Débats du Sénat (Hansard)
2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 127
Le mercredi 25 mars 2015
L'honorable Leo Housakos, Président intérimaire
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- Examen de la réglementation
- L'ajournement
- Projet de loi de crédits no 5 pour 2014-2015
- Projet de loi de crédits no 1 pour 2015-2016
- La table ronde nationale sur les femmes et les jeunes filles autochtones disparues ou assassinées
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- La Loi sur l'emploi dans la fonction publique
- La Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité
- Le Budget des dépenses de 2015-2016
- Le Code criminel
- Visiteurs à la tribune
- Projet de loi instituant la Journée nationale des produits du phoque et de la mer
- Banques et commerce
- Les phares à titre de symboles irremplaçables du patrimoine maritime
- Affaires étrangères et commerce international
- Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'examen des conditions de sécurité et des faits nouveaux en matière d'économie dans la région de l'Asie-Pacifique
- Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'examen des questions se rapportant aux relations étrangères et au commerce international en général
- Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude du potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique
- Le Sénat
LE SÉNAT
Le mercredi 25 mars 2015
La séance est ouverte à 13 h 30, le Président intérimaire étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
La Loi sur la gestion financière des premières nations
Le dixième anniversaire
L'honorable Dennis Glen Patterson : Honorables sénateurs, très souvent, les mesures législatives touchant les Premières Nations sont accueillies avec méfiance, compte tenu des relations qui ont toujours été assez mauvaises entre le gouvernement fédéral et les peuples autochtones du Canada. Les Premières Nations craignent l'existence d'intentions cachées, comme l'extinction de titres ou l'abandon des obligations fiduciaires du gouvernement. Cependant, la Loi sur la gestion financière des premières nations constitue une exception à la règle.
La Loi sur la gestion financière des premières nations est une initiative à adhésion facultative dirigée par les Premières Nations qui, comme le précise le site web de la Gazette du Canada :
[...] favorise le développement économique et le bien-être des collectivités des Premières Nations par le renforcement de leur régime d'impôt foncier, la mise en place d'un régime de financement par obligations, et le soutien de leur capacité de gestion financière. Pour atteindre ces objectifs, on misera sur les institutions financières des Premières Nations établies en vertu de la Loi [...]
Trois institutions ont été créées au moyen de cette loi. La Commission de la fiscalité des Premières Nations, dirigée par le commissaire en chef Manny Jules, fournit un soutien réglementaire aux Premières Nations en matière d'impôt foncier. Jusqu'ici, elle a approuvé plus de 760 lois en vertu de la Loi sur la gestion financière des premières nations, et les Premières Nations visées par cette loi perçoivent des recettes générées grâce aux impôts fonciers de plus de 42 millions de dollars par année, ce qui leur permet d'accorder des prêts à long terme.
Le Conseil de gestion financière des Premières Nations, dirigé par Harold Calla, vise à améliorer la littératie financière en établissant des normes liées aux lois relatives à l'administration financière, aux systèmes de gestion financière et au rendement financier et, sur demande, elle peut attester qu'une Première Nation respecte ces normes.
Enfin, l'Administration financière des Premières Nations, dirigée par Ernie Daniels, est une société sans but lucratif offrant des services de titrisation. Elle est administrée par les Premières Nations qui constituent ses membres emprunteurs. À l'heure actuelle, l'administration compte 39 membres emprunteurs, et 5 autres sont en voie de le devenir. Jusqu'ici, environ 150 Premières Nations ont demandé au ministre de leur permettre de se prévaloir des dispositions de la loi et des services de l'institution.
Il y a 10 ans presque jour pour jour, le 23 mars 2005, la loi a reçu la sanction royale après avoir reçu l'appui de tous les partis dans les deux Chambres. Dix ans plus tard, 147 Premières Nations, soit 25 p. 100 de toutes les Premières Nations du Canada, se prévalent des dispositions de cette loi. Elles ont recueilli, localement, plus de 220 millions de dollars de recettes locales et émis des débentures à hauteur de 90 millions de dollars. Plus de 50 Premières Nations ont obtenu leur accréditation en gestion financière. Plus de 100 étudiants autochtones ont suivi les cours universitaires requis pour pouvoir appliquer cette loi. De nouvelles nations, dont certaines qui s'opposaient à la loi, veulent maintenant y adhérer.
Malgré ce succès, quelques interrogations et problèmes pratiques de mise en œuvre se sont posés. Ils ont été soulevés lors de l'examen prévu sept ans après la sanction royale. En collaboration avec les trois institutions financières, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada élabore actuellement des modifications qui permettront d'accélérer et d'harmoniser l'adhésion à la Loi sur la gestion financière des premières nations, de réduire les formalités administratives auxquelles doivent se conformer les Premières Nations participantes et de raffermir la confiance des investisseurs et des marchés financiers à l'égard de la loi.
J'exhorte les honorables sénateurs à appuyer les recommandations qui pourraient être soumises au Sénat et à féliciter la Commission de la fiscalité des Premières Nations, le Conseil de gestion financière des Premières Nations et l'Administration financière des Premières Nations pour leurs réalisations à l'occasion de leur 10e anniversaire.
AFFAIRES COURANTES
Examen de la réglementation
Dépôt du quatrième rapport du comité mixte
L'honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation, qui porte sur les délais exprimés de façon vague ou subjective dans la législation subordonnée.
L'ajournement
Préavis de motion
L'honorable Yonah Martin (leader adjointe du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que, lorsque le Sénat s'ajournera après l'adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu'au 31 mars 2015 à 14 heures.
Projet de loi de crédits no 5 pour 2014-2015
Première lecture
Son Honneur le Président intérimaire annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-54, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2015, accompagné d'un message.
(Le projet de loi est lu pour la première fois.)
Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?
(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)
Projet de loi de crédits no 1 pour 2015-2016
Première lecture
Son Honneur le Président intérimaire annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-55, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2016, accompagné d'un message.
(Le projet de loi est lu pour la première fois.)
Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?
(Sur la motion de la sénatrice Martin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)
(1340)
La table ronde nationale sur les femmes et les jeunes filles autochtones disparues ou assassinées
Préavis d'interpellation
L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, je donne préavis que, dans deux jours :
J'attirerai l'attention du Sénat sur la table ronde nationale sur les femmes et les jeunes filles autochtones disparues ou assassinées et sur le Plan d'action pour contrer la violence familiale et les crimes violents à l'endroit des femmes et des filles autochtones du gouvernement du Canada.
[Français]
PÉRIODE DES QUESTIONS
La citoyenneté et l'immigration
Les demandes d'immigration—Le système Entrée Express
L'honorable Claudette Tardif : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. En janvier, Citoyenneté et Immigration Canada a lancé le nouveau système Entrée Express. Plusieurs attendaient avec impatience l'arrivée de ce nouveau système, mais ont vite compris qu'il n'était pas à la hauteur de leurs attentes.
M. Rory McAlpine, vice-président principal de Maple Leaf Foods, a expliqué, lors de sa comparution devant le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, que le secteur de la transformation n'a pas accès au système Entrée Express, puisqu'il ne s'agit pas d'emplois saisonniers ni d'emplois nécessitant les compétences de niveaux 0, A ou B, selon la classification nationale des professions. Les mêmes préoccupations ont été soulevées hier au comité par le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture. Le système Entrée Express présente de graves lacunes. Plusieurs entreprises qui espéraient avoir accès à ce système n'y ont pas accès et devront diminuer leur productivité en conséquence.
Le gouvernement peut-il s'engager à collaborer avec les entreprises affectées par une pénurie de main-d'œuvre pour améliorer rapidement le système Entrée Express?
L'honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Sénatrice, comme vous le savez, c'est ce que nous faisons continuellement. Nous travaillons avec les entreprises pour créer de la richesse et des emplois. Dans le cadre du dossier de l'immigration et de la réforme qui a été mise sur pied, il s'agit de jumeler les compétences des individus et les besoins des entreprises, et c'est ce que nous allons continuer de faire.
Vous savez également que le ministre des Finances déposera le Plan d'action économique de 2015 au cours des prochaines semaines. Je suis convaincu que vous pourrez y retrouver l'expression de la volonté gouvernementale de continuer de faire avancer cette vision et cette philosophie visant à développer l'économie, à créer des emplois et à favoriser la richesse. J'espère que vous participerez avec nous à l'adoption de ce plan d'action.
La sénatrice Tardif : La situation est particulièrement alarmante en Alberta. Selon le rapport du directeur parlementaire du budget, basé sur des données recueillies de 2002 à 2012, les travailleurs étrangers temporaires occupent une plus grande partie de la main-d'œuvre de l'Alberta comparativement aux autres provinces. Les travailleurs étrangers temporaires représentent 3,03 p. 100 de la main-d'œuvre en Alberta, soit presque deux fois plus que la moyenne nationale de 1,79 p. 100. La majorité de ces travailleurs étrangers temporaires occupe des postes qui nécessitent peu de qualifications professionnelles et qui ne sont donc pas admissibles au système Entrée Express.
Quelle est la stratégie du gouvernement pour aider les entreprises de l'Alberta à trouver la main-d'œuvre dont elles ont grandement besoin?
Le sénateur Carignan : Comme je l'ai dit, sénatrice, notre gouvernement a toujours indiqué clairement, et il continuera de le faire, que les Canadiens doivent toujours avoir la priorité en matière d'emploi. Les réformes que nous avons mises sur pied en ce qui a trait au Programme des travailleurs étrangers temporaires et sa vocation première en font une mesure limitée de dernier recours, à court terme. Elle exige que les employeurs, lorsqu'ils ne trouvent pas de Canadiens qualifiés pour combler des postes vacants, attestent qu'ils ont tenté de recruter des candidats parmi les jeunes Canadiens et d'autres groupes sous-représentés avant de recruter des travailleurs étrangers. Lorsqu'il est possible de le faire, comme vous l'avez mentionné, le système Entrée Express peut s'appliquer. Tout est mis en place pour que les Canadiens puissent trouver un emploi et que les employeurs, lorsque la main-d'œuvre n'est pas disponible au sein de la population canadienne, puissent obtenir de l'aide de l'extérieur.
La sénatrice Tardif : Hier soir, le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture nous a indiqué qu'il manquait 35 000 emplois par année. Cela mine énormément les capacités en matière de productivité et de compétitivité de ces entreprises dans le secteur de l'agriculture. Il faut prendre cette situation au sérieux. Le gouvernement doit penser à une stratégie pour combler ces besoins.
J'aimerais revenir à la question du système Entrée Express pour les francophones. Le 5 février, je vous ai posé une question sur le fait que le système Entrée Express ne comprenait pas de composante francophone afin de faire la promotion des communautés francophones hors Québec. Depuis ce temps, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a participé à une journée de réflexion sur l'immigration francophone, organisée par la Fédération des communautés francophones et acadienne, le 9 mars. Le système Entrée Express est au cœur des discussions. Pour donner suite aux questions de la présidente de la fédération, le ministre a annoncé qu'il espérait proposer quelque chose au cours de l'année.
Quand le gouvernement va-t-il incorporer une composante francophone au système Entrée Express?
Le sénateur Carignan : Sénatrice, comme vous l'avez sûrement entendu de la bouche du ministre, nous nous sommes engagés à promouvoir l'immigration francophone partout au Canada par l'entremise d'un programme d'immigration permanent. Depuis le 1er janvier, les demandes sont traitées dans un délai de six mois ou moins grâce au nouveau système Entrée Express. Je crois comprendre que le ministre a pris part, comme vous l'avez souligné, à des consultations pour voir comment nous pourrions attirer plus de francophones, y compris les francophones les plus brillants qui nous aideront à combler les besoins sur le marché du travail et les besoins économiques.
Je fais confiance au ministre, et il continuera d'élaborer des politiques et de prendre des décisions qui favoriseront la richesse et attireront les personnes ciblées pour aider nos entreprises et améliorer l'immigration.
(1350)
La sénatrice Tardif : La question importante est de savoir quand. Permettez-moi de vous lire l'extrait d'une lettre que j'ai reçue d'une famille albertaine.
Voici notre parcours. Nous sommes des Parisiens arrivés à Edmonton le 27 août 2012 avec un permis ouvert pour moi, un permis visiteur d'un an pour mon conjoint et deux permis d'étude pour mes fils âgés de neuf et sept ans à l'époque.
Au mois de janvier 2015, nous étions admissibles à une demande de résidence permanente. Nous avons par conséquent effectué cette demande au 24 janvier 2015. C'est à ce moment que nous avons pris conscience du fait suivant : le système Entrée Express nous est très défavorable. Nous avons reçu une réponse nous informant que nous étions effectivement admissibles à la résidence permanente sous la catégorie de l'expérience canadienne avec 253 points. Citoyenneté et Immigration Canada ne prend pas en considération l'expérience de mon conjoint en qualité de Warehouse Supervisor, car son emploi a été obtenu un an auparavant sans la fameuse LMO désormais obligatoire. Nous perdons ainsi les 600 points qui nous auraient permis de recevoir l'invitation à fournir les documents afin d'avoir la résidence permanente.
Le ministère de l'Immigration va-t-il prendre en compte les deux années et demie que nous avons faites sur le territoire ou ces années seront-elles considérées comme perdues? Devrions-nous plier bagage pour Paris, mon conjoint, moi-même et nos trois enfants?
Nous avions des rêves d'ouvrir des commerces de bouche de type boulangerie, pâtisserie et bistro parisien, mais ces rêves deviennent des chimères. Nous vivons un cauchemar éveillé à l'heure actuelle.
Alors, oui, il est vrai que le système Entrée Express propose un service beaucoup plus rapide, mais pour certains, les effets pervers sont catastrophiques. Notre famille est en sursis jusqu'à échéance de notre permis de travail prévu en juillet 2016.
Monsieur le leader, qu'allons-nous faire pour ces familles qui veulent contribuer à la société canadienne en choisissant la citoyenneté canadienne?
Le sénateur Carignan : Sénatrice, vous savez qu'il n'est pas dans notre habitude de traiter de situations particulières au Sénat pendant la période des questions. Nous nous sommes engagés, dans le cadre de la Feuille de route pour les langues officielles 2013-2018, à travailler dans les secteurs de l'éducation, de l'immigration et des communautés. Citoyenneté et Immigration Canada investit 29,4 millions de dollars pour appuyer les communautés de langue officielle en situation minoritaire, et le gouvernement du Canada finance 13 réseaux en immigration francophone aux quatre coins du pays, sauf au Québec et au Nunavut. Ces réseaux mobilisent les intervenants clés afin de favoriser la collaboration dans le but d'accroître l'immigration francophone dans les communautés visées. Une multitude de ressources sont mises en place pour appuyer les gens sur le plan de l'immigration, particulièrement en ce qui a trait à l'immigration francophone, qui est prisée, comme vous le savez.
La sénatrice Tardif : Monsieur le leader, des représentants du Réseau en immigration francophone de l'Alberta, situé à Edmonton, m'informent qu'il y a cinq ou six dossiers semblables à celui-ci.
Quand y aura-t-il des changements au système Entrée Express qui permettront à ces familles francophones de s'intégrer à notre société canadienne?
Le sénateur Carignan : Sénatrice, comme je l'ai dit, nous travaillons de façon continue à faire en sorte que les employeurs canadiens puissent obtenir du personnel qualifié. L'immigration francophone, comme je vous l'ai expliqué, est une immigration qui est prisée, et nous allons continuer à travailler, comme le ministre l'a dit, pour combler les besoins du marché du travail et nos besoins économiques, et pour appuyer ce type d'immigration.
[Traduction]
Visiteur de marque à la tribune
Son Honneur le Président intérimaire : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d'un de nos ex-collègues, un ancien sénateur du Nunavut, l'honorable Willie Adams.
Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite un bon retour parmi nous.
Des voix : Bravo!
ORDRE DU JOUR
La Loi sur l'emploi dans la fonction publique
Projet de loi modificatif—Troisième lecture
L'honorable Carolyn Stewart Olsen propose que le projet de loi C-27, Loi modifiant la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (accès élargi à l'embauche pour certains militaires et anciens militaires des Forces canadiennes), soit lu pour la troisième fois.
— Je suis ravie d'intervenir à nouveau aujourd'hui pour parler des changements importants qui amélioreront les possibilités d'emploi des membres des Forces canadiennes et de nos anciens combattants.
J'aimerais profiter de cette occasion pour remercier mes collègues du Sous-comité des anciens combattants de leur soutien et du rapport relatif au projet de loi qu'ils ont présenté au Sénat. Je crois que nous sommes tous déterminés à veiller à ce que les anciens combattants, les militaires actifs et leurs proches aient toute l'aide requise pour réussir la transition vers la vie civile.
Le projet de loi a été présenté afin de donner aux hommes et aux femmes en uniforme ainsi qu'à nos anciens combattants les outils supplémentaires dont ils auront besoin pour réintégrer la vie civile. Le gouvernement sait très bien que la possibilité d'un emploi stable et d'une nouvelle carrière joue un rôle de premier plan dans la réussite de ce type de transition. C'est pour cette raison que j'estime qu'il est important que le projet de loi entre en vigueur dès que possible. Ainsi, les anciens combattants et les militaires actifs n'auront plus à attendre pour bénéficier des avantages que leur offre cette mesure législative.
Notre comité a entendu le témoignage de plusieurs personnes compétentes, qui ont donné des conseils utiles sur la meilleure façon d'améliorer l'accès à des emplois gouvernementaux des militaires et anciens militaires.
Ce qui est ressorti clairement des témoignages recueillis est l'appui sans réserve que les témoins accordent à l'esprit du projet de loi, ainsi qu'aux débouchés que cette mesure législative offrira à nos militaires et anciens combattants.
Certains témoins ont exprimé des inquiétudes au sujet du processus d'arbitrage qui servira à déterminer la désignation à donner à une maladie ou à une blessure liée au service. Je suis heureuse d'entendre leur point de vue sur cette question, car je crois que cela aidera le gouvernement à continuer d'apporter les améliorations nécessaires aux services et aux avantages offerts aux anciens combattants.
Le ministère des Anciens Combattants et le ministère de la Défense nationale se sont engagés à travailler en étroite collaboration pour éliminer les tracasseries administratives qui empêchent les personnes concernées de recevoir les prestations qu'on leur doit. Je crois que les problèmes relatifs au processus d'arbitrage, soulevés par les témoins, seront corrigés grâce à la collaboration entre les deux ministères.
En effet, lors de sa comparution devant notre comité, le ministre a affirmé que le gouvernement avait déjà répondu à une recommandation de la Chambre des communes à cette fin. Nous avons instauré une politique voulant qu'aucune personne ne soit libérée des Forces canadiennes tant que son état médical ne se sera pas stabilisé et que le ministère des Anciens Combattants n'aura pas pris des mesures concrètes pour l'aider. De telles mesures permettent de faciliter le processus de transition et d'assurer un continuum de soins, ce qui est très important pour ceux qui retournent à la vie civile.
Je vous signale en passant que j'ai parlé aujourd'hui avec l'ancien militaire Walt Natynczyk, et qu'il est très heureux que nous soyons saisis de ce projet de loi parce qu'il a toujours cru qu'assurer la sécurité d'emploi des anciens combattants après leur service militaire est primordial pour aider les familles, et que cela est indispensable pour les personnes qui souffrent de troubles de santé mentale. Voilà l'orientation qu'adopte le gouvernement et je suis très contente que nous allions de l'avant avec ce projet de loi.
(1400)
En principe, je suis d'avis que le processus d'embauche prévu dans le projet de loi C-27 devrait être aussi simple que possible, tout comme les mécanismes administratifs mis en place, lesquels ne devraient pas imposer de fardeau à nos anciens combattants. Ces mesures reflètent l'engagement soutenu du gouvernement de donner aux anciens combattants et à leur famille accès à l'aide et aux services dont ils ont besoin.
Nous avons récemment présenté une série de mesures visant à améliorer la façon dont nous prenons soin de nos militaires. La semaine dernière, nous avons annoncé que nous honorons notre engagement de fournir le même soutien aux réservistes à temps partiel qu'aux réservistes à temps plein et aux soldats de la Force régulière. Au titre du programme d'Allocation pour perte de revenus, le personnel à temps partiel de la Force de réserve qui a subi des blessures touchera, dès le mois prochain, le même revenu minimum que tous les autres soldats. Le montant de l'allocation sera fondé sur la solde militaire actuelle du réserviste et sera proportionnel à son grade et à la durée de son service, au lieu de se fonder sur son allocation quotidienne.
En outre, au titre de la nouvelle allocation de sécurité du revenu de retraite proposée, nous fournirons un soutien financier à vie aux anciens combattants blessés et à leur famille. Cette allocation fournira aux anciens combattants gravement blessés un soutien mensuel continu dès l'âge de 65 ans. L'allocation fera en sorte que le revenu annuel d'un ancien combattant admissible équivaudra à au moins 70 p. 100 des prestations qu'il touchait avant l'âge de 65 ans.
Nous avons également annoncé que nous élargissons l'admissibilité à l'allocation pour déficience permanente, de sorte que plus d'anciens combattants gravement blessés recevront de l'aide. Par conséquent, les anciens combattants et leur famille auront la certitude d'obtenir l'aide dont ils ont besoin pour gérer leur maladie pendant leur transition vers la vie civile.
Nous allons aussi créer l'allocation de secours pour les aidants familiaux, qui se traduira par le versement d'un montant annuel non imposable de plus de 7 000 $. Grâce à cette allocation, les aidants familiaux pourront se faire remplacer par un autre membre de la famille, un ami ou un professionnel, selon ce que préférera l'ancien combattant. Elle s'ajoutera aux autres prestations permettant déjà de voir aux besoins des anciens combattants dans le domaine la santé.
Sans l'ombre d'un doute, le projet de loi C-27 bonifiera ces mesures en renforçant les assises financières des membres des Forces armées qui font la transition vers la vie civile et en améliorant leur qualité de vie.
Nos militaires incarnent ce qu'il y a de mieux au Canada, et on les admire pour leur leadership et leur dévouement, ici comme à l'étranger, mais surtout, leurs compétences, leur entraînement et leur expérience en font les candidats parfaits pour occuper un emploi dans la fonction publique fédérale. Partout au pays, les entreprises et les organismes se rendent compte que ce n'est pas seulement par patriotisme qu'on embauche un ancien combattant. Le programme Embauchez un vétéran, mis sur pied par le gouvernement conservateur, a connu un vif succès, notamment auprès d'entreprises comme le CN, Cenovus et 3M Canada. Tous ces employeurs sont pleinement conscients de la valeur et de l'expertise des anciens militaires. Avec le projet de loi C-27, le gouvernement ne se contente plus de demander aux autres de passer à l'action et il joint lui aussi le geste à la parole.
Lorsque nos anciens combattants retournent à la vie civile, ils ont acquis les connaissances pratiques et la maturité professionnelle nécessaires pour occuper toutes sortes d'emplois. Aux termes du projet de loi C-27, les anciens combattants qui ont les compétences requises et qui cumulent au moins trois ans de service seront embauchés en priorité lorsqu'ils poseront leur candidature aux processus externes annoncés de la fonction publique, et ce, jusqu'à cinq ans après leur libération. Si on se fie aux témoins que le comité a entendus, ces processus permettent de combler grosso modo un poste sur six dans la fonction publique.
Les membres des Forces canadiennes et les anciens combattants qui répondront aux critères et qui cumuleront trois ans de service militaire pourront aussi poser leur candidature aux processus internes annoncés durant les cinq ans suivant leur libération.
Le nombre exact d'emplois disponibles varie d'une année à l'autre en fonction du taux d'embauche. Cependant, d'après nos témoins, ces processus constituent le principal mécanisme d'embauche dans la fonction publique.
En général, les témoins ont aussi convenu que la période de cinq ans prévue au projet de loi devrait permettre aux militaires nouvellement libérés de se préparer à occuper un emploi civil. En cinq ans, les anciens combattants et les membres encore en service devraient avoir amplement le temps de mettre de l'ordre dans leur vie et de faire les démarches requises pour faire prendre la direction souhaitée à leur carrière.
Le gouvernement estime que les anciens combattants qui sont blessés dans l'exercice de leurs fonctions devraient avoir la priorité d'embauche dans la fonction publique fédérale. C'est exactement l'objectif du projet de loi C-27, qui propose d'inscrire dans la loi un droit de priorité d'embauche pour les anciens combattants qui sont libérés pour des raisons médicales liées au service. Ils profiteront de ce statut prioritaire pendant une période de cinq ans à partir du moment où ils demandent à en bénéficier, et il se prolongera rétroactivement au mois d'avril 2012.
Le gouvernement examine également d'autres mesures qui pourraient être prises pour aider davantage les anciens combattants ainsi que les membres actifs des Forces armées. Par exemple, en ce qui concerne les dispositions relatives à la pension à vie, nous étudions différentes options afin que les réservistes, qui tireront parti de la mesure législative proposée, puissent convertir leurs cotisations de retraite existantes en cotisations au régime de pension de la fonction publique, un régime à prestations déterminées.
J'aimerais maintenant revenir au principe directeur du projet de loi. En adoptant la mesure législative proposée, on offrira une plus grande sécurité aux membres des Forces armées canadiennes qui sont libérés et à nos anciens combattants. Il ne fait aucun doute que cette mesure législative atténuera bon nombre de problèmes auxquels les anciens combattants se heurtent dans le cadre du processus de transition et qu'elle améliorera la situation globale des anciens combattants et des membres de leur famille.
Je demande à mes collègues d'appuyer eux aussi le projet de loi C-27 et de l'adopter pour que nous puissions mettre en œuvre ces changements importants pour nos anciens combattants.
L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je veux tout simplement m'assurer que mes collègues ne souhaitent pas poser d'autres questions. S'ils n'ont pas de questions, je propose d'aborder moi aussi ce sujet dès maintenant.
Honorables sénateurs, pour commencer, j'aimerais remercier l'honorable sénatrice Stewart Olsen, la vice-présidente du Sous-comité des anciens combattants, de même que les autres membres du sous-comité de l'excellent travail qu'ils ont accompli dans ce dossier. Comme nous l'avons tous constaté aujourd'hui en assistant à la rencontre des anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Canada, le Sénat en général, et le Sous-comité des anciens combattants en particulier, sont reconnus pour leur détermination à améliorer le sort des membres des forces armées, des anciens combattants et de leur famille. Il est agréable de recevoir des éloges lorsqu'on participe à des rencontres. J'étais donc ravi d'avoir eu l'occasion d'assister à celle-ci.
Honorables sénateurs, j'aimerais préciser que j'ai l'intention de donner un appui général à la mesure législative proposée. Je soutiens fermement cette initiative et je recommande vivement à mes collègues de l'appuyer. Toutefois, à l'étape de la deuxième lecture, j'ai parlé de choses qui, à mon avis, pourraient améliorer le projet de loi. Elles font écho à certains témoignages que nous avons entendus. Je vais en parler brièvement.
Notre rôle, au Sénat, est de prendre les mesures législatives proposées par l'exécutif, qui ont été étudiées à la Chambre des communes puis nous ont été renvoyées, et d'y apporter des améliorations ou de suggérer des modifications, si nous le pouvons, et c'est ce que nous devrions faire. Qu'elles soient apportées dans la mesure législative à l'étude ou dans de futures initiatives que la sénatrice a mentionnées — les deux étant possibles — je dois, lorsque je prends la parole au nom de l'opposition, m'en tenir au projet de loi à l'étude et éviter de commenter d'autres initiatives que le gouvernement pourrait prendre, comme l'a fait la sénatrice Stewart Olsen. Nous traiterons de ces dernières lorsque nous en serons saisis, le cas échéant.
Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur le titre du projet de loi C-27, Loi modifiant la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (accès élargi à l'embauche pour certains militaires et anciens militaires des Forces canadiennes). Ce projet de loi a pour principal objet des modifications à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.
(1410)
Il y a beaucoup d'autres choses que nous pourrions faire, mais ce qui est proposé représente un bon moyen d'accomplir notre devoir social envers les membres des Forces armées canadiennes qui partent à la retraite ou qui le sont déjà, que ce soit ou non en raison d'une blessure. La principale modification législative concerne les membres des forces armées qui ont dû les quitter à cause d'une blessure subie dans l'exercice de leurs fonctions. À elle seule, cette priorité est de loin la plus importante initiative proposée dont il faut s'occuper.
Parmi les témoins que nous avons entendus — la sénatrice Stewart Olsen en a parlé —, nous avons été ravis d'accueillir le nouveau ministre des Anciens Combattants, M. O'Toole, qui, pour la première fois, comparaissait publiquement devant un comité sénatorial; quel heureux hasard que ce soit au Sous-comité des anciens combattants. Nous avons aussi accueilli Guy Parent, ombudsman des vétérans, et Gary Walbourne, ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes.
S'il est adopté, le projet de loi permettra aux retraités et aux anciens combattants des Forces armées canadiennes de jouir d'un traitement prioritaire dans le processus d'embauchage de la Commission de la fonction publique. Comme le savent les honorables sénateurs, la Commission de la fonction publique est l'employeur principal de tous les fonctionnaires, mais, aux termes de la mesure législative que nous avons étudiée il y a quelques années, elle assume maintenant un rôle de vérification. La Commission de la fonction publique délègue son autorité aux divers ministères, puis vérifie et encadre les activités d'emploi. Chaque ministère devra respecter la loi et offrir ce traitement prioritaire.
Ce n'est pas une simple question de priorité, honorables sénateurs. J'ai ici une liste des priorités. Elle commence par les priorités légales et se poursuit avec les priorités réglementaires. La liste est très longue. Comme on peut s'y attendre, il existe plusieurs dispositions visant à protéger les fonctionnaires congédiés faute de travail, leur accordant la priorité ou la préférence dans un certain ministère. Il va de soi que nous protégions ces gens également. Il faut donc se demander comment faire pour les militaires, qui n'ont pas le même statut que les fonctionnaires. Comment les intégrer à cette liste de priorité? C'est ce qui a alimenté une grande partie de la discussion sur cette mesure législative.
Le projet de loi C-27 vise à améliorer et à faciliter la transition des militaires vers la vie civile, et à garantir que nos soldats et nos anciens combattants auront la qualité de vie qu'ils méritent amplement après leur départ des forces. C'est une marque de reconnaissance pour le service qu'ils ont accompli afin d'assurer la sécurité des Canadiens, tant au Canada qu'à l'étranger, durant un certain nombre d'années.
Je trouve que c'est une bonne initiative de la part du gouvernement, mais je veux souligner certains éléments clés qui ont été soulevés durant les audiences du comité sur le projet de loi. Je crois que, si nous corrigeons convenablement ces faiblesses, nous améliorerons le projet de loi C-27 de manière à mieux servir nos anciens combattants. Après tout, c'est là l'objet de cette mesure législative : mieux servir nos anciens combattants. Parlons de certaines de ces différentes initiatives.
Comme je le disais, le principe du projet de loi est une bonne chose, mais je crois que certains éléments peuvent être améliorés sensiblement. Notre sous-comité appuie entièrement le paragraphe 12(2) du projet de loi, qui établit la définition d'« ancien combattant ». C'est une nouvelle définition qui sera intégrée dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Elle précise qu'il s'agit d'une personne qui a servi au moins trois ans dans les Forces canadiennes et a été libérée honorablement. Ce nouveau paragraphe est ajouté dans le but de moderniser la définition d'« ancien combattant ». Quiconque a servi au moins trois ans et a été libéré honorablement correspond à cette nouvelle définition et, comme je le disais, il s'agit d'un nouveau paragraphe.
Malheureusement, le paragraphe 12(1) du projet de loi continue de limiter la définition de « survivant d'un ancien combattant », et je trouve cela regrettable. La définition de ce qui constitue un ancien combattant a été élargie pour inclure les anciens combattants de l'époque moderne ayant servi pendant au moins trois ans. Cependant, la définition de « survivant d'un ancien combattant », c'est-à-dire le conjoint d'un ancien combattant décédé par suite de son service, se limite encore aux survivants des anciens combattants de la Première Guerre mondiale et de la Seconde Guerre mondiale.
Ainsi, s'il y a des changements à apporter à ce projet de loi, je dirais qu'il faudrait soit enlever ces dispositions pour indiquer qu'on n'a pas l'intention de faire quoi que ce soit pour les survivants des anciens combattants qui ont été tués ou qui sont décédés par suite de leur service parce que ces survivants ne comptent pas, soit s'occuper de ces personnes de façon significative. Je préfère la dernière solution, c'est-à-dire qu'on s'occupe des survivants de façon significative. Nous devrions nous occuper des familles des anciens combattants décédés par suite de leur service.
Cela n'apparaît pas dans le projet de loi parce que nous ne l'avons pas amendé. Pour le moment, les survivants en question sont les épouses, les conjoints de fait ou les enfants des anciens combattants de la Première Guerre mondiale décédés. C'est donc dire que les emplois dans la fonction publique seront offerts à des gens qui ont environ 120 ans, ou à des nonagénaires, dans le cas des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale. Ces dispositions du projet de loi ne démontrent tout simplement pas que l'on souhaite offrir un privilège significatif et qu'on en fait une priorité. En voyant cela, on se dit qu'il faut corriger la situation. Je crois, comme tous ceux qui sont ici, qu'il faudrait corriger le projet de loi pour mettre à jour la définition de « survivant d'un ancien combattant ». La définition du terme « ancien combattant » a changé, alors pourquoi ne pas également modifier la définition de « survivant d'un ancien combattant »?
J'aimerais maintenant parler des témoignages de l'ombudsman des vétérans, M. Guy Parent, et de l'ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, M. Gary Walbourne, qui ont comparu ensemble et présenté un front coordonné. Dans l'ensemble, ils appuient ce projet de loi, comme on l'a déjà dit. Toutefois, ils s'inquiètent tous les deux du processus qui servira à déterminer si les facteurs médicaux menant à la libération d'un soldat sont attribuables au service, pour reprendre le terme du projet de loi. Est-ce que le militaire est libéré, est-ce qu'il deviendra bientôt un ancien combattant à cause d'une blessure attribuable à ses activités militaires? Ces deux ombudsmans s'inquiètent du processus qu'on utilisera pour répondre à cette question. À leur avis, les Forces armées canadiennes devraient, en tant qu'employeur, utiliser tous les renseignements médicaux dont elles disposent au sujet de leurs membres pour déterminer si les raisons médicales à l'origine de la libération peuvent être liées ou attribuables au service. Il est possible qu'un militaire soit touché par un problème de santé qui mène à sa libération, mais n'est pas attribuable au service. Il peut s'agir d'une blessure ou d'une maladie qui survient naturellement, quelque chose comme la sclérose en plaques, par exemple. Il faudra déterminer si le problème de santé est attribuable au service du militaire ou si celui-ci a simplement été frappé de malchance.
(1420)
Les deux ombudsmans sont d'avis que ce sont les Forces canadiennes qui sont les mieux placées pour prendre ces décisions, et non le ministère des Anciens Combattants. C'est le nœud du problème, parce que c'est le ministère des Anciens Combattants qui prend ces décisions, notamment pour les pensions et les paiements forfaitaires. C'est normalement le rôle du ministère des Anciens Combattants, qui a les compétences nécessaires pour ce faire et qui offre aux principaux intéressés des recours pour faire appel des décisions.
Le projet de loi prévoit que le ministère des Anciens Combattants s'en occuperait. Les témoins disent qu'il vaudrait mieux que ce soient les Forces canadiennes parce qu'elles savent six mois à l'avance que le militaire sera libéré. Elles ont six mois pour préparer la libération, alors pourquoi ne pas prendre les décisions nécessaires plus tôt, de manière à ce que le militaire ait ce souci de moins une fois le moment venu de poursuivre sa vie hors des forces armées?
D'autres témoins, en particulier la Légion royale canadienne et M. Tim Laidler, directeur administratif du Réseau de transition des vétérans, étaient d'accord avec les deux ombudsmans, concernant le ministère des Anciens Combattants et les Forces canadiennes.
Le problème est l'existence de ces deux vases clos : d'une part, le ministère des Anciens Combattants, dont les programmes, les règles et les mécanismes d'appel sont bien établis, et, d'autre part, les Forces canadiennes. C'est la période de transition qui cause certaines difficultés.
Carolyn Gasser, agente de service à la Direction nationale de la Légion royale canadienne, a déclaré ceci :
[...] lorsqu'il est prévu qu'un militaire sera libéré pour des raisons médicales, on pourrait agir plus tôt dans le processus et l'informer par écrit environ six mois avant sa libération.
Elle parle de six mois avant la libération.
À cette étape, son dossier est examiné par le directeur des politiques de santé au MDN. Selon nous, ce serait le moment idéal pour établir si la libération est attribuable ou non au service. Le militaire aurait six mois pour s'inscrire sur la liste de priorité afin de savoir plus tôt ce qu'il va faire dès qu'il sortira des forces.
La position de la légion est qu'il serait plus logique de laisser les forces armées prendre cette décision.
Il y en a d'autres — vous avez entendu la sénatrice Stewart Olsen — qui trouvent que puisqu'il a déjà les moyens de le faire, c'est le ministère des Anciens Combattants qui devrait continuer de déterminer si les blessures sont attribuables au service militaire. C'est le critère à remplir.
La position de la sénatrice Stewart Olsen dans le dossier est que, puisque les ministères des Anciens Combattants et de la Défense nationale reconnaissent tous deux combien la transition est difficile, ils s'efforceront de travailler en plus étroite collaboration. Après avoir entendu le ministre affirmer qu'il est conscient de ce problème, qui lui a été signalé par le Sénat et d'autres, je suis prêt à attendre de voir ce qu'il fera dans le dossier, dossier que nous continuerons néanmoins de surveiller de près.
M. Parent, un des ombudsmans, a également mis le sous-comité en garde contre d'éventuels problèmes découlant du fait que le projet de loi laisse la décision au ministère des Anciens Combattants. Il est important que la loi soit appliquée de manière à clairement refléter les différences potentielles entre l'attribution de la libération pour raisons médicales au service militaire et la détermination des prestations d'invalidité. Il y a tant d'étapes à franchir pour les anciens combattants. Mettez-vous à la place d'un ancien combattant atteint d'un trouble mental ou physique qui vient d'être libéré; imaginez avoir à répondre à tous ces critères, d'abord auprès du ministère des Anciens Combattants, et ensuite auprès du ministère de la Défense nationale, qui sera bientôt votre ancien employeur. Voilà de quoi s'inquiète l'ombudsman.
Essayons de simplifier les choses. Essayons de rationaliser le processus de manière à ce que les deux décisions ne reviennent pas à deux organes différents — ce qui serait le contre-pied de l'approche préconisée—, et tâchons d'accélérer le processus dans l'intérêt des anciens combattants.
Je me demande pourquoi, dans ce projet de loi, le gouvernement souhaite établir une distinction entre les anciens combattants qui ont été libérés pour des raisons médicales liées à leurs fonctions et ceux qui ont été libérés non pas à cause de leurs fonctions, mais simplement pour des raisons médicales. Le gouvernement créera ainsi au moins deux catégories différentes d'anciens combattants, ce qu'il faudrait éviter de faire, parce qu'un ancien combattant, c'est un ancien combattant, point final. Si c'est ce que l'on croit, alors il faudrait éviter les règles secondaires et les critères auxquels doivent se soumettre les anciens combattants.
J'aimerais aussi exprimer mes inquiétudes au sujet de la période de cinq ans précédant l'activation du droit de priorité. Le projet de loi prévoit deux périodes de cinq ans, ce qui complique encore les choses. Avons-nous vraiment besoin de ce délai de cinq ans? Le projet de loi prévoit que, lorsque les anciens combattants commencent à chercher un emploi dans la fonction publique, ils bénéficient d'un droit de priorité pendant seulement cinq ans. On peut se demander pourquoi cela est nécessaire. Les membres des Forces armées canadiennes libérés pour des raisons médicales peuvent bénéficier de ce droit de priorité une fois qu'ils ont été jugés aptes pendant une période de cinq ans.
Prenons le cas d'un ancien combattant libéré pour des raisons qui ne sont pas médicales ou qui ne sont pas liées au service ou au temps qu'il a passé dans l'armée. Si cet ancien combattant décide d'interjeter appel de la décision devant le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) en disant que la sclérose en plaques dont il souffre est attribuable à son service militaire, il faut parfois des années avant qu'on puisse démêler toutes ces choses. Par conséquent, le processus d'appel peut dépasser la période de cinq ans au cours de laquelle l'ancien combattant pourrait être déclaré apte au travail, ou pourrait constituer un problème grave avant qu'il perde les droits que nous tentons d'établir. Si ces deux périodes de cinq ans n'existaient pas, il n'y aurait pas de problème. Honorables sénateurs, l'ombudsman partage ces inquiétudes.
Les sénateurs d'en face ont aussi soulevé cette question, et on leur a répondu que la période de cinq ans commence au moment où l'ancien combattant a obtenu une libération honorable. Par contre, rien ne le précise dans le projet de loi. Bref, c'est l'agent s'occupant du dossier qui devra l'établir clairement, parce que la loi parle bien de cinq ans.
À mon avis, il est donc nécessaire, honorables sénateurs, de prolonger la période limite au-delà de cinq ans ou de la rendre illimitée — ce que je préférerais — et de préciser dans le projet de loi que le droit de priorité sera accordé aux anciens combattants chaque fois qu'une organisation compétente établit un lien entre la blessure et les fonctions exercées. Si la décision pouvait être prise par le ministère des Anciens combattants ou par le ministère de la Défense nationale, l'ancien combattant pourrait alors passer à autre chose. J'estime que c'est ce que nous voulons.
Honorables sénateurs, je veux parler aussi de la GRC. La GRC n'est pas visée cette fois-ci, même si elle l'était la première fois. Aucune raison n'a été donnée pour justifier que le nouveau droit de priorité ne s'applique pas à ses membres. Ce nouveau droit de priorité est absolu. Les militaires blessés et libérés des Forces armées en raison de leurs blessures ont la priorité absolue.
(1430)
Cette notion de priorité absolue est devenue importante parce que la loi prévoyait déjà une priorité dite réglementaire. Il y avait donc des priorités légales et des priorités réglementaires, et cela fonctionnait bien. Jusqu'à il y a deux ou trois ans, le système fonctionnait pour les militaires retraités des forces armées. Puis, tout à coup, il y a eu une importante réduction des effectifs en raison de la situation économique et plus de 25 000 fonctionnaires ont été mis à pied. Comme je l'ai dit plus tôt, les personnes mises à pied ont une priorité plus élevée.
Ainsi, les membres de la GRC et des Forces canadiennes, ainsi que les époux des militaires, se sont soudainement retrouvés au bas de la liste prioritaire et ils n'avaient aucune chance d'obtenir un emploi au moyen de la préférence qui avait été établie.
Voilà la raison d'être de cette mesure législative : elle vise à instaurer une nouvelle priorité absolue pour ceux qui ont été blessés pendant qu'ils étaient en service. Alors pourquoi ne pas inclure les agents de la GRC blessés pendant leur service au même titre que les membres des forces armées?
Les membres des Forces armées canadiennes ou de la Gendarmerie royale du Canada qui ont été libérés ou renvoyés pour des raisons médicales se retrouvent au bas de la liste de priorité réglementaire — je dis « au bas » parce que ma liste des différents niveaux de priorité est assez longue —, après les fonctionnaires qui ont été déclarés excédentaires, ceux qui sont en congé et ceux qui ont été mis à pied qui, eux, figurent plus haut dans la liste, comme je le disais plus tôt. Tous les fonctionnaires qui ont été mis à pied, les 25 000 personnes qui cherchent un nouveau poste dans la fonction publique ont préséance sur ces membres des forces armées et de la GRC.
Le gouvernement a seulement modifié le traitement des membres des forces armées blessés dans l'exercice de leurs fonctions : il leur accorde maintenant la priorité, mais les employés de la GRC demeurent au bas de la liste.
Honorables sénateurs, ce ne sont là que quelques-uns des points dont je voulais vous parler et qui, à mon avis, permettraient d'améliorer la mesure législative. Je voulais attirer l'attention du public sur ces enjeux, qui ont aussi été portés à l'attention du ministre. Je crois que ces changements seraient utiles.
Je ne proposerai pas un amendement pour chacun de ces éléments, mais je vais tout de même proposer un amendement parce que je crois sincèrement que le gouvernement a fait une omission en ce qui concerne les survivants d'anciens combattants, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. Le fait d'inclure, dans un projet de loi, une mesure que l'on ne peut appliquer est sans aucun doute une erreur. Ce type de mesure a déjà été valable, peu après la Première et la Seconde Guerres mondiales. En effet, à l'époque, il était indiqué d'accorder la priorité aux survivants des anciens combattants ayant succombé à des blessures subies alors qu'ils servaient leur pays.
Motion d'amendement
L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je propose :
Que le projet de loi C-27 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 12, à la page 4, par substitution, aux lignes 38 à 40, de ce qui suit :
« de laquelle elle était ancien combattant. ».
Voilà qui éliminerait la restriction actuelle, qui découle du fait que la définition de « survivant d'un ancien combattant » n'a pas été mise à jour en fonction de la nouvelle définition de l'expression « ancien combattant ».
Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Day, avec l'appui de l'honorable sénateur Mitchell, propose que le projet de loi C-27 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 12, à la page 4, par substitution, aux lignes 38 à 40, de ce qui suit :
« de laquelle elle était ancien combattant. ».
Nous poursuivons le débat?
Des voix : Le vote!
Son Honneur le Président intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix : Oui.
Son Honneur le Président intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.
Des voix : Non.
Son Honneur le Président intérimaire : De toute évidence, les non l'emportent. L'amendement est rejeté.
Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix : Le vote!
Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénatrice Stewart Olsen, avec l'appui de l'honorable sénatrice Marshall, propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois maintenant.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
Des voix : Avec dissidence.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté avec dissidence.)
La Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité
Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat
L'honorable Vernon White propose que le projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et d'autres lois, soit lu pour la troisième fois.
— Honorables sénateurs, j'aimerais tout d'abord remercier le comité, particulièrement son président, le sénateur Lang, et son vice-président, le sénateur Mitchell, pour le travail qu'il a accompli dans le dossier du projet de loi C-44.
Honorables sénateurs, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui au Sénat à titre de parrain du projet de loi C-44, Loi sur la protection du Canada contre les terroristes. Comme son titre l'indique, cette mesure contribuera à protéger les Canadiens contre ceux qui préfèrent la violence à la paix, la haine à l'ouverture, et le chaos à la démocratie.
Avant de décrire comment le projet de loi C-44 renforcera la sécurité des Canadiens, j'aimerais dire quelques mots sur l'évolution rapide des enjeux liés à la sécurité.
Depuis les événements tragiques du 11 septembre 2001 et la guerre qui a suivi en Afghanistan, le terrorisme a été associé à Al-Qaïda et aux talibans, deux groupes qui menacent toujours la sécurité internationale. En 2013, les talibans ont mené plus d'attaques terroristes que tout autre groupe connu. En parallèle, un groupe associé à Al-Qaïda poursuivait sa campagne de terreur contre le gouvernement du Yémen, une campagne qui nuisait aux intérêts militaires et occidentaux.
Plus récemment, un groupe qui a d'abord été une branche d'Al-Qaïda s'est ajouté au nombre des organismes terroristes connus des Canadiens : l'État islamique en Irak et au Levant, aussi appelé EIIL.
Ce groupe a commis des atrocités indicibles et les a effrontément affichées sur les médias sociaux. Ses actes non seulement déstabilisent l'Irak, la Syrie et l'ensemble de la région, mais menacent le Canada ainsi que nos intérêts et nos valeurs.
L'EIIL est connu des services du renseignement depuis un certain temps, mais ses attaques sont devenues plus fréquentes, plus complexes et plus mortelles. En 2013, l'EIIL arrivait au second rang après les talibans pour le nombre d'attaques perpétrées. Selon les Nations Unies, les actes commis par l'EIIL auraient tué près de 8 000 personnes seulement cette année-là.
Je récapitule ces faits pour faire comprendre à quel point la situation évolue vite dans le domaine de la sécurité internationale. Aucun pays ne peut rester les bras croisés devant une menace qui change continuellement. Un pays qui choisirait de ne pas réagir ferait courir de grands risques à ses citoyens.
Les dangers sont réels. En 2013, à Nairobi, deux Canadiens étaient au nombre des victimes d'une attaque d'al-Chabaab. Le Canada n'était peut-être pas ciblé cette fois, mais des vies canadiennes ont quand même été perdues.
Nous devons toutefois reconnaître que les Canadiens ne sont pas seulement victimes de terrorisme; ils peuvent aussi être des assaillants. Nous nous rappelons tous que deux hommes ont été accusés de comploter en vue de l'attaque d'un train de VIA Rail. Je crois qu'ils ont été reconnus coupables il y a quelques jours.
Nos services du renseignement et nos forces policières ont aussi travaillé ensemble à contrecarrer une attaque contre l'assemblée législative, à Victoria. Cette affaire est actuellement devant les tribunaux.
Les attaques perpétrées sur notre territoire en octobre 2014 sont encore fraîches dans l'esprit de tous les Canadiens, et surtout de ceux qui fréquentent la Colline.
Nous entendons régulièrement parler de Canadiens arrêtés par la GRC ou accusés pour des raisons liées au terrorisme, et de Canadiens soupçonnés d'avoir participé à des actes terroristes ou d'avoir tenté de voyager à l'étranger à cette fin. Le fait que des citoyens de pays occidentaux, y compris du Canada, se joignent à la cause du terrorisme à l'étranger préoccupe grandement notre gouvernement.
C'est pourquoi nous demeurons fermement résolus à faire ce qu'il faut pour bâtir un Canada plus fort et plus sûr.
Nous avons pris clairement cet engagement en 2012, quand nous avons annoncé la première stratégie antiterroriste de notre pays. Cette stratégie est composée de quatre volets qui se renforcent les uns les autres : empêcher les individus de commettre des actes terroristes; déceler les activités, menées par des personnes ou des organisations, qui pourraient représenter une menace terroriste; priver les terroristes des moyens et des possibilités de poser des actes; intervenir en conséquence, rapidement et de façon organisée, pour atténuer les effets des activités terroristes.
(1440)
Dans le cadre de cette stratégie, nous produisons chaque année un rapport public sur la menace terroriste pour le Canada. Le rapport de 2014 a mis l'accent sur l'extrémisme violent et la meilleure façon d'intervenir auprès des personnes voulant se rendre à l'étranger pour soutenir des actes terroristes.
Nous nous sommes également attaqués à ce problème en présentant un certain nombre de nouvelles mesures législatives. Parmi ces dernières, mentionnons la Loi sur la lutte contre le terrorisme, qui criminalise le fait de se rendre à l'étranger, ou de tenter de s'y rendre, pour se livrer à des activités terroristes.
Plus récemment, le gouvernement a présenté le projet de loi C-51, un projet de loi important conférant des pouvoirs accrus, qui, à mon avis, renforcera les capacités du Canada en matière de sécurité nationale de multiples façons.
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, le C-44, est certainement d'une portée beaucoup plus limitée, mais il permet néanmoins de renforcer notre programme de sécurité. Il apporte à deux lois des modifications qui aideront à déceler les menaces terroristes et à priver les terroristes des moyens de les mettre à exécution.
Permettez-moi de parler des principales dispositions du projet de loi.
Premièrement, comme tous les sénateurs s'en souviendront, la Loi renforçant la citoyenneté canadienne a reçu la sanction royale en juin 2014. Cette loi élargit les motifs de révocation de la citoyenneté canadienne, en plus de simplifier le processus décisionnel à cet égard.
Une fois que les dispositions sur la révocation seront en vigueur, il sera possible de révoquer la citoyenneté canadienne des personnes ayant une double citoyenneté qui ont été reconnues coupables de terrorisme, de haute trahison, de trahison ou d'espionnage, selon la peine infligée.
Elles permettront aussi de révoquer la citoyenneté des gens qui ont la double citoyenneté et qui ont été membres d'une force armée d'un pays ou d'une organisation armée en conflit avec le Canada.
Ces dispositions envoient clairement un message important aux personnes qui se servent de leur passeport canadien pour se livrer à des activités terroristes à l'étranger. Nous ne tolérerons pas cet abus de la citoyenneté canadienne.
Actuellement, le processus décisionnel est lent et la révocation de la citoyenneté peut prendre jusqu'à trois ans. Voilà pourquoi les modifications prévues dans la Loi renforçant la citoyenneté canadienne simplifient également le processus décisionnel lié à la révocation tout en assurant l'équité et le respect des droits individuels.
Afin de ne pas retarder la mise en œuvre de ces mesures, le projet de loi C-44 comprend des modifications techniques autorisant le devancement de l'entrée en vigueur des dispositions de révocation prévues dans la Loi renforçant la citoyenneté canadienne.
Je passe maintenant au deuxième élément de ce projet de loi, à l'essentiel des modifications que nous proposons, à savoir les modifications apportées à la Loi sur le SCRS, laquelle n'a pas été modifiée depuis qu'elle a été adoptée il y a quelque 30 ans.
Plus particulièrement, ce projet de loi : confirmerait le pouvoir actuel du SCRS de mener des activités à l'étranger pour recueillir des renseignements sur les menaces à la sécurité du Canada; confirmerait le pouvoir de la Cour fédérale de décerner des mandats autorisant le SCRS à entreprendre des activités intrusives à l'étranger; préciserait que la Cour fédérale doit fonder sa décision de décerner ou non de tels mandats uniquement sur la Loi sur le SCRS et la Charte canadienne des droits et libertés; créerait une protection automatique de l'identité des sources humaines du SCRS; étendrait les protections existantes de l'identité des employés du SCRS qui ont participé, participent ou seront probablement appelés à participer à des opérations secrètes.
Les modifications proposées dans le projet de loi C-44 sont modestes, mais essentielles pour que le SCRS puisse remplir son mandat.
En répondant aux questions soulevées par la Cour fédérale, le projet de loi confirme certains pouvoirs que le Parlement a toujours eu l'intention de conférer au SCRS. Il ne modifie aucun des mécanismes mis en place pour protéger les droits des Canadiens. De plus, et c'est tout aussi important, il ne modifie pas le mandat fondamental du SCRS. Il garantit plutôt que le SCRS peut, comme le prévoit son mandat, enquêter sur les menaces à la sécurité du Canada.
De toute évidence, les enquêtes du SCRS ne peuvent pas s'arrêter à nos frontières. Le SCRS doit être en mesure de poursuivre ses enquêtes partout où elles le mènent, afin de pouvoir comprendre les menaces qui nous guettent et de conseiller le gouvernement en conséquence. Ces changements ne modifieront pas le mandat actuel du SCRS, qui collecte des renseignements touchant l'étranger ici, au Canada, et ils ne transformeront pas non plus cette organisation en un service de renseignement étranger.
Donc, je le répète, ces modifications ne changeront aucunement le rôle du service en ce qui concerne le renseignement étranger, rôle qui est clairement défini dans la Loi sur le SCRS et qui se limite à la collecte de renseignements ici, au Canada. C'est une distinction essentielle qui est parfois mal comprise. Les modifications portent sur le mandat du service, qui doit faire enquête sur les menaces à notre sécurité.
Le SCRS exerce déjà certaines activités à l'étranger. Les modifications proposées lui donneront le pouvoir explicite de mener de telles activités, mais elles ne changeront rien à sa présence à l'étranger. Les activités à l'étranger présentent des risques inhérents. Ces risques sont reconnus et pris en compte dans la directive ministérielle ainsi que dans les politiques opérationnelles du SCRS.
Pour toutes ces raisons, j'appuie ces modifications, qui confirmeront que le SCRS a le pouvoir de mener des enquêtes relatives à la sécurité nationale, tant au Canada qu'à l'étranger.
Je vais maintenant parler des préoccupations qui ont été soulevées quant à savoir si le SCRS respectera ou ne respectera pas les lois d'un pays hôte lorsqu'il exerce ses activités à l'étranger.
Je pense que le directeur du SCRS a été très clair lorsqu'il s'est adressé aux membres du comité de l'autre endroit. Il a dit que dans la majorité des cas, les pays hôtes savent que le SCRS mène des activités sur leur territoire, et que bien souvent, ils participent à ces activités. Il a fait valoir que cette collaboration est essentielle pour cerner des pistes et comprendre les menaces qui pèsent sur le Canada. Bien franchement, cette collaboration est souvent avantageuse pour les deux parties.
Dans d'autres cas, par exemple lorsqu'il est question d'un pays qui ne partage pas des vues similaires aux nôtres, il se peut que le SCRS soit tenu de mener ses activités en secret, sans que le pays hôte en soit informé. Il se peut aussi que le SCRS doive mener une opération justifiée à l'étranger afin de recueillir des renseignements sur une menace à la sécurité nationale du Canada. Je tiens à ce que les choses soient claires : le consentement d'un partenaire étranger n'équivaut pas à une autorisation. Le mandat du SCRS et ses pouvoirs d'enquête lui sont confiés par les lois canadiennes. C'est pour cette raison qu'il est essentiel que la Cour fédérale soit clairement autorisée à délivrer des mandats, le cas échéant.
Même si certains ont laissé entendre que de telles activités étaient irrégulières et sans précédent, je peux garantir aux sénateurs que ce n'est tout simplement pas le cas.
Ces activités ne devraient surprendre personne ici. Si les hommes et les femmes dévoués du SCRS ne faisaient pas leur travail, qui comprend la collecte de renseignement à l'étranger, le Canada serait moins en sécurité.
La plupart des partenaires du Groupe des cinq ont une agence mandatée pour enquêter à l'étranger. Le SCRS, toutefois, a besoin d'une autorisation judiciaire pour recourir à certaines techniques d'enquête. De leur côté, certains de nos plus proches alliés s'en remettent à des autorisations exécutives ou ministérielles, ce qui veut dire qu'ils n'ont pas besoin de définir expressément dans une loi le champ de compétence des tribunaux ni le mode d'application des lois nationales. Le régime d'autorisation judiciaire prévu dans la Loi sur le SCRS, combiné aux directives et à la reddition des comptes ministérielles ainsi qu'à un examen indépendant rigoureux, fournit un cadre solide pour les activités du SCRS à l'étranger.
J'appuie donc ces modifications et je demeure convaincu que le SCRS respecte la Charte canadienne des droits et libertés, la Loi sur le SCRS et nos valeurs.
Le dernier élément de ce projet de loi dont je vais parler est l'ensemble des modifications concernant la protection des sources humaines. Ces modifications prévoient la protection de l'identité des sources humaines du SCRS. Les sénateurs devraient savoir que cette disposition ne crée pas un précédent. Dans notre pays, les informateurs de police reçoivent déjà une protection semblable en vertu de la common law.
Cela dit, même avec ces modifications, les juges garderont leur pouvoir de divulguer l'identité d'une source humaine du SCRS si cette information est nécessaire pour prouver l'innocence d'un accusé dans une affaire criminelle.
J'ai été heureux de constater que M. Tom Stamatakis, président de l'Association canadienne des policiers, a pris la parole à l'autre endroit durant l'étude de ce projet de loi. Il a parlé au comité du point de vue des enquêtes, sujet souvent absent de ces discussions. M. Stamatakis a confirmé qu'il est essentiel de protéger l'identité des informateurs, tant pour les enquêtes criminelles que celles touchant la sécurité nationale, comme celles que mène le SCRS.
M. Stamatakis nous a donné un aperçu inédit de la manière dont les sources humaines contribuent souvent à plus d'une enquête et il a dit que, en faisant éclater leur anonymat, nous pourrions évidemment nuire à leur sécurité, mais aussi compromettre des mois, voire des années d'enquête. De toute évidence, sans ces dispositions, le SCRS aurait beaucoup de mal à recruter et à protéger les sources humaines auprès de qui il obtient de précieux renseignements. Il va aussi en avoir besoin pour assurer la sécurité de ces mêmes sources et de leurs proches.
Honorables sénateurs, le SCRS doit disposer des outils dont il a besoin pour faire enquête sur les menaces qui pèsent contre le Canada et assurer notre sécurité. Or, sans les modifications prévues dans ce projet de loi, il nagerait dans l'incertitude.
J'invite l'ensemble des sénateurs à appuyer ce projet de loi important, car il permettra de protéger la citoyenneté canadienne et d'en renforcer les assises, en plus de fournir au SCRS les pouvoirs dont il a besoin pour faire son travail. Je vous remercie.
(Sur la motion du sénateur Mitchell, le débat est ajourné.)
(1450)
Le Budget des dépenses de 2015-2016
Le Budget principal des dépenses—Adoption du dix-septième rapport du Comité des finances nationales
Le Sénat passe à l'étude du dix-septième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales (Premier rapport intérimaire sur le Budget principal des dépenses 2015-2016), déposé au Sénat le 24 mars 2015.
L'honorable Joseph A. Day propose que le rapport soit adopté.
— Honorables sénateurs, vous avez sous les yeux maintenant un document qui fait suite à celui dont j'ai parlé hier, soit le seizième rapport de notre comité, qui portait sur le Budget supplémentaire des dépenses (C), destiné à clore l'année financière se terminant à la fin de mars. Nous parlons maintenant du Budget principal des dépenses pour l'année 2015-2016, qui commence le 1er avril.
Nous avons reçu ces budgets le 1er mars. Notre comité a examiné le Budget principal des dépenses, et nous savons que des projets de loi nous sont arrivés aujourd'hui, honorables sénateurs. Je crois qu'il s'agit des projets de loi C-54 et C-55, qui sont arrivés aujourd'hui au Sénat. Ils vont de pair avec ces rapports. Nous avons vu hier le rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (C). Vous l'avez déjà reçu.
Vous avez maintenant sous les yeux le second rapport. Nous allons étudier les deux projets de loi. Le premier est un projet de loi de crédits qui accorde au gouvernement la somme nécessaire pour terminer l'année financière prenant fin le 31 mars 2015, tandis que le second projet de loi vise à accorder des crédits provisoires au gouvernement pour que l'État puisse continuer de fonctionner jusqu'à ce que nous accordions les crédits définitifs à la fin de juin. Donc, les crédits provisoires portent sur une période de trois mois.
Je n'ai pas encore reçu un exemplaire de l'un ou l'autre de ces projets de loi, mais ils nous seront remis bientôt. Il serait normal de s'attendre à ce que, dans ces projets de loi, les dépenses prévues soient constantes pour chaque mois. Les crédits provisoires demandés portent sur trois mois, soit avril, mai et juin, et on pourrait s'attendre à ce qu'ils ne varient pas d'un mois à l'autre. Cependant, honorables sénateurs, certains ministères dépensent davantage au début de l'année, donc la courbe des dépenses en fonction du temps n'est pas une ligne droite. Il en est question dans ce rapport.
Le comité a rédigé le présent rapport après avoir commencé son étude du budget des dépenses pour l'année. Honorables sénateurs, il s'agit du dix-septième rapport du comité.
Le Budget principal des dépenses expose les sommes que le gouvernement fédéral et ses organismes comptent dépenser au cours du prochain exercice. Il arrive que ces sommes soient légèrement modifiées dans les Budgets supplémentaires des dépenses, dont on a parlé hier. On commence à préparer le Budget principal des dépenses en janvier, voire décembre, en examinant les sommes dépensées l'année précédente et en déterminant de manière générale les budgets que les divers ministères aimeraient avoir pour l'année suivante. Le Budget principal des dépenses dont il est question prévoit des dépenses totales s'élevant à 241 milliards de dollars, honorables sénateurs. Cela comprend les postes législatifs et les crédits votés.
Le projet de loi relatif aux crédits provisoires dont vous serez bientôt saisis contiendra seulement les crédits votés. Le total des crédits votés s'élève plus ou moins à 88 milliards de dollars, et la semaine prochaine, on vous demandera de voter les trois douzièmes des crédits, soit un quart de 88 milliards de dollars, plus ou moins, selon les dépenses que les ministères prévoient effectuer dans les trois premiers mois.
Honorables sénateurs, le comité a entendu les représentants de cinq ministères qui sont venus décrire les dépenses prévues pour l'année. Il est important de se souvenir qu'il s'agit seulement du Budget principal des dépenses. Ainsi, lorsque le budget sera présenté, nous aurons connaissance de certaines des initiatives que le gouvernement compte lancer. On donnera suite à ces initiatives dans les Budgets supplémentaires des dépenses, et les fonds dont les ministères ont besoin pour appliquer les décisions stratégiques énoncées dans le budget figureront dans les Budgets supplémentaires des dépenses. Ces sommes ne figurent pas dans le Budget principal des dépenses, encore moins dans les crédits provisoires.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor nous a rencontrés, comme à son habitude, et nous a beaucoup aidés. Puisque c'est au Conseil du Trésor que se retrouvent toutes ces demandes de financement, son personnel connaît bien les postes budgétaires; c'est pourquoi les premiers témoins que nous convoquons dans le cadre de notre étude des affectations budgétaires des ministères viennent toujours du Conseil du Trésor.
Nous avons cru bon de demander à la GRC de venir nous parler — ce qu'elle a fait —, et de consulter également la Société canadienne d'hypothèques et de logement, l'Agence du revenu du Canada et le Bureau de l'infrastructure Canada. Vous remarquerez que, parmi ces organismes, il y en a que nous consultons assez fréquemment parce qu'ils s'occupent de questions qui revêtent un intérêt particulier pour notre comité. Il y a d'autres organismes que nous n'avons pas consultés depuis longtemps. Nous consultons normalement les organismes qui font des dépenses majeures ou dont les dépenses présentent des écarts considérables par rapport aux dépenses des années précédentes.
Avant de parler du rapport, j'aimerais prendre quelques minutes pour expliquer le lien entre le Budget principal des dépenses et le budget. J'en ai parlé plus tôt. Le Sénat ne se prononce pas sur le budget. La Chambre des communes le fait, mais pas nous. De plus, en général, le Sénat ne se prononce pas sur le budget des dépenses ni sur son libellé. Le Sénat se prononce sur les projets de loi de crédits liés au budget des dépenses, ainsi que sur le projet de loi d'exécution du budget lié au budget. Voilà ce sur quoi le Sénat se prononce, et c'est ainsi que le Sénat peut appuyer ou non les initiatives du gouvernement.
Le cycle budgétaire exige que le Budget principal des dépenses soit déposé au plus tard le 1er mars. À moins d'un problème majeur, son dépôt ne peut être reporté, contrairement au dépôt du budget, que le ministre des Finances a décidé de reporter à avril, ou peut-être plus tard encore.
Comme je l'ai dit plus tôt, le budget des dépenses fournit des renseignements sur les dépenses que chacun des ministères et des organismes fédéraux compte faire au cours du prochain exercice financier, et il s'agit des montants maximaux qu'on nous demande d'approuver. Puisque l'exercice financier commence le 1er avril, et que le Parlement n'a pas fini d'établir le budget des dépenses, nous sommes saisis de ces estimations provisoires. Nous nous pencherons ensuite sur le Budget principal des dépenses, en juin.
Le ministre des Finances dépose le budget à la Chambre des communes, mais, contrairement à ce qui se fait à l'autre endroit, nous, sénateurs, ne votons que sur les projets de loi qui sont issus de ce processus, soit un ou deux projets de loi d'exécution du budget.
Le budget est un document stratégique qui propose diverses mesures, notamment en matière de fiscalité et de politiques, qui y figurent à titre d'information et sur lesquelles cette Chambre n'a pas à voter. Dans ce domaine, le Sénat n'est pas habilité à prendre un vote de confiance.
Après le dépôt du budget, un projet de loi d'exécution du budget est généralement présenté avant l'été. Je m'attends à ce que ce soit encore le cas. Le sénateur Smith et moi, de même que les autres membres du comité, adapterons notre horaire en conséquence lorsque nous le recevrons dans l'espoir de l'étudier dans les plus brefs délais, conformément au Règlement.
En théorie, le projet de loi d'exécution du budget vise à mettre en œuvre les changements et les politiques proposés dans le budget. Cependant, comme nous l'avons constaté précédemment, beaucoup de mesures disparates s'y glissent souvent, ce qui nous complique grandement la tâche, car des centaines de pages d'un projet de loi omnibus du budget qui devrait traiter de finances recèlent alors toutes sortes de mesures d'ordre non financier.
Le budget des dépenses précède le budget, comme je l'ai déjà dit, c'est pourquoi il y a également un Budget supplémentaire des dépenses.
Cela dit, honorables sénateurs, passons maintenant aux témoignages et à certains points qui en sont issus, comme les rapporte le dix-septième rapport. Je n'aborderai pas systématiquement tous les points qui y figurent. Le temps finirait par me manquer si je les abordais tous, mais il y a quand même certains points qui pourraient vous intéresser et vous aider à comprendre pourquoi vous allez vous prononcer, la semaine prochaine, sur l'affectation de milliards de dollars. Je vous les expose, pour que vous ayez au moins une idée générale du processus.
(1500)
Aux affectations destinées aux ministères et organismes fédéraux, le Conseil du Trésor ajoute 750 millions de dollars pour les urgences et les imprévus. Si vous regardez dans votre document, le tout se trouve au crédit 5, Conseil du Trésor. Cet argent est mis de côté dans l'éventualité où le gouvernement aurait besoin rapidement de liquidités et serait dans l'impossibilité de demander l'autorisation du Parlement.
Cet argent serait utilisé si nous nous trouvions à une étape du cycle budgétaire où nous serions trop loin du moment où serait présenté le projet de loi de crédits pour attendre l'autorisation du Parlement, ou même un des projets de loi associés aux crédits supplémentaires. Voilà à quoi servent les 750 millions en question. Dans la section « Conseil du Trésor » se trouve un aperçu de l'usage qui pourrait en être fait. Si ce fonds d'urgence devait servir, le Conseil du Trésor indiquerait au Parlement quelle portion a été utilisée et lui demanderait, dans un Budget supplémentaire des dépenses ou dans un projet de loi de crédits connexe, de le regarnir. À la fin de l'exercice, il devra donc contenir de nouveau 750 millions de dollars, puisque les fonds dépensés doivent être remplacés. Il est ainsi possible de demander aux ministères concernés de rembourser les fonds utilisés.
Honorables sénateurs, ce fonds a par exemple servi, dernièrement, à acheter l'édifice à bureaux situé au 2-4, rue Cockspur, à Londres, en Angleterre. Les sommes requises ont alors été transférées au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement du Canada afin qu'il puisse acquérir l'immeuble juste à côté de la Maison du Canada, située Trafalgar Square. Le ministère devait faire vite, et c'est pourquoi il a demandé à puiser dans le fonds d'urgence. Les travaux de rénovation sont maintenant terminés, et les nouveaux locaux viennent tout juste d'être inaugurés officiellement.
Le Conseil du Trésor nous a informés que ce fonds de 750 millions de dollars est distinct du fonds pour éventualités de 3 milliards de dollars dont le ministre des Finances parle. Le fonds de 3 milliards de dollars fait partie du cadre financier global du ministère des Finances et sa raison d'être est de parer aux éventualités, comme une chute du cours du pétrole dans l'industrie de l'extraction qui se traduirait par une baisse des recettes fiscales du gouvernement fédéral. Le fonds de 3 milliards peut alors être utilisé pour d'autres dépenses et d'autres mesures que le gouvernement veut prendre.
Nous avons longuement discuté du fonds pour éventualités et du crédit 5 avec les représentants du Conseil du Trésor. Nous ne nous étions pas entretenus avec eux de leurs activités particulières depuis un certain temps. Ils nous parlent habituellement d'autres activités, mais dans ce cas-ci, cela nous a été utile et j'ai fait circuler certains des points saillants.
La GRC demande 2,6 milliards de dollars de plus pour des initiatives comme un programme pour indemniser à vie ses membres blessés dans l'exercice de leurs fonctions. Cette partie du fonds s'apparente à ce dont nous venons de parler pour le personnel des forces armées blessé en service. Le programme sur lequel nous nous sommes penchés lors de l'étude du projet de loi C-27 est maintenant repris pour la GRC. Lors du débat sur le projet de loi C-27, j'ai demandé pourquoi nous ne garderions pas le personnel de la GRC et de la Défense nationale dans le même programme. C'est logique et cela simplifierait beaucoup les choses. Il n'y aurait pas de dédoublement et on n'aurait pas un programme de plus. Toutefois, on trouvait que, pour l'instant...
Son Honneur le Président intérimaire : Je regrette d`interrompre le sénateur Day, mais je dois l'informer que son temps de parole est écoulé.
Le sénateur Day : Puis-je demander un peu plus de temps pour terminer?
Son Honneur le Président intérimaire : Les sénateurs accordent-ils cinq minutes de plus au sénateur Day?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Day : Je vous remercie, honorables sénateurs. J'ai presque fini. Je voulais que vous soyez au courant de certaines questions. Je parlais du cloisonnement.
La Société canadienne d'hypothèques et de logement demande 2 milliards de dollars pour aider les familles à faible revenu, les aînés, les Autochtones, les personnes handicapées et les victimes de violence familiale. Elle estime qu'on devrait affecter 2 milliards de dollars à cette initiative en matière de logement.
Certains membres du comité ont posé des questions sur les fonds visant à améliorer les conditions de vie des Premières Nations vivant dans les réserves. Nous savons qu'il s'agit d'un problème très grave au Canada. Nous devons nous y attaquer et continuer de poser des questions.
Selon la Société canadienne d'hypothèques et de logement, environ 150 millions de dollars serviront à construire de nouvelles habitations, à rénover celles qui existent déjà et à verser des subventions pour les gens qui habitent dans les logements sociaux. Vous pouvez constater qu'il s'agit de sommes importantes. Certains pourraient douter de l'utilité de telles dépenses; nous devrions peut-être surveiller un peu plus étroitement les fonds consacrés au logement et ce à quoi ils servent, pour nous assurer que l'argent est dépensé judicieusement. Les parlementaires ont notamment le devoir de vérifier que les fonds publics permettent bien de s'attaquer aux grands problèmes du Canada.
L'Agence du revenu du Canada demande 3,8 milliards de dollars supplémentaires pour améliorer divers programmes de conformité et administrer des mesures fiscales. Hier, nous avons appris qu'elle accepte dorénavant les cartes de crédit et que 1,5 p. 100 des sommes ainsi collectées iront aux banques et aux sociétés émettrices de cartes de crédit.
Le dernier organisme dont je veux vous parler, honorables sénateurs, est le Bureau de l'infrastructure du Canada. C'est le responsable du pont à Montréal — pas le pont de Windsor, mais le remplacement du pont à Montréal. Le bureau est très satisfait des progrès relativement aux plans, et considère qu'il n'y a pas eu de temps perdu jusqu'à maintenant. Je pense que la prochaine partie du plan de construction risque d'être un peu ambitieux. Nous allons le surveiller de près à cet égard.
Honorables sénateurs, en examinant le budget des dépenses, on constate que les paiements de transfert représentent une somme faramineuse. De l'ensemble des recettes du gouvernement, 148 milliards de dollars sont transférés aux provinces ou consacrés aux personnes âgées et à d'autres formes de transferts. Les dépenses de fonctionnement et en capital s'élèvent à 67 milliards de dollars, comparativement à des transferts de 148 milliards. Vous pouvez voir qu'une part énorme des activités du gouvernement fédéral consiste à transférer de l'argent aux provinces et à différents secteurs.
Par ailleurs, les frais de la dette publique représentent une importante somme de 25 milliards de dollars. Plus notre dette est élevée en raison des déficits qui s'accumulent chaque année, plus les frais de la dette sont élevés, ce qui laisse moins d'argent à consacrer aux transferts, aux soins de santé et aux services sociaux. Cela réduit également l'argent qu'on peut consacrer aux personnes âgées et aux dépenses de fonctionnement.
(1510)
Nous ne devons pas l'oublier, honorables sénateurs. Les frais de la dette publique sont peu élevés maintenant en raison des taux d'intérêt. En fait, le ministère des Finances réclame moins d'argent dans le Budget principal des dépenses pour couvrir ces frais parce qu'il croit que les taux d'intérêt demeureront faibles. Honorables sénateurs, c'est quelque chose d'autre que nous devons surveiller attentivement. Si les taux d'intérêt augmentent, nous aurons beaucoup de difficulté à respecter nos autres obligations.
Merci, honorables sénateurs.
Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter le rapport?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
[Français]
Le Code criminel
Projet de loi modificatif—Troisième lecture—Ajournement du débat
L'honorable Pierre-Hugues Boisvenu propose que le projet de loi C-452, Loi modifiant le Code criminel (exploitation et traite de personnes), soit lu pour la troisième fois.
— Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture du projet de loi d'initiative parlementaire C-452, Loi modifiant le Code criminel (exploitation et traite de personnes).
Ce projet de loi vise essentiellement à renforcer la réponse du système judiciaire à l'égard de l'une des violations les plus odieuses des droits et libertés de la personne, la traite de personnes.
La traite de personnes est souvent qualifiée de forme contemporaine d'esclavage. Les criminels recrutent, transportent et hébergent les victimes en vue de les exploiter. Il s'agit habituellement d'exploitation sexuelle ou de travail forcé. Les trafiquants adoptent une conduite amenant leurs victimes à croire que leur sécurité serait en danger si elles refusaient de fournir le travail ou les services exigés d'elles. D'ailleurs, ces criminels trafiquants n'hésitent pas à recourir aux menaces et à l'intimidation afin de dissuader leurs victimes de sortir du piège dans lequel elles sont tombées et à ne pas les dénoncer, et, éventuellement, à témoigner contre eux.
En résumé, les victimes sont privées de leur liberté. Elles sont victimes de sévices horribles, sont forcées à vivre dans des conditions inhumaines; elles doivent offrir leurs services — sexuels ou autres — au risque de faire face aux conséquences les plus terribles : menaces, déshumanisation, violence ou, pire, la perte de leur vie.
Je ne parle pas seulement d'adultes, mais aussi d'adolescentes, de fillettes même. Un crime si grave nécessite la prise des mesures les plus rigoureuses en droit pénal. C'est ce que vise le projet de loi C-452, que je vous demande ardemment d'appuyer aujourd'hui.
Quelles sont les modifications que propose ce projet de loi?
Premièrement, le projet de loi créerait une présomption de preuve, permettant ainsi d'aider la Couronne à établir la perpétration d'une traite de personnes.
Les victimes sont vulnérables et craignent leurs trafiquants. Cet ajout permettrait aux poursuivants d'établir la perpétration de l'infraction de traite de personnes en présentant la preuve qu'un accusé vit avec une personne exploitée, ou se trouve habituellement en sa compagnie.
Dans l'esprit de ce paragraphe, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de l'autre Chambre a amendé la proposition proposée par le projet de loi C-452 pour l'harmoniser avec la présomption qui s'applique à l'infraction de proxénétisme. Je salue donc cette approche.
Les amendements contribueront à l'atteinte d'importants objectifs du projet de loi à cet égard : veiller à ce que les trafiquants répondent de leurs crimes odieux.
Deuxièmement, le projet de loi exigerait aussi que la peine infligée à un trafiquant pour une infraction de traite soit purgée consécutivement à toute peine sanctionnant une autre infraction basée sur les mêmes faits, car, malheureusement, la traite de personnes comporte presque toujours de multiples infractions s'y rattachant, notamment les voies de fait, les agressions sexuelles, diverses menaces, la séquestration, l'enlèvement et les infractions liées à la prostitution ou aux organisations criminelles.
Contrairement à d'autres crimes, la traite de personnes s'étend sur de longues périodes. Les trafiquants utilisent diverses méthodes pour exploiter leurs victimes à des fins personnelles. La loi doit prendre acte de l'ensemble de cette conduite et de ses terribles répercussions sur les victimes. La peine infligée au trafiquant doit tenir compte de chaque acte criminel commis. Une telle approche servira efficacement les principes de dissuasion et de dénonciation.
Troisièmement, concernant l'application des dispositions sur la confiscation prévues au Code criminel, le projet de loi imposerait au trafiquant le fardeau de prouver que ses biens ne constituent pas des produits de la criminalité. Personne ne devrait pouvoir profiter de la souffrance des autres. Pourtant, il est indéniable que c'est ce qui se produit lorsque quelqu'un fait la traite de personnes. La loi ne doit pas permettre aux trafiquants de conserver leurs gains mal acquis. Le projet de loi C-452 offrirait aux responsables de l'application de la loi les outils nécessaires pour atteindre cet objectif important : il faciliterait l'élimination de l'incitatif à s'adonner à la traite de personnes.
[Traduction]
En résumé, les principaux objectifs du projet de loi consistent à tenir les trafiquants responsables de leurs gestes, à imposer des peines reflétant la gravité de leurs crimes et à faire en sorte qu'ils ne profitent pas des fruits de leurs actes illégaux.
[Français]
Les victimes et experts qui ont témoigné devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles nous ont éclairés sur l'urgence d'agir.
Nous avons d'abord reçu la députée Maria Mourani, marraine du projet de loi à l'autre endroit, que je salue aujourd'hui pour sa persévérance et sa patience. Elle nous a rappelé que près de 80 p. 100 des victimes ne dénoncent pas leur agresseur. C'est l'une des raisons fondamentales pour laquelle le renversement du fardeau de la preuve de l'accusé représente un changement très important.
Nous avons entendu le sergent-détective Dominic Monchamp, qui est reconnu par les tribunaux québécois comme un expert en la matière. Il fait partie d'une division spéciale de la police de Montréal depuis 21 ans. Il est venu nous rappeler que le renversement du fardeau de la preuve ne condamnerait pas des innocents, des personnes qui voudraient aider les prostituées ou des personnes qui sont dans le milieu de la traite de personnes.
Il a déclaré ce qui suit :
[...] cette disposition a pour but d’aider les personnes qui ne sont pas en mesure de s’en sortir, qui ont peur de s’en sortir, qui ont peur de parler. Ceci fait en sorte qu’on peut se servir d’autres types de preuves pour alimenter l’accusation contre les trafiquants.
Il a dit aussi que les cas qu'on rencontre sont vraiment des cas d'esclavagisme. Les jeunes filles et les fillettes sont torturées, violées, séquestrées et forcées à se prostituer.
L'Association du Barreau canadien a soulevé des questions sur la constitutionnalité de ce projet de loi, plus particulièrement au sujet de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve. Bien que je respecte son opinion, fondée sur la perception unidirectionnelle des avocats de la défense, il est clair qu'elle ne correspond pas à la réalité légale.
En effet, Nathalie Levman, qui est avocate à la Section de la politique en matière à droit pénal de Justice Canada, est considérée comme une experte, non seulement sur ce sujet, mais aussi en ce qui concerne le très important projet de loi C-36. Elle a été très claire sur cette question. Elle a dit ce qui suit, et je cite :
Quand on se penche sur la présomption de preuve proposée dans le projet de loi C-452, il devient évident que pour invoquer la présomption, la couronne devrait prouver un certain nombre de choses, à savoir que l'accusé n'a pas été exploité, que la personne qui a porté plainte l'a été et que l'accusé vivait avec la personne exploitée ou se trouvait habituellement en sa compagnie. Une fois que cela a été prouvé, l'accusé pourrait signaler ou produire des éléments de preuve qui soulèvent des doutes raisonnables sur le fait présumé ou substitué, et c'est de cette façon que la présomption de preuve dans le projet de loi C-452 fonctionnerait.
(1520)
Honorables sénateurs, les objectifs de présomption de preuve que l'on retrouve dans les anciens articles du Code criminel ou les nouveaux articles prévus dans le projet de loi C-452 sont tous les mêmes : ils visent à reconnaître que les victimes de relations fondées sur l'exploitation sont vulnérables et qu'elles ont beaucoup de difficulté à dénoncer ceux qui les exploitent.
Finalement, retenons que Mme Levman a déclaré ce qui suit :
Les circonstances de chaque affaire sont prises en compte dans l'application de la loi. C'est en quelque sorte l'inverse de la norme régulière du droit pénal. Il revient à la Couronne de prouver qu'une infraction criminelle a été commise hors de tout doute raisonnable. Tout ce que l'accusé doit faire, c'est de soulever un doute raisonnable quant à la perpétration de l'infraction ou encore à l'existence de la preuve substituée. C'est un seuil peu élevé, à mon avis.
L'accusé a seulement besoin de soulever un doute raisonnable ou de présenter un élément de preuve qui soulèverait un doute raisonnable. »
[Traduction]
Honorables sénateurs, nous ne devrions jamais permettre que le Code criminel préconise la clémence, car ces criminels peaufinent leur capacité de tromper et d'exploiter. Le Parlement doit réagir rapidement et efficacement. Il faut examiner et adapter constamment les dispositions législatives applicables. Le projet de loi C-452 est le produit d'un tel exercice.
[Français]
Le gouvernement est fier de ses réalisations en matière de lutte contre la traite de personnes. Ainsi, le 6 juin 2012, le gouvernement a lancé le Plan d'action national de lutte contre la traite de personnes. Ce plan met l'accent sur la protection des victimes, la poursuite des délinquants, les partenariats avec des intervenants clés et, bien entendu, la prévention de la traite de personnes. Toutes ces activités sont coordonnées par le Groupe de travail sur la traite de personnes, dirigé par Sécurité publique Canada.
Le Canada fait actuellement preuve d'une approche ferme à l'égard de la traite de personnes, mais nous pouvons faire davantage. Le projet de loi C-452 constitue un excellent exemple de ce que nous pouvons faire, ensemble, pour aider ces innocentes victimes.
Par conséquent, je vous invite à vous joindre à moi pour appuyer cette importante initiative, qui représente une prochaine étape vers la réalisation de notre objectif commun de lutte contre la traite de personnes. Cette forme contemporaine d'esclavage ne doit pas être tolérée. Le projet de loi appuie ce principe, et nous devons tous le soutenir. Je vous remercie.
Des voix : Bravo!
L'honorable Ghislain Maltais (Son Honneur le Président suppléant) : Est-ce que les sénateurs sont prêts à poser des questions?
L'honorable Céline Hervieux-Payette : J'aimerais poser une question. Sénateur Boisvenu, j'aurais aimé que vous nous donniez plus de détails sur l'opinion de l'Association du Barreau canadien et sur son hésitation à approuver le projet de loi tel quel.
Le sénateur Boisvenu : Comme je siège au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles depuis presque cinq ans maintenant, je sais que le Barreau canadien, dans beaucoup de projets de loi, soulève souvent l'élément de leur constitutionnalité. Dans ce cas, il le fait surtout sur la notion de présomption d'innocence. En fait, ce que les témoins favorables au projet de loi nous ont dit, c'est que les victimes hésitent souvent à dénoncer leur agresseur pour diverses raisons, souvent à cause du lien qu'elles avaient avec l'ex-proxénète. Ces personnes deviennent des victimes à nouveau, parce qu'elles dénoncent leur agresseur, parce que les sentences sont relativement courtes et que le fardeau de la preuve est très difficile à faire dans ces cas. Renverser le fardeau de la preuve, c'est exiger du présumé criminel qu'il prouve qu'il ne vit pas de ce commerce et qu'il n'a personne sous son emprise.
De plus, le policier de Montréal nous disait que, auparavant, pour faire la preuve qu'un individu commettait ce type de crime, il fallait faire défiler devant lui l'ensemble du réseau qui était sous son emprise, soit 5, 10 ou 15 jeunes filles. Vous comprendrez que ces jeunes filles n'ont pas toutes le même courage pour venir témoigner et confronter en cour l'individu qui avait une énorme emprise sur leur vie. Renverser cet élément fera en sorte que l'on n'aura pas à faire défiler l'ensemble des jeunes filles. Ce sera au présumé criminel de faire la preuve qu'il ne vit pas de ce commerce, et qu'il ne gérait pas ce réseau. Selon les témoins qui nous ont parlé de ce projet de loi et qui vivent près de ces victimes, il s'agit d'un élément majeur du projet de loi qui fera en sorte qu'il n'y aura pas seulement une ou deux jeunes filles parmi dix qui seront prêtes à dénoncer leur agresseur.
La sénatrice Hervieux-Payette : J'ai une question complémentaire à poser. Comme il s'agit d'un projet de loi privé, le mécanisme habituel du gouvernement fédéral consiste à effectuer une révision constitutionnelle de toutes les lois dont le Parlement est saisi. Avez-vous l'assurance que les autorités gouvernementales croyaient que le projet de loi respectait la Constitution canadienne?
Le sénateur Boisvenu : Nous avons reçu Nathalie Levman à titre de témoin. Or, elle avait travaillé sur le projet de loi C-36, et elle est une spécialiste en la matière. Elle est venue témoigner et elle nous a confirmé que cet élément existe déjà dans le Code criminel à d'autres égards, et que cet élément de présomption est tout à fait constitutionnel. Cependant, nous ne sommes pas à l'abri des contestations juridiques, comme c'était le cas par le passé. Il y a des avocats de la défense qui contesteront cet élément, mais cela suivra son cours normal, comme cela se faisait par le passé. Le ministère de la Justice a confirmé que cet élément du projet de loi C-452 était constitutionnel.
L'honorable Joan Fraser (leader adjointe de l'opposition) : Je propose l'ajournement du débat au nom de la sénatrice Jaffer.
Son Honneur le Président suppléant : La sénatrice Batters souhaite poser une question.
[Traduction]
L'honorable Denise Batters : Je siégeais au Comité des affaires juridiques lorsque le Barreau du Québec nous a remis des documents. Est-il vrai que ce dernier nous avait fourni un avis divergeant de celui de l'Association du Barreau canadien, à savoir que le projet de loi est constitutionnel?
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Oui.
Son Honneur le Président suppléant : La sénatrice Fraser, au nom de la sénatrice Jaffer, avec l'appui de l'honorable sénateur Cowan, propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
(Sur la motion de la sénatrice Fraser, au nom de la sénatrice Jaffer, le débat est ajourné.)
Visiteurs à la tribune
Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Rose-Marie Duguay, professeure de l'Université de Moncton, et de Benoît Duguay, ex-journaliste de Radio-Canada. Ils sont les invités des sénateurs et sénatrices du Nouveau-Brunswick.
Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
(1530)
Projet de loi instituant la Journée nationale des produits du phoque et de la mer
Deuxième lecture—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Hervieux-Payette, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Joyal, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-224, Loi instituant la Journée nationale des produits du phoque et de la mer.
L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables collègues, je prends la parole aujourd'hui pour vous parler du projet de loi S-224, Loi instituant la Journée nationale des produits du phoque et de la mer.
Ce projet de loi est un symbole, et vous savez qu'en politique les symboles comptent. Ce symbole, c'est la reconnaissance, par une loi du Parlement canadien, de l'importance des communautés côtières et de leur mode de vie dans la culture de notre pays; c'est l'expression de notre fierté envers les métiers difficiles que ces chasseurs et pêcheurs exercent, y compris la chasse au phoque; c'est notre volonté d'affirmer notre soutien à ces Canadiens qui sont confrontés à une crise sans précédent, orchestrée par des groupes de pression qui menacent à la fois la pérennité des moyens de subsistance de ces communautés et leur environnement, notre environnement.
Ce symbole, c'est aussi le choix de la date à laquelle on soulignera la journée canadienne des produits du phoque et de la mer, soit celle du 20 mai, date à laquelle l'Union européenne souligne, elle aussi, sa journée maritime.
L'Union européenne, qui a banni les produits canadiens du phoque non pas en fonction de raisons scientifiques, mais en fonction de considérations morales — et je reviendrai sur ce point plus tard —, honore depuis 2008 ses communautés côtières tout en mettant l'accent sur le développement durable.
La Journée maritime européenne, appelée aussi Journée européenne de la mer, doit mettre en évidence le rôle crucial que jouent les océans et les mers dans la vie quotidienne non seulement des populations côtières, mais aussi de l'ensemble des citoyens européens. Elle doit appeler à une meilleure croissance européenne durable et à l'emploi. Elle doit permettre une réflexion des pouvoirs publics sur une meilleure gestion des zones côtières, des mers et des océans de la part de tous les citoyens et acteurs concernés.
Ces objectifs, honorables collègues, ce sont aussi les nôtres. Oui, nous souhaitons affirmer que les océans jouent un rôle crucial pour la vie de nos communautés côtières et pour l'ensemble des Canadiens. Oui, nous souhaitons que l'économie durable de la mer puisse apporter la croissance et la création d'emplois que ces communautés méritent. Oui, nous appelons le gouvernement du Canada à poursuivre et à approfondir sa gestion durable des écosystèmes marins.
Or, nous devons le redire sans ambiguïté : la chasse au phoque au Canada n'est pas incompatible avec ces objectifs. Mieux, elle en est une partie intégrante, inaliénable.
La chasse au phoque joue un rôle crucial pour bien des communautés; elle a permis d'apporter travail, croissance et emplois à des populations qui vivent dans des régions isolées. Depuis la Commission royale d'enquête de 1986, la chasse au phoque s'effectue de manière durable et humaine et contribue à l'équilibre des écosystèmes marins. Enfin, la chasse au phoque est pratiquée par des pêcheurs qui vivent par et avec leur environnement.
Voilà pourquoi, honorables collègues, ce projet de loi vise à célébrer non seulement les produits du phoque, mais aussi, plus largement, les produits de la mer, car le prélèvement des produits du phoque s'inscrit dans cette grande activité de prélèvement des ressources de la mer.
Et voilà pourquoi je vous propose cette date du 20 mai, qui est identique à celle des Européens; nous partageons les mêmes préoccupations de gestion durable, de création d'emplois et de croissance soutenable que les Européens, y compris dans le cadre de notre chasse au phoque.
Cependant, les temps sont durs pour celles et ceux qui vivent de la chasse au phoque. J'ai commencé ce discours en parlant d'une crise sans précédent. C'est le cas. Cette crise a pris racine il y a plus de 40 ans et elle hypothèque désormais l'avenir des chasseurs de phoque et leurs activités de pêche.
J'ai eu l'occasion de le dire en cette Chambre par le passé : la disparition du marché des produits du phoque n'entraînera jamais la fin de l'abattage des phoques. Ceux qui prétendent le contraire manipulent l'opinion publique. En réalité, l'Homme aura toujours besoin de réguler l'écosystème auquel il appartient, cet Homme qui, dans bien des cas, s'avère être le seul prédateur naturel du phoque.
Au Canada, nous avons régulé notre écosystème en développant une gestion durable des espèces de phoque et une méthode d'abattage sans douleur, supervisée par des scientifiques indépendants, et j'ai suivi le cours que les chasseurs de phoque suivent auprès de ces scientifiques chaque année. Nous l'avons fait en développant un marché des produits du phoque, car seul un marché du phoque garantit le caractère éthique de la démarche, contrairement aux apparences et au discours tenu par les organisations végétariennes. En effet, il est plus moral d'utiliser à son maximum un animal prélevé dans son environnement que de ne rien en faire. Cette sagesse, nous la devons aux peuples autochtones.
En revanche, l'Union européenne pratique la politique de l'autruche : cachez ce phoque que je ne saurais voir, semble-t-elle dire. J'insiste sur le fait que, sous la pression des lobbies, elle a fermé son marché aux produits du phoque. Pourtant, des Européens continuent de tuer des phoques. Ainsi, en Écosse, les groupes animalistes et végétariens font toujours campagne contre les abattages de phoque commis, selon eux, par les producteurs de saumon afin de préserver leur source de revenus. En Suède, l'Agence pour la protection de l'environnement a permis l'abattage de 400 phoques en 2014 pour éviter l'épuisement des stocks de poisson. Les gouvernements de l'Estonie et de la Finlande ont recommencé, cette année, à attribuer des quotas de chasse au phoque gris en raison de la recrudescence de l'espèce. En outre, certains de mes collègues ici présents, qui ont participé à l'étude sur le phoque gris, que l'on retrouve surtout au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, savent que nous faisons face à une recrudescence incroyable de cette espèce de phoque.
Alors, je pose la question suivante : sans marché, qu'est-ce que l'Europe fait de ces phoques? La réponse : rien. Elle n'en fait rien. Elle coule les animaux morts, c'est-à-dire qu'elle les jette dans l'océan. Est-ce là une pratique plus morale que d'utiliser la ressource prélevée comme nous le faisons au Canada? Certainement pas. Pourtant, je le disais précédemment, ce sont sur des questions de moralité que l'Union européenne a fondé sa décision d'interdire les produits canadiens dérivés du phoque. C'est, en effet, parce que l'utilisation commerciale des populations de phoque a été jugée immorale qu'elle a été interdite. C'est un non-sens, comme je viens de l'expliquer. Cette position est pourtant validée par l'Organisation mondiale du commerce, ce qui constitue une décision sans précédent. Toute considération de cruauté ou de menace à l'espèce a été écartée dans le cadre de la décision européenne. La preuve, c'est que les groupes de pression, qui n'ont cessé de crier à la barbarie et au meurtre, n'ont fait que manipuler l'opinion publique.
Par conséquent, le Canada n'a pas à rougir de sa chasse au phoque. Nous devons garder la tête haute et continuer de revendiquer notre leadership car, en la matière, nous faisons bien mieux que l'Union européenne.
Si, comme je l'ai dit, nous partageons avec l'Europe les mêmes préoccupations de gestion durable, force est de constater que le Canada a une longueur d'avance sur les Européens en la matière. Depuis la Commission royale d'enquête de 1986, le Canada a eu le courage d'examiner froidement sa chasse au phoque. Il a repensé ses méthodes d'abattage pour éliminer la souffrance animale, a renforcé sa supervision de la chasse et a amélioré ses projections pour définir les quotas de chasse et ainsi maintenir des troupeaux de phoques en santé. En 30 ans, la population de phoques du Groenland a triplé. On compte aujourd'hui de 8 à 9 millions de phoques du Groenland, l'espèce la plus chassée. Les projections pour 2030 évoquent une population de 10 à 16 millions. Quant au phoque gris, l'espèce la plus grosse qui est présente sur la côte Est, sa population est passée de 10 000 têtes à un demi-million environ en l'espace de 50 ans.
De l'autre côté de l'Atlantique, l'Union européenne a été incapable de prendre des mesures pour protéger le phoque moine de Méditerranée. Il y a 17 ans que cette espèce est en danger critique d'extinction, et elle figure sur la liste rouge des espèces menacées de l'Union internationale pour la conservation de la nature. On n'en compte plus aujourd'hui que 400 individus.
Le projet de loi S-224 met à l'honneur les produits du phoque, et je me dois de les nommer en réfutant deux fausses affirmations que véhiculent les groupes animalistes et végétariens, selon lesquels nous ne tuons les phoques que pour leur fourrure et qu'il n'y a pas de marché pour d'autres produits. À partir de la fourrure de phoque, nous fabriquons des manteaux, des tuques, des mitaines, des bottes et même des portefeuilles. Je dois dire que j'ai à peu près toute cette panoplie de produits; ils sont excellents, et de très bonne qualité. De plus, de la viande de phoque est servie dans certains restaurants de Montréal, et la boucherie Côte à Côte, aux îles de la Madeleine, offre de la viande de phoque à tous les Madelinots en plus d'élaborer des charcuteries à base de cette viande dont la particularité est qu'elle est maigre et riche en oméga-3.
(1540)
Cette viande de phoque est même disponible au restaurant parlementaire. Si vous souhaitez y goûter, il faut aviser le chef. Ce dernier pourra s'en procurer durant la période de la chasse.
La graisse de phoque, quant à elle, est transformée en huile et était utilisée par les premiers colons comme combustible et lubrifiant. Aujourd'hui, nous l'utilisons comme huile alimentaire et fabriquons des compléments alimentaires riches en oméga-3, réputés pour favoriser la santé cardiovasculaire et circulatoire. Des laboratoires au Québec sur les produits de la mer font des recherches et nous disent que les oméga-3 tirés des produits du phoque sont les plus performants de tous ceux qui sont sur le marché.
D'autres produits pourraient être envisagés. Des études menées en collaboration avec la Grèce portaient, avant le boycott européen, sur l'utilisation des valves cardiaques de phoque pour la chirurgie humaine, en raison de la qualité de ces valves et du fait qu'elles présentent moins de risque d'hémorragie et d'infection cardiaque.
Il y a aussi le collagène du phoque qui serait particulièrement intéressant, car il est exempt de maladies attribuables à l'industrie, comme la maladie de la vache folle. Le collagène peut être utilisé dans les produits de beauté. Au moment où l'on commencera à utiliser le collagène du phoque, la valeur de chaque phoque pourrait atteindre jusqu'à 1 000 $, estime un professeur de l'Université Laval. Donc, il y a un marché et, plus encore, un potentiel de marché phénoménal.
Cependant, les produits issus de la chasse au phoque ne sont pas les seuls qui seront à l'honneur grâce au projet de loi S-224. Nous parlons aussi des produits de la mer dans leur ensemble, car nos chasseurs de phoque sont aussi des pêcheurs. Or, ce projet de loi est un coup de chapeau à nos communautés côtières et aux bénéfices dont nous jouissons grâce aux fruits de leur travail : homard, morue, hareng, pétoncle, crevette, espadon, truite et saumon sont parmi les principales espèces pêchées au pays par les chasseurs de phoque. Nous devons célébrer ces produits et inviter les Canadiens à les consommer, car ils sont excellents pour la santé.
Avant de conclure, je dois parler des communautés autochtones, notamment des Inuits — qui nous ont rendu visite, aujourd'hui, au caucus libéral — et de certaines Premières Nations qui dépendent peut-être plus que toute autre communauté des produits de la mer et dont les modes de vie ancestraux sont liés à la chasse aux phoques.
Le phoque annelé a longtemps été la base de l'alimentation inuite. Le professeur George Wenzel, de l'Université McGill, a décrit l'impact terrible des campagnes anti-chasse au phoque des Européens au cours des années 1960 et 1970 sur l'économie inuite, qui était dépendante de cet animal. Selon lui, en 1963, une peau de phoque annelé rapportait 20 $ à un chasseur inuit. En 1967, elle ne valait plus que 2,50 $, et, après les protestations de Brigitte Bardot en 1977, la peau ne valait pas plus d'un dollar à 1,25 $. Au même moment, le mode de vie de ces communautés autochtones évoluait, se modernisait, passant des traîneaux à chiens aux motoneiges, des harpons aux fusils. Je peux en témoigner, puisque j'ai participé à une chasse au phoque sur la banquise au Nunavut.
Les coûts de la chasse au phoque ont augmenté jusqu'à 50 p. 100 en raison des nouveaux moyens, tandis que ses revenus se sont effondrés. Le découragement, le sentiment d'abandon, le suicide, l'abandon de la chasse ont été les conséquences dramatiques qu'ont éprouvées ces familles.
Sans doute consciente des erreurs du passé, l'Union européenne s'est assurée d'inclure une exception dans son récent boycott des produits du phoque. Elle interdit, depuis 2009, le commerce des produits dérivés du phoque, à l'exception de la vente à des fins non lucratives — c'est tout un commerce que celui qui doit être non lucratif! — des produits provenant de la chasse traditionnelle pratiquée par les Inuits, mais cette exception, en plus de refléter une attitude paternaliste et colonialiste détestable, condamne en réalité les Inuits à la survie en leur interdisant de faire le commerce des produits de leur chasse.
Honorables sénateurs, c'est aussi pour ces communautés de fiers Canadiens que nous devons créer une journée nationale pour célébrer nos produits du phoque et de la mer.
Permettez-moi, pour conclure, de citer une clause « Attendu » du projet de loi S-224 qui a été élaborée à la suite de mes consultations avec les groupes scientifiques, et qui dit ceci :
Attendu que l'espèce humaine fait partie intégrante de l'écosystème, et qu'en conséquence, sa position en tant que prédateur ne peut être séparée du reste de la nature;
Cette affirmation n'a l'air de rien, et pourtant, elle est en opposition frontale avec l'idéologie des groupes animalistes et végétariens qui s'opposent à la chasse au phoque. Selon eux, les animaux doivent avoir les mêmes droits que les hommes. À titre d'exemple, un tribunal de New York a étudié une requête visant à accorder à un chimpanzé les mêmes droits que les humains. Les premiers sont d'ailleurs appelés des « animaux non humains », et les seconds, des « animaux humains ». Par conséquent, dans cette représentation du monde où tous les êtres vivants sont des animaux qui ont une personnalité juridique, il ne peut y avoir de prédation des seconds sur les premiers.
Cette idéologie appelée anti-spéciste, c'est-à-dire qu'elle ne fait pas de différence entre les espèces, n'est pas marginale. Elle mobilise des millions d'individus partout sur la planète, elle influence des décisions des parlements, elle fait fermer des marchés, elle circule sur les réseaux sociaux, elle motive des gens à devenir végétaliens, elle recrute des adeptes, elle est source d'actes criminels aux États-Unis et en Europe, et elle mène à des sabotages, à des incendies, à la destruction de laboratoires, à du harcèlement et à des menaces de mort.
Honorables sénateurs, j'ai commencé ce discours en vous disant que le projet de loi S-224 est un symbole qui permet d'honorer nos communautés côtières. Cependant, c'est aussi un étendard qui revendique une vision du monde, qui affirme une certaine idée de l'Homme qui est sensible et qui a de la compassion pour ses semblables et pour toute forme de vie en général; un étendard qui reconnaît l'Homme comme étant au sommet de la chaîne alimentaire, en interdépendance avec son environnement; un étendard qui fait de l'Homme cet être protecteur sur lequel pèse la responsabilité de léguer aux générations futures un monde sain et durable aux formes de vie les plus diverses.
Honorables sénateurs, je vous invite à faire du projet de loi S-224 une loi pour tous les Canadiens. Je vous invite à faire du 20 mai la Journée nationale des produits du phoque et de la mer, et à donner à tous les citoyens qui vivent sur les côtes de nos trois océans ce cadeau en guise de respect et d'admiration de leur courage. Je vous remercie.
Des voix : Bravo!
(Sur la motion du sénateur Maltais, le débat est ajourné.)
[Traduction]
Banques et commerce
Motion tendant à autoriser le comité à étudier les échanges commerciaux entre les États-Unis et le Canada ainsi que le respect des lois et des principes de tous les accords commerciaux—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénatrice Ringuette, appuyée par l'honorable sénatrice Tardif,
Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à examiner, afin d'en faire rapport, les échanges commerciaux entre les États-Unis et le Canada ainsi que le respect des lois et des principes de tous les accords commerciaux applicables, en accordant une attention particulière aux importations de volaille de réforme et de poulet, notamment :
a) l'application de droits et de quotas aux produits dont la classification comprend les mélanges, préparations et kits alimentaires ainsi que la possibilité que ces produits échappent aux lois et aux principes des accords commerciaux applicables, en particulier aux quotas d'importation;
b) la réglementation applicable aux droits et quotas d'importation établis par le ministère des Finances;
c) l'interprétation et l'application des règles et règlements de l'Agence des services frontaliers du Canada;
d) la surveillance des produits qui constituent des mélanges, des préparations et des kits alimentaires;
e) la réciprocité de la réglementation américaine en ce qui a trait aux importations canadiennes similaires;
Que le comité formule des recommandations sur la prise de mesures réglementaires et législatives afin d'assurer l'équité du système pour les Canadiens;
Que le comité soumette son rapport final au Sénat au plus tard le 27 juin 2014, et qu'il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions pendant les 180 jours suivant le dépôt de son rapport final.
L'honorable Michael L. MacDonald : Je propose l'ajournement du débat à mon nom.
(Sur la motion du sénateur MacDonald, le débat est ajourné.)
(1550)
Les phares à titre de symboles irremplaçables du patrimoine maritime
Interpellation—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Munson, attirant l'attention du Sénat sur les phares, qui sont un symbole unique du patrimoine maritime du Canada et des monuments qui enrichissent les collectivités et le paysage national.
L'honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, j'ai l'intention d'intervenir au sujet de cette interpellation au cours des prochaines semaines. J'ajourne donc le débat pour le reste du temps de parole dont je dispose.
(Sur la motion du sénateur MacDonald, le débat est ajourné.)
Affaires étrangères et commerce international
Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'examen des conditions de sécurité et des faits nouveaux en matière d'économie dans la région de l'Asie-Pacifique
L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 11 mars 2015, propose :
Que nonobstant les ordres du Sénat adoptés le jeudi 21 novembre 2013 et le jeudi 12 juin 2014, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international relativement à son examen des conditions de sécurité et des faits nouveaux en matière d'économie dans la région de l'Asie-Pacifique, de leurs incidences sur la politique et les intérêts du Canada dans la région, et d'autres questions connexes soit reportée du 31 mars 2015 au 30 septembre 2015.
Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée.)
Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'examen des questions se rapportant aux relations étrangères et au commerce international en général
L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 11 mars 2015, propose :
Que, nonobstant les ordres du Sénat adoptés le jeudi 21 novembre 2013 et le jeudi 12 juin 2014, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international relativement à son examen des questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant aux relations étrangères et au commerce international en général soit reportée du 31 mars 2015 au 30 septembre 2015.
Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée.)
Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude du potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique
L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 11 mars 2015, propose :
Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le mardi 23 septembre 2014, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international relativement à son examen sur le potentiel d'accroissement du commerce et de l'investissement entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, y compris dans les secteurs de croissance clés des ressources, de la fabrication et des services; les mesures fédérales nécessaires à la réalisation des possibilités cernées dans ces secteurs clés; les possibilités d'intensifier la collaboration au niveau trilatéral soit reportée du 31 mars 2015 au 30 septembre 2015.
Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
L'honorable Anne C. Cools : J'aurais une question : la sénatrice Andreychuk ne souhaite-t-elle pas intervenir au sujet de la motion no 120? À quelle motion en sommes-nous, exactement?
Son Honneur le Président intérimaire : Nous en sommes à la motion no 120, sénatrice Cools.
La sénatrice Cools : La sénatrice Andreychuk a proposé la motion, mais je m'attendais à ce qu'elle fournisse plus de précisions. Je parle ici de la motion no 120 proposée par la sénatrice Andreychuk, au sujet du commerce entre le Canada, les États-Unis et le Mexique.
La sénatrice Andreychuk : Je n'avais pas l'intention d'expliquer davantage la motion. Elle vise simplement à reporter le dépôt du rapport. Elle ne porte pas sur le contenu du rapport. Il s'agit seulement d'avoir plus de temps à notre disposition.
La sénatrice Cools : Je comprends, mais il pourrait être utile de savoir pourquoi une prolongation semble nécessaire.
La sénatrice Andreychuk : Le rapport ne sera pas prêt d'ici au 31 mars. Il est encore en cours de rédaction. La personne responsable de la recherche est malade, ce qui occasionne des retards. Nous demandons une prolongation raisonnable.
La sénatrice Cools : C'est raisonnable. Merci.
Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(La motion est adoptée.)
Le Sénat
Motion portant que le Sénat prenne acte du cas de Sergei Magnitsky—Débat
L'honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 24 mars 2015, propose :
Que le Sénat prenne note des faits suivants :
a) Sergei Magnitsky, un avocat moscovite qui a mis au jour la plus importante fraude fiscale de l'histoire de la Russie, a été détenu sans procès, a été torturé et est mort le 16 novembre 2009 dans une prison de Moscou;
b) Aucune enquête rigoureuse, indépendante et objective n'a été menée par les autorités russes sur la détention, la torture et la mort de Sergei Magnitsky, et les individus responsables n'ont pas non plus été traduits en justice;
c) Le procès posthume sans précédent de Sergei Magnitsky, ainsi que sa condamnation en Russie pour la fraude qu'il a lui-même mise au jour, constituent une violation des principes de justice fondamentale et de l'État de droit;
Que le Sénat demande au gouvernement :
a) de condamner tout ressortissant étranger responsable de la détention, de la torture ou de la mort de Sergei Magnitsky, ou qui a été impliqué dans la dissimulation des crimes qu'il a mis au jour;
b) d'étudier la pertinence d'imposer des sanctions, et d'encourager l'imposition de sanctions contre tout ressortissant étranger responsable de la détention, de la torture, ou de la mort de Sergei Magnitsky, ou qui a été impliqué dans la dissimulation des crimes qu'il a mis au jour;
c) d'étudier la pertinence d'imposer des sanctions appropriées contre tout ressortissant étranger responsable de violation, à l'étranger, des droits de la personne reconnus à l'échelle internationale, lorsque les autorités de ce pays ne peuvent ou ne veulent pas enquêter sur ces violations de façon rigoureuse, indépendante et objective.
— Honorables sénateurs, la motion vise les auteurs de violations de droits de la personne où qu'elles soient perpétrées, mais elle concerne tout particulièrement le décès notoire de M. Sergei Magnitsky dans une prison russe en novembre 2009.
Sergei Magnitsky a grandi dans le Sud de la Russie. Doué en physiques et en mathématiques, il fait une brillante carrière en droit en tant que vérificateur dans une Russie en pleine évolution.
En 2008, alors qu'il travaille pour un cabinet américain à Moscou, M. Magnitsky découvre une fraude colossale. Trois sociétés appartenant à un client ont été escroquées, et une fraude fiscale s'élevant à 230 millions de dollars a été perpétrée. M. Magnitsky témoigne contre des hauts fonctionnaires du ministère de l'Intérieur qu'il accuse d'avoir orchestré et exécuté ce vol.
Un mois plus tard, ces mêmes fonctionnaires mettent M. Magnitsky en état d'arrestation, l'accusant de fraude fiscale. Il passe presque un an sous les verrous. Il se plaint de conditions insalubres, de confinement excessif, de la présence de rats et de problèmes de santé.
En juillet 2009, il reçoit un diagnostic de calculs biliaires et de pancréatite, entre autres. Les médecins disent qu'une intervention s'impose. Il est néanmoins mis en isolement médical.
À mesure que progresse son procès, les procureurs présentent plus d'éléments de preuve, et la détention de M. Magnitsky est prolongée.
Le 16 novembre 2009, Sergei Magnitsky meurt en détention préventive. Il était âgé de 37 ans. Il laisse dans le deuil son épouse, sa mère et ses deux jeunes fils. La mort de M. Magnitsky a été dénoncée par la communauté internationale. Le conseil des droits de la personne du Kremlin lui-même a déterminé que la poursuite contre M. Magnitsky était illégale à maints égards. Entre autres, il y avait conflit d'intérêts.
Les accusations qui pesaient contre M. Magnitsky avaient été portées par les mêmes cadres qu'il avait lui-même accusés de corruption. Le conseil a également révélé des preuves selon lesquelles M. Magnitsky avait été sauvagement battu avant sa mort. Pour sa part, le comité d'enquête russe a dit ceci :
[...] il y a un lien direct de cause à effet entre le décès de M. Magnitsky et l'insuffisance des soins médicaux dont il bénéficiait.
Le président Poutine a toutefois soutenu avec insistance qu'il est mort d'une crise cardiaque. Les allégations voulant que M. Magnitsky ait été victime de torture ont été rejetées. Le gouvernement n'a pas autorisé la tenue d'une autopsie indépendante.
Les accusations portées contre un haut dirigeant de la prison — la seule personne visée par des accusations concernant la mort de M. Magnitsky — ont été rejetées.
En mai 2010, Human Rights Watch a dit ce qui suit :
La réaction du gouvernement de la Russie à la suite du décès en prison de Sergei Magnitsky a encore une fois démontré son manque de détermination à apporter un véritable changement.
Le 11 juillet 2013, Sergei Magnitsky a été jugé et déclaré coupable à titre posthume. Bien des gens ont accusé le Kremlin d'avoir imposé sa version des faits.
Amnistie Internationale a parlé de poursuites profondément sinistres, ajoutant que l'affaire :
[...] [a établi] un dangereux précédent et ouvriraient un nouveau chapitre du bilan contesté de la Russie en matière de droits humains.
Quant à l'Union européenne, elle a affirmé que le procès a envoyé un message inquiétant à ceux qui combattent la corruption en Russie.
Bien d'autres personnes ont également fait part de leur déception. La motion dont le Sénat est saisi aujourd'hui s'appuie sur la vague de condamnation internationale qu'ont suscitée l'injustice dont Sergei Magnitsky a été victime, son décès en prison ainsi que sa condamnation posthume.
[Français]
Son Honneur le Président intérimaire : Il est maintenant 16 heures. Conformément à l'ordre adopté par le Sénat le 6 février 2014, je déclare le Sénat ajourné jusqu'au jeudi 26 mars 2015, à 13 h 30.
(La séance est levée, et le Sénat s'ajourne au jeudi 26 mars 2015, à 13 h 30.)