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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule no 52 - Témoignages du 6 décembre 2018


OTTAWA, le jeudi 6 décembre 2018

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi C-243, Loi visant l’élaboration d’une stratégie relative au programme national d’aide à la maternité, se réunit aujourd’hui à 10 h 32 pour étudier ce projet de loi et en faire l’étude article par article.

La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bonjour à tous et à toutes. Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Je m’appelle Chantal Petitclerc, sénatrice du Québec, et j’ai l’honneur de présider cette réunion ce matin.

[Traduction]

Avant de passer la parole à nos témoins, j’invite mes collègues à se présenter.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, Québec, et vice-présidente de ce comité.

La sénatrice Eaton : Nicky Eaton, Toronto.

[Français]

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Ravalia : Mohamed Ravalia, Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Oh : Victor Oh, Ontario.

Le sénateur M. Deacon : Marty Deacon, Ontario.

[Français]

La sénatrice Forest-Niesing : Bonjour et bienvenue. Josée Forest-Niesing, du Nord de l’Ontario.

La présidente : Je vous remercie. Aujourd’hui, nous poursuivons et terminons notre étude du projet de loi C-243, Loi visant l’élaboration d’une stratégie relative au programme national d’aide à la maternité.

[Traduction]

Nous passons maintenant la parole à nos témoins que je vous présente. Robert Blakely est directeur, Affaires canadiennes, Syndicats des métiers de la construction du Canada. La Dre Nicola Cherry est professeure à l’Université de l’Alberta, titulaire de la chaire tripartite de la santé au travail, Division de la médecine préventive. Enfin, Mme Jeanette Southwood est vice-présidente, Affaires générales et partenariats stratégiques, à Ingénieurs Canada.

Je vous souhaite à tous la bienvenue. Nous entendrons d’abord la Dre Cherry, puis M. Blakely et ensuite Mme Southwood.

Docteure Cherry, à vous la parole.

Dre Nicola Cherry, professeure, Chaire tripartite de la santé au travail, Division de la médecine préventive, Université de l’Alberta : Merci. Je suis médecin et épidémiologiste. Mes recherches portent sur la santé au travail, domaine qui englobe un vaste éventail de sujets, mais aujourd’hui je vais m’attarder sur deux de mes phases de recherche qui intéressent tout particulièrement ce comité.

Pour la première, je vais en quelque sorte m’exprimer au nom de la Dre Alison Macdonald, qui est décédée il y a quelques années. J’ai travaillé avec elle à Montréal, à l’IRSST, ou Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail. Nous y avons mené une étude auprès de 56 000 femmes ayant accouché dans 11 hôpitaux de Montréal entre 1982 et 1984. De cette étude découle la majorité des données probantes qui sont à la base du retrait préventif. Le programme est en grande partie fondé sur des données tirées des résultats de cette étude. Comme je le disais, Alison est décédée il y a un certain nombre d’années, mais je me ferai un plaisir de répondre à vos éventuelles questions sur cette recherche.

J’ai ensuite passé un certain temps à faire autre chose, mais je suis retournée à ce domaine peu après mon entrée en fonction en Alberta, en 2000. Nous avons examiné les tendances de l’emploi des femmes de métier, surtout en soudure et en électricité. Nous avons lancé cette étude, parce que nous nous inquiétions des effets possibles de la soudure sur les femmes enceintes, sur leur enfant, sur leur fœtus.

Nous avons comparé les soudeuses à un groupe d’électriciennes ainsi qu’à une cohorte comparable d’hommes travaillant dans ces deux métiers, mais je ne m’attarderai pas sur cela aujourd’hui. Nous étudiions les effets de ces métiers sur la santé des poumons et autres. Je vais parler seulement des effets que subissent les femmes qui continuent à travailler pendant leur grossesse.

Nous avons recruté 448 soudeuses de partout au Canada, dont 60 p. 100 venaient de l’Alberta. Grâce à la collaboration des provinces et des territoires, nous avons pu recruter 440 électriciennes d’un peu partout. Cette année, nous avons fini de récolter les données. Nous avons des renseignements sur 1 126 femmes enceintes, et 478 d’entre elles avaient conçu pendant qu’elles travaillaient. Il s’agit de 223 soudeuses et de 255 électriciennes qui sont tombées enceintes pendant qu’elles exerçaient leur métier.

Qu’avons-nous découvert? Nos résultats donnent sérieusement à penser qu’un plus grand nombre de femmes qui travaillent dans ces deux métiers risquent de faire une fausse couche. En fait, les soudeuses albertaines sont même plus à risque, parce que leur travail est assez différent de celui de leurs consœurs ontariennes. Ces femmes travaillent dans les champs pétrolifères, et un grand nombre d’entre elles effectuent des tâches très éprouvantes physiquement.

Cela dit, rien n’indique que, dans ces métiers, les femmes ont donné naissance à des bébés plus petits ou prématurés. Celles qui tolèrent bien leurs trois premiers mois — c’est un thème qui est revenu souvent — donnent naissance à des bébés en aussi bonne santé que celles qui n’exercent pas ces métiers ou qui avaient arrêté de travailler.

Un résultat intéressera particulièrement le comité : 80 p. 100 des femmes de ces métiers avaient cessé de travailler avant leur 28e semaine de grossesse. Nous avons remarqué que les soudeuses dont les tâches étaient très éprouvantes sur le plan physique avaient moins tendance que les autres travailleuses à être réaffectées à des tâches moins exigeantes. Donc, même si leur travail est très éprouvant physiquement, très peu d’entre elles sont affectées ailleurs, à cause des tâches qu’elles accomplissent dans les champs pétrolifères. Je crois qu’il n’y a pas tellement d’autres tâches à leur confier que de la soudure dans ce contexte.

J’ai choisi un chiffre, que j’ai remis au comité et dont les membres ont eu connaissance. J’ai sélectionné 28 semaines comme période cruciale, parce qu’après, les femmes peuvent prendre leur congé de maternité. La moitié de nos soudeuses avaient cessé de travailler avant la fin de ces 28 semaines, donc avant de toucher leurs prestations de maternité. Nous avons constaté qu’un moins grand nombre d’électriciennes avaient cessé de travailler et que ce nombre était encore moins élevé chez les femmes n’exerçant pas un métier. Il est donc évident que les femmes travaillant dans des métiers spécialisés physiquement exigeants sont essentiellement obligées d’arrêter plus tôt que les autres.

Nous ne possédons pas beaucoup de données sur l’incidence que peut avoir le fait de travailler jusqu’à un stade tardif de la grossesse, sur la santé du bébé et de la mère. Un retrait tardif semble en fait ne pas avoir d’effet délétère sur la mère ou sur l’enfant.

Un grand nombre de données indiquent que les femmes dont les tâches sont très éprouvantes ont beaucoup de problèmes de santé pendant leur grossesse, mais qu’elles s’en remettent. Ces problèmes ne durent généralement pas très longtemps.

Dans notre étude de Montréal, nous avons constaté que ces femmes ont tendance à développer des varices et notre étude actuelle indique que les femmes développent des maux de dos. Cela étant, on ne constate pas un large éventail de problèmes chez un grand nombre de femmes.

En résumé, je dirais que les résultats de ces deux études démontrent que les tâches physiquement éprouvantes provoquent peut-être un plus grand nombre de fausses couches. Cependant, ils n’indiquent que très peu d’effets sur la santé des bébés et des mères qui avaient continué à travailler, disons, après leur 20e semaine.

Toutefois, les résultats de notre étude actuelle démontrent clairement que les femmes de métier, surtout les soudeuses, cessent de travailler avant leur 28e semaine, c’est-à-dire avant de toucher leurs prestations de maternité. Je trouve qu’il serait bon de mener des consultations en vue d’élaborer un programme national d’aide à la maternité. Je ne voudrais cependant pas qu’il soit cause de discrimination envers les femmes de métier. Nos travaux visent essentiellement à éviter cette discrimination.

Nous avons recueilli beaucoup de données qui peuvent vous être utiles dans votre étude et je serais très heureuse d’effectuer les analyses qui vous aideraient dans vos discussions futures. Merci.

Robert Blakely, directeur, Affaires canadiennes, Syndicat des métiers de la construction du Canada : Vous vous demandez peut-être pourquoi un vieux bonhomme chauve, de race blanche et membre des syndicats de la construction se mêle de parler de maternité. En fait, cet enjeu est vraiment crucial pour nous.

Notre organisme compte 500 000 membres dans tout le Canada. À l’heure actuelle, 4 p. 100 d’entre eux sont des femmes. Nous espérons faire doubler ce chiffre au cours de ces cinq prochaines années, puis le faire doubler à nouveau. Autrement dit, la pyramide des âges de notre syndicat est très simple. Au cours des 40 dernières années, le Canada a été construit par les baby-boomers qui ont tiré la couverture à eux et qui s’en vont maintenant à la retraite. Au cours des cinq prochaines années, nous devrons remplacer un quart de million de travailleurs qualifiés. En réalité, nous devrons, pour cela, recruter 500 000 travailleurs parce que, comme dans les universités et dans la majorité des carrières qui nécessitent un diplôme postsecondaire, il faut deux aspirants pour un élu. Nous n’y parviendrons pas tant que nous n’inciterons pas un plus grand nombre de femmes intelligentes à faire carrière dans nos métiers.

Nous avons tout à fait intérêt à prendre part à cette consultation. Nos métiers sont physiquement très éprouvants, mais ils exigent plus qu’une simple force bête, comme on disait d’antan. Nous avons maintenant des machines qui exécutent de nombreuses tâches, mais elles ne sont pas capables de tout faire. Certains métiers exposent les travailleurs à des substances toxiques, d’autres à des rayonnements radioactifs. Le plus souvent, nos gens travaillent à l’extérieur, par toutes sortes d’intempéries. Nos métiers sont pratiqués dans toutes les villes et dans tous les villages du pays.

Malheureusement, chaque affectation est temporaire. On commence sur un chantier aujourd’hui et on se retrouve mis à pied le lendemain, le surlendemain, le mois suivant ou un an plus tard. On met toujours des gens à la porte. Le Canada compte quelque 100 000 entrepreneurs, mais 85 p. 100 d’entre eux emploient moins de 10 travailleurs. Il est beaucoup plus difficile de donner du travail à un petit groupe. Je crois qu’à l’heure actuelle, environ 3 000 personnes travaillent à Muskrat Falls. Il est super facile d’avoir assez de travail pour pourvoir un seul poste, mais il est absolument impossible à l’entrepreneur qui construit un garage derrière une maison unifamiliale d’avoir assez de tâches variées à offrir pour occuper trois personnes. Je ne veux pas critiquer nos petits entrepreneurs, mais s’ils ont 10 employés et qu’ils ne réussissent pas à leur trouver assez de travail, ils leur disent : « Salut, à la prochaine ». C’est la seule façon de faire tourner leur entreprise.

Nous ne savons pas vraiment comment régler ce problème. Les résultats de recherche de la Dre Cherry confirment ce que nous observons. Les femmes qui tombent enceintes quittent leur emploi avant leur 28e semaine, soit avant de recevoir leurs prestations de maternité. Cela nous donne un peu de souplesse. C’est excellent, mais ce n’est qu’un emplâtre sur une jambe de papier. En réalité, en prenant leur congé de maternité si tôt, elles y perdent beaucoup. Leur période d’allaitement, leur vie familiale et leur vie sociale en souffrent. Elles se demandent même si elles pourraient ou devraient rester dans ce métier. Il nous arrive très régulièrement que des femmes résistent malgré tout, qu’elles cachent leur grossesse ou qu’elles essaient de travailler alors qu’elles devraient s’arrêter. Nous comptons sur la recherche que vous allez commander, sur les consultations que vous allez mener, pour passer à l’étape suivante.

Il est injuste que les femmes aient à se demander si elles doivent prendre leur congé de maternité plus tôt à cause du genre de travail qu’elles font. Dans toute la mesure du possible, nous assemblerons des tâches permettant de dépanner des travailleuses. Nos syndicats dirigent 175 centres de formation partout au pays. Nous formerons les gens sur d’autres aspects de leur travail, mais il nous faudra un soutien pour cela.

À l’heure actuelle, les prestations d’assurance ne sont pas égales partout au pays. Au Québec, la Loi sur la santé et la sécurité au travail permet aux gens de recevoir jusqu’à 90 p. 100 de leur salaire. Sous le régime de l’assurance-emploi, ils reçoivent 55 p. 100. Bon, d’accord, je ne suis qu’un petit bonhomme tout simple des Prairies, mais cet écart est énorme. Un si grand écart entre les prestations d’assurance ne devrait pas exister.

Je comprends les problèmes de compétence, les difficultés que cela va poser en vertu du paragraphe 92(13), mais c’est une question qu’il faut régler. Le Forum des ministres du marché du travail, que l’on désigne malheureusement par FMMT, devrait se réunir et corriger la situation. Il est possible de régler ce problème, et votre étude est vraiment importante.

En conclusion, le nombre de femmes que cela va concerner est minime. Il faut que nous trouvions un moyen de les protéger économiquement et socialement. Nous tenons à les encourager. Les femmes intelligentes, qui deviennent compagnes d’apprentissage, soudeuses à pression, mécaniciennes d’instruments ou tuyauteuses, sont précieuses dans notre domaine. Ces femmes possèdent les mêmes qualités que les étudiants qui décrochent une maîtrise. Elles sont très intelligentes, alors ne les désavantageons pas.

Comme je suis plutôt près de mes sous, je ne veux pas qu’elles quittent leur travail parce qu’elles n’y ont trouvé aucun soutien et qu’elles partent faire autre chose. Nous voulons qu’elles restent. Nous voulons que tout l’argent que nous, Canadiens, avons investi dans leur formation nous donne un bon rendement pendant de nombreuses années.

Nous voulons qu’elles soient en meilleure santé. Nous voulons qu’elles aient une meilleure situation sociale. Nous désirons que les programmes soient mieux gérés partout au pays afin de combler l’écart entre les prestations de l’assurance-emploi et celles de la santé et sécurité au travail. L’assurance des accidents au travail s’insère mal dans le système d’assurance-emploi, alors il faut que ces deux régimes restent distincts.

Notre pays fait partie du G7, il est en tête de file des sociétés progressistes du monde. Il faut que nous trouvions moyen de traiter avec équité les problèmes liés à la maternité des jeunes femmes brillantes qui choisissent de faire carrière dans un métier.

J’ai probablement dépassé le temps que vous m’aviez accordé. Merci beaucoup. Je vais me taire, maintenant.

Jeanette Southwood, vice-présidente, Affaires générales et partenariats stratégiques, Ingénieurs Canada : Merci de m’avoir offert de présenter des observations sur le projet de loi d’initiative parlementaire C-243, Loi visant l’élaboration d’une stratégie relative au programme national d’aide à la maternité.

Je suis vice-présidente des affaires générales et partenariats stratégiques d’Ingénieurs Canada. Notre organisme représente plus de 295 000 ingénieurs au Canada. Nous sommes fiers d’être membres de la Canadian Coalition of Women in Engineering, Sciences, Trades and Technology, ou CCWESTT. Ses organismes membres collaborent depuis longtemps à l’avancement professionnel des femmes.

Je suis très heureuse de représenter aujourd’hui notre coalition, la CCWESTT, et de parler au nom d’Ingénieurs Canada du grave problème qui entrave le recrutement, le maintien de l’effectif et le perfectionnement professionnel des femmes dans le domaine de l’ingénierie.

Je tiens à souligner qu’aujourd’hui, le 6 décembre, Ingénieurs Canada commémore le massacre des étudiantes de l’École Polytechnique perpétré, il y a près de 30 ans, ainsi que de toutes les femmes victimes de la violence de genre.

Je vais parler de trois enjeux : le rôle des femmes dans le nouveau programme d’innovation, la protection des femmes enceintes et le besoin d’élaborer une stratégie nationale.

Tout d’abord, le rôle des femmes dans le nouveau programme d’innovation. Au Canada, les femmes demeurent une main-d’œuvre importante, mais sous-utilisée. Voici quelques chiffres tirés du rapport que le forum stratégique de la CCWESTT a publié en 2012. Alors que les femmes représentent 47,3 p. 100 de l’ensemble de la main-d’œuvre, on les trouve principalement dans les domaines de la coiffure, de la vente au détail et de l’accueil.

Elles ne composent que 21,9 p. 100 de la main-d’œuvre en sciences naturelles et en génie. Soulignons cependant qu’en 2012, seulement 10,5 p. 100 des ingénieurs praticiens étaient des femmes, et 9 p. 100 des femmes terminant un programme d’apprentissage obtenaient leur certificat dans un métier spécialisé à prédominance masculine.

Nous savons que ces chiffres sont encore très peu élevés en 2018. Par exemple, les ingénieures ayant droit d’exercice ne composent que 13,1 p. 100 de la main-d’œuvre dans ce domaine. Dans les métiers comme la soudure et le transport, ce pourcentage tombe à moins de 7 p. 100 et dans la construction, à un tout petit peu plus de 3 p. 100.

À peine 14,2 p. 100 des apprentis qui s’inscrivent à des programmes non traditionnels sont des femmes. Il est évident que, dans tous ces domaines, les femmes sont sous-représentées ou totalement absentes.

Nous savons que les femmes pourraient jouer un rôle important dans le Plan pour l’innovation et les compétences du Canada, mais cela ne se produira que si elles reçoivent du soutien, surtout quand elles tombent enceintes.

Comme le Forum économique mondial l’indique dans son Rapport mondial sur l’écart entre les sexes, les personnes et leurs compétences sont parmi les principaux moteurs d’une croissance durable à long terme. Il est donc clair que, comme les femmes représentent 50 p. 100 de la population canadienne, il faut qu’elles participent à ce plan. Comme l'indiquent Ozkan et Beckton dans leur rapport de 2012, le secteur minier aura besoin à lui seul de plus de 75 000 nouveaux travailleurs d’ici 2021.

Cependant, comme le soulignent Fouad et Singh dans leur article publié en 2011, les femmes se heurtent à de nombreux obstacles dans les domaines de l’ingénierie, des sciences, des métiers et de la technologie. Elles quittent ces domaines principalement à cause des problèmes liés à la maternité et aux soins maternels.

Le deuxième enjeu dont je voulais parler est la protection des femmes enceintes. Nombreuses sont celles qui subissent du stress à cause de leur milieu de travail et de leur condition de femme enceinte. Selon l’étude de Nielson en 2017, l’un de leurs principaux défis est la perspective de graves problèmes financiers, surtout si elles n’ont pas de conjoint ou si elles sont seules à subvenir aux besoins de leur famille.

Nous nous devons de mieux protéger les femmes qui travaillent dans un milieu qui s’avère dangereux pour la mère et le fœtus. Comment subviendront-elles à leurs besoins si elles doivent cesser de travailler?

Bien que la Loi canadienne sur les droits de la personne interdise la discrimination envers les femmes enceintes, la situation n’est pas simple. Comme l’indique le rapport de la Commission canadienne des droits de la personne publié en 2011 et intitulé Grossesse et droits de la personne en milieu de travail — Politique et pratiques exemplaires, la grossesse en milieu de travail est un enjeu fondamental des droits de la personne liés à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes.

Les femmes ne devraient pas subir de conséquences négatives au travail simplement parce qu’elles tombent enceintes. Les employeurs ont l’obligation légale de tenir compte des besoins liés à la grossesse, à moins que les mesures d’adaptation ne causent un préjudice injustifié. Il arrive toutefois que l’employeur ne puisse pas prendre de mesures d’adaptation. D’un côté, l’employée a le droit de contribuer pleinement à la main-d’œuvre, mais d’un autre côté, si ses conditions de travail menacent gravement sa santé et sa sécurité, la femme enceinte a besoin de soutien.

Jusqu’à tout récemment, les lois et les règlements du Canada ne facilitaient pas la situation des femmes enceintes qui devaient cesser de travailler, sauf au Québec où, comme on l’a dit plus tôt, le système est différent.

La décision de permettre aux femmes de toucher des prestations d’assurance-emploi 12 semaines avant la date prévue de l'accouchement — selon le budget fédéral de 2017 ou 15 semaines en vertu du projet de loi C-43 — au lieu de 8 semaines, aidera déjà bien les femmes qui subissent le stress de se trouver enceinte en milieu de travail. Cependant, elle ne réglera pas complètement les problèmes de celles qui doivent travailler dans des conditions dangereuses.

En leur laissant le choix de prendre une partie de leurs 17 semaines avant ou après l’accouchement, on réduit un peu leur fardeau financier, mais elles ont d’autres difficultés à surmonter.

Nous avons d’excellents exemples démontrant que l’industrie est en mesure de soutenir les femmes dans leur lieu de travail. Ainsi, dans le cadre de l’assouplissement de sa politique de travail, la société Rio Tinto Coal Australia réorganise les tâches des femmes pour qu’elles puissent les exécuter à partir de chez elles.

L’entreprise espagnole Iberdrola, spécialisée dans la production et la distribution d’électricité, de gaz et d’énergies renouvelables, favorise les mesures d’aide à la maternité et d’égalité des chances et offre une diversité d’options et d’arrangements qui non seulement aident les femmes, mais leur permettent aussi d’obtenir des promotions professionnelles et d’accéder à des postes de direction, comme l’expliquent Ozkan et Beckton dans leur rapport de 2012.

Notre dernier point est la nécessité pour le Canada de se doter d’une stratégie nationale qui lui permettra de se positionner avantageusement dans un système équitable pour tous. Il existe actuellement de nombreux autres obstacles qui empêchent les femmes de participer pleinement au marché du travail, surtout dans les domaines des sciences, du génie, des métiers et de la technologie. Je parle notamment du processus d’embauche et du respect en milieu de travail, puisque la recherche démontre que les problèmes de harcèlement et d’intimidation sont toujours présents et que la conciliation travail-famille demeure difficile en raison du manque de flexibilité des horaires de travail.

Dans le domaine du génie, les principales causes d’abandon du marché du travail chez les femmes sont le climat de travail et la culture du milieu de travail, comme l’ont expliqué Fouad et Singh dans leur rapport publié en 2011. Dans son récent rapport de 2016, le Forum canadien de l’apprentissage fait ressortir la nécessité de changer la culture en milieu de travail à cause de la discrimination. Toute nouvelle stratégie nationale devra faire en sorte que les travailleurs à faible revenu, en particulier, ne soient pas traités de manière inéquitable.

Madame la présidente, je vous remercie beaucoup d’avoir invité Ingénieurs Canada et CCWESTT à présenter leur point de vue au comité sur cette importante question.

M. Blakely : Madame, puis-je apporter une précision?

La présidente : Je vous en prie.

M. Blakely : Nous avons dit que le Québec est l’exemple par excellence, mais il ne s’applique qu’aux Québécoises assujetties à la loi provinciale. Si vous faites partie des 9 p. 100 de Canadiennes couvertes par le Code du travail du Canada, vous êtes perdantes à cet égard.

On a laissé entendre qu’une simple modification du Code du travail du Canada corrigerait cette lacune. Cela marchera pour le Québec, mais pas pour les travailleuses des autres provinces.

La présidente : Merci. Je suis certaine que vous aurez le temps d’approfondir la question. Beaucoup de sénateurs souhaitent poser des questions.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup à tous pour vos exposés. Docteure Cherry, vous nous avez fourni de précieux renseignements fondés sur des preuves scientifiques. Je remercie également les deux autres témoins pour les données pragmatiques et concrètes qu’ils nous ont fournies.

Monsieur Blakely, vous avez d’emblée affirmé qu’il existe des inégalités dans ce pays et que le Québec est un excellent exemple, sauf pour les travailleuses fédérales qui y travaillent, malheureusement.

Nous sommes saisis d’un projet de loi d’initiative parlementaire. Lorsque nous avons accueilli le parrain ici, j’ai exprimé mon étonnement de voir que notre travail se résumait à tenir une consultation, et non à traiter la question et que nous allions malheureusement devoir attendre encore trois, quatre ou cinq ans avant d’arriver au cœur du sujet. Il m’a rappelé qu’un projet de loi d’initiative parlementaire ne devait pas entraîner de coûts. Nous sommes donc dans une drôle de situation.

Ce projet de loi vise à mettre en place un processus de consultation en vue de l’établissement d’une stratégie; les personnes invitées à participer à cette consultation sont des ministres fédéraux, des représentants des gouvernements provinciaux et territoriaux responsables de l’emploi et d’autres intervenants pertinents.

Je vous pose à chacun la question suivante : à votre avis, qui sont ces intervenants pertinents que nous devrions consulter pour nous assurer que tous les secteurs de la communauté scientifique seront représentés?

En commençant par la Dre Cherry, pouvez-vous nous dire, à tour de rôle, qui sont ces intervenants qui pourraient participer à la consultation?

De plus, pouvez-vous nous dire s’il y a un sujet en particulier que nous n’avons pas mentionné et qu’il serait important d’aborder dans le cadre de la consultation?

Dre Cherry : Vous me prenez au dépourvu. Je ne m’attendais pas à cette question.

Si vous me permettez de nuancer la question, je dirais que l’une des questions que le Québec a dû se poser, c’est de savoir si le but est de protéger le fœtus ou de protéger la femme et sa famille. Si votre but est de protéger le fœtus contre tout danger, vous devez alors intervenir dès le moment où la femme envisage de devenir enceinte ou au tout début de la grossesse. C’est un très gros engagement. Si vous voulez protéger la femme plus tard, d’après ce que d’autres intervenants et moi-même avons dit, vous devriez alors probablement intervenir à partir du deuxième ou troisième trimestre de sa grossesse.

D’après les discussions que j’ai suivies sur ce sujet, ce projet de loi vise essentiellement le bien-être de la femme.

Vous ne chercherez probablement pas à consulter des experts en santé, mais plutôt des experts en économie et des personnes ayant une bonne connaissance des métiers. Je pense à la soudure, par exemple. Dan Tadic, de l’Association canadienne de soudage, s’intéresse beaucoup à cette question et y travaille de près. D’après les travaux dont j’ai parlé, il ferait un bon candidat pour votre consultation.

La sénatrice Seidman : Merci. Vous avez soulevé un point très important, à savoir s’il faut chercher à protéger le bébé ou la mère. Il faudrait aborder cette question dans le cadre de notre consultation.

M. Blakely : Il y a beaucoup d’éléments qui se recoupent ici : la santé et la sécurité, les implications liées à l’exercice du métier, le fait d’être une soudeuse ou une technicienne du contrôle de la qualité qui transporte la source radioactive pour radiographier une soudure; la formation; le volet socioéconomique et bien d’autres. Vous allez toutefois devoir consulter des personnes qui ont une expérience pratique du travail. Nous pouvons vous suggérer plusieurs femmes ayant le statut de compagne — équivalent du statut de compagnon chez les hommes — qui ont franchi toutes les étapes du métier, qui ont eu des enfants et vécu cette expérience. Elles pourraient vous éclairer sur la question.

Les répercussions touchent tous les aspects de la vie de ces femmes. Une jeune femme qui a entamé sa quatrième année en tant que monteuse de conduites de vapeur et qui doit interrompre sa formation ne reprendra peut-être jamais ce travail. Nous devons trouver des moyens d’aider ces femmes à poursuivre leur carrière. Je pourrais vous en parler longuement, mais je vais m’arrêter ici.

La sénatrice Seidman : Comme le temps file, je vais poursuivre.

M. Blakely : Je ne veux pas vous accaparer.

La sénatrice Seidman : Je le sais et vos commentaires sont extrêmement précieux.

Madame Southwood, vous voulez peut-être dire un mot?

Mme Southwood : Je suis tout à fait d’accord avec ce que viennent de dire M. Blakely et la Dre Cherry. Vous devriez absolument consulter des représentantes de ces groupes, ce sont celles qui sont les plus touchées.

Il faudrait également consulter les organisations qui ont adopté avec succès des pratiques exemplaires, tant au Canada qu’à l’étranger. Dans notre exposé, nous avons cité les exemples des entreprises Rio Tinto Coal Australia et Iberdrola, mais il y en a beaucoup d’autres. Nous pouvons vous en suggérer si vous le voulez.

Enfin, vous devriez consulter les grands employeurs des femmes visées afin d’entendre tous les points de vue — tant celui des employées que celui des employeurs — et de les colliger dans les conclusions de la consultation.

[Français]

La sénatrice Mégie : C’est vraiment rafraîchissant de vous entendre ce matin avec vos points de vue qui convergent tous. J’aimerais d’abord poser une question à la Dre Cherry. Vous avez dit qu’il faudrait faire un choix à savoir si on protège le fœtus ou la femme. J’ai vu dans votre étude que ces femmes exercent un métier dangereux, qu’elles sont à risque d’avoir un accident de travail et que la fumée qui se dégage de la soudure peut certainement être néfaste pour le fœtus. Finalement, dans le cas des soudeuses, on devrait protéger les deux, c’est-à-dire la femme et le fœtus.

La moitié des soudeuses qui ont arrêté de travailler plus tôt avaient-elles droit au retrait préventif ou étaient-elles dans une situation où elles arrêtaient d’elles-mêmes tout en sachant qu’elles devraient faire face à des problèmes financiers?

[Traduction]

Dre Cherry : Si j’ai bien compris votre dernière question, vous voulez savoir s’il s’agit d’un problème financier ou si le problème est lié à la difficulté de continuer à travailler?

[Français]

La sénatrice Mégie : Les soudeuses qui ont arrêté de travailler très tôt habitaient-elles dans une province où le retrait préventif existe? Quant à l’autre moitié des travailleuses, ont-elles décidé de ne pas arrêter de travailler parce qu’elles n’avaient pas droit au retrait préventif?

[Traduction]

Dre Cherry : Toutes les soudeuses du Québec ont profité d’un retrait préventif. Il y a donc une nette différence entre les femmes du Québec et celles des autres provinces dans la démarche qu’elles entreprennent dès qu’elles deviennent enceintes.

[Français]

La sénatrice Mégie : Dans les autres provinces, ont-elles arrêté de travailler malgré le fait qu’elles risquaient d’avoir des problèmes financiers?

[Traduction]

Dre Cherry : Elles ont arrêté de travailler, même si cela leur posait des difficultés financières, oui. En fait, elles ne pouvaient pas continuer à travailler.

[Français]

La sénatrice Mégie : Parfait, merci.

Monsieur Blakely et madame Southwood, rencontrez-vous beaucoup d’obstacles en ce qui a trait au recrutement? Monsieur Blakely, vous dites que votre cible est de recruter un plus grand nombre de femmes. Quels sont les obstacles que vous rencontrez sur votre route pour recruter les femmes dans les différents corps de métier, par exemple en ingénierie et en construction?

[Traduction]

M. Blakely : Certains obstacles sont difficiles à surmonter. L’un d’eux est ce que nous appellerions le décalage des perceptions dans le milieu de l’éducation. Supposons qu’une brillante jeune femme, capitaine de l’équipe de débat ou de l’équipe de volleyball et ayant obtenu une mention d’honneur dans la plupart des matières, va voir le conseiller en orientation pour lui demander de l’information sur le métier de mécanicien d’instruments parce que c’est un travail qu’elle aimerait faire. Le traitement de choc débutera avant même que ses parents en soient informés. Il existe des préjugés à l’égard de certains métiers, à tout le moins à l’égard des femmes exerçant ces métiers.

Cette tendance commence à s’atténuer. L’actuel gouvernement fédéral a fait un bon travail de sensibilisation à cet égard et cela donne des résultats.

Parmi les autres obstacles, il y a le fait que ces emplois sont moins prévisibles, qu’ils sont temporaires et souvent dans des endroits éloignés. Une jeune femme enceinte de six mois qui travaille sur un clarificateur dans une usine de pâtes et papiers du Nord de l’Ontario se trouve très loin de l’hôpital et d’une foule d’autres services. Elle est loin des soutiens sociaux. Et elle sera éventuellement mise à pied de toute façon.

C’est le genre de problèmes auxquels nous sommes confrontés.

De plus, il y a une culture propre à ces métiers. Quand j’ai débuté comme apprenti, il était facile de dire qui étaient les meilleurs tuyauteurs : c’était ceux qui mâchouillaient une grosse chique de tabac et qui étaient capables, par temps froid, de la recracher assez loin pour qu’elle gèle. Cela ne se fait plus. Les comportements évoluent.

Mais la question du respect en milieu de travail n’est pas encore tout à fait réglée. Nous allons y arriver. J’ai servi un certain nombre d’années dans les Forces canadiennes. Quand nous avons commencé à intégrer certains métiers dans la Marine, les gens ont essayé de nous dissuader en disant que cela ne fonctionnerait jamais. Mais ça marche. Vous devez simplement faire preuve de détermination et d’avoir des chefs de file qui créeront un effet d’entraînement. C’est ainsi que nous arriverons là où nous devons être.

Mme Southwood : D’après les études effectuées et les renseignements factuels qui nous arrivent depuis de nombreuses années de partout au pays, nous constatons que les principaux facteurs sont, entre autres, le harcèlement et la discrimination à l’endroit des femmes, les préjugés conscients et non conscients, comme les stéréotypes et l’intimidation.

Nous faisons partie d’un consortium de recherche appelé Engendering Success in STEM, qui regroupe des établissements d’enseignement, des employeurs et d’autres organisations de partout au Canada. À ce jour, les travaux de recherche ont permis de recenser quatre étapes dans la carrière d’une femme; et cela commence, comme on peut le deviner, bien avant le choix d’une profession : de la maternelle à la fin du primaire, les études secondaires, la formation et l'enseignement postsecondaires, et le début de la carrière.

De la maternelle à la fin du primaire, le principal obstacle que les chercheurs ont relevé, c’est le préjugé contre les matières techniques, que M. Blakely appelle les matières non traditionnelles. Cela comprend les mathématiques.

Aux étapes de la formation et de l'enseignement postsecondaires et du début de la carrière, le consortium de recherche a constaté ce qu’il décrit comme une « culture d’exclusion ». La culture du milieu de travail est le principal obstacle. Nous pouvons vous donner des références à consulter à ce sujet, en plus de notre site web. La recherche se poursuit. Nous n’en sommes qu’au début. Il s’agit d’une étude longitudinale échelonnée sur sept ans.

De plus, nous avons constaté que la mise en place de mesures nationales de soutien serait une façon d’aider les femmes à surmonter ces obstacles et de lutter contre la discrimination des employeurs à leur endroit.

Le sénateur Ravalia : Mes questions concernent surtout l’exposition à des produits toxiques et le risque de séquelles à long terme. Premièrement, je suis curieux de savoir si vous offrez, dans l’ensemble de ces métiers, un programme de counselling pour les femmes qui songent à devenir enceintes et qui, dans le cadre de leur travail, sont exposées à des produits toxiques afin de les mettre en garde contre les risques pour le fœtus, avant même le début de la grossesse.

Deuxièmement, je m’interroge au sujet d’autres séquelles sur la santé mentale causées par les effets nocifs des produits toxiques auxquels elles sont exposées. Nous sommes tous d’accord pour dire que la perte d’un bébé ou un avortement est un événement traumatisant pour toute la famille, s’il est le résultat de l’exposition à une toxine. Quelles sont les séquelles? Y a-t-il des effets à long terme, par exemple, un trouble de stress post-traumatique ou autre? Les entreprises, les sociétés ou les employeurs que vous représentez offrent-ils un service de counselling aux femmes susceptibles d’être vulnérables dans ces professions où les risques sont très élevés?

M. Blakely : Pour vous donner une réponse courte, non, nous n’en avons pas. La réponse longue, c’est que les employeurs sont censés mettre un certain nombre de mesures en place au moment de l’embauche d’une personne. Si cette personne doit travailler en soudure, les employeurs sont censés la mettre au courant des dangers liés à ce travail et parfois, cela va plus loin que leur fournir des fiches techniques sur la sécurité des substances. Concernant l’exposition à des produits toxiques, nous avons fait un piètre travail pour déterminer à quelles vapeurs sont exposées les soudeuses et, ce qui est encore plus important, les personnes qui travaillent à proximité.

Quant aux effets sur la santé mentale, je dirais que nous sommes loin d’avoir approfondi la question. Concernant le trouble de stress post-traumatique, nous sommes tellement loin d’avoir exploré la question que j’en suis gêné.

Le sénateur Ravalia : D’après vous, est-il pertinent de le faire?

M. Blakely : Absolument.

Le sénateur Ravalia : Pensez-vous que cela pourrait être l’une des raisons de certains déséquilibres entre les sexes engendrés par le peu d’attention accordé à la sécurité des femmes qui travaillent dans ces domaines et qui prévoient devenir enceintes?

M. Blakely : Je vais vous donner une réponse anecdotique. Je ne pense pas que les femmes réfléchissent à ces questions au début de leur carrière. C’est seulement plus tard. Je pense que cela devient évident seulement lorsqu’elles-mêmes ou une collègue se retrouvent dans cette situation.

Est-ce que cette question doit faire partie de notre réforme? Oui.

Le sénateur Ravalia : Docteure Cherry, avez-vous des commentaires à ce sujet?

Dre Cherry : Oui. Premièrement, lorsque nous avons entrepris cette étude, nous avons consulté des groupes cibles constitués de soudeuses qui nous ont dit ne pas avoir réfléchi aux enjeux liés à la reproduction. Dès que nous les avons mentionnés, c’est devenu une préoccupation pour elles, mais ce sujet n’avait pas été abordé durant leur formation.

L’exposition à des produits toxiques est une question très difficile à résoudre. Il existe peu de preuves — malgré mes efforts pour en trouver — démontrant que l’exposition à des produits toxiques peut provoquer des fausses couches. C’est plutôt la nature du travail, comme soulever des poids lourds, qui est en cause. Si notre but était de protéger seulement les femmes exposées à des mutagènes, par exemple, nous ne toucherions qu’un nombre infime de femmes et les mettrions à l’abri de très peu de maladies congénitales. Dans le cadre de l’étude menée à Montréal qui portait sur 56 000 femmes — en fait, sur 100 000 grossesses —, nous n’avons pas pu prouver que l’exposition à des produits toxiques avait causé des anomalies congénitales. Cela n’a pas été un problème chez la plupart des femmes exerçant un métier pénible. C’est plutôt une question d’ergonomie ou de pénibilité des tâches qu’elles accomplissent au début de leur grossesse.

M. Blakely : Quant à la toxicité des vapeurs de soudage ou autres, peu d’études démontrent l’existence d’un problème de toxicité parmi la main-d’œuvre en général. Selon certains, les vapeurs de soudage pourraient provoquer des maladies, comme le myélome multiple ou le cancer du poumon. Cela nous ramène cependant à l’époque où les gens se demandaient si l’amiante causait vraiment des problèmes.

Le sénateur Ravalia : Dans le domaine de la santé, nous parlons de technologues en radiation, de personnes qui mélangent des substances aux fins de chimiothérapie ou préparent des solutions toxiques.

Dre Cherry : Ce sont deux bons exemples.

La présidente : D’autres commentaires?

Mme Southwood : Non. La Dre Cherry et M. Blakely ont bien couvert le sujet. Je n’ai rien à ajouter.

Le sénateur Oh : Ma question s’adresse d’abord à vous, docteure Cherry. Pour quelle raison avez-vous choisi d’étudier le cas des femmes travaillant en soudure? Est-ce parce qu’elles ont tendance à être plus nombreuses dans cette profession?

Dre Cherry : En fait, on m’a approchée pour cette étude en 2002 et, à l’époque, j’ai dit que je ne voulais pas me pencher sur le cas des soudeuses parce que, comme les femmes étaient peu nombreuses dans cette profession, nous n’allions pas obtenir de résultats clairs. Je craignais que cela ne fasse qu’encourager la discrimination à l’endroit des femmes recrutées comme soudeuses.

En Alberta, il y avait une grave pénurie d’ouvriers qualifiés; de nombreuses femmes, qui travaillaient comme serveuses dans les chantiers d’exploitation pétrolière, voyaient bien ce que les hommes gagnaient comme soudeurs. Elles ont fini par se faire embaucher. À un moment donné, près de 10 p. 100 des apprentis soudeurs étaient des femmes. Nous avons donc eu une masse critique qui nous permettait de répondre à la question.

La soudure est un bon exemple, en ce sens que c’est un travail pénible et physiquement exigeant. De plus, il y a la possibilité d’exposition aux métaux. Nous savons que les soudeuses sont fortement exposées au manganèse, par exemple, ce qui présente un risque élevé d’effets nocifs sur les bébés. C’était un bon choix. Mais ce n’est qu’un exemple. C’est loin d’être le seul métier dans lequel les femmes sont exposées.

Le sénateur Oh : Conservez-vous des statistiques ou des dossiers sur les professions ou métiers affichant le taux le plus élevé de fausses couches?

M. Blakely : Non. J’en suis désolé, mais la réponse est non.

Le sénateur Oh : Il n’existe donc pas de dossiers ni de statistiques à ce sujet?

Dre Cherry : Non. Pour cela, il faudrait faire une étude distincte. Je le répète, l’étude menée à Montréal sur 100 000 grossesses n’indique pas quelles professions affichaient les taux les plus élevés. En fait, l’étude portait sur des femmes travaillant dans certaines professions des secteurs de la santé, de l’électricité et de la métallurgie. C’est une autre raison qui nous a incités à choisir ces métiers.

La sénatrice Eaton : Nous savons tous que les trois premiers mois de la grossesse sont les plus à risque pour les femmes. Il faudrait lancer un vaste programme d’information pour sensibiliser les travailleuses à ce risque; elles veulent devenir enceintes. Si j’étais soudeuse et que j’en étais à mes premières semaines de grossesse, j’irais tout de suite demander à mon supérieur de prendre une pause de trois ou quatre mois. Par la suite, est-ce que je pourrais revenir travailler durant deux ou trois mois si je le voulais? Croyez-vous que ce serait une possibilité, et est-ce que ce serait une bonne façon de présenter les choses?

M. Blakely : Oui, je crois, nous pourrions accorder des aménagements de cet ordre. Des observations empiriques nous apprennent que, pendant leur premier trimestre de grossesse, les femmes ne révèlent pas leur état. Elles tâchent de tenir bon. Au deuxième trimestre, elles continuent à travailler jusqu’à n’en plus pouvoir. Il nous faut trouver un moyen de les amener à déclarer leur grossesse. Et selon le poste qu’elles occupent, nous devrions pouvoir leur trouver un ensemble de fonctions, de tâches non rattachées au métier pour qu’elles aient un emploi à temps plein jusqu’au moment où, normalement, elles partent en congé de maternité.

La sénatrice Eaton : Ce qui mène à ma prochaine question. Le projet de loi à l’étude mis à part, ne devriez-vous pas, dans les métiers de la construction et en génie, déployer des efforts énormes de sensibilisation? Premièrement, cela favoriserait la participation au nouveau programme. Deuxièmement, les femmes auraient peut-être moins honte, seraient peut-être moins inquiètes et s’adresseraient à vous. Même si elles ne se confiaient pas à leurs amis, elles vous diraient, à vous ou à votre patron, qu’elles sont enceintes depuis quelques semaines.

M. Blakely : Beaucoup de femmes s’adressent à leur syndicat et lui disent qu’elles sont enceintes, mais ne veulent en parler à personne. Nous essayons de trouver une solution. J’espérais qu’un des résultats, en matière de sensibilisation, découlerait des consultations que le comité va recommander.

En bref, il ne faut pas oublier que, si on prend l’exemple de la construction, où 80 p. 100 des employeurs ont moins de 10 employés, ceux-ci travaillent pour une toute petite entreprise qui n’a pas de services très élaborés. Mais il y aura aussi des façons de régler ce problème, surtout si les femmes suivent un programme d’apprentissage, car elles sont probablement liées par contrat au syndicat et nous pouvons trouver une façon d’allier la formation et un certain nombre d’autres éléments.

La sénatrice Eaton : Je remplace la personne s’il faut prévoir trois mois de congé.

M. Blakely : Oui.

Dre Cherry : Nous avons la chance d’avoir l’exemple du Québec. J’ai en main le rapport de 2010. Les trois quarts des Québécoises ont pris leur retrait préventif au premier trimestre.

La sénatrice Eaton : Sont-elles retournées au travail?

Dre Cherry : Non. Je suis sûr qu’elles ne l’ont pas fait, mais c’était une idée brillante de leur permettre de le faire. Si elles font savoir tôt qu’elles sont enceintes, sachant qu’elles pourront revenir après 12 semaines si elles sont toujours enceintes... C’est une formule que le comité pourrait envisager. Et ce serait fort différent de ce qu’on observe au Québec.

La sénatrice Eaton : Je suis allée récemment dans l’Arctique et je me suis rendue dans une mine d’or près de Cambridge Bay. On y a constaté que ce sont des femmes qui sont les conducteurs les plus responsables et les plus prudents de ces énormes camions dont les roues sont plus hautes que moi.

M. Blakely : Parmi les grutiers, les soudeurs et les conducteurs des gros camions de transport de pierre, les femmes sont très attentives. Si on leur dit qu’il ne faut pas baisser la flèche à moins de 36 degrés, elles ne le feront pas. Ce ne sont pas des cow-boys comme les jeunes hommes qui prennent tous les risques dont ils ont envie. En soudure, les femmes ont de belles compétences et elles font attention. Elles ne sont pas comme ce jeune fou qui ne fait que penser au prochain week-end et qui se blesse. Les femmes sont de meilleures soudeuses. Ce sont des observations empiriques.

La sénatrice Eaton : Les miennes le sont également.

La présidente : Madame Southwood, vous vouliez ajouter quelque chose?

Mme Southwood : Madame la sénatrice Eaton, je vous remercie beaucoup de cette question. Vous avez également posé une question au sujet des ressources en sensibilisation. En 2016, Ingénieurs Canada et Géoscientifiques Canada ont publié conjointement un document en ligne — nous pourrons vous communiquer le lien après la séance — intitulé Gérer les transitions : Quoi faire avant, pendant et après un congé. Il s’agit d’un guide de planification des ressources qui permet aux employeurs et aux employés de mieux planifier et gérer les congés de maternité depuis le début jusqu’au retour au travail. Il met aussi en évidence le soutien qui peut être offert aux employés et aux employeurs pendant la transition, avant et après.

La sénatrice Omidvar : L’expérience du Québec est certainement très éloquente, mais j’essaie de me souvenir du témoignage que nous avons entendu il y a quelques semaines à ce sujet. L’expérience québécoise montre, si je me souviens bien, que ce ne sont pas seulement les femmes qui travaillent dans les métiers qui se prévalent du programme Pour une maternité sans danger. En fait, un grand nombre de celles qui le font sont des infirmières et des enseignantes. Je veux simplement le rappeler, en tout cas pour ma propre gouverne.

Ma question s’adresse à vous, monsieur Blakely. Dans votre mémoire, vous parlez du programme des International Ironworkers pour la grossesse, la période précédant l’accouchement et la naissance. Pourriez-vous nous l’expliquer?

M. Blakely : Les monteurs de charpentes métalliques exercent l’un des métiers les plus exigeants qui soient dans le secteur de la construction. Ce sont les types qu’on voit dans les hauteurs, sur les charpentes d’acier qu’ils mettent en place. Vous avez peut-être déjà vu des photos de travailleurs assis sur des poutres d’acier à New York. Ce sont ces types-là.

Parmi eux, une femme a caché sa grossesse et a donc subi un avortement spontané. Le syndicat l’a appris et lui a demandé si elle était disposée à en parler. La jeune femme en a parlé, et un certain nombre de ces monteurs, qui sont normalement des types imposants, rudes et robustes, ont trouvé cela terrible. Ils ont donc créé un fonds. Cela s’est passé aux États-Unis, où accepter un congé de maternité, c’est comme rendre son arme à feu. Lorsqu’une jeune femme ne pouvait pas travailler en raison d’un problème de santé lié à sa grossesse, on lui accorderait l’équivalent d’un congé de maternité. Le programme existe depuis environ deux ans.

Un certain nombre de femmes peuvent se prévaloir de ce programme et elles finissent par avoir une grossesse qui se déroule mieux et le syndicat peut compter sur une syndiquée qui reviendra et terminera sa formation ou continuera de travailler.

La sénatrice Omidvar : C’est le genre de pratique exemplaire dont vous parliez, madame Southwood. Il y a différentes composantes et différents secteurs qui font les choses à leur manière et, à partir de là, une tendance se dessine.

Voici une autre question, monsieur Blakely. Dans vos observations, vous avez dit que, selon vous, il y aurait des problèmes à cause de l’article 92.13 de la Constitution.

M. Blakely : Il s’agit des compétences en matière de propriété et de droits civils. À cause de cette disposition, dans le domaine de l’emploi, le code des relations de travail, le code de santé et de sécurité au travail, le code des normes d’emploi relèvent de la compétence des provinces. Peu importe ce que fait le gouvernement fédéral, cela n’a pas nécessairement d’incidence sur les provinces, bien qu’une mesure fédérale puisse constituer une indication sur la voie à suivre ou une pratique exemplaire.

La sénatrice Omidvar : Permettez-moi de creuser un peu cette question. Y aura-t-il des problèmes à cause des compétences provinciales?

M. Blakely : Nous sommes au Canada. L’amiante a été l’un des principaux problèmes de santé au siècle dernier. Le gouvernement fédéral a pris un règlement sur l’amiante, mais il ne s’applique qu’à 9 p. 100 des lieux de travail visés par le Code canadien du travail. Toutes les provinces ne se sont pas nécessairement empressées d’emboîter le pas. Dans certaines, mes conseils provinciaux doivent multiplier les démarches pour faire retirer ce produit. Ils obtiennent quelque succès dans certaines provinces, mais d’autres résistent fermement. Dans ce genre de dossier, c’est malheureusement la norme au Canada.

[Français]

La sénatrice Forest-Niesing : J’ai deux questions à poser et un commentaire à faire. Mon commentaire s’adresse à M. Blakely.

[Traduction]

Je tiens à vous dire à quel point j’apprécie votre témoignage et la façon dont vous avez livré votre très important message. Lorsqu’il est question d’enjeux qui touchent les femmes, ce sont surtout des femmes qui s’expriment.

Mais entendre un homme tel que vous, même si vous vous êtes décrit en des termes peu flatteurs au début de votre exposé... Je tiens à vous remercier de vous faire le champion de cette cause et de comprendre si clairement les problèmes que les femmes doivent affronter. Vous avez dû être une femme dans une autre vie. Merci de ce que vous faites.

J’ai une question à poser à Jeanette Southwood.

[Français]

Dans votre présentation et en réponse à une question, vous avez fait référence à deux employeurs à l’étranger qui ont connu certains succès pour répondre à cette problématique. J’aimerais obtenir plus de détails à ce sujet. En quoi consistent ces mesures et ces programmes? Par quel moyen ont-ils atteint un tel succès?

[Traduction]

Mme Southwood : Je vous remercie de cette question, madame la sénatrice. Je peux décrire brièvement ce que chacun de ces employeurs a fait, quitte à vous faire parvenir ensuite des renseignements supplémentaires sur cet employeur et certains autres. Si nous avons braqué les projecteurs sur ces deux employeurs en particulier, c’est notamment parce que nous croyons qu’il existe des exemples, non seulement au Canada, mais aussi à l’étranger, qui pourraient servir dans le cadre des consultations et de l’étude à mener chez nous.

Voyons Rio Tinto Coal Australia. Comme nous le savons, Rio Tinto a des organisations et des bureaux un peu partout dans le monde. Elle a mis à l’essai ce programme de travail à domicile dans le cadre de sa politique de travail souple pour tenir compte des difficultés que les femmes doivent affronter avant, pendant et après la grossesse. Nous devrons communiquer de nouveau avec vous pour vous procurer de plus amples renseignements.

Il en va de même pour l’entreprise espagnole Iberdrola. Elle a intégré dans son travail des politiques précises qui lui ont permis, estime-t-elle, de beaucoup mieux encadrer ses employées qui sont enceintes ou reviennent au travail, mais aussi de faire évoluer sa culture organisationnelle. L’une des choses que nous avons relevées, et l’étude de Engendering Success in STEM a montré la même chose, c’est que, bien qu’il faille assurer un soutien aux femmes enceintes, qui partent en congé de maternité et en reviennent, il existe un problème plus vaste lié à la culture du milieu de travail lui-même. Tous les aménagements, toutes les solutions doivent être mis en place dans le cadre d’un changement de culture plus large. J’espère que ce point de vue est éclairant. Nous ferons parvenir au comité de l’information à ce sujet.

La sénatrice Forest-Niesing : Merci. J’ai hâte d’en apprendre davantage.

Madame Cherry, merci du travail que vous avez accompli et merci aussi d’avoir fait ressortir une question très importante : il est impérieux que nous réglions tout le problème en mettant aussi l’accent sur la protection du fœtus. Je comprends, comme vous nous l’avez dit avec beaucoup d’éloquence, que nous devons être très attentifs au vaste débat qu’il faudra déclencher pour aborder cet enjeu beaucoup plus vaste.

Je crois vous avoir entendu dire dans votre exposé que vous seriez disposée à fournir de plus amples renseignements. J’aimerais beaucoup recevoir de votre part de l’information — ou alors vous entendre de nouveau à ce sujet — sur des mesures précises, des mesures supplémentaires que vous jugeriez importantes, à la lumière de vos connaissances médicales, et qu’il serait essentiel de prendre en considération et d’appliquer pour mieux protéger le fœtus.

Dre Cherry : Ce sera un plaisir de le faire, oui.

La sénatrice Forest-Niesing : Merci.

Le sénateur Munson : Toutes les bonnes questions ont été posées. J’écoutais le débat dans mon bureau, là-haut, et j’ai participé à la formulation de questions. Je n’ai qu’une question : en 2007, le comité a réclamé une stratégie nationale, comme vous l’avez fait ici, une stratégie nationale sur l’autisme. Il y a toujours des intérêts divergents. Le gouvernement actuel et le précédent n’ont pas encore mis en œuvre cette stratégie. C’est un travail qui se poursuit toujours et quelques éléments ont été proposés au cours des 10 ou 11 dernières années grâce au comité et à son rapport.

Le projet de loi propose d’élaborer une stratégie relative à un programme national d’aide à la maternité. Le temps presse. Cela concerne une génération de jeunes femmes qui sont sur le marché du travail, et les gouvernements avancent à pas de tortue. Quand voudriez-vous qu’on élabore cette stratégie? Comment faut-il s’y prendre? Combien de temps faudra-t-il? Vous connaissez tous les détails de ce qu’il faut faire. Souhaiteriez-vous que le travail soit achevé avant les prochaines élections, par exemple? Quelle échéance proposez-vous?

M. Blakely : Je voudrais qu’on agisse tout de suite. Mais je crois aussi comprendre que, au Canada, les bonnes mesures sont parfois l’aboutissement d’une démarche progressive. Chaque petit pas nous fait avancer vers l’objectif, qui est atteint beaucoup plus tard.

Comme je l’ai dit plus tôt, il s’agit d’un problème vraiment considérable. C’est toute une affaire, mais s’il faut se contenter de petits pas, je suis prêt à l’accepter. Je serais disposé à tout faire d’un coup, mais je suis réaliste et je suis par nature partisan d’une approche progressive. C’est sans doute là que nous en sommes.

Le sénateur Munson : Merci. Je vous remercie de cette réponse.

La présidente : D’autres observations à ce sujet? Mesdames et messieurs les sénateurs, vous avez été très efficaces et, tant dans les questions que dans les réponses, tous s’en sont tenus à l’objet du débat. Nous avons du temps pour un deuxième tour, qui sera bref.

[Français]

La sénatrice Mégie : Ma question s’adresse à tous nos témoins. Nous avons appris d’autres témoins que certaines modifications aux congés de maternité ont été apportées dans le budget de 2016-2017 à la suite d’une vaste consultation. Vos organismes respectifs ont-ils été consultés à ce sujet?

[Traduction]

M. Blakely : À propos de la souplesse des règles de l’assurance-emploi, effectivement. Nous avons été très heureux d’appuyer ce qui était proposé, tout en y voyant une demi-mesure et non une solution au problème.

[Français]

La sénatrice Mégie : Madame Southwood, avez-vous été consultée?

[Traduction]

Mme Southwood : Il faudrait que je m’en remette à mon collègue, M. Joey Taylor, à qui je vais maintenant demander si nous avons été consultés.

Joey me dit que nous avons été consultés et que nous avons fait part de nos réactions au gouvernement. Merci.

[Français]

La sénatrice Mégie : À mon avis, vous devriez participer aux prochaines consultations que prévoit ce projet de loi. Ainsi, vous seriez en mesure de fournir des informations comme celles que vous nous avez transmises aujourd’hui et de donner des exemples d’initiatives qui ont réussi ailleurs. Je souhaite que toutes les questions pertinentes soient incluses afin qu’il y ait suffisamment d’information lors des consultations pour permettre la création d’un programme vraiment utile. J’espère que vous ferez partie de ce groupe. Nous pourrions en faire la recommandation. Je vous remercie.

[Traduction]

La présidente : Comme il ne semble pas y avoir d’autres questions à ce deuxième tour, je vais remercier les témoins. Vous êtes le dernier groupe de témoins que nous entendons pour l’étude du projet de loi. Dans quelques minutes, nous passerons à l’étude article par article. Je tiens à vous dire que nous vous sommes très reconnaissants de votre contribution à l’étude du projet de loi.

Honorables collègues, nous sommes prêts à passer à l’étude article par article du projet de loi C-243, Loi visant l’élaboration d’une stratégie relative au programme national d’aide à la maternité.

Je tiens à signaler que, si vous avez des questions à poser, des observations à faire ou des précisions à demander, vous ne devez pas hésiter à vous manifester. Allons-y.

Le titre est-il reporté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le préambule est-il reporté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il reporté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 2 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 3 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 4 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Avant de passer à l’article 1, qui contient le titre abrégé, je m’adresse à la sénatrice Mégie. Avez-vous quelque chose à ajouter? Je sais que, au cours des échanges avec certains témoins, il y a eu des discussions sur la correspondance entre le titre et le contenu. Je voulais simplement vous donner le dernier mot à ce sujet.

[Français]

La sénatrice Mégie : Nous avons tenu compte des observations de tout le monde, à savoir que le titre ne reflète pas exactement le contenu du projet de loi et qu’il aurait fallu le modifier.

Mon personnel et moi avons regardé dans La Procédure du Sénat en pratique où il est bien indiqué qu’il faut apporter des changements majeurs et significatifs au projet de loi pour que cela vaille la peine d’en changer le titre.

En ce qui concerne le titre « Programme national d’aide à la maternité », cela sous-entend la période incluant le début de la grossesse, toute la grossesse, l’accouchement et l’allaitement. Je présume que, dans le cadre des consultations, on examinera tout le portrait global. Donc, le titre traduit bien l’objectif du projet de loi. De ce point de vue, je crois qu’on pourrait laisser le titre tel quel.

La présidente : Tout le monde est à l’aise avec cela?

[Traduction]

L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le préambule est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le titre est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le comité souhaite-t-il étudier la possibilité de faire des observations? J’en ai une à faire, et vous l’avez entre les mains. Quelqu’un d’autre a-t-il une observation à ajouter au rapport sur le projet de loi?

Ce que je veux ajouter, et certains témoins en ont parlé, c’est que le préambule du projet de loi mentionne très clairement la grossesse et l’allaitement. Ensuite, les articles du projet de loi ne parlent que de la grossesse. Il y est question de maternité, ce qui comprend probablement aussi l’allaitement, mais ce n’est pas très clair.

Il m’a semblé pertinent d’ajouter cette observation pour que la stratégie soit précise, en fait. Voulez-vous que je lise l’observation?

Le sénateur Munson : Je pense que oui, pour que chacun sache à quoi s’en tenir.

La présidente : Il y a une coquille en français. Il y a une version en français et une autre en anglais. Et il y a donc une coquille. Je lis l’observation que je propose.

[Français]

Le préambule du projet de loi C-243 constate ceci :

que le Canada, [...] ne dispose pas d’une stratégie globale nationale à long terme visant à permettre aux femmes enceintes ou qui allaitent de continuer à travailler et à leur accorder une aide pécuniaire lorsqu’elles ne peuvent pas travailler pendant leur grossesse,

Par conséquent, le comité suggère que les consultations en vue d’élaborer un programme national d’aide à la maternité ne se limitent pas seulement aux travailleuses enceintes et soient étendues à celles qui allaitent.

[Traduction]

Le sénateur Munson : En anglais, est-ce ainsi qu’on écrit « their pregnancy »?

La présidente : C’est un peu une combinaison. C’est franco-anglais. À mon avis, c’est une coquille.

Le sénateur Munson : C’est une coquille? Très bien.

[Français]

La présidente : Avez-vous des commentaires à formuler à propos de cette observation?

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Merci d’avoir proposé cette observation, qui assure la cohérence du texte. Dans le préambule, il est facile de passer à côté, mais les lignes 29 à 31 disent clairement : « les risques à sa santé, à celle de l’enfant à naître ou de l’enfant qu’elle allaite ». Et plus loin, à partir de la ligne 33, il est question « d’une stratégie globale nationale à long terme visant à permettre aux femmes enceintes ou qui allaitent de continuer à travailler ».

Vous avez raison de dire que le projet de loi lui-même omet l’allaitement. Nous devrions faire cette observation. L’intention est claire. C’est par inadvertance qu’on l’a omis. J’appuie tout à fait cette observation.

La sénatrice Deacon : Je me demandais depuis combien de temps le comité étudie cette mesure.

La présidente : Nous lui avons consacré deux séances en plus de celle-ci.

La sénatrice Deacon : D’accord.

La présidente : Son étude a été interrompue par le projet de loi d’exécution du budget.

La sénatrice Deacon : C’est exact.

La présidente : Oui, nous l’avons étudié attentivement.

Les membres du comité sont-ils d’accord sur cette observation?

Des voix : D’accord.

La présidente : Êtes-vous d’accord pour que je fasse rapport du projet de loi au Sénat, avec des observations?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’étude article par article étant terminée, il est probable que ce soit aujourd’hui notre dernière séance de l’année. Je tiens à prendre quelques minutes pour vous remercier tous. Les connaissances, les compétences et, si je peux me permettre, la passion qui caractérisent les membres du comité sont admirables, et c’est vraiment un honneur de faire partie du comité. Je tiens donc à vous remercier. Mes meilleurs vœux pour les fêtes de fin d’année et pour 2019.

J’ai aussi une liste de personnes à remercier, et je crois que vous vous associerez à ces remerciements. Merci à Sonya Norris, analyste de la Bibliothèque du Parlement, à Daniel Charbonneau, greffier du comité, à Ericka Dupont, adjointe administrative du comité, au personnel du bureau de chacun des membres du comité, aux journalistes et interprètes parlementaires du Sénat, aux préposés des salles de réunions, aux pages, à l’équipe de télévision, au personnel de la restauration et aux agents de sécurité. Nous savons tous fort bien et nous reconnaissons que nous ne pourrions pas accomplir notre travail comme nous le faisons et voulons le faire, sans leur aide et leur soutien constants. Je vous invite donc à vous joindre à moi pour les remercier et leur souhaiter de joyeuses fêtes.

La sénatrice Omidvar : Vous avez énuméré tout le monde, mais, quant à nous, nous tenons aussi à vous remercier.

[Français]

La présidente : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : À la présidence du comité, vous avez succédé à un illustre prédécesseur, et je tiens vraiment à vous remercier d’occuper la présidence avec tant de compétence et de grâce.

Le sénateur Ravalia : Je voudrais également souligner les compétences de la vice-présidente, la sénatrice Seidman. Merci. Vous assurez un excellent leadership.

[Français]

La sénatrice Mégie : Je vous remercie pour tout l’appui que vous avez apporté au projet de loi.

(La séance est levée.)

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