Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule no 18 - Témoignages du 8 mars 2017
OTTAWA, le mercredi 8 mars 2017
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 16 h 15, pour étudier le rôle de la robotique, de l'impression 3D et de l'intelligence artificielle dans le système de santé.
Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, nous avons beaucoup de choses intéressantes à voir aujourd'hui. Nous allons donc commencer sans plus tarder.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[Traduction]
Je m'appelle Kelvin Ogilvie, sénateur de la Nouvelle-Écosse et président du comité. Je vais commencer par demander à chaque sénateur de se présenter à partir de ma gauche.
Le sénateur Meredith : Le sénateur Meredith, de l'Ontario.
[Français]
La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Hartling : Nancy Hartling, du Nouveau-Brunswick.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Sénatrice Chantal Petitclerc, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
Le président : Je vous rappelle que nous poursuivons notre étude sur le rôle de la robotique, de l'impression 3D et de l'intelligence artificielle dans le système de santé.
Je veux que tout le monde sache que le volet officiel de la séance durera 90 minutes. Je lèverai alors la séance, étant donné que nous assisterons ensuite à une démonstration. Vous verrez alors un certain nombre d'échantillons d'impressions 3D et vous aurez tous la chance d'observer ce genre de matériel. Je pense que nous avons tous hâte à ce segment.
Nous avons deux témoins qui comparaissent à titre personnel, et une troisième qui sera désignée. J'invite donc les témoins qui comparaissent à titre personnel à présenter leur exposé d'abord, à commencer par M. Matt Ratto, professeur agrégé à la faculté de l'information de l'Université de Toronto.
Matt Ratto, professeur agrégé, faculté de l'information, Université de Toronto, à titre personnel : Je vous remercie infiniment de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Je suis professeur agrégé à la faculté de l'information de l'Université de Toronto. Je suis également conseiller scientifique principal de Nia Technologies, une entreprise à vocation sociale sans but lucratif qui a été créée à partir de recherches que j'ai menées à l'Université de Toronto.
J'ai remis quelques notes de recherche au comité tard dans la soirée d'hier. J'espère qu'elles vous seront utiles. Je vais en parler de façon générale, et je mettrai l'accent sur les deux exemples que j'y présente, qui découlent de mes propres recherches, de même que sur des répercussions et recommandations qui pourraient être utiles au comité.
Je vais parler expressément de la fabrication par couches en santé — un terme plus descriptif qui désigne l'impression 3D. Je me concentrerai précisément sur l'impression d'instruments médicaux personnalisés au moyen de technologies d'impression 3D à faible coût. Je vous donnerai deux exemples à ce chapitre.
Le point principal que je souhaite soulever, c'est simplement que les innovations en impression 3D sont bien placées à l'heure actuelle pour améliorer les options de traitement, dans le cas de soins de santé personnalisés directs et indirects. Or, leur application est encore limitée en raison de la difficulté à les intégrer à la pratique médicale courante. Je vais en parler à la fin de mon exposé.
Je veux juste vous présenter brièvement des raisons pour lesquelles la fabrication par couches peut être utilisée dans le domaine de la santé, ou plutôt de bonnes raisons de l'utiliser. Il s'agit de trois points différents. Je vais les décrire, après quoi j'aborderai le dernier volet.
Tout d'abord, l'impression 3D peut être employée pour produire des objets ayant des formes géométriques complexes ou des matériaux qui ne peuvent pas être fabriqués à l'aide d'autres techniques. Je pense que mon confrère Konrad abordera cette utilisation de l'impression 3D. En deuxième lieu, l'impression 3D est souvent utilisée pour produire des objets sur demande, compte tenu de l'espace d'entreposage limité ou d'autres problèmes d'approvisionnement. Je pense que Mme Wong parlera de ses travaux à ce chapitre. Enfin, l'impression 3D peut être utilisée pour produire des dispositifs ou des objets personnalisés propres au patient. Voilà les principaux exemples que je donnerai.
Comme je l'ai dit, vous trouverez dans les notes des exemples dont je ne vais pas parler maintenant. J'aimerais simplement attirer votre attention sur le dernier, qui porte sur l'utilisation de l'impression 3D afin de créer des objets personnalisés aux patients. En fait, les gens ne sont pas au courant de la plus grande utilisation de l'impression 3D à l'heure actuelle, selon certains. Il s'agirait de l'impression 3D d'appareils auditifs sur mesure. À vrai dire, l'industrie des appareils auditifs produits par impression 3D est en véritable expansion. Plus de 10 millions d'appareils auditifs ont été imprimés à ce jour. Pourtant, nous ne pensons pas beaucoup à ce volet.
Je voudrais brièvement parler de deux initiatives qui émanent de mes propres recherches, et qui ont abouti dans le monde de façon intéressante. Il s'agit du Advanced Perioperative Imaging Laboratory, ou APIL, à l'Hôpital général de Toronto, de même que de Nia Technologies. Je vais en parler dans cet ordre.
L'APIL est un établissement de l'Hôpital général de Toronto qui a été inauguré par deux anesthésistes cardiaques, les Drs Meineri et Mashari, qui appartiennent tous les deux à la faculté de médecine de l'Université de Toronto. Ce groupe mène des activités à la fois de recherche et d'éducation associées à la production de modèles personnalisés et propres aux patients, dans le cadre de la formation et de la planification chirurgicales.
J'ai d'ailleurs apporté un des modèles. Il s'agit d'un modèle cardiaque qui provient du tomodensitogramme et des données échographiques d'un patient. Je vais le faire circuler, si vous voulez y jeter un coup d'œil. Il se divise en différents morceaux, et il a été utilisé lors d'un exercice de formation chirurgicale afin de montrer aux chirurgiens cardiaques et aux étudiants en médecine diverses particularités anatomiques du cœur.
Parmi les autres projets de l'APIL, on compte la production de voies respiratoires imprimées, qui servent à former des chirurgiens et d'autres praticiens sur la façon correcte d'élargir une voie aérienne; la production en impression 3D de fantômes de cœurs qui sont échogènes, c'est-à-dire qu'ils ressemblent à un vrai cœur sous échographie. Ces cœurs servent à former des anesthésistes cardiaques pour la pratique de l'échocardiographie transœsophagienne, une technique particulière d'échographie cardiaque. On a aussi créé des fantômes des rachis lombaires et thoraciques d'un patient afin de former les anesthésistes et d'autres professionnels sur les procédures qui conviennent lors d'administrations épidurales échoguidées. Ainsi, au moment où un étudiant en médecine ou un chirurgien enfonce pour la première fois une aiguille dans le dos d'un patient, il aura déjà pratiqué la technique sur ce genre de fantôme. Fait intéressant, les fantômes qui ont été produits pour ce genre de formations proviennent de données sur les patients. Ces modèles ne sont pas normalisés, mais ils sont plutôt basés sur l'anatomie particulière d'un patient.
L'objectif principal des recherches réalisées à l'APIL et de ses activités pédagogiques est d'éviter les problèmes liés aux erreurs médicales évitables qui, selon certains auteurs, constituent la troisième cause de décès en importance, aux États-Unis du moins. L'APIL offre donc de nouvelles occasions de formation pratique fondée sur les compétences. Le laboratoire a été créé à la suite de recherches menées à mon laboratoire, en partenariat avec d'autres praticiens de l'Hôpital général de Toronto et de la faculté de médecine.
De son côté, Nia Technologies représente un autre exemple d'impression 3D personnalisée, et l'organisme a lui aussi vu le jour à la suite d'un projet de recherche réalisé en partenariat avec d'autres intervenants. Il s'agit d'une entreprise en démarrage sans but lucratif qui offre des chaînes d'outils logiciels et matériels pour la production de prothèses et d'orthèses dans des pays à revenus faibles à moyens. Dans ce contexte, l'impression 3D accélère essentiellement la production des appareils par des praticiens formés.
J'ai apporté certains de ces appareils pour vous donner une idée de ce à quoi ils ressemblent. Nous faisons notamment des emboîtures de prothèses transtibiales. Il s'agit d'emboîtures personnalisées qui sont créées à partir de la numérisation tridimensionnelle d'un patient. Les données sont traitées par un logiciel que nous avons mis au point, puis elles sont converties dans un modèle qui est ensuite imprimé sur une imprimante 3D à faible coût. L'élément essentiel de ces travaux, c'est qu'il faut environ une semaine pour concevoir une emboîture à l'aide des méthodes habituelles de production, alors que la procédure prend moins d'une journée lorsque nous utilisons la chaîne d'outils de l'impression 3D. Nous sommes donc en train de faire l'impression 3D d'emboîtures et d'orthèses pédijambières — je serai ravi de les faire circuler si vous voulez y jeter un coup d'œil — dans trois pays différents et quatre cliniques distinctes, dans le cadre du plus vaste essai clinique au monde sur des prothèses d'impression 3D.
Les conclusions de cette initiative sont tout à fait encourageantes. Les résultats de l'essai clinique seront divulgués d'ici un mois environ. Il semble que l'impression 3D accélère de cinq fois la vitesse de production des prothèses, et donne des appareils de force et de qualité équivalentes aux objets produits par la méthode habituelle. J'aimerais remercier toute une liste de personnes à ce chapitre, mais je ne pense pas avoir suffisamment de temps.
Je veux ajouter deux choses. Tout d'abord, je présente ici une série de conséquences qui disent essentiellement que ces formes d'impression 3D sont sur le point de changer radicalement les soins personnalisés offerts aux patients dans le milieu de la santé. J'ai quelques recommandations sur l'utilisation d'imprimantes à moindre coût, compte tenu de leur meilleur fonctionnement dans des cliniques dont les ressources sont limitées. Même dans les environnements cliniques qui ont plus de ressources, comme l'Hôpital général de Toronto, il est possible d'avoir une dizaine d'imprimantes à moindre coût pour le prix d'une, et de réaliser des impressions simultanées, ce qui est beaucoup mieux que d'avoir une seule imprimante plus coûteuse, du moins dans le cas de l'APIL.
La principale chose que je veux mettre en évidence, c'est que l'intégration de ces technologies — je ne parle pas de leur développement technique, mais bien de leur intégration — est difficile en raison de la façon dont nous avons tendance à compartimenter les connaissances nécessaires pour vraiment les incorporer à l'infrastructure clinique et médicale. Entre les connaissances médicales, techniques et sociales qui permettent réellement de comprendre comment intégrer ces technologies aux contextes organisationnels et économiques, nous subissons le manque d'intégration à ce chapitre. Je recommande que nous nous concentrions davantage sur des compétences multidisciplinaires qui permettent de véritablement déployer ces technologies à grande échelle.
Le président : Merci. Je vais maintenant céder la parole à M. Konrad Walus, professeur agrégé en Génie électrique et informatique à l'Université de la Colombie-Britannique. Allez-y, s'il vous plaît.
Konrad Walus, professeur agrégé, Génie électrique et informatique, Université de la Colombie-Britannique, à titre personnel : Mesdames et messieurs les sénateurs et membres du comité, je vous remercie. Je me sens très privilégié d'avoir l'occasion de vous présenter mon point de vue sur l'impression 3D dans le domaine de la santé.
Comme vous l'avez mentionné, je suis professeur agrégé en Génie électrique et informatique à l'Université de la Colombie-Britannique. Je suis aussi dirigeant principal de la technologie chez Aspect Biosystems, une entreprise qui a vu le jour notamment à la suite des recherches que nous menons dans notre laboratoire de l'Université de la Colombie- Britannique. Au cours des 15 dernières années, j'ai participé à des recherches dans un certain nombre de domaines importants, y compris la nanotechnologie informatique, les microsystèmes, l'impression 3D et la bio-impression 3D. Tous ces volets se recoupent dans les travaux que nous réalisons.
Comme on l'a déjà mentionné, l'impression 3D est une technologie qui permet de recréer des objets tridimensionnels par couches. Un certain nombre de matériaux peuvent être employés, comme le plastique, la céramique, les métaux et même les cellules vivantes. L'impression 3D a été inventée en 1980 par Charles Hall, et elle représente désormais un marché de plusieurs milliards de dollars. Vous pouvez maintenant trouver des imprimantes 3D dans les classes de petite école et dans les maisons. Ces jours-ci, vous pourriez même entendre des histoires d'imprimantes 3D qui permettent d'imprimer des maisons, de sorte que la technologie prolifère très rapidement.
J'ai commencé il y a 10 ans mes recherches sur la technologie de l'impression 3D à l'Université de la Colombie- Britannique. Grâce au soutien du Conseil de recherches en sciences naturelles, nous avons inventé et mis au point un nouveau type de bio-imprimante 3D qui permet de mieux recréer des tissus à l'aide d'une imprimante 3D. C'est ce que nous appelons la technologie « lab-on-a-printer ».
En 2013, j'ai fondé Aspect Biosystems en collaboration avec Tamer Mohamed et Simon Beyer, deux de mes étudiants de troisième cycle qui ont développé la technologie d'impression, de même qu'avec le Dr Sam Wadsworth, notre collaborateur au Centre for Heart-Lung Innovation de l'Université de la Colombie-Britannique. L'entreprise est un bel exemple d'équipe interdisciplinaire. Nous avons des biologistes cellulaires qui travaillent avec des ingénieurs en mécanique, en logiciels et en électricité pour atteindre notre objectif ambitieux. Nous développons les systèmes de bio- impression et la technologie relative aux tissus qui s'imposent pour relever les défis entourant le développement de médicaments et la médecine régénérative. Notre entreprise a attiré l'attention du milieu international pour ses travaux, et The Economist l'a récemment reconnue comme étant un chef de file dans ce domaine.
Je considère que l'impression 3D peut avoir une incidence sur les soins de santé dans deux domaines distincts. Vous en avez déjà entendu parler. D'une part, à peu près n'importe quelle personne qui possède une imprimante de bureau 3D est capable d'imprimer des prothèses en plastique ou d'autres matières, même à la maison, de sorte que les patients n'auront même plus à en faire l'achat.
Pour vous donner un autre exemple, les médecins utilisent des modèles 3D des organes avant d'effectuer une chirurgie afin de planifier et de revoir les procédures médicales à employer sur le patient. Je pense donc que nous ressentons déjà les effets de l'impression 3D grâce à cette utilisation. En fait, l'évolution est tellement rapide dans ces domaines qu'il est vraiment difficile de suivre le rythme.
D'autre part, la bio-impression 3D est une utilisation différente et très puissante de cette technologie. Les encres employées par l'imprimante 3D contiennent des biomatériaux et des cellules vivantes qui sont déposés par couche afin de reconstruire la structure fondamentale d'un tissu. Ce n'est pas la dernière étape, puisque ces tissus imprimés en 3D doivent ensuite être incubés et recevoir les stimulations chimiques et physiques appropriées pour devenir une structure finale et fonctionner adéquatement. Plutôt que de simplement modéliser la structure d'un tissu en plastique, par exemple, ces imprimantes sont capables de générer des tissus vivants, qui ont des applications fort importantes pour la recherche et la médecine.
Une des principales utilisations de cette technologie consiste à améliorer le processus de développement des médicaments. À l'heure actuelle, la procédure prend plus de 10 ans, et parfois même 15 ans, et elle nécessite bien plus d'un milliard de dollars par médicament. Grâce à la bio-impression 3D, nous pouvons imprimer et cultiver des tissus humains qui expriment une maladie donnée, puis administrer des doses de composés d'intérêt potentiel afin de surveiller la réponse. Les modèles bio-imprimés en 3D permettent donc d'obtenir une réponse au médicament plus naturelle et humaine, qui peut être surveillée et étudiée plus tôt dans le processus de développement. Nous espérons que la technologie réduira la nécessité absolue d'effectuer des études sur des animaux à l'heure actuelle. Cette utilisation répond à un besoin énorme, puisqu'il y a actuellement 90 p. 100 des nouvelles drogues expérimentales qui n'aboutissent pas à la pharmacie en raison de lacunes sur les plans de la sécurité et de l'efficacité. Dans certains cas, celles-ci sont décelées après que le médicament soit considéré comme étant à la fois efficace et sécuritaire chez les animaux.
Grâce à la technologie de bio-impression 3D, l'équipe d'Aspect a mis au point un modèle imprimé en 3D des cellules musculaires lisses qui forment les voies respiratoires humaines dans le but de tester et d'étudier des médicaments d'intérêt pour le traitement de maladies comme l'asthme. Nous sommes en mesure de fabriquer ces tissus rapidement et à une échelle suffisante pour réaliser des essais en parallèle. Notre entreprise travaille actuellement en collaboration avec des sociétés pharmaceutiques afin de faire progresser le modèle et de faire l'essai de composés d'intérêt.
Une autre application importante de la bio-impression 3D relève de la médecine. En effet, on pourrait faire la bio- impression 3D directe de tissu de remplacement humain. Il s'agit ici d'une utilisation de l'impression 3D en médecine régénérative. En fait, le milieu rêve d'avoir un jour les moyens de créer des organes humains entiers à partir des cellules du patient. Voilà qui aurait évidemment une incidence profonde sur la médecine, puisque cela réduirait ou éliminerait le besoin de donneurs d'organes et les nombreux défis que pose le rejet d'organes.
Toutefois, la réalisation de cette vision audacieuse exige des contributions à l'échelle nationale et internationale. Je pense que notre entreprise et notre laboratoire adoptent une démarche très collaborative à ce chapitre. C'est donc dans cette optique que notre entreprise en démarrage collabore avec des chefs de file mondiaux en médecine, comme DePuy Synthes et Johnson & Johnson, afin de développer une technologie de bio-impression 3D en réponse aux besoins médicaux de remplacement du ménisque. Nous établissons donc des partenariats avec des universités d'un bout à l'autre du Canada afin de relever ce défi.
Pour terminer, je crois que les chercheurs et les entreprises du Canada sont prêts à jouer un rôle de premier plan dans ce domaine. Je suggère donc de multiplier les efforts afin de tirer parti des réussites canadiennes en appuyant les grappes de recherche et l'industrie, en travaillant dans ces domaines, et en soutenant davantage la formation d'ingénieurs et de scientifiques hautement qualifiés au Canada.
J'aimerais souligner que le Canada en fait déjà beaucoup, et je veux, entre autres, montrer le rôle positif que jouent ces programmes et ces organismes. À Aspect, nous avons pu bénéficier du Programme d'aide à la recherche industrielle — ou PARI — par un financement direct d'activités de R-D qui aide les conseillers en technologie industrielle, qui sont absolument exceptionnels. Notre entreprise collabore avec des chercheurs universitaires, et les programmes du CRSNG, en particulier leurs subventions de partenariat, profitent à ces partenariats.
Je veux également souligner l'aide à la recherche essentielle que fournit CMC Microsystems, un organisme qui aide de nombreux chercheurs canadiens à se doter d'une capacité de conception et de prototypage, une capacité nécessaire pour que nos idées conçues en laboratoire puissent être intégrées dans les jeunes entreprises canadiennes.
Cela dit, je vous remercie de m'avoir permis de comparaître devant vous, et je suis impatient de répondre à vos questions.
Le président : Merci. C'est maintenant au tour de la Dre Julielynn Wong, fondatrice, directrice générale et chef de la direction de 3D4MD.
[Français]
Dre Julielynn Wong, fondatrice, directrice générale et chef de la direction, 3D4MD : Bonjour, monsieur le président et distingués sénateurs.
[Traduction]
Je suis spécialiste en médecine de la santé publique et en médecine aérospatiale et diplômée de l'Université Queen's et de l'Université Harvard. J'ai fondé 3D4MD, un organisme qui propose des solutions technologiques économiques de drones et d'impression 3D pour sauver des vies et économiser du temps et de l'argent.
3D4MD a fait la démonstration de technologies d'impression 3D dans le cadre de deux missions spatiales analogues et d'une mission de la Station spatiale internationale. Nous avons publié nos résultats dans des revues médicales évaluées par des pairs, fait 14 demandes de brevets et collaboré avec plus de 30 organisations. Nous avons reçu un certain nombre de prix et de subventions, dont la subvention à l'innovation de Joule de l'Association médicale canadienne.
L'impression 3D est une technologie des soins de santé abordable, portable, axée sur les patients, économique sur le plan des coûts et de la main-d'œuvre et écologique. Nos travaux nous ont permis de déterminer les applications en soins de santé d'impression 3D utiles suivantes : objets imprévus nécessaires pour prévenir ou traiter un trouble médical en région éloignée; articles médicaux spécialisés fabriqués sur mesure ou difficiles à obtenir; modèles médicaux pour la formation; et planification préchirurgicale pour des opérations complexes, peu communes dont les enjeux sont importants.
En décembre 2014, j'ai utilisé l'énergie solaire pour alimenter mon imprimante 3D afin de fabriquer les premières fournitures médicales, dont des attelles digitales sur mesure pour un doigt en maillet, sur place, à la Mars Desert Research Station. En janvier 2015, j'ai transporté mon imprimante 3D dans une valise et j'ai imprimé la première attelle digitale faite sur mesure sur place pour un patient du Centre Sunnybrook des sciences de la santé de Toronto.
L'impression 3D d'attelles faites sur mesure réduit les coûts et est plus pratique pour les patients. Le coût matériel de l'impression 3D de cette attelle représente moins de la moitié du coût matériel de la fabrication d'une attelle à la main. Si une clinique possède deux imprimantes 3D, elle peut les faire fonctionner en même temps pour imprimer deux attelles identiques faites sur mesure si, pour des raisons d'hygiène, le patient souhaite avoir une deuxième attelle. Dans les rares cas où une attelle se brise, une imprimante 3D peut fabriquer une attelle de remplacement identique. Nous avons également imprimé en 3D la même attelle à partir de matériaux contenant à 25 p. 100 du plastique de bouteilles recyclées.
Des statistiques indiquent que près de quatre millions de Canadiens ont un handicap. Bon nombre de personnes handicapées ne peuvent pas obtenir d'appareils fonctionnels qui leur permettraient de participer pleinement aux activités de la vie quotidienne. Nous faisons des appareils fonctionnels par impression 3D — qui ont remporté des prix — pouvant être fabriqués à l'aide d'imprimantes 3D et aidant les gens dans des cliniques externes, des bibliothèques, des écoles, des laboratoires ouverts, des imprimeries et à domicile. Cela permet aux personnes handicapées d'économiser du temps et de l'argent.
L'été dernier, nous avons signé un contrat pour l'établissement des premiers services d'impression 3D du pays dans une résidence-services afin de fabriquer sur demande des appareils fonctionnels personnalisés et à faibles coûts pour 1 000 aînés qui vivent à Mon Sheong Court, à Markham. J'ai ici le modèle primé — créé par une élève du secondaire sino-canadienne — d'un outil d'aide à l'écriture imprimable en 3D qui convient à tout crayon ou stylo et qui coûte cinq fois moins cher qu'un crayon avec cartouches de rechange qui est vendu à des patients ayant une poigne limitée.
Je vous donne un autre exemple. Près de 2,4 millions de Canadiens souffrent de diabète. Nous avons conçu un outil qu'on peut lier à une seringue à insuline et qui ne coûte que 1 $. Cet outil pourrait permettre aux patients diabétiques dont l'usage des mains est limité de continuer à se faire des injections eux-mêmes, ce qui ferait en sorte qu'ils n'auraient pas besoin qu'une infirmière leur rende visite deux fois par jour.
Nous avons également aidé un vétérinaire qui voulait des modèles d'os imprimés en 3D servant à la formation des résidents et à la planification de chirurgies complexes pour réparer les pattes d'un chien de secours.
Nous avons appris qu'il est possible de transférer un examen d'imagerie vers un site web respectant la vie privée et de faire envoyer à une personne des modèles ou des guides chirurgicaux imprimés en 3D en moins d'une semaine par une entreprise ayant obtenu la certification ISO.
Selon un récent rapport rédigé par des radiologues de Stanford, l'externalisation des services d'impression 3D de modèles médicaux permet d'économiser de l'argent, car l'impression 3D à l'interne fait augmenter les coûts indirects et les coûts de dotation pour les hôpitaux.
Nous recommandons que le gouvernement canadien établisse les priorités liées aux ressources pour l'impression 3D en fonction d'un cadre simple constitué de quatre étapes.
Première étape : sur combien de personnes cette solution aura-t-elle des effets? Plus elles sont nombreuses, mieux c'est.
Deuxième étape : peut-on recourir à l'externalisation ouverte et créer la solution à l'aide d'un logiciel gratuit? L'externalisation ouverte et l'utilisation d'un logiciel gratuit peuvent entraîner une réduction substantielle du temps et des sommes investis en recherche et développement.
Troisième étape : quelles sont les preuves que la solution se traduira par une augmentation du nombre de vies sauvées et une diminution du temps et de l'argent investis par rapport aux autres options?
Quatrième étape : l'impression 3D de la solution peut-elle être confiée à l'extérieur des hôpitaux, à des installations communautaires? L'externalisation entraînera des économies de temps et d'argent pour notre système de soins de santé; permettra d'élargir l'accès pour que les Canadiens en tirent le maximum d'avantages; appuiera l'économie locale; et favorisera l'engagement communautaire dans les institutions publiques.
Nous tentons de faire approuver par Santé Canada les 50 appareils de notre catalogue numérique dont le contenu augmente rapidement. Nous avons besoin de l'aide du gouvernement pour qu'un examen réglementaire soit effectué rapidement afin que les Canadiens puissent avoir accès à des fournitures médicales qui coûtent moins cher, qui permettent de gagner du temps et qui peuvent être imprimées en 3D. Notre objectif, c'est de faire en sorte que dans les soins de santé, l'impression en 3D soit utilisée de façon sécuritaire, selon les règles de l'éthique et d'une bonne façon.
Nous demandons du soutien financier pour la création et le développement de la 3DF4ME Exchange. Il s'agit d'une plateforme protégeant la vie privée où les patients et les fournisseurs de soins peuvent faire des demandes pour des modèles médicaux imprimés en 3D, obtenir une supervision clinique adéquate et communiquer des résultats cliniques à long terme, des événements indésirables et des données sur les coûts et les avantages pour les publications de recherche et la planification des politiques.
Grâce à l'impression 3D, n'importe qui peut innover, car si on a une idée, on peut la dessiner en utilisant un logiciel gratuit et la rendre concrète en appuyant sur « imprimer ». L'automne dernier, j'ai créé Medical Makers, un réseau grandissant d'innovateurs du domaine médical présent dans 10 villes canadiennes. L'un de nos medical makers est une élève du secondaire, et elle a utilisé un logiciel gratuit pour créer un outil d'évaluation sensorielle imprimable en 3D qui a la forme d'une étoile ninja et qui coûte au moins 10 fois moins cher que l'outil de référence. De plus, la boîte est imprimée en 3D et nous pouvons la personnaliser avec le nom de la personne.
Avec notre bibliothèque numérique, nous bâtissons un héritage pour l'humanité. Cette année, nous lançons le Medical Make-A-Thons pour ajouter 150 nouveaux modèles imprimables en 3D à notre catalogue numérique afin de souligner le 150e anniversaire du Canada. Nous vous demandons de soutenir le Medical Make-A-Thons ici et à l'étranger pour favoriser des soins de santé universels et l'accès aux soins de santé partout dans le monde; promouvoir le programme du gouvernement fédéral en matière d'invalidité partout dans le monde; et utiliser des projets d'innovation pour que les étudiants canadiens acquièrent des compétences de pointe en STIM — sciences, technologie, ingénierie et mathématiques — pour l'obtention d'emplois qui seront offerts en cette ère numérique.
L'innovation émerge à l'interface de différentes disciplines, de sorte que l'impression 3D nous appartient tous : élèves, patients et fournisseurs de soins de santé. Ensemble, nous pouvons concevoir des solutions pour sauver des vies et économiser du temps et de l'argent.
Merci.
Le président : Merci. Les sénateurs vous poseront maintenant des questions.
La sénatrice Stewart Olsen : Je vous remercie de votre présence. C'est fascinant.
J'aimerais tout d'abord savoir comment on intègre les innovations dans les écoles de médecine et les établissements de formation. La technologie se développe tellement vite, et si je devais me faire remplacer un genou, je voudrais que l'orthopédiste qui s'occupe de moi ait des connaissances dans ces domaines. Comment se déroulent les choses au pays?
M. Ratto : C'est l'une des raisons de la création du laboratoire, ce groupe de recherche de l'Hôpital général de Toronto. J'ai fourni des travaux de base pour cela, mais il est géré par des anesthésiologistes cardiaques et du personnel médical qui forment des étudiants, en fait. Leur but est, entre autres, d'être directement en contact avec les écoles de médecine, en particulier celle de l'Université de Toronto, mais d'autres écoles de médecine également, pour enseigner aux gens les bons moyens d'utiliser ces technologies.
C'est la grande question : comment sortir ces innovations des laboratoires et du contexte d'ingénierie — et, dans une certaine mesure, des maisons et des bibliothèques —, et les intégrer dans le contexte des professionnels. Cela me semble être un point essentiel à examiner. Il faut que les orthopédistes les utilisent et pas seulement les élèves du secondaire.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci. Monsieur Walus, en ce qui concerne la production de cellules vivantes, constatez-vous que d'autres entreprises, non seulement les soins de santé, mais aussi l'industrie, utilisent les cellules vivantes qui sont davantage des cellules humaines plutôt que des cellules animales pour remplacer les tests sur les animaux?
M. Walus : À l'heure actuelle, l'industrie utilise des cellules humaines dans le cadre de son processus de développement préclinique de médicaments, mais elle les utilise dans un format 2D. On cultive les cellules dans une plaque à cupules multiples, une plaque qui contient différentes cupules dans lesquelles on peut faire la culture cellulaire, et on y intègre le médicament et on examine ce qui se passe.
Ce que nous constatons, c'est que ces modèles ne représentent pas nécessairement fidèlement la réaction humaine, car les cellules cultivées en 3 D exprimeront des protéines et des gènes différents et reformeront leur phénotype d'origine de façon plus exacte. Dans la modélisation tridimensionnelle des tissus, on utilise également des cellules humaines, mais ces cellules se comportent comme elles le feraient dans un tissu humain — et on n'obtient pas le résultat peut-être plus artificiel qu'on obtient dans un environnement bidimensionnel. Nous utilisons la technologie pour créer de nouveaux tissus qui peuvent être utilisés pour analyser des médicaments qu'on ne pourrait autrement pas analyser avec ces modèles 2D.
Vous avez également parlé des études sur les animaux. À l'heure actuelle, elles sont absolument essentielles dans le processus de développement de médicaments, car elles fournissent une réaction de l'ensemble du système. Je peux faire un modèle de tissu à trois dimensions de vos voies respiratoires et on pourra voir comment elles réagissent au médicament, mais on ne pourra pas savoir comment réagit l'ensemble du système. Il sera difficile d'éliminer ce test particulier. Or, nous pouvons augmenter le nombre de tests effectués sur les modèles 3D pertinents pour l'humain et effectuer moins de tests au bout du compte simplement pour vérifier l'aspect sécuritaire, par exemple, dans les études sur les animaux. J'espère que leur nombre diminuera un jour, mais nous n'en sommes pas encore là.
La sénatrice Stewart Olsen : Merci beaucoup.
La sénatrice Seidman : Si nous devions penser à employer le mot « impressionnant », qui est souvent utilisé de façon exagérée, nous pourrions le faire présentement, car vous nous avez vraiment tous présenté des exposés impressionnants, et bien comprendre leur contenu exige un tour de force de notre part.
Si vous me le permettez, monsieur Ratto, j'aimerais vous poser d'autres questions sur certaines choses que vous avez dites, qui sont plutôt fascinantes. Vous avez beaucoup parlé d'une plus grande attention portée sur le contexte social de la production, et vous avez parlé des nouvelles technologies et des changements sociaux et de l'aspect multidisciplinaire de ces travaux. Vos travaux ont été décrits comme étant des travaux qui transcendent la frontière entre le monde numérique et le monde matériel ainsi que la frontière entre les sciences humaines et l'ingénierie. Pourriez-vous nous aider à comprendre les défis que pourrait poser ce type de travaux et nous parler des considérations éthiques possibles et de la façon de vous y prendre?
M. Ratto : Les aspects éthiques de ces travaux sont extrêmes, surtout quand on entre dans le monde des analogues humains, par exemple.
Je vais essayer de répondre à votre question sur la transcendance des frontières et le besoin de connaissances sociales en vous racontant une brève histoire. Lorsque nous avons commencé à travailler au projet sur les prothèses imprimées en 3D, il portait sur une clinique de l'Ouganda qui s'appelle CoRSU, située du côté sud de Kampala. Notre modèle initial consistait à envoyer des scanners et des imprimantes 3D à la clinique, à demander au personnel sur place de faire le scan des jambes des patients et d'envoyer le modèle au Canada, à collaborer avec des prothésistes et des orthésistes dans le laboratoire pour prendre les analyses des membres de ces patients, les convertir et envoyer le modèle en Ouganda pour l'impression.
Dès que nous avons commencé à y réfléchir davantage d'un point de vue humain, nous avons compris que c'était une idée incroyablement mauvaise. D'un point de vue technique, c'était une façon rationnelle de procéder; c'était le moyen le plus facile de fournir des services. Or, on siphonnait alors l'expertise de ce contexte. Si je peux être même un peu hardi, une autre façon de parler ainsi de ce projet aurait consisté à dire que nous aurions demandé aux Noirs de s'occuper du travail manuel et aux Blancs, du travail intellectuel. C'est la façon dont nous étions en train de configurer, potentiellement, un système sociotechnique pour le développement de l'impression 3D.
Nous nous sommes dit que nous ne voulions pas faire cela. Nous voulions créer un système qui améliore les capacités des praticiens dans ces contextes, même si, techniquement, c'est un processus plus difficile. L'idée de commencer à partir d'un point de vue humain et d'utiliser cela comme base pour le développement technologique est une façon de connaître les questions éthiques qui émergent lorsque nous essayons de transformer ces contextes d'expertise dans le traitement médical.
La sénatrice Seidman : Docteure Wong et monsieur Walus, vous voulez peut-être répondre à la même question.
Dre Wong : Pourriez-vous répéter la question?
La sénatrice Seidman : Concentrons-nous sur les questions d'éthique liées à votre contexte, car elles doivent être plutôt importantes puisque vous transcendez plusieurs frontières. Que faites-vous à cet égard? Existe-t-il des protocoles, par exemple, et quelles sont vos mesures de protection sur le plan de l'éthique et des considérations éthiques?
Dre Wong : Avoir une imprimante 3D, c'est comme avoir une photocopieuse 3D. Des questions éthiques ont été soulevées au sujet du fait que l'imprimante 3D fait le travail d'un travailleur de la santé très spécialisé, comme un thérapeute de la main. Si l'imprimante 3D peut permettre de fabriquer une attelle digitale sur mesure, il s'agit essentiellement d'un thérapeute robotique de la main. Nous automatisons le travail d'une personne.
Je répondrais que ce n'est pas le cas. Dans ce cas, les thérapeutes de la main sont très peu nombreux, tant au pays que dans le monde. Il y aura toujours un manque criant de ce type de main-d'œuvre hautement qualifiée. L'impression 3D ne la remplace d'aucune façon, car nous ne serons jamais en mesure de former un nombre suffisant de gens pour répondre à la demande. En fait, la technologie augmente leur travail.
Par exemple, un patient canadien qui vit dans une collectivité éloignée pourrait se blesser et avoir besoin d'une attelle digitale sur mesure pour un doigt en maillet, car la recherche nous indique que c'est la meilleure façon de traiter une telle blessure. À l'heure actuelle, si ce patient ne peut pas trouver de thérapeute pour ce type de blessure près de chez lui — et il n'y a pas de répartition égale sur le plan géographique à l'échelle nationale et mondiale —, alors il devra chercher et trouver une personne qui peut fabriquer ces attelles — et ces thérapeutes ne le font pas tous. Ensuite, le patient doit prendre un rendez-vous, attendre, se déplacer pour rencontrer la personne, payer de sa poche les dépenses et payer le travailleur spécialisé pour son travail et les coûts matériels.
Grâce à l'impression 3D, nous avons simplifié la vie des patients et diminué les coûts connexes. S'il n'y a pas de thérapeute de la main dans une région éloignée, pourquoi ne pas aller à une clinique locale où le personnel des soins de santé pourrait prendre quelques photos de votre main et utiliser un logiciel gratuit pour produire une attelle sur mesure? Cela peut se faire sur place, mais vous aurez besoin de la supervision clinique d'un thérapeute de la main. Nous disposons ici d'un merveilleux réseau de télémédecine, si bien que l'évaluation et le suivi de votre état pourraient s'effectuer à distance.
Même si l'impression 3D permet l'automatisation, elle n'entraînera pas des pertes d'emploi. Au contraire, elle étendra la portée d'une main-d'œuvre hautement qualifiée, qui est en pénurie à l'échelle mondiale.
Le président : Monsieur Walus, avez-vous une observation à faire rapidement?
M. Walus : Oui. De notre point de vue, bien que la technologie de bio-impression 3D soit nouvelle, les considérations et protocoles déontologiques concernant la manipulation de cellules humaines et leur utilisation dans le cadre d'essais sur médicaments et tout le reste sont déjà très bien établis. Par conséquent, je ne pense pas que nous soyons là en terrain inconnu. En revanche, nous faisons certes œuvre de pionniers sur le plan technique.
[Français]
La sénatrice Mégie : Ma question s'adresse au professeur Walus. Vous avez parlé du développement de médicaments par le processus 3D. J'ai un peu de difficulté à comprendre le fonctionnement de tout cela. Pour ce qui est de la forme de la pilule, je comprends que cela peut se faire, mais comment vous y prenez-vous pour faire les études sur l'efficacité et l'innocuité de la médication?
Dans ma tête, le 3D peut servir à fabriquer la capsule ou la poudre qu'il faut mettre dedans, mais l'effet sur l'organisme, comment l'évaluez-vous? Êtes-vous capable de l'évaluer avec la méthode 3D?
[Traduction]
M. Walus : Je n'ai pas entendu le début, mais je pense avoir saisi la question au complet. Si je comprends bien, vous faites allusion à l'idée d'utiliser une imprimante 3D pour produire des comprimés. Curieusement, c'est une question que les gens étudient déjà, et il y a des entreprises qui essaient de fabriquer des imprimantes 3D à cette fin.
Nos imprimantes 3D ne permettent pas de produire ni de structurer des médicaments. Ce que nous faisons plutôt, c'est prélever des cellules humaines et les mettre en suspension dans un biomatériau. Ces cellules humaines vivantes et ce biomatériau forment l'encre de l'imprimante. Cette encre est configurée en trois dimensions, un peu comme pour les objets ici, sauf que nous travaillons en l'occurrence à une échelle bien moindre. Au bout du compte, ces cellules composent la structure imprimée en 3D.
Au terme du processus, nous obtenons un objet vivant imprimé en 3D, qui contient littéralement des cellules humaines. Nous prenons ensuite cet objet et nous le plaçons dans un incubateur, qui assure les conditions environnementales propices pour permettre à ces cellules de commencer à reconstituer un tissu. Au départ, ces cellules n'ont aucun lien entre elles, mais elles n'aiment pas être seules; elles se mettent alors à s'associer aux cellules voisines, puis à reconstituer la structure d'un tissu humain.
Nous prenons ensuite le composé, c'est-à-dire le médicament que nous cherchons à tester, et nous en injectons une dose dans le tissu. Nous remettons le tout dans l'incubateur, et nous pouvons alors surveiller ce qui se passe au tissu sous l'effet du médicament. Idéalement, nous voulons voir une régression de la maladie ou une réduction de l'intervention.
Nous utilisons donc les tissus comme modèles vivants dans le cadre d'essais sur médicaments. Nous ne fabriquons pas les médicaments proprement dits au moyen de nos imprimantes.
[Français]
La sénatrice Mégie : J'ai toujours de la difficulté à comprendre. À mes yeux, il s'agit de haute voltige, parce qu'un tissu vivant, c'est un tissu; je coupe un tissu, je fais un test, mais la maladie comme telle, c'est le tout. Quand on teste un médicament, il rentre dans le système, il va dans le cœur, dans les poumons, dans les reins, partout, mais faut-il prendre un échantillon de chaque organe pour tester le produit? On fait des tests sur le produit pour voir s'il fait du tort au tissu ou s'il gère la maladie. J'ai de la difficulté à comprendre, mais peut-être que ça viendra. Dans quelques années, on pourra sûrement le faire. Enfin, je vous remercie de votre réponse.
[Traduction]
M. Walus : En fait, je pense que votre dernière affirmation était à peu près juste.
Le sénateur Meredith : Merci à vous tous de vos exposés remarquables. Comme l'a dit ma collègue, la sénatrice Seidman, c'est tout à fait génial. Si vous me permettez un jeu de mots, vous faites vraiment des pieds et des mains. Quel bonheur de voir l'innovation à l'œuvre au Canada et de constater que le gouvernement a appuyé ces efforts par l'intermédiaire du conseil de recherches et du PARI.
Une des questions qui me préoccupent, c'est la sécurité. Je siège d'ailleurs au Comité de la sécurité. Docteure Wong, vous avez dit que vous transportiez une imprimante 3D dans votre mallette. Êtes-vous préoccupée par la sécurité de l'impression 3D? Pourriez-vous, tous les trois, me dire ce que vous pensez des dérives possibles de cette technologie? Je ne veux pas m'étendre sur le sujet, mais y avez-vous déjà songé?
Dre Wong : Comme je l'ai dit tout à l'heure, une imprimante 3D ressemble à un photocopieur 3D. Cette technologie permet une souplesse incroyable. Je crois que l'impression 3D, comme la plupart des technologies, n'est ni bonne ni mauvaise. Tout dépend de l'utilisateur. Vous pouvez prendre mon imprimante 3D et l'utiliser pour créer un dispositif médical d'importance vitale et à moindres coûts ou, encore, vous pouvez vous en servir pour fabriquer une arme.
N'empêche que c'est à notre portée. Donc, dans le cas de l'impression 3D, il faut reconnaître que c'est un peu comme Internet. La technologie est là, elle existe et elle est disponible et accessible à nous tous. Selon moi, on ne devrait pas nécessairement se concentrer sur les applications négatives possibles, mais plutôt sur ce que notre société peut faire pour encourager les gens à exercer des choix moraux au moment d'utiliser la technologie : comment pouvons-nous favoriser de telles décisions et créer les conditions nécessaires de sorte que les gens puissent faire des choix éthiques positifs en ce qui concerne non seulement la technologie d'impression 3D, mais aussi d'autres technologies qui nous sont accessibles, comme les drones?
Le président : Messieurs Ratto et Walus, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Ratto : Il y a quelques années, j'ai imprimé en 3D une arme à feu dans mon laboratoire et j'ai participé à une émission télévisée avec Cody Wilson, soit l'étudiant en droit du Texas qui, à l'époque, avait produit un modèle du pistolet Liberator. Nous avons débattu de la question de l'impression 3D et des armes à feu. Dans ce contexte, un des principaux aspects était la conclusion que oui, on peut imprimer en 3D une arme à feu, mais qu'il existe des moyens plus faciles de s'en procurer : on peut notamment aller chez Home Depot pour acheter quelques ressorts et bouts de tuyaux ou, encore, traverser la frontière.
Je crois que les affirmations de la Dre Wong sont vraies : nous devons apprendre à faire de bons choix éthiques. Par ailleurs, la réglementation des imprimantes 3D en vue de réduire pareils résultats négatifs éventuels ne permet pas réellement de diminuer de tels risques parce qu'il existe justement tous ces moyens plus simples.
Le sénateur Meredith : Merci. Nous étudierons, nous aussi, les répercussions liées à l'adoption de cette technologie. Avez-vous des recommandations à faire au comité sur les mesures que le Canada, le gouvernement et Santé Canada doivent prendre afin de profiter véritablement de cette technologie?
Nous avons parlé de l'efficacité, et je suis content, monsieur, que vous ayez évoqué l'Ouganda et notre programme de développement dans le cadre duquel nous aidons d'autres pays du point de vue médical. Nous avons dépensé des milliards de dollars à cette fin.
Que devrait faire le gouvernement dans cette optique, en adoptant et en encourageant cette technologie, sur le plan des possibilités d'exportation? Je tiens à savoir ce que vous en pensez.
M. Ratto : Je dois dire que notre travail a été largement financé par Grands Défis Canada et, à certains égards, si nous avons cherché à déployer la technologie principalement dans des pays à revenu faible ou moyen, c'est non seulement parce que le manque d'accès aux prothèses constitue un problème beaucoup plus grave dans ces contextes, mais aussi parce qu'il y a, en quelque sorte, un plus grand appétit pour des technologies innovatrices.
Cela ne veut pas dire que les contextes propres aux pays développés, dont le Canada, laissent à désirer, mais il faut tenir compte des nombreux systèmes en place lorsqu'on essaie d'innover dans de tels contextes. Par conséquent, une chose que nous pourrions faire, c'est nous efforcer vraiment de mieux aider les gens à s'y retrouver dans ces systèmes complexes.
Je dirai que, dans le domaine des prothèses, chaque province s'y prend différemment au chapitre du financement et de la réglementation; ainsi, le Québec ne procède pas de la même façon que l'Ontario. S'agissant de l'exploitation d'une entreprise et, je le répète, nous sommes une entreprise sans but lucratif, mais si nous devions exercer nos activités dans un but lucratif, nous aurions beaucoup de mal à déployer des solutions partout au Canada. En fait, il serait plus facile d'essayer de déployer ces solutions aux États-Unis, où le marché est non seulement plus grand, mais curieusement plus condensé.
Je crois qu'il y a un appétit vorace pour l'innovation au Canada, surtout en ce qui concerne l'innovation axée sur des principes sociaux et empreints de valeur. Selon moi, nous n'avons qu'à miser sur ces capacités et les renforcer non seulement pour orienter de telles initiatives, mais aussi pour créer une innovation propre au Canada, sur le plan tant social que technique.
M. Walus : Je ne suis pas un spécialiste de la réglementation, mais j'ai remarqué qu'aux États-Unis, la FDA appuie activement la mise au point de nouveaux modèles tridimensionnels in vitro pour les essais sur médicaments, et elle offre des programmes de subventions assez importants à cet égard.
Je constate également que la FDA finance et appuie des ateliers destinés à élaborer une nouvelle politique sur la façon d'adopter ce genre de technologies dans le cadre du processus de mise au point de médicaments. Je n'ai encore rien constaté de tel au Canada; je pense donc qu'il y a lieu de nous engager davantage, parce que je suis convaincu que cela aura une incidence positive sur la vie des Canadiens.
Le sénateur Gold : Merci, et bienvenue.
Je me rappelle avoir été exposé à l'impression 3D pour la première fois dans les années 1990, en tant qu'investisseur dans une entreprise qui fabriquait des dispositifs médicaux, plus précisément des instruments dentaires. Ensuite, mon fils adorable a pris part au développement de Blender, un programme de modélisation de gratuiciels, et il a imprimé en 3D certaines de ses directions artistiques. Je me réjouis de voir l'expansion continue dans le domaine médical.
En ma qualité de constitutionnaliste, je comprends tout à fait les problèmes de compétence auxquels vous faites face, d'une province à l'autre. C'est la vie.
J'aimerais revenir à votre argument sur le travail en vase clos et la nécessité d'intégrer la formation des chercheurs, des médecins, des spécialistes de la technologie de l'information, et j'en passe, pour mieux profiter de cette technologie. Nous mettons l'accent sur l'impression, qui représente en quelque sorte le produit final, mais à l'arrière-plan, il y a évidemment la conception, la modélisation, l'analyse des besoins, et tout le reste.
Je sais que le MIT offre un programme — dont le nom m'échappe —, qui permet de rassembler les gens des domaines du multimédia et de la technologie de l'information ainsi que des philosophes pour mettre sur pied des équipes qui accomplissent un travail tout à fait créatif et multidisciplinaire, à défaut d'une meilleure expression.
S'il y a lieu, où sont les centres au Canada — qu'il s'agisse de centres universitaires ou de centres de recherche —, qui mobilisent des groupes de gens compétents provenant de différentes disciplines afin de leur permettre de travailler sur ces questions et d'apporter ainsi leur contribution, que ce soit dans le contexte des écoles de médecine ou de génie ou pour répondre aux besoins en matière de services sociaux? Notre pays est-il bien équipé pour produire la prochaine génération de chercheurs multidisciplinaires et polyvalents?
Dre Wong : Je dirais que c'est déjà le cas. C'est pourquoi j'ai créé Medical Makers. Nous représentons un réseau mondial en pleine croissance, composé d'innovateurs, de fournisseurs de soins de santé et de patients, qui travaillent ensemble pour créer des solutions permettant de sauver des vies et d'économiser du temps et de l'argent.
Chez Medical Makers, nous croyons que tout le monde peut innover. Certains de nos innovateurs sont des élèves du secondaire. Nous vous avons montré des exemples de leurs travaux. Parmi nos innovateurs figurent aussi des retraités, des professionnels et des étudiants universitaires; ce qui nous rassemble, c'est notre créativité, notre compassion et notre désir de résoudre des problèmes ayant des répercussions sociales.
Soit dit en passant, nous collaborons avec les universités. En fait, nous nous apprêtons à lancer, ce mois-ci, un marathon d'innovation médicale à l'Université Guelph. J'ai vu des étudiants de l'Université Guelph faire des travaux formidables grâce à l'impression 3D.
Voici donc ce que je vous réponds : allez au-delà du réseau traditionnel des centres d'excellence et du milieu universitaire et tâchez de comprendre que, grâce à l'accessibilité de l'impression 3D, l'innovation peut se produire auprès des masses.
Medical Makers a vu le jour parce que les gens ont entendu parler de mon travail. Ils ont dit : « C'est formidable. Comment puis-je y participer? » Je recevais des messages de gens qui avaient des patients ou de fournisseurs de soins qui étaient aux prises avec certaines difficultés. Je n'ai fait que les rassembler. Aujourd'hui, le projet a pris son envol. Nous avons une présence dans 10 pays.
Nous sommes heureux de collaborer avec l'industrie et le milieu universitaire, mais l'innovation se produit dans les foyers. C'est un réseau virtuel. Nul besoin d'avoir un réseau physique.
M. Ratto : Je vais parler des initiatives plus officielles. Sans vouloir nier les propos de la Dre Wong, sur le plan officiel, le Canada a un certain nombre de programmes vraiment intéressants qui permettent de combler ces fossés. Il y en a des tonnes; je n'en connais que quelques-uns.
L'Université de la Colombie-Britannique offre un programme tout à fait intéressant, appelé Engineers in Scrubs, qui réunit l'ingénierie et la médecine. On trouve des programmes équivalents dans d'autres universités. Il y a un programme de bio-ingénierie et de biomatériaux à l'Université de Toronto. La seule lacune de tous ces programmes, c'est qu'ils ne tiennent pas compte du contexte humain ou social, qui constitue en fait mon domaine de spécialisation. Je suis un universitaire spécialisé en sciences humaines, qui a atterri, je ne sais trop comment, dans le monde de la technologie. J'étudie les répercussions sociales des technologies et, curieusement, je suis aussi un fabricant.
Permettez-moi de vous présenter ma faculté à la lumière de ce contexte; il s'agit de la faculté des sciences de l'information à l'Université de Toronto, qui rassemble des membres du corps professoral des facultés de médecine, d'informatique, des sciences humaines et des sciences sociales. C'est dans cette optique que nous essayons de former nos étudiants à la maîtrise.
Ce dont souffrent tous ces programmes, à certains égards, c'est la façon dont le Canada répartit son financement entre les organismes subventionnaires, soit les IRSC, le CRSNG et le CRSH. Dans mon cas particulier, j'ai eu des problèmes concernant des demandes de subventions qui m'ont été refusées parce que les IRSC trouvent qu'il s'agit d'un projet d'ingénierie et le CRSNG pense que c'est quelque chose d'autre. Il y a donc moyen de mieux appuyer des programmes comme Engineers in Scrubs et d'autres de ce genre.
Un programme que je trouve formidable est celui des Réseaux de centre d'excellence ou RCE. Si je ne me trompe pas, vous recevrez demain un excellent représentant de ce programme, M. Alex Mihailidis, qui vous parlera du Réseau AGE-WELL. C'est là un bel exemple de mise en commun de toutes ces disciplines.
À mon avis, plus nous pouvons créer de telles possibilités, mieux ce sera. Par ailleurs, plus nous pouvons créer des programmes éducatifs — pas seulement des programmes de subventions et de recherche, mais aussi des programmes pédagogiques à la base de ces travaux —, meilleurs seront nos résultats.
Le président : Je tiens à ajouter que nous recevrons, le 29 mars, des témoins qui pourront probablement aborder, eux aussi, certaines de ces questions.
La sénatrice Griffin : Je remplace le sénateur Tony Dean. Le sénateur Meredith a posé la question principale que j'avais, mais j'ai une question complémentaire. Nous nous occuperons de lui plus tard.
Dans sa forme actuelle, le Règlement sur les instruments médicaux convient-il pour l'évaluation de vos produits médicaux imprimés 3D? Sinon, quels changements proposeriez-vous?
Dre Wong : Nous sommes actuellement engagés dans ce processus. Le contrôle de la qualité est nécessaire, qu'on utilise une imprimante 3D ou un autre procédé de fabrication. À certains égards, c'est beaucoup plus facile dans le cas de l'impression 3D, car c'est automatisé. Lorsque j'appuie sur « imprimer », je m'attends à avoir un instrument identique chaque fois. Ma réponse, c'est que nous découvrons actuellement ce qu'il en est, car nous sommes à l'étape de l'homologation des quelque 50 instruments de notre catalogue numérique. C'est avec plaisir que je ferai un suivi en vous présentant un mémoire écrit et d'autres renseignements si je constate des problèmes liés à votre question.
M. Ratto : Je dirai simplement que lorsque nous avons commencé à faire ce genre de choses, j'ai été heureux de constater que ces instruments ne sont pas réglementés. Les prothèses et les orthèses sur mesure ne sont pas réglementées; c'est l'orthésiste-prothésiste qui est assujetti à la réglementation. Essentiellement, ces produits sont couverts tant qu'ils sont fabriqués par une personne détenant une licence de praticien, sauf au Québec, où la situation est différente.
L'aspect le plus intéressant n'est pas nécessairement la réglementation applicable, mais plutôt le mode de paiement. En Ontario, ces appareils sont financés par le PAAF, qui a une particularité digne d'intérêt : il ne finance pas les appareils fabriqués dans une installation centralisée. Ces appareils pourraient ne pas être couverts par le PAAF si vous décidiez d'en faire la conception, mais d'en confier l'impression à un service externe, autrement dit, si vous les faisiez imprimer ailleurs qu'à votre cabinet. Donc, la réglementation et le financement sont des enjeux complexes qui varient d'un endroit à l'autre, comme vous l'avez indiqué.
La sénatrice Petitclerc : Merci beaucoup de cette excellente présentation. C'est fascinant. Ma question s'adresse à vous, monsieur Ratto, parce que les prothèses me fascinent. J'ai été athlète paralympique pendant 30 ans, ce qui m'a permis de suivre l'évolution des prothèses. J'ai aussi participé à des voyages d'aide internationale. Je connais donc les problèmes auxquels les gens qui ont besoin de prothèses sont confrontés à l'échelle internationale.
Vous avez tous abordé cet aspect, brièvement, mais j'aimerais avoir une meilleure idée de l'accessibilité de cette technologie, aujourd'hui et demain, au Canada et à l'étranger. Lorsque je regarde cela, j'en viens à penser que vous allez sauver le monde, parce que cela ne semble avoir que des avantages, d'après ce que j'entends. C'est moins coûteux, plus rapide et plus précis, et nous savons que cela peut changer des vies. Je me rappelle que des amis ont dû attendre un an pour avoir un appareil. Une erreur d'un millimètre pouvait les renvoyer sur la liste d'attente.
Cette technologie me semble vraiment bonne. La population y a-t-elle accès, actuellement? Sinon, quand sera-t-elle accessible, à votre avis? Croyez-vous que cela favorisera la démocratisation de l'aide aux personnes handicapées à l'échelle internationale?
M. Ratto : Nos travaux à Nia Technologies étaient axés sur cet aspect précis. L'idée est de servir les gens et de généraliser l'utilisation de la technologie. C'est une démocratisation, dans le sens qu'elle accroît l'accessibilité en améliorant la capacité de production des praticiens pour ces appareils, et non dans le sens de permettre à tout le monde de fabriquer des appareils convenables.
Vous avez mentionné que c'est plus précis. Ce n'est pas vraiment le cas. En fait, selon mes recherches, la qualité d'une prothèse ne dépend pas du mode de fabrication — qu'il s'agisse de l'impression 3D ou d'un procédé conventionnel à l'aide d'un moulage de plâtre —, mais de l'habileté du prothésiste. Il faut un prothésiste compétent pour faire une bonne prothèse.
C'est une démocratisation dans le sens que cela permet d'accélérer les choses, d'augmenter la capacité et, dans certains cas, d'offrir un service dans des régions éloignées. Cela ne veut donc pas dire qu'il n'est plus nécessaire de consulter un clinicien. C'est très avantageux pour nous, mais cela entraîne son lot de difficultés, car nous devons évidemment offrir de la formation et des cours de perfectionnement, en plus de valider ces technologies pour une catégorie de cliniciens habitués à travailler autrement.
Une bonne partie de notre travail est axée sur la recherche de données cliniques légitimes qui, à certains égards, attestent de la qualité de ces activités. Nous participons à des conférences sur les prothèses. En mai, nous irons au congrès international de la Société internationale de prothèse et orthèse, au Cap, pour présenter cette technologie. Nous nous contenterons de dire que c'est comparable. Nous ne voulons pas nous avancer davantage pour le moment.
En fin de compte, je suis convaincu que c'est là l'avenir du domaine des prothèses et des orthèses. Pour en arriver là, toutefois, il ne faut pas uniquement nous concentrer sur l'aspect technique, comme je l'ai indiqué précédemment. Il y a aussi beaucoup de choses à faire sur les plans social, organisationnel, économique et juridique.
Dre Wong : Depuis 2015, 3D4MD a travaillé avec des étudiants canadiens de niveau secondaire et universitaire pour fabriquer des prothèses à coût réduit, comme cette main prothétique. Je précise que cette main — que je vous invite à examiner — a été conçue avec un modèle de source ouverte. Son coût de fabrication est de moins de 25 $, ce qui est environ 40 fois moins coûteux qu'une prothèse en vente libre offrant des fonctionnalités comparables. Je précise que l'impression 3D, il est possible de choisir la couleur. La famille de la patiente que vous voyez ici voulait que la couleur de l'appareil s'harmonise avec son teint, et c'est ce que nous avons fait. Donc, comme Matt l'a indiqué, la technologie permet en effet une démocratisation sans précédent de l'accès aux prothèses à l'échelle mondiale.
Je tiens toutefois que vous sachiez qu'elle démocratise aussi l'innovation dans le secteur des prothèses. L'un des thèmes de notre concours de fabrication d'instruments médicaux est la fabrication d'équipement de sport adapté imprimable en 3D destiné aux athlètes handicapés pour leur permettre de participer pleinement aux compétitions sportives, comme leurs homologues non handicapés. Nous considérons qu'il y a là des besoins considérables qui ne sont pas comblés, surtout cette année, en raison de la tenue des Jeux Invictus. Dans le domaine des prothèses, on observe une forte démocratisation sur les plans de l'accès et de l'innovation.
M. Walus : Notre technologie est différente parce que nous utilisions des cellules vivantes. Donc, pour nous les coûts sont considérablement plus élevés. Il n'y a pas de comparaison possible. Je ne vois pas comment les gens pourraient faire ce genre de choses à domicile. Nous favorisons toutefois la démocratisation des activités d'innovation, car ces systèmes de bio-impression 3D, qu'on voit de plus en plus dans les laboratoires universitaires à l'échelle mondiale, peuvent être utilisés pour reproduire des expériences de biologie que nous pourrions avoir conçues. Il suffit alors d'envoyer le fichier numérique à ces laboratoires.
Je considère que l'impression 3D, dans le sens général, favorise la démocratisation de l'innovation. À mon avis, dans les situations qui ont été décrites, ce serait même possible à l'échelle des utilisateurs, mais dans notre cas, l'innovation de fait uniquement dans les laboratoires de recherche.
La sénatrice Raine : C'est extrêmement intéressant. Utilisez-vous cela dans le domaine des orthèses? Il me semble y avoir des méthodes plus efficaces. Dans le cas des assises plantaires, on a plutôt recours à un moulage, n'est-ce pas? Qu'en est-il du remplacement d'une articulation ou du cartilage? Où en sommes-nous dans ces deux domaines?
M. Ratto : C'est une orthèse; une orthèse pédi-jambière. Vous parlez d'orthèses, des orthèses plantaires faites sur mesure, qui sont fabriquées par d'autres praticiens, les podo-orthésistes. Ces orthèses ne sont pas nécessairement conçues pour des personnes handicapées, mais pour des personnes qui ont de la difficulté à marcher, par exemple. Les dispositifs orthétiques sont des dispositifs cliniques, généralement moins coûteux. Certaines entreprises les fabriquent grâce à l'impression 3D. Cela ne se fait pas encore au Canada, mais cela se fait.
Plusieurs entreprises fabriquent des prothèses orthopédiques par impression 3D. J'ai donné un exemple dans mes notes de recherche, la cage lombaire, que l'on utilise pour la spondylodèse. Dans la plupart des cas, l'impression 3D ne sert pas nécessairement à fabriquer un dispositif en fonction des caractéristiques propres au patient. Elle sert plutôt à obtenir des types de surface qu'on ne pourrait fabriquer autrement. On parle de surfaces qui favorisent l'interposition osseuse et la fusion aux vertèbres du patient.
On trouve actuellement divers implants orthopédiques fabriqués par impression tridimensionnelle : des hanches, des genoux et beaucoup d'autres. En général, ce sont les produits les plus coûteux.
Dre Wong : À San Francisco, une entreprise nommée UNYQ fabrique des corsets pour la scoliose par impression 3D. La scoliose touche habituellement les adolescentes; porter un corset 24 heures par jour pendant des mois peut être une expérience très difficile. Nous savons que ces patientes devront probablement être opérées si elles ne portent pas leur corset selon les recommandations du médecin. C'est ce que nous cherchons à éviter.
L'entreprise parvient à faire une représentation numérisée du torse de la patiente atteinte de scoliose. Si vous consultez leur site web, vous pourrez voir les magnifiques corsets qu'elle fabrique. Les corsets pour la scoliose n'ont pas vraiment évolué depuis des décennies. J'espère qu'on pourra obtenir des données démontrant la complexité que permet l'impression tridimensionnelle. Il est possible de fabriquer des appareils adaptés au corps des patients, mais aussi à leurs goûts. Cette société fabrique de magnifiques corsets pour la scoliose qui ont l'aspect de la dentelle. Vous n'avez jamais rien vu de tel. Ils sont fantastiques.
Ce qu'on espère, c'est qu'en fabriquant des appareils qui plaisent aux patientes, elles auront plus tendance à les porter, et qu'elles éviteront ainsi une intervention chirurgicale. J'attends la publication des données, mais ce raisonnement a du sens. Je vous invite à surveiller cela de près.
M. Walus : De notre côté, nous fabriquons du cartilage. Nous collaborons actuellement avec Johnson & Johnson pour un projet sur le ménisque du genou. C'est très excitant. Les besoins sont énormes.
Je pense qu'à l'avenir, les implants tissulaires seront utilisés en chirurgie plastique; on utiliserait donc du vrai tissu humain plutôt que des plastiques. Sur le plan technique, c'est plus réaliste que l'impression d'un organe fonctionnel comme un rein ou un foie. À mon avis, ces utilisations seront viables à relativement court terme.
Le président : Vous avez mentionné la facilité d'utilisation et l'accessibilité de toutes ces choses, et vous avez laissé entendre que c'était moins coûteux que les méthodes conventionnelles. Docteure Wong, vous avez mentionné le coût d'un produit imprimé précis, soit la main que vous avez fait circuler.
En ce qui concerne l'imprimante comme telle, nous savons que des gens voudront imprimer à la maison les dispositifs relativement simples dont ils ont besoin, comme ceux dont nous parlons. Quel est le prix d'une imprimante? Pour un particulier, quel est le coût total approximatif, par article? Je suis conscient que c'est quelque chose de nouveau et que les prix baisseront rapidement. Il y a déjà eu une baisse considérable à cet égard. Donnez-nous un chiffre approximatif.
Dre Wong : Habituellement, le prix des imprimantes 3D de bureau se situe entre 300 $ et 3 000 $. Le matériau d'impression, du plastique rigide ou souple, ne coûte habituellement que quelques cents le gramme. Toutefois, les gens n'ont pas à acheter une imprimante 3D. Si c'est leur choix, cela ne pose pas problème, mais ils peuvent avoir accès à une imprimante dans les bibliothèques publiques. Si vous voulez en utiliser une, allez à la bibliothèque publique.
Le président : Qu'en est-il de la capacité de numérisation des caractéristiques physiques d'une personne en vue du versement des données dans le logiciel?
Dre Wong : Votre téléphone intelligent est un numériseur 3D. Vous pouvez télécharger une application gratuite qui permet de transformer votre téléphone intelligent en numériseur 3D.
Le président : Nous avons vu une application qui permet de voir le réseau vasculaire, ce qui évite de se faire piquer à de multiples reprises par la personne qui prend des échantillons sanguins.
M. Ratto : Outre les applications pour transformer un téléphone en numériseur 3D, certains téléphones ont maintenant un numériseur intégré. Celui-ci est fabriqué par Lenovo; le couvercle du dessous que vous voyez ici contient un numériseur 3D. Il peut être utilisé pour mesurer les dimensions de cette salle ou d'autres composantes. Nous menons actuellement des essais pour capturer la morphologie des membres résiduels des patients.
Le président : Monsieur Walus, vous avez donné une bonne description du procédé d'impression des cellules pour la création de colonies cellulaires et la tenue d'essais. Un des témoins que nous avons entendus précédemment a parlé des avancées pour les organes complets. Les difficultés à cet égard sont liées aux nutriments et aux flux des communications entre les cellules imbriquées sur l'échafaudage. Par conséquent, pour le moment, ces choses ont une durée de vie relativement limitée. C'est évidemment un domaine en évolution.
Manifestement, vous n'avez pas eu de telles difficultés dans le cas des exemples précis dont vous avez parlé. Pourriez-vous parler des prochaines étapes de recherche pour passer d'une colonie cellulaire à une possible communication entre les cellules d'un organe imprimé?
M. Walus : Il reste encore d'importantes difficultés à surmonter pour fabriquer un organe complet, un rein, par exemple. En ce moment, nous produisons essentiellement des tissus en microvolumes ou des parties d'organe. Vous avez souligné, à juste titre, qu'il est très difficile de fournir un apport en substances nutritives aux tissus épais. En fait, les tissus d'une masse cellulaire épaisse ne peuvent survivre. Les cellules et la partie interne du tissu mourront.
La vascularisation est l'un des aspects sur lesquels se concentre l'ensemble de la communauté scientifique. Elle fait d'ailleurs d'importants progrès dans ce domaine. Certains ont montré des exemples de modèles de vascularisation, mais la recherche ne fait que commencer. Il va sans dire que la vascularisation est un aspect fondamental pour la fabrication d'un organe complet.
Le président : Dans un récent numéro de la revue New Scientist, on trouve une description d'un segment de deux vertèbres imprimées en 3D. Essentiellement, les vertèbres de remplacement servent d'échafaudage pour la colonne. On a réussi à imprimer, sur la surface, une structure cellulaire modifiée afin de permettre la compatibilité avec le tissu humain. Cependant, on a réussi à reproduire les caractéristiques de la colonne vertébrale, de sorte que le produit a la solidité du tissu osseux et la souplesse de vertèbres naturelles. J'ai trouvé que c'était une combinaison remarquable des deux types de techniques dont vous avez parlé.
Monsieur Ratto, concernant vos observations sur les obstacles liés aux diverses administrations, il est bien connu qu'il est plus facile de faire des affaires avec divers pays du monde qu'à l'intérieur de nos propres frontières. Nous nous targuons d'avoir toutes sortes d'accords de libre-échange, mais nous sommes incapables de favoriser le commerce intérieur. Beaucoup estiment que ce modèle est foncièrement défectueux.
Vous avez donné un exemple des problèmes de financement qui surviennent lorsqu'on observe un changement radical dans l'orientation des capacités de recherche. Cependant, les données semblent indiquer qu'il existe, outre les organismes subventionnaires conventionnels, d'autres sources de financement qui permettent de combler les lacunes. Si le passé peut servir d'exemple, on constate que le secteur de la biotechnologie a connu les mêmes difficultés, c'est-à-dire des problèmes liés aux activités multidisciplinaires et à la portée. Il est à espérer que lorsque les connaissances auront été établies — ce qui est déjà le cas au Canada —, les organismes subventionnaires mettront fin au cloisonnement et s'intéresseront à la recherche sur la théorie.
Le problème du financement des chercheurs du secteur de la santé a toujours été lié au financement des activités dans les diverses administrations. À titre d'exemple, un chimiste développe un produit qui a une application médicale, mais n'est pas admissible au financement dans les diverses régions. Nous devons régler ces choses rapidement si nous voulons demeurer concurrentiels dans ce domaine. Vous avez soulevé plusieurs enjeux importants.
La sénatrice Seidman : J'aimerais vous poser quelques questions sur la preuve. Je pense que certains d'entre vous ont utilisé le concept de la preuve ou en ont discuté. Monsieur Ratto, je veux vous poser une question sur l'APIL. Vous avez dit que son but premier consiste à résoudre des questions associées aux erreurs médicales évitables. Bien entendu, comme vous l'avez dit, c'est un problème de taille, la troisième cause de décès aux États-Unis. Des travaux ont-ils été effectués pour démontrer que l'APIL, par exemple, a contribué à réduire les erreurs médicales?
M. Ratto : L'efficacité de l'impression 3D en tant qu'outil adjacent pour la formation est démontrée dans diverses publications et différents milieux universitaires. Certains de ces articles qui ont découlé des travaux à l'APIL sont énumérés dans les notes que je vous ai envoyées, mais il n'y a pas que le travail de l'APIL. Plusieurs personnes se penchent sur ces questions.
D'une certaine manière, l'impression 3D n'importe pas autant que l'utilisation de fantômes chirurgicaux notamment, et la façon dont le modèle standard de la formation médicale, qui consiste à regarder, à faire et à enseigner, est perturbé par l'accès accru à des fantômes. Par « fantômes », j'entends des analogues humains qui peuvent être utilisés pour effectuer des procédures chirurgicales analogues. En augmentant le temps que les étudiants en médecine peuvent passer à étudier ces analogues, on améliore leurs compétences et on réduit les erreurs. Il y a des exemples flagrants pour le prouver.
Je pense que les recherches pour déterminer si l'obtention d'un modèle du cerveau du patient qui subira une neurochirurgie aidera à la procédure sont en grande partie non scientifiques pour l'instant. Je ne sais pas combien d'études viables qui portent sur le sujet ont été réalisées. Il y en a un certain nombre, mais je pense que l'on travaille encore sur ce point.
Soit dit en passant, les chirurgiens semblent adorer cette technologie. Les patients l'adorent aussi, car ces modèles aident le chirurgien à comprendre la procédure et à l'expliquer au patient, si bien que le patient est mieux informé également.
Dre Wong : L'un des défis pour prouver les avantages associés aux modèles chirurgicaux imprimés en 3D, c'est que ces modèles sont probablement plus bénéfiques pour les cas complexes, inhabituels et à risque élevé, si bien qu'il est très difficile d'obtenir un point de référence pour confirmer que la durée des chirurgies a été moins longue parce qu'un modèle a été imprimé en 3D. La clinique Mayo a commencé l'impression 3D il y a de cela plusieurs années, car elle devait procéder à une chirurgie pour séparer des jumeaux siamois. Ce ne sont pas des cas courants, alors il est difficile d'obtenir un échantillon suffisamment grand pour pouvoir dire que c'est un avantage.
Par ailleurs, même si un modèle médical imprimé en 3D peut réduire la durée des procédures, il y a quand même le temps que le chirurgien doit passer à se préparer et à utiliser le modèle. Ces types de mesures qualitatives et quantitatives permettent très difficilement d'établir si l'impression 3D a permis de faire des économies de temps et d'argent.
[Français]
La sénatrice Mégie : Je ne veux pas vous paraître rabat-joie, ne soyez pas inquiets, je sais que l'évolution de la technologie est très importante pour l'évolution de la médecine. Par contre, j'aimerais savoir — car le domaine dans lequel vous travaillez est très excitant —, si vous aviez dans votre équipe un expert en économie de la santé pour vous conseiller sur les coûts. Effectivement, tout le monde sait que les rapports sortent et que les coûts liés aux soins de santé évoluent de façon exponentielle. Ici, on fait face à une technologie qui évolue et qui sera coûteuse, même s'il y aura des avantages pour les patients en termes de coûts individuels. Avez-vous un expert en économie de la santé qui vous met des balises de type économique, pour vous indiquer jusqu'où vous pouvez aller?
[Traduction]
Dre Wong : Je vais revenir au cadre que j'ai mentionné plus tôt et que je suggère à notre gouvernement d'adopter. Je tiens à répéter que lorsque vous avez recours à l'externalisation et à l'impartition pour l'impression 3D, les coûts sont très faibles. Comme nous l'avons dit, si vous choisissez d'acheter une imprimante 3D — et que vous n'êtes pas obligés de le faire parce qu'il y en a dans les bibliothèques publiques, dans les écoles et dans les maisons —, ce n'est pas si dispendieux; c'est moins de 3 000 $. Nous mettons un point d'honneur à recueillir des preuves pour nous convaincre que notre solution imprimée en 3D sauve des vies ou économise du temps ou de l'argent, et ce, davantage que les solutions de rechange.
Par exemple, plus tard aujourd'hui, je vais vous montrer un modèle imprimé en 3D de huit attelles que nous avons fabriqué pour une femme de Toronto atteinte de paralysie cérébrale. Elle devra porter ces attelles sur sa main droite pour le restant de ses jours. Elles se brisent et doivent être remplacées. La patiente doit faire des recherches, fixer un rendez-vous, attendre son rendez-vous, se déplacer, s'absenter du travail et payer une thérapeute pour son travail, son temps et les coûts du matériel. C'est du temps et de l'argent que la patiente doit consacrer. Avec des attelles en 3D, elle pourrait se rendre à la bibliothèque publique, choisir la couleur qu'elle veut, imprimer une autre attelle pour moins de 2 $, et elle n'aurait pas à s'absenter du travail.
Nous rédigeons ces rapports en tant que rapports de cas, car nous comprenons que ces publications de recherche démontreront la valeur de cette technologie pour nos patients, les fournisseurs de soins de santé et le système de soins de santé.
M. Ratto : Grâce à ses travaux, l'APIL a, dans le cadre de ses ressources de formation, un fantôme d'échographie cardiaque du nom de Blue Phantom, je crois, qui coûte environ 40 000 $. Le laboratoire a créé sa propre version du Blue Phantom en utilisant la technologie d'impression 3D abordable, pour la somme d'environ 60 $. De toute évidence, ce ne sont pas des modèles entièrement comparables, mais il y a un article qui compare la résolution et la qualité de la formation offertes par le Blue Phantom à celles du modèle que les chercheurs ont produit eux-mêmes. Les résultats démontrent qu'ils sont assez comparables, et la différence de prix est énorme.
Le sénateur Meredith : Vous m'avez volé la question que je voulais poser concernant les coûts, docteure Wong, mais je suis ravi de voir dans votre mémoire que vous dites que l'impression 3D est une technologie pour les soins de santé abordable, écologique et axée sur le patient qui permet de réaliser des économies et de réduire le recours à la main- d'œuvre. Pour ce qui est de la participation des jeunes à l'égard de cette technologie, je suis ravi de voir cette participation chez vos fabricants, mais ma principale question porte sur le financement et la recherche, ce à quoi le président a fait allusion. Il faut faire preuve de créativité en ce qui concerne le financement. Pouvez-vous expliquer ce qu'il faudra faire pour offrir du soutien aux personnes, aux organisations et aux entreprises qui en font la demande et pour s'assurer que cette technologie novatrice arrive sur le marché en très grandes quantités?
Dre Wong : C'est une excellente question. Je me ferai un plaisir de vous faire parvenir un mémoire écrit pour vous fournir des explications plus détaillées.
Le président : C'est une bonne idée, car c'est une question complexe. Si nous pouvons obtenir un mémoire écrit, ce serait extrêmement utile.
La séance publique de cette réunion nous a été très utile. Vos explications étaient excellentes et portent surtout sur l'impression 3D. Nous pouvons clairement voir les étapes qui sont des exemples de cette technologie existante, et l'imagination n'a pas de limite quant au potentiel. Avec ce type de technologie, nous voyons déjà des jeunes qui prennent des produits comme un appareil de reconnaissance des vaisseaux sanguins, un produit commercial de 5 000 $, et qui le transforment en une application gratuite que vous pouvez utiliser sur votre téléphone cellulaire. Les possibilités sont pratiquement illimitées. Je suis ravi d'être ici à l'étape où les choses évoluent vraiment; ce ne sont pas seulement des idées utopiques. Les exemples sont déjà extrêmement importants pour ceux qui en bénéficieront, et le potentiel est énorme.
Sur ce, je vous remercie au nom du comité. Je vais lever la séance, et nous allons immédiatement passer à une démonstration privée de l'impression 3D.
(La séance est levée.)