autant de services que les grandes écoles des deux grands centres urbains.

Malgré tout cela, et c'est là que l'aide du fédéral est extrêmement importante pour nous, nous avons des projets pour essayer de compléter, d'enrichir et d'avancer dans notre progression. Et nous voulons présenter ces solutions.

Une des solutions que nous avons lancées cette année c'est principalement les classes de quatre ans. C'est quelque chose, en Colombie-Britannique, qui n'existe pas. Nous sommes le premier conseil scolaire à avoir lancé ce programme de quatre ans. Nous avons quatre écoles qui ont lancé ce programme. Actuellement, deux sont ouverts. Il s'agit des écoles à Mission et à Chilliwack. Et c'est évident que nous ne recevons du provincial aucun financement pour cela. Mais c'est une réponse que nous voulons apporter au français à la maison. Nous pensons que si nous commençons le plus tôt possible à mettre les enfants dans un environnement francophone, leur scolarité sera, pour eux, facilitée.

L'autre chose que nous voulons mettre en place et que nous mettons en place depuis quelques années, c'est le Baccalauréat international. Il est financé aussi par des fonds fédéraux à travers le PLOE, ainsi que les cours de métiers. Nous sommes à la recherche de partenaires pour nous aider avec les cours de métiers, avec Éducacentre. Parce qu'il est évident qu'un des grands aspects de notre problème, en Colombie-Britannique, c'est que nous avons très peu de débouchés économiques pour nos élèves. Il y a très peu de débouchés pour la francophonie, excepté au gouvernement fédéral, et j'ai beaucoup aimé une des questions que vous avez posées à l'école Jules-Verne sur la Chambre de commerce. Comme ils vous l'ont dit, la Chambre de commerce a une action très limitée en français. C'est donc pour nous quelque chose d'important d'amener nos élèves à s'apercevoir que le français amène des débouchés économiques. Ce n'est pas évident pour des élèves nés en Colombie-Britannique qui s'aperçoivent que tout est en anglais, ou même maintenant dans d'autres langues comme le chinois, par exemple, pour Richmond ou Vancouver.

Il est important d'établir des relations postsecondaires avec les universités. Hier, nous étions à SFU. On en a parlé un petit peu. C'est évident que nous sommes le plus gros employeur de francophones de la province, avec 900 personnes. Malheureusement, aucun de nos enseignants ou presque n'est formé en Colombie-Britannique. Il faut qu'ils aillent vers l'Alberta ou alors il faut qu'on aille les chercher. Et cela, c'est quelque chose que nous déplorons et qui serait une force.

Nous essayons aussi de développer les rencontres avec nos élèves de différentes écoles. Donc nous les rassemblons. Cela peut paraître simple, quand on vit au même endroit, mais quand vous avez des écoles qui sont à 1 000 kilomètres, il faut véritablement un tour de force et énormément d'argent pour permettre ces rencontres. Donc nous utilisons énormément les voies technologiques. Mais, de temps en temps, le côté physique est important, surtout lorsqu'on parle d'élèves de 8e ou 9e année. Donc ils aiment se rencontrer, ils aiment comprendre que la francophonie n'est pas limitée dans leur petite zone et que la francophonie rayonne au Canada et à travers le monde. C'est donc un des aspects pour lequel nous utilisons des fonds fédéraux. Et nous essayons également d'ouvrir notre programme sur des nouveautés. Vous savez qu'actuellement, tout ce qui est environnemental est extrêmement important. Et nous voulons montrer que la francophonie est véritablement ouverte sur les problèmes climatiques et autres. Et donc tout ceci, ce sont les fonds fédéraux qui nous permettent de les offrir à nos élèves.

En conclusion, je crois que nous avons un conseil scolaire dynamique et vibrant, qui est suivi par la communauté francophone. Nous ne sommes pas des marginaux ni des rêveurs. Cette année, le conseil scolaire a élaboré son plan stratégique. Quatre mille personnes y ont répondu, ce qui veut dire que 4 000 personnes de la communauté francophone ont participé à ce plan stratégique. C'est sûr que ce n'est pas toute la province, mais 4 000, cela représente déjà énormément de personnes. Et nous avons pu mettre en place un nouveau plan stratégique que je vous présenterai demain lors de votre visite dans l'une de nos écoles.

Nous voulons continuer à être ce flambeau parce que pour moi — et je reviendrai brièvement sur le choix que j'ai fait en venant au Canada —, la francophonie c'est plus qu'une langue. Il s'agit de valeurs que le Canada promeut et représente.

Je vous remercie.

La présidente : Je vous remercie, monsieur Dupain, pour votre présentation.

Monsieur Allison, la parole est à vous.

Sylvain Allison, secrétaire-trésorier, Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique : Je vous remercie de me donner l'occasion de faire une présentation ce matin.

J'aimerais ajouter quelques précisions sur le curriculum de Mme Asselin et de M. Tardif. M. Tardif est directeur des écoles élémentaires de La Vallée, à Pemberton, et La Passerelle, à Whistler. Il est avec nous depuis 12 ans. Il a aussi occupé le poste de directeur à l'école MA-12, à Comox, pendant deux ans. Mme Asselin est la directrice de l'école Anne-Hébert depuis trois ans. Elle a aussi été directrice adjointe, pendant six ou sept ans, à l'école Victor-Brodeur. Mme Asselin a 29 ans d'expérience en éducation en milieu minoritaire.

Je me présente, je m'appelle Sylvain Allison. Je suis secrétaire-trésorier au Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique. Comme vous l'avez probablement remarqué, je suis Québécois d'origine. J'ai déménagé en Colombie-Britannique en 1991 où j'ai rencontré mon épouse et où j'y ai fondé une famille. Mes deux enfants sont bilingues. Un ici, en Colombie-Britannique et l'autre à Ottawa. Dès la petite enfance, mes deux enfants ont fréquenté la garderie et la prématernelle en français. Ils ont fréquenté l'école élémentaire homogène francophone de Prince George, un établissement scolaire du CSF. Je dois avouer que sans l'aide de ces services, mes enfants ne seraient probablement pas bilingues aujourd'hui. C'est grâce à ces services que mes enfants sont devenus bilingues. Je suis marié à une anglophone. C'est donc encore plus difficile de transmettre une autre langue dans une famille exogame.

Je tiens à préciser que le CSF a bénéficié de fonds fédéraux par le passé. Il s'agit de l'entente de 2002-2008 de 15 millions de dollars. Plusieurs écoles ont bénéficié de ces fonds : l'école Gabrielle-Roy pour l'aménagement d'une garderie et d'une palestre, l'agrandissement du gymnase, ainsi que l'aménagement d'un théâtre; l'école André-Piolat, ici, à Vancouver-Nord pour l'aménagement d'un théâtre, d'un foyer communautaire et l'agrandissement du gymnase et d'une bibliothèque; l'école Jules-Verne, que vous avez visitée, pour l'aménagement d'un théâtre et l'agrandissement du gymnase et de la bibliothèque; et l'école Victor-Brodeur pour l'aménagement d'une garderie et d'un centre d'art. J'allais oublier de mentionner qu'une garderie a aussi été aménagée à l'école André-Piolat grâce à l'entente de 2002-2008 de 15 millions de dollars avec le gouvernement fédéral.

Depuis ce temps, nous avons obtenu à deux reprises des fonds fédéraux pour l'aménagement d'espaces communautaires à la suite de demandes complètement distinctes. L'école Mer-et-montagne, à Campbell River, a rénové son gymnase existant. On avait construit une école neuve, mais on avait gardé le vieux gymnase de l'école qui avait tout simplement été rénové. De plus, un centre de la petite enfance a été aménagé grâce à ce financement.

Plus récemment, l'école des Pionniers-de-Maillardville, à Fort Coquitlam, qui est actuellement en construction, où nous avons bénéficié de 3,6 millions de dollars pour offrir un programme à l'intention des enfants de quatre ans. Là aussi des espaces publics communautaires ont été aménagés pour accueillir la communauté. Ce sont des initiatives qui sont grandement appréciées.

Nous bénéficions aussi de fonds fédéraux pour certains programmes dont le Baccalauréat international qui, comme l'a mentionné M. Dupain, est offert dans plusieurs écoles. Nous souhaitons que ce programme de quatre ans prenne de l'expansion.

On facilite l'apprentissage grâce à l'accès aux technologies. On dispose de 4 000 ordinateurs portables pour nos élèves de la 4e à la 12e année. Les élèves en bas âge ont accès à plus de 1 000 tablettes électroniques. Ce financement provient en partie du gouvernement fédéral. On bénéficie de fonds en faveur des programmes d'intégration à la culture francophone pour les activités quotidiennes dans nos écoles. Ce sont des fonds dont nous bénéficions toujours et pour lesquels nous sommes très reconnaissants.

Toutefois, certaines dispositions dans l'entente du PLOE ne répondent plus à nos besoins à l'heure actuelle. C'est la raison pour laquelle le Conseil scolaire francophone souhaite faire partie de l'entente Colombie-Britannique—Canada pour les prochains financements du PLOE.

À titre d'exemple, les fonds du gouvernement fédéral ne devraient plus servir à financer l'éducation essentielle. Les programmes de francisation et d'alphabétisation devraient être financés par le gouvernement provincial. C'est leur financement de base qui devrait s'en charger. Les fonds fédéraux devraient servir à financer des programmes d'innovation à l'enseignement. Ils devraient plutôt servir à financer le démarrage de nouvelles écoles.

Depuis mon entrée en fonction en tant que secrétaire-trésorier, en 2010, j'ai eu l'occasion de mettre en place deux programmes francophones en Colombie-Britannique, à Revelstoke et à Fernie, grâce à des parents intéressés et passionnés par la francophonie, par l'éducation de leurs enfants en français. J'ai mis sur pied ces programmes sans l'aide du gouvernement provincial. C'est une initiative du Conseil scolaire francophone financée par le Conseil scolaire francophone. Lorsqu'on démarre des petits programmes dans les régions, cela coûte très cher, notamment pour la dotation du personnel puisque les écoles accueillent 8, 10, 12 élèves. On a besoin d'un enseignant, du temps préparatoire pour l'enseignement, du personnel d'aide pédagogique, un secrétariat. Aussi, étant donné que ce sont des régions éloignées, on ne peut pas faire les deux écoles. Contrairement à M. Tardif qui a deux écoles assez près l'une de l'autre, à Pemberton et à Whistler, où il est possible de faire les deux écoles. Par contre, lorsqu'on est à Fernie et à Revelstoke, c'est impossible de le faire. Cela prend une direction sur place. Ce sont donc des programmes qui coûtent extrêmement chers à démarrer tant et aussi longtemps que le nombre critique d'élèves n'est pas atteint. On souhaite obtenir des fonds fédéraux pour nous aider à démarrer ces petits programmes lorsqu'on reçoit des demandes.

On a aussi besoin de fonds pour créer des programmes d'enseignement innovateurs. Par exemple, des programmes de concentration en sports ou en arts ainsi que des programmes techniques. On en offre quelques-uns, mais on a besoin de fonds supplémentaires pour accroître l'offre de nos programmes à toute la gamme de nos élèves, non seulement ceux qui sont orientés vers un succès académique, mais aussi ceux qui souhaitent un programme technique. Ce serait important que le gouvernement fédéral nous aide à ce chapitre.

Offrir une plus grande variété de cours optionnels est très important pour éviter l'abandon scolaire. Comme on le sait très bien, c'est au secondaire que l'on perd le plus d'élèves. J'entends souvent dire qu'on aimerait offrir une plus grande variété de cours optionnels pour garder nos élèves à l'école. Le ministère de l'Éducation de la Colombie-Britannique ne finance pas de tels cours. Je pense que le gouvernement fédéral pourrait définitivement nous aider avec ceci.

On est le seul conseil scolaire en Colombie-Britannique qui n'offre pas l'éducation aux adultes. Il serait important de commencer à offrir un programme aux adultes francophones qui n'ont pas terminé l'école secondaire.

Il serait important de créer un fonds en faveur du transport pour améliorer l'accès à nos écoles. Le transport est sous-financé par la province. Ce serait extrêmement important de recevoir des fonds fédéraux pour encourager les familles à envoyer leurs enfants dans une école francophone lorsqu'elles en ont envie. La distance décourage tellement de familles en ce moment. On parle d'une heure dix, une heure quinze, une heure vingt de transport, matin et soir. Cela prend des guerriers pour inscrire des enfants dans nos écoles. Ceci est extrêmement important pour nous.

De plus, il faudrait aussi créer un fonds pour la construction d'écoles. J'irais jusqu'à dire que le gouvernement fédéral pourrait construire des écoles en entier, mais, du moins, on pourrait conclure une entente comme celle de 2002-2008 qui nous permettrait d'obtenir le financement nécessaire pour l'aménagement de locaux communautaires. On pourrait montrer à la province que le gouvernement fédéral participe à la construction des écoles. Cela inciterait peut-être la province à financer la construction d'écoles dans les régions qui en ont grandement besoin. Une entente comme celle de 2002-2008 serait perçue de façon très positive par la province.

Enfin, je propose de créer un fonds pour offrir des programmes beaucoup plus élaborés que ceux qu'on a à l'heure actuelle dans les établissements postsecondaires, que ce soit à l'Université Simon Fraser ou dans d'autres universités. Je n'aime pas le mot que je vais utiliser, mais nous produisons des enfants francophones, des élèves francophones jusqu'à la 12e année. Ce serait bien qu'ils puissent avoir la chance de rester en Colombie-Britannique. Ce sont des enfants fiers. Il faut miser sur leur fierté de parler français, de vivre en français en Colombie-Britannique. Je pense que s'il y avait du financement pour le faire, mon fils serait peut-être ici, à Vancouver, pour ses études postsecondaires.

Je vous remercie.

La présidente : Je vous remercie, monsieur Allison.

Nous allons maintenant passer à la période des questions. La première question sera posée par le sénateur McIntyre qui sera suivi par la sénatrice Jaffer.

Le sénateur McIntyre : Je vous remercie tous pour vos présentations.

Monsieur Dupain, monsieur Allison, je pense que vous avez bien résumé la situation. D'ailleurs, dans votre exposé, monsieur Dupain, vous avez porté à notre attention les trois points principaux, c'est-à-dire l'engouement pour le programme francophone, les défis majeurs et les initiatives en cours.

Monsieur Tardif, je comprends que vous êtes directeur de deux écoles primaires, c'est-à-dire l'école La Passerelle, à Whistler, et l'école La Vallée, à Pemberton. Alors que madame Asselin, vous êtes la directrice de l'école Anne-Hébert.

Cela dit, j'ai deux questions qui s'adressent au groupe. Quelles sont les activités parascolaires offertes pour favoriser l'apprentissage du français à l'extérieur de la salle de classe?

Peut-être que Mme Asselin ou M. Tardif sont mieux placés pour répondre à cette question, ou M. Dupain.

M. Dupain : Je vais commencer et je donnerai la parole ensuite à M. Tardif et à Mme Asselin.

Elles sont multiples et je pense que vous allez être surpris de voir l'ingéniosité de notre personnel de direction et d'enseignement. Cela va de l'activité, puis je ne veux pas trop dévoiler, mais l'activité parascolaire qui est celle du club de sports ou du groupe de théâtre. Mais cela va également, pour certaines écoles et pour une grande partie d'entre elles, au développement. Par exemple, on s'est aperçu que, dans la cour d'école, les élèves — et là, je parle principalement des élèves de MA-7 — naturellement vont se remettre à parler anglais et qu'ils perdront cette possibilité de maîtriser le français de tous les jours. On va avoir des enfants — et je prends l'exemple de mes filles — qui vont dire « je "kicke" le ballon », parce que, en fin de compte, dans la salle de classe, on ne leur a jamais appris qu'on frappe le ballon. Ce seront des choses simples comme celles-là.

Certaines écoles ont mis en place un système qui incite les élèves à parler en français, mais pas de manière obligatoire ni punitive. Au contraire, on les encourage à parler français dans un contexte joyeux, dans la cour d'école. D'autres écoles organiseront d'autres activités.

J'aimerais me tourner vers le sénateur Maltais. Vous verrez demain, à l'école Victor-Brodeur, comment les grands prendront en charge les petits. Et comment les grands sont, à ce moment-là, les porte-parole de la francophonie. Parce que si on met les grands de 11e, 12e année tout seuls, ils parleront en anglais. Si vous les mettez responsables des tout-petits, parce qu'ils viennent de ce milieu, ils viennent de la maternelle, ils vont comprendre leurs responsabilités. Et vous allez trouver qu'ils sont les plus grands défenseurs de la langue française.

Bon nombre d'initiatives sont mises en place. Je laisserai nos deux directeurs vous donner des exemples. Il y a véritablement toute cette imagination que chacun des enseignants, que chacune des directions d'école veut mettre en place. J'espère vous surprendre demain, monsieur le sénateur.

Johanne Asselin, directrice, école Anne-Hébert, Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique : J'ai été à l'école Victor-Brodeur pendant plusieurs années et les élèves de 11e année — puisque c'était surtout les élèves de 11e année —, et certains de 12e année animaient des clubs pendant le dîner des plus jeunes, ce qui permettait aux élèves d'explorer différents thèmes. Cela peut être, pour certains, les arts dramatiques, pour d'autres, les arts visuels, le sport. Je trouve que c'était un avantage pour les petits. Les petits voyaient les grands comme des modèles, des héros. Il y avait beaucoup de modélisation. Chez les grands, on constatait qu'ils avaient développé le leadership et qu'ils avaient acquis des habiletés d'animateurs et d'organisateurs auprès des petits.

Ceci dit, j'ai quitté cette école depuis trois ans. Je suis maintenant à l'école Anne-Hébert, et, oui, nous offrons des activités, les arts du cirque, la chorale, pendant l'heure du dîner. Mais cela doit être animé par des adultes. Alors souvent, on doit trouver du financement pour pouvoir engager des adultes de l'extérieur qui viendront le faire, parce qu'on n'a malheureusement pas de grands disponibles pour animer ces ateliers pour nous. Ou bien demander aux membres du personnel qui acceptent volontairement de divertir les petits pendant l'heure du dîner. Lorsque les enfants sont divertis, il y a moins de conflits à gérer dans la cour d'école. Cela représente vraiment un avantage pour les écoles MA-12.

Michel Tardif, président du Regroupement des directions francophones, directeur des écoles La Passerelle (Whistler) et La Vallée (Pemberton), Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique : En ce qui concerne les écoles La Vallée et La Passerelle, à Whistler et à Pemberton, c'est dans un contexte hétérogène. En tant que communauté-école, nous avons le devoir de favoriser l'apprentissage de la langue française et de développer le sens d'appartenance à la culture, et non seulement la culture francophone, mais la culture de l'élève qui va cheminer dans ces écoles francophones dans les régions de Whistler et de Pemberton.

Nous avons ciblé plusieurs activités afin de promouvoir ce sens d'appartenance. Nous célébrons ensemble. Nous organisons de grands rassemblements afin que les deux communautés puissent se rencontrer pendant la semaine de célébrations et la semaine de la Francophonie. C'est vraiment un grand événement pendant lequel plusieurs écoles se rencontrent ainsi que les élèves et les parents. C'est vraiment une occasion extraordinaire pour affirmer leur francophonie.

Nous avons aussi élaboré des soirées francophones. En tant qu'établissement scolaire, nous avons le devoir non seulement de favoriser l'apprentissage auprès des élèves, de la communauté-école et des parents. Nous favorisons donc ce développement en offrant des soirées-thème, une fois par mois, une soirée francophone ou une rencontre francophone, pour les deux établissements. Et cela donne aux familles, non seulement aux parents de langue française, mais aussi à ceux qui, dans les relations exogames, sont de langue autre que le français, l'occasion de développer leur sens d'implication au sein de la francophonie.

Nous croyons sincèrement que la mission d'une école au sein du Conseil scolaire francophone va au-delà de l'objectif de favoriser l'apprentissage des élèves. On a un devoir au-delà de cela, soit de développer le sens de la communauté. Nous reconnaissons que c'est un devoir qui pourrait renverser l'effet de l'assimilation qui, je crois, est aux alentours de 70 p. 100. En tant que personnes natives de l'Est du Canada, nous avons évolué pendant des générations à essayer de renverser l'assimilation. Comme directeur, c'est mon devoir de communiquer à cette belle province que je me reconnais en tant que Franco-Britanno-Colombien.

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie pour votre présentation fort intéressante.

Monsieur Dupain, je suis d'accord avec vous que la francophonie n'est pas seulement la langue, mais que c'est aussi une valeur pour nous de dire que nous sommes Canadiens.

[Traduction]

Je suis absolument d'accord avec vous; il s'agit de nos valeurs.

D'entrée de jeu — et nous en avons parlé en privé —, je tiens à vous dire que je vais recourir abondamment à cette brochure dans la communauté parce que quand je l'ouvre et que je vois ces enfants, je vois Vancouver, je vois la Colombie-Britannique. Cela correspond à qui nous sommes, et vous avez bien transmis l'idée que ces enfants sont la francophonie. Je vous félicite d'ailleurs d'y être parvenu puisque l'un de nos problèmes c'est que les gens croient — et dans notre province, ce n'est pas une surprise pour vous — que la francophonie se limite aux gens du Québec ou de France, alors que c'est faux. La communauté francophone est très diversifiée, et nous devons veiller à le faire savoir. Alors, l'un des enjeux auxquels je tiens — et je suis une rêveuse, ce qui explique pourquoi je suis en politique —, c'est que je veux que nos enfants parlent les deux langues : le français et l'anglais. Je crois que cela devrait aller de soi. Cela se fait en Europe, cela se fait partout dans le monde, alors je ne sais pas pourquoi nous résistons.

Or, les gens me disent — et je suis certaine que ce n'est rien de nouveau pour vous quatre — que l'on devrait plutôt opter pour le mandarin ou le pendjabi, mais je leur réponds : « Non, vous ne comprenez pas. Cela fait partie de notre patrimoine. »

Faites mon éducation. Montrez à un comité fédéral sur les langues officielles ce qu'il doit savoir à cet égard. Comment expliquez-vous aux gens pourquoi il est à ce point important de pousser le bilinguisme et de faire en sorte que les enfants de Colombie-Britannique parlent eux aussi le français? Vous en avez parlé un peu, monsieur Dupain, mais pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

M. Dupain : Je vous remercie de poser cette question.

La sénatrice Jaffer : Il n'y a pas de quoi.

[Français]

M. Dupain : Je pense que vous avez tout à fait raison, sénatrice. Quand on parle de cultures francophones, j'aimerais parler de cultures avec un « s », francophones. Le monde francophone se réunit en Colombie-Britannique. Nous avons des élèves qui viennent de partout dans le monde et de pays qui ne sont pas du tout francophones, mais qui ont cette francophonie.

Je vivais en France dans un milieu où la francophonie était partout. À cette époque, on ne se sentait pas du tout menacé. Peut-être un peu plus, maintenant, avec l'Europe, où tout se passe en anglais, et cetera. J'ai découvert qu'il y a des communautés francophones en Roumanie, qu'il y a des communautés francophones en Bulgarie, qui ont maintenu, malgré le rideau de fer...

Nous avons évidemment des francophones en Afrique. Et quand je parle d'Afrique, il faut comprendre la multiplicité, la diversité et la richesse de ces cultures. Oui, il y en a en Asie, il y en a en Océanie. La francophonie est partout, elle véhicule ces valeurs. Et nous avons la chance de les accueillir et il est évident que notre rôle est de chérir toute cette différence.

Je suis heureux de constater que ce n'est plus juste des enfants blancs qui jouent dans les cours d'école. Maintenant, nous avons des différences de couleur et c'est un enrichissement. C'est quelque chose que je voulais pour mes filles. En tant que parent, je vais vous répondre plus avec mes sentiments de parent, parce que c'est véritablement quelque chose de sentimental. Je veux que mes filles comprennent que le monde apporte de la diversité. Je veux que mes filles comprennent que la diversité est une richesse et qu'il faut la respecter. Et le Canada avait, avec ses deux langues officielles, ce principe de mosaïque que je ne retrouverais pas chez notre voisin du sud, et où tout le monde peut s'exprimer dans ses deux langues officielles.

La présidente : Monsieur Dupain, je vous prierais d'être bref parce que d'autres sénateurs souhaitent vous poser des questions.

M. Dupain : Excusez-moi, c'est une question de passion. Mais j'aurai l'occasion de vous en reparler.

La présidente : Sénateur Maltais, vous avez la parole.

Le sénateur Maltais : Nous nous côtoyons depuis quelques jours et nous devenons de bons copains, et je pense qu'à la fin de la semaine, nous serons amis.

Je suis toujours surpris de voir cette vivacité et cette flamme lorsque vous parlez de votre vie en tant que francophone. Le français n'est pas seulement une langue académique, c'est un mode de vie, un mode de vie de la pensée, un mode de vie de tous les jours, un mode de vie dans la communication, dans l'expression de la parole.

Je vais faire une parenthèse. Il faut que je vous dise humblement, et Mme la présidente l'a déjà dit, je suis l'un des membres de ce comité qui insistait pour venir en Colombie-Britannique. J'ai visité à peu près toutes les communautés francophones du Canada, à l'exception de la Colombie-Britannique. Grâce à la chaîne Unis, maintenant, et à la télévision francophone de l'Ontario, qui vous donne une bonne visibilité, avec de nombreux reportages sur TFO, j'ai appris à connaître la communauté francophone de la Colombie-Britannique.

J'ai été agréablement surpris lorsque j'ai visité les classes. On avait dit à la présidente qu'on voulait voir non seulement les administrateurs, mais également les enfants. On les a vus de la garderie, hauts comme ça, à l'université, grands comme ça. J'ai remarqué que les élèves de 4e, 5e, 6e et 7e année ont une certaine vision de la francophonie. Lorsqu'ils arrivent en 8e année, jusqu'à la 12e année, ils ont une autre vision. Et là où la vision m'inquiète, c'est à l'université.

Je pense que la très grande majorité des jeunes qui suivent leurs cours en français le font pour avoir de meilleures perspectives d'emploi. Ils n'ont pas encore adopté le mode de vie francophone. Je crois qu'ils l'adoptent plus dans votre système scolaire qu'ils ne l'adoptent à l'université. C'est un constat. Je peux me tromper. Je n'ai pas la prétention de détenir la vérité à ce sujet, mais c'est ce que j'ai constaté. Toutes les questions que les jeunes nous ont posées après la rencontre étaient toutes orientées vers les perspectives d'emplois. Et cela m'a frappé.

Ce matin, je lisais dans les journaux de la Colombie-Britannique que votre ministère de l'Éducation fait face à des problèmes sérieux comme la vétusté des écoles. Les écoles tombent un peu en ruines. J'aimerais examiner avec vous la question de la reddition de comptes du gouvernement fédéral. Et l'idée m'a été donnée par le président du Conseil du Trésor, M. Scott Brison, lorsqu'il a comparu devant notre comité. Je lui ai demandé s'il avait une façon de faire une reddition de comptes des fonds pour que le gouvernement fédéral injecte des fonds en faveur de la francophonie. Il venait d'être assermenté quelques mois auparavant. Il m'a répondu : « Malheureusement, sénateur, je n'ai pas de façon. Mais je vais en trouver une, parce que ce n'est pas normal. »

Le gouvernement fédéral — les sénateurs, les députés — demande des fonds en faveur de la francophonie à la ministre responsable de la Francophonie, mais elle distribue les fonds selon les normes gouvernementales. Et elle n'a pas le choix d'envoyer cela aux gouvernements principaux. Et c'est à ce moment que le courant électrique ne se fait pas. Je suis certain que ce n'est pas la totalité des fonds que le gouvernement du Canada envoie en Colombie-Britannique pour la francophonie.

La présidente : Monsieur Allison, voulez-vous répondre aux commentaires du sénateur?

M. Allison : En effet, je suis d'accord. Je pense qu'il faut une reddition de comptes, c'est certain. Aussi, il faut beaucoup plus de contrôle. C'est nous, le conseil scolaire, qui savons où sont les besoins. De se faire dicter des choses, je pense que ce n'est pas approprié. Ce serait à nous de prendre le leadership à ce moment-là et de proposer des choses, et ce serait à nous de faire la reddition de comptes d'un autre côté aussi. Je pense qu'on est prêt à le faire. On le fait déjà avec l'argent du PLOE. Il nous faut des fonds supplémentaires pour continuer à faire ce développement.

Le sénateur Maltais : J'aimerais soulever un dernier point qui a fait l'objet d'une discussion hier autour de la table. On ne mise pas beaucoup sur la formation professionnelle au sein de la francophonie. C'est sans doute en raison du manque de financement. Ce n'est pas tout le monde qui peut aller à l'université. Ne nous racontons pas d'histoires. On aura toujours besoin d'électriciens, de plombiers, de menuisiers, de soudeurs, de mécaniciens. On aura toujours besoin de ce monde. La formation professionnelle est fort importante au sein de la francophonie. Je sais que c'est en raison d'un manque d'argent, mais prévoyez-vous, au cours des prochaines années, investir, pas nécessairement de grosses sommes d'argent, mais tout au moins donner une chance à ces jeunes d'avoir une formation professionnelle adéquate en français?

M. Dupain : Vous avez tout à fait raison et c'est l'un des gros problèmes de la Colombie-Britannique. Actuellement, et vous le verrez demain, on a annoncé trois programmes qui sont des cuisines communautaires où nos élèves peuvent participer. Vous aurez l'occasion d'en voir une demain à Victoria. Nous obtenons un certain succès sur une cohorte de 10 élèves par année. Environ deux ou trois qui fréquentent un collège anglophone à ce moment-là se dirigeront dans le domaine de la restauration. C'est un grand problème. C'est certainement notre problème à l'heure actuelle.

Oui, vous avez tout à fait raison. Merci.

La sénatrice Gagné : La recherche démontre que pour assurer le développement, l'épanouissement d'une communauté, il s'agit d'assurer un continuum institutionnel. Quand on regarde le grand portrait, on doit s'assurer qu'il y a des garderies francophones, des écoles, des universités, des collèges, un système de santé en mesure d'offrir des services, et cetera. Je pense que quand on crée une vision pour une communauté, il faut s'assurer qu'il y a bel et bien des infrastructures, des regroupements solides et bien financés. Je comprends très bien les défis de la communauté francophone.

Pour revenir à toute la négociation entourant l'enveloppe, on espère qu'elle sera quand même beaucoup plus généreuse que lors des 10 dernières années, puisqu'on n'a pas vu d'augmentation. En ce qui concerne le Programme des langues officielles en enseignement — le PLOE —, on sait que, quand il n'y a pas de changement sur une période de 10 ans, cela veut dire qu'il y a une baisse au niveau des ressources, compte tenu du coût de la vie.

Vous revendiquez une place à la table pour négocier une entente tripartite, soit au niveau fédéral, avec le CMEC et Patrimoine canadien, puis, ensuite, ici, dans les négociations bilatérales. Cette idée ou cette demande a-t-elle déjà été avancée auprès de la Colombie-Britannique?

M. Allison : Je sais que cela a été avancé avec le fédéral, avec le CSF, et dans le cadre des négociations ici, en Colombie-Britannique. Peut-être que M. Dupain peut en dire davantage à ce sujet? Je pense qu'il y a des relations directes avec des gens de la province pour voir ce qu'il en est.

M. Dupain : C'est une chose qu'on a demandée. Quand on a commencé le PLOE, qui finira en 2018, on nous a dit : « Vous avez 4,3 millions de dollars, un point c'est tout. » On n'a jamais su pourquoi on devait avoir 4,3 millions et pas 4,5 millions, et cetera, mais c'était déjà quelque chose qui était fixé à l'avance.

Je vais vous donner un exemple très simple. On a réclamé des moniteurs de langue pour toutes nos écoles. On en a 38. On nous a dit : « Non, vous en aurez 20. » À l'origine, on en avait 12, la province en avait 52 ou 54, je ne m'en souviens plus. Le reste, c'est pour l'immersion, mais nous, on avait le droit d'en avoir jusqu'à 20.

Donc vous voyez, il n'y a pas vraiment de négociations. En fin de compte, quant aux huit moniteurs de langue qui sont importants pour la vie en dehors de la salle de classe, comme le disait tout à l'heure le sénateur, nous avons été obligés de les payer avec des fonds fédéraux durant le projet Odyssée. Ça a été clair, nous n'en aurons pas plus de 20. C'est 20 qu'on nous donne.

La présidente : C'est la province?

M. Dupain : C'est la province.

M. Allison : Puis-je ajouter un commentaire?

On nous demande aussi de planifier les quatre ou cinq prochaines années. C'est certain que nos besoins changeront au fil des années. Et puis, on nous demande d'élaborer un plan statique pour ces cinq années. On essaie de changer. C'est difficile à chaque fois. Il faut se réorienter et ainsi de suite. Je pense que c'est un peu déplorable de devoir s'attacher à ça.

Comme je le disais, la reddition de comptes, on peut la faire, on accordera le financement là où les besoins se feront sentir. Les besoins changent à l'intérieur de cinq ans.

La sénatrice Gagné : J'aurais une question complémentaire à poser par rapport à la comparaison qu'on peut faire avec d'autres commissions scolaires semblables à votre commission scolaire ici, en Colombie-Britannique.

Y a-t-il un autre conseil scolaire qui dessert des écoles un peu partout dans la province qui serait pour la majorité?

M. Allison : Je connais des conseils scolaires qui ont des grands territoires, mais pas aussi grands que celui du CSF, qui couvre la province. Je sais, pour avoir déjà habité à Prince George pendant 16 ans, que le conseil scolaire là-bas incluait des petites communautés jusqu'à environ 200 kilomètres de Prince George. Il s'agit de petites communautés. On parle peut-être de sept ou huit écoles en tout, donc dans des communautés de 50 à 200 kilomètres de Prince George. Je connais celui-là. Il y en a peut-être d'autres, mais pas aussi grands.

La sénatrice Gagné : Connaissez-vous leur situation financière? Ont-ils accès à des fonds beaucoup plus importants que vous?

M. Allison : Il y a une partie de la formule de financement qui repose sur le facteur de la géographie, en Colombie-Britannique. Et lorsqu'une école est plus éloignée de tant de kilomètres du bureau central, il y a quelque chose qui clique. Ils accordent du financement supplémentaire, que ce soit pour nous ou pour les conseils scolaires anglophones. Plus on a d'écoles éloignées du bureau central, plus cela génère de l'argent; c'est le cas pour les francophones ou les anglophones. Aussi, en ce qui concerne les distances entre deux écoles francophones ou anglophones du même conseil scolaire, encore une fois, le facteur de la géographie génère de l'argent.

C'est certain que nous, étant donné notre situation, on reçoit plus d'argent que les autres. Par contre, il y a un coût énorme à avoir des écoles partout en province. Lorsqu'on fait de la formation, tout le monde doit voyager, tout le monde doit être remplacé dans son école. Il y a des coûts énormes et pour nous, ce n'est pas suffisant.

En terminant, mon prédécesseur avait demandé, par le passé, un surfinancement de 25 p. 100. Finalement, on a obtenu 15 p. 100, mais on avait vraiment besoin de 25 p. 100.

Le sénateur McIntyre : Ma question porte sur l'équivalence en éducation. J'aimerais attirer votre attention sur la décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l'affaire Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique c. British Columbia Education. Comme vous le savez, la décision a été rendue le 26 septembre dernier. C'est un jugement de 1 600 pages qui suscite des avis partagés. La réaction des intervenants est mitigée, avec un mélange de joie et de déception. On pourrait en parler tout l'avant-midi, surtout au niveau des infrastructures, et cetera. Ma question est la suivante : avez-vous obtenu la collaboration du Programme d'appui aux droits linguistiques?

M. Allison : Oui. Au cours des dernières années, on a fait des demandes à quelques reprises afin de recevoir des fonds pour nous aider avec ça. Mais comme vous le savez, je pense que cela couvre une petite portion du financement de ce procès.

La présidente : Quel montant avez-vous reçu?

M. Allison : Au cours des dernières années, c'était... Puis là, je pense que nos avocats, M. Roy est ici, je pense que le maximum qu'on pouvait recevoir, c'était 125 000 $ pour le cas de cour. Mais après, il y avait d'autres petites demandes qu'on avait faites aussi pour des actions, des petites requêtes qu'on faisait à côté.

Le sénateur McIntyre : Avez-vous l'impression que cette cause sera portée en appel?

M. Allison : Je préfère ne pas me prononcer sur la poursuite juridique en ce moment. J'ai un peu laissé cela entre les mains de nos élus. Pour moi, comme vous l'avez si bien dit, c'est une décision partagée. Et j'attends aussi que l'analyse soit terminée par nos avocats et qu'on amène cela devant le conseil d'administration de la fédération des parents et du conseil scolaire.

Le sénateur McIntyre : Ce qui me frappe, c'est que la cour ne reconnaît pas l'obligation, en vertu de l'article 23 de la Charte, d'offrir des services à la petite enfance en français.

M. Allison : En fait, il y a beaucoup de choses qui sont décevantes. Et je pense que le plus décevant, c'est le fait que le juge semble dire que les prochaines générations de communautés seront assimilées. Je pense que c'est de là que le frein se fait pour les autres communautés en ce qui concerne le reste du jugement.

Le sénateur McIntyre : Je termine en disant qu'il y a toute la question des infrastructures aussi qui s'applique, c'est-à-dire que la cour ordonne que certaines infrastructures puissent être réparées alors que d'autres, non.

M. Allison : Si des infrastructures peuvent être réparées, il faut avoir du financement quand même. Cela coûte cher réparer des vieilles écoles et parfois, il y a des conditions sismiques. À ce moment-là, c'est souvent moins cher de reconstruire une école que de réparer ces écoles.

Donc oui, les conditions des écoles, c'est certain, cela peut être réparé. Et on le fait très bien, je pense, avec le peu d'argent que nous avons. On reçoit des subventions annuelles en matière d'infrastructures, comme tous les autres conseils scolaires; ce sont des sommes pour faire des rénovations dans nos écoles. Mais on ne peut pas rajouter des espaces. Ce n'est pas seulement la condition de l'école, c'est aussi des espaces supplémentaires qu'il faut ajouter. Et ces sommes, lorsqu'on reçoit 1,2 ou 1,3 milliard de dollars par année pour faire des rénovations, ne sont pas suffisantes pour construire des écoles. Une des plus petites écoles, par exemple, avec une capacité de 100 élèves, peut coûter jusqu'à 8 millions de dollars à construire, et c'est sans parler du terrain.

[Traduction]

La sénatrice Jaffer : En me préparant pour ces réunions, j'ai fait certaines recherches. L'une des choses que j'ai trouvées — et je veux avoir votre avis avant de demander au comité d'examiner cela de plus près —, c'est qu'il y a de l'argent pour les infrastructures, pour le logement et pour tout ce qui est susceptible d'améliorer les conditions sociales de la collectivité. Le gouvernement s'occupe des infrastructures. Avez-vous pensé à lui demander de l'aide pour vos infrastructures, notamment en ce qui concerne l'entretien des écoles, comme moyen de promouvoir l'harmonie et le bilinguisme dans notre pays? Le gouvernement fédéral fait beaucoup d'annonces pour signaler qu'il y a de l'argent pour les infrastructures. Avez-vous envisagé cette possibilité?

[Français]

M. Allison : Non. Je n'ai pas examiné cet aspect, mais je vais définitivement le faire.

Je vais vous donner un exemple. Lors d'une rencontre avec une élue fédérale, il a été clair et net que, lorsqu'on demandait de l'aide du gouvernement fédéral, on nous répondait que l'éducation était sous la juridiction provinciale et que c'était à la province de répondre à ces demandes.

Mais définitivement, je vais regarder pour voir si ces fonds pourraient être disponibles maintenant. Je vous remercie.

La présidente : Vous nous avez présenté beaucoup d'information ce matin ainsi que lors de nos rencontres informelles. Quelles recommandations souhaitez-vous que notre comité propose?

M. Allison : J'en ai discuté un peu et je peux peut-être apporter une précision à ce sujet. Une chose importante serait un incitatif pour le gouvernement provincial de construire des écoles. Je pense que s'il y avait un fonds du gouvernement fédéral pour construire des espaces communautaires, un montant d'argent qu'on pourrait montrer à l'avance au gouvernement provincial, cela aiderait énormément à régler des problèmes d'espace.

Un autre problème est qu'étant donné la dispersion de nos élèves à travers la province, pour favoriser l'accès à nos écoles à ces élèves, il faut du financement pour améliorer le transport. L'accès se fait de plusieurs façons, mais les deux façons principales, c'est d'avoir plus d'écoles dans certaines régions, entre autres à Abbotsford où il n'y a pas d'écoles. Les enfants doivent aller à l'école élémentaire à Mission, et au secondaire, à Surrey. On parle de 45 minutes à une heure de route en auto. Et en autobus, c'est beaucoup plus long. Donc, il y a ces deux composantes qui sont extrêmement importantes pour moi.

Et il y en a d'autres peut-être à plus long terme. Par exemple, l'éducation postsecondaire en français, c'est extrêmement important pour moi. Je pense qu'on veut garder nos francophones en Colombie-Britannique. Il faut garder une vitalité à l'intérieur de la communauté francophone. Et puis c'est par l'entremise de nos jeunes qui terminent leur 12e année qu'on peut contribuer à le faire.

Il y a d'autres moyens, mais je pense que ce serait intéressant pour nous d'embaucher nos élèves qui ont réussi leurs études secondaires, qui auraient obtenu leur diplôme à l'université ici, en Colombie-Britannique. Ils pourraient être embauchés comme enseignants ou comme administrateurs au conseil scolaire et ainsi de suite. Je pense que cela aiderait énormément à développer la communauté.

La présidente : Monsieur Dupain, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Dupain : Je ne vais pas revenir sur les questions d'argent, que je laisse à M. Allison. Comme beaucoup d'entre vous, je pense que nous sommes des rêveurs. Si vous pouviez véhiculer juste une chose en Ontario : dites-leur que la francophonie en Colombie-Britannique se porte bien, que nous avons beaucoup d'enfants qui rêvent de faire partie de nos programmes, qui sont dans nos programmes, et cetera. C'est dommage d'avoir une limitation, parce qu'on n'a plus de place.

Je regarde Mme Asselin, qui a 10 portatives sur son terrain où les enfants ne peuvent même plus jouer en français. Donc, nous avons une francophonie vibrante. On entend peut-être dire — je le répète parce que cela m'a énormément choqué — que nous sommes moribonds. Nous ne sommes pas moribonds. Nous avons un programme vivant. Juste cela, ce serait quelque chose d'important. Bien sûr, il faut de l'argent, de temps en temps aussi, mais ce serait la chose que j'aimerais que vous véhiculiez, si vous l'acceptiez.

La présidente : Madame Asselin, monsieur Tardif, voulez-vous ajouter quelque chose?

Mme Asselin : Ce que j'aimerais ajouter, justement, c'est de ne pas limiter nos actions dans nos classes, dans nos écoles, même en étant restreints par l'espace. Chez nous, on sent une restriction. On sent que nos enseignants ne peuvent pas développer un leadership puisqu'on a souvent à leur dire non, dû au manque d'espace. On a souvent fermé notre gymnase, notre bibliothèque. J'ai même refusé des activités que les étudiants aimeraient faire puisqu'on n'a pas l'espace nécessaire. Alors je trouve que c'est dommage de freiner des initiatives dans nos écoles à cause d'un manque d'espace.

M. Tardif : Évidemment, dans mes écoles, ce qui est scandaleux, c'est qu'on n'a pas d'installations équivalentes à celles des écoles anglophones. On n'est pas en mesure de créer le sens d'appartenance à l'école, qui est de notre devoir. On dispose de deux sites de classes portables et d'un local au centre communautaire. Donc, pour nous, ce serait d'avoir des installations équivalentes dans notre région ainsi que l'enveloppe budgétaire nécessaire afin d'offrir d'autres activités. Par exemple, on pourrait offrir aux familles exogames des activités après les heures de classe, afin de créer cette francophonie vibrante au sein de toutes les communautés des écoles du CSF.

M. Allison : J'aimerais ajouter, et c'est très important, je pense, que le gouvernement fédéral, à Ottawa, puisse nous aider à acquérir des terrains. Comme on l'a mentionné lors de nos rencontres aux écoles Rose-des-vents et Jules-Verne, cela prend de l'aide, surtout lorsqu'il y a des terrains qui appartiennent au gouvernement fédéral. On devrait avoir absolument priorité. Notre communauté francophone devrait avoir la priorité étant donné notre situation minoritaire. C'est quelque chose que j'aimerais que vous rapportiez à Ottawa.

La présidente : Je pense que c'est un point important à ajouter. C'est quelque chose que nous allons retenir.

M. Allison : Je vous remercie.

La présidente : Il n'y a pas d'autres questions de la part des sénateurs, et notre temps est écoulé.

Au nom des membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles, je tiens à vous remercier très sincèrement de votre présentation aujourd'hui. Nous sentons votre passion et votre engagement envers vos écoles et votre communauté. Je vous remercie beaucoup.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants des enseignantes et des enseignants. Le comité poursuit son étude spéciale sur les défis liés à l'accès aux écoles françaises et aux programmes d'immersion française de la Colombie-Britannique.

Nous sommes heureux d'accueillir, ce matin, Mme Sophie Bergeron, présidente de l'Association provinciale des professeurs d'immersion et du programme francophone de la Colombie-Britannique, Mme Sylvie Liechtele, présidente du Syndicat des enseignantes et enseignants du programme francophone de la Colombie-Britannique (Local 93), Mme Teri Mooring, première vice-présidente de la Fédération des enseignantes et enseignants de la Colombie-Britannique ainsi que Mme Trish Kolber, représentante des enseignants du français, BC Association of Teachers of Modern Languages. Bienvenue à vous toutes. C'est un plaisir de vous recevoir.

Nous avons entendu parler des défis que vous devez surmonter dans le cadre de votre profession. Hier, on a beaucoup abordé toute la question de la compétence linguistique. Je ne sais pas si c'est l'objet de votre présentation, mais nous avons bien hâte de vous entendre.

Nous allons commencer par Mme Bergeron. Veuillez vous limiter à cinq minutes. Vous êtes quatre, et les sénateurs auront certainement des questions à vous poser.

Madame Bergeron, la parole est à vous.

Sophie Bergeron, présidente, Association provinciale des professeurs d'immersion et du programme francophone de la Colombie-Britannique : Madame la présidente, mesdames et messieurs les sénateurs, bonjour. Au nom de l'Association provinciale des professeurs d'immersion et du programme francophone de la Colombie-Britannique (APPIPC), je tiens à vous remercier de l'invitation à venir partager avec vous nos commentaires dans le cadre de votre étude sur la situation de l'enseignement en français en Colombie-Britannique.

J'aimerais tout d'abord vous parler un peu de notre association. L'APPIPC est l'une des 32 associations spécialistes de la Fédération des enseignantes et enseignants de la Colombie-Britannique (FECB) et elle regroupe en majorité des enseignants de la maternelle à la 12e année des écoles publiques de la Colombie-Britannique qui enseignent en immersion et au programme francophone, ainsi que quelques enseignants des écoles indépendantes qui œuvrent dans le domaine de l'éducation en français.

Un des buts de l'APPIPC est de favoriser un sens de communauté parmi les enseignants des programmes d'immersion française et francophones de la Colombie-Britannique en offrant des occasions de développement professionnel en français et en facilitant des échanges d'idées et de ressources. C'est pourquoi nous organisons chaque année un congrès annuel qui permet à nos membres de se rencontrer et de se ressourcer.

Cette année, le congrès aura lieu les 20 et 21 octobre sur le thème de la réussite scolaire en français. L'association a également comme mandat de plaider au nom des enseignants sur les questions ayant rapport à l'éducation en français. Je suis donc ici aujourd'hui pour vous faire part de certains enjeux auxquels font face nos enseignants.

Un de ces enjeux est l'accès au développement professionnel en français. Bien que l'APPIPC organise une conférence annuelle d'environ 300 participants, les occasions pour les enseignants de se rencontrer et d'échanger sont peu nombreuses. De plus, les coûts pour participer à de telles activités sont souvent plus élevés pour les enseignants des programmes en français, parce que ces activités nécessitent, la plupart du temps, des frais de déplacement, puisqu'elles se déroulent dans les grands centres, même parfois hors de la province.

Or, comme on le sait, les budgets consacrés au développement professionnel sont restés statiques depuis au moins 10 ans, s'ils n'ont pas carrément diminué. Cette réalité rend donc l'accès difficile, surtout pour nos collègues francophones qui habitent en région éloignée et qui se sentent déjà isolés.

Dans le même ordre d'idées, j'aimerais parler du soutien pédagogique aux enseignants d'immersion française qui se fait de plus en plus rare au sein des conseils scolaires. Les postes de conseillers pédagogiques, tels que celui que j'occupe à Coquitlam, ont presque tous disparu alors que les besoins en soutien pédagogique en français se font de plus en plus criants.

Vous savez probablement que le ministère de l'Éducation de la Colombie-Britannique a entrepris cette année une transformation de tous ses programmes d'études de la maternelle à la 12e année. Ce projet d'envergure, qui touche tous les enseignants, a des répercussions encore plus grandes sur les professeurs d'immersion qui ont déjà peine à trouver des ressources pédagogiques adaptées à la situation d'enseignement en français langue seconde et au contexte britanno-colombien. Face à une telle situation, nos enseignants d'immersion ont d'autant plus besoin de soutien pédagogique pour les aider à faire face à ce nouveau curriculum.

Un autre enjeu auquel font face les programmes d'immersion est le fait qu'un grand nombre de nos enseignants n'ont pas nécessairement été formés pour l'enseignement en langue seconde. Cette réalité engendre des besoins en ce qui a trait à la formation continue, une fois ces enseignants en poste. Le manque de formation en méthodologie de l'enseignement d'une langue seconde laisse plusieurs de nos professeurs dépourvus et frustrés. Il n'est pas rare de voir ces enseignants abandonner les programmes d'immersion après seulement quelques années pour se diriger vers le programme anglais, parce que c'est plus facile pour eux.

Bien qu'il soit encourageant de voir d'anciens élèves d'immersion se tourner vers l'enseignement et qu'on puisse y voir un gage de réussite de nos programmes, il n'en reste pas moins qu'ils n'ont pas tous nécessairement les compétences langagières et culturelles nécessaires pour faire d'eux de bons enseignants d'immersion française.

Ce point m'amène à parler d'un autre enjeu de taille, le manque de ressources humaines. Nous sommes en période de crise. Nous n'avons pas assez d'enseignants qualifiés pour répondre à la demande. Même si, à certains endroits, les conseils scolaires ont l'espace pour créer de nouvelles classes, le manque d'enseignants qui maîtrisent assez bien le français pour l'enseigner les empêche d'augmenter leurs effectifs.

J'enseigne à Coquitlam, et nous nous estimons heureux d'avoir été capables de pourvoir tous nos postes pour la rentrée de septembre. Par contre, nous savons déjà que nous avons quatre postes à combler d'ici janvier pour des congés de maternité, et nous ne savons pas si nous serons en mesure de le faire. Il va sans dire qu'il est pratiquement impossible d'avoir des enseignants suppléants qui parlent français lorsqu'un professeur doit s'absenter pour des raisons médicales ou autres. Cela a un impact direct sur la qualité de l'enseignement, autant pour les élèves que pour les enseignants qui voient leur tâche de travail augmenter à leur retour de congé.

Bien que les universités comme Simon Fraser et la UBC offrent de très bons programmes de formation des maîtres, ils ne parviennent pas à répondre à la demande. De plus, la situation économique actuelle en Colombie-Britannique rend le recrutement hors province encore plus difficile. Nos salaires ne sont pas compétitifs lorsque comparés au coût de la vie dans le Grand Vancouver.

En plus du manque d'enseignants qualifiés, le manque d'espace limite l'accès aux programmes d'immersion. Bon nombre de conseils scolaires ne parviennent pas à répondre à la demande en ce qui concerne l'immersion précoce. Encore cette année, à Coquitlam, on a dû refuser environ 30 élèves qui voulaient s'inscrire à la maternelle. Ce manque d'espace est en partie lié au sous-financement auquel fait face le système d'éducation en Colombie-Britannique. Cette situation oblige les conseils scolaires à maximiser le nombre d'élèves par école et à occuper tous les locaux, ce qui limite les possibilités d'accroissement des programmes de choix, tels que l'immersion. Ce problème d'infrastructure restreint l'accès à une éducation dans les deux langues officielles, un désir exprimé par un nombre croissant d'élèves.

Puisque nous parlons des élèves, les changements au sein de notre clientèle étudiante sont un autre défi de taille auquel font face les enseignants. La composition de nos classes n'est plus ce qu'elle était il y a 10 ans, encore moins il y a 40 ans. Une large proportion de nos élèves parle une autre langue que l'anglais ou le français à la maison, et de plus en plus d'entre eux sont désignés comme ayant des troubles d'apprentissage ou de comportement.

Nous sommes heureux de voir que de plus en plus de parents et d'élèves choisissent l'immersion française, parce qu'ils croient aux bénéfices d'une éducation bilingue. Toutefois, cette démocratisation de nos programmes ne se fait pas sans heurt. Le soutien pédagogique nécessaire pour répondre aux besoins grandissants de cette clientèle est insuffisant, voire inexistant. Il y a un manque d'équité entre l'accès à des services en orthopédagogie en français pour nos élèves et l'accès à ces services dans le programme régulier anglais. Du côté de l'administration, il est souvent plus facile de transférer un élève vers le programme anglais au lieu de lui offrir du soutien orthopédagogique en français. Encore une fois, le manque de ressources humaines et financières entre en jeu.

J'aimerais conclure sur un ton positif en précisant que je suis fière de représenter un groupe d'enseignantes et d'enseignants qui croient en la valeur du français et qui désirent partager leur passion pour cette langue et cette culture avec leurs élèves. J'espère que mes commentaires vous seront utiles pour vous aider à dresser un portrait de la situation de l'enseignement du français en Colombie-Britannique, et qu'ils pourront servir à améliorer le soutien pour nos élèves et nos enseignants de sorte à mieux faire rayonner le français dans cette province.

Je vous remercie.

La présidente : Un grand merci.

Sylvie Liechtele, présidente, Syndicat des enseignantes et enseignants du programme francophone de la Colombie-Britannique (Local 93) : C'est avec plaisir que le Syndicat des enseignantes et enseignants du programme francophone de la Colombie-Britannique (SEPF) répond à l'invitation qui lui a été lancée de prendre part à cette consultation sur les principaux enjeux pour les enseignants des écoles francophones et des programmes d'immersion de la Colombie-Britannique.

D'emblée, nous tenons à préciser que nous apprécions vos efforts à mieux comprendre les enjeux qui animent le dossier des langues officielles en général, les enseignants et enseignantes francophones en milieu minoritaire étant une composante fondamentale des valeurs d'un pays qui accorde une grande place au bilinguisme.

De plus, aujourd'hui est la Journée mondiale des enseignantes et des enseignants. Je tenais à le préciser. Je suis Sylvie Liechtele, présidente du SEPF. J'entame ma cinquième année de fonction et je suis heureuse d'être la porte-parole des enseignantes et enseignants des écoles francophones de toute la province. C'est un privilège et un honneur.

Je voudrais tout d'abord souligner le travail de recherche qu'a effectué la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (FCE) concernant ces enjeux. Vous trouverez cette recherche menée en 2014 et intitulée Enjeux de l'enseignement en contexte minoritaire francophone à l'adresse suivante : www.ctffce.ca/fr/Pages/Francophones/ Recherche.aspx.

Ce document reflète bien la réalité en Colombie-Britannique. Il est composé de deux parties. La première partie, les enjeux de l'enseignement en 2014, constitue une mise à jour des éléments les plus probants de l'enquête réalisée en 2004 (Le personnel enseignant face aux défis de l'enseignement en milieu minoritaire). Ce questionnaire a été approuvé par le Comité consultatif du français langue première de la FCE dont je fais partie, et est administré par SavoirNet, qui a ensuite fait l'analyse des réponses obtenues. Ce sont les constats de cette démarche qui se retrouvent dans la première partie.

La conclusion en est que les principaux enjeux auxquels doivent faire face les enseignants francophones en milieu minoritaire en 2014 sont sensiblement les mêmes que ceux qui ont fait l'objet de l'étude de 2004. Ces enjeux se résument ainsi : enseigner, avec peu de moyens, à des groupes d'élèves d'horizons divers ayant de multiples besoins, faire la promotion et l'apprentissage de la langue française dans un milieu anglo-dominant, et transmettre la matière scolaire prévue au programme avec des ressources pédagogiques limitées en français.

Ces enjeux semblent d'ailleurs se complexifier en raison de l'augmentation du nombre de familles exogames et de la diversité culturelle de plus en plus présente en milieu minoritaire. De plus, l'arrivée de la technologie dans les salles de classe au cours des dernières années a certes amélioré l'accès aux ressources, mais elle a également engendré un défi supplémentaire auquel le personnel enseignant a dû s'adapter.

La deuxième partie est la comparaison entre les écoles de langue française et les écoles de langue anglaise, y compris les écoles d'immersion. Cette deuxième partie présente l'analyse d'une enquête menée par les recherchistes du secteur Recherche et Information de la FCE, au printemps 2014. Au total, 7 950 personnes, toutes langues d'enseignement confondues, ont répondu au sondage, dont 1 448 qui s'associaient aux écoles de langue française. On constate systématiquement, chez le personnel enseignant des écoles de langue française, une différence marquante dans la perception des enjeux liés à l'équilibre vie-travail et dans les conditions d'exercice de la profession, y compris les relations avec la direction, les programmes d'études, les tests et j'en passe. Dans la grande majorité des cas, l'analyse démontre que le personnel des écoles de langue française se sent défavorisé par rapport à ses homologues anglophones. Ceci est très préoccupant.

En ce qui concerne l'échelon provincial, j'aimerais partager avec vous mes inquiétudes par rapport au Plan d'appui aux langues officielles en éducation (PLOE), la subvention fédérale accordée au Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique, le CSF, par l'entremise du ministère de l'Éducation de la Colombie-Britannique. En effet, les quelque 4,5 millions de dollars accordés chaque année au Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique sont administrés par le directeur général avec l'appui du conseil d'administration. Cependant, le syndicat, un partenaire essentiel, n'est pas partie prenante de la répartition de cet argent. Bien sûr, on nous présente les décisions dans le cadre d'un comité mensuel, le Comité conseil éducation, mais nous n'avons pas de pouvoir décisionnel.

Voici des exemples où cet argent pourrait être alloué de façon plus pertinente. Le Bac international — qui comprend l'inscription, la correction d'examens, les ressources et la formation spécifique des enseignants — est financé par les fonds publics du PLOE, à raison d'environ 600 000 $ par année. Somme toute, il ne profite qu'à très peu d'élèves. Il faut également signaler que les manuels scolaires, dont la plupart proviennent de la compagnie Pearson, ne sont disponibles qu'en anglais pour nos enseignants. En ce qui nous concerne, cette somme importante pourrait être utilisée à d'autres fins pour servir l'éducation publique francophone en milieu minoritaire. Ainsi, nous pourrions miser sur la formation des enseignants et des enseignantes à la Pédagogie à l'école de langue française (PELF), élaborée par la FCE, ou bien investir dans les écoles de l'UNESCO qui partagent les valeurs liées à la justice sociale et aux droits de la personne, ce qui profiterait à l'ensemble de nos enseignants et enseignantes.

Un autre exemple est le suivant : le Conseil scolaire francophone a retiré toutes les enseignantes-bibliothécaires de nos écoles. Il semble que le PLOE aurait pu financer ces bibliothécaires où le besoin d'enseigner l'alphabétisation et de comprendre la littérature en français, par exemple, est criant dans un milieu minoritaire.

Un autre endroit où nous aurions besoin de verser ces subventions fédérales est dans l'organisation de la seule journée provinciale qui réunit tous les enseignants et toutes les enseignantes francophones de la province. Le SEPF y consacre 20 000 $ et le CSF y verse la même somme, alors que le budget du CSF est de 300 fois plus élevé que celui du SEPF.

Par ailleurs, nous faisons face à un manque de personnel enseignant francophone dans des domaines spécialisés tels que le counseling et l'orthopédagogie. Des incitatifs à approfondir et à diversifier la formation des enseignants francophones déjà employés pourraient également faire également l'objet du PLOE.

Enfin, en raison de la charge de travail, qui est plus importante que dans les écoles de la majorité — il y a plus de cours à enseigner et dans diverses matières, et il faut faire vivre la culture francophone —, et comme il y a un bon nombre de postes à temps partiel — ce qui est problématique vu le coût de la vie, par exemple, dans le Grand Vancouver —, et compte tenu du fait que les enseignants francophones sont souvent déracinés et sans réseau d'entraide, il y a un taux de roulement plus important que dans les écoles de la majorité linguistique.

Le personnel enseignant dans les écoles françaises de la Colombie-Britannique fait face à des défis importants. En tant que syndicat, nous croyons à l'importance des conditions d'enseignement bonifiées pour nos enseignantes et enseignants en situation minoritaire qui, de ce fait, favorisent l'apprentissage optimal de tous les élèves.

Le SEPF remercie le comité sénatorial de lui avoir donné l'occasion de partager avec lui ses préoccupations et lui présente les recommandations qui suivent :

Que le protocole d'entente pour la répartition de l'argent fédéral du Programme des langues officielles fasse l'objet d'une entente quadripartite — le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, le Conseil scolaire francophone et le syndicat francophone — au lieu d'une entente bipartite entre le gouvernement fédéral et la province;

Qu'il y ait des directives pour que l'argent alloué soit utilisé en priorité pour l'alphabétisation — par l'embauche de bibliothécaires —, la culture et le développement professionnel des enseignantes et enseignants francophones;

Que la formation de base des enseignantes et enseignants comprenne des cours sur l'enseignement du français en contexte minoritaire — la PELF, par exemple.

Je vous remercie.

La présidente : Merci beaucoup, madame Liechtele.

Madame Mooring, vous avez la parole.

[Traduction]

Teri Mooring, 1re vice-présidente, Fédération des enseignantes et enseignants de la Colombie-Britannique : Je tiens à remercier le comité du Sénat d'avoir invité la Fédération des enseignantes et enseignants de la Colombie-Britannique à témoigner et à discuter des enjeux relatifs à l'accès aux programmes en français et aux programmes de français langue seconde.

La première chose que j'aimerais souligner, c'est le manque d'enseignants qualifiés. À l'heure actuelle, la Colombie-Britannique ne compte que trois universités où l'on offre une formation en enseignement du français et en immersion française. Toutes les universités offrent une certaine formation en français de base, mais aucune en français intensif. Le nombre actuel de diplômés des programmes de formation en enseignement du français et en immersion française n'arrivera jamais à combler la demande d'enseignants, ce qui a une incidence énorme sur la capacité de développement des programmes.

Les enseignants de niveau intermédiaire du programme d'anglais ont souvent une connaissance très rudimentaire du français et on leur demande d'enseigner le français de base alors qu'ils n'ont qu'une très modeste formation, sinon pas de formation du tout. Par conséquent, le manque de formation des enseignants qui enseignent le français de base est un problème bien concret, et la situation est encore pire dans les régions rurales.

La plupart des enseignants francophones sont formés à l'extérieur de la Colombie-Britannique. Or, même s'ils ont eu à faire un stage d'un an, très peu d'entre eux savent ce que c'est que d'enseigner le français comme langue première dans le contexte d'une minorité puisqu'il s'agit d'un environnement dans lequel ils n'ont pas vécu.

Il n'est pas rare que les enseignants abandonnent ce programme, et cela s'explique de diverses façons. Il y a, entre autres, le manque de ressources, phénomène particulièrement marqué à l'heure actuelle étant donné que le gouvernement de la Colombie-Britannique a choisi de modifier les programmes de tous les niveaux, comme vous en avez sans doute entendu parler. L'une des modifications importantes qui ont été apportées est l'intégration de perspectives autochtones dans toutes les disciplines de tous les niveaux. Or, il y a un manque criant de ressources pour rendre cette chose possible pour tous les enseignants, et le problème se corse encore davantage pour les professeurs de français.

L'autre enjeu, c'est que les trois programmes de français langue seconde ont des problèmes de recrutement. Les cohortes d'élèves pour ces programmes se décharnent donc de plus en plus avec le temps. Lorsqu'elles atteignent le secondaire, les cohortes peuvent être rendues très modestes, et les enseignants sont contraints d'enseigner les programmes de plusieurs niveaux dans le même cours, ce qui, comme vous pouvez l'imaginer, a une incidence de taille sur leur charge de travail et sur l'expérience des étudiants. La situation est encore plus difficile à l'extérieur du Lower Mainland, dans les régions rurales, où, dans certains cas, il n'y a qu'un professeur d'immersion pour toute une école secondaire.

Il y a aussi le fait que le financement fédéral destiné à la fois aux programmes en français qu'au français langue seconde ne se rend malheureusement pas toujours jusqu'à la salle de classe et jusqu'aux enseignants eux-mêmes, et il y a un certain nombre de raisons à cela.

Je vais maintenant parler du financement de l'enseignement du français comme langue seconde. L'un des problèmes, c'est que les enseignants ne savent pas qu'ils peuvent accéder à des fonds fédéraux pour le perfectionnement. Un autre problème, c'est qu'il y a un manque de compréhension — souvent de la part de l'école ou du district scolaire — en ce qui concerne la façon de dépenser l'argent. Il arrive donc parfois que l'argent soit dépensé sur des choses qui profitent à l'ensemble de l'école plutôt qu'aux programmes eux-mêmes.

En outre, le financement est censé couvrir la différence entre les versions anglaises et françaises des livres de classe, mais cette responsabilité est parfois transférée aux écoles. Cette dynamique fait en sorte qu'il y a un manque de ressources pour les enseignants et un manque de livres de classe. Les étudiants qui restent se retrouvent donc souvent sans livres ou avec de vieux livres.

Il y a d'autres raisons pour expliquer pourquoi les enseignants qualifiés désertent le programme. La Colombie-Britannique est l'une des provinces canadiennes où les salaires sont les plus bas et où le coût de la vie est le plus élevé. Il y a cet exemple de deux enseignants de Mission, en Colombie-Britannique, qui ont dû quitter la région parce qu'ils n'arrivaient pas à trouver un logement abordable pour leurs familles respectives. En outre, le fait que la province a le taux de pauvreté le plus élevé au pays a une incidence négative directe sur les étudiants et les enseignants.

Il faut aussi parler du manque de soutien d'éducateurs spécialisés, comme on vous l'a déjà signalé. Lorsqu'il y a effectivement des enseignants-bibliothécaires, des conseillers ou des aides-enseignants, le soutien n'est pas offert en français. Du reste, malgré le mythe dont on vous a aussi parlé selon lequel les professeurs en immersion française sont ultras performants, les enseignants constatent qu'il y a de plus en plus d'élèves avec des besoins spéciaux, des problèmes de santé mentale et des problèmes de pauvreté, constatation qui s'appliquent tant à ces programmes qu'aux deux autres en français langue seconde. Ces élèves ne reçoivent pratiquement pas d'aide pour leurs difficultés, et cela a de toute évidence une incidence directe sur l'enseignement et l'apprentissage.

Un étudiant en français de base qui a des besoins spéciaux sera retiré du cours de français pour qu'on lui donne l'aide dont il a besoin, parce que ce cours est perçu comme étant moins important pour eux que leurs autres matières. Même quand ces étudiants qui ont des besoins spéciaux réussissent bien, les parents se font souvent conseiller de les retirer du programme, ce qui est attribuable au manque de connaissance quant à leur capacité de réussir.

En effet, des études ont montré que ces étudiants avec des besoins spéciaux sont capables d'apprendre une nouvelle langue. Dans bien des cas, cela leur permet en outre d'être au même niveau que les autres étudiants du cours, attendu que tous les membres du groupe s'efforcent d'apprendre une nouvelle langue. Bref, il peut être très bénéfique pour ces élèves de suivre ce cours, même s'ils ont des besoins spéciaux.

Un autre problème est le fait que le soutien supplémentaire offert au primaire est souvent laissé de côté lorsque les étudiants arrivent au secondaire et qu'ils avancent dans leur apprentissage. Les enseignants ont souvent... On constate aussi souvent qu'il y a ce sentiment selon lequel le programme d'immersion française n'est pas vraiment soutenu. Les enseignants ont souvent l'impression que leur programme n'est pas soutenu, ce qui peut les pousser à vouloir sortir du système.

De plus, de nombreux enseignants déménagent ici depuis une autre province et l'environnement d'ici leur apparaît parfois comme un autre pays. La barrière de la langue crée chez eux un effet d'isolement et ils se sentent éloignés des leurs et de leurs amis. Il y a aussi un manque de services en français, manque qui est encore plus difficile à combler dans les régions rurales, comme vous pouvez l'imaginer.

Les programmes d'immersion française sont aussi considérés comme des programmes de choix, par opposition au programme ordinaire de l'école de quartier, alors ils ne sont instaurés qu'au moment où le district scolaire leur trouve une place. Les étudiants sont donc souvent contraints de parcourir de grandes distances pour se rendre à l'école ou le programme est donné. Lorsqu'ils peuvent faire le trajet par autobus, ce sont les parents qui doivent payer, attendu que leurs enfants ne vont pas à l'école de leur quartier. Cette question est très problématique en Colombie-Britannique, compte tenu du déchargement des responsabilités à grande échelle et du manque de soutien à l'égard de l'enseignement public.

Il arrive aussi que les programmes soient tout simplement annulés. C'est ce qui s'est produit à Haida Gwaii. Le programme d'immersion française a été annulé sans consultation et sans égard pour les protestations des étudiants et des enseignants qui voulaient le garder.

Nous n'avons pas beaucoup de recommandations à formuler. L'une d'elles, c'est qu'il faut un meilleur suivi quant à la façon dont le financement fédéral est dépensé afin d'assurer qu'il sert vraiment aux enseignants et aux étudiants francophones et des programmes d'enseignement du français langue seconde.

De l'argent frais est aussi nécessaire pour permettre aux districts scolaires de faire passer l'examen pour le Diplôme d'études en langue française fondé sur le Cadre européen commun de référence pour les langues, afin que les étudiants des programmes de français langue seconde de partout au Canada et à l'international soient en mesure d'évaluer et de valider les compétences linguistiques des diplômés de ces programmes.

De l'argent additionnel doit être accordé aux ressources en matière d'apprentissage, aux enseignants qui enseignent leur utilisation et aux aides-enseignants en apprentissage. Ce soutien doit être donné à ceux qui étudient en français. De plus, étant donné le nouveau programme adopté par la Colombie-Britannique, un financement accru doit être accordé pour créer, traduire et adapter les ressources pour tous les programmes, notamment en ce qui a trait au mandat que s'est donné la province d'intégrer à toutes les matières les façons autochtones de connaître et d'apprendre.

En outre, un travail additionnel doit être fait pour attirer et garder des enseignants qualifiés et des spécialistes. Il serait très utile que toutes les universités offrent des formations pour tous les programmes de français langue seconde, notamment pour le français de base à l'école élémentaire. En faisant cela, il sera plus facile de combler la demande à l'échelle locale. Enfin, vous n'êtes pas sans savoir que les salaires dans l'enseignement en Colombie-Britannique et dans l'ensemble du Canada ne sont pas concurrentiels.

Une formation en français intensif doit aussi être offerte en Colombie-Britannique. À l'heure actuelle, cette formation n'est donnée qu'en Saskatchewan et au Nouveau-Brunswick. Cela permettrait de ramener dans les écoles primaires les enseignants spécialisés dans l'enseignement des langues et de mieux appuyer les enseignants du français de base en allégeant le stress des enseignants de niveau intermédiaire qui ne parlent pas français, mais qui doivent enseigner cette matière.

Les districts scolaires reçoivent le financement nécessaire pour évaluer... Les districts scolaires doivent aussi recevoir le financement nécessaire pour veiller à ce que les programmes soient offerts en fonction de la demande des parents, partout en Colombie-Britannique.

Ce sont les recommandations que nous souhaitons soumettre au comité. Merci beaucoup de votre temps.

La présidente : Merci beaucoup.

Madame Kolber?

Trish Kolber, représentante des enseignants du français, British Columbia Association of Teachers of Modern Languages : Merci de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Je représente la British Columbia Association of Teachers of Modern Languages, une association de spécialistes qui, depuis 45 ans, représente la Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique. Notre travail consiste à promouvoir, à soutenir et à faire avancer l'enseignement et l'apprentissage des langues secondes et d'autres cultures en Colombie-Britannique.

L'éducation publique en français offerte en Colombie-Britannique suit trois grandes avenues. Premièrement, il y a les écoles publiques de langue française, où l'on enseigne le français aux étudiants francophones. Deuxièmement, il y a les programmes d'immersion française qui offrent un enseignement entièrement en français aux enfants non francophones. Troisièmement, il y a les cours de français langue seconde, aussi appelé français de base, et ce sont les professeurs qui donnent ces cours que je représente aujourd'hui.

En Colombie-Britannique, ce programme ne commence qu'en 5e année. Les districts scolaires ne sont toutefois pas nécessairement tenus d'enseigner le français. Ils peuvent choisir d'enseigner une autre langue seconde, comme le mandarin, le pendjabi ou une autre langue, selon la composition culturelle de la collectivité où se trouve l'école. Les élèves du primaire consacrent de 40 à 120 minutes par semaine à l'étude du français, mais il n'y a aucune durée établie pour l'enseignement du français de base à ce niveau.

Dans quelques districts, les cours de français de base sont donnés par un enseignant spécialisé, mais, presque partout, ce sont des enseignants généralistes anglophones du primaire qui s'en chargent. En général, ce sont des professeurs spécialisés dans l'enseignement du français de base qui donnent les cours au niveau intermédiaire et secondaire, mais cela n'est pas toujours le cas.

En 2007, la British Columbia Association of Teachers of Modern Languages et la Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique ont mené auprès de 800 professeurs de français langue seconde un sondage provincial détaillé sur l'enseignement du français en Colombie-Britannique. Le rapport rédigé par Wendy Carr à la suite de ce sondage, Teaching Core French in British Columbia : Teachers' Perspectives, rend compte de la seule étude complète à grande échelle à avoir été réalisée sur la situation des programmes de français de base en Colombie-Britannique.

Ce sondage a donné des résultats troublants. En effet, 78 p. 100 des professeurs de français langue seconde au primaire ont déclaré ne pas se sentir à l'aise de converser en français. Arrêtons-nous un instant pour réfléchir à cela. Les trois quarts des enseignants de français langue seconde ont dit ne pas être à l'aise de parler en français.

Que serait-il arrivé si des professeurs de mathématiques avaient avoué ne pas se sentir à l'aise de résoudre des équations ou si des professeurs d'anglais avaient dit qu'ils ne se sentaient pas à l'aise de lire et d'écrire en anglais? Cela en dit long sur la qualité de l'enseignement du français de base en Colombie-Britannique et, par conséquent, sur la qualité du bilinguisme de la vaste majorité des étudiants qui apprennent le français dans notre province.

Nos enseignants, surtout ceux du niveau primaire et des régions rurales, doivent se montrer à la hauteur et atteindre les résultats d'apprentissage attendus de la province malgré un faible niveau de compétence, de confiance et peu de méthodes d'enseignement.

Compte tenu de ces facteurs, notre première recommandation serait d'exiger que tous les enseignants suivent un cours de méthodes d'enseignement du français avant d'être autorisés à enseigner cette langue. Deuxièmement, il est nécessaire d'établir un processus de présélection plus rigoureux afin d'assurer que les nouvelles recrues aient une maîtrise minimum de la langue qu'elles vont enseigner. Troisièmement, il faut offrir aux professeurs de français des occasions de perfectionnement professionnel afin qu'ils maintiennent leur niveau de connaissances et gardent un contact avec la culture francophone, et que cela se fasse conformément au tout nouveau programme que la Colombie-Britannique a mis en place en matière d'enseignement.

Les fonds fédéraux pour le français sont essentiels pour continuer à promouvoir le bilinguisme auprès des citoyens canadiens. Nous estimons toutefois que des mises au point sont nécessaires quant à la gestion et à l'octroi de ces fonds. Voici quelques-unes de nos recommandations en la matière. Premièrement, exiger que les districts scolaires suivent de plus près l'utilisation et l'octroi des fonds fédéraux pour le français et rendent davantage de comptes au ministère de l'Éducation à cet égard. Deuxièmement, donner aux enseignants davantage de contrôle et d'autonomie quant à la gestion et à l'utilisation en classe des fonds fédéraux pour le français. Troisièmement, accroître le financement accordé aux activités culturelles, en classe et à l'extérieur de l'école, tant pour les étudiants que pour les enseignants.

Plusieurs provinces canadiennes ont mis en œuvre des programmes fondés sur le Cadre européen commun de référence pour les langues, le CECR, qui peut mener à l'obtention d'un DELF, soit un diplôme d'études en langue française. Ce diplôme de langues officiel accordé par le ministère de l'Éducation national en France est reconnu dans le monde entier. Les enseignants qui sont membres de la BCATML ont constaté que l'obtention d'un DELF peut motiver les élèves en Colombie-Britannique, car il leur donne un objectif concret et, par conséquent, un sentiment d'accomplissements et de réussite.

Si le gouvernement finançait les examens du DELF pour les élèves du cycle supérieur, cela pourrait les encourager à continuer d'étudier le français jusqu'à la fin du secondaire, pendant leurs études postsecondaires et peut-être même sur le marché du travail. Par ailleurs, la BCATML recommande au gouvernement d'accorder aux enseignants de Colombie-Britannique les fonds nécessaires pour entreprendre la formation menant à l'obtention du DELF. Cela leur permettrait d'améliorer leur compréhension du français et leurs aptitudes dans cette langue et aurait l'avantage de normaliser le niveau de compétence des enseignants de toute la Colombie-Britannique, et peut-être même du Canada, dans les cinq aspects de l'acquisition du langage.

Pour conclure, l'enseignement du français de base en Colombie-Britannique requiert un apport substantiel de locuteurs qui parlent couramment cette langue, de la formation sur les plus récentes méthodes d'apprentissage des langues et un perfectionnement professionnel connexe, ainsi qu'un accès plus facile aux fonds fédéraux alloués aux programmes, dans le but de permettre aux étudiants de la province en quête de bilinguisme d'atteindre leur plein potentiel.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup, madame Kolber.

En cette Journée mondiale des enseignantes et des enseignants, je tiens à reconnaître publiquement le travail important que vous faites dans votre profession, pour vos étudiants et votre communauté. Ayant moi-même été enseignante il y a plusieurs années, je peux reconnaître le dévouement qu'il faut pour être enseignant, surtout dans notre société qui devient de plus en plus complexe. Je vous remercie donc d'être ici ce matin.

Notre comité a publié un rapport, en 2014, intitulé Viser plus haut : Augmenter le bilinguisme de nos jeunes Canadiens qui, justement, met de l'avant l'importance d'une formation professionnelle, d'un appui pour les activités culturelles et du développement d'un Cadre canadien commun de référence pour les langues, semblable au cadre européen. C'est un rapport important, et je vous encourage à le lire si ce n'est déjà fait.

La première question sera posée par la sénatrice Gagné.

La sénatrice Gagné : Bravo à vous tous et à toutes pour vos excellentes présentations qui sont très appréciées.

Je viens également d'une famille d'enseignants et d'enseignantes. J'ai commencé ma carrière en salle de classe. J'ai un fils qui est enseignant, j'ai des frères et sœurs, des beaux-frères et belles-sœurs, des neveux et nièces qui le sont également. Je suis donc bien entourée.

Je constate, par contre, qu'on ne vit plus dans le même contexte que celui dans lequel j'ai vécu lorsque j'étais en salle de classe, quand j'ai commencé, à l'âge de 21 ans. Vous vous imaginez, cela fait plusieurs années. Comme la sénatrice Tardif l'a mentionné, c'est un milieu beaucoup plus complexe qu'il y a une quarantaine d'années, lorsque j'ai commencé.

Vous avez aussi très bien exposé les enjeux entourant l'enseignement en langue française et le manque de financement. Et cela, on l'a entendu partout où on est allé et aussi dans le cadre des audiences d'hier.

J'aimerais qu'on s'attarde aux mesures qui devraient être prises pour assurer la qualité des programmes, surtout en ce qui a trait au recrutement d'enseignants et d'enseignantes qualifiés. Vous avez mentionné les défis à ce chapitre, ainsi que les difficultés d'obtenir du matériel pédagogique en français, au lieu de prendre le matériel en anglais pour le traduire et l'adapter. Je peux comprendre que cela nécessite des ressources et du temps pour le faire. En outre, souvent, l'adaptation ne répond pas nécessairement complètement aux besoins ou à la spécificité des élèves qu'on retrouve dans nos communautés.

Je vous laisse décider qui répondra à ma question.

[Traduction]

Mme Mooring : Merci. Oui, le manque de formation et d'offre, je dirais, de programmes universitaires pour les enseignants est un problème de taille. Il faut donc que plus d'universités offrent de la formation aux enseignants pour répondre à cette demande, et il faut aussi offrir beaucoup plus de soutien aux enseignants anglophones qui apprennent le français de base.

Je suis, moi-même, une enseignante qui vient d'une collectivité septentrionale en Colombie-Britannique. Les enseignants de 7e année couvrent tous les sujets, alors je faisais partie des enseignants chargés d'enseigner le français à mes élèves. Je demandais toujours à mon assistant, l'enseignant qui m'aidait à me préparer, d'enseigner le français, car il arrivait souvent que cette personne le parle mieux que moi. C'est un problème de taille, alors je dirais qu'il faut offrir plus de formations universitaires.

Je dirais aussi que les enseignants devraient avoir un meilleur accès aux cours de perfectionnement professionnel, et c'est souvent une question de financement. Malheureusement, c'est souvent une question d'investissement et de priorités, alors pour faire en sorte que les enseignants se sentent plus à l'aise d'enseigner le français, surtout le français de base, ils doivent avoir un bien meilleur accès à de la formation.

[Français]

Mme Liechtele : Je pense qu'il est aussi important qu'il y ait des gens qui soient formés ici, en Colombie-Britannique. Ce qui se passe, c'est que beaucoup de nos enseignants arrivent dans nos écoles et ils viennent de milieux majoritaires. Et là, ils sont étonnés quand ils arrivent dans leur classe. Ce n'est pas par manque de volonté, c'est qu'ils ne comprennent pas ce qui se passe. C'est pour cette raison que j'ai mentionné, dans mon allocution, qu'il serait important que, dans la formation des enseignants, il y ait des cours sur l'enseignement en milieu minoritaire. On dirait que c'est quelque chose qui va de soi quand on arrive. Cela devrait faire partie de toutes les formations, autant que la formation liée au français langue seconde, mais dans ce cas-ci, ce serait du français pour des francophones en milieu minoritaire.

Il y a un outil qui a été élaboré par la Fédération canadienne des enseignants, la Pédagogie à l'école de langue française (PELF) -, qui a été financé par le gouvernement fédéral et qui a été admis et louangé par plusieurs ministères, les 13 ministères de l'Éducation du pays, je crois, y compris celui du Québec. Il n'y a pas cet aspect. Or, il serait très utile de savoir ce que c'est que de tisser son identité, de développer une identité, de la conserver et de la transformer, et d'inclure les autres francophonies diverses qui sont dans nos écoles. C'est vraiment quelque chose qui serait très bénéfique.

Mme Bergeron : Dans le même ordre d'idées, il y a 25 ans, quand j'ai commencé à travailler dans le domaine de l'enseignement, beaucoup d'enseignants nous arrivaient du Manitoba et du Québec, et le financement provenait en grande partie du ministère pour créer des instituts. À la fin août, on leur faisait une mise au point sur la situation en Colombie-Britannique, sur le fonctionnement des programmes d'immersion et des programmes francophones, et sur la réalité de vivre en situation minoritaire. Et cela fonctionnait bien. Or, tout cela a disparu. Si nous pouvions réinstaurer ces instituts, ce serait déjà un point départ pour acclimater les francophones qui nous arrivent d'ailleurs.

Pour ce qui est des enseignants qui n'ont pas le français comme langue première et qui enseignent dans nos programmes d'immersion ou même dans le programme de français de base, il y a aussi l'idée d'avoir une espèce d'évaluation linguistique obligatoire. C'est laissé au conseil scolaire. Chez nous, on le fait pour nos professeurs d'immersion. On leur fait passer une entrevue en français, on leur demande un exemple écrit également, mais ce n'est rien de scientifique et c'est fait chez nous, et dans quelques conseils scolaires, et ça s'arrête là. On ne le fait pas pour nos professeurs de français de base, parce qu'il n'y a pas le nombre. Si c'était quelque chose qui était institué, une obligation qui accompagnerait la certification, cela aiderait certainement dans plusieurs cas.

[Traduction]

Le sénateur McIntyre : Comme on l'a déjà indiqué, c'est la Journée mondiale des enseignants, c'est donc une bonne journée pour célébrer le travail des enseignants.

[Français]

Mesdames, merci d'avoir porté à notre attention les facteurs suivants, notamment les besoins en formation des enseignants, les mesures qui devraient être prises pour assurer la qualité des programmes offerts à travers la province, le manque de professionnels qualifiés pour répondre à la demande croissante de programmes en langue seconde, le manque d'accès aux ressources pédagogiques, et j'en passe.

Cela dit, auriez-vous des recommandations spécifiques à formuler au comité que nous pourrions prendre en considération pour la préparation de notre prochain rapport?

Je note, par exemple, dans le cas de Mme Kolber, qu'elle a été très spécifique dans ses recommandations. Madame Kolber, vous avez donc déjà répondu à ma question. Cependant, pour la préparation de notre rapport, j'aimerais savoir quelles seraient les recommandations spécifiques des autres personnes. Madame Liechtele?

Mme Liechtele : Je dirais qu'une des recommandations spécifiques, justement, c'est qu'on sait qu'il y a de l'argent consenti par le gouvernement fédéral. On sait que cet argent fédéral est transféré à la province. Ensuite, c'est très dur de retracer ce qui se passe. Oui, les commissions scolaires devraient être à la table, de même que les syndicats. Ils connaissent très bien les besoins de leurs enseignants et enseignantes. Donc, si on veut rendre cela transparent et qu'il y ait une table où il y a plusieurs participants, je pense que le syndicat devrait être à cette table, puisqu'il représente les enseignants.

Mme Bergeron : J'aimerais ajouter quelque chose. Je suis choyée dans mon conseil scolaire. Je reçois directement l'argent dans le cadre de l'entente avec le gouvernement fédéral et, avec les collègues, on décide comment le dépenser. Mais on sait très bien que, selon l'entente, présentement, une somme équivalant à seulement 0,4 p. 100 d'un salaire d'enseignant peut être consacrée aux salaires. Alors, dans l'enveloppe qu'on reçoit, il y a seulement une petite portion qui peut être consacrée aux salaires. Et c'est seulement pour un poste de coordonnateur. Cette année, et pour les trois prochaines années, ils ont dit qu'on pouvait utiliser 1 p. 100 pour un poste de coordonnateur pour la mise en œuvre de nouveaux programmes d'études. Mais, à part cela, c'est tout. Alors, quand on parle de besoins spécialisés, comme l'orthopédagogie, on ne peut pas utiliser ces montants pour payer ce genre de services.

Pour citer un autre exemple, un conseil scolaire qui a plus de 100 élèves en immersion ne reçoit aucun montant pour les besoins spécialisés. Je crois qu'il faudrait peut-être revoir les critères de l'entente.

La présidente : C'est le gouvernement fédéral qui...

Mme Bergeron : Je ne sais pas si ces critères sont imposés par le gouvernement fédéral ou provincial. C'est pour cette raison qu'il faudrait s'assurer de voir, dans l'entente, quels sont les critères que le ministère de l'Éducation impose pour le déboursement de ces montants.

La présidente : Est-ce que le syndicat a vu l'entente négociée entre la province et le gouvernement?

Mme Liechtele : Je ne l'ai pas vue, non.

La présidente : Auriez-vous accès à cette information?

Mme Bergeron : Sur le site du ministère de l'Éducation, on met les grandes lignes et le montant qui est versé aux différents conseils scolaires. Je parle du français langue seconde. En ce qui a trait aux montants qui vont au Conseil scolaire francophone, je n'ai pas vu cette information.

[Traduction]

Le sénateur McIntyre : Madame Mooring, je crois qu'aux pages 17, 18 et 19, vous avez formulé ces recommandations. Cependant, si vous souhaitez ajouter quelque chose, allez-y, je vous prie.

Mme Mooring : Je veux simplement mentionner deux ou trois points.

Premièrement, je veux aussi faire valoir le besoin de reddition de comptes et de surveillance en ce qui concerne la façon dont le financement fédéral est dépensé, mais je voulais aussi mentionner la question entourant le suivi et le maintien en poste d'enseignants qualifiés pour les programmes. Comme Sylvie l'a indiqué, il est important que les enseignants qui sont formés en Colombie-Britannique le soient adéquatement. De cette façon, il nous sera probablement plus facile de les maintenir en poste. Cela serait peut-être utile.

Je voulais aussi mentionner le fait que lorsque nous faisons concurrence avec d'autres provinces pour embaucher des enseignants qui ont été formés, disons, au Québec ou en Ontario, il est clair que nos salaires peu élevés en Colombie-Britannique et notre coût de la vie extrêmement élevé dissuadent les gens de venir travailler chez nous, ce qui désavantage nettement notre province. Voilà certaines des principales recommandations.

De plus, compte tenu de notre diversité dans les secteurs ruraux et urbains en Colombie-Britannique, il existe une réelle... toutes les questions dont nous discutons sont encore plus marquées dans les régions rurales. À Fort St. John, par exemple, il est presque impossible de recruter des enseignants. On y ouvre actuellement un programme d'immersion française, et on est incapable d'embaucher qui que ce soit, et l'année scolaire est déjà entamée. On est en octobre et on n'a encore trouvé personne pour enseigner le français en immersion là-bas.

Vous pouvez vous imaginer que les questions qui sont problématiques en milieu urbain dans cette province le sont bien davantage en région rurale. Comme je l'ai déjà mentionné, je suis originaire de Quesnel, une collectivité septentrionale, et nous réussissons à attirer des enseignants du Québec et de l'Ontario, mais ils ne restent que quelques années. Ils se sentent très isolés dans une petite collectivité, alors il y a un certain nombre de questions que nous devrions examiner et régler.

[Français]

Le sénateur Maltais : Madame la présidente, comme je n'ai jamais enseigné, je vais y aller en rafale avec mes questions pour éviter d'être disputé. Vous prendrez les questions, et ceux qui voudront me répondre le feront.

Madame Liechtele, vous êtes présidente du syndicat. Est-ce que votre syndicat est affilié au syndicat provincial de tous les enseignants de la Colombie-Britannique?

Mme Liechtele : Oui. Nous sommes un des locaux de la FECB, le 93.

Le sénateur Maltais : Est-ce que votre syndicat vous aide dans le perfectionnement des enseignants?

Mme Liechtele : Oui. Et c'est pour cette raison que je mentionnais ce que l'on fait actuellement en ce qui concerne tous les enseignants. Il y a des fonds professionnels que reçoivent les enseignants qui sont définis dans notre convention collective, qui n'ont pas augmenté depuis bien des années. Mais il y a cette journée provinciale, qu'on appelle le « Rond-Point », et qui, à mon avis, est totalement sous-financée. Il y a eu une restriction dernièrement à cause du fait que cela a été peut-être financé... En tout cas, il y a eu des problèmes avec les comptes. Mais ce qui se passe, c'est que, aujourd'hui, c'est très peu financé. Nous, on donne 20 000 $; c'est quand même beaucoup pour un petit syndicat de 450 professeurs. Or, le conseil scolaire verse le même montant, ce qui n'a pas d'allure.

Le sénateur Maltais : En visitant les écoles, j'ai constaté l'attachement des élèves envers les enseignants et enseignantes. J'ai constaté cela surtout au niveau secondaire, parce que vous venez du Québec, et que les enseignants, dans une école secondaire au Québec, ne font que passer. Les trois quarts des enfants ne se souviennent plus de leur nom le soir.

Je veux donc vous féliciter, parce que vous avez un rôle d'éducatrice, mais je dirais aussi un rôle de confidents et de confidentes auprès des élèves qui l'apprécient grandement. C'est extrêmement important.

Est-ce qu'il y a encore un tuteur, dans une école, qui est responsable de la classe?

Mme Liechtele : Non.

Le sénateur Maltais : Est-ce que vous enseignez l'histoire à l'école? Et le cas échéant, quelle histoire enseignez-vous?

Mme Liechtele : Oui. L'histoire est enseignée. Si vous parlez au niveau secondaire, dans les écoles francophones, vous savez que toutes les écoles francophones offrent le programme du Bac international. Donc, le programme d'histoire résulte de ce programme.

Le sénateur Maltais : Est-ce qu'on enseigne l'histoire de la Colombie-Britannique?

Mme Liechtele : Je ne suis pas professeure d'histoire. Je sais qu'à l'école élémentaire, on l'enseigne, mais...

[Traduction]

Mme Mooring : On enseigne l'histoire tant au primaire qu'au secondaire, mais je voulais simplement dire qu'un des changements survenus récemment a été l'inclusion de contenu autochtone dans tous les secteurs. Il faut maintenant enseigner l'histoire des peuples autochtones en Colombie-Britannique, et bien que cela se fasse dans bien des salles de classe, ce sera maintenant obligatoire partout.

Comme nous avons 198 peuples autochtones distincts en Colombie-Britannique, il est très difficile de trouver les ressources disponibles, et nous devons être en mesure d'enseigner cet aspect de l'histoire dans la région où les élèves vivent. C'est très très difficile. Ce sera l'un de nos plus grands défis, et vous pouvez vous imaginer qu'il nous sera encore plus difficile de trouver ces ressources en français.

[Français]

Le sénateur Maltais : Madame Liechtele, vous avez parlé de l'entente quadripartite pour le partage des budgets. Ce serait l'idéal pour vous, mais ce serait une catastrophe dans les autres provinces. Si je me fie à l'expérience du Québec, je vois mal la partie syndicale — et je peux me tromper, je n'ai pas la prétention de tout connaître — distribuer des montants d'argent dans les écoles. Est-ce que ce ne serait pas un peu paradoxal?

Expliquez-moi cela, s'il vous plaît.

Mme Liechtele : D'abord, la relation syndicale, au Québec, est très différente d'ici. Je ne demande pas d'avoir l'autorité de distribuer l'argent, mais d'avoir l'occasion d'être à la table pour pouvoir influencer la façon dont l'argent est distribué, par exemple, pour que l'argent du gouvernement fédéral soit consacré à la formation et à la journée de formation, ou aux bibliothécaires qu'on a éliminés des écoles francophones. Je ne veux pas gérer l'argent, mais je veux avoir une influence sur les aspects dont me font part mes enseignants et sur ce qui se passe dans les écoles. C'est ça le but d'avoir le syndicat à la table.

Le sénateur Maltais : Je comprends très bien, maintenant. Au début, cela m'a fait sursauter, mais je comprends mieux, maintenant. Je vous remercie.

[Traduction]

La sénatrice Jaffer : Merci à tous et bonne Journée des enseignants.

Comme vous le savez, je suis originaire de Colombie-Britannique. Vous avez tous couvert tellement de territoire. Cela me laisse un peu pessimiste, mais je pense que mes collègues devraient connaître certains des défis auxquels tous les enseignants sont confrontés chez nous.

Je vais commencer par vous, madame Mooring. Les enseignants sont en conflit à l'heure actuelle. Vous êtes toujours devant les tribunaux, et il serait utile de montrer l'existence de défis de taille pour l'ensemble des enseignants qui rendent le milieu toxique. J'ai quatre enseignants à la maison, et je sais à quel point leur dévouement à la tâche les empoisonne, car ils ne se sentent simplement pas valorisés, et c'est important pour mes collègues de savoir que le milieu est, selon moi — et peut-être que j'exagère — véritablement toxique. C'est le premier point.

Le deuxième point est que j'ai trois jeunes nièces qui viennent de devenir enseignantes et qui n'arrivent pas à décrocher d'emplois. Elles font de la suppléance. Je n'essaie pas de jeter l'éclairage sur la situation de ma famille, mais bien de montrer que je suis consciente des défis auxquels font généralement face les enseignants, qui ne ressemblent en rien à leur situation quand j'étais jeune et qu'ils étaient très respectés. C'est donc dire que le milieu a changé. Madame Mooring, j'aimerais que vous et d'autres personnes en parliez. Ensuite, j'aurai d'autres questions précises à vous poser.

Mme Mooring : Merci beaucoup d'avoir soulevé la question, sénatrice Jaffer, car c'est un point vraiment important.

En Colombie-Britannique, la relation entre les enseignants et le gouvernement provincial est très tendue. En 2002, le gouvernement a éviscéré notre convention collective, qui avait été négociée équitablement. Il en a retiré des dispositions relatives aux conditions de travail et d'apprentissage. Ces mesures ont causé la perte de 3 000 postes d'enseignants. Alors lorsque nous parlons d'un manque d'enseignants ressources et de bibliothécaires, c'est que nous avons perdu des milliers de spécialistes au cours des 14 dernières années, et nous avons aussi augmenté le nombre d'élèves dans les salles de classe et modifié la composition des groupes. Il n'y a plus de limites à la taille des groupes ou au niveau de difficulté des cours. Les ressources sont très limitées, ce qui a été un changement important.

Nous avons intenté, contre le gouvernement provincial, une action en justice qui dure depuis 14 ans. Le 10 novembre, notre cause sera portée devant la Cour suprême du Canada. Nous avons gagné deux fois en cour provinciale. L'éviscération de notre convention collective a été jugée inconstitutionnelle. La décision a été renversée en appel, si bien que nous portons maintenant notre cause devant la Cour suprême du Canada.

Nous sommes très confiants, et nous espérons que ces dispositions seront rétablies dans notre convention collective pour que nous puissions embaucher plus d'enseignants.

Une autre chose qui vient juste de se produire — hier, en fait — est que le gouvernement a annoncé l'octroi d'un million de dollars aux écoles privées pour appuyer les élèves ayant des besoins spéciaux. Les écoles privées reçoivent déjà le plein financement pour ces élèves. Ce million de dollars vient s'y ajouter afin de permettre un ratio de six pour un, c'est-à-dire de six élèves par enseignant. Je peux vous dire que si les écoles publiques avaient un ratio qui se rapprochait de celui-là, nous pourrions faire des choses incroyables pour nos élèves.

Je suis aussi ravie que vous ayez parlé de la difficulté de décrocher des emplois à temps plein. Nous avons des problèmes réels en Colombie-Britannique; dans certaines parties de la province, il nous est impossible de recruter des enseignants, si bien que des personnes non qualifiées doivent prendre la place d'enseignants qualifiés, tandis que d'autres enseignent des sujets pour lesquels ils n'ont pas reçu de formation simplement parce qu'on n'arrive pas à attirer des enseignants dans certaines commissions scolaires du Lower Mainland, où on ne peut même plus figurer sur des listes d'appel, car elles ont été fermées. La diversité est énorme.

Il faut qu'on offre aux enseignants de meilleurs incitatifs pour qu'ils quittent le Lower Mainland où il n'y a pas d'emplois pour aller dans des endroits où il y en a, et c'est quelque chose... Lorsque j'ai parlé du besoin de s'attarder davantage au maintien en poste et au recrutement, j'englobais aussi la Colombie-Britannique. Il faut faire plus de travail là-bas.

Alors, absolument, si nous prenons les provinces dans lesquelles la relation entre le gouvernement et les enseignants est beaucoup plus respectueuse, si vous êtes originaire du Québec ou de l'Ontario, vous avez l'option de déterminer où vous allez enseigner au Canada. Il est clair que la situation en Colombie-Britannique a été très houleuse, alors merci beaucoup d'avoir posé cette question.

La sénatrice Jaffer : J'ajouterai simplement un point pour que mes collègues aient une idée des défis auxquels les enseignants sont généralement confrontés : premièrement, si vous êtes suppléant, on vous appelle à six heures du matin pour vous dire si vous allez travailler. Vous n'avez pas de travail régulier — et cela continue pendant des années et des années. C'est le premier point.

Le deuxième point concerne les enfants qui ont des besoins spéciaux — et vous l'avez mentionné — ainsi que les auxiliaires d'enseignement. Vous parliez de quelqu'un qui vous aidait à vous préparer. Je pense que cela fait des années que ma sœur n'a personne pour l'aider à se préparer, et elle enseigne la maternelle et la première année. Je dis simplement que ces choses sont aussi spéciales — vous savez, on les voit moins aujourd'hui.

Cependant, j'aimerais vous dire, madame Kolber, qu'après vous avoir écouté tous les quatre, je me sens vraiment très pessimiste, en général, en ce qui concerne la formation en français. Ma première question porte sur les langues autres que le français — le mandarin, le punjabi, le coréen. Je ne sais pas, mais j'imagine que, puisque le besoin est moins marqué, les enseignants sont très spécialisés et très compétents pour enseigner ces langues. Ai-je tort ou pouvez-vous m'en dire davantage à ce sujet?

Mme Kolber : Pour autant que je sache, toutes les personnes qui enseignent d'autres langues en Colombie-Britannique sont des immigrants ou des descendants d'immigrants de première génération qui les parlent comme langue maternelle. Je connais très peu de cas dans lesquels les gens n'ont pas appris ces langues dans un contexte authentique plutôt que dans le contexte d'un programme d'immersion.

La sénatrice Jaffer : Je me rends souvent dans les écoles secondaires et à ces occasions, je m'informe toujours de la formation en français, et on me répond invariablement : « Oh non, nous n'aimons pas le français ». Ils choisissent le mandarin ou une autre langue, et je me suis aussi demandé pourquoi.

Nous avons tous été des élèves. Si l'enseignant était bon, nous aimions le sujet. Alors j'en déduis que le problème ne réside pas dans la langue, mais bien dans la façon dont elle est enseignée, et ce n'est pas de la faute de l'enseignant. Je ne dis pas cela, mais il est clair que cela pose problème.

L'autre question se rapporte au phénomène des écoles de week-end, dont j'aimerais que mes collègues soient informés. Elles existent peut-être dans d'autres provinces, je ne sais pas. Nous avons des écoles de week-end en mandarin, en allemand et en coréen. Parmi les personnes du Lower Mainland qui n'apprécient pas le type de formation en français qui est offerte dans les écoles, l'Alliance Française et autres gagnent en popularité, mais ces écoles sont, en quelque sorte, réservées à une élite, car il coûte très cher d'y envoyer ses enfants. En conséquence, il y a encore là une question d'accessibilité, si bien que tous les enfants ne peuvent pas bénéficier d'une bonne formation en français. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Mme Kolber : Je pense qu'au Canada, nous croyons que tous les élèves ont le droit d'apprendre leur langue seconde, y compris en Colombie-Britannique. Il est clair que la majorité des élèves qui apprennent le français dans cette province n'ont pas accès aux écoles du samedi en français.

Nous voulons qu'un programme de français de qualité soit offert dans les écoles, et vous avez soulevé un point important concernant les méthodes. Les enseignants, surtout ceux que je représente, ceux qui n'enseignent leurs cours de français que deux ou trois heures par semaine, se sont dits découragés. Les méthodes d'enseignement ne suivent pas nécessairement la façon d'apprendre de nos enfants aujourd'hui. Nous avons un tout nouveau programme dont les méthodes d'apprentissage sont assez conformes à la façon dont les adolescents aiment apprendre, c'est-à-dire en se servant de la culture, de la danse et de la musique pour donner vie à la langue et en faire un outil de communication — plus seulement une liste de points à acquérir, mais bien une langue vivante.

En ce qui concerne les autres langues que notre organisme représente, je crois que ces professeurs ont peut-être réussi à mettre de l'avant certains aspects culturels qui sont perçus comme exotiques et stimulants et qui ont su capter l'intérêt des élèves. Notre défi en Colombie-Britannique est de susciter le même désir à l'égard de la francophonie, de sa nourriture, de ses traditions et de sa richesse. J'espère que notre nouveau programme réussira à vraiment prendre vie.

Mme Bergeron : Pour répondre à vos questions, la compétence de la personne qui enseigne une langue est fondamentale. Je crois que les gens présument que vous connaissez le français, parce que vous êtes Canadien, et que vous pouvez enseigner le français si vous êtes un enseignant du cycle intermédiaire, ce qui est faux, comme nous le savons tous. Je souhaiterais que ce soit aussi simple, mais c'est faux, et c'est important.

En neuvième année, lorsque nous commençons à enseigner l'espagnol et le pendjabi, nous avons des enseignants qui parlent la langue, puis nous entendons certains dire : « Oh, j'ai passé quatre ans avec un enseignant qui peinait à parler la langue, et j'ai maintenant un vrai cours. » Par conséquent, ils changent. Nous devons donc vraiment outiller nos enseignants pour être mieux...

La sénatrice Jaffer : J'ai mentionné cette semaine qu'il faut adopter une approche exhaustive à l'égard de l'enseignement. Je vous ai écouté toutes les quatre parler, et il faut également donner des ressources additionnelles, parce que l'enseignante doit payer de sa poche. Il n'y a pas d'argent disponible. Je sais que les enseignants doivent fournir des ressources en Colombie-Britannique, mais je ne sais pas ce qu'il en est ailleurs.

Mme Mooring : Nous avons réalisé des recherches sur le montant que dépensent les enseignants dans leur classe. Les enseignants de la Colombie-Britannique comptent parmi ceux qui pigent le plus dans leurs poches pour fournir non seulement des fournitures, mais aussi de la nourriture. La Colombie-Britannique est l'une des provinces où le taux de pauvreté chez les enfants est le plus élevé au pays; elle arrive au deuxième rang, mais c'est la seule province qui n'a pas de plan de réduction de la pauvreté.

Nous constatons que les enseignants, en particulier dans les écoles vulnérables où les élèves vont à l'école sans les ressources dont ils ont besoin, ont tendance à dépenser personnellement beaucoup d'argent. Les institutions ont malheureusement tendance à se fier aux enseignants et aux parents pour lever des fonds en vue d'acheter des biens essentiels. Il s'agit souvent de collectivités très vulnérables, et vous demandez des fonds supplémentaires pour des écoles qui devraient être financées par l'État.

Le sous-financement du système se manifeste de bien des manières. Cela se traduit par un manque de ressources et l'incapacité d'attirer des enseignants en raison du salaire. Le sous-financement chronique ronge gravement l'ensemble du système, et cela aura évidemment des effets encore plus sentis sur les programmes en langue française.

La perception que les élèves francophones sont moins vulnérables que les autres est fausse. Nous constatons que l'ensemble de notre population étudiante devient plus vulnérable, et c'est généralisé. C'est donc un grand problème.

[Français]

Le sénateur Maltais : Madame Liechtele, pour bien comprendre votre demande, au Québec, les enseignants siègent au comité d'école qui, à partir du budget de l'école, travaille à la répartition des ressources. Est-ce que c'est ce que vous demandez?

Mme Liechtele : Non. Ça, c'est ce qu'on appelle, ici, le Conseil de planification scolaire, et ça a été retiré de la loi. En Colombie-Britannique, il y a la Loi 11 qui a été adoptée, et il n'y a plus de Conseil de planification scolaire. Cela n'existe plus en Colombie-Britannique.

Ce que je demande, c'est qu'il y ait une entente, parce que la distribution de l'argent est décidée par la commission scolaire et qu'elle n'a aucune obligation de demander l'avis du syndicat, si ce n'est que de la lui présenter. C'est là où le bât blesse. Comment expliquez-vous qu'il n'y ait pas d'argent alloué aux bibliothécaires en milieu minoritaire francophone? Pour moi, c'est un scandale.

Le sénateur Maltais : Je comprends mieux. Excusez-moi si j'ai eu un peu de difficulté à comprendre.

Mme Liechtele : Non, ça va. Vous pouvez communiquer avec moi n'importe quand.

La présidente : Madame Liechtele, est-ce que vous avez présenté vos souhaits au conseil scolaire?

Mme Liechtele : Comme je le dis dans mon allocution, tous les mois, il y a un Comité conseil éducation qui réunit tous les partenaires et où on discute de l'argent du PLOE, comment il est dépensé, et cetera. Oui, c'est une présentation, mais on n'a pas d'influence réelle. En outre, ce n'est pas d'aujourd'hui que je demande des bibliothécaires. Cela fait deux ans que j'en fais la demande.

[Traduction]

Mme Mooring : J'aimerais mentionner que nous soulevons depuis longtemps notre inquiétude au sujet du manque de consultations et avons expliqué au conseil scolaire que c'est un problème. Il n'y a tout simplement pas de coopération en vue de nous assurer de donner une voix aux enseignants.

Nous sommes d'avis que les enseignants, par l'entremise de leur syndicat, sont les mieux placés pour savoir ce dont ils ont besoin dans leur classe, mais ils n'ont pas de voix à la table où se prennent les décisions concernant les dépenses; c'est très différent de participer aux discussions sur la manière de dépenser l'argent au lieu de tout simplement apprendre que d'autres ont décidé comment l'argent sera dépensé sans en discuter avec les personnes qui sont les mieux placées pour savoir ce dont elles et leurs élèves ont besoin dans les classes. Il y a une voix importante qui n'est pas entendue.

Le sénateur Maltais : Je comprends.

La présidente : Merci beaucoup. Malheureusement, notre temps est écoulé.

Je tiens à vous remercier du fond du cœur d'être venues témoigner aujourd'hui et à vous rappeler que toutes les recommandations que nous formulerons dans notre rapport devront évidemment concerner le gouvernement fédéral. Nous ne pouvons pas toucher aux compétences provinciales, et l'éducation en est une. Nous devrons donc faire preuve de prudence, mais nous sommes certainement conscients du rôle que peut jouer le gouvernement fédéral en vue d'offrir des mesures incitatives et de promouvoir les langues officielles par l'entremise du financement qu'il fournit aux différentes provinces.

[Français]

Un grand merci à vous toutes. Merci de votre engagement et de votre dévouement.

Nous enchaînons avec la troisième partie de nos audiences publiques. Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui, de la Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique, Mme Marie-Pierre Lavoie, présidente, ainsi que Mme Marie-Andrée Asselin, directrice générale. Bienvenue à vous deux.

De l'organisme Canadian Parents for French, nous accueillons Mme Cendra Beaton, présidente de la succursale du District de Sooke, et Mme Mary-Em Waddington, présidente de la succursale du Surrey. Bienvenue à toutes.

Comme vous le savez, nous poursuivons notre étude sur les défis liés à l'accès aux écoles françaises et aux programmes d'immersion française de la Colombie-Britannique.

Madame Lavoie, vous allez commencer, si je comprends bien. Suivront ensuite Mme Beaton et Mme Waddington.

La parole est à vous, madame Lavoie.

Marie-Pierre Lavoie, présidente, Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique : Madame la présidente, honorables sénatrices et sénateurs, merci de nous accueillir aujourd'hui. Je vais commencer par une petite présentation de qui je suis. Je suis une maman de deux jeunes âgés de 14 et 16 ans. Vous allez les rencontrer demain lorsque vous viendrez visiter l'école Victor-Brodeur, à Victoria. J'œuvre dans le mouvement des parents depuis qu'ils sont tout petits, depuis qu'ils ont commencé la prématernelle, et cela, à Edmonton, en Alberta. J'ai été présidente de la prématernelle à l'école Notre-Dame, ensuite, du comité de parents de l'école. Je suis déménagée à Vancouver et je continue dans le mouvement depuis ce temps. Je vois que cela a une grande influence sur la vie scolaire de mes enfants. C'est pour cette raison que je le fais, pour défendre tous les enfants, mais aussi, bien sûr, les miens.

C'est pour moi un réel plaisir d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant votre comité pour parler d'un sujet qui me tient à cœur, l'accessibilité à l'éducation en français langue première dans notre province.

La Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique œuvre dans le dossier de l'éducation depuis sa création, en 1979. Elle représente les parents des quelque 20 000 enfants ayant le droit de recevoir leur éducation primaire et secondaire en français, ici, en Colombie-Britannique.

Notre fédération regroupe 45 associations de parents, c'est-à-dire 30 associations de parents actives dans les écoles du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique, et 15 associations de parents gestionnaires d'un centre préscolaire, soit d'une garderie ou d'une prématernelle offrant un programme en français.

La mission de la fédération est de rassembler, de représenter, d'appuyer et d'outiller les parents dans leur rôle d'éducateur, et de promouvoir leur engagement et leur participation à la création d'un milieu francophone vivant et exemplaire. La fédération réalise cette mission en appuyant les parents et en les informant des choix qui s'offrent à eux et des comportements à adopter afin de favoriser un développement de la langue et de l'identité francophone optimal chez leurs enfants. Elle offre aussi de l'accompagnement et de l'information aux groupes de parents bénévoles qui œuvrent au sein des écoles francophones ou du côté de la petite enfance qui effectuent le démarrage d'un centre préscolaire ou gèrent un tel centre.

Nous sommes un acteur important du développement de l'éducation francophone dans la province et un partenaire privilégié du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique, le CSF. Notre organisme est d'ailleurs codemandeur avec le CSF et certains parents dans la cause juridique qui les oppose présentement au gouvernement de la province.

Dès ses premières années, la fédération a revendiqué, notamment sur le plan juridique, l'obtention d'un système d'éducation francophone de qualité accessible partout en Colombie-Britannique et a participé activement à l'établissement d'un tel système. Ce travail de longue haleine a mené, en 1996, à l'établissement du CSF qui a la responsabilité de gérer le système d'éducation francophone de la maternelle à la 12e année dans la province.

Depuis lors, les effectifs de nos écoles ne cessent de croître d'année en année. Nous sommes particulièrement fiers des 5 700 élèves que compte le CSF. Un tel succès est dû aux efforts concertés des parents, de la communauté francophone et des administrateurs scolaires, ainsi qu'à ceux des centres préscolaires qui sont, pour la grande majorité, logés au sein des écoles francophones.

En effet, depuis plus de 20 ans, le secteur de la petite enfance est devenu un élément important de l'éducation francophone. Quand on parle d'accès à une éducation francophone en Colombie-Britannique, on parle, bien entendu, des écoles qui dispensent une éducation en français langue première à des enfants d'ayants droit, selon l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, mais on parle aussi d'une éducation au sens large du terme qui commence dès la petite enfance, avec la garderie et la prématernelle, et qui va jusqu'au postsecondaire.

Dans le travail d'analyse de votre comité au sujet de l'éducation en français langue première en Colombie-Britannique, il serait impensable, de notre point de vue, de ne pas inclure la petite enfance. Les recherches démontrent clairement que c'est dès la naissance qu'il faut intervenir auprès de l'enfant afin de lui donner les meilleures chances possible de développer son plein potentiel et d'être bien préparé à entrer à l'école. Des recherches scientifiques indiquent, en outre, que chez l'enfant, la période optimale pour le développement du cerveau pour ce qui est du langage est la période de zéro à quatre ans. Ces recherches mettent en relief l'importance, pour les communautés francophones en situation minoritaire, de la petite enfance comme pierre d'assise de l'éducation.

Les garderies et les prématernelles francophones, avec leurs programmes éducatifs axés sur l'acquisition de compétences orales en français, sont d'excellents agents de francisation pour nos enfants, et les préparent ainsi à l'entrée à l'école francophone. Ces programmes ont le pouvoir d'influencer le degré d'appartenance à la communauté francophone et même à la construction identitaire de nos enfants.

De ce fait, c'est en intervenant dès le plus jeune âge que les communautés francophones pourront augmenter le taux de transmission de la langue française chez les enfants, dont un des parents est francophone. Les données du recensement de 2011 indiquent que ce taux de transmission était, en Colombie-Britannique, de 24 p. 100 pour les enfants âgés de zéro à quatre ans, soit l'un des taux les plus faibles au pays. C'est donc dire qu'au sein des familles où un des parents est francophone, l'assimilation touche trois enfants sur quatre, avant leur entrée à la maternelle.

Pour renverser cette tendance, il est impératif d'investir massivement et immédiatement dans les services à la petite enfance francophone. La petite enfance est une porte d'entrée directe vers la maternelle. Les services de prématernelle et de garderie sont donc incontournables dans les communautés francophones, car elles sont un outil puissant de recrutement pour l'école en français langue première. Pour nous, parents, c'est dès le choix de la garderie ou d'une prématernelle pour nos enfants que tout se joue.

En Colombie-Britannique, les statistiques compilées par notre organisme montrent depuis plusieurs années que l'inscription au centre préscolaire en français est la meilleure façon de prévoir l'inscription à la maternelle dans une école francophone. Il est donc essentiel que l'on poursuive le développement du réseau de centres préscolaires en vue d'assurer une place en garderie ou en prématernelle à tous les petits francophones, dès les premières années de leur vie.

Le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer en ce qui concerne l'accessibilité des services à la petite enfance dans les communautés francophones, et ce, en investissant de façon plus importante dans les infrastructures, grâce, entre autres, au programme de Patrimoine canadien qui finance les espaces communautaires à même les projets de construction de nouvelles écoles. En Colombie-Britannique, par exemple, presque tous les centres préscolaires, soit 17 sur 19, sont logés dans une école francophone. De ces centres, cinq occupent ou occuperont prochainement des espaces dits « communautaires », construits avec l'aide financière de Patrimoine canadien.

Cependant, les écoles francophones ont atteint et même dépassé leur capacité en termes d'espaces disponibles, et ce, dans plusieurs régions. Cela signifie que nous avons donc atteint la limite en ce qui a trait au nombre de places en garderie et en prématernelle qui peuvent être actuellement accueillies dans les écoles du CSF. Pourtant, la demande de places en garderie ne cesse de croître.

La fédération des parents est fière de ce qu'elle a accompli avec l'aide de son réseau de parents, en termes de démarrage de nouveaux services à la petite enfance au cours des 10 dernières années. Toutefois, les services actuels sont loin d'être suffisants. Selon Statistique Canada, la province compte environ 4 000 enfants francophones de quatre ans ou moins. Or, il n'y a que 450 places dans les garderies et prématernelles francophones. En comparaison, cette année, ce sont près de 650 élèves qui fréquentent la maternelle dans une école du CSF. De plus, il faut préciser que la majorité des centres préscolaires n'offrent que des services à l'intention des enfants de trois et quatre ans, en dépit du fait que les besoins des familles se font sentir dès que l'enfant atteint l'âge d'un an.

Pour répondre à la demande et assurer l'accès à un centre de la petite enfance à tous les enfants francophones afin de contrer l'assimilation, il faudrait donc multiplier, de manière importante, le nombre de services préscolaires francophones et le nombre de places disponibles dans ces services. Et, pour ce faire, l'aide du gouvernement fédéral est essentielle.

Le rôle du gouvernement fédéral ne se résume pas uniquement aux infrastructures. Avec le renouvellement prochain, en 2018, du Plan d'action en matière de langues officielles, actuellement nommé « Feuille de route », le moment est propice pour réfléchir à la place qu'occuperont l'éducation de langue française et la petite enfance dans le prochain plan de 2018-2023 pour les langues officielles.

Si la petite enfance a pratiquement été écartée de la Feuille de route de 2013-2018, il est crucial qu'elle occupe une place prépondérante dans le nouveau plan. En ce sens, à cause de l'importance des services à la petite enfance pour la pérennité des communautés francophones, nous suggérons que le gouvernement fédéral fasse du développement de la petite enfance un axe distinct dans son prochain Plan d'action pour les langues officielles, au même titre que l'éducation, la santé ou l'immigration.

Les différents intervenants en petite enfance, dont fait partie la Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique, doivent avoir accès aux ressources nécessaires pour continuer à construire sur des assises solides. Le choix de la langue parlée à la maison, dans la communauté et à l'école se fait pendant les premiers mois suivants la naissance et même avant. Un parent bien informé, qui comprend bien ses droits et l'impact de ses décisions sur son enfant en ce qui a trait à la langue, à l'identité, à la culture et à l'appartenance, fera des choix éclairés. C'est particulièrement vrai en Colombie-Britannique où les parents dont les enfants fréquentent les écoles françaises forment des couples mixtes ou exogames, dans une proportion de 87 p. 100.

Le travail des organismes tels que notre fédération de parents se révèle, par conséquent, essentiel pour sensibiliser et accompagner les parents. Il faut donc prévoir, dans le Plan d'action en matière de langues officielles, un investissement suffisant, stable et continu pour créer et appuyer des services à la petite enfance qui satisfont aux besoins des communautés francophones.

Si on veut assurer le développement et l'épanouissement de la communauté francophone en Colombie-Britannique, il faut intervenir à la base. Il faut non seulement continuer à recruter et à préparer les jeunes enfants en vue de leur entrée à l'école française, mais il faut également leur assurer, ainsi qu'à leur famille, toute une gamme de services, de la grossesse jusqu'au postsecondaire. Une bonne façon pour le gouvernement fédéral d'y parvenir serait de créer une stratégie nationale en faveur de la petite enfance, d'y intégrer une composante francophone, et de la mettre en œuvre en partenariat avec les regroupements de parents francophones reconnus comme des chefs de file dans le dossier de la petite enfance francophone au pays.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, les défis sont nombreux en ce qui concerne l'accessibilité à l'éducation francophone en Colombie-Britannique. Pour les parents francophones, le fait de vivre à l'ouest des Rocheuses ne doit pas entraîner l'assimilation linguistique de leurs enfants. La dualité linguistique du pays doit s'étendre et se vivre quotidiennement, d'un océan à l'autre, et ce, dès la naissance.

À l'aube des célébrations du 150e anniversaire de la Confédération canadienne, le gouvernement fédéral doit, plus que jamais, jouer son rôle pour réaffirmer l'importance de cette dualité linguistique en appuyant la vitalité de nos communautés et la capacité des Canadiennes et des Canadiens de vivre en français, et ainsi, faire en sorte que les familles francophones soient sensibilisées et accompagnées, et qu'elles jouissent d'un milieu familial éducatif et communautaire qui assure leur plein épanouissent en français.

La présidente : Merci beaucoup, madame Lavoie.

Madame Beaton, vous avez la parole.

[Traduction]

Cendra Beaton, présidente, section de l'arrondissement scolaire de Sooke, Canadian Parents for French : Merci de votre invitation.

Je m'appelle Cendra Beaton. Je suis née à Val-d'Or, au Québec, où j'ai grandi en français. À l'âge de neuf ans, j'ai déménagé en Ontario, où j'ai été inscrite dans un programme d'immersion en français, comme le français était ma langue maternelle. En trois mois, j'ai appris à lire et à écrire en anglais et à parler la langue, et je suis officiellement devenue bilingue.

J'ai terminé mes études et obtenu deux diplômes, le Cornouiller et le Dogwood, ce qui s'est avéré très utile sur le marché du travail. J'ai tôt fait de remarquer des différences pour ce qui était du salaire et des possibilités d'emploi par rapport aux personnes unilingues et même aux personnes bilingues qui avaient appris une deuxième langue sur le tas au lieu d'avoir étudié dans les deux langues comme moi. Plus tard, à l'âge adulte, j'ai couru l'aventure en Alberta à la recherche de nouvelles possibilités qui étaient nombreuses pour les personnes bilingues.

C'est là que j'ai rencontré mon conjoint, un soldat d'infanterie des Forces canadiennes. Nous nous sommes mariés et avons eu deux enfants, un garçon et une fille. Peu après son retour de l'Afghanistan, il s'est joint à la Marine canadienne, et nous habitons maintenant à Colwood, qui fait partie de l'arrondissement scolaire de Sooke.

Je suis mère au foyer depuis la naissance de mon premier enfant en raison de la nature de la carrière de mon mari. Je suis depuis devenue une bénévole très active, parce que je veux faire avancer les choses aussi souvent que possible. J'ai participé comme bénévole au projet Heroes; je suis membre des comités consultatifs des parents de l'école; je prépare des boîtes à lunch pour les personnes démunies; et cetera.

Ma fille a vite atteint l'âge de la maternelle. Il ne faisait aucun doute qu'elle ferait ses études dans les deux langues, tout comme son frère plus tard. En janvier 2013, nous avons dû faire la ligne dehors et nous avons croisé les doigts pour qu'elle soit acceptée au programme d'immersion en français.

À l'école, je suis devenue membre bénévole de la section locale de l'organisme Canadian Parents for French. Je participe à la plupart des réunions de la commission scolaire, où j'ai toujours été bien accueillie. Je rappelle à la commission les conséquences des décisions sur les programmes d'immersion en français.

Je milite activement en faveur des programmes d'immersion en français. De nombreux changements pour le mieux ont été mis en place, et une étroite collaboration s'est établie dans notre arrondissement scolaire. Les enseignants des cours de langue ont amélioré leurs compétences grâce au Test de français international.

Nous avons commencé à niveler les services de soutien en apprentissage grâce à un programme d'amélioration des aptitudes de lecture en français, mais il reste encore beaucoup à faire. J'entends encore parler d'enfants qui se font conseiller d'abandonner le programme, parce qu'ils souffrent d'anxiété ou de troubles d'hyperactivité avec déficit de l'attention, ou THADA. Or, ces enfants pourraient réussir si les services étaient les mêmes partout.

En deuxième année, ma fille est devenue très anxieuse après avoir été victime d'intimidation. Nous avons appris qu'il y avait très peu de services de soutien en place en raison du manque de fonds. Nous avons eu l'option de l'inscrire au programme Choices pour l'aider à acquérir des compétences émotionnelles. Le programme semblait parfait, mais il était seulement offert en anglais.

Les premières années à l'école primaire sont entièrement en français afin de jeter des bases solides dans la langue seconde, et nous ne voulions pas compromettre l'avenir bilingue de notre fille. Heureusement, il y avait une deuxième école offrant un programme d'immersion en français à une distance raisonnable en voiture. Le transfert dans cette école était la meilleure décision que nous pouvions prendre pour notre fille. Elle avait de toute évidence besoin d'un changement de milieu pour regagner la confiance qu'elle avait perdue.

Que se serait-il produit si nous n'avions pas eu cette possibilité? Des parents qui ont des enfants en immersion française souffrant de troubles d'apprentissage, par exemple, me racontent trop souvent qu'ils se sont aussi sentis forcés d'abandonner la voie qu'ils avaient choisie pour leurs enfants et qu'ils ont eu l'impression de ne pas avoir d'autres choix, même si les enfants se débrouillaient bien avec un tuteur. J'entends parler d'élèves avec un THADA qui sont isolés dans des classes séparées pendant que leurs compagnons de classe font des excursions ou même pendant les heures de cours, car il n'y a pas suffisamment de services de soutien.

La langue de communication empêche-t-elle de répondre à des besoins de base? Pourquoi les services ne sont-ils pas les mêmes qu'en anglais? Est-ce une question de sensibiliser le personnel enseignant pour qu'il accepte et appuie également les élèves des deux types de programmes offerts dans les écoles publiques ou est-ce un appel pour obtenir plus de fonds pour les services de soutien en français?

S'il y avait plus d'argent pour les services de soutien en français et si les gens étaient mieux sensibilisés à l'importance d'accepter les élèves, peu importe leur niveau d'apprentissage, dans les programmes d'immersion en français, nous constaterions une grande amélioration non seulement pour les élèves, mais aussi pour les membres du personnel, qui auraient l'impression d'être mieux entourés et d'avoir les outils dont ils ont besoin.

Le transport limite aussi les choix. Les écoles n'offrent pas toutes des services de transports égaux. Lorsqu'ils choisissent un programme, les parents doivent se demander si leur enfant aura accès à un autobus scolaire ou s'ils pourront les conduire eux-mêmes à l'école d'immersion en français. Le transport coûte cher, et le nombre d'élèves qui peuvent bénéficier de ces services est limité dans notre arrondissement. Il n'y a pas de financement prévu pour le transport des élèves en immersion française. Si c'était le cas, cela encouragerait les arrondissements scolaires.

Si plus d'écoles offraient des programmes d'immersion en français, le transport serait alors accessible à tous de manière égale, et les jeunes auraient plus de choix, sans compter que cela entraînerait une diminution des coûts de transport ou des coûts de fonctionnement.

Les programmes d'immersion en français sont ouverts à tous dans notre arrondissement. Nous espérons continuer à recevoir le soutien de la commission scolaire. La formule de financement du guide de financement des études en français s'est avérée problématique. Dans notre arrondissement, le nombre d'élèves en immersion française a plus que doublé au cours des six dernières années. Or, le montant que nous recevons est fixe, malgré la hausse du nombre d'inscriptions. Une formule de calcul par élève, rajustée chaque année, permettrait de générer les fonds nécessaires pour fournir les ressources et les services de soutien qui répondent aux besoins de nos collectivités et de rallier le soutien de la commission scolaire.

En Colombie-Britannique, nous sommes très loin du Québec, et les envois de documents coûtent plus cher. Dans notre école offrant seulement le programme d'immersion en français, seulement 12 p. 100 des livres de la bibliothèque sont en français. Dans les écoles secondaires, les livres en français occupent moins d'une demi-tablette, et ce n'est pas tout.

Ma section n'épargne aucun effort pour trouver d'autres ressources en français pour les bibliothèques des écoles. Or, ce n'est pas facile compte tenu des besoins.

Je me souviens des frictions entre les parents durant le référendum au Québec lorsque j'étais moi-même élève en immersion française. Mes compagnons de classe et moi ne comprenions pas pourquoi la langue divisait les adultes, alors que, pour nous, il n'y avait clairement aucune différence entre une personne parlant une langue ou l'autre. Ce genre de programmes nous permet de créer une société plus ouverte à la culture. Les études bilingues ne devraient pas être une question de choix, mais bien un droit pour mes enfants et les vôtres en tant que Canadiens. Merci.

La présidente : Merci, madame.

Madame Waddington, allez-y.

Mary-Em Waddington, présidente, section de Surrey, Canadian Parents for French : Bonjour. Je m'appelle Mary-Em Waddington. Je suis mère de deux élèves d'immersion en français, et je suis présidente de la section de Surrey de l'organisme Canadian Parents for French et directrice exécutive du programme des Ordinateurs pour les écoles pour la Colombie-Britannique. Je prends la parole aujourd'hui pour discuter des conséquences du plafonnement des programmes d'immersion en français dans l'arrondissement scolaire de Surrey.

Voici mon histoire. Dès l'âge de deux ans, ma fille faisait des casse-tête de 24 morceaux. Elle posait les morceaux rangée par rangée. Quand c'est devenu trop facile, elle s'est mise à faire des casse-tête à l'envers, c'est-à-dire avec le côté cartonné. Comme j'étais très inquiète que l'école élémentaire ne lui pose pas un défi suffisant, je me suis dit que l'immersion en français serait une excellente manière de la mettre au défi au moyen de la langue. J'avais tort, parce qu'elle a appris le français en trois mois et que dès Noël elle pouvait discuter sans peine avec un commerçant.

Quand le moment est venu de l'inscrire à la maternelle, en 2004, je n'ai pas vécu la même expérience que Cendra. Je n'ai pas eu besoin de croiser les doigts et d'espérer que tout aille bien. J'ai été très choyée. Je me suis rendue à l'école de notre choix, où j'ai attendu avec une autre mère pour remplir des formulaires. C'est tout; ma fille était inscrite. La liste d'attente n'était pas longue, mais ce n'est pas la réalité actuelle à laquelle se heurtent de nombreuses familles à Surrey.

Le programme d'immersion en français à Surrey jouit d'une grande popularité, au point que, depuis cinq ans, plus de 200 enfants se trouvent chaque année sur la liste d'attente pour la maternelle. Cela signifie que depuis cinq ans ce sont environ un millier d'enfants qui n'ont pu se prévaloir du programme d'apprentissage précoce en français.

L'inscription précoce est plafonnée, ce qui oblige les autorités à adopter un système de loterie, et cela signifie que ceux qui sont inscrits à l'immersion en français ont en fait remporté une loterie. Aux rencontres tenues par CPF-Surrey avec la commission pour solliciter davantage de places pour l'immersion en français, la commission répond qu'elle aimerait beaucoup en ajouter, mais qu'elle en est empêchée par le manque de ressources, notamment de locaux et d'enseignants de français qualifiés.

Aux fins de nos discussions, je mettrai l'accent sur le manque de locaux, puisque c'est la raison fondamentale du plafonnement des programmes de français à Surrey. Sur le plan géographique, Surrey est une très grande ville couvrant une superficie de 316 km2. Il suffirait de 17 Surrey pour recouvrir toute l'Île-du-Prince-Édouard. Les gens y affluent; nous estimons que 1 000 personnes s'y établissent tous les mois, et cela dure depuis plus de 10 ans. La ville connaît un immense essor pour répondre à cette croissance, et ce développement prend largement la forme de maisons en rangée, parce qu'elles sont plus abordables pour les jeunes familles qui ont des enfants.

La commission scolaire de Surrey porte tout le poids de cette vaste croissance, qui se traduit par l'arrivée de 1 000 nouveaux élèves tous les ans dans les écoles publiques de Surrey. Cela entraîne bien évidemment une pénurie d'écoles à Surrey. Les 243 salles de classe mobiles de l'arrondissement scolaire et ses 7 000 élèves feraient d'eux le 24e arrondissement en importance dans la province.

Le problème véritable de ces salles de classe mobiles est que le ministère de l'Éducation les considère comme des dépenses de fonctionnement, et ce budget sert pour le salaire des enseignants, les aides-enseignants, les fournitures scolaires, les ressources, les excursions scolaires, et cetera. Le financement des salles de classe mobiles ne provient pas du budget pour les dépenses en capital.

En janvier 2015, la commission a lancé une consultation publique sur la question des programmes facultatifs : la réponse retentissante est que les parents souhaitent davantage d'accès à un choix de programmes, en particulier en français. Au printemps, à la conclusion des inscriptions à la maternelle, quelque 230 élèves figuraient toujours sur la liste d'attente pour le programme de français, contre 213 élèves sur les listes d'attente respectives des trois autres programmes facultatifs combinés.

Depuis avril 2016, CPF Surrey a assisté à de nombreuses consultations publiques afin d'examiner comment la commission répondra à la croissance massive de la clientèle scolaire et comment cette hausse se répercutera sur les programmes facultatifs relatifs à l'apprentissage du français.

Une des consultations publiques a eu pour résultat de transférer le programme d'immersion française d'une école vers une autre. Malheureusement, la nouvelle école commence avec seulement 14 élèves. Le programme demeure en péril. Dans une autre école secondaire, on envisage d'annuler un programme Inter-A ou un programme d'immersion française, parce que la première école est terriblement surchargée. Nous sommes certes chanceux d'avoir une nouvelle école de construite, mais comment allons-nous en remplir les rangs? Selon toute vraisemblance, il faudra transférer les programmes de français.

En fait, cette dernière école est tellement surpeuplée — elle compte plus de 2 000 élèves — qu'elle constituerait, pour ainsi dire, le 13e arrondissement en importance dans la province.

La commission scolaire de Surrey a des politiques concernant les élèves, les écoles et les limites. En vertu de la politique 9200, on accueille les programmes facultatifs uniquement si l'espace le permet. Il s'agit d'une politique juste et raisonnable, sauf lorsque les écoles deviennent tellement surpeuplées que l'espace fait défaut pour les programmes facultatifs, sans parler de l'espace pour les enfants du quartier.

Quant aux familles et aux enfants qui gagnent la loterie, elles arrivent dans un programme qui est déraciné et réinstallé selon les besoins de la commission, conformément à la politique 9200. On perd des professeurs de français, qui passent au volet anglais pour réduire les risques qu'ils soient transférés dans une autre école.

La conséquence imprévue du déménagement des programmes facultatifs est l'augmentation des taux d'attrition normaux, parce qu'un changement d'emplacement scolaire perturbe la famille. À Surrey, il n'y a pas de service de ramassage scolaire. Autrement dit, il n'y a pas de transport. Si vous choisissez d'inscrire vos enfants à un programme facultatif, vous n'aurez d'autre choix que de les y conduire.

Permettez-moi de revenir à la taille de notre ville. Nous savons qu'environ 25 p. 100 des familles vivent dans la zone de recrutement de leurs enfants et qu'en conséquence de l'impossibilité d'organiser la navette ou d'autres raisons familiales, elles décident souvent de renoncer au français. C'est là une perte énorme.

Nous attendons la réunion des commissaires en novembre pour entendre les résultats d'une analyse interne sur les répercussions de l'augmentation de la clientèle scolaire sur les programmes facultatifs offerts dans l'arrondissement scolaire, surtout aux écoles Kwantlen Park, Lord Tweedsmuir et Woodward Hill.

Cela ne représente pas un accès raisonnable à l'autre langue officielle de notre pays. Je ne parle pas moi-même le français. À l'école secondaire, je n'accordais pas le respect voulu à l'acquisition de cette langue, alors que mon père, très anglais, ne comprenait pas les raisons ni l'importance du français, ni du manque de priorité accordée à l'espagnol ou au mandarin, langues qu'il jugeait plus utiles en raison de notre position dans le monde. Parvenue à l'âge adulte, je ne saurais exprimer à quel point je regrette tout cela.

Dans mon introduction, j'ai mentionné mon emploi principal auprès d'Ordinateurs pour les écoles, un programme national du gouvernement du Canada. Cela signifie que j'ai des collègues avec qui je ne peux pas parler directement. J'ai aussi dû embaucher un directeur général qui, selon un des critères du poste, devait être bilingue. Aujourd'hui, je comprends vraiment pourquoi il est important d'avoir accès aux programmes d'immersion française dès un jeune âge.

À l'adolescence, il m'aurait été impossible de prédire où j'en suis aujourd'hui et à quel point il m'aurait été beaucoup plus utile d'acquérir une certaine compétence en français. On entend beaucoup parler des retombées utiles — davantage de choix dans les voyages, meilleurs emplois, meilleur fonctionnement des synapses neuronaux, et tout le reste —, mais il n'en demeure pas moins que nous sommes un pays bilingue. Savoir parler les deux langues officielles témoigne de notre statut de nation, de sorte que nous puissions communiquer les uns avec les autres. À Surrey, nous avons besoin d'un accès à ces cours, et il faut de l'espace pour les élèves francophones. C'est ainsi que nous viendrons à bout des problèmes liés au plafonnement des programmes d'immersion française. Merci.

La présidente : Merci beaucoup, madame Waddington.

Vous nous avez fait des exposés fort percutants, et nous vous en sommes reconnaissants.

La première à prendre la parole sera la sénatrice Gagné, suivie de la sénatrice Jaffer.

La sénatrice Gagné : Je vous remercie beaucoup de vos exposés.

[Français]

Ma première question s'adresse à la Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique. Je voudrais revenir sur la question de la stratégie en matière de développement de la petite enfance. Je voudrais comprendre un peu plus la politique d'investissement de la province dans le domaine de la petite enfance, et comment on arrime les priorités de la province en matière de petite enfance comparativement à ce que vous demandez au niveau fédéral. Est-ce que vous serez en mesure d'arrimer les besoins, de part et d'autre?

Marie-Andrée Asselin, directrice générale, Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique : Bonjour. Pour répondre à la question, ici, en Colombie-Britannique, c'est le ministère du Développement de la petite enfance et de la Famille qui s'occupe du secteur de la petite enfance, et il n'y a pas vraiment de considération pour tout ce qui est francophone. Si, par exemple, ils ouvrent de nouveaux programmes Franc départ, on entre dans le moule avec les anglophones, puis c'est le meilleur projet qui recevra le financement. Il n'y a pas vraiment de spécificité donnée au projet qui vient de la communauté francophone.

C'est la même chose dans le cas du financement pour les centres de la petite enfance. On a présenté une demande la deuxième année, mais il n'y a eu que deux vagues d'appels de projets. La première année, on n'a pas été accepté, et la deuxième année, un des projets de centre de la petite enfance a été approuvé. Mais, encore là, c'était évalué au cas par cas, avec tous les autres projets anglophones. Donc, il n'y a aucune spécificité dans les politiques de la province qui est accordée spécifiquement aux francophones en ce qui concerne la petite enfance.

La sénatrice Gagné : Vous avez déjà reçu du financement du gouvernement fédéral pour ouvrir des garderies. Pouvez-vous me dire dans le cadre de quelle entente cela s'est fait? Est-ce que c'était l'entente Canada-communautés? Est-ce que c'était dans l'entente du PLOE?

Mme Asselin : En ce qui concerne les ouvertures de garderies, c'est un appui aux ouvertures de garderie. Donc, on appuie les groupes de parents dans les régions pour démarrer les nouveaux services. C'est fait dans le cadre des ententes fédérales-provinciales pour les langues officielles en éducation, donc dans le cadre du PLOE.

En ce qui concerne les services d'appui à la petite enfance, on reçoit certains fonds du PLOE et on en a reçu de la province pour d'autres services, par exemple, pour ouvrir notre centre de petite enfance.

La sénatrice Jaffer : Merci beaucoup pour votre présence ici aujourd'hui. J'ai bien compris ce que vous avez dit.

Je voudrais commencer avec Mme Waddington.

[Traduction]

J'admire vraiment votre zèle, et c'est le genre de chose dont nous avons besoin dans notre province. Nous ne pouvons parler que de notre province — vous et moi venons de la même province — lorsqu'il s'agit de déterminer comment accroître le bilinguisme dans notre pays.

Vous venez de Surrey et, même si mes collègues finiront par en avoir assez de cette question, je continue à la poser. En fait, je suis très préoccupée par l'absence de la notion de bilinguisme. Je ne dis pas que ce problème n'existe qu'à Surrey; il s'agit plutôt d'un phénomène généralisé parce que, selon moi, le gouvernement fédéral ne joue pas son rôle de chef de file. Certes, le premier ministre affirme que le français est important, mais quoi encore? On ne peut pas se contenter d'en parler. On doit mettre en place des campagnes. On doit insister là-dessus et, par-dessus tout, on doit fournir les ressources nécessaires.

Ce matin, nous avons entendu des enseignants, et leurs témoignages m'ont rendue très pessimiste; vous savez, si on n'offre pas de bons programmes en français, on ne va pas augmenter le bilinguisme.

Voici ma question : sachant qu'on trouve une très grande communauté sud-asiatique à Surrey et, d'après votre expérience en tant que personne ayant activement participé à la promotion du français, comment devons-nous nous y prendre pour faire comprendre aux gens que nous sommes un pays bilingue?

Mme Waddington : Je vous remercie de votre question. Je crois qu'au fond, il s'agit de sortir de sa petite bulle, pour ainsi dire, et d'aller explorer d'autres cultures. Alors, oui, à Surrey, nous avons une très grande communauté sud-asiatique. Il y a aussi une très grande communauté coréenne et une communauté chinoise. C'est une ville extrêmement diversifiée. Le français est une langue très minoritaire à Surrey. Il est présent à Coquitlam-Maillardville, mais à part cela, on ne trouve pas vraiment de francophones au sud du fleuve Fraser.

À mon avis, la solution consiste à accroître l'accès à des activités communautaires et à mieux faire connaître la langue, mais honnêtement, nous devons, en tant que Canadiens, aller explorer notre pays. Vous savez, si le billet d'avion pour Québec coûtait moins cher que celui pour Vegas, peut-être qu'un plus grand nombre de personnes iraient là-bas afin de vivre une expérience authentique, au lieu d'aller voir des spectacles à Vegas.

En tout cas, nos commissaires à Surrey n'ont pas la tâche facile, et ils sont aux prises avec la question de savoir quoi faire au sujet de la communauté pendjabie dont les membres plaident fortement en faveur de l'enseignement de leur langue dans l'arrondissement scolaire de Surrey. D'ailleurs, leur demande a été acceptée, puisqu'ils viennent de lancer un programme jusqu'à la cinquième année dans certaines écoles primaires à Surrey. Pour ma part, je déplore un peu cette situation.

Je respecte pleinement la grande diversité de notre pays, mais le français est une de nos langues officielles. Je ne sais pas parler l'allemand non plus, mais il y a des écoles du samedi pour l'apprentissage d'autres langues. Je suis donc persuadée que, même si nous respectons la diversité, nous devons appuyer et protéger le français, surtout en Colombie-Britannique parce que nous sommes tellement loin du Québec.

La sénatrice Jaffer : Merci.

J'ai une question qui s'adresse à vous toutes. Les communautés prennent de plus en plus d'expansion — vous avez parlé de Surrey, et j'en suis très consciente. C'est pourquoi je pose sans cesse la même question à propos des communautés qui font pression pour que leurs langues soient enseignées dans le système scolaire. Je ne suis pas contre, mais je pense que notre priorité absolue doit être notre patrimoine linguistique, en ce sens que le français devrait aller de soi; tout le monde devrait l'apprendre, et je ne parle même pas d'un scénario dans un monde parfait. Soit que nous assumons notre bilinguisme, soit que nous y renonçons, mais nous ne voulons pas faire cela. Moi non plus, d'ailleurs.

Voici donc ma question pour vous toutes : en tant que parents, comment pouvons-nous promouvoir le bilinguisme dans notre province?

[Français]

Mme Lavoie : Il faut offrir des services, il faut commencer, comme nous le défendons à la fédération, par la petite enfance, il faut aller jusqu'au postsecondaire. Il faut pouvoir offrir un continuum de services, un continuum d'activités. Et quand je parle de services, il s'agit de services de santé, de services à l'immigration, de services à la petite enfance, mais aussi de services à l'activité pour les jeunes, pour promouvoir l'identité, pour que les jeunes puissent s'amuser dans leur langue maternelle, lorsqu'ils sont francophones, et dans leur deuxième langue, lorsqu'ils sont bilingues, donc dans les deux langues officielles. Il faut que les enfants, que les parents puissent pouvoir offrir ces avantages, ces droits, puisque, comme vous le dites, notre pays est bilingue, il l'est ou il ne l'est pas. Ce sont des droits, il faut pouvoir les leur offrir. Cela passe donc par un continuum dès la naissance, où on choisit dans quelle langue on va éduquer nos enfants. Dans une famille exogame... moi, j'ai eu de la chance, il n'y a pas eu de discussion. Mon mari est anglophone, je suis francophone et nous éduquons nos enfants en français. Il faut pouvoir leur offrir des occasions et, de là, l'étude que votre comité fait pour déterminer quelle est l'accessibilité à l'éducation en français est d'une très grande importance.

[Traduction]

Mme Beaton : À mon avis, nous devons rendre le français plus accessible. Nous devons fournir plus de ressources. Nous devons mieux informer la société. En ce qui a trait à l'immersion française, j'ai vraiment l'impression que les gens ne comprennent pas en quoi consistent la nature et la teneur du programme. J'entends souvent certains administrateurs ou parents dire : « Oh, ce n'est que du français. Je veux que mes enfants l'apprennent comme langue seconde, et non comme langue première. » Je leur explique alors que c'est justement l'objectif du programme d'immersion française. Le programme fait donc souvent l'objet d'un malentendu au sein de la société : oui, c'est un programme bilingue au terme duquel on obtient un certificat bilingue. Voilà ce qui le rend unique.

Si les gens étaient mieux informés et si nous avions un accès égal au programme du système scolaire public, je crois que cela améliorerait grandement la situation dans notre pays. Il y aurait ainsi plus de possibilités. Songez au nombre d'emplois qui exigent déjà le bilinguisme, et imaginez la situation dans 20 ans.

Nous devons offrir ces possibilités afin de répondre aux besoins de demain. À défaut de quoi, comment allons-nous nous y prendre?

Le sénateur McIntyre : Je fais écho aux observations de la sénatrice Jaffer, et je suis d'accord avec elle pour dire qu'il y a effectivement un manque de leadership non seulement dans cette province, mais aussi dans l'ensemble du pays, pour ce qui est de promouvoir le bilinguisme officiel; cela ne fait aucun doute.

[Français]

Mesdames Lavoie et Asselin, je note que, depuis des années, votre fédération mène différentes luttes judiciaires aux côtés du CSF pour obtenir des services pour les élèves des écoles françaises qui soient comparables à ceux offerts aux élèves anglophones. Vous connaissez sans doute la décision récente de la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l'affaire impliquant le Conseil scolaire francophone de cette province. C'est une décision de 1 600 pages. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans les détails de la décision. Naturellement, la réaction des intervenants est mitigée avec un mélange de joie et de déception.

La déception touche évidemment le fait que la cour ne reconnaît pas l'obligation, en vertu de l'article 23 de la Charte, d'offrir des services à la petite enfance en français. Je mentionne ceci, madame Lavoie, parce que, dans vos présentations, orale et écrite, vous avez parlé beaucoup de la petite enfance, et je suis d'accord avec vous.

Cela dit, pourriez-vous brièvement nous parler des luttes judiciaires que vous avez engagées dans les dernières années, sans entrer dans les détails de la décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique? Est-ce que les luttes que vous avez menées aux côtés du CSF semblent donner certains résultats? Est-ce qu'on avance à pas de tortue en Colombie-Britannique, sachant qu'on avance quand même?

Mme Lavoie : C'est sûr qu'on a avancé un peu, puisqu'on a maintenant un conseil scolaire en Colombie-Britannique. Du côté de la petite enfance, c'est très difficile, comme vous le dites, parce que le gouvernement provincial ne semble pas reconnaître la spécificité du côté francophone. On se bat pour dire que tout commence là. Si on veut pouvoir continuer à faire croître le système scolaire, si on veut pouvoir continuer à éduquer nos enfants en français, il faut commencer par leur donner les options dès le départ. Si nos enfants ne peuvent pas aller dans des services de garde, dans des services de prématernelle en français, ils vont se tourner tout simplement vers l'école anglaise et, éventuellement, ce sera l'assimilation.

Comme je l'ai dit, des 4 000 enfants qui ont droit à des services préscolaires en français, il n'y a de la place que pour 450. On a besoin de places.

Le sénateur McIntyre : Mais pour être plus précis, ma question est la suivante : pensez-vous qu'il est important de continuer à faire des luttes judiciaires pour avancer?

Mme Lavoie : Ah! Tout à fait!

Le sénateur McIntyre : Parce que, sans cela, vous n'avancerez jamais.

Mme Lavoie : Tout à fait! Vous avez entièrement raison.

Le sénateur McIntyre : Il n'y a pas de volonté politique. C'est aussi simple que cela.

Mme Lavoie : Tout à fait. Et c'est ce qui est décourageant. Il faut toujours se battre pour une chose à laquelle on a droit. C'est malheureux, mais vous avez entièrement raison, il faut qu'on continue à se battre, et on ne baisse pas les bras.

Vous l'avez dit, la réaction est mitigée à la décision de 1 600 pages, qu'on n'a pas fini de lire et d'analyser. Mais il faut continuer. On ne peut vraiment pas arrêter.

Marie-Andrée, est-ce que tu veux ajouter quelque chose?

Mme Asselin : C'est le système, soit les formules de financement et le système d'allocation des projets qui est une des pierres angulaires de notre recours juridique. Si le système répondait aux besoins des francophones, ou s'il y avait un système complètement différent pour le financement, on n'aurait pas ces problèmes.

Par exemple, je vais parler des programmes Franc départ — Strong Start du côté anglophone. Dans les communautés anglophones, les écoles se vident. Donc, il y a plein d'espaces disponibles pour la communauté. Le ministère de l'Éducation a décidé de mettre sur pied des programmes Franc départ pour les jeunes enfants.

Chez nous, dans nos écoles, les chiffres sont en croissance extrême et il n'y a plus de place dans nos écoles. Alors, même si ce beau projet est mis de l'avant, il ne répond pas aux besoins des francophones, parce qu'il n'y a plus d'espace chez nous. Dans les 37 ou 38 écoles du conseil scolaire, on a seulement six programmes Franc départ. Comment cela se fait-il? On en a besoin partout, mais il n'y a pas de place dans les écoles. Donc, le système n'est pas fait pour accommoder les besoins des francophones.

Le sénateur McIntyre : Justement, sur ce point, la décision de la cour traite non seulement de la question de la petite enfance, mais elle traite également des infrastructures scolaires francophones.

Par exemple, je note que la cour oblige la province à agir pour améliorer certaines infrastructures scolaires francophones, notamment pour ce qui est des écoles élémentaires du Pacifique, l'école Entre-lacs, à Penticton, à Sechelt, l'école des Deux-Rives, à Abbotsford, et l'école Rose-des-vents, à Vancouver. Par contre, je note que la cour reconnaît que l'article 23 de la Charte a été enfreint, mais elle n'oblige pas la province à financer l'amélioration des infrastructures ou la construction de nouvelles écoles, puisqu'elle n'a pas agi de façon déraisonnable. C'est le cas notamment à Victoria.

Le point que je veux soulever est le suivant : il s'agit non seulement de la petite enfance, mais aussi des infrastructures scolaires francophones. Il faudra donc, à moins que j'aie tort, que vous retourniez aux barricades judiciaires.

Mme Lavoie : Possiblement, oui. Aucune décision n'a été prise encore en ce qui concerne les conseils d'administration. En fait, le conseil scolaire, la fédération des parents et des codemandeurs s'opposent au gouvernement provincial dans cette cause. Il faut qu'on se réunisse et qu'on finisse d'analyser la situation pour décider quelle sera la suite. Oui, il faudra toujours se battre.

Si on avait un système national pour la petite enfance, ou un système national pour l'éducation francophone qui comprenne la petite enfance, ce serait idéal. Si on commence par la base, les provinces et les territoires devront être redevables envers cette politique nationale. On pourrait tout uniformiser jusqu'à un certain point, pour que les gouvernements provinciaux et territoriaux n'aient pas le choix que de respecter les règles.

Il faut aller jusqu'au niveau national. Et c'est exactement ce que vous avez entendu la semaine passée de la part de la Commission nationale des parents francophones. On est membre de cette commission, et c'est ce qu'on aimerait voir du côté de la petite enfance pour éviter de toujours avoir à se battre.

Le sénateur McIntyre : Avez-vous eu l'occasion de rencontrer vos députés provinciaux et fédéraux?

Mme Lavoie : Non. On essaie, mais on n'a pas toujours les réponses qu'on voudrait avoir pour les rencontrer.

On a d'ailleurs organisé un événement, lundi, où on a accueilli M. Lorieau, le représentant du Commissariat aux langues officielles pour l'Ouest du Canada, qui est venu jusqu'à Vancouver. On a lancé notre programme Franc départ, à l'école Anne-Hébert, et cela a été très bien reçu. Or, le commissaire dit exactement cela. On n'offre pas assez d'accès aux services à la petite enfance pour assurer la pérennité de la communauté francophone à long terme.

Le sénateur Maltais : Bienvenue, mesdames. Nous avons sans doute rencontré quelques-uns de vos enfants dans les écoles que nous avons visitées.

J'aimerais revenir sur la petite enfance. C'est le monde à l'envers. Ce matin, Radio-Canada annonce qu'au Québec, il y a trop de places dans les garderies. Si on n'était pas si loin, on pourrait ramasser quelques-uns de vos enfants. Mais peut-être que si c'est Radio-Canada qui l'a annoncé, ce n'est pas nécessairement une vérité de La Palice.

Comme j'ai siégé à un autre Parlement dans une autre vie, j'ai suivi beaucoup de débats au Québec sur la création des garderies publiques et privées de la petite enfance. Il y a deux écoles de pensées à ce sujet. Vous en avez exprimé une qui est fort bien, mais il y en a une autre aussi qui est peut-être pédagogique et philosophique, celle de laisser vivre un enfant. Une enfance n'arrive qu'une fois. C'est comme dans la chanson, on n'a pas tous les jours 20 ans, cela nous arrive qu'une fois durant.

Je suis un grand-père et j'ai beaucoup de petits-enfants qui sont âgés de quelques mois à 16 ans. Ils ont tous passé par le système. Cet été, comme j'ai été en convalescence, j'ai eu la chance de garder plusieurs de mes petits-enfants. Je les observais pendant qu'ils jouaient. Je trouvais qu'ils manquaient d'initiative personnelle. Ils avaient des jeux, ils apprenaient à la prématernelle, et je ne les voyais pas inventifs. Vous savez, une boîte de carton peut amuser un enfant, il suffit d'y faire des fenêtres et une petite porte. Tu leur donnes une boîte de carton, ils attendent que quelqu'un leur dise de faire une fenêtre. Dans mon temps, la première chose qu'on faisait avec la boîte de carton, c'était de la couper. La fenêtre était probablement croche, mais on savait que ça prenait une fenêtre. Personne ne nous l'avait dit.

Je me dis qu'autant chez les anglophones que chez les francophones, ce principe doit s'appliquer à tous les enfants de cette terre. Dans votre cas, vous êtes en minorité, mais est-ce que le rôle des parents doit être plus important, compte tenu de la situation? Je pense que votre fédération de parents francophones devrait avoir des liens tissés plus serrés avec les familles, et échanger des enfants, pas au sens monétaire, évidemment, mais afin établir des rencontres, sur une base un peu plus régulière, pour que les enfants soient entre eux seulement et ne soient pas dirigés. Et là, vous allez vous apercevoir d'une chose, c'est que les enfants n'ont pas de barrière de langues, pas de barrière de couleurs, contrairement aux adultes. C'est un développement extraordinaire pour l'enfant et qui ne coûte pas grand-chose. Et quand ils arrivent à la prématernelle, ils ont déjà un sens de sociabilité, ils n'ont pas besoin de se le faire enseigner, ils l'ont appris en famille, en groupe familial lors de rencontres. Ils ont appris à être sociables. Bien sûr, les enseignants vont développer ce sens de sociabilité, mais avant toute chose, c'est la base familiale.

Avez-vous des commentaires à ce sujet?

Mme Asselin : C'est une très bonne question. On ne peut pas passer à côté. Il faut une multitude de services. Je pense que dans 69 p. 100 des familles canadiennes, les deux parents travaillent. On n'a pas le choix d'avoir des prématernelles ou des garderies pour accommoder les parents. À Vancouver surtout, avec le prix des maisons, on n'a pas le choix de travailler. Il est certain qu'il faut de bonnes garderies qui vont laisser une place aux enfants afin qu'ils puissent jouer par eux-mêmes, que ce ne soit pas toujours un jeu dirigé.

Il faut aussi une gamme de services pour briser l'isolement des familles, parce qu'ici, en milieu minoritaire, quand on veut se retrouver entre francophones afin de créer un milieu francophone autour de notre enfant, il faut aller les chercher, les francophones. Et quand on est mère ou père d'un jeune bébé, ce n'est pas facile. Cela prend une multitude d'activités, de groupes de jeu. Le programme Franc départ est un bon exemple de cela. Le parent vient passer l'avant-midi avec son enfant pour jouer au centre Franc départ. Ce n'est pas nécessairement une prématernelle en tant que telle. Il y a une éducatrice qui est sur place. Il y a une partie des jeux qui est dirigée, une partie du programme qui est dirigée, mais le reste du programme laisse libre cours aux enfants et aux parents afin qu'ils puissent tisser des liens. C'est ce genre de service qu'il faut développer.

On a les Petits Matins, à la Maison de la Francophonie où, deux matins par semaine, une éducatrice est sur place pour accueillir les parents. Ils peuvent s'y rendre sans rendez-vous, pour socialiser et discuter. Il y a une petite collation qui est servie. Donc, c'est fait d'une manière tout à fait informelle. C'est ce dont les parents francophones ont besoin, surtout les parents de jeunes enfants, pendant leur congé parental ou de maternité, pour qu'ils puissent vraiment se sentir appuyés. Nos familles sont souvent loin. Donc, il faut créer une communauté francophone autour de cette famille et non pas seulement offrir des services à l'enfant, comme la garderie et la prématernelle. Ce sont des services à la famille et il faut les concevoir dans l'entièreté des services dont ils peuvent avoir besoin.

Le sénateur Maltais : Compte tenu de tout ce qu'on a vécu au Québec, et de ce que vous vivez ici, je me dis qu'il ne faut pas que la structure fasse disparaître l'enfant, parce que la structure est là pour l'enfant. La base de toutes les structures que vous avez ici, c'est pour la petite bonne femme et le petit bonhomme de six à huit mois, et d'un an à trois ans.

Ce que vous avez expliqué, madame Asselin, est universel. Les deux parents sont obligés de travailler aujourd'hui, le coût de la vie est tellement élevé qu'on n'a pas le choix. Cela prend des garderies de qualité, et la qualité doit être égale. C'est compris dans la Charte canadienne des droits et libertés. Si vous n'avez pas atteint l'égalité au niveau de la petite enfance, ici en Colombie-Britannique, la province — ou les responsables, je ne sais pas qui — viole la Charte des droits et libertés. Or, la Charte des droits et libertés n'est pas maniable, on ne peut pas la mettre dans la garde-robe le lundi et la ressortir le vendredi. Elle est là toute la semaine, 7 jours par semaine, 24 heures par jour. Et je crois profondément à la Charte des droits et libertés, en particulier lorsque cela touche l'enfant, ou la défense des droits de l'enfant. Il est inacceptable que vos organismes politiques n'appliquent pas la Charte dans votre cas.

Madame la présidente, je crois que nous aurons l'occasion de rencontrer beaucoup de personnes au cours de cette année. Soyez tous assurés que le message sera passé. Je ne vous garantis pas le résultat. Vous savez, il n'y a rien de pire que de parler à un sourd qui ne veut rien entendre. Mais nous allons crier très fort, parce que c'est inacceptable. Il ne s'agit pas de la structure, mais bien de l'enfant, d'un Canadien ou d'une Canadienne, et c'est ce qu'on doit protéger.

Mme Lavoie : Sénateur Maltais, vous avez entièrement raison, et c'est ce qu'on revendique depuis longtemps. On veut l'égalité, on veut pouvoir offrir à nos enfants, qui sont au centre de la communauté, qui sont l'avenir du pays, des services auxquels ils ont droit en vertu de la Charte.

Je vous remercie beaucoup. Si vous nous entendez, nous en sommes fort heureux.

Mme Asselin : En outre, Patrimoine canadien doit s'engager aussi à financer la petite enfance. On sait qu'au cours des derniers 5 ou 10 ans, Patrimoine canadien, avec la Feuille de route, a très peu investi en faveur de la petite enfance, et cela a vraiment contribué à l'assimilation et à la déconnexion de la communauté envers la petite enfance.

Quand on parle de qualité égale, par exemple, on veut avoir des éducatrices qui sont bien formées, qui peuvent avoir de la formation continue pour pouvoir faire face aux besoins des enfants d'aujourd'hui. Les projets qu'on a présentés à Patrimoine canadien par rapport à la formation des éducatrices ont tous été rejetés dans les dernières années. C'est inadmissible.

Ce matin, vous parliez avec des gens du milieu de l'éducation, des enseignants. Eux aussi ont besoin de formation, mais les éducatrices aussi. Or, qui est responsable d'offrir cette formation? Cela retombe souvent sur les fédérations de parents qui prennent en charge cette formation. Mais pour pouvoir l'offrir, surtout dans une province où la population est aussi dispersée que la nôtre, il faut faire venir les éducatrices, et ce sont des déplacements qui occasionnent des coûts. Il faut vraiment pouvoir s'assurer que Patrimoine canadien, à l'intérieur des ententes Canada-communautés, puisse financer la petite enfance, financer des projets qui apporteront une qualité égale dans les services.

La sénatrice Gagné : J'aurais une dernière question. Vous avez mentionné que le secteur de la petite enfance est un élément important de l'éducation francophone partout au pays. Je suis parfaitement d'accord. Il reste quand même que l'interprétation de l'article 23 est limitée jusqu'à présent au système de la maternelle à la 12e année.

Pour tenter de contrer cela, vous avez quand même mentionné l'idée de créer une stratégie nationale en faveur de la petite enfance, une stratégie nationale qui ferait partie d'un plan d'action. Il me semble qu'on pourrait aller plus loin. Il s'agirait de penser en termes d'un énoncé de politique gouvernementale en matière de petite enfance qui énonce clairement que la petite enfance est au cœur du développement et de l'épanouissement de nos communautés.

Je me suis demandé si cela pouvait être — je vous fais la suggestion — une possibilité de revendication. Habituellement, une politique gouvernementale aurait probablement plus de poids, et cela nous permettrait d'espérer qu'un jour, l'interprétation de l'article 23 soit faite de façon beaucoup plus libérale et incorpore justement la petite enfance.

Mme Lavoie : C'est une excellente suggestion, et si on martèle le message de tous les côtés, on obtiendra quelque chose qui pourrait nous aider grandement. Je vous remercie de votre suggestion, et on la prend en note.

Mme Asselin : Ce qu'il faut aussi, c'est reconnaître qu'il faudrait des ententes, par exemple, au niveau de la petite enfance, avec les provinces et le gouvernement fédéral, comme il y en avait au début des années 2000. Il faut vraiment reconnaître la spécificité des francophones de sorte qu'une certaine partie de ces fonds revienne à la communauté francophone. Sinon, on va passer à côté.

La sénatrice Gagné : Quand je parle d'un énoncé gouvernemental, c'est pour les communautés vivant en situation minoritaire.

Mme Lavoie : Je voudrais ajouter à ce que Mme Asselin a dit. Comme il y a de l'argent qui est désigné pour les Premières Nations, on a besoin qu'il y ait de l'argent qui soit désigné pour les francophones en situation minoritaire, comme vous le suggérez.

[Traduction]

La présidente : Ce sera peut-être la dernière question, mais je voudrais poser une question à la représentante de Canadian Parents For French. Je crois comprendre qu'en vertu de la politique en Colombie-Britannique, l'apprentissage d'une langue seconde est obligatoire de la cinquième à la huitième années, mais le français n'est qu'une option parmi une foule d'autres langues qu'un conseil scolaire pourrait choisir d'offrir. Que pensez-vous de cette politique?

Mme Beaton : Personnellement, même si j'aime et j'apprécie toutes les langues du monde, étant moi-même bilingue, je suis très ouverte aux autres cultures, mais je trouve que nous devons préserver nos langues officielles avant les autres. Tant mieux si on enseigne d'autres langues, mais elles devraient passer après le français ou l'anglais.

La présidente : Que pensez-vous du fait qu'on commence dès...

Mme Beaton : Dans notre arrondissement scolaire, l'apprentissage du français de base commence en 4e année, mais rendus en 10e année, les élèves oublient presque tout; donc, nous devons en faire plus. Dans le cas du français de base, les élèves n'apprennent que les rudiments du français, ce qui est... [Note de la rédaction : inaudible]. Ils n'apprennent pas à soutenir une conservation suivie, ce qui est attribuable, en partie, au fait que les enseignants n'ont pas les compétences nécessaires pour donner le cours ou, je le répète, au fait qu'il y a une pénurie de ressources ou encore, un manque d'échanges entre les différents programmes de français.

Si nous pouvions trouver une façon de mieux répondre à la demande pour ces cours, les élèves auraient beaucoup plus de chances de maintenir leurs compétences linguistiques. Nous devons en faire un peu plus pour... après tout, nous vivons au Canada. Honnêtement, cet apprentissage devrait commencer dès le premier jour d'école. On ne devrait pas le remettre à plus tard. Vous savez, les gens qui viennent au Canada s'attendent à ce que tout le monde apprenne les deux langues, mais force est de constater que ce n'est pas la réalité. En tant que citoyenne canadienne, je trouve cela plutôt décevant.

La présidente : Madame Waddington, êtes-vous du même avis?

Mme Waddington : Non, je suis certainement d'accord avec Mme Beaton pour dire qu'il y a un manque fondamental de ressources en Colombie-Britannique, allant du nombre de places disponibles jusqu'aux livres. D'ailleurs, le Syndicat des enseignants a dit ce matin qu'environ 78 p. 100 des enseignants ne sont pas capables de s'exprimer en français avec aisance, ce qui aura évidemment une incidence sur la façon dont ils enseignent la matière en classe.

Le programme d'immersion française existe depuis 40 ans, je crois, partout au Canada et en Colombie-Britannique. Nous sommes réellement aux prises avec un manque, car il n'y a pas assez de francophones pour en faire la promotion, et c'est considéré comme une question touchant une très petite minorité. Il ne devrait pas en être ainsi puisque nous sommes des Canadiens et nous vivons dans un pays bilingue. On doit renforcer l'apprentissage du français dans notre système d'éducation.

Mme Beaton : J'aimerais ajouter que les convictions de l'administration en ce qui concerne le bilinguisme et l'intégration du français varient beaucoup d'un arrondissement local à l'autre. Chaque conseil scolaire semble fonctionner différemment; par exemple, dans mon arrondissement scolaire, je participe activement au processus décisionnel en tant que présidente de ma section locale, et on m'écoute vraiment. Je présente des faits en disant : « Nous devons faire mieux. Comment pouvons-nous appuyer cela? » Les administrateurs en tiennent compte et ils font de leur mieux pour y donner suite, alors que dans l'arrondissement de Mme Waddington, c'est très différent.

Si on pouvait nous fournir une orientation, c'est-à-dire nous indiquer comment procéder au lieu de simplement nous donner les fonds et de nous dire de nous débrouiller, la situation serait alors bien différente. Nous avons besoin d'une approche plus uniforme dans l'ensemble de la province.

La sénatrice Jaffer : Madame la présidente, j'aimerais apporter une précision. J'ai laissé faire tout à l'heure, mais il y a un point qui me rend très mal à l'aise. Je crois que personne ne voulait insinuer cela, mais je ne veux pas que, dans ma province, les gens disent : « Oh, les Autochtones ont ce droit, et nous ne l'avons pas. » Je ne pense pas que c'est ce que vous vouliez dire, mais je tenais simplement à le préciser aux fins du compte rendu. Les Autochtones font face à des difficultés de taille, et nous ne rivalisons pas avec eux. Les deux programmes devraient avoir les ressources nécessaires.

La présidente : Merci, sénatrice Jaffer, de souligner ce point.

[Français]

Notre temps est écoulé pour la matinée. Je tiens, au nom des membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles, à vous remercier très sincèrement pour la qualité de vos présentations. On constate dans vos présentations que vous vous souciez de cette question. Les renseignements que vous nous avez transmis nous seront très utiles et vos recommandations sont très pertinentes. Comme l'a indiqué le sénateur Maltais, vous pouvez être assurées que nous allons donner suite à ce que nous avons entendu aujourd'hui.

(La séance est levée)

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