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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 112

Le mercredi 28 janvier 2015
L'honorable Pierre Claude Nolin, Président

LE SÉNAT

Le mercredi 28 janvier 2015

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d'amis et de membres de la famille du regretté Adam Hutt, un ancien membre du personnel des sénateurs Cowan et Fraser. Nous accueillons la mère d'Adam, Brigitte Robinson, et son conjoint, Roger Taylor; la grand-mère d'Adam, Elizabeth Robinson; la cousine d'Adam, Amélie Crosson-Gooderham; le meilleur ami d'Adam, Joel Whitty; et, enfin, une amie de la famille, notre ancien collègue, l'honorable Landon Pearson. Ils sont les invités des sénateurs Cowan et Fraser.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès d'Adam Hutt

L'honorable James S. Cowan (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, il y a eu une semaine samedi, j'ai eu le privilège de prendre la parole lors du service commémoratif tenu en l'honneur d'Adam Hutt à la chapelle du collège Ridley de St. Catharines. Au moment de son décès, Adam, qui venait de terminer son cours universitaire, était un jeune homme qui faisait partie de mon personnel, ainsi que de celui de la sénatrice Fraser. Travailleur acharné et très intelligent, Adam mettait beaucoup d'ambiance au bureau et était très heureux de travailler sur la Colline du Parlement et de faire partie de la scène politique canadienne et de son histoire.

Adam éprouvait un profond respect à l'égard du Sénat et de tous ceux qui travaillent ici. Il a rapidement compris les réalités, les particularités, les défis et les possibilités que présente cette institution.

Ses principales responsabilités comprenaient notamment la charge de promouvoir et de coordonner notre initiative qui consiste à inviter les Canadiens à poser des questions. Il était profondément déterminé à inciter les Canadiens, plus particulièrement les jeunes, à s'intéresser à notre travail. Son enthousiasme, sa diligence et son professionnalisme ont aidé à faire en sorte que cette initiative ait le succès qu'on lui connaît maintenant. Je sais qu'Adam a déjà appelé plusieurs de mes collègues du caucus des sénateurs libéraux pour leur faire part de questions posées par des Canadiens. Le grand enthousiasme qu'il manifestait lorsque ces questions étaient posées au Sénat était irrésistiblement contagieux.

Adam, qui venait de Niagara-on-the-Lake, est allé à l'école publique Parliament Oak, puis au collège Ridley. Il a ensuite fait ses études à l'Université McGill, où il a obtenu son diplôme en 2013. On lui avait proposé de faire des études supérieures à Sciences Po, à Paris, ou à la London School of Economics, mais il a décliné ces offres pour pouvoir travailler ici, au Sénat.

Adam était jeune, mais c'était un leader, un jeune homme brillant, enjoué et prometteur. Tous ceux qui le connaissaient et qui travaillaient avec lui le respectaient et l'admiraient. C'était une de ces rares personnes qui sont tout simplement une source de joie et de gaieté pour les gens qui les entourent.

Adam est tombé malade en octobre dernier. À l'hôpital, on lui a diagnostiqué un rare trouble sanguin, la LHH. Malgré les soins extraordinaires qu'il a reçus à l'hôpital Juravinski, à Hamilton, et malgré le soutien et les prières de sa famille et de ses nombreux amis, il est décédé le 21 décembre dernier à l'âge de 24 ans.

Voici ce que notre ancien collègue, le sénateur Dallaire, a écrit à Adam dès qu'il a su qu'il était malade :

Adam, certains sont éprouvés beaucoup plus jeunes que d'autres. Certains souffrent beaucoup plus intensément et profondément que les autres. Mais les personnes qui se trouvent dans de telles circonstances difficiles sont très souvent des exemples de courage, de grâce et de dignité pour les autres. Adam, tu es une personne comme celles-là et je te salue.

Je ne pourrais mieux dire.

La chapelle du collège Ridley était pleine à craquer d'amis et de membres de la famille d'Adam qui ont fait de très beaux témoignages en rendant hommage à son intelligence, à sa curiosité et à sa joie de vivre. Ce fut une cérémonie inoubliable à laquelle j'ai eu l'honneur de participer, car on m'avait demandé de dire quelques mots au nom de ses collègues et amis du Sénat. Au service funèbre, j'ai aussi remis à la famille d'Adam un drapeau qui a flotté au sommet de la Tour de la Paix, sur la Colline du Parlement, un endroit où il aimait tant travailler.

Honorables sénateurs, nous prenons souvent la parole pour rendre hommage à des collègues et à des Canadiens dont la vie a été couronnée de succès et semée de réalisations. La vie d'Adam a été tragiquement écourtée avant qu'il puisse concrétiser ses nombreux rêves et projets, mais c'était un jeune homme hors du commun dont la vivacité était si intense qu'elle ne peut pas disparaître. Il restera vivant dans le cœur de ses nombreux proches et amis dont il a tellement enrichi l'existence.

Aujourd'hui, plusieurs de ses proches et amis les plus chers sont présents à notre tribune, notamment sa mère, sa grand-mère et une amie intime de la famille, notre ancienne collègue, madame la sénatrice Landon Pearson.

Honorables sénateurs, je vous demande de vous joindre à moi pour exprimer notre soutien et nos plus sincères condoléances à la famille et aux amis d'Adam pour leur perte, et la nôtre.

L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Honorables sénateurs, l'un des aspects fantastiques de notre travail est que nous avons l'occasion de rencontrer beaucoup de jeunes. En général, ils sont intelligents, compétents et extraordinaires, mais Adam Hutt était dans une classe à part. Comme vous l'aurez compris d'après les propos du sénateur Cowan, il était particulièrement estimé par tous ceux qu'il rencontrait, et son départ a laissé un grand vide dans notre famille.

J'ai l'impression de tenir des propos insipides, alors qu'Adam était tout sauf insipide. Qu'on me comprenne bien. Tout ce qu'il faisait était empreint d'entrain, d'enthousiasme et de gaieté.

Lorsqu'il a posé sa candidature pour travailler ici, il a parlé de sa soif d'aventure et a dit qu'il avait la ferme intention de vivre et d'apprendre dans un environnement vaste et toujours grandissant.

(1340)

Tous ceux qui ont connu Adam gardent de lui un souvenir propre à chacun. Le sénateur Cowan a évoqué quelques souvenirs aujourd'hui et lors du service commémoratif. L'une de mes employées me disait hier qu'elle se rappelle qu'il était très habile comme photographe et vidéographe et qu'il avait le courage de se rendre à des événements qui donnaient le trac à d'autres employés à cause de leur importance. Adam y allait, et il avait raison.

Le premier souvenir que je garde de lui est son allure lorsqu'il entrait au bureau, mû par un enthousiasme qui lui faisait incliner légèrement le corps vers l'avant, impatient d'entreprendre ce que nous avions au programme ce matin-là ou cet après-midi-là. C'était presque l'expression physique du goût de l'aventure dont il nous avait parlé en postulant un emploi avec nous.

Nous avons été chanceux de l'avoir. Il était d'une grande intelligence. Il pouvait se débrouiller avec n'importe quel sujet. Lorsqu'on lui confiait la tâche de faire des recherches, il revenait avec des résultats fantastiques. Cependant, je pense que, pour la plupart d'entre nous, ce qui nous importait par-dessus tout, c'était son sourire et son incroyable don de répandre la bonne humeur dans toute la pièce. Lorsqu'Adam arrivait quelque part, l'atmosphère s'égayait tout de suite et avait tendance à demeurer joyeuse, car il ne faisait pas semblant d'être plein d'entrain. Il était lui-même, et c'est ce qui était merveilleux. Cet enthousiasme et cette cordialité étaient bien réels.

Lorsque j'ai demandé à mes employés de m'écrire leurs souvenirs d'Adam, l'un d'entre eux, Céline Ethier, a composé un hommage. Je ne pourrai pas le lire en entier, mais je voudrais vous en citer quelques extraits. Elle dit ceci :

Dès qu'il est entré dans mon bureau, le premier jour, je savais que je l'aimerais et qu'il s'intégrerait bien [...]

Il se montrait intéressé et intéressant. Il était gentil et attentionné. Il se passionnait pour tout. [...] Il était tout ce qu'un jeune homme dans la fleur de l'âge peut espérer être.

Il avait un sourire qui pouvait illuminer la pièce et un rire absolument contagieux.

Le fait qu'il s'éteigne à l'âge de 24 ans est une tragédie, non seulement pour ceux qui le connaissaient, mais aussi pour tous ceux qui l'auraient connu. Il aurait accompli de grandes choses — sa courte vie a été si riche. Céline a dit ce qui suit :

Je sais que le fait de le connaître fait de moi une meilleure personne.

C'est le cas pour nous tous.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Au nom de tous les sénateurs de ce côté-ci de la Chambre, je souhaite offrir nos plus sincères condoléances à la famille d'Adam et la remercier d'avoir élevé un jeune homme si formidable. Nous partageons toutes les pensées que vous avez exprimées, sénatrice Fraser. En tant que leader adjointe, j'assiste tous les matins à une rencontre au sujet du plumitif. Je le vois assis à ma droite et je me souviens que la présence d'Adam illuminait la pièce. Après avoir remarqué son absence prolongée, j'ai présumé qu'il était parti découvrir de nouveaux horizons. En effet, il avait un potentiel extraordinaire et, de toute évidence, les qualités d'un véritable leader. C'est alors que vous m'avez parlé de sa maladie. Je ne puis qu'imaginer l'impact que cette nouvelle a eu sur votre caucus et en particulier sur vous et le sénateur Jim Cowan, avec qui Adam travaillait en étroite collaboration.

Les membres de notre personnel nous sont très chers. En de telles circonstances, nous réagissons comme les membres d'une même famille, car nous les considérons comme tels. Je veux simplement exprimer notre appui et notre respect envers la famille d'Adam et tous ceux qui ont travaillé de très près avec lui. J'ai eu l'occasion de connaître sa chaleur et sa vivacité seulement au cours de nos réunions. Le jour où j'ai appris son décès, j'ai été très touchée et j'ai écrit à chacun d'entre vous pour vous offrir mes plus profondes condoléances.

Au nom de mon caucus, je tenais à exprimer aujourd'hui nos sentiments les plus vifs en cette occasion, et à rendre hommage à Adam, qui nous a quittés beaucoup trop tôt. Je me sens toutefois privilégiée de l'avoir connu, et je souhaite la bienvenue à sa famille en ce jour si spécial.

Le très honorable sir Winston Churchill, K.G., O.M., C.H., T.D., D.L., F.R.S., R.A.

L'honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, la semaine dernière marquait le 50e anniversaire du décès d'un des personnages les plus emblématiques de notre époque et d'un de mes héros politiques, sir Winston Churchill. Aux débuts de la Seconde Guerre mondiale, alors que les armées d'Hitler marchent sur l'Europe et menacent d'envahir l'Angleterre, Churchill est appelé à assumer les fonctions de premier ministre. En mai 1940, dans son premier discours à la Chambre des communes en sa nouvelle qualité de premier ministre, il déclare ceci :

[...] la victoire, la victoire à tout prix, la victoire en dépit de la terreur, la victoire, aussi long et dur soit le chemin qui nous y mènera; car sans victoire, il n'y a pas de survie.

En fait, la victoire aurait été impossible sans Winston Churchill. Ses discours allaient servir de cri de ralliement dans un empire au bord de la défaite. La France tombée et la bataille d'Angleterre sur le point de commencer, Churchill prépare son peuple à résister à Hitler. C'est à ce moment qu'il fait cette déclaration devenue célèbre :

Aussi, préparons-nous à accomplir notre devoir et à nous conduire de telle sorte que, si l'Empire britannique et son Commonwealth durent mille ans, les hommes diront encore : « Ce fut leur plus belle heure. »

Chers collègues, le caractère provocateur et irréductible de Churchill eut un effet mobilisateur sur l'Angleterre et le Commonwealth, qui comprirent que la victoire était leur seule option. Churchill est bien connu en tant que premier ministre. Cependant, sa montée au pouvoir marque l'aboutissement d'une carrière des plus romanesques. Fraîchement diplômé de l'Académie royale militaire de Sandhurst, il est nommé officier dans le 4th Queen's Own Hussars, qui l'amena à servir et à combattre à la frontière nord-ouest de l'Inde et au Soudan à la fin des années 1890. Au tournant du siècle, préférant la plume à l'épée, il est affecté à la guerre des Boers en Afrique du Sud en tant que correspondant. Envoyé pour accompagner une mission d'expédition, il est capturé et devient prisonnier de guerre. Toujours aussi irréductible, il réussit à s'enfuir, exploit qui lui vaut la reconnaissance du public à son retour à Londres. Il décide ensuite de se lancer en politique, remportant un siège à la Chambre des communes; la vie politique sied bien au jeune Churchill. Sa détermination indéfectible l'amène à gravir les échelons politiques à une vitesse fulgurante, lui valant finalement un siège au Cabinet. En 1911, il devient premier lord de l'Amirauté, un poste important en temps de guerre. À la suite du déclenchement des hostilités et après de longs mois difficiles, Churchill démissionne en 1915 et regagne l'armée. Il sert ensuite en France au rang de lieutenant-colonel du 6e bataillon des Royal Scots Fusiliers jusqu'à son retour en politique, plus tard au cours de la guerre.

Pendant les années 1920 et 1930, Churchill ne cessait de quitter la vie politique pour y revenir ensuite. Quand la Seconde Guerre mondiale a été déclenchée, il était vu comme un paria sur la scène politique.

Puis, en mai 1940, la Grande-Bretagne a décidé d'utiliser l'inébranlable détermination de Churchill afin de changer le cours de la guerre et d'aider le pays à combattre, comme il le disait :

[...] un régime tyrannique qui commet les crimes les plus sombres et les plus lamentables de l'histoire de l'humanité.

Honorables collègues, toute la vie de cet homme l'a préparé à devenir un leader en temps de guerre. Churchill a dit que, sans victoire, il n'y a pas de survie; je crois pour ma part que, sans Churchill, il n'y aurait pas eu de victoire. Cette semaine, rendons hommage à sir Winston Churchill. Souvenons-nous de ses réalisations et soulignons le leadership exceptionnel de cette figure emblématique.

Jonathan « Jon » Robert Ryan

L'honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de prendre la parole aujourd'hui afin de souligner les réalisations incroyables de Jon Ryan, l'enfant chéri de la ville de Regina, en Saskatchewan. Jon Ryan fait partie de la Ligue nationale de football depuis neuf ans maintenant et il est le botteur des Seahawks de Seattle. Les Seahawks défendront leur titre lors du match de championnat qui aura lieu dimanche. À Regina, et partout en Saskatchewan, nous n'avons pas passé les 10 derniers jours à répéter inlassablement cette histoire de ballons dégonflés; nous avons plutôt vanté les brillants exploits du héros de notre région, Jon Ryan.

(1350)

Jon a fréquenté le collège Sheldon-Williams de Regina, ainsi que mon alma mater, l'Université de Regina. L'année dernière, Jon est devenu le premier joueur originaire de Saskatchewan à gagner une finale du Super Bowl.

Laissez-moi maintenant planter le décor des moments enlevants qui sont survenus récemment. Lors de la finale du Championnat de la Conférence nationale de football, les Seahawks accusaient un grand retard sur leurs adversaires, les Packers de Green Bay, assez tard dans le match. Ils perdaient 16 à 0, et les derniers espoirs des partisans fanatiques de Seattle étaient rapidement en train de s'envoler quand Ryan est venu à la rescousse. Sur une feinte de placement, le botteur Jon Ryan a lancé une passe de touché de 19 verges, donnant à Seattle son premier touché du match. Ce touché a stimulé les Seahawks, qui ont orchestré une remontée incroyable afin de vaincre les Packers. Je pense que la mère de Jon, Barb Ryan, a fait la meilleure observation sur cette remontée incroyable quand elle a été interviewée par les médias de la Saskatchewan à ce sujet. Elle a dit que ce match avait été à la fois le meilleur et le pire match de tous les temps.

Grâce à cette passe de touché, Jon Ryan est devenu le premier joueur d'une université canadienne, de Sport interuniversitaire canadien, à lancer une passe de touché dans un match de la Ligue nationale de football, et est-ce que j'ai mentionné qu'il est un botteur? En fait, même Manning, Elway, Montana — ces passeurs légendaires et prolifiques — ne peuvent se vanter d'avoir, comme Jon Ryan, un pourcentage parfait de passes complétées. Il a réussi les trois passes qu'il a tentées.

Jon a une famille merveilleuse. Son père, Bob, était un grand partisan des Packers de Green Bay. Avant son décès tragique il y a plusieurs années, Bob a pu voir Jon réaliser son rêve de jouer dans la LNF. Bob était également très fier que la première équipe de la ligue pour laquelle Jon a joué ait été ses bien-aimés Packers. Toute la famille Ryan rayonnera de fierté à Phoenix dimanche prochain, lors du Super Bowl. La mère de Jon, Barb, ses sœurs, Jill et Erica, ainsi que son frère, Steve, seront tous de la partie. Ce sont des gens si gentils et humbles, comme la majorité des Saskatchewanais, à mon avis.

En outre, fait digne de mention à la Cité parlementaire, la sœur de Jon Ryan, Jill Scheer, est la merveilleuse épouse du Président de la Chambre des communes, Andrew Scheer.

Cette semaine, l'hôtel de ville de Regina a hissé fièrement le drapeau du 12e homme des Seahawks de Seattle en l'honneur de Jon. Les citoyens de la Saskatchewan savent pertinemment à quel point l'appui des partisans peut porter chance, étant donné le statut légendaire de la Rider Nation, qui l'est considérée comme le cœur de la LCF.

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour souhaiter à Jon Ryan, cet excellent joueur de football canadien, la meilleure des chances alors qu'il continue de s'imposer au sud de la frontière. Vive les Seahawks!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

L'ajournement

Préavis de motion

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs et sénatrices, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera après l'adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu'au mardi 3 février 2015, à 14 heures.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Le commerce international

L'Accord économique et commercial global Canada-Union européenne—Les mécanismes de règlement des différends

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, j'aimerais tout d'abord souhaiter une bonne année à tous mes collègues des deux côtés de la Chambre, et leur dire en même temps que j'ai profité de la période des Fêtes pour approfondir les sujets sur lesquels je me penche sérieusement, surtout les sujets à caractère économique, et qui font tellement plaisir au leader du gouvernement. Je continue donc dans la même voie des questions que j'ai posées en 2014.

[Traduction]

Ce mois-ci, la Commission européenne a publié un rapport analysant l'opinion publique européenne à l'égard du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États proposé pour l'accord de libre-échange entre les États-Unis et l'Europe.

[Français]

Je suppose que celui-ci a fait un peu plus de bruit que celui qui a été conclu avec le Canada.

[Traduction]

Le mécanisme en question est le même que celui qui est prévu dans l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, l'AECG. Le rapport révèle une opposition considérable. Je le cite :

[...] le mécanisme de règlement des différends est perçu comme une menace pour la démocratie et les finances publiques, ou pour les politiques publiques.

En réaction à la publication du rapport, le ministre de l'Économie de l'Allemagne, Sigmar Gabriel, et le secrétaire d'État chargé du Commerce extérieur de la France, Matthias Fekl, ont publié une déclaration commune réclamant le recours à « toutes les options de modifications » du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États prévu dans l'accord avec le Canada. Cela signifie qu'ils ne sont pas satisfaits, et toute possibilité de mise en œuvre est maintenant écartée.

Monsieur le leader, il est évident que le public et les politiciens européens demandent des modifications à l'AECG, surtout sur ce point. Comment pouvons-nous justifier que le Canada campe sur sa position et affirme que c'est le meilleur accord, tant pour les Canadiens que pour les Européens, et qu'aucune renégociation de l'AECG n'est possible, alors que nos homologues européens demandent clairement à renégocier ce point particulier qui a des répercussions sur tous les habitants des deux continents?

[Français]

L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Merci, sénatrice, pour votre question.

Comme vous le savez, le règlement des différends par voie d'arbitrage international dans les accords de libre-échange n'empêche aucun ordre de gouvernement de légiférer dans l'intérêt général de son pays. Les investisseurs canadiens et étrangers sont assujettis aux mêmes lois et règlements qui sont en vigueur au Canada en ce qui concerne les normes, que ce soit des normes sur l'environnement, sur le travail, que ce soit au sujet des soins de santé, des bâtiments et de la sécurité. Aucune des dispositions des accords de libre-échange auxquels le Canada est partie n'exempte les fournisseurs de services étrangers de l'application des lois ou des règlements qui sont en vigueur au Canada.

Comme vous le savez, grâce à des dispositions comme celles qui portent sur l'arbitrage de différends, les entreprises canadiennes sont protégées contre toute mesure gouvernementale qui serait arbitraire ou discriminatoire et, en cas de différends, les entreprises canadiennes auront accès à des processus de règlement des différends, comme toute autre entreprise, d'ailleurs, auprès d'un tiers indépendant et impartial. Le règlement de différends entre investisseurs et États est d'ailleurs un élément central de la politique du Canada depuis plus d'une génération, depuis que les accords historiques de libre-échange Canada-États-Unis et l'ALENA ont été signés. Cette entente reflète une position commune entre les États européens et le Canada.

La sénatrice Hervieux-Payette : Monsieur le leader, vous devez tout de même savoir que, malgré l'expérience que le Canada a tirée de l'ALENA, il a été amplement démontré qu'il a dû verser des compensations à des gens qui sont extérieurs aux gouvernements mais qui dépensent l'argent des contribuables dans le cadre de situations inacceptables, puisqu'elles limitent effectivement leur pouvoir de légiférer et notre pouvoir de réglementer.

Ainsi, voici ce que la Commission européenne rapporte et les changements qu'elle demande, et je cite :

[Traduction]

En ce qui concerne le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, il ressort de cette consultation que des améliorations sont nécessaires dans les quatre domaines suivants : premièrement, « la protection du droit de réglementer »; deuxièmement, « la surveillance et le fonctionnement des tribunaux d'arbitrage ».

[Français]

Vous venez de parler de « tribunaux indépendants », mais ce sont les tribunaux privés que les gens choisissent, et ceux-ci n'ont rien à voir avec la magistrature canadienne.

[Traduction]

Les deux autres domaines sont « les rapports entre l'arbitrage du règlement des différends entre investisseurs et États et les voies de recours nationales » et « le contrôle de la régularité juridique des décisions du règlement des différends entre investisseurs et États au moyen d'un mécanisme d'appel ».

[Français]

Toute décision prise au Canada et rendue par un tribunal de première instance ou par la Cour d'appel est susceptible d'être révisée pour aboutir à la Cour suprême, alors que dans l'accord Canada-Europe, il n'y aura pas d'appel. Il s'agit généralement de centaines de millions de dollars, pour ne pas dire de milliards, et il n'y aurait aucun mécanisme pour revoir la décision de ce tribunal indépendant.

(1400)

Expliquez-moi pourquoi, dans quatre secteurs, le gouvernement conservateur juge qu'il n'y a pas lieu de s'asseoir à la table de négociations avec les Européens pour se pencher sur cet aspect, puisque, à l'heure actuelle, eux ne seront pas prêts. Ils examinent toutes les options pour changer ce mécanisme dans le cadre de leurs relations avec les Américains. Je ne vois pas pourquoi on ne ferait pas la même chose.

Le sénateur Carignan : Comme vous le savez, les retombées de l'accord de libre-échange avec l'Europe pour les Canadiens sont énormes. Cet accord commercial avec l'Europe procurera d'importantes retombées à long terme. Des intervenants de toutes les régions du Canada et de tous les secteurs économiques ont chaudement accueilli cet accord de libre-échange. Nous avons bien l'intention de ratifier l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, puisque c'est en notre pouvoir de le faire.

J'aimerais vous rappeler que le ministre Fast s'est rendu en Europe récemment, et qu'il a entendu beaucoup de bonnes choses au sujet de l'accord. La chancelière allemande, Angela Merkel, a, elle aussi, commenté favorablement l'accord, alors que l'ambassadeur allemand au Canada a affirmé que l'Allemagne accordait « tous ses appuis à l'accord ».

Les missions commerciales en provenance de l'Union européenne sont enthousiastes à l'idée de faire affaire avec le Canada. Cet accord est bon pour le Canada, il est bon pour l'Union européenne. Honorables sénateurs, j'espère que vous l'appuierez.

La sénatrice Hervieux-Payette : On pourrait continuer d'y réfléchir et penser à plus long terme. Un traité de libre-échange semblable a été conclu entre l'Australie et les États-Unis. Pendant les négociations avec les Australiens, un pays qui compte 22 millions d'habitants comparativement aux États-Unis, qui en comptent 300 millions, les Australiens ont dit non au mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États. Malgré ce refus, ils ont conclu un accord de libre-échange.

Je ne vois donc pas pourquoi, au Canada, nous n'aurions pas le courage de nous tenir debout, à titre de parlementaires, et d'affirmer que nous voulons conserver tous nos droits de légiférer et de réglementer et, surtout, de protéger les fonds des contribuables canadiens. Lorsqu'une pénalité est imposée en vertu d'une loi ou d'un règlement, c'est le gouvernement qui paie la facture. Ces mesures sont décidées par des gens qui n'ont jamais été élus et qui agissent dans l'intérêt strictement privé de ces entreprises.

Monsieur le leader, dites-moi pourquoi le Canada ne pourrait pas s'asseoir avec les Européens et réviser cette clause. Je crois que les représentants français et allemands reviendront à la table et seront très heureux, car ils obtiendront probablement ce que les Australiens ont obtenu. Je ne vois pas pourquoi le Canada ne demanderait pas la même chose.

Le sénateur Carignan : J'entends vos réflexions. Comme je l'ai dit, le règlement des différends entre investisseurs et États est un élément central de la politique du Canada depuis plus d'une génération. Tant de ce côté-ci que de l'autre, des gens de tous les milieux et de tous les secteurs économiques ont chaudement applaudi l'accord conclu entre le Canada et l'Union européenne. Nous sommes enthousiastes à l'idée de pouvoir l'entériner le plus tôt possible.

La sénatrice Hervieux-Payette : Je souhaite vous donner des arguments que vous pourrez transmettre à vos collègues. Tout le monde sait que, lorsqu'on parle de réglementation et de législation, généralement, c'est pour améliorer la situation. Pour ce qui est de nos puissants voisins, vous avez entendu parler de leur façon de faire, c'est-à-dire l'harmonisation. Très souvent, leur réglementation a une moindre portée que la nôtre. Elle nous obligerait, à l'avenir, à ne pas pouvoir apporter des améliorations à nos règlements, qu'il s'agisse de l'alimentation, du secteur de l'automobile ou de tous les domaines techniques. On devra respecter leur réglementation si on ne veut pas payer la note.

C'est une limite à nos pouvoirs, à titre de parlementaires, mais surtout à titre de représentants des Canadiens. Or, on ira chercher dans les poches de ces derniers des sommes d'argent pour compenser les compagnies privées.

Je vous demande simplement de considérer et d'étudier cette question et de suggérer à votre collègue, le ministre Fast, de s'asseoir avec ses collègues européens afin d'aider à conclure cette entente. On en parle beaucoup, mais elle n'est pas encore ratifiée. Vous mettez peut-être en danger sa ratification si nous ne nous assoyons pas avec eux, de bonne foi, à ce moment-ci.

Le sénateur Carignan : Le ministre Fast s'est rendu en Europe récemment. Il a entendu beaucoup de bonnes choses au sujet de l'accord. La chancelière allemande a, elle aussi, commenté favorablement l'accord. L'ambassadeur allemand au Canada a également donné, et je le cite de nouveau, « tous ses appuis à l'accord ». Des missions commerciales des deux côtés sont très enthousiastes à l'idée de faire des affaires au Canada et, dans le cas des missions canadiennes, de faire des affaires en Europe. On souhaite donc la ratification de cet accord le plus rapidement possible.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi no 2 sur le plan d'action économique de 2014

Huitième rapport du Comité de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles; sixième rapport du Comité des banques et du commerce; huitième rapport du Comité des transports et des communications; dix-huitième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles; et huitième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international sur la teneur du projet de loi—Retrait des articles

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je demande le consentement du Sénat pour retirer les articles nos 1, 2, 3, 4 et 6 sous la rubrique « Affaires du gouvernement — Rapports de comités — Autres », puisque ces rapports sont directement rattachés au projet de loi C-43, qui a reçu la sanction royale le 16 décembre 2014.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(Les articles sont retirés.)

Projet de loi sur la sensibilisation à la densité mammaire

Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Martin, appuyée par l'honorable sénatrice Marshall, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-314, Loi concernant la sensibilisation au dépistage chez les femmes ayant un tissu mammaire dense.

L'honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, je ne suis pas encore prête à prendre la parole au sujet de ce projet de loi. J'en suis vraiment désolée. J'aimerais donc demander l'ajournement pour le temps de parole qu'il me reste.

(Sur la motion de la sénatrice Eaton, le débat est ajourné.)

(1410)

[Français]

L'étude sur les impacts des changements récents au système d'immigration sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire

Adoption du quatrième rapport du Comité des langues officielles et demande d'une réponse du gouvernement

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Tardif, appuyée par l'honorable sénatrice Fraser,

Que le quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des langues officielles intitulé Saisir l'occasion : Le rôle des communautés dans un système d'immigration en constante évolution, déposé au Sénat le mardi 2 décembre 2014, soit adopté et que, conformément à l'article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport.

L'honorable Suzanne Fortin-Duplessis : Honorables sénateurs, je joins ma voix à celle de ma collègue, la sénatrice Tardif, pour féliciter et remercier les membres du Comité des langues officielles, les sénateurs Chaput, Charette-Poulin, Maltais, McIntyre et Poirier, de même que notre analyste, Marie-Ève Hudon et notre greffier, Daniel Charbonneau. Merci à tous les témoins qui se sont déplacés pour nous faire part de leurs observations, de leurs préoccupations et des éléments de succès que l'on a constatés quant à l'intégration des nouveaux arrivants et de leurs besoins.

Après avoir tenu une quinzaine de réunions et entendu 44 témoins, nous sommes maintenant en mesure de brosser un bon portrait de l'impact des réformes les plus récentes apportées au système d'immigration sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Comme mon honorable collègue a déjà abordé le contenu du rapport de cette étude le 4 décembre dernier, je serai brève et ne soulèverai que quelques points qui m'interpellent particulièrement.

L'un des grands constats s'articule autour de l'immigration économique et du rôle prépondérant que l'on donne aux employeurs au moyen du nouveau système Entrée Express. Nous savions, dès le départ, qu'il existe d'importants défis à relever en ce qui a trait à la reconnaissance des titres de compétences étrangers. Trop souvent, des immigrants hautement qualifiés dans des domaines spécialisés, comme la médecine et le droit, sont contraints d'occuper des emplois qui sont bien en deçà de leurs compétences et peu rémunérateurs. Cela risque d'être accentué par l'entrée en vigueur du système Entrée Express, qui fera en sorte que les employeurs joueront un rôle déterminant dans le recrutement des nouveaux arrivants. Bien qu'il s'agisse d'une question complexe puisque, dans le cas de plusieurs professions, ce sont les associations professionnelles qui donnent les équivalences de compétences, il est d'autant plus important que le gouvernement fédéral établisse une stratégie concertée. Il devra agir en collaboration avec tous les partenaires et les communautés de langue officielle en situation minoritaire afin de stimuler la croissance par l'immigration et de veiller à ce que les immigrants francophones puissent s'inscrire dans le bassin de candidats qualifiés sans qu'il y ait d'obstacles à la reconnaissance de leurs titres de compétences étrangers. Il est aussi important que des mesures de recrutement ciblées envers les pays francophones soient mises en œuvre.

Nous savons que, pour faciliter l'accès à un emploi, il est important d'être en mesure d'établir un contact entre les employeurs et les nouveaux arrivants au cours de la recherche d'emploi. À ce titre, j'aimerais attirer votre attention sur l'initiative Destination Canada, un forum d'emploi pour les travailleurs étrangers francophones qui a été mis de l'avant par le gouvernement et qui a suscité des commentaires positifs de la part de la majorité des témoins.

Par ailleurs, l'une des stratégies de création d'emplois au sein des communautés de langue officielle en situation minoritaire consiste à sensibiliser les employeurs aux avantages économiques et culturels que constitue l'embauche de nouveaux arrivants et à la contribution qu'ils apportent à l'épanouissement de leur communauté. Un chercheur qui a témoigné devant notre comité nous a dit ce qui suit, et je cite :

Quand on présente l'argument de nature économique aux employeurs sur les effets multiplicateurs, l'impact de l'immigration en général, et de l'immigration francophone en particulier, on est capable de développer des arguments qui rejoignent les employeurs, parce que cette famille de trois ou quatre personnes qui arrive dans la communauté génère une activité économique. Elle achète une maison, les enfants vont à l'école, elle consomme des services publics et privés et génère une activité économique plus large.

Il appartient aux communautés de développer une stratégie pour attirer les immigrants chez elles et de travailler avec les municipalités et les employeurs en région afin que ces nouveaux arrivants aient accès à un emploi. L'un des deux chercheurs qui ont préparé cette étude publiée en 2013 nous a dit ce qui suit, et je cite :

Il devient clair que l'immigration est une affaire de communauté. Tout ce que les gouvernements de plus haut niveau peuvent faire, c'est d'établir les cadres généraux et la mécanique de sélection, mais l'accueil, la rétention, le recrutement des immigrants, c'est sur le plan local que cela se fait.

L'autre point qui m'interpelle énormément est lié à l'importance de l'apprentissage des langues officielles.

Pour avoir un emploi et s'intégrer à la société, la maîtrise d'au moins une langue officielle est cruciale. L'un des changements récents apportés par le gouvernement a été de renforcer les critères de sélection à l'égard des compétences linguistiques des immigrants. Ceux-ci doivent dorénavant avoir une connaissance suffisante de l'une des deux langues officielles du Canada. Ce changement fait en sorte que, dès leur arrivée en sol canadien, ils sont déjà un peu mieux outillés, d'une part en ce qui concerne la recherche d'emploi et, d'autre part, pour participer activement à la vie sociale canadienne, ce qui est un aspect fondamental de l'intégration des nouveaux arrivants.

J'aimerais souligner un autre facteur positif, soit celui de l'arrivée d'étudiants internationaux, qui représentent une source potentielle de renouvellement des communautés francophones et acadienne. La stratégie récemment mise de l'avant par le gouvernement fédéral vise à doubler le nombre d'étudiants internationaux d'ici 2022. Cette stratégie peut cibler des étudiants qui proviennent de pays francophones, et plusieurs s'attendent à ce que cette catégorie d'expérience canadienne soit de plus en plus utilisée par les étudiants internationaux pour accéder à la résidence permanente. Il sera donc important, pour tous les intervenants concernés, de prévoir des mécanismes qui favoriseront la rétention et l'intégration de ces étudiants venus de l'extérieur.

En terminant, je suis fière d'avoir pris part avec mes collègues à cette étude qui nous a bien éclairés sur l'impact qu'auront les réformes les plus récentes apportées au système d'immigration sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous avons pu prendre le pouls des réalités qu'elles vivent, évaluer les aspects à améliorer, de même que constater le succès des mesures positives qui ont été mises de l'avant. C'est pourquoi, chers collègues, je vous demande d'adopter ce rapport, qui est excellent.

Merci beaucoup.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

(1420)

[Traduction]

L'armistice de Moudania

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Cools, attirant l'attention du Sénat, en cette année qui marque le centenaire du début des hostilités de la Grande Guerre de 1914-1918, sur le 11 novembre, connu de tous sous le nom de Jour du Souvenir, journée de deuil national et collectif, journée de commémoration et d'hommage à tous ceux qui ont combattu et sont tombés au service de Dieu, du roi et de leur pays et dont nous saluons l'ultime sacrifice par des actes à la fois individuels et collectifs de prière et de commémoration à l'occasion desquels nous nous arrêtons un instant et penchons la tête dans un recueillement sacré à la onzième heure du onzième jour du onzième mois en l'honneur de tous ceux qui ont tant donné d'eux-mêmes; et :

Sur deux soldats et êtres humains exceptionnels, qui se sont combattus dans la Grande Guerre, deux généraux distingués et militaires accomplis, à savoir le général Charles Harington, commandant en chef britannique de l'occupation alliée à Constantinople, et le général Mustafa Kemal, commandant des forces turques dans leur intrépide résistance au traité de Sèvres qui démembrait leurs terres en vue de les donner à certains des alliés qui les convoitaient; sur leurs troupes rassemblées, prêtes au combat et attendant les ordres pour lancer les hostilités à Chanak, sur les Dardanelles, en octobre 1922, et sur le destin qui les a fait se rencontrer là; sur leur détermination à éviter un bain de sang inutile, leur remarquable contribution à la paix turco-britannique et mondiale et leur volonté d'épargner à leurs soldats la mort dans une folle aventure en négociant et en signant, dans l'honneur et la justice pour tous, l'armistice de Moudania le 11 octobre 1922; et sur, Andrew Bonar Law, qui est né au Canada, qui est devenu premier ministre britannique de Grande-Bretagne le 23 octobre 1922, qui a servi pendant sept mois et est décédé le 30 octobre 1923, et sur son engagement ferme en faveur de la paix turco-britannique dans ce que les Britanniques, les Dominions et les Canadiens ont appelé l'affaire de Chanak.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Je propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

La crise de Chanak

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Cools, attirant l'attention du Sénat, en cette année qui marque le centenaire du début des hostilités de la Grande Guerre de 1914-1918, sur le 11 novembre, connu de tous sous le nom de Jour du Souvenir, journée de deuil national et collectif, journée de commémoration et d'hommage à tous ceux qui ont combattu et sont tombés au service de Dieu, du roi et de leur pays et dont nous saluons l'ultime sacrifice par des actes à la fois individuels et collectifs de prière et de commémoration à l'occasion desquels nous nous arrêtons un instant et penchons la tête dans un recueillement sacré à la onzième heure du onzième jour du onzième mois en l'honneur de tous ceux qui ont tant donné d'eux-mêmes; et :

Sur les événements survenus en 1922, à peine quatre ans après la Grande Guerre, et connus sous le nom d'affaire de Chanak, à l'occasion de laquelle le Canada a défendu fermement contre la Grande-Bretagne son autonomie constitutionnelle en matière d'affaires étrangères, de guerre et de paix; sur le refus du premier ministre libéral Mackenzie King d'envoyer des troupes à Chanak, aujourd'hui Çanakkale, petit port turc des Dardanelles, comme le lui demandaient instamment le premier ministre britannique David Lloyd George et son secrétaire aux colonies Winston Churchill; sur le rejet total de cette guerre par les Canadiens et les Britanniques fatigués de la guerre et pleurant toujours leurs fils morts au combat; sur cette menace de guerre inexorablement issue du traité de Sèvres, création injuste, inapplicable et mort-née du premier ministre Lloyd George, traité injuste et humiliant qui chassait les peuples turcs de leurs terres ancestrales de Thrace orientale et d'Anatolie et auquel ils se sont opposés avec succès; sur le rôle du Canada dans l'arrangement qui a permis à l'occasion de l'affaire de Chanak d'éviter une guerre inutile et honnie; sur le jeu politique britannique où un seul vote du caucus conservateur a obligé le premier ministre Lloyd George et son gouvernement de coalition libérale à démissionner; et sur l'ascendant du premier ministre britannique né au Canada Bonar Law, qui a perdu deux fils dans la Grande Guerre et qui était alors l'homme le plus respecté en Grande-Bretagne, et sur sa politique de paix au Proche-Orient.

L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Je propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

L'Université Trinity Western

Interpellation—Ajournement du débat

L'honorable Donald Neil Plett, ayant donné préavis le 11 décembre 2014 :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur la décision prise par certains barreaux provinciaux de refuser de reconnaître la nouvelle école de droit de l'Université Trinity Western.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir faire la lumière sur un enjeu de taille. L'Université Western Trinity est une université chrétienne d'arts libéraux située à Langley, en Colombie-Britannique.

L'université a proposé de donner une formation en droit en s'inspirant du programme d'enseignement offert par les autres facultés de droit du Canada. Plusieurs barreaux provinciaux ont tenu des votes pour savoir s'ils devraient permettre aux futurs diplômés de cette faculté de pratiquer le droit. L'octroi de l'agrément à ces diplômés est remis en question parce que les étudiants de l'Université Western Trinity doivent signer une entente, un code de conduite, lors de leur inscription.

Le code de conduite interdit les relations sexuelles hors du cadre d'un mariage hétérosexuel. L'université accepte les homosexuels et les non-chrétiens, et la règle en question vise également les couples hétérosexuels non mariés.

Certains barreaux estiment toutefois qu'il s'agit de discrimination envers les étudiants homosexuels, et les Barreaux de l'Ontario et de la Nouvelle-Écosse ont décidé, à la suite d'un scrutin, de rejeter les candidatures des futurs diplômés de cette université. Pour leur part, les Barreaux de l'Alberta et de la Saskatchewan leur accorderont l'agrément, alors que celui du Manitoba a décidé de reporter sa décision. Le Barreau de la Colombie-Britannique a tout d'abord décidé d'octroyer l'agrément à ces étudiants, mais il est revenu sur sa décision par la suite.

Honorables sénateurs, je viens tout juste de recevoir un courriel m'informant que la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a jugé aujourd'hui que l'interdiction visant les diplômés en droit de l'Université Trinity Western est illégale.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Depuis que j'ai donné avis de cette motion, en décembre, le ministre de l'Enseignement supérieur de la Colombie-Britannique, Amrik Virk, a révoqué l'approbation qu'il avait accordée à la faculté de droit de l'Université Trinity Western, ce qui veut dire qu'aucun étudiant ne pourra s'inscrire au programme.

Ce n'est pas la première fois qu'on fait obstacle à l'école en raison de ses valeurs. En 2001, le British Columbia College of Teachers a voulu rejeter la demande d'accréditation de la faculté d'éducation de l'Université Trinity Western à cause de ce même accord. Dans la décision de la Cour suprême, huit juges contre un ont donné gain de cause à l'Université Trinity Western. Je cite la décision : « Force est de constater que la tolérance de croyances divergentes est la marque d'une société démocratique. »

Honorables collègues, on ne saurait trouver un cas de jurisprudence plus clair que cette décision. L'un des arguments les plus convaincants en faveur de l'Université Trinity Western est venu de Tony Wilson, un conseiller du Barreau de la Colombie-Britannique athée qui s'est prononcé en faveur de l'accréditation de la faculté de droit, par respect pour la règle de droit, en faisant valoir que : « Nous ne pouvons pas choisir les lois qui font notre affaire et rejeter les autres. »

Dans notre État démocratique, la liberté de religion est un droit fondamental auquel la plupart des Canadiens accordent de l'importance. Cependant, la liberté de religion n'est pas accordée équitablement dans l'ensemble de la société canadienne, pas même pour les principales religions.

Il semble désormais courant de critiquer les chrétiens et de se moquer de leurs croyances et de leurs valeurs, alors que la plupart des autres grandes religions qui transmettent des valeurs semblables sont célébrées pour leur différence et leur contribution à la diversité dans la société. Je ne peux m'empêcher de croire que, si l'école était bouddhiste, juive, islamique ou de toute autre confession non chrétienne, son code de conduite ne poserait aucun problème.

Parmi ceux qui ont voté contre l'université, certains ont affirmé qu'il est impossible d'enseigner adéquatement l'éthique dans un établissement confessionnel. Faut-il en conclure que, en raison de leurs croyances, des avocats croyants seraient incapables d'enseigner l'éthique dans une université non chrétienne?

D'autres opposants ont soutenu que l'école formerait des avocats intolérants, qui agiraient de façon discriminatoire envers les gais et les lesbiennes, et ce, même si le programme pédagogique demeure identique. Est-ce à dire que les Canadiens qui se déclarent chrétiens, soit 69 p. 100 de la population, ne sont pas aptes à pratiquer le droit au Canada?

Peut-être aurait-il été plus logique d'avancer que les normes éthiques des athées et des avocats sans appartenance religieuse ne correspondent pas à celles de la majorité des Canadiens. Une discrimination de ce genre serait considérée ridicule de nos jours, et à juste titre.

Qu'en est-il des étudiants qui ont obtenu un baccalauréat de l'Université Trinity Western et qui ont fréquenté une autre école de droit? Ont-ils été, eux aussi, à ce point contaminés par l'orthodoxie chrétienne qu'ils ne peuvent pas pratiquer correctement le droit? Certains avocats exerçant au Canada ont fait leurs études dans des écoles confessionnelles des États-Unis. Devrait-on leur retirer leur permis d'exercice?

Un avocat m'a écrit pour m'expliquer que, si cette école de droit était accréditée, il y aurait au Canada moins de places pour les candidats homosexuels que pour les hétérosexuels, ce qui désavantagerait les étudiants homosexuels. Cela est tout simplement faux.

L'école n'exerce aucune discrimination envers les candidats, peu importe leur religion ou leur orientation sexuelle. Fait ironique, aucun de ces opposants n'a mentionné que la règle toucherait davantage de couples hétérosexuels que de couples homosexuels. Cette situation n'a rien à voir avec les droits des LGBT.

Trinity Western demande simplement à ses étudiants de signer un code de conduite conforme à ses principes. La plupart des universités canadiennes ont adopté un code de conduite qui décourage ou interdit certains comportements. Si les valeurs d'un étudiant diffèrent de celles de cette université, il peut décider de ne pas y étudier. C'est son choix.

Nous constatons actuellement que les préjugés de la société contre les chrétiens ont des répercussions sociales bien réelles et, malheureusement, nous voyons maintenant des répercussions juridiques et financières.

La Banque de Montréal a adressé à la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada une lettre invitant les conseillers des différents barreaux à voter contre la reconnaissance des futurs diplômés en droit de l'Université Trinity Western parce qu'elle estime que le code de conduite de l'université est discriminatoire envers les étudiants homosexuels. Dans sa lettre, la banque invoque les valeurs fondamentales des Canadiens pour justifier sa position. Je ne suis pas sûr de savoir ce qui fait de la BMO, une institution financière, une autorité en matière de valeurs fondamentales canadiennes.

Je sais toutefois que les Canadiens ont à cœur la Charte des droits et libertés, qui codifie la liberté de religion.

En octobre, la banque a envoyé un courriel à ses conseillers juridiques externes, qui disait ce qui suit :

Dans le cadre de son programme de sélection de conseillers juridiques externes, la banque demande à ses fournisseurs de lui communiquer des statistiques sur la diversité de leurs associés, de leurs partenaires et de leur comité de direction.

La BMO ajoute ceci :

La banque commence par ses conseillers externes. Elle cessera de traiter avec ceux qui n'ont pas des normes compatibles avec les siennes. En outre, la banque veut que ses employés reflètent son caractère inclusif, c'est-à-dire que, non seulement ils tolèrent les autres, mais qu'ils reflètent aussi les valeurs des clients.

(1430)

Dans une entrevue avec le magazine Canadian Lawyer, le vice-président de la BMO, Simon Fish, a lancé l'avertissement suivant :

[...] à l'avenir, les groupes juridiques s'appuieront sur les indicateurs pour décider avec qui ils font affaire.

La BMO a créé un groupe appelé Legal Leaders for Diversity, ou LLD, formé de 72 autres sociétés, comme Sobey's, la RBC et Home Depot, pour ne nommer que celles-là. Ces sociétés ont signé cette lettre, fondant leur position sur la promotion de la diversité et l'inclusion. Je le répète, les principes de la diversité et de l'inclusion ne s'appliquent pas à tous les cas; plus précisément, ils ne s'appliquent pas au christianisme.

Bill Maher, commentateur sociopolitique et animateur de l'émission Real Time sur la chaîne HBO, a récemment reconnu publiquement dans son émission, en tant que personne qui se qualifie de libérale, que la gauche s'empresse de critiquer la théocratie blanche, surtout le christianisme, alors qu'elle ne critique pas les autres religions, même dans les circonstances les plus atroces.

En mai, le conseil municipal de Nanaimo a décidé d'interdire un colloque réunissant des dirigeants, parce que le PDG de l'une des sociétés qui parrainait l'événement s'était publiquement prononcé en faveur de la définition traditionnelle du mariage et avait fait des dons à des organismes qui font la promotion des valeurs familiales traditionnelles. L'événement en soi n'avait rien à voir avec ces enjeux. Toutefois, parce que la position de l'un des parrains sur une question qui n'avait aucun lien ne correspondait pas à celle de la majorité des membres du conseil municipal, une motion a été présentée et adoptée, interdisant aux résidants de Nanaimo d'assister à ces délibérations qui devaient avoir lieu dans leurs installations financées à même les fonds publics. Dans le débat sur cette affaire, ils ont ridiculisé cet homme en disant que ses « convictions chrétiennes sont incroyablement ancrées ». L'un d'entre eux a ajouté que son point de vue est « presque criminel » à notre époque.

J'ai reçu récemment une lettre d'une professeure canadienne critiquant la position que j'adopte à l'égard d'un projet de loi dont le Sénat est actuellement saisi. Dans sa lettre, elle n'a pas commenté la validité de mes arguments, mais a plutôt parlé de mon « bagage », qui ferait de moi un ignorant, et une personne mal informée et peu éclairée. Voici ce qu'on peut lire dans la lettre :

Monsieur, vous êtes un Canadien de vieille souche, fortement assimilé et unilingue, qui est né et a été élevé ici, au Canada.

Elle poursuit ensuite en majuscules :

UN HOMME DE RACE BLANCHE, ANGLO-SAXON ET CHRÉTIEN.

Ce sont là les propos d'une professeure. Ces mots, à eux seuls, sont censés être considérés comme des insultes et des faiblesses, et je suppose que les mots en majuscules représentent les aspects les plus révoltants de ma personne.

Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que si l'un ou l'autre de ces mots était remplacé par une autre variable, on jugerait que cette personne est intolérante et fait preuve d'étroitesse d'esprit. Pour moi, ces commentaires identifient clairement, en des termes bien précis, les groupes de la société canadienne à propos desquels les élites jugent bon d'entretenir des préjugés et de faire preuve de discrimination, c'est-à-dire les hommes unilingues anglophones, non-immigrants, caucasiens et, bien entendu, chrétiens.

Chers collègues, la liberté de religion n'est pas interprétée ni appliquée équitablement. Depuis l'horrible attaque terroriste perpétrée contre les employés de Charlie Hebdo, à Paris, d'importantes discussions ont lieu dans la majorité des pays démocratiques partout dans le monde au sujet de l'intolérance, des propos haineux, des crimes haineux, de la pertinence des lois anti-blasphème, de la liberté de religion et de la liberté d'association.

Le mot-clic « Je suis Charlie » a été extrêmement populaire sur Twitter. Les gens l'ont utilisé pour manifester leur appui ainsi que pour défendre la liberté d'expression, la liberté de parole et la liberté de presse. De nombreux Canadiens bien connus, y compris des journalistes, ont utilisé ce mot-clic dans leurs gazouillis, et certains ont même remplacé leur photo de profil par une image portant l'inscription « Je suis Charlie » ou « We are Charlie ».

Après une telle tragédie, il n'est pas étonnant de voir les gens sembler solidaires, mais cela nous amène à nous poser la question suivante : pourquoi tant de gens sont-ils prêts à appuyer la liberté d'expression absolue à l'étranger, mais pas dans notre propre pays? Pourquoi tant de personnes ne sont-elles pas autorisées à prendre la parole dans les universités pour des raisons aussi bidon, invoquées par l'administration, parce que leur point de vue ne correspond pas aux valeurs fondamentales de l'université?

Comme Rex Murphy l'a déclaré dans un article très émouvant publié à la suite du mouvement « Je suis Charlie » observé sur Twitter :

Dire que les propos d'une personne sont « haineux » simplement parce qu'on ne veut pas les entendre suffit à réduire leur auteur au silence. Pour les petits sujets comme pour les grands, du réchauffement climatique à l'avortement, nous sommes assujettis à une forme de collusion — à laquelle on donne le nom de « rectitude politique » — quant à ce qui ne devrait pas, ou ne peut pas être dit.

Il poursuit ainsi :

J'ajouterai que personne ne s'embarrasse de tels scrupules dès qu'il est question d'images qui ridiculisent, moquent, insultent ou tournent en dérision les symboles de la foi chrétienne, comme la croix, l'hostie ou la messe. Les médias nord-américains et les émissions de télé qui sont censées être humoristiques ont pris l'habitude plutôt lassante de calomnier et de diffamer bassement la religion pratiquée par la majorité des Nord-Américains, tout en prétendant faussement — oui, faussement — qu'ils s'attaquent à tous les sujets sans discrimination.

Les journalistes et les entreprises médiatiques, y compris notre société d'État financée à même les fonds publics, CBC/Radio-Canada, ont admis s'être longuement demandé si on devait publier les caricatures de Charlie Hebdo qui se moquaient de l'islam et qui auraient supposément déclenché l'attentat que l'on sait.

Puis-je avoir quelques minutes de plus, monsieur le Président?

Son Honneur le Président : Le sénateur Plett peut-il avoir cinq minutes de plus?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Plett : Le directeur des normes et des pratiques journalistiques de CBC, David Studer, a dit que son organisme avait choisi de ne pas diffuser les images de Charlie Hebdo qui mettaient en scène le prophète Mahomet parce qu'elles sont « choquantes pour ceux qui pratiquent une des grandes religions du monde ».

CBC a cependant choisi de diffuser, à deux occasions distinctes, la caricature de Charlie Hebdo sur laquelle un condom remplace l'eucharistie ainsi qu'un dessin où on voit un crucifix dans un bocal d'urine. Je répète que les adeptes de la grande religion dont parle CBC représentent 3 p. 100 de la population canadienne, alors que ceux qui pratiquent la religion ainsi bafouée comptent pour 69 p. 100 des Canadiens.

Chers collègues, si nous voulons défendre la liberté d'expression, nous devons défendre la liberté de tous ceux qui veulent s'exprimer, et si nous voulons défendre la liberté de religion, nous devons défendre la liberté de ceux qui pratiquent toutes les religions, y compris la foi chrétienne.

Que ce soit — ou non — politiquement correct d'être un chrétien en 2015, l'Université Trinity Western jouit toujours de sa liberté de religion, comme le confirme le précédent créé par la décision limpide qui a été rendue par la Cour suprême dans une affaire à peu près identique et que nous devons respecter.

J'ai été extrêmement déçu de constater que le ministre de l'Enseignement supérieur de la Colombie-Britannique n'avait pas eu le courage de défendre la liberté de religion et qu'il avait cédé aux pressions exercées par les membres d'un barreau qui fait de la discrimination. J'espère sincèrement que l'Université Trinity Western va saisir la Cour suprême de cette question afin qu'elle puisse de nouveau dénoncer la discrimination et se prononcer en faveur de la démocratie.

(1440)

L'honorable Serge Joyal : L'honorable sénateur répondrait-il à une question?

Le sénateur Plett : Bien sûr.

Le sénateur Joyal : J'ai cru entendre, à la fin de votre discours, que l'Université Trinity Western pourrait s'adresser aux tribunaux. L'université a-t-elle déjà entamé une procédure ou envisage-t-elle seulement de le faire?

Le sénateur Plett : Sénateur, je ne peux pas m'exprimer officiellement au nom de l'Université Trinity Western, mais lorsque j'ai discuté avec son équipe, au téléphone, on m'a assuré qu'elle entendait défendre sa cause jusqu'au bout. De toute évidence, elle attend les décisions telles que celle que vient maintenant de rendre le tribunal de la Nouvelle-Écosse et celle des tribunaux ontariens, afin de voir s'ils adopteront la même position. Cela dit, je ne peux pas officiellement m'exprimer en son nom.

Le sénateur Joyal : Êtes-vous en mesure de nous résumer l'essentiel de la décision du tribunal en Nouvelle-Écosse? Ce n'est pas un examen de droit. Je cherche à comprendre ce qui est en cause et je ne crois pas être le seul ici. J'aimerais comprendre les critères juridiques sur lesquels le tribunal de la Nouvelle-Écosse s'est fondé pour reconnaître que ce dossier porte sur la liberté de religion et qu'il est donc protégé en vertu de l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Le sénateur Plett : Je l'ai déjà dit, sénateur, je ne suis manifestement pas un juriste de votre trempe. Je répète que, au moment de préparer mes notes, pas plus tard qu'il y a une heure ou une heure et demie, je n'avais pas connaissance de cette décision.

J'étais assis ici lorsque j'ai reçu un courriel d'un journaliste qui suit ce dossier de très près. Il fait des pieds et des mains. Bref, il a écrit un courriel qui s'intitulait simplement « Pour le Canada », mais je ne peux rien dire de plus que ce que j'y ai lu, sénateur. Je cite :

J'ai tout de suite voulu vous écrire en apprenant la nouvelle. Aujourd'hui, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a jugé illégales les restrictions imposées par la province aux diplômés de la faculté de droit de l'Université Trinity Western.

Il ajoute ceci :

Vous pouvez consulter l'intégralité de la décision de la cour, qui fait 138 pages, en suivant ce lien.

Je n'ai pas eu le temps d'aller lire la décision. Je compte bien le faire, mais je n'ai pas plus de détails pour l'instant.

(Sur la motion du sénateur Doyle, le débat est ajourné.)

(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au jeudi 29 janvier 2015, à 13 h 30.)

© Sénat du Canada

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