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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 43e Législature
Volume 151, Numéro 18

Le mercredi 25 mars 2020
L’honorable Leo Housakos, Président suppléant


LE SÉNAT

Le mercredi 25 mars 2020

(Conformément à l’article 3-6(1) du Règlement, le Sénat a été rappelé pour se réunir en ce jour, au lieu du 21 avril 2020 tel qu’ordonné antérieurement.)

La séance est ouverte à 10 heures, l’honorable Leo Housakos, Président suppléant, étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Les travaux du Sénat

Adoption de la motion tendant à prolonger la séance d’aujourd’hui et à autoriser les sénateurs à prendre la parole ou à voter à partir d’un autre siège que leur place désignée

L’honorable Peter Harder (coordonnateur législatif suppléant du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :

Que, nonobstant l’article 3-4 du Règlement, la séance continue au-delà de l’heure fixée pour la clôture de la séance aujourd’hui;

Que l’article 3-3(1) du Règlement soit suspendu aujourd’hui;

Que, nonobstant les articles 6-1 et 9-8(1)b) du Règlement, les sénateurs puissent prendre la parole ou voter à partir d’un siège autre que la place qui leur est attribuée au cours de la séance d’aujourd’hui.

L’honorable Leo Housakos (Son Honneur le Président suppléant) : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Adoption de la motion tendant à nommer la Présidente intérimaire suppléante pour la séance d’aujourd’hui

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou pratique normale, l’honorable sénatrice Ringuette soit Présidente intérimaire suppléante pour la séance d’aujourd’hui.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


AFFAIRES COURANTES

Le Sénat

Adoption de la motion tendant à autoriser le Sénat à se réunir en comité plénier afin d’étudier la teneur du projet de loi C-13 et d’évaluer la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19

L’honorable Peter Harder (coordonnateur législatif suppléant du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou procédure ordinaire :

1.le Sénat se forme en comité plénier au début de l’ordre du jour aujourd’hui afin d’étudier la teneur du projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19;

2.le comité plénier sur la teneur du projet de loi C-13 reçoive l’honorable Bill Morneau, c.p., député, ministre des Finances, accompagné d’un fonctionnaire;

3.le comité plénier sur la teneur du projet de loi C-13 lève sa séance au plus tard une heure après le début de ses travaux;

4.le Sénat se forme en un deuxième comité plénier immédiatement avant l’appel des motions sous les Affaires du gouvernement aujourd’hui afin d’étudier la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19;

5.le comité plénier sur la réponse du gouvernement à la pandémie reçoive l’honorable Bill Blair, c.p., député, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et l’honorable Patty Hajdu, c.p., députée, ministre de la Santé, chacun accompagné d’un fonctionnaire;

6.le comité plénier sur la réponse du gouvernement à la pandémie lève sa séance au plus tard une heure et trente minutes après le début de ses travaux;

7. la durée des interventions prévue à l’article 12-32(3)d) du Règlement soit de cinq minutes pour les deux comités pléniers aujourd’hui, le temps des questions et des réponses y compris.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Projet de loi sur les mesures d’urgence visant la COVID-19

Première lecture

Son Honneur le Président suppléant annonce qu’il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19, accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

L’honorable Peter Harder (coordonnateur législatif suppléant du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-6(1)f) du Règlement, je propose que la deuxième lecture du projet de loi soit inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion du sénateur Harder, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.)


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, conformément à l’ordre adopté plus tôt aujourd’hui, je quitte le fauteuil pour que le Sénat se forme en comité plénier sur la teneur du projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19. Tel que convenu lors des discussions, l’honorable sénatrice Ringuette présidera le comité.

[Français]

Projet de loi sur les mesures d’urgence visant la COVID-19

Étude de la teneur du projet de loi en comité plénier

L’ordre du jour appelle :

Le Sénat en comité plénier afin de recevoir l’honorable Bill Morneau, c.p., député, ministre des Finances, accompagné d’une fonctionnaire, relativement à la teneur du projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19.

(La séance est suspendue et le Sénat se forme en comité plénier sous la présidence de l’honorable Pierrette Ringuette.)


La présidente : Honorables sénateurs, le Sénat s’est formé en comité plénier pour étudier la teneur du projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19.

Honorables sénateurs, durant un comité plénier, les sénateurs s’adressent à la présidente, mais ne sont pas obligés de se lever. Tel qu’ordonné plus tôt aujourd’hui, le temps de parole est de cinq minutes — questions et réponses y compris. De plus, tel qu’ordonné par le Sénat, le comité accueillera le ministre des Finances. Je l’invite maintenant à entrer, accompagné d’une fonctionnaire de son ministère.

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat, l’honorable Bill Morneau et une fonctionnaire de son ministère prennent place dans la salle du Sénat.)

(1010)

La présidente : Monsieur le ministre, j’ai le plaisir de vous accueillir au Sénat. Je vous invite à présenter votre fonctionnaire et à faire vos observations préliminaires.

[Traduction]

L’honorable Bill Morneau, c.p., député, ministre des Finances : Honorables sénateurs, merci de m’avoir invité ici aujourd’hui. Nous comprenons tous que la crise de la COVID-19 est sans précédent. La pandémie progresse rapidement, et le gouvernement doit être capable d’intervenir rapidement. Il doit être souple, réceptif et, surtout, capable d’agir rapidement. Nous devons être en mesure de protéger la santé des Canadiens et l’économie du pays.

La mesure législative que j’ai présentée à la Chambre des communes plus tôt ce matin, et dont le Sénat est actuellement saisi, permettra au gouvernement d’agir en ce sens. Elle nous aidera à financer les systèmes de santé, à appuyer les travailleurs et les entreprises du Canada et à stabiliser l’économie canadienne.

D’abord et avant tout, notre priorité est de protéger la santé des Canadiens. La mesure législative proposée confère à la ministre de la Santé et à moi-même le pouvoir de demander des fonds pour appuyer les efforts fédéraux visant à prévenir et à endiguer la propagation de la COVID-19.

La mesure législative propose aussi de faire un versement ponctuel de 500 millions de dollars aux provinces et aux territoires au titre du Transfert canadien en matière de santé afin de garantir que les systèmes de santé continuent de fournir des soins de calibre mondial.

Nous savons également que bien des Canadiens n’ont pas accès à des prestations lorsqu’ils sont malades. Ils ne savent pas s’ils vont pouvoir payer l’épicerie, le loyer, leurs médicaments. Nous proposons la nouvelle Prestation canadienne d’urgence. Il s’agit d’un soutien qui serait versé aux travailleurs qui perdent leur revenu à cause de la COVID-19 pendant une période allant jusqu’à 16 semaines. Cette prestation constituerait une combinaison plus simple et plus accessible de l’allocation de soins d’urgence et de l’allocation de soutien d’urgence qui avaient été annoncées antérieurement. Cette mesure permet d’aider tous les Canadiens qui se retrouvent dans une situation où ils perdent la totalité de leur revenu à cause de la COVID-19. Elle soutient les entreprises canadiennes en leur permettant de garder leurs employés en poste. Il s’agit d’une subvention salariale versée directement aux gens.

Cela comprend les travailleurs qui ont toujours un emploi, mais qui ne reçoivent aucun revenu en raison d’interruptions du travail causées par la COVID-19. Cette prestation aidera les entreprises à garder leurs employés en poste pendant qu’ils gèrent ces moments difficiles tout en leur permettant de conserver la capacité de reprendre rapidement leurs activités dès que cela sera possible.

Nous proposons en outre d’aider les familles en leur versant, en mai, 300 $ de plus par enfant dans le cadre de l’Allocation canadienne pour enfants. Les 12 millions de familles canadiennes à revenu faible ou moyen recevront un montant supplémentaire spécial par l’entremise du crédit pour la TPS.

Nous proposons également de suspendre les intérêts sur les prêts aux étudiants pendant six mois. En ce qui concerne les personnes âgées, nous avons réduit de 25 % le seuil de retrait minimal des FERR, ce qui contribue à protéger leurs épargnes de la volatilité des marchés. Le projet de loi prévoit aussi une subvention salariale pour les petits organismes, en plus de la subvention salariale directe aux citoyens, afin de les aider à garder les Canadiens au travail.

En plus de la subvention, comme je l’ai dit, la prestation canadienne d’urgence permet aux employeurs de mettre à pied provisoirement les employés qu’ils ne peuvent pas payer en sachant que ceux-ci recevront de l’argent directement du gouvernement fédéral.

Nous savons que les entreprises ont besoin d’aide pour traverser la crise et maintenir en poste les Canadiens. Pendant cette période, les entreprises peuvent avoir besoin de liquidités. Grâce au projet de loi, nous apporterons des modifications qui donneront au gouvernement la souplesse nécessaire pour aider plus d’entreprises par l’intermédiaire de la Banque de développement du Canada et d’Exportation et développement Canada. Ces modifications permettront à la Banque de développement du Canada d’offrir une plus grande aide financière aux entreprises canadiennes et donneront à Exportation et développement Canada la souplesse requise pour fournir une aide financière et une assurance-crédit aux entreprises canadiennes touchées.

Nous proposons également de renforcer notre capacité à agir par l’intermédiaire du Compte du Canada. Le Compte du Canada est un outil important qui peut fournir de l’aide aux entreprises canadiennes en matière de financement et de garanties.

Nous savons que le financement est actuellement crucial pour les entreprises dans l’ensemble du Canada. Nous proposons de renforcer Financement agricole Canada afin d’appuyer les agriculteurs du secteur agroalimentaire en cette période et de veiller à ce qu’ils aient accès à du financement.

Le gouvernement prend des mesures pour aider la Société canadienne d’hypothèques et de logement à accroître les liquidités disponibles dans le secteur financier en fournissant un financement stable aux banques et aux prêteurs hypothécaires afin qu’ils puissent continuer d’offrir des prêts aux particuliers et aux entreprises du pays. Ce travail est absolument essentiel.

Il est de notre responsabilité collective de veiller à ce que le gouvernement dispose des outils nécessaires pour pouvoir réagir rapidement et protéger les Canadiens et notre économie. C’est pourquoi je demande à mes honorables collègues d’appuyer cette mesure législative. Il ne faut vraiment pas tarder. Les Canadiens comptent sur nous. Merci.

Le sénateur Plett : Monsieur le ministre, mes questions seront courtes, et j’espère que vos réponses le seront tout autant afin que je puisse en poser le plus possible en cinq minutes.

Mes questions à votre intention portent sur le soutien à la base de l’économie canadienne que sont les petites et moyennes entreprises. Elles souffrent énormément en ce moment.

Votre gouvernement offrira une subvention salariale de 10 % aux petites entreprises. Cette subvention s’élève à 75 % au Danemark et à 80 % au Royaume-Uni. Nos PME et des groupes d’affaires, dont la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, demandent un niveau de subvention semblable de la part de votre gouvernement. Aider les petites entreprises à garder leurs employés favorisera une reprise plus rapide lorsque cette crise prendra fin. Les petites entreprises apprécient toute l’aide qui leur est offerte, mais cette subvention de 10 % est trop petite pour être efficace.

Monsieur le ministre, pourquoi avez-vous choisi cette méthode pour aider les petites entreprises? Pouvez-vous expliquer comment vous êtes parvenu à 10 %? Croyez-vous toujours que 10 %, c’est suffisant, ou envisagez-vous une hausse éventuelle?

M. Morneau : Monsieur le sénateur, il s’agit d’une situation qui évolue rapidement. Évidemment, elle est sans précédent et je dois vous corriger, car ce que vous venez de dire est en fait inexact.

Nous avons décidé d’offrir une subvention salariale qui sera versée directement aux employés. Il y a une semaine, comme vous vous en souvenez peut-être, nous parlions d’offrir une sorte distincte de prestation d’assurance-emploi. Toutefois, par la suite, nous avons décidé qu’il serait préférable d’avoir recours à une forme d’aide qui permettra aux employeurs de mettre leurs employés au chômage technique, tout comme c’est le cas au Royaume-Uni. Les employés au chômage technique seront admissibles à l’aide qui leur sera envoyée directement par le gouvernement et, de surcroît, une subvention de 10 % sera versée pour les employés qui continuent de travailler.

Si vous examinez de plus près ce qui se fait au Royaume-Uni, vous verrez que notre approche est passablement semblable. Hier matin, j’ai parlé au téléphone avec les ministres des Finances des pays du G7, et c’est ce que nous avons conclu.

Par ailleurs, si vous regardez les mesures mises en place au Danemark, vous conclurez, je crois, que celles du Canada sont supérieures. Au Danemark, seules les entreprises dont les revenus chutent considérablement auront accès aux subventions salariales. Au Canada, nous proposons plutôt que les gens qui se retrouvent sans travail pour n’importe quelle raison liée à la COVID-19 aient accès à la prestation, par exemple parce qu’ils sont malades ou en quarantaine, qu’ils prennent soin d’un de leurs parents âgés ou d’un enfant, qu’ils n’ont pas d’emploi, qu’ils ne veulent pas aller travailler, ou que leur employeur leur a demandé de s’absenter du travail. Le lien d’emploi entre les travailleurs et leur employeur sera maintenu, ce qui permettra un retour rapide.

Si vous faites les calculs — comme cela se fera sûrement dans les prochains jours —, vous constaterez, comme les petites entreprises, que cette mesure procure un soutien considérable aux petites entreprises.

Nous soutenons aussi d’autres secteurs, bien sûr, mais c’est un secteur absolument crucial. Nous sommes convaincus que sa position sera grandement renforcée grâce aux mesures que nous prenons maintenant.

Le sénateur Plett : Il me semble évident, et j’espère que ça l’est pour vous aussi, que ce n’est pas le moment d’augmenter les impôts des petites entreprises. Monsieur le ministre, avez-vous l’intention de repousser ou d’annuler la hausse des charges sociales, dont les cotisations au Régime de pensions du Canada et à l’assurance-emploi, ou encore la hausse de la taxe sur le carbone, qui devait entrer en vigueur le 1er avril?

M. Morneau : Nous avons clairement dit que nous souhaitons permettre aux entreprises et aux particuliers de reporter le paiement des impôts sur le revenu jusqu’au 31 août. On parle ici d’un report de 55 milliards de dollars — 55 milliards qui auraient dû sortir des circuits économiques et qui y resteront malgré tout.

Nous avons également pris un certain nombre d’autres mesures pour soutenir les entreprises, grandes ou petites. Ce qui compte par-dessus tout, de notre point de vue, c’est que ceux qui en auront besoin pour passer à travers cette crise puissent avoir accès à du crédit.

(1020)

Nous n’avons annulé aucune mesure. La situation actuelle est sans précédent. Nous continuerons de tout faire pour aider les entreprises. Je peux vous assurer que les mesures que nous avons annoncées jusqu’ici aideront les Canadiens à passer à travers cette crise. Comme nous en ignorons l’ampleur exacte et que nous sommes incapables de prédire combien de temps elle durera, nous estimons nécessaire d’avoir la latitude voulue pour réagir adéquatement, et c’est précisément ce que ferait ce projet de loi.

Le sénateur Plett : Comme il ne me reste que 15 secondes, je ne me donnerai pas la peine de poser la question suivante.

Le sénateur Smith : Bienvenue, monsieur le ministre. Tout semble aller vite, mais les choses semblent s’améliorer. Ma question est simple.

Selon le gouvernement, certaines propositions telles que la Prestation canadienne d’urgence en réponse à la COVID-19 seront mises en œuvre début avril, tandis que l’augmentation des transferts de TPS et l’augmentation de l’Allocation canadienne pour enfants devraient entrer en vigueur en mai. Le problème est que les Canadiens vulnérables ont besoin d’aide financière dès maintenant.

En janvier 2019, un sondage mené pour le compte de MNP a révélé que 46 % des Canadiens sont à 200 $ de ne pas pouvoir payer leurs factures et se retrouvent donc confrontés à l’insolvabilité.

Monsieur le ministre, pourriez-vous expliquer le raisonnement qui a mené au choix des dates pour la mise en œuvre de ces programmes? Le gouvernement a-t-il examiné d’autres moyens potentiellement plus rapides et plus efficients d’offrir ces programmes?

M. Morneau : Je vous remercie de votre question, honorable sénateur. Il n’y a pas de façons plus rapides de faire parvenir l’argent aux Canadiens. C’est le défi qui se pose à nous dans les circonstances actuelles. Notre approche — et il s’agit d’une approche pangouvernementale — devait nous permettre d’offrir un soutien aux Canadiens de la manière la plus simple, efficace et rapide.

Nous avons exploré les solutions possibles et avons conclu qu’il fallait procéder ainsi. Nous avons jugé que la nouvelle Prestation canadienne d’urgence, qui est différente de ce que nous avons proposé la semaine dernière, était le meilleur moyen d’aider les Canadiens de manière efficace et en temps opportun. La prestation sera versée par l’intermédiaire de l’Agence du revenu du Canada et de l’assurance-emploi. Nous simplifierons toutefois les choses, de sorte que les gens n’auront qu’à aller en ligne pour indiquer qu’ils répondent à des critères très précis, à savoir qu’ils ont touché 5 000 $ au cours des 12 derniers mois et que leur revenu est maintenant nul en raison de la crise de la COVID-19. C’est un moyen simple et efficace de leur faire parvenir de l’argent. Nous ne ménageons aucun effort pour que les choses se concrétisent sans tarder. Nous visons la semaine du 6 avril. Nous allons fixer une date exacte pour le versement, afin de rassurer les Canadiens.

En ce qui concerne le crédit pour la TPS à l’intention des personnes à faible revenu et le supplément d’Allocation canadienne pour enfants, les systèmes ne seront pas prêts à effectuer de versements avant le mois de mai. Nous aurions souhaité que ce soit possible en avril, mais nous n’en avons pas la capacité. Voilà comment nous en sommes arrivés à mai. Nous faisons notre possible pour accélérer les choses, mais il faut tenir compte du fait que c’est la toute première fois que les systèmes sont utilisés de cette manière. Si nous le pouvons, nous ferons les versements plus rapidement.

Le sénateur Smith : Étant donné qu’on exige déjà beaucoup du système, le gouvernement est-il en mesure d’offrir une prestation de services malgré le volume des demandes d’aide des Canadiens, notamment les restaurants? La question me tient à cœur. Mon fils a un restaurant qu’il a dû fermer. Il a pris cette mesure il y a plus de deux semaines et demie, et il a congédié tous ses employés. Pour les propriétaires de petite entreprise, le moment auquel l’aide arrivera est une question critique. Les divers ministères ont-ils la capacité d’offrir les services malgré la pression incroyable exercée sur le système actuellement? Dans quelle mesure avez-vous confiance que le système sera en mesure d’y parvenir?

M. Morneau : Il va sans dire qu’il s’agit d’une situation sans précédent. De toute évidence, les systèmes n’ont pas été conçus pour être mis à aussi rude épreuve.

Pour répondre à votre question, nous avons proposé des mesures que nous estimons être capables de mettre en œuvre dans les délais prévus. Nous faisons le nécessaire pour y arriver.

Arrêtons-nous en particulier sur la situation de votre fils, qui, à titre de propriétaire de restaurant, a dû licencier de nombreux travailleurs. Tous ces employés sont admissibles au nouveau programme de 16 semaines, dont la prise d’effet sera rétroactive au 15 mars. Les travailleurs pourront faire une demande de prestations dans le cadre de ce programme. Si son entreprise est paralysée, votre fils pourra lui aussi se prévaloir du programme. Contrairement à ce qui se fait habituellement, il pourra lui aussi en bénéficier. Au-delà des prestations que ses employés et lui pourront recevoir, nous faisons le nécessaire pour qu’il ait accès à du crédit pour cette période.

Nous parlerons d’autres mesures dans les jours à venir, car nous travaillons littéralement jour et nuit avec le secteur bancaire pour trouver des façons de combler les écarts. Par surcroît, le gouvernement a décidé qu’il serait inapproprié que les entrepreneurs comme votre fils et leurs employés paient de l’impôt au cours de cette crise. Nous veillons à ce que ces engagements soient respectés. Pour l’instant, nous envisageons d’autres mesures pour qu’une fois la crise passée — nous espérons et nous prévoyons que la situation n’est que temporaire —, votre fils puisse rouvrir rapidement son restaurant. Voilà l’objectif que nous visons.

La sénatrice Dasko : Tout d’abord, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, de tous les efforts que vous avez déployés afin de créer ce programme incroyable au nom des Canadiens.

Comme nous l’avons constaté ces dernières semaines, la crise qui sévit a des répercussions économiques sur des industries entières, notamment celles du tourisme, de la culture, de l’hôtellerie, de la vente au détail et j’en passe, et elle entraîne des conséquences comme des pertes d’emplois et des mises à pied. Ces secteurs sont dévastés.

En tenant compte des mesures que vous avez présentées, pouvez-vous nous donner votre analyse de l’état de l’économie? Nous avons entendu des rumeurs de récession. J’aimerais savoir, selon vous, quelles sont les probabilités d’une récession, quelle sera sa gravité et combien de temps il nous faudra pour nous en remettre. J’aimerais savoir ce que vous en pensez. Je sais que nous espérons tous que la situation s’améliorera et qu’elle évolue rapidement, mais ces prévisions relèvent de votre ministère. C’est ce que fait le ministère des Finances. J’aimerais au moins avoir une idée des scénarios que vous envisagez pour l’avenir.

M. Morneau : Merci, madame la sénatrice. Je pense que nous aimerions tous savoir des choses que nous ignorons actuellement. Je sais que c’est une question qui se pose en toute bonne foi. Nous aimerions connaître l’étendue et la durée de ce problème et nous aimerions savoir s’il arrivera par vagues. Or, nous n’en savons rien.

Lorsque la Réserve fédérale des États-Unis a abaissé son taux directeur, il y a quelques jours seulement — bien qu’on ait l’impression que cela remonte à il y a plus longtemps —, elle n’a pas présenté de prévisions financières parce qu’elle a déterminé qu’il ne serait pas utile de le faire dans cette situation particulière, puisqu’elle ne pouvait pas vraiment faire une analyse de ces projections.

J’ai parlé au ministre des Finances de l’Ontario, hier soir. Il doit présenter sa mise à jour des perspectives financières aujourd’hui. Je ne peux pas anticiper la teneur de la présentation qu’il fera aujourd’hui, mais le ministre m’a fait part des mêmes difficultés à tirer ce genre de conclusions.

Mon ministère essaie de bien évaluer les implications financières de toutes les mesures que nous proposons. C’est ce à quoi nous nous employons actuellement. Vous avez vu cette annonce la semaine dernière. Il y en aura au moins une autre cette semaine. Cela permettra aux Canadiens de prendre la mesure des investissements que nous devrons faire, selon nous, face à un tel défi. Il serait vraiment inapproprié que j’avance une estimation qui ne repose par sur une analyse crédible. Nous savons que de très nombreux Canadiens sont en train de perdre leur emploi en ce moment. Nous espérons et nous pensons que c’est temporaire.

Quand on y pense et quand on pense à ce qui va arriver, en particulier en ce qui concerne la demande des consommateurs, dans un proche avenir — je ne peux pas dire pendant combien de temps exactement — on ne peut que conclure que l’économie va connaître un fort déclin pendant cette période. Néanmoins, on peut raisonnablement s’attendre à ce que la demande des consommateurs augmente une fois la crise passée. Dans une situation économique normale, c’est la conclusion à laquelle on aboutirait, mais il est vrai que nous ne sommes pas dans une situation normale du tout. Je ne vais certainement pas prétendre que nous savons des choses que nous ne savons pas. Nous allons dire clairement ce que nous savons et ce que nous ne savons pas et nous allons faire face à la situation telle qu’elle se présente à nous.

(1030)

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci, monsieur le ministre, d’être parmi nous aujourd’hui. Je vais poursuivre dans la même veine que mon collègue le sénateur Smith. Un grand nombre de travailleurs autonomes, de chômeurs, de malades et de proches aidants sont très inquiets de la lenteur bureaucratique qu’ils observent lorsqu’ils tentent d’obtenir de l’aide. Comme vous le savez, énormément de Canadiens sont sans revenu.

J’aimerais savoir quelles mesures vous comptez mettre en place. Comme on le sait, les fonctionnaires travaillent de la maison actuellement, les systèmes informatiques sont débordés, les services de téléconférence le sont également. Quelles mesures spécifiques allez-vous mettre en place à cet égard? Le premier ministre du Québec, François Legault, a parlé du 6 avril comme de la date à partir de laquelle les prestations commenceraient à être versées. Est-ce bien le cas?

M. Morneau : Merci beaucoup. Je vais répéter en français que nous estimons qu’il est très important de trouver une façon simple et efficace de livrer des fonds aux gens qui se trouvent dans une situation difficile. Nous savons que, pour les personnes malades de même que pour ceux et celles qui doivent rester à la maison, peu importe la raison, il est très important que l’intervention soit rapide. C’est pourquoi nous avons opté pour une approche très simple où nous ne poserons que deux questions : d’abord, la personne qui fait la demande a-t-elle reçu 5 000 $ en revenu au cours de la dernière année? Deuxièmement, cette personne se trouve-t-elle présentement dans une situation où, à cause de la COVID-19, elle ne reçoit aucun revenu? Avec notre système, nous croyons qu’il sera possible de recevoir des fonds d’ici deux à trois semaines. Voilà la situation. Je ne peux pas être plus exact. Toutefois, à mon avis, on parle approximativement du 6 avril ou de la semaine du 6 avril.

Il est clair que nos systèmes ne sont pas adaptés à une situation comme celle qui prévaut aujourd’hui. C’est pourquoi nous travaillons chaque jour pour nous assurer que les systèmes fonctionnent, compte tenu du nombre de personnes qui se trouvent dans une situation difficile.

La sénatrice Miville-Dechêne : Ma deuxième question concerne l’équité pour les travailleurs autonomes. Pourquoi les travailleurs autonomes doivent-ils être privés de revenu pendant 14 jours, alors que vous avez décidé de laisser de côté la période d’attente pour les chômeurs? Je précise que ces travailleurs ne reçoivent aucun revenu. Comme on le sait, normalement la taille de leurs contrats varie. Ils peuvent obtenir de gros contrats, de petits contrats ou encore 20 $ pour une leçon de musique. Pourquoi avez-vous placé la barre si haut pour les travailleurs autonomes, qui, justement, se trouvent dans une situation particulièrement précaire?

M. Morneau : Permettez-moi d’expliquer notre approche. Chaque personne qui, au cours des 12 derniers mois, a gagné 5 000 $ — ce qui est le cas de la grande majorité des travailleurs, qu’ils soient pigistes, chauffeurs pour la compagnie Uber ou autre — sera dans cette situation. Ces gens constateront ainsi que, à cause de la COVID-19, ils sont sans revenu. Ils pourront donc recevoir des prestations à compter du 15 mars pendant une période de 16 semaines. Ce sera exactement la même situation pour les autres personnes, au sein de notre économie, qui bénéficient du programme d’assurance-emploi.

La sénatrice Miville-Dechêne : Ma question, plus précisément, est la suivante : pourquoi 14 jours sans aucun revenu quand on sait que les travailleurs autonomes, en temps normal, peuvent obtenir plusieurs types de contrats? Vous placez la barre très haut. Ils ne peuvent générer un revenu de 20 $ ou de 40 $ par semaine s’ils veulent recevoir ces prestations.

M. Morneau : On ne parle pas de 14 jours. Je ne comprends pas la question.

[Traduction]

La sénatrice Miville-Dechêne : Ils doivent n’avoir aucun revenu pendant 14 jours sur une période d’un mois. C’est ce que j’ai lu. S’ils gagnent un revenu, aussi minime soit-il, ils ne sont pas admissibles à la mesure de soutien. À mon avis, c’est une condition extrêmement stricte pour ces travailleurs qui ont de multiples contrats. Dans certains cas, ils peuvent avoir conservé un très petit contrat, mais avoir perdu leur plus important.

La présidente : Honorable sénatrice, nous devons maintenant céder la parole à un autre sénateur.

Le sénateur Campbell : Merci de votre présence aujourd’hui, monsieur le ministre. Le gouvernement a chargé la Banque de développement du Canada, la BDC, de la mise en œuvre d’une bonne partie de l’aide financière aux petites et moyennes entreprises. Étant donné la situation actuelle, la BDC risque-t-elle d’être submergée de demandes et de ne pas être en mesure d’y répondre dans des délais qui permettraient aux entreprises d’éviter la faillite?

M. Morneau : Pour répondre à la question précédente de la sénatrice, je dirai que la décision ne concerne que les gens qui n’ont pas de revenus. Nous l’avons prise parce que c’est la seule façon d’appliquer la mesure souhaitée.

En fait, sénateur, l’approche adoptée par rapport à la Banque de développement du Canada n’oblige pas les gens à s’adresser à cette dernière ni à Exportation et développement Canada, d’ailleurs. En fait, ces organismes soutiennent les banques. Ainsi, une petite entreprise peut s’adresser à son banquier actuel pour obtenir un prêt. Ce prêt sera couvert par une garantie de crédit de la Banque de développement du Canada.

Nous continuons de disposer de toute la capacité du système bancaire canadien pour mobiliser les gens. C’est la même approche qui a été suivie en 2008-2009. Pendant cette période, 10 000 petits employeurs ont utilisé cette approche pour obtenir du crédit. Nous reprenons donc l’approche qui avait permis de dégager 11 milliards de dollars de capitaux à l’époque. Nous croyons que le moyen le plus efficace est d’utiliser le crédit que la Couronne met à notre disposition par l’entremise de la Banque de développement du Canada et que nous offrons par l’entremise des banques. Cette approche dépasse le cadre des six grandes banques et s’applique aussi à d’autres banques plus modestes et à Desjardins, par exemple, afin que les gens puissent obtenir du crédit auprès de leur banque.

Le sénateur Campbell : J’ai une autre question à poser. Nous ne sommes pas en 2008. Selon moi, la crise actuelle sera bien pire que celle de 2008, et de loin. La BDC agit à titre de soutien aux milieux financiers; je comprends cela. Néanmoins, je crains vraiment qu’à un moment donné, elle ne soit submergée par la quantité phénoménale de demandes à venir. Je souhaite m’assurer que vous êtes en mesure d’évaluer la capacité et l’efficacité de la BDC, et qu’un plan est mis en place si cette dernière venait à être débordée. Comme vous l’avez dit, nous nous dirigeons vers une zone inconnue, et nous n’avons donc aucune expérience préalable. C’est ce qui me préoccupe.

M. Morneau : Sénateur, vous exprimez une préoccupation valable. Il est absolument vrai que nous vivons une situation sans précédent. Nos systèmes, nos approches pour traiter les demandes des entreprises au quotidien n’ont pas été testés dans de telles circonstances. Voilà exactement pourquoi nous avons choisi le moyen que nous estimons le meilleur pour offrir du crédit aux entreprises. Selon nous, il n’existe pas de meilleure solution. Cela dit, nous sommes ouverts aux suggestions pour l’améliorer. Nous surveillerons la situation non pas de semaine en semaine, mais de jour en jour afin de déterminer quelles sont les difficultés. Parmi les facteurs que nous continuons d’examiner, notamment en collaboration avec les banques, se trouve leur capacité à gérer le crédit aux entreprises.

La situation évoluera très rapidement. Nous devons penser aux sommes d’argent à verser, déterminer de quel ordre elles seront et comment elles seront versées. Cela vaut pour tout, depuis les prestations versées directement aux employés jusqu’aux prêts consentis aux entreprises. Faites-moi confiance, si nous estimons qu’il faut rectifier le tir, nous le ferons. Si le projet de loi vise à nous donner une certaine capacité que nous n’avons pas en temps normal, c’est entre autres parce que nous ne savons pas ce que l’avenir nous réserve. Nous ne prétendons pas savoir quelle sera la situation dans les jours et les semaines à venir.

Le sénateur Campbell : Merci, monsieur le ministre. Soit dit en passant, je vous fais confiance.

Le sénateur Munson : Merci, monsieur le ministre, d’être ici aujourd’hui. C’est très important.

(1040)

J’ai trois brèves questions à poser au nom du groupe dont je fais partie, le groupe progressiste du Sénat. La première vient de la sénatrice Lillian Dyck, de la Saskatchewan, et elle concerne les Autochtones.

Un budget de 305 millions de dollars est prévu. On s’inquiète, car lors de la pandémie de H1N1, le nombre de cas était beaucoup plus élevé chez les Autochtones que dans le reste de la population canadienne. Pouvez-vous nous expliquer en quoi ces 305 millions de dollars suffiront à la protection contre la COVID-19 et au traitement dans les communautés autochtones?

M. Morneau : Merci. Nous sommes conscients que la crise causée par la COVID-19 nous affectera tous dans notre mode de vie et que certains d’entre nous seront peut-être plus durement touchés en raison de leur situation; je pense notamment aux gens qui habitent dans les réserves et à ceux qui ont un accès limité aux soins de santé. C’est pour cette raison que nous avons affecté des fonds spécifiquement aux peuples autochtones. Évidemment, les sommes engagées pour l’ensemble du pays sont destinées à l’ensemble des Canadiens, il ne faut pas l’oublier.

Le maintien de notre capacité à gérer cette crise de santé publique — qui sera assuré par le projet de loi dont vous êtes saisis — nous permettra de réagir aux problèmes à mesure qu’ils surviennent. Cette capacité de réaction en continu aux problèmes émergents visera également les enjeux qui touchent les Autochtones.

Si nous avons débloqué 305 millions de dollars dans l’immédiat, c’est parce que nous croyons que certaines mesures doivent être mises en œuvre sans attendre. Advenant la nécessité de mettre en place d’autres mesures en raison de situations émergentes qui ne peuvent être prévues à l’heure actuelle, nous réagirons et mettrons en œuvre les mesures requises.

Le sénateur Munson : Je vous remercie, monsieur le ministre. En ce qui concerne les prestations d’assurance-emploi, rappelons que de nombreux Canadiens n’ont pas accès à un ordinateur, particulièrement dans un contexte où les écoles et les bibliothèques sont fermées un peu partout au pays. Comment ces Canadiens peuvent-ils présenter une demande s’ils ne peuvent pas le faire en ligne? Où doivent-ils aller? Comment doivent-ils procéder? Ils tiennent assez désespérément à soumettre leur demande dès que possible, je crois. Beaucoup de Canadiens n’ont pas accès aux outils technologiques.

M. Morneau : Tout d’abord, nous devrons relever de nombreux défis, car, comme vous le savez, un grand nombre de personnes ne sont pas inscrites au régime d’assurance-emploi. Environ 5,7 millions des 19 millions de travailleurs canadiens ne sont pas inscrits à ce régime, et la plupart d’entre eux ne le connaissent pas du tout. C’est pourquoi nous mettons en place une approche très simplifiée, ce qui est extrêmement important pour que les gens puissent recevoir les prestations auxquelles ils ont droit.

La plupart des Canadiens sont en mesure d’avoir accès à Internet — je reconnais toutefois que certains d’entre eux ne le peuvent pas — et pourront donc recevoir un dépôt direct. Nous collaborons avec les institutions bancaires pour augmenter le nombre de personnes qui ont accès au dépôt direct. À l’heure actuelle, quelque 70 % des Canadiens utilisent le dépôt direct par l’entremise du système de l’Agence du revenu du Canada. Nous examinons présentement les façons d’accroître ce pourcentage, en collaboration avec les banques.

Nous sommes conscients des grandes difficultés auxquelles doivent faire face les personnes qui n’ont pas accès à Internet. Nous sommes en voie de réaffecter un nombre considérable d’employés vers les centres d’appels. Nous avons rapidement mis sur pied un centre d’appels à l’Agence du revenu du Canada. Environ 1 300 employés seront affectés à l’administration du régime d’assurance-emploi. Comme le traitement des déclarations de revenus sera retardé, près de 1 000 employés affectés au système de l’Agence du revenu du Canada pourront répondre aux demandes d’assurance-emploi.

Ce sont là les chiffres qui s’appliquent depuis hier. Il est certain que nous devrons faire preuve de souplesse pour traiter un nombre d’appels qui risquent d’être plus élevé que jamais.

Le sénateur Munson : Merci. En ce qui concerne les dettes de cartes de crédit, le gouvernement collaborera-t-il avec les grandes sociétés émettrices et les banques pour offrir de l’aide à leur clientèle, que ce soit en ce qui concerne les paiements exigés ou les taux d’intérêt appliqués, en cette période sans précédent?

M. Morneau : Les dettes de cartes de crédit relèvent en fait des banques. Nous travaillons avec elles pour déterminer comment elles peuvent venir en aide aux gens en cette période. Chose importante, nous nous sommes entendus avec les banques sur des idées comme la possibilité de reporter un paiement exigible pour une carte de crédit.

Il existe trois types de dettes considérées comme non garanties : les dettes de cartes de crédit, les prêts automobiles et les prêts non garantis. Les banques ont mis en place des protocoles qui permettent aux gens de reporter des paiements. Nous collaborons avec elles afin qu’elles en informent les Canadiens. Nous étudions aussi d’autres façons d’offrir de l’aide, mais c’est un bon début.

La sénatrice Galvez : Monsieur le ministre, les modifications à la Loi sur le développement des exportations prévues dans le présent projet de loi accordent au gouvernement une plus grande latitude pour accroître les responsabilités, rajuster le capital autorisé et élargir le type d’activités qui peuvent être financées en confiant un nouveau mandat en matière d’activité commerciale intérieure à Exportation et Développement Canada et en ouvrant la voie à des mesures de renflouement importantes.

Comme vous l’avez dit, ces mesures devraient être efficaces sur le plan économique et protéger les travailleurs du pays, pas comme le renflouement de l’industrie automobile canadienne de 2008, qui a fait perdre aux contribuables canadiens des milliards de dollars d’investissements qu’ils n’ont jamais récupérés, sans améliorer de façon durable le sort des travailleurs puisque les usines sont encore fermées plus d’une décennie plus tard.

Comment les Canadiens peuvent-ils avoir l’assurance que ces mesures serviront à investir dans les industries de l’avenir et non celles du passé, ainsi qu’à bâtir une économie réellement durable et robuste au lieu de maintenir en vie des entreprises parasites dans des industries désuètes et très polluantes? Comment les Canadiens peuvent-ils avoir la certitude que les investissements effectués favoriseront la lutte contre les changements climatiques, la réconciliation et le respect des droits de la personne puisque la loi actuelle n’offre pas de telles garanties?

M. Morneau : Sénatrice, je vous remercie de votre question. Votre question sous-entend que les circonstances actuelles sont normales, mais elles ne le sont pas. Nous sommes dans une situation où un nombre considérable d’entreprises, petites et grandes, vont connaître des difficultés extrêmes dans les semaines et les mois à venir.

Avec l’adoption de ce projet de loi, nous voulons nous donner les moyens, tout au long de la crise, de soutenir ces travailleurs et ces entreprises qui, de toute évidence, forment un vaste bassin d’employeurs à l’échelle du pays. Nous nous abstenons de faire de la discrimination en accordant plus d’importance à une entreprise comparativement à une autre, ou en estimant qu’un employé est supérieur à un autre.

Nous constatons que les Canadiens subissent des pressions extrêmes et que, à court terme, ils n’auront pas assez d’argent pour acheter de la nourriture. Nous devons trouver une solution pour pouvoir leur fournir l’argent nécessaire à leur subsistance. Nous devons trouver une solution pour traverser cette période sombre en aidant les entreprises à pouvoir offrir les emplois aux travailleurs dès que nous aurons franchi le tunnel. C’est notre objectif.

La situation variera d’une industrie à l’autre, j’en conviens. Toutefois, je peux vous dire que, au cours des derniers jours, je me suis entretenu avec des dirigeants de différentes industries, allant du secteur du transport aérien au secteur touristique dans son sens large en passant par celui de l’énergie, et ils m’ont dit que, en l’absence d’un quelconque crédit ou d’un autre moyen de surmonter l’épreuve, leurs entreprises seront contraintes de fermer leurs portes. Si c’était le cas, nous nous retrouverions avec une économie bien différente.

Vous pouvez vous attendre à ce que nous fassions passer les intérêts de la population en premier. Vous pouvez vous attendre à que nous tentions, par tous les moyens possibles, de protéger le gouvernement et les Canadiens — qui sont, évidemment, notre priorité absolue — à mesure que nous aiderons les entreprises à faire face à cette conjoncture.

C’est ce que nous cherchons à faire avec ce projet de loi. Je suis convaincu que les Canadiens conviendront qu’il s’agit d’une mesure aussi nécessaire qu’urgente qui, à l’heure actuelle, devrait être prise sans autre parti pris que celui de but de venir en aide aux gens pendant cette crise.

La sénatrice Galvez : Pouvez-vous nous assurer que vous allez regarder ce qui s’est passé, comment nous en sommes arrivés à cette situation et quels ont été les différents facteurs sociétaux et économiques qui nous ont placés dans cette situation de grande vulnérabilité afin que nous ne nous retrouvions plus dans une telle situation et que nous soyons prêts à affronter la prochaine crise?

M. Morneau : Je comprends ce que vous dites, que tout n’est pas parfait au Canada. Cela dit, nous entrons dans cette crise sur une base très solide; nous sommes mieux placés que la plupart des autres pays. Nous avons un très bon système de santé; nous avons un très bon système bancaire, peut-être le meilleur au monde; nous avons une situation financière qui nous permet de faire des investissements pour faire face à cette crise.

(1050)

Ce qui se passe à l’heure actuelle est absolument sans précédent. Donc, pour ce qui est d’être prêts à affronter ce genre de situation, je pense que le mieux est de soutenir les institutions solides qui nous permettent de surmonter de tels défis. C’est ce que nous avons fait, ce qui est une bonne chose. Cela nous permet de réagir d’une manière qui est, à mon avis, appropriée et nous espérons qu’à l’issue de cette situation, nous pourrons répondre au genre de question que vous posez quant à ce que nous pouvons faire pour aider tous les Canadiens à continuer de bien s’en sortir.

Le sénateur Ngo : Monsieur le ministre, je vous remercie d’être parmi nous aujourd’hui. Peu de temps après qu’on ait déclaré que l’épidémie de COVID-19 avait atteint les proportions d’une pandémie, le gouvernement a émis une interdiction de voyager et a demandé aux Canadiens de prendre les précautions nécessaires pour aider à ralentir la propagation du virus. Comme la situation s’aggravait de jour en jour, de nombreux Canadiens ont pris la décision nécessaire et responsable d’annuler leurs projets de voyage. Les compagnies aériennes ont réagi en offrant diverses options de voyage souples, donnant notamment aux voyageurs la possibilité de repousser la date de leur voyage plutôt que de réclamer un remboursement. Par conséquent, pour éviter de mettre leur vie et leur santé en péril, nombre de Canadiens ont opté pour un moindre mal, soit reporter leurs déplacements à plus tard.

Dans la situation actuelle, beaucoup de Canadiens ont besoin d’argent pour payer leurs factures et acheter de la nourriture et des produits essentiels. Or, ce n’est pas avec un bon de voyage qu’ils pourront payer. Que fera le gouvernement pour que les Canadiens obtiennent un remboursement? Par ailleurs, le gouvernement peut-il également s’assurer que les compagnies aériennes rembourseront les Canadiens une fois qu’elles auront été renflouées?

M. Morneau : Merci de votre question. Je suis certain que nous devrons faire face à des difficultés qui surviendront dans des secteurs auxquels nous ne nous attendons pas actuellement. L’une d’entre elles portera certainement sur notre capacité à nous déplacer dans un avenir rapproché. Les compagnies aériennes éprouveront des difficultés, et nous collaborerons avec elles pour gérer la situation. De toute évidence, sur le plan individuel, les difficultés dont vous parlez sont bien réelles.

À l’heure actuelle, ma priorité est l’urgent besoin de verser une prestation aux Canadiens qui leur permettra de joindre les deux bouts durant la période où, manifestement, beaucoup de gens seront privés de leur source normale de revenu. C’est la priorité.

Évidemment, une partie de la prochaine étape, que nous devons franchir non pas d’ici quelques semaines, mais bien d’ici quelques heures, est de déterminer comment nous pouvons nous assurer que les entreprises sont capables de faire la transition entre la crise et la prochaine étape. C’est de la plus haute priorité pour les petites et moyennes entreprises. De surcroit, dans le cas de certaines grandes entreprises, comme les compagnies aériennes, non seulement elles n’engrangent pas de recettes provenant de réservations, mais elles doivent aussi rembourser les gens, ce qui entraîne un déficit. Par conséquent, nous collaborons avec elles. Bien sûr, favoriser la réussite de ces entreprises nous permettra de faire en sorte qu’on s’occupera adéquatement des consommateurs, et c’est ce que nous nous efforçons de faire actuellement.

Le sénateur Ngo : Merci. Outre les pressions économiques que la pandémie de coronavirus exerce sur les provinces, l’Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador doivent composer avec l’effondrement des cours de l’énergie, qui sont à leur plus bas niveau depuis 20 ans.

Monsieur le ministre, vous avez parlé de mesures de relance à l’égard des activités d’assainissement et des puits de pétrole abandonnés. Qu’est-ce que le gouvernement compte faire exactement pour aider ces provinces et l’industrie canadienne de l’énergie dans ces circonstances exceptionnelles, quelle forme prendra cette aide et avec quelle rapidité sera-t-elle offerte?

M. Morneau : Permettez-moi d’aborder en premier lieu la question. De toute évidence, le secteur de l’énergie se trouve dans une situation particulièrement précaire. Contrairement à tous les autres secteurs canadiens qui sont aux prises avec un problème énorme, mais unique, le secteur de l’énergie se heurte à trois problèmes. Premièrement, il y a la situation actuelle concernant l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, la Russie et l’Arabie saoudite ne réussissant pas à s’entendre quant à la stabilisation du marché pétrolier. Deuxièmement, il y a le tumulte des marchés boursiers, qui rend très difficile tout financement. Troisièmement, il y a la COVID-19. Il s’agit là de problèmes bien réels. Comme vous l’avez mentionné, les provinces subissent effectivement des pressions et des contraintes. Nous communiquons quotidiennement avec elles pour discuter des répercussions que ces problèmes ont sur les recettes des gouvernements provinciaux. Nous communiquons aussi d’heure en heure avec les représentants du secteur de l’énergie pour déterminer comment mettre à leur disposition des possibilités de crédit appropriées. C’est ce que nous faisons actuellement.

Je ne sais pas encore avec certitude quand cette aide sera offerte, mais on ne parle pas ici de semaines. Dans quelques heures, ou peut-être dans quelques jours, nous pourrons assurer la mise en place de facilités de crédit, surtout pour les petites et moyennes entreprises de ce secteur. Puis, il y a le grand sous-secteur pétrolier et gazier. La plupart de ses 10 plus grandes entreprises entretiennent des relations de crédit avec les banques et, dans la majorité des cas, ont du crédit à leur disposition. Cependant, elles sont également soumises à de fortes pressions. Nous nous penchons donc individuellement sur chaque cas dans ce secteur.

Tout cela est important, mais comme je l’ai dit à d’autres aujourd’hui dans cette enceinte, nous nous concentrons d’abord sur les personnes. Nous étudions des façons de soutenir les entreprises, et nous continuerons à le faire.

Le sénateur Loffreda : Monsieur le ministre, je vous remercie d’être ici et d’avoir mis au point, avec tous les députés de la Chambre des communes, un excellent ensemble de mesures d’aide, dont les Canadiens ont grand besoin à ce moment-ci.

Nos banques se portent bien et elles ont une excellente capacité financière. Vous l’avez mentionné. Je vous remercie de les avoir intégrées à la solution. Nous avons assez bien réussi à faire reporter de six mois les paiements hypothécaires des particuliers. Je sais que cela se décide au cas par cas, mais avons-nous envisagé une approche similaire pour les PME? En tant qu’ancien banquier, je crains que, dans quelques mois, lorsque nous examinerons les bilans et les états des résultats des entreprises individuelles, les chiffres ne soient pas très bons et les prévisions ne soient pas très prometteuses. Ainsi, avons-nous envisagé une approche similaire?

Par ailleurs, avons-nous envisagé que la Banque de développement du Canada puisse garantir directement certains prêts en difficulté? Je sais que vous travaillez avec les banques pour financer de futurs prêts. Pourriez-vous nous parler de certaines des discussions que vous avez eues avec nos banques? Comme vous le savez, le retour des Canadiens au travail est important si nous voulons une reprise rapide. Nous ne voulons pas une hausse vertigineuse du chômage.

Enfin, avons-nous étudié, avec la Banque de développement du Canada, la possibilité non pas de faire concurrence directe aux banques, mais d’élaborer des programmes ou de faire grâce. Le terme « grâce » n’ayant pas la cote auprès des banquiers, parlons donc de programmes pour créer un ensemble de mesures d’encouragement afin d’aider les entreprises qui ont gardé leurs employés ou qui en embauchent? Avons-nous étudié ces possibilités avec la Banque de développement du Canada, ainsi que d’autres possibilités pour faire participer plus activement la Banque de développement du Canada dans le soutien des banques canadiennes?

M. Morneau : Il s’agit de deux questions distinctes. Premièrement, avons-nous consulté les banques sur le soutien qu’elles pourraient apporter à leurs clients ou aux organismes qui ne font pas actuellement partie de leur clientèle et qui pourraient avoir besoin de leur aide? Le travail à ce sujet se poursuit, et étant donné l’état d’avancement des consultations, je ne peux rien vous dire pour l’instant. Je peux toutefois vous assurer que nous nous efforçons de garantir la disponibilité du crédit, qui est l’oxygène indispensable pour la réussite des entreprises.

Comme vous l’avez constaté, nous travaillons avec la Banque du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières pour augmenter les liquidités du secteur bancaire. Nous avons injecté environ 500 milliards de dollars de liquidités supplémentaires dans le secteur bancaire, ce qui nous a permis d’offrir du crédit totalisant environ 1,4 billion de dollars, au lieu des 900 milliards offerts auparavant. Il s’agit maintenant de savoir comment nous pouvons garantir que la capacité de prêt est utilisée. Nous y travaillons.

En ce qui concerne le fait que la Banque de développement du Canada travaille directement sur des approches qui sont, d’après ce que je comprends, non commerciales, nous considérons de notre côté que c’est au gouvernement qu’il incombe de travailler sur des concepts non commerciaux et à la Banque de développement de fournir un soutien commercial, conformément au mandat qui est le sien. Ainsi, elle devra entre autres élaborer le filet de sécurité assorti au Programme de crédit aux entreprises. C’est d’ailleurs le concept que nous avons retenu pour la Banque de développement du Canada dans le cadre de ce projet.

Ces mesures seront précisées dans les prochains jours. Nous pensons qu’elles représenteront une aide importante. Comme je l’ai mentionné par ailleurs, nous restons ouverts à d’autres propositions susceptibles de nous faire surmonter la crise.

Le sénateur Loffreda : Merci beaucoup de votre réponse. Je crois qu’il est essentiel que tous les Canadiens retournent au travail. Je vous remercie de tout ce que vous avez fait.

Si on regarde ce qui a été fait pour les particuliers, le message est clair : les paiements hypothécaires seront reportés de six mois. Il faut aussi envoyer un message clair à nos entreprises. J’ai reçu beaucoup de questions de la part d’anciens clients, et ils ne semblent pas certains de ce que nous tentons de faire. Même son de cloche du côté de la Banque de développement du Canada et d’Exportation et développement Canada. Les messages ne sont pas clairs. Je crois que nous devrions envoyer un message uniforme aux banques et leur expliquer comment nous voyons les choses.

(1100)

Je crois que la situation est plus claire pour les particuliers. Nous sommes prêts à reporter de six mois les versements hypothécaires, au cas par cas; il suffit de communiquer avec sa banque. La situation n’est pas aussi claire en ce qui concerne les entreprises. Si nous devons concentrer notre message sur un point en particulier, c’est qu’au bout du compte, les banques sont là pour aider, que la Banque de développement du Canada va intervenir, qu’elle jouera un rôle accru. Il faut transmettre à tous le message que nous sommes là pour les aider. Si nous devons nous concentrer sur une chose au cours des prochains mois, j’aimerais que ce soit sur cela.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Bienvenue, monsieur le ministre. Au préalable, j’aimerais souligner le travail extraordinaire qu’ont fait nos collègues à l’autre endroit dans le cadre de l’adoption de ce projet de loi, non seulement pour venir en aide aux travailleurs canadiens, mais surtout pour protéger le système démocratique du Canada.

Monsieur le ministre, la plupart des spécialistes en matière de fiscalité ou de finances que j’ai entendus ce matin affirment que l’approche du gouvernement, qui consiste à verser directement aux travailleurs des sommes d’argent pour subvenir à leurs besoins, était sans doute la pire approche à adopter, compte tenu du fait qu’il y a plus de 1 million de travailleurs qui ont demandé des prestations d’assurance-emploi et que 5 millions de Canadiens ne sont pas inscrits au fichier.

Pourquoi n’avoir pas fait comme certains pays — la Norvège, entre autres —, qui se sont appuyés sur les entreprises privées et ont subventionné les salaires des employés afin que ces entreprises puissent retenir leurs travailleurs? L’approche que vous avez prise, monsieur le ministre, risque de créer un bris d’emploi entre l’entreprise et le travailleur. Lorsque la crise sera passée, ces entreprises feront face à un important problème de recrutement. S’agit-il de la meilleure approche, soit celle de financer des millions de travailleurs plutôt que de soutenir des milliers d’entreprises afin qu’elles puissent garder à leur service ces employés, de sorte qu’il y ait toujours un lien d’emploi entre l’employé et l’entreprise lorsque le marché reprendra? À l’heure actuelle, vous venez de briser ce lien.

M. Morneau : Merci de votre question. Il est clair que nous ne sommes pas d’accord. Notre approche permettra de maintenir la relation entre les entreprises et leurs employés. Il n’y a aucune raison, selon notre approche, pour que la compagnie doive se séparer de ses employés. De cette façon, il est possible de verser des fonds directement aux gens. Nous saurons ainsi qu’il s’agit de citoyens qui ne reçoivent aucun revenu, et c’est très important. En même temps, les mesures aideront les employeurs en leur versant une subvention également.

Donc, nous pensons que c’est une approche qui fonctionne. À mon avis, c’est préférable à la situation au Danemark, où les compagnies doivent faire la preuve qu’elles génèrent moins de revenus. Notre approche qui préconise le paiement direct est importante pour les gens et aussi pour les entreprises, parce que celles-ci peuvent maintenir le lien avec leurs employés. C’est pour cette raison que nous avons décidé d’utiliser cette nouvelle approche, qui n’est pas prévue dans notre programme d’assurance-emploi. Cela signifie que, après la crise, chaque personne qui a la possibilité de faire appel au système d’assurance-emploi pourra le faire. Cependant, les mesures que nous proposons maintenant se distinguent du programme d’assurance-emploi, car il n’y a pas de séparation entre l’employeur et l’employé.

Le sénateur Boisvenu : Il y a quelque chose que je ne comprends pas ou que vous ne comprenez pas. J’ai parlé à des comptables récemment. La plus grande part du travail des bureaux de comptables à l’heure actuelle est liée à l’émission de cessations d’emploi afin que les gens puissent bénéficier du soutien financier de l’État. En faisant cela, le lien d’emploi est brisé entre l’employé et l’entreprise. Il y a quelque chose que je ne comprends pas quand vous dites que l’entreprise pourra maintenir le lien d’emploi alors qu’elle est obligée de prévoir une cessation d’emploi pour que l’employé puisse profiter de votre programme.

M. Morneau : C’est une question de faits. Nous avons changé notre approche. Si les employés sont dans une situation où ils n’ont pas de revenus, à savoir que leur employeur ne les paie pas, ils peuvent recevoir des prestations. Il n’est pas nécessaire d’avoir une cessation d’emploi. Ils ne doivent tout simplement pas recevoir d’argent de la part de leur employeur. De cette façon, il s’agit d’une subvention salariale aux employeurs.

[Traduction]

La sénatrice Pate : Monsieur le ministre, vous-même et d’autres ministres avez précisé que cet ensemble de mesures législatives louables constitue une première étape. Malheureusement, bon nombre de Canadiens nous disent qu’il y a encore de nombreuses lacunes. L’accès aux prestations est difficile et, par conséquent, de nombreux Canadiens n’auront pas les moyens de rester à la maison et de respecter la consigne de distanciation physique. Ce sont eux qui subiront de manière disproportionnée les conséquences économiques de la COVID-19.

Je m’intéresse à plusieurs enjeux. D’abord, quels sont les moyens pris pour envisager la possibilité d’un revenu de base garanti en tant que mesure à court et à long terme pour faire face à de futures crises sanitaires?

En outre, nous sommes conscients que les conséquences humaines, sociales, sanitaires et économiques de cette pandémie affecteront de manière disproportionnée les communautés les plus marginalisées.

Afin de garantir que le respect des droits protégés par la Constitution demeure au centre de la réponse du Canada à la COVID-19, le gouvernement va-t-il mettre en place un comité de surveillance composé d’experts en droits de la personne représentant ces communautés, et chargé de fournir en permanence des conseils et de la rétroaction concernant la mise en œuvre de cette mesure législative et d’autres décisions relatives à la COVID-19? De même, dans l’éventualité où une situation d’urgence serait déclarée en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence, le gouvernement s’engagera-t-il à appliquer les dispositions en matière de surveillance prévues dans la Loi sur les mesures d’urgence aux mesures prises en vertu du projet de loi dont nous sommes saisis?

M. Morneau : Pour répondre d’abord à la dernière question, je préfère ne pas m’avancer sur ce qui pourrait arriver, ou pas, dans une situation encore hypothétique.

Pour ce qui est de vos autres questions, c’est vrai que certaines personnes trouvent ardues les démarches pour obtenir la nouvelle prestation. Nous en avons fait l’annonce hier. Nous faisons déjà le nécessaire pour nous doter des capacités administratives requises pour la mettre en œuvre le plus rapidement possible, en misant sur les systèmes que nous savons être assez robustes pour répondre aux besoins des Canadiens.

À mon avis, nous essayons déjà de tout faire pour que l’argent se rende jusqu’à ceux qui sont touchés par la crise. Je suis conscient que d’aucuns souhaiteraient que l’on change nos façons de faire et que nous instaurions un revenu annuel garanti, et je suis persuadé qu’ils ont leur petite idée sur la manière de s’y prendre. Ce débat est sûrement loin d’être terminé.

Cela dit, nous n’en sommes pas là. Il n’est pas question de modifier nos façons de faire à long terme. Il faut voir aux besoins immédiats et pressants, car dans deux ou trois semaines, certaines personnes n’auront plus d’argent pour se nourrir, pour acheter des médicaments ou pour payer le loyer. Il est là, notre objectif à court terme. Sans oublier qu’à court terme aussi, de nombreuses entreprises subiront un stress énorme.

Le 1er avril approche à grands pas. Les petites et moyennes entreprises devront payer le loyer le 1er avril. Il y a d’importants problèmes à régler immédiatement. Nous ne nous laisserons donc pas entraîner dans une discussion sur la restructuration à long terme de notre système. Ce serait inapproprié en ce moment.

De toute évidence, nous tiendrons compte de votre suggestion ainsi que des autres suggestions sur la façon d’obtenir des points de vue pertinents et d’établir une gouvernance appropriée en cette période difficile pour tous les Canadiens. C’est tout à fait approprié. Nous n’aurions jamais pensé chercher à obtenir des pouvoirs aussi étendus que ceux que nous demandons aujourd’hui, mais cela s’impose en raison de la situation actuelle. Nous reconnaissons la nécessité d’avoir des discussions pertinentes et d’assurer une gouvernance appropriée et nous nous efforcerons de le faire.

La présidente : Il reste trois minutes à la séance.

(1110)

Le sénateur R. Black : Merci beaucoup. En ce qui concerne la distribution de l’aide financière qui sera allouée en vertu du projet de loi C-13, il y a déjà un système qui permet à l’Agence du revenu du Canada de déposer de l’argent directement dans le compte bancaire des contribuables canadiens.

Le gouvernement a-t-il envisagé de se servir du dépôt direct pour distribuer l’aide financière au lieu de poster des chèques ou de créer un nouveau système de distribution bureaucratique? Une fois la crise passée, de nombreux Canadiens fatigués et à court d’argent auront dépensé toutes leurs économies et leurs prestations d’assurance-emploi pour payer le loyer, l’épicerie et les factures de carte de crédit. La situation n’est pas comparable à celle de 2008. Comment rétablirons-nous la confiance des consommateurs une fois la crise passée?

M. Morneau : Ce sont deux questions importantes. Concernant votre première question, je pense que vous m’avez entendu dire plus tôt que nous essayions de ne pas envoyer des chèques aux gens. Nous essayons de mettre à profit les moyens que l’Agence du revenu du Canada et d’autres ont à leur disposition pour faire des dépôts directs. C’est essentiel à notre approche.

Je crois comprendre qu’aujourd’hui, environ 70 % des Canadiens ont recours au dépôt direct par l’intermédiaire de l’Agence du revenu du Canada. C’est une des raisons pour lesquelles nous réfléchissons à cette possibilité depuis la semaine dernière. Le fait que les banques inscrivent un plus grand nombre de personnes au dépôt direct sera d’une grande utilité. C’est une chose à laquelle nous travaillons en ce moment.

Bien sûr, il y a des gens qui auront besoin de chèques. Nous faisons aussi en sorte que le processus soit le plus rapide possible, et il est aussi très efficace, me dit-on. C’est extrêmement important.

Quant à votre seconde question, j’y répondrai en disant que nous allons résoudre cette crise par étapes. En ce moment, nous devons essayer de faire ce qui est urgent et important. Nous allons devoir réfléchir à la manière dont nous allons faire sortir les gens de cette crise et redonner confiance aux consommateurs. Maintenant n’est pas vraiment le bon moment pour parler de retrouver la confiance des consommateurs alors qu’on demande aux gens de rester chez eux et qu’ils ne peuvent littéralement pas consommer. Ce moment viendra, cependant.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, le comité siège maintenant depuis une heure. Conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, je suis obligée d’interrompre les délibérations afin que le comité puisse faire rapport au Sénat.

Monsieur le ministre, au nom de tous les sénateurs, je vous remercie de vous être joint à nous aujourd’hui et de nous avoir aidés dans nos travaux concernant ce projet de loi. Je tiens également à remercier la fonctionnaire de votre ministère.

Des voix : Bravo!

La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que la séance du comité soit levée et que je déclare au Sénat que les témoins ont été entendus?

Des voix : D’accord.


Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.

Rapport du comité plénier

L’honorable Pierrette Ringuette (Son Honneur la Présidente intérimaire suppléante) : Honorables sénateurs, le comité plénier, qui a été autorisé par le Sénat à étudier la teneur du projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19, signale qu’il a entendu lesdits témoins.

Deuxième lecture

L’honorable Peter Harder (coordonnateur législatif suppléant du représentant du gouvernement au Sénat) propose que le projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19, soit lu pour la deuxième fois.

[Traduction]

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Troisième lecture

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

L’honorable Peter Harder (coordonnateur législatif suppléant du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5b) du Règlement, je propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois maintenant.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président suppléant : Le sénateur Harder a la parole.

Le sénateur Harder : Merci, honorables sénateurs, de votre présence aujourd’hui, lors de cette séance sans précédent, et de me permettre de proposer la troisième lecture du projet de loi C-13, Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19.

Je remercie également les sénateurs et les membres du personnel qui font du télétravail aujourd’hui. Nous sommes particulièrement reconnaissants au huissier du bâton noir, au greffier, aux greffiers au Bureau et au personnel de soutien de leur présence et de veiller à ce que nous puissions accomplir nos tâches aujourd’hui, ici, au Sénat.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Harder : Je serai bref, car il n’y a pas de temps à perdre.

Le projet de loi C-13 vise à donner au gouvernement les moyens d’aider les Canadiens durement touchés par la COVID-19. En raison de l’évolution de la situation, des dizaines de milliers de Canadiens sont déjà aux prises avec une situation financière difficile ou le seront bientôt. Personne ne devrait avoir à choisir entre protéger sa santé ou payer ses factures. La crise actuelle requiert des interventions immédiates ainsi qu’une coordination entre tous les ordres de gouvernement et tous les partis.

Au terme de longues négociations, le projet de loi C-13 a été adopté à l’unanimité à l’autre endroit. Notre approbation est maintenant nécessaire pour que les Canadiens, tant les propriétaires d’entreprise que les particuliers, les parents et les Autochtones, aient accès à un soutien dont ils ont grandement besoin pour passer à travers cette pandémie mondiale et toutes les répercussions qu’elle entraîne.

Parmi les modifications apportées avec la participation de tous les partis, mentionnons qu’il sera nécessaire d’obtenir le consentement de la ministre de la Santé et une description détaillée des dépenses qui seront permises, ce qui va des affectations supplémentaires visant à limiter le type de paiements, à la nécessité d’aider les provinces et territoires en situation de détresse financière. De plus, une disposition de caducité prévoit que toutes les mesures relatives au projet de loi C-13 prendront fin le 30 décembre 2020.

Les mesures prévues dans le projet de loi C-13 font partie de la première phase du plan d’intervention économique pour répondre à la COVID-19. Elles fourniront jusqu’à 27 milliards de dollars en soutien direct aux travailleurs et aux entreprises du Canada et reportent la perception de 55 milliards de dollars en impôt auprès des particuliers et des sociétés. Cela représente un soutien de plus de 500 milliards de dollars sous forme de crédit et de liquidité pour les entreprises par l’intermédiaire de sociétés d’État à vocation financière, de la Banque du Canada, du Bureau du surintendant des institutions financières, de la Société canadienne d’hypothèques et de logement et de prêteurs commerciaux.

Il s’agit d’une crise sanitaire. Aussi, le projet de loi C-13 prévoit un financement ponctuel de 500 millions de dollars pour les provinces et les territoires, dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé. Ces fonds seront disponibles immédiatement une fois la sanction royale accordée, sans doute cet après-midi.

Le projet de loi C-13 instaure la Prestation canadienne d’urgence, un soutien pouvant durer jusqu’à 16 semaines pour ceux qui ne peuvent pas travailler en raison de la COVID-19. La prestation est offerte à tous, qu’on soit admissible ou non à l’assurance-emploi.

On sera admissible à cette prestation si on demeure à la maison, si on est malade en raison de la COVID-19 ou en quarantaine, si on prend soin d’une personne malade, si on a été mis à pied ou si on est obligé de demeurer chez soi pour s’occuper de son enfant. Le projet de loi C-13 élimine temporairement le délai de carence d’une semaine pour les gens en quarantaine et ceux qui demandent des prestations de maladie de l’assurance-emploi.

De plus, l’aide aux particuliers et aux personnes marginalisées comprend une aide allant jusqu’à 900 $ aux deux semaines, pour une période maximale de 15 semaines, y compris pour les travailleurs autonomes; l’affectation de 5 milliards de dollars pour aider les travailleurs qui ne sont pas admissibles à l’assurance-emploi; un financement de 305 millions de dollars pour la constitution d’un fonds de soutien aux communautés autochtones tenant compte des différences afin de répondre à des besoins immédiats des communautés inuites, des Premières Nations et de la nation métisse; la réduction de 25 % du montant minimal requis pour les retraits des fonds enregistrés de revenu de retraite pour 2020; un financement de 157,5 millions de dollars pour aider les sans-abris; un financement allant jusqu’à 50 millions de dollars pour les refuges pour femmes et les centres d’aide aux femmes victimes de violence sexuelle afin de les aider à gérer ou à prévenir l’éclosion de la maladie dans leurs établissements; un paiement ponctuel, par l’intermédiaire du crédit pour la taxe sur les produits et services, de près de 400 $ pour les personnes seules et de près de 600 $ pour les couples; l’augmentation de 300 $ des prestations de l’Allocation canadienne pour enfants dans le versement du mois de mai; le report du paiement de l’impôt sur le revenu des particuliers et des entreprises jusqu’à l’automne prochain; la mise en place d’un moratoire de six mois sur les intérêts applicables aux paiements du Programme canadien de prêts aux étudiants.

Les petites et moyennes entreprises sont au cœur de l’économie canadienne. Par conséquent, le projet de loi C-13 comprend des mesures qui visent à soutenir les propriétaires d’entreprise, notamment en prolongeant la durée des accords de travail partagé, qui passera de 38 à 76 semaines, en offrant une subvention aux petites et moyennes entreprises et en réduisant le montant des retenues d’impôt sur le revenu des employés qui doit être versé. Cela comprend les entreprises admissibles à la déduction accordée aux petites entreprises, les organismes sans but lucratif et les œuvres de bienfaisance.

(1120)

La Banque du Canada a pris des mesures pour assurer la liquidité de sorte que les institutions financières puissent continuer d’offrir du crédit aux ménages et aux entreprises. Le Bureau du surintendant des institutions financières a abaissé la réserve pour stabilité intérieure, permettant aux grandes banques canadiennes d’injecter 300 milliards de dollars en prêts supplémentaires dans l’économie.

L’une des dépenses les plus importantes pour les Canadiens est le remboursement du prêt hypothécaire. Les trois assureurs hypothécaires du Canada se sont engagés à fournir aux propriétaires de logement des solutions pour pallier les difficultés financières, notamment en permettant aux prêteurs de reporter jusqu’à six mois les paiements de prêt hypothécaire sans que l’assureur hypothécaire n’intervienne.

Le projet de loi C-13 permettra d’augmenter la limite imposée par la loi à la SCHL pour ce qui est de garantir des titres et d’assurer les prêts hypothécaires, la faisant passer de 150 milliards de dollars à 750 milliards de dollars. Pour appuyer les activités de la SCHL, le projet de loi permettra de porter à 10 milliards de dollars le capital maximal autorisé de la SCHL. Ainsi, elle disposera de capital et de ressources supplémentaires pour appuyer le marché du financement hypothécaire.

La Banque de développement du Canada et Exportation et développement Canada coopèrent avec les prêteurs du secteur privé pour coordonner des solutions en matière de crédit pour les entreprises, y compris celles des secteurs pétrolier et gazier, du transport aérien et du tourisme. Le crédit à court terme offert aux agriculteurs et au secteur de l’agroalimentaire par l’entremise de Financement agricole Canada est bonifié.

En terminant, je remercie tous les professionnels de la fonction publique qui ont maintenant l’énorme tâche de mettre en œuvre les mesures que nous adopterons, je l’espère, aujourd’hui.

Honorables sénateurs, cette pandémie mondiale cause des ravages dans l’économie et dans les industries et empêche les Canadiens de circuler librement dans le cadre de leurs activités quotidiennes. La COVID-19 ne fait aucune discrimination. Toutes les régions sont à risque. Ce n’est pas un enjeu partisan, mais humain. Je demande à tous les sénateurs de s’acquitter du mandat qui nous a été confié, c’est-à-dire soutenir nos entreprises, nos collectivités, nos régions et les personnes les plus vulnérables en adoptant ce projet de loi avant le coucher du soleil. De plus en plus, nos concitoyens auront besoin de cette aide au moment où le soleil se lèvera demain. Nous avons un rôle à jouer. Qu’on s’y mette.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, comme nous l’avons très souvent entendu ces jours-ci, nous vivons une situation encore jamais vue.

Nos pensées et nos prières accompagnent tous les Canadiens touchés par la COVID-19, et plus particulièrement la famille et les amis des Canadiens qui ont succombé à la maladie. Nous traversons tous une période extrêmement difficile, mais elle l’est encore plus pour qui a perdu un être cher.

Je tiens à remercier du fond du cœur tous les Canadiens qui sont en première ligne depuis le début de la pandémie. Il y en a beaucoup trop pour tous les nommer, mais je tiens néanmoins à saluer les professionnels de la santé publique et ceux qui s’occupent des malades, car ils travaillent jour et nuit pour que nous demeurions en santé et en sécurité. Merci de faire passer le bien-être d’autrui avant le vôtre et sachez que nous prions pour que vous retrouviez chaque jour la force d’affronter la tâche qui vous attend. Votre dévouement n’est pas passé inaperçu.

À tous les travailleurs de l’ombre qui font des pieds et des mains pour que leurs concitoyens aient accès aux biens et services dont ils ont besoin, je dis merci. À tous ceux qui ont pris le temps d’aider un voisin, un aîné ou une personne dans le besoin, je dis merci. Aux entreprises qui sont à pied d’œuvre pour que l’on ne manque de rien d’ici la fin de la crise, quitte à augmenter la production, je dis merci.

À tous les Canadiens qui suivent les recommandations des autorités sanitaires et qui pratiquent la distanciation sociale et s’isolent volontairement, je dis merci. En plus de protéger vos proches, vos sacrifices et votre respect des directives aident aussi les plus vulnérables d’entre nous.

Peu d’entre nous auraient pu imaginer vivre une telle situation, mais elle est bien réelle. C’est une bataille que nous livrons ensemble et, ensemble et avec l’aide de Dieu, nous nous en sortirons.

Honorables sénateurs, la santé et la sécurité de tous les Canadiens sont la grande priorité de tout parlementaire. Je sais que de nombreux autres sénateurs auraient voulu être ici aujourd’hui, mais ils ont accepté de ne pas être présents afin de respecter les consignes qui ont été données à la population canadienne par les autorités de la santé publique. Je tiens à les remercier d’avoir fait un choix responsable et d’avoir pensé d’abord au bien des Canadiens.

Honorables collègues, la semaine dernière, le premier ministre a annoncé un plan d’aide de 82 milliards de dollars dans le but d’atténuer les répercussions de cette pandémie sur notre santé et notre économie. Ce plan comprend 27 milliards de dollars en soutien direct et 55 milliards pour répondre aux besoins de liquidités des entreprises sous forme de reports d’impôt.

Aujourd’hui, nous sommes saisis du projet de loi. Comme beaucoup l’ont mentionné, le gouvernement doit adopter des mesures qui vont nous permettre de tenir le coup jusqu’à ce que cette crise soit passée. Les Canadiens en ont grandement besoin.

Le caucus conservateur du Sénat a l’intention d’appuyer les mesures prévues dans ce projet de loi. Cela dit, nous avons de grandes réserves quant aux façons de faire du gouvernement dans cette crise.

Hier, le gouvernement s’apprêtait à s’octroyer le pouvoir d’augmenter les taxes, la dette et les dépenses d’ici au 1er janvier 2022 sans avoir besoin d’obtenir l’autorisation du Parlement. Même en temps de guerre, aucun gouvernement ne s’est jamais octroyé autant de pouvoir et je suis bien content que, après avoir été talonné par l’opposition conservatrice, le gouvernement se soit ravisé.

Au nom de tous les Canadiens, nous avons pu obtenir les concessions suivantes et je remercie les députés de notre caucus de leur diligence et des efforts déployés dans l’autre endroit jusqu’aux petites heures ce matin.

Nous avons insisté pour que le gouvernement retire l’article qui allait lui permettre d’augmenter les taxes sans avoir besoin de demander l’autorisation du Parlement, et il a accepté. Nous avons insisté pour que le gouvernement ne s’accorde pas un pouvoir illimité de dépenser et pour que les mandats spéciaux viennent à échéance le 23 juin 2020 plutôt que le 30 septembre 2020. Le gouvernement a accepté.

Nous avons insisté pour que le gouvernement ajoute une référence explicite à la priorisation des droits des contribuables. Il a accepté. Nous avons insisté pour que le gouvernement ajoute des dispositions de caducité dans son projet de loi. Il a accepté. Nous avons insisté pour que le gouvernement rende des comptes au Parlement au moyen de rapports présentés au Comité de la santé et au Comité des finances de la Chambre des communes et pour que le Comité des finances ait le pouvoir de rappeler le Parlement si des abus devaient être relevés. Il a accepté.

Les conservateurs ont réclamé des mesures plus strictes pour protéger la frontière, ce que le gouvernement a fait. Nous avons posé des questions sur l’impact de la fermeture de la frontière sur le Programme des travailleurs étrangers temporaires et le Programme des travailleurs agricoles saisonniers, et le gouvernement a fait des exceptions. Nous avons demandé au gouvernement de mettre fin à l’afflux de personnes qui traversent illégalement la frontière pour entrer au Canada, en particulier au chemin Roxham, et le gouvernement nous a écoutés.

Nous continuerons à utiliser tous les outils à notre disposition pour demander des comptes au gouvernement et nous continuerons à jouer notre rôle en tant qu’opposition officielle au Sénat en posant des questions difficiles au gouvernement au nom des Canadiens et en proposant des solutions constructives afin que personne ne soit laissé pour compte.

Toutefois, ce qui continue de m’inquiéter, c’est que, même si le gouvernement était prêt à dépasser les limites qu’il s’était fixées, je constate que les mesures qu’il a prises pour aider les Canadiens sont insuffisantes. Beaucoup d’entre vous pourraient être étonnés de m’entendre dire cela, étant donné que, en tant que conservateur convaincu sur le plan financier, je reproche depuis cinq ans au gouvernement d’être incapable d’équilibrer le budget. Toutefois, il est nécessaire d’équilibrer le budget pour pouvoir maintenir une santé financière et économique optimale au pays. De cette façon, le pays peut prospérer dans les bons moments et disposer de tout ce dont il a besoin pour affronter les moments difficiles, comme ceux que nous connaissons à l’heure actuelle.

Je ne souhaite nullement marquer des points politiques aujourd’hui. Nous allons appuyer ce projet de loi, mais je m’en voudrais de ne pas exposer publiquement mes préoccupations.

Depuis cinq ans, le gouvernement s’en donne à cœur joie en distribuant l’argent à tout vent, sans s’inquiéter de la dette et des déficits. Pourtant, alors que nous faisons face à une véritable crise qui exige des mesures financières énergiques, ils se font maintenant timides.

À la lecture de mesures comme un remboursement unique de la TPS, une augmentation unique de l’Allocation canadienne pour enfants, une réduction de seulement 25 % du montant minimal requis des retraits des fonds enregistrés de revenu de retraite et une subvention salariale de seulement 10 % pour les petites entreprises, je suis inquiet.

(1130)

On croirait entendre des crédits d’impôt ultraciblés comme ceux que l’on nous sert juste avant des élections, et non des mesures dignes d’un pays qui fait face à une urgence nationale imminente.

Pourquoi supprimer le délai de carence d’une semaine de l’assurance-emploi seulement pour ceux qui sont mis en quarantaine? En pareilles circonstances, pourquoi ne pas supprimer le délai de carence pour l’ensemble des demandeurs?

Pourquoi ne prévoit-on que 50 millions de dollars pour soutenir les refuges pour femmes et les centres d’aide aux victimes d’agressions sexuelles, ce qui inclut les fonds pour les établissements de ce genre dans les communautés autochtones? Comment peut-on penser que ce sera suffisant à l’échelle nationale?

Honorables sénateurs, l’ampleur de la crise actuelle exige un train de mesures exhaustives et généralisées. On nous présente plutôt des propositions qui seront lourdes sur le plan administratif, qui seront trop longues à mettre en œuvre, qui laisseront tomber beaucoup de personnes et qui exigeront un effort surhumain pour gérer la hausse des demandes associées.

Lorsque le gouvernement a annoncé les modifications apportées à l’assurance-emploi pour les personnes qui sont touchées par la COVID-19, un demi-million de demandes ont été reçues du jour au lendemain. Le total des demandes dépasse maintenant 1 million. Comment le gouvernement pense-t-il gérer cette soudaine hausse des demandes alors que la majorité des fonctionnaires travaillent de la maison? Au lieu de pouvoir déposer de l’argent dans leurs comptes bancaires, les Canadiens remplissent des formulaires gouvernementaux et attendent des réponses. Cette situation m’inquiète vivement.

Nous sommes en présence de la pire pandémie mondiale de notre vivant. Les marchés ont connu leurs plus grosses pertes en 80 ans. Partout au pays, des entreprises sont forcées de fermer leurs portes, des gens ne peuvent plus travailler et ils ne savent pas comment ils vont pouvoir payer leur loyer ou leur hypothèque, et c’est là le mieux qu’on puisse faire?

Chers collègues, je ne prétends pas avoir la science infuse, mais je sais ceci : quand on construit un pont, le pire scénario possible est qu’il ne se rende pas assez loin.

Nous appuyons les mesures qui nous sont présentées aujourd’hui parce qu’elles sont absolument nécessaires, mais je doute qu’elles soient suffisantes. Dans l’intérêt de tous les Canadiens, j’espère vraiment qu’elles seront suffisantes.

Que Dieu bénisse le Canada.

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, en premier lieu, je signale que le Canada enregistre actuellement plus de 25 décès attribuables à la COVID-19 et que les familles touchées pleurent la perte d’un être cher. De nombreuses autres personnes atteintes du virus sont actuellement hospitalisées à différents stades de la maladie. Au nom de l’ensemble des sénateurs, j’offre mes condoléances aux personnes dans le deuil.

Je tiens par ailleurs à saluer les efforts inlassables que déploient les travailleurs de première ligne du système de soins de santé pour réagir à la crise. Ils s’acquittent de leurs tâches dans des circonstances très éprouvantes puisqu’ils sont confrontés à des hôpitaux et des cliniques bondés, à une prolongation des heures de travail, à une pénurie de trousses de test, de lits et d’équipement, à des réserves limitées d’équipement de protection individuelle et, par surcroît, au risque de contracter eux-mêmes la maladie.

J’ajoute que bien d’autres travailleurs font plus que leur part. Je songe notamment aux fonctionnaires qui ont préparé cette mesure législative dans un temps record et aux nombreux autres qui travaillent à mettre en place des mesures pour amenuiser les retombées économiques de la crise de la COVID-19.

La meilleure façon d’atténuer la crise économique qui découle de la COVID-19 est de s’assurer d’endiguer complètement et rapidement la crise sanitaire. Pour ce faire, il faut déployer les ressources essentielles au secteur de la santé et appliquer les directives de santé publique aussi longtemps qu’il le faudra pour freiner de façon marquée la propagation du virus. Si nous relançons l’économie prématurément, nous risquons d’aggraver la crise sanitaire, ce qui ne pourra conduire qu’à un ralentissement économique à double creux et qui nuira probablement encore plus au gagne-pain des gens. Voilà pourquoi, pour que les mesures économiques actuelles et toutes les autres mesures qui ont été mises en place portent leurs fruits, il faut s’assurer qu’elles sont suffisantes pour permettre à l’économie de tenir le coup pendant toute la durée de la crise sanitaire. J’appuie ces mesures et j’espère que nous voterons sans plus tarder pour adopter le projet de loi afin que l’on puisse verser immédiatement des fonds aux Canadiens et aux entreprises canadiennes.

Il est peu probable que ces mesures suffiront à elles seules à endiguer la crise. Le problème n’est pas que le projet de loi n’offre pas la souplesse d’accorder plus de fonds ou de prolonger les périodes de financement, c’est que nous n’avons pas encore utilisé pleinement tous les outils à notre disposition pour endiguer la crise, qui est sans précédent.

Lors des crises financières et des chocs économiques précédents, habituellement dus à un endettement excessif dans un secteur, des effets de contagion se sont produits dans d’autres secteurs, entraînant un ralentissement de l’économie dans son ensemble. Dans la situation actuelle, ce n’est pas que les effets d’un secteur économique en difficulté se propagent à d’autres secteurs de l’économie. C’est plutôt que tous les secteurs souffrent parce que la main-d’œuvre, qui est l’élément clé de la production, ne peut plus participer à l’économie, car on tente de freiner la propagation de la maladie.

Honorables sénateurs, le fait est qu’il ne s’agit pas d’une crise financière, et c’est une bonne nouvelle. Ne vous méprenez pas. La crise sanitaire va rapidement se transformer en crise financière systémique si nous ne réagissons pas de manière appropriée. Cependant, nous pouvons être rassurés par le fait qu’avant le début de la crise, les finances du pays et les institutions financières étaient solides comparativement à celles d’autres pays. Nous devons profiter pleinement de cette force pour soutenir l’économie durant cette période d’arrêt de la production, des investissements et de la consommation.

Tout ensemble de mesures économiques doit avoir trois objectifs : d’abord, contenir la baisse de la production économique, ensuite, soutenir les revenus, et finalement, préserver la capacité de production. Le projet de loi dont nous sommes saisis ainsi que les mesures déjà annoncées permettent d’atteindre ces trois objectifs. Toutefois, je pense que l’on peut faire plus.

En ce qui a trait au plan de stimulation économique directe, le gouvernement ne doit pas hésiter à se servir de ses pouvoirs d’emprunt et de dépense pour des projets d’investissements qui produiront des biens publics pour les Canadiens d’un bout à l’autre du pays. Si les entreprises n’investissent pas dans l’avenir en raison de l’incertitude qui plane, le gouvernement canadien devrait intervenir pour pallier ce manque. Nous avons déjà vu que l’hésitation à créer des déficits budgétaires a comme résultat de ralentir la reprise économique mondiale et que cette hésitation s’est traduite par une hausse du chômage après la crise financière de 2008. Cette fois-ci, le ralentissement économique pourrait être pire, alors nous ne pouvons pas nous permettre d’hésiter.

Deuxièmement, en ce qui concerne le soutien au revenu, l’approche actuelle consiste à essayer de cibler les personnes touchées en utilisant les outils existants tels que l’assurance-emploi et le système fiscal, avec des solutions temporaires telles que la Prestation canadienne d’urgence qui fait partie du projet de loi C-13. Toutefois, le problème ne concerne pas les travailleurs qui ont ou n’ont pas droit à l’assurance-emploi ni ceux qui doivent rester à la maison parce qu’ils sont malades ou qu’ils doivent prendre soin d’un proche. Le fait est que la grande majorité des travailleurs devraient rester à la maison, qu’ils soient couverts ou non par l’assurance-emploi, et qu’ils soient malades ou non. Les programmes d’aide qui tentent d’établir de telles distinctions sont non seulement lourds sur le plan administratif, mais ils risquent également de laisser de côté une grande partie des travailleurs concernés, comme les travailleurs autonomes qui continuent de toucher un certain revenu, mais à un niveau très réduit en raison du ralentissement économique causé par la COVID-19. Ces personnes ne sont pas admissibles au soutien au revenu parce que leur revenu n’a pas été réduit à zéro au cours de cette période d’attente de 14 jours.

Autrement dit, nous devrions cibler l’ensemble de la population active, car il a été demandé à la quasi-totalité de la population active de se retirer de l’activité économique.

Si nous reformulons le problème de cette façon, il y a lieu d’instaurer temporairement un revenu de subsistance garanti pour tous les Canadiens adultes, peut-être dans le cadre d’un train supplémentaire de mesures économiques. Certaines personnes pourraient être portées à dire que la mise en œuvre temporaire d’un revenu de subsistance garanti en temps de crise est risquée, mais ce n’est pas le cas. En fait, c’est peut-être le moyen le plus approprié d’assurer le soutien du revenu, qui est un objectif central de tout programme de relance économique.

(1140)

Troisièmement, en vue de prévenir la perte de la capacité de production, le projet de loi C-13 fournit au gouvernement quelques outils pour lui permettre d’offrir une aide directe à certaines entreprises. Lorsque le projet de loi aura été adopté, il sera important pour le gouvernement d’expliquer pourquoi il veut sauver ces entreprises, mais pas d’autres, et d’énoncer les principes sous-tendant l’approche précise adoptée pour chaque cas.

Je souscris à l’idée que certaines entreprises et industries clés devraient être sauvées. Cependant, les mesures de renflouement ne devraient pas privilégier les cadres supérieurs, les actionnaires et les créanciers obligataires par rapport aux travailleurs. Si l’objectif principal consiste à empêcher l’entreprise de faire faillite, la meilleure approche serait pour le gouvernement de prendre une participation directe dans cette entreprise et de fournir les garanties souveraines directes et indirectes nécessaires pour que l’entreprise puisse continuer de fonctionner à un niveau d’activité réduit, jusqu’à ce que la situation s’améliore et que le gouvernement puisse vendre sa participation.

L’une des plus grandes difficultés que connaîtront les entreprises consistera à rembourser leurs dettes. Le gouvernement a déjà accordé de l’aide en repoussant le paiement des impôts des entreprises, de la TPS et ainsi de suite, sans pénalité. Les principaux prêteurs sont également intervenus en autorisant le report du remboursement de prêts, sauf que les intérêts sur ces prêts continuent de s’accumuler. Les institutions financières canadiennes sont bien capitalisées, bien gérées et très rentables, et elles ont maintenant l’occasion de faire partie de la solution en venant elles aussi au secours des emprunteurs. Je les mets au défi de suivre l’exemple du gouvernement en renonçant pendant un certain temps au remboursement — capital et intérêts — des prêts aux entreprises, ce qui aura pour effet de juguler l’hémorragie financière de nombreuses entreprises et, dans une certaine mesure, de les mettre sur pause jusqu’à ce que les conditions s’améliorent.

Sur le plan analytique, lever les paiements d’intérêts pour une période donnée équivaut à mettre à pied des travailleurs pour ralentir les sorties de fonds d’une entreprise. Dans la mesure où il faut tenter de maintenir les entreprises à flot en réduisant le coût de la main-d’œuvre, nous devrions aussi chercher comment les aider à se maintenir à flot en réduisant les montants qu’elles doivent consacrer à rembourser leurs dettes. Si nous ne parvenons pas à maintenir les entreprises à flot pendant la crise sanitaire, il sera très difficile de relancer l’économie une fois la crise terminée. Par conséquent, les prêteurs, les emprunteurs, les travailleurs, les actionnaires et l’ensemble de la population devront faire face à une situation économique encore plus grave.

Honorables collègues, j’espère sincèrement que les mesures de sauvetage économique que renferme ce projet de loi suffiront à éviter un grave ralentissement économique. Cependant, même si nous espérons que tout ira pour le mieux, nous devons nous préparer au pire, et ce, dès que nous aurons adopté le projet de loi C-13. Merci.

L’honorable Robert Black : Honorables sénateurs, je tiens tout d’abord à faire écho aux paroles de mes collègues du Sénat et de l’autre endroit en remerciant tous les travailleurs de première ligne, les professionnels de la santé, les préposés aux caisses, les commis de magasin, les employés d’épicerie, les camionneurs et les nombreux autres Canadiens qui mettent leur santé en péril pour nous aider à traverser cette pandémie tous ensemble.

J’interviens aujourd’hui au sujet du projet de loi C-13 pour souligner, comme mes collègues, que les Canadiens ont besoin de ce programme d’aide d’urgence qui les aidera à composer avec la pandémie de COVID-19.

Comme une bonne partie de nos collègues ne peuvent pas être ici aujourd’hui, comme il se doit, je vous présenterai mon point de vue et certaines des inquiétudes de mes collègues du Groupe de sénateurs canadiens. Nul n’est besoin de rappeler que nous vivons une situation sans précédent. Nous en sommes tous conscients. Nous sommes tous déjà touchés par ce virus, que ce soit directement ou indirectement. Pour donner un exemple personnel, des membres de ma famille ont été mis à pied et d’autres sont en isolement ou en quarantaine à la suite de voyages récents.

J’ai été réconforté de voir tant de Canadiens demeurer à la maison et s’efforcer de limiter la propagation du virus. Toutefois, tout comme le gouvernement, nous savons que cela ne suffit pas. Beaucoup de Canadiens se trouvent dans une situation financière précaire, que ce soit parce qu’ils ont été licenciés, que leurs heures de travail ont été réduites ou qu’ils ont dû puiser dans leur banque de congés pour s’isoler à la maison. Durant la présente crise, les gens demeurent tenus de payer leur loyer ou leur prêt hypothécaire, de régler leurs autres factures et de s’occuper de leur famille tandis qu’ils craignent que leurs proches ou eux-mêmes tombent malades.

Le projet de loi à l’étude prévoit un fonds d’urgence pour aider les particuliers et les entreprises du Canada. Il comprend des mesures pour augmenter le crédit pour la TPS et l’Allocation canadienne pour enfant, réduire le seuil de retrait minimal des REER et aider financièrement les travailleurs qui subissent une perte de revenus, ainsi qu’un nouveau congé pouvant aller jusqu’à 16 semaines pour les employés sous réglementation fédérale. Le projet de loi comprend plusieurs autres mesures qui visent à réduire les difficultés financières des Canadiens, y compris un programme permettant au gouvernement d’acheter des blocs de prêts hypothécaires assurés par l’intermédiaire de la Société canadienne d’hypothèques et de logement et une mesure interrompant le paiement des intérêts sur les prêts d’études.

Cette mesure législative viendra également en aide aux entreprises canadiennes. Les petites entreprises seront admissibles à une subvention salariale temporaire. De plus, le projet de loi permettra à Exportation et développement Canada de développer l’activité commerciale intérieure, une mesure importante en raison des restrictions qui touchent les frontières canadiennes. La Loi sur la Banque de développement du Canada sera également modifiée afin d’assurer la disponibilité de fonds pour les entrepreneurs.

Autre mesure importante, le gouvernement a prévu 5 milliards de dollars supplémentaires pour l’industrie agricole et agroalimentaire afin d’aider ceux qui vivent présentement des difficultés, mais qui doivent continuer à produire la nourriture dont nous avons besoin. Malgré la pandémie de COVID-19, nous devons assurer le maintien de la chaîne de valeur des producteurs jusqu’aux consommateurs. Cette chaîne ne comprend pas que la production agricole et la transformation, elle comprend aussi des maillons comme l’inspection des viandes et bien d’autres encore.

Le gouvernement accroît également son investissement dans Financement agricole Canada, qui offre des prêts aux agriculteurs. Même si c’est une bonne nouvelle, j’ai quelques réserves à ce sujet, à l’instar de ma collègue la sénatrice Wallin. Il est question de prêts supplémentaires que les agriculteurs devront éventuellement rembourser. L’échéance des prêts risque d’entraîner de graves problèmes. Les travailleurs d’autres secteurs auront accès à un programme bonifié de l’assurance-emploi et, bien évidemment, ils n’auront pas à rembourser les prestations qu’ils recevront, mais les agriculteurs canadiens, eux, devront rembourser les prêts qui leur seront accordés.

Si le projet de loi est adopté et reçoit rapidement la sanction royale, les aides financières dont beaucoup ont besoin ne sauraient tarder. Certains groupes seront plus touchés que d’autres par cette crise, notamment les personnes ayant un emploi occasionnel et précaire, les familles avec des enfants et plusieurs bouches à nourrir, les jeunes qui tentent de rembourser leur prêt étudiant tout en essayant d’économiser pour leur première maison, et bien d’autres encore.

Je me félicite que ce projet de loi tienne compte de leurs besoins. J’ai bon espoir que ces mesures allégeront au moins en partie les pressions qu’ils subissent aujourd’hui. Qu’il s’agisse de rassurer le secteur agricole qui a immédiatement besoin de travailleurs étrangers temporaires et de travailleurs saisonniers ou de collaborer avec tous les partis d’opposition dans les deux chambres pour que ce financement d’urgence soit mis à la disposition de ceux qui en ont besoin, le gouvernement a fait du bon travail en ces temps difficiles. Il a réagi sans tarder pour offrir des solutions aux nombreux problèmes qui se posent au quotidien, tout en collaborant avec les autres ordres de gouvernement et les partis d’opposition et en nous tenant tous informés.

Certes, de nombreuses questions demeurent en suspens, car nous ne savons pas vraiment ce que nous réserve cette situation sans précédent. Nous savons qu’avant de présenter cette proposition à la Chambre des communes, le gouvernement a supprimé les mesures qui donnaient des pouvoirs excessifs aux ministres. Au lieu de cela, une nouvelle mesure législative pourrait être nécessaire dans les mois à venir, en fonction de l’évolution de la situation.

Je crois savoir que l’autre endroit a accepté un accord négocié de sorte que son comité des finances et son comité de la santé puissent tenir des réunions virtuelles pour assurer une surveillance parlementaire. Le Sénat doit reconstituer les comités similaires ou tous les comités aujourd’hui, ou il risque de devenir inutile. Pour des questions de sécurité alimentaire, il serait peut-être important que nous envisagions de reconstituer le comité de l’agriculture et des forêts ou de l’inclure dans certaines des discussions à ce sujet.

J’ai quelques doutes, cependant, dont certains sont partagés par mes collègues ici, dans cette enceinte. Je m’inquiète que cela ne soit peut-être pas suffisant pour nous aider à surmonter cette crise sanitaire. Les gens et les entreprises ont besoin d’aide maintenant. Le gouvernement sera-t-il en mesure de distribuer suffisamment rapidement des fonds à ceux qui en ont besoin? Nous avons tous entendu dire que près d’un million de demandes de prestations d’assurance-emploi ont été déposées au cours de la semaine dernière. Le gouvernement sera-t-il en mesure de distribuer assez rapidement les fonds d’urgence? Qu’en est-il des Canadiens qui vivent dans les régions rurales et éloignées du Canada? Ils ont déjà des problèmes de connectivité. Seront-ils en mesure d’accéder aux fonds par l’intermédiaire d’une infrastructure qui est déjà surchargée? Mes collègues du Groupe des sénateurs canadiens ont également des doutes et des questions, dont certaines ont déjà été posées lors de la partie précédente du débat en comité plénier. La Banque de développement du Canada sera-t-elle en mesure de répondre aux demandes avant que les entreprises ne soient contraintes à fermer leurs portes? Est-ce qu’on en fait assez pour protéger les PME? Est-ce que l’industrie pétrolière et gazière sera protégée? Comment vérifions-nous que les gens qui reviennent de l’étranger s’auto-isolent, et comment pouvons-nous faire respecter les consignes de distanciation sociale?

(1150)

Avant de conclure, je saisis l’occasion pour remercier les agriculteurs et les autres membres de l’industrie agroalimentaire et de la chaîne de valeur qui assurent le maintien de notre approvisionnement continu en aliments, même en cette période d’incertitude. Je tiens également à remercier ceux qui font tout en leur pouvoir pour aider les autres.

En ce moment, la façon la plus importante et la plus efficace d’aider est de rester chez soi et, pour ceux qui doivent sortir, d’observer une distanciation sociale.

Pour ceux qui ne suivent pas les conseils des médecins et du gouvernement, je vous prie de songer aux conséquences de vos actions. Même si vous ne craignez pas personnellement le virus, alors que vous le devriez, pensez aux membres des groupes vulnérables de la société, les personnes dont le système immunitaire est compromis, celles qui ont déjà des problèmes de santé et celles qui sont âgées. Votre imprudence risque de propager davantage le virus.

Chers collègues, je vous remercie de votre attention. Rappelons-nous de veiller les uns sur les autres, d’être bienveillants les uns envers les autres et de faire tout en notre pouvoir pour demeurer en santé et protéger la santé d’autrui. Nous devons travailler ensemble pour aider à aplanir la courbe. Merci. Meegwetch.

L’honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, je ne pensais jamais prononcer un tel discours au Sénat. Hélas, il s’agit de notre nouvelle réalité, celle de vivre avec la COVID-19, le coronavirus.

Au nom du groupe progressiste du Sénat, nous appuyons fermement les mesures qui sont prises par tous les paliers de gouvernement — fédéral, provincial, territorial, municipal et autochtone.

Nous avons posé des questions au ministre aujourd’hui. C’est normal. Nous avons des préoccupations, c’est normal. Nous continuerons d’exiger que de plus amples mesures soient prises, ce qui est aussi normal. Cependant, nous traversons une période sans précédent et il est crucial que nous nous serrions les coudes en tant que nation dans de telles circonstances.

Le temps presse. Le nombre de cas ne cesse d’augmenter.

Les paroles de l’administratrice en chef de la santé publique du Canada m’ont frappé. Il y a quelques jours, la Dre Theresa Tam a dit ceci : « Il ne faut pas seulement aplanir la courbe, il faut l’aplatir. » Cela veut dire que tous les Canadiens doivent faire leur part.

Alors que nous sommes sur le point d’adopter cette importante mesure législative, le projet de loi C-13, je pense à tous les Canadiens qui en bénéficieront. Nous prenons en considération les travailleurs essentiels, comme ceux des épiceries et des pharmacies, ou les policiers, les travailleurs des postes, les personnes qui assurent l’entretien des immeubles et les propriétaires de petites entreprises qui s’inquiètent pour leur avenir. Tout ce que vous faites ne passe pas inaperçu.

Les Canadiens qui travaillent dans des établissements de soins de longue durée pour s’occuper de nos citoyens les plus vulnérables sont aux premières lignes de notre système de santé. Ils travaillent de longues heures loin de leur famille pour veiller au bien-être d’étrangers. Tout ce que vous faites ne passe pas inaperçu.

Des bénévoles livrent de la nourriture et des produits essentiels à leurs voisins. Nous savons aussi que bien des Canadiens sont forcés de rester à la maison et de modifier leur train-train quotidien. On voit des gestes d’humanité en dépit des difficultés.

Tous les gestes comptent. Les efforts consentis aujourd’hui détermineront la longueur et l’ampleur des conséquences de la pire crise de santé publique à laquelle le Canada et le monde aient jamais été confrontés. Je remercie donc tous les Canadiens de leur contribution en cette période d’incertitude. Nous savons que la situation n’est pas facile.

Je souligne souvent l’importance de la bonté et de l’inclusion, mais dans les circonstances actuelles, ce sont vraiment des impératifs dont je dois encore une fois faire mention. Il faut se rappeler que le plus petit geste peut avoir une énorme incidence. Je songe aux gens qui vivaient déjà dans l’isolement avant la crise, aux personnes ayant des handicaps physiques et cognitifs et qui comptent sur des bénévoles et des groupes communautaires pour avoir des rapports humains et socialiser. Il faut leur tendre la main. On ne peut les oublier. Je sais que nos dirigeants et nos concitoyens ne permettront pas que cela se produise.

Je suis heureux de constater qu’on utilise la langue des signes dans nos bulletins de nouvelles pendant cette épreuve. Voilà enfin une mesure concrète d’équité et d’inclusion à l’égard des malentendants. Je sais que des milliers de Canadiens qui communiquent par la langue des signes apprécient d’être informés en temps réel.

Je salue également ce partage quotidien détaillé d’information à l’intention des Canadiens dans les bulletins de nouvelles. Il est réconfortant pour la population de pouvoir bénéficier de communications prévisibles et fiables. Nos journalistes travaillent jour et nuit pour nous tenir informés et branchés sur le monde. Votre travail ne passe pas inaperçu et nous vous remercions.

Je ne cesse d’entendre que nous devons être solidaires, ce qui signifie que certains ont besoin de notre amour et de notre soutien plus que jamais. Je songe encore une fois aux aînés et aux malades, à ceux qui souffrent d’une déficience intellectuelle, aux autistes, aux personnes qui souffrent d’un handicap physique.

Honorables sénateurs, pendant les Jeux olympiques spéciaux, on s’étreint beaucoup. C’est difficile à faire maintenant, n’est-ce pas? Cela ne devrait toutefois pas m’empêcher ni vous empêcher d’envoyer un câlin virtuel, un câlin en ligne ou un câlin téléphonique dès maintenant. Nous devons être solidaires plus que jamais.

Encore une fois, il y a toutes ces personnes dans le système de santé qui se tiennent aux premières lignes, et ce, d’un bout à l’autre du pays. Vous qui prenez soin des autres êtes une source d’espoir. Il y a les travailleurs des banques alimentaires qui nourrissent ceux qui en ont besoin. Ils le font parce qu’après tout, nous sommes au Canada, un pays où on se soucie des autres. Ce n’est pas toujours facile, mais nous arrivons tous à trouver courage.

Je conclus sur ces quelques mots. Nous avons tous notre histoire. En 1918, mon père avait 8 ans quand un nouveau virus de la grippe se propagea. Nous connaissons la terrible issue de cette grippe. La Première Guerre mondiale, qui tirait à sa fin, a été suivie de la Grande Dépression, puis de la Deuxième Guerre mondiale. Ensuite, dans les années 1940 et 1950, la polio a fait des ravages. C’est quelque chose vivre tout cela.

Mon père est décédé en 2003. Il avait 93 ans.

Voilà où je puise mon courage.

Aujourd’hui, collectivement en tant que pays et individuellement, nous prenons des mesures pour vaincre la COVID-19. Nous devons tous aller dans le même sens, même si nous devons nous tenir à six pieds ou deux mètres les uns des autres pendant encore un certain temps.

Sur ce, honorables sénateurs, je vous engage à adopter cette mesure législative historique sans délai. Merci.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, conformément à l’ordre adopté plus tôt aujourd’hui, je quitte le fauteuil pour que le Sénat se forme en comité plénier relativement à la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19. Tel que convenu lors des discussions, l’honorable sénatrice Ringuette présidera le comité.

[Français]

La pandémie de COVID-19

L’étude de la réponse du gouvernement en comité plénier

L’ordre du jour appelle :

Le Sénat en comité plénier afin de recevoir l’honorable Patty Hajdu, c.p., députée, ministre de la Santé, et l’honorable Bill Blair, c.p., député, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, chacun accompagné d’un fonctionnaire, relativement à la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.

(La séance est suspendue et le Sénat se forme en comité plénier sous la présidence de l’honorable Pierrette Ringuette.)


La présidente : Honorables sénateurs, le Sénat s’est formé en comité plénier pour étudier la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.

Honorables sénateurs, comme vous le savez, durant un comité plénier, les sénateurs s’adressent à la présidente, mais ne sont pas obligés de se lever. Tel qu’ordonné plus tôt aujourd’hui, le temps de parole est de cinq minutes — questions et réponses y compris. De plus, tel qu’ordonné par le Sénat, le comité accueillera la ministre de la Santé et le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Je les invite maintenant à entrer, chacun accompagné d’un fonctionnaire.

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat, l’honorable Patty Hajdu, l’honorable Bill Blair et des fonctionnaires prennent place dans la salle du Sénat.)

La présidente : Monsieur et madame les ministres, j’ai le plaisir de vous accueillir au Sénat. Je vous invite à présenter vos fonctionnaires et à faire vos observations préliminaires.

(1200)

[Traduction]

Je vous rappelle que nous avons convenu d’accorder une période de questions et de réponses de cinq minutes à chacun des sénateurs. Il se pourrait que je doive interrompre des intervenants pour faire respecter cette règle.

Sans plus tarder, je vous prie, madame la ministre, de présenter vos observations.

L’honorable Patty Hajdu, c.p., députée, ministre de la Santé : Merci beaucoup, honorables sénateurs.

Depuis trois mois, le monde doit se battre contre un nouvel ennemi, un virus inconnu jusqu’ici, qui n’avait jamais touché l’espèce humaine. Il doit se battre contre une pandémie d’une ampleur jamais vue depuis plus de 100 ans. Le gouvernement collabore avec ses partenaires fédéraux, provinciaux, territoriaux et internationaux pour préparer les Canadiens aux conséquences de ce virus.

Des millions de Canadiens tentent de s’adapter à la réalité de cette pandémie dans le but de sauver des vies. Au cours de la dernière semaine, la courbe d’évolution de la maladie a commencé à monter au Canada; le nombre de cas a augmenté et, malheureusement, on a commencé à dénombrer des morts.

Au cours de cette période sans précédent, les Canadiens méritent d’obtenir rapidement l’information pertinente. Ils doivent se protéger et se préparer à faire face à la maladie et aux changements qu’elle impose à la société. C’est pourquoi, en tant que ministre de la Santé, j’ai promis dès le départ d’informer les Canadiens des faits et de la vérité à mesure que j’en prends connaissance. La vérité est parfois troublante, et elle est parfois angoissante. Cependant, nous devons transmettre aux Canadiens toute l’information à mesure que nous l’obtenons afin qu’ils puissent faire face à cette pandémie mondiale avec tous les outils dont ils ont besoin pour se protéger et pour prendre des mesures courageuses et difficiles.

[Français]

Avant de poursuivre, je tiens à saluer les femmes et les hommes de l’Agence de la santé publique du Canada. Depuis les premiers signalements de cas de COVID-19, plus tôt cette année, ils travaillent sans relâche pour protéger les Canadiens. Leurs conseils et leur appui me permettent de mieux informer les Canadiens sur la progression du virus et la réponse du Canada. Ensemble, nous tentons de donner aux Canadiens des renseignements clairs sur la façon dont ils peuvent protéger leur propre santé, mais aussi sur ce qu’ils peuvent faire pour protéger celle des autres.

[Traduction]

En quelques semaines seulement, les termes « isolement » et « distanciation sociale » sont devenus partie intégrante de notre vocabulaire quotidien. Je me réjouis du courage des Canadiens qui suivent les conseils extrêmement difficiles de nos experts en santé publique en ce qui concerne les nouvelles façons d’établir des liens les uns avec les autres tout en pratiquant la distanciation sociale.

Les Canadiens se montrent également réceptifs aux conseils quant à la nécessité de garder une distance physique à un moment où cette pratique est pourtant complètement contre-intuitive. Ces gestes, et certains qui sont plus faciles à mettre en pratique, comme se laver les mains, éviter les poignées de main, et j’en passe, sont importants et nécessaires.

Pour leur part, les provinces et les territoires ont renforcé les mesures visant à contenir la propagation du virus. Ils ont déclaré l’état d’urgence et fermé des écoles et d’autres établissements publics.

À compter de minuit ce soir, les voyageurs qui rentrent au Canada, à l’exception des travailleurs essentiels, seront soumis à un isolement obligatoire de 14 jours en vertu de la Loi sur la mise en quarantaine. Cette nouvelle mesure justifiera la nécessité de s’isoler pour ceux qui rentrent au pays. Les personnes qui présentent des symptômes à leur arrivée au Canada n’auront pas le droit d’utiliser les transports en commun pour se rendre à leur lieu d’isolement. Il leur sera également interdit de s’isoler dans un endroit où elles seront en contact avec des personnes vulnérables. L’Agence de la santé publique du Canada prendra d’autres dispositions pour les personnes se trouvant dans de telles situations.

Le gouvernement s’est également rapidement tourné vers le milieu de la recherche et a investi plus de 52 millions de dollars par l’entremise des Instituts de recherche en santé du Canada. Ce financement permettra d’appuyer 96 projets actuellement en cours dans l’ensemble du pays qui visent à trouver des contre-mesures à la COVID-19. Cela fait partie du montant de 275 millions de dollars que nous injectons pour renforcer la capacité d’étudier les antiviraux, de mettre au point des vaccins et de soutenir les essais cliniques.

[Français]

Avec ce financement, les chercheurs des universités et des hôpitaux de tout le pays travaillent sur des outils de diagnostic et des vaccins potentiels pour la COVID-19. Ils travaillent aussi à l’élaboration de stratégies en vue de lutter contre la désinformation, la stigmatisation et la peur. Leurs travaux nous permettront d’approfondir notre compréhension de la maladie. Ils nous permettront aussi d’avoir les meilleures données possible pour faire des interventions plus éclairées en santé publique.

[Traduction]

Depuis que les premiers cas de COVID-19 ont été signalés, nous nous sommes efforcés d’accroître notre capacité à protéger les travailleurs de la santé de première ligne qui se démènent tous les jours pour nous servir. Nous collaborons avec les provinces et les territoires pour effectuer des achats en gros et tirer parti du pouvoir d’achat du Canada pour obtenir le matériel médical dont le réseau de santé a tant besoin pour gérer les cas de COVID-19. Compte tenu de la demande mondiale et de la perturbation de la chaîne d’approvisionnement que nous avons observée à la suite de la pandémie, c’est extrêmement difficile.

Comme l’a annoncé le premier ministre la semaine dernière, nous collaborons également avec des entreprises canadiennes pour fabriquer des fournitures essentielles au Canada. Les gens de l’Agence de la santé publique du Canada, de Santé Canada, d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada et de Services publics et Approvisionnement Canada travaillent jour et nuit pour obtenir des articles tels que des masques, des écrans faciaux et des blouses de contagion auprès d’entreprises nationales et internationales.

La pandémie de COVID-19 représente une menace sans précédent pour la santé publique. Aucun d’entre nous n’a déjà vécu un événement de cette ampleur. Les Canadiens comptent sur nous tous pour protéger leur santé et les aider à traverser cette période d’incertitude. C’est pourquoi nous devons agir maintenant et agir ensemble. Merci.

L’honorable Bill Blair, c.p., député, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile : Honorables sénateurs, je suis heureux et honoré d’être ici aujourd’hui en compagnie de ma collègue la ministre Hajdu. Je tiens à vous remercier tous de nous donner l’occasion de prendre des mesures immédiates et décisives au nom de tous les Canadiens, qui, nous le savons, subiront les contrecoups de la COVID-19.

Le monde entier est touché par ce virus, et la réponse du Canada est conforme aux meilleurs conseils que nous avons reçus de nos responsables de la santé publique et aux données scientifiques qui éclairent chacune de nos mesures. Il s’agit toujours d’un problème mondial qui évolue rapidement, et nous sommes tenus de réagir non seulement de jour en jour, mais presque d’heure en heure. Depuis le début, la priorité du gouvernement du Canada a été, et continuera d’être, la santé et la sécurité de tous les Canadiens, et nous continuerons de nous adapter et de faire le nécessaire pour protéger les Canadiens.

D’après les premières constatations, une grande partie des infections au Canada provenaient de voyageurs qui rentraient au pays en provenance de régions infectées. Nous avons donc annoncé une série de mesures plus strictes visant à contrôler la propagation de cette maladie au Canada. Nous avons pris des mesures pour empêcher les ressortissants étrangers de prendre des vols à destination du Canada. Nous avons aussi amélioré considérablement le travail effectué à nos frontières. Par exemple, l’Agence des services frontaliers du Canada a augmenté le nombre d’agents à tous les principaux points d’entrée et renforcé les mesures de dépistage à tous les aéroports et à tous les points d’entrée terrestres, ferroviaires et marins. L’Agence des services frontaliers du Canada a aussi augmenté le nombre d’affiches, en plus de distribuer des brochures d’information aux voyageurs.

Je signale également que les transporteurs aériens qui ont des vols vers le Canada sont maintenant tenus d’effectuer des contrôles médicaux minimaux avant de permettre aux voyageurs d’embarquer. Peu importe la façon dont ils arrivent et leur point d’entrée, tous les voyageurs subissent un contrôle médical lors de leur arrivée au Canada. Les gens chez qui on observe des symptômes seront envoyés directement à l’Agence de la santé publique du Canada pour une évaluation. Ensuite, on leur donne des masques et on leur ordonne de s’isoler à la maison. Ils devront par la suite subir d’autres examens par un agent de quarantaine.

Je profite de l’occasion pour rassurer les Canadiens qui sont toujours à l’étranger : nos portes leur sont ouvertes. Les citoyens canadiens, les résidents permanents et les Autochtones ont toujours le droit d’entrer au pays. Le ministre des Affaires étrangères travaille sans relâche pour aider à faire revenir au pays les ressortissants canadiens qui sont en vacances ou qui participent à d’autres activités et qui sont incapables de rentrer au Canada parce qu’il n’y a plus de vols internationaux.

Nous demandons aux passagers aériens et à tous ceux qui utilisent d’autres moyens de transport et qui sont asymptomatiques de s’isoler pendant 14 jours. Cela assurera leur propre sécurité, de même que celle de leurs voisins et de leurs êtres chers.

La semaine dernière, nous avons communiqué avec nos collègues et alliés américains afin de discuter de mesures additionnelles à la frontière pour contrôler la propagation de la COVID-19 entre les deux pays. Avec nos partenaires américains, nous avons annoncé la prise de mesures réciproques pour restreindre la circulation des voyageurs qui traversent notre frontière commune pour des motifs non essentiels.

Il importe aussi de souligner qu’à la suite du travail accompli avec nos alliés, nous avons pu maintenir les canaux d’approvisionnement essentiels entre les deux pays, de façon à maintenir l’acheminement des biens et services qui sont cruciaux pour la survie et la prospérité des Canadiens et des Américains. Nous sommes conscients aussi qu’il y a des travailleurs essentiels pour notre sécurité et notre santé qui vivent d’un côté de la frontière et travaillent de l’autre. C’est pourquoi nous avons mis en place d’importantes exceptions pour leur permettre de se rendre sur leur lieu de travail et de remplir leurs fonctions au service des Canadiens et des Américains.

(1210)

Il était très important de préserver les chaînes d’approvisionnement pour maintenir l’accès aux biens, aux services, à la nourriture et aux produits pharmaceutiques dont nous avons besoin, mais aussi parce qu’elles seront nécessaires pour remettre un jour l’économie sur pied.

Nous sommes aussi conscients que les personnes qui transportent ces biens ou qui assurent ces services de part et d’autre de la frontière — les camionneurs, les équipages des avions ou des navires et les équipes à bord des trains — continuent d’offrir des services essentiels. C’est pourquoi nous avons pris des mesures pour protéger leur santé et leur sécurité, mais aussi pour permettre à ce travail de se poursuivre.

Nous sommes en outre conscients de l’importance des travailleurs étrangers temporaires dans le domaine de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la transformation du poisson et des fruits de mer ainsi que d’autres industries clés. Ceux-ci ne seront pas soumis aux restrictions concernant les voyages aériens, mais ils devront néanmoins prendre les mesures nécessaires et s’isoler pendant 14 jours pour assurer leur sécurité et celle des Canadiens.

Madame la présidente, nous estimons avoir pris les bonnes décisions jusqu’ici, car elles suivaient les conseils avisés que nous faisaient les professionnels de la santé pour assurer la sécurité des Canadiens, et nous allons continuer à mettre en œuvre les différents plans de santé publique. Je suis aussi responsable d’un certain nombre de premiers intervenants et d’organismes offrant des services essentiels. Nous faisons tout, en collaboration avec les principaux intéressés, pour que l’Agence des services frontaliers, le Service correctionnel, la GRC et tous les autres puissent compter sur un plan de poursuite des activités.

Nous avons que la situation est difficile à cerner et qu’elle évolue rapidement. Nous sommes en communication constante avec nos homologues des provinces et des territoires. Pour tout vous dire, je leur parle presque chaque jour, et nous continuons à suivre l’évolution de la maladie et à réévaluer les mesures prises un peu partout au pays. La collaboration est tout simplement phénoménale.

Aussi difficile la situation soit-elle, je considère comme les honorables sénateurs que les responsables et les travailleurs de première ligne ont agi de manière remarquable, pour ne pas dire héroïque. Toujours au poste, ils sont là pour servir les Canadiens, dans un merveilleux esprit de collaboration. Je sais qu’il s’agit d’un moment profondément éprouvant pour le Canada, mais c’est là qu’on voit que les épreuves font ressortir le meilleur de nos concitoyens. Merci beaucoup.

La présidente : Je vous remercie, monsieur le ministre. Nous passons maintenant aux questions.

Le sénateur Plett : Madame la ministre, monsieur le ministre, merci de vous être déplacés pour nous éclairer pendant cette période difficile. J’aimerais prendre un instant pour saluer aussi la Dre Tam, qui est parmi nous également. Merci de tout ce que vous faites.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Plett : Mes questions au premier tour s’adresseront à la ministre de la Santé, la ministre Hajdu. Je vais tenter de toutes vous les poser, donc j’aimerais que vos réponses soient aussi succinctes que possible. J’essaierai aussi d’être bref.

Madame la ministre, de nombreuses personnes craignent, à juste titre, que la qualité des soins qu’ils reçoivent dans le système de santé puisse diminuer par rapport à ce qu’il en était avant l’arrivée de la COVID-19. À titre d’exemple, je vais parler d’une jeune femme de l’Ontario qui est traitée pour un cancer. Les médicaments qu’on lui donnait auparavant par intraveineuse doivent maintenant être pris oralement. Les analyses sanguines que l’on effectuait plusieurs fois par semaine pour surveiller son état ont maintenant lieu une fois par semaine. Elle sait que ces changements ont pour but de protéger sa santé et celle de son équipe médicale, mais il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une situation très difficile.

Madame la ministre, je suis persuadé que d’autres Canadiens se trouvent dans une situation similaire. Que dites-vous aux patients dans l’ensemble du Canada qui recevaient habituellement d’excellents soins pour des problèmes de santé qu’ils avaient déjà avant la pandémie et qui doivent maintenant composer avec des soins nettement inférieurs? Pendant combien de temps seront-ils aux prises avec cette nouvelle réalité?

Mme Hajdu : Merci de votre question, monsieur le sénateur. Tout d’abord, je tiens à dire que je suis de tout cœur avec les patients à qui l’on demande de reporter une chirurgie élective ou un autre acte médical non urgent, ce qui, dans certains cas, cause beaucoup d’anxiété ou de changements dans les habitudes de vie. Je remercie encore une fois les professionnels de la santé de tout le pays, qui s’efforcent de peser la nécessité de prendre ce genre de décisions et qui réfléchissent à des façons de réduire le taux d’occupation de certains hôpitaux ou leur charge de travail pour se préparer au point culminant de la crise, que nous atteindrons, comme nous le savons, dans les prochaines semaines.

Il s’agit évidemment d’une situation sans précédent au Canada, et, même si nous disposons d’un système de santé publique dont nous pouvons être extrêmement fiers, comme l’est la majorité des Canadiens, il est débordé depuis très longtemps, comme nous le savons, et il l’est davantage maintenant que nous recensons plus de cas au Canada. Nous traversons une période où tous les Canadiens font des sacrifices, et je suis absolument certaine que ces sacrifices sont profondément personnels et, dans certains cas, assez lourds.

Je remercie la femme dont vous avez parlé d’avoir été capable de collaborer avec des fournisseurs de soins de santé pour trouver des solutions de rechange afin de recevoir ses traitements. Je présume que des milliers, voire des centaines de milliers, de Canadiens sont dans la même situation, tandis que le système de santé se prépare à une arrivée massive de patients comme nous n’en avons jamais vue auparavant.

Le sénateur Plett : Madame la ministre, que ferez-vous pour que le Canada ait des réserves suffisantes de sang pendant cette crise? Avez-vous parlé de l’approvisionnement en sang avec vos homologues provinciaux? Que se passera-t-il s’il y a confinement obligatoire? Pouvez-vous garantir au Sénat qu’un processus sera mis en place pour assurer la sécurité des gens qui souhaitent donner du sang?

Mme Hajdu : Merci, monsieur le sénateur. Nous avons observé une baisse des dons de sang ces temps-ci, et c’est pourquoi la Dre Tam et moi avons demandé aux Canadiens de continuer à donner du sang. Il est très important que les personnes qui peuvent le faire continuent à le faire. Il est nécessaire que nous maintenions les réserves de sang et ce, même dans les meilleures circonstances.

En ce qui concerne le confinement obligatoire, il faut être très prudent lorsqu’on utilise ce terme parce qu’il peut signifier plusieurs choses. D’une certaine façon, le Canada est en confinement. Nous n’acceptons plus de voyageurs en provenance de l’étranger. Nous avons toute une série de mesures à l’échelle du pays, selon les provinces, qui limitent de façon importante la vie des gens. Au fédéral, en prenant ce type de mesures, nous nous efforçons de préserver la capacité des gens de vaquer à leurs occupations au quotidien tout en tenant compte de la nécessité d’intensifier l’éloignement social, par exemple. Ce ne sont pas des décisions faciles. Cela dit, je pense que le terme « confinement obligatoire » a différentes significations pour différentes personnes. Nous devons donc éviter de l’utiliser d’une façon qui laisse entendre une seule chose.

Le sénateur Plett : Mais les réserves de sang seront-elles suffisantes?

Mme Hajdu : Dre Tam pourra répondre à cette question. C’est un point sur lequel elle travaille.

Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, Agence de la santé publique du Canada : Je tiens à rassurer les Canadiens et à leur dire que la Société canadienne du sang et Héma-Québec ont mis en place des mesures très rigoureuses pour garantir la sécurité des personnes qui vont donner du sang dans leurs cliniques. Ces deux organismes font une sélection préliminaire et ne laissent pas entrer dans les cliniques les personnes qui ont des symptômes. Il est donc très sécuritaire d’aller donner du sang.

Les Canadiens répondent à l’appel qui a déjà été lancé. Je leur demande de continuer de répondre à l’appel pour que les réserves de sang demeurent adéquates. Les Canadiens répondent déjà présents, et ils doivent simplement continuer dans la même voie. Merci.

La sénatrice Seidman : Je remercie les ministres et la Dre Tam. Selon un rapport commandé par le gouvernement fédéral, à la suite de la crise du SRAS, il n’y avait pas de base de données nationale pour assurer le suivi des cas, et les mécanismes pour communiquer les données aux provinces étaient déficients. Pendant cette pandémie de COVID-19, les Canadiens s’attendent à ce que l’on déploie des efforts exceptionnels pour que les données soient recueillies et échangées de façon transparente entre les gouvernements. Il est essentiel d’harmoniser les pratiques de gestion de données dans l’ensemble du pays.

Madame la ministre, dans quelle mesure a-t-on centralisé le suivi épidémiologique des cas? Pourriez-vous expliquer comment les gouvernements fédéral et provinciaux échangent et communiquent leurs données? Est-ce que le gouvernement fédéral mène ce processus très important?

Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénatrice. Vous avez entièrement raison; les données, en particulier les données détaillées, nous permettent de suivre la progression de la maladie partout au pays et d’établir les mesures requises d’une façon plus précise afin d’atténuer certains des effets de la crise économique qui sévit.

Le défi auquel nous devons faire face, bien honnêtement, est le niveau de transparence dans la présentation des données qui varie d’une province et d’un territoire à l’autre. Dans certains cas, il s’agit d’un problème de capacité, et Santé Canada est intervenu pour offrir du soutien, notamment en matière de ressources humaines, dans les provinces et territoires qui peinent à produire les données requises pour aider l’Agence de la santé publique du Canada à suivre la progression de la maladie et à la modéliser afin de déterminer les meilleures mesures à prendre.

À ce sujet, je vais céder la parole à la Dre Tam, car il s’agit d’une question sur laquelle elle s’est beaucoup penchée au sein du comité consultatif spécial avec les administrateurs en chef de la santé publique des provinces et des territoires.

(1220)

Dre Tam : Je vous remercie de cette question. Absolument, c’est une des choses les plus importantes que nous faisons avec les provinces et les territoires. Chacun des médecins hygiénistes en chef est chargé de recueillir des données. Ils partagent toutes les données possibles, aussi rapidement que possible. Nous savons tous que ceux qui sont sur la ligne de front du système de santé publique travaillent d’arrache-pied; ce n’est pas faute d’avoir essayé. Vous verrez que les données seront transmises de plus en plus vite.

Les médecins hygiénistes en chef de tout le Canada fournissent chaque jour des renseignements au public, sur chaque cas dont ils ont pris connaissance. Par contre, nous essayons de recueillir des informations plus détaillées sur ces cas afin de déterminer si les mesures prises ont eu une incidence sur l’épidémie. Ce travail se poursuit actuellement et il s’accomplit de plus en plus rapidement.

Le Canada est un pays vaste. Nous devons examiner l’épidémiologie de façon distincte à différents endroits. Les données nationales globales n’offrent pas suffisamment de détails sur ce qui arrive en Colombie-Britannique, en Alberta ou en Ontario. Donc, il faut vraiment avoir des données infranationales. Les provinces commencent à afficher les données sur leurs sites Web; nous n’avons qu’à les compiler. L’épidémie présente différentes caractéristiques dans les différentes parties du Canada, que nous sommes maintenant en mesure de décrire.

La sénatrice Seidman : Comment le pays peut-il déterminer le nombre réel de cas étant donné que beaucoup de Canadiens ayant des symptômes légers restent chez eux et qu’ils ne font jamais de test de dépistage? D’un point de vue épidémiologique, il est important de connaître le nombre réel de cas pour comprendre l’incidence et la propagation de la maladie.

Est-ce que Santé Canada ou l’Agence de la santé publique du Canada a étudié la manière dont d’autres pays ont mis en place des mécanismes d’échange de données avec leurs citoyens? Je crois qu’il y a environ 10 pays, dont la Corée du Sud, Singapour, la Belgique, l’Italie et l’Allemagne, qui utilisent les données des téléphones cellulaires pour suivre les cas et les contacts. Certains sont plus intrusifs et s’intéressent aux données personnelles, mais d’autres s’intéressent aux données globales des collectivités concernant la localisation et les mouvements. Le Canada a-t-il envisagé cette approche?

Mme Hajdu : Je vais commencer, puis je céderai encore la parole à la Dre Tam pour une réponse plus détaillée à votre question.

Si l’on se compare avec les autres pays, oui, des efforts sont déployés à cet effet. Nous examinons les efforts des pays comparables, non seulement pour gérer l’épidémie, mais aussi pour trouver une façon, comme je le dis souvent, de sortir de cette crise. C’est un défi. Nous avons l’impression d’être aux prises avec ce problème depuis un an au Canada, mais cela fait seulement trois mois que l’espèce humaine est confrontée à ce virus.

D’un pays à l’autre, diverses méthodes sont utilisées pour essayer de comprendre les variables épidémiologiques et trouver le moyen de se sortir de cette situation, à défaut de développer un vaccin ou un traitement.

La Dre Tam et ses collègues font un travail remarquable pour augmenter notre capacité de dépistage. En fait, selon les données qu’elle m’a transmises, près de 20 000 tests ont été faits hier. Nous approchons donc des taux de dépistage de la Corée du Sud.

La présidente : Je suis désolée, mais nous devons céder la parole à un autre sénateur.

La sénatrice Moodie : Madame la ministre Hajdu et Dre Tam, je vous remercie pour tout le travail que vous avez accompli au nom des Canadiens.

Les dangers auxquels sont exposés les intervenants de première ligne, surtout les travailleurs de la santé, m’inquiètent beaucoup. Sur les 40 000 cas documentés de COVID-19 en Espagne, 14 % étaient des professionnels de la santé, médecins et infirmières. Il y a déjà un grand nombre de personnes dont le test s’est révélé positif au Canada; j’ai vu qu’il y en a 26 en Ontario et 11 en Alberta. De nombreux professionnels de la santé travaillent avec une protection insuffisante, voire nulle.

Des travailleurs de la santé de première ligne nous disent également craindre pour leur propre sécurité, et la presse en donne de multiples exemples. Une douzaine d’infirmières d’Edmonton refusent de travailler à cause d’un équipement de protection individuelle inadéquat. Une pétition en ligne lancée par 62 médecins demande des équipements de protection. Hier, cette pétition comptait quelque 97 000 signatures.

Il paraît que dans les cliniques et les cabinets médicaux, des médecins et des infirmières ont un accès limité, voire inexistant, à de l’équipement de protection individuelle.

Madame la ministre, pouvez-vous faire le point sur les mesures concrètes qui sont prises, en collaboration avec les provinces et les territoires, pour faire en sorte que l’investissement qui a déjà été fait ou qui sera fait pour fournir l’équipement de protection individuelle nécessaire se traduise par un accès réel à cet équipement pour les travailleurs de première ligne? Ces derniers font face au danger en notre nom et nous disent que leurs besoins ne sont pas satisfaits et qu’ils ont peur.

Pourriez-vous aussi expliquer aux travailleurs de première ligne comment ils peuvent obtenir l’équipement de protection individuelle auquel ils n’ont pas accès à l’heure actuelle?

Mme Hajdu : Merci beaucoup, madame la sénatrice. Ma réponse comportera trois parties. Je céderai ensuite la parole à Dre Tam si le temps le permet.

Premièrement, nous collaborons très étroitement avec nos partenaires internationaux, provinciaux et territoriaux pour nous assurer que les conseils techniques fournis aux travailleurs de première ligne à propos de l’équipement de protection requis pour les différentes interventions soient fondés sur la science et permettent à la fois d’assurer la sécurité du personnel de première ligne de la manière la plus efficiente possible, et de protéger nos réserves d’équipement. Nous sommes conscients que ces conseils techniques suscitent des débats, particulièrement parmi les infirmières. J’ai parlé avec la présidente de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers, Linda Silas, et de nombreux fonctionnaires de mon ministère le font aussi. Ces conversations se poursuivent.

Je tiens à être claire. L’Agence de la santé publique du Canada continuera de fournir des conseils fondés sur la science. Les médecins nous demandent, eux aussi, de continuer d’écouter la science et de faire le nécessaire pour avoir, en quantité suffisante, l’équipement de protection requis pour l’intervention qu’on fait auprès du patient à un moment donné.

Des conseils techniques sont offerts aux travailleurs de première ligne. Nous parlons souvent des travailleurs de la santé de première ligne, mais n’oublions pas les autres services essentiels qui sont offerts dans les collectivités de l’ensemble du pays, y compris par le personnel des magasins de détail et des épiceries, les pharmaciens et le personnel de première ligne des refuges pour les sans-abris. Nous avons fourni une foule de directives concernant l’équipement de protection individuelle et les procédures de sécurité pour diverses catégories de travailleurs de première ligne, outre les travailleurs de la santé.

Pour ce qui est de se préparer à la hausse des cas, comme je l’ai indiqué dans mes observations préliminaires, des efforts considérables ont été déployés par Santé Canada, l’Agence de la santé publique du Canada, le ministère des Services publics et de l’Approvisionnement ainsi que le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique afin que l’on se procure le matériel nécessaire sur le marché mondial, étant donné les capacités très limitées de la chaîne d’approvisionnement mondiale, mais aussi afin que l’on puisse accroître les capacités de production à l’échelle nationale dans certains de ces secteurs. Nous poursuivons ces efforts tous les jours et à toute heure.

La sénatrice Moodie : Madame la ministre, vous savez peut-être que, dans les 24 dernières heures, nombre d’hôpitaux de Toronto ont demandé à leurs employés de porter des masques lors de toute rencontre clinique. Les données scientifiques n’indiquent aucune différence, mais, étant donné, d’une part, l’incertitude quant à l’infectiosité des personnes que ces employés doivent côtoyer et, d’autre part, la difficulté de maintenir une distance physique dans un milieu clinique, on estime que cette mesure offre une protection supplémentaire au personnel. Il y a donc des incohérences, puisque certains établissements ne prennent aucune mesure de ce genre, alors que d’autres cherchent à accroître le niveau de protection.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Je tiens à vous remercier, ainsi que votre entourage, de votre engagement et de votre expertise. Je remercie également les gens qui travaillent très fort pour nous protéger. C’est très généreux de leur part, et nous leur en sommes reconnaissants.

Ma question est générale, et je la pose dans le but d’être rassuré. Depuis un mois, le gouvernement fédéral et les provinces nous disent presque tous les jours que, même s’ils savent que la pandémie se propage et qu’elle constitue une menace importante, la situation est bien gérée et qu’on peut s’attendre à ce que tous nos besoins essentiels soient satisfaits.

Cependant, hier, j’ai entendu le premier ministre du Québec s’en prendre au gouvernement fédéral pour le manque de ventilateurs, et je crains que dans deux ou trois semaines, la situation tourne au vinaigre et que les deux parties commencent à s’accuser l’une et l’autre.

Pouvez-vous nous assurer que nous pourrons répondre à tous les besoins? Je comprends que le défi est énorme pour vous, mais pouvez-vous nous confirmer que le tout se déroulera de façon appropriée pour les Canadiens?

(1230)

[Traduction]

Mme Hajdu : Merci, sénateur. Je suis désolée, mais je dois vous répondre en anglais. Mon français est trop rudimentaire pour la réponse compliquée que je vais donner à votre question. Je tiens d’abord à dire que nous travaillons assidûment avec l’ensemble des provinces et des territoires et que, à mesure qu’augmentent les tensions liées à la prestation de services aux Canadiens durant cette période extrêmement difficile, les politiciens deviennent de plus en plus tendus, car ils veulent s’assurer de faire tout en leur pouvoir pour la population canadienne.

Soyons bien clairs. L’une des raisons pour lesquelles nous tentons d’aplatir la courbe est parce que nous ne possédons pas assez de respirateurs pour faire face à une flambée des cas comme celle observée dans de nombreux autres pays, tels que l’Italie. J’estime que nous devons être honnêtes à ce sujet. Nous faisons de notre mieux pour nous procurer davantage de respirateurs. Nous les fournirons aux régions qui en ont le plus besoin; cette décision sera prise collectivement par le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires. En effet, nous nous sommes entendus avec les provinces et les territoires pour partager l’équipement, en fonction de la manifestation et de la gravité du virus.

Ce n’est pas le moment pour les particuliers, les provinces ou les territoires d’accumuler des choses. Nous devons être animés par un esprit de partage et de générosité afin de pouvoir acheminer des fournitures, des personnes et des ressources aux régions qui en ont le plus besoin.

Je sais que ma collègue, la Dre Tam, collabore également avec le directeur de la santé publique du Québec.

Dre Tam : Des efforts sont déployés tous les jours pour mobiliser les provinces et les territoires et évaluer les besoins. Bien entendu, les provinces et les territoires doivent nous fournir une estimation de leurs besoins. En ce qui concerne les respirateurs artificiels, par exemple, le gouvernement fédéral a pris les devants et en a acheté avant même que les provinces fournissent une estimation des besoins prévus.

Nous examinons toutes les possibilités, y compris certains fournisseurs canadiens de respirateurs. Évidemment, notre objectif premier est d’éviter que quiconque ait besoin d’un respirateur artificiel. Toutefois, si l’on se fie aux statistiques et à la modélisation de cette pandémie, le recours aux respirateurs sera inévitable. Tous nos efforts visent à maintenir la courbe de l’épidémie, ainsi que son sommet, en-deçà de la capacité maximale du Canada pour ce qui est de gérer les patients. Cela dit, nous mettons absolument l’accent sur l’équipement de protection individuelle, les respirateurs artificiels et d’autre matériel essentiel.

Le sénateur Massicotte : À de simples fins de vérification, optimisons-nous toutes les innovations qui voient le jour? Par exemple, j’ai lu qu’une entreprise appelée Cepheid a créé un test de dépistage qui permet d’obtenir un résultat en 45 minutes, que ce test a été approuvé par la Food and Drug Administration et qu’il est maintenant utilisé aux États-Unis. Je constate également qu’un test d’immunité est maintenant disponible. Il s’agit d’une ressource importante créée par l’école de médecine Mount Sinai et dont se servent de nombreux pays. Utilisons-nous tout ce nouveau matériel pour améliorer notre efficacité et notre rendement?

Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénateur. Assurément, nous tirons parti des innovations et nous modifions les règlements aussi rapidement que possible afin de permettre l’utilisation de nouveaux tests et de profiter de la capacité des producteurs du pays de fournir de l’équipement de sécurité personnelle et des choses comme des respirateurs. Ce faisant, nous devons toutefois veiller à ce que des exigences minimales soient respectées, surtout en ce qui concerne la production d’équipement. En effet, il est inutile d’acheter une cargaison de masques N95 s’ils ne protègent pas véritablement les travailleurs.

Comme vous le savez, dans une situation comme celle-ci, il y a des centaines et des centaines de gens prêts à nous vendre leur marchandise. Dans certains cas, il s’agit de fournisseurs légitimes, mais, parfois, il s’agit de gens qui tentent de tirer profit de la situation absolument tragique qui frappe le monde entier. Les responsables de l’approvisionnement travaillent de concert avec Santé Canada et l’Agence de la santé publique pour faire en sorte que ce que nous achetons soit bel et bien utile pour les travailleurs de première ligne et pour les Canadiens qui comptent sur les produits en question.

Le sénateur White : Je remercie les sénateurs et les autres fonctionnaires de leur présence aujourd’hui. Je remercie particulièrement la Dre Tam qui, je pense, pour de nombreux Canadiens, est une source de quiétude pendant cette période difficile. Je suis reconnaissant du travail que vous accomplissez.

Ma question s’adresse au ministre Blair. Nous n’avons pas eu recours à la Loi sur les mesures d’urgence dans sa forme actuelle une seule fois au Canada. D’ailleurs, je pense que la majorité des gens se rapportent à la Loi sur les mesures de guerre, qui a été promulguée en 1970. Toutefois, je pense que si tout le monde lisait la Loi sur les mesures d’urgence, on se rendrait compte que la section portant sur les sinistres correspond parfaitement à la situation dans laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui. Je pourrais vous donner une longue liste des raisons pour lesquelles cette mesure législative doit être mise en place, mais, plus important encore, j’aimerais que vous nous disiez ce qu’il a été envisagé de faire, pourquoi on n’a pas décidé de le faire jusqu’à présent et ce qui sera le facteur déterminant pour décider d’aller de l’avant.

M. Blair : Merci beaucoup, monsieur le sénateur. Je serai bref. Tout d’abord, je conviens que les dispositions sur les sinistres de la Loi sur les mesures d’urgence, plus précisément l’article 8, s’appliquent tout à fait à la situation actuelle. Cette loi exige que certaines conditions soient présentes avant qu’il ne soit possible d’invoquer la loi. La première condition est, bien sûr, la présence de circonstances à caractère d’urgence et de nature temporaire, qui mettent en danger la vie, la santé et la sécurité des Canadiens.

De toute évidence, la situation actuelle correspond à cette définition. Cependant, la loi exige également que le gouvernement fédéral tienne compte de la capacité et des pouvoirs des provinces pour gérer la situation. Cette capacité et ces pouvoirs doivent être considérés comme insuffisants ou déficients pour justifier une intervention fédérale. Par ailleurs, le gouvernement doit également conclure qu’il est impossible de gérer la situation efficacement avec les pouvoirs que confèrent les autres lois canadiennes.

Monsieur le sénateur, je vous assure que nous évaluons la situation chaque jour et que, lors de nos consultations avec les provinces et les territoires, je me suis renseigné sur l’efficacité et la pertinence de leurs lois et des mesures d’urgence prises à ce niveau. Nous consultons quotidiennement les provinces et les territoires pour savoir s’il faut en faire davantage.

Je tiens à vous assurer que le gouvernement n’éprouvera aucune réticence à recourir à la Loi sur les mesures d’urgence si cela est jugé nécessaire. Nous évaluons la situation au quotidien afin de déterminer si c’est nécessaire. S’il devient nécessaire d’accorder les pouvoirs qu’elle confère où que ce soit au Canada, nous le ferons. De par la nature même de cette loi, il faut alors procéder en consultation avec les provinces et les territoires. Cette consultation s’effectue à tous les niveaux entre nos représentants respectifs, avec mes homologues et même entre les premiers ministres provinciaux et territoriaux et le premier ministre. Cette discussion a lieu chaque jour.

Le sénateur White : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Il y a environ une dizaine d’années, la GRC a créé une importante unité de réserve qui n’existait pas auparavant, ainsi que le Programme des auxiliaires de la GRC, qui existe dans toutes les provinces sauf l’Ontario et le Québec, si je ne m’abuse. A-t-on prévu avoir recours à ces réservistes et à ces auxiliaires pour les affecter à des tâches auxquelles ils ne seraient normalement pas affectés?

M. Blair : Je répète que l’urgence actuelle est tout à fait inédite. Normalement, les policiers, les pompiers et les ambulanciers sont les premiers sur les lieux, mais dans les circonstances, ce n’est plus forcément le cas. Les premiers intervenants sont des professionnels de la santé. Notre objectif premier a toujours été de les aider à faire un travail tout simplement essentiel. Or, plus la maladie progressera, plus leur travail deviendra important. Voilà pourquoi l’ensemble des organismes gouvernementaux et des ministères ont passé en revue et actualisé leurs plans de poursuite des activités. Ils ont tous étudié la possibilité d’accroître leur capacité d’intervention.

J’ai aussi demandé à la commissaire de la GRC de prendre les devants et de communiquer avec les autres personnes responsables des premiers intervenants du pays afin que l’intervention nationale se fasse de manière concertée et soutenue. Nous faisons tout pour que les capacités nécessaires puissent être déployées et renforcées en cas de besoin. Nous sommes en présence de difficultés encore jamais vues et, comme vous le savez, les agents de la GRC sont souvent appelés à se déplacer d’un endroit à l’autre; or, dans les circonstances, les déplacements peuvent aggraver une situation déjà difficile. Voilà pourquoi nous cherchons de nouvelles façons d’intervenir dans le contexte difficile de la pandémie actuelle.

Le sénateur White : Merci beaucoup.

[Note de la rédaction : Le sénateur White s’exprime dans une langue inconnue.]

Le sénateur Munson : J’ai deux questions à poser aux deux ministres, mais avant cela, je tiens à les remercier de leur action. Nous savons que vous faites de votre mieux. Dans un reportage diffusé ce matin à la CBC, on disait ceci :

Les Canadiens qui, face à la pandémie de COVID-19, sont prêts à tout pour rentrer chez eux contournent facilement le contrôle des voyages aériens [...]

Et ils relatent des faits réels à ce sujet.

Monsieur le ministre, la Chine a presque aplati la courbe. Les gens qui sont rentrés facilement chez eux ont probablement contourné les contrôles qu’on essayait de leur imposer. Comment pouvez-vous les en empêcher? Quelles autres mesures avez-vous prévues pour garantir que les passagers d’un avion ne rapportent pas la maladie au pays?

(1240)

M. Blair : Je vais commencer, puis je céderai la parole à ma collègue qui pourra aborder le point de vue sanitaire. Nous avons adopté un certain nombre de mesures à l’égard des voyageurs qui reviennent de l’étranger. Le transporteur aérien constitue la première ligne de défense. Nous avons émis des directives à l’intention des transporteurs aériens qui assurent les vols à destination du Canada. Ils ont le devoir et la responsabilité de vérifier s’il y a des personnes symptomatiques qui montent à bord. Une fois à bord, ces personnes peuvent poser un risque pour les autres.

Il ne s’agit pas simplement de poser les questions, car nous savons que la grande majorité des Canadiens sont très responsables et consciencieux et qu’ils vont dire la vérité, mais certains ne le feront pas. Nous avons demandé aux transporteurs et à leurs équipages d’observer les passagers afin de repérer ceux qui semblent symptomatiques. Nos représentants en sont avertis avant l’atterrissage de l’avion. Ces personnes sont attendues à la barrière, séparées des autres passagers qui arrivent et aiguillées vers les interventions sanitaires appropriées. Tout le monde doit répondre à une question. On demande aux passagers s’ils sont symptomatiques. Ils doivent répondre. On leur dit également de s’isoler pendant 14 jours. Ils doivent reconnaître qu’ils ont reçu cette consigne.

Des agents patrouillent dans les aires d’arrivée des passagers afin de détecter les symptômes et de diriger les personnes qui en ont vers les autorités sanitaires compétentes. Nous ne procédons pas à des examens de santé dans ces lieux; nous cherchons plutôt à repérer les passagers qui présentent des symptômes à leur arrivée. Nous les informons également des mesures à prendre pour prévenir la propagation de la maladie.

Le sénateur Munson : Madame la ministre de la Santé, pourquoi ne procède-t-on pas à des examens de santé? Je suis allé souvent en Afrique et, parfois, on prend la température des voyageurs à leur arrivée. On faisait cela avant la pandémie. Je pense que la situation est très grave.

Mme Hajdu : Merci, monsieur le sénateur. Tout d’abord, permettez-moi de dire qu’il s’agit d’un virus très sournois. J’entends par là qu’il provoque parfois des symptômes légers sans aucune fièvre, ce qui pose problème. Les symptômes varient d’une personne à l’autre, et il est extrêmement difficile de détecter la maladie. Il arrive parfois que les gens aient des symptômes si légers qu’ils ne savent même pas qu’ils sont malades. C’est pourquoi ce virus est problématique depuis le tout début. En réalité, les meilleures données à notre disposition proviennent de l’épisode du SRAS, où, certains d’entre vous s’en souviennent peut-être, on utilisait des thermomètres à la frontière. Aucun cas n’a été détecté à l’aide de cette technologie.

La façon d’utiliser les ressources dans une telle situation est cruciale. Bien sûr, des agents de quarantaine de l’Agence de la santé publique se trouvent à tous les aéroports. Nous avons triplé le nombre d’employés pour appuyer l’Agence des services frontaliers du Canada. Lorsque des employés de l’agence repèrent des personnes qui présentent des symptômes, ces dernières sont isolées des autres voyageurs, elles sont questionnées davantage, puis elles sont dirigées vers l’Agence de la santé publique, au besoin. Ce travail se fait déjà.

Nous sommes évidemment préoccupés par les gens qui reviennent au Canada et qui ne prennent pas la situation au sérieux, comme la nécessité de se placer en quarantaine pour 14 jours, de rester en isolement pour 14 jours. C’est pourquoi, à compter de minuit ce soir, cette mesure sera obligatoire pour tous les voyageurs qui rentrent au pays.

C’est particulièrement vrai pour les gens qui viennent de pays qui ont minimisé le problème que pose le virus. Nous savons que beaucoup de gens reviennent de leurs résidences d’hiver, par exemple, qui ont peut-être entendu différentes nouvelles concernant la gravité de la maladie et qui ne prennent pas la situation au sérieux. À partir de ce soir, toute personne qui revient au Canada sera tenue de s’isoler pendant 14 jours, conformément à la Loi sur la mise en quarantaine. De plus, il lui sera interdit de s’isoler dans une résidence où se trouve une personne vulnérable et de prendre le transport en commun pour se rendre à son lieu d’isolement. L’Agence de la santé publique du Canada aidera les personnes qui n’ont pas d’endroit où se loger ou qui n’ont pas de moyen de transport privé.

Il faut que les Canadiens qui rentrent au pays prennent la situation au sérieux. Même s’ils ne présentent pas de symptômes au débarquement, il est extrêmement important que les Canadiens comprennent que, pour assurer la sécurité de leurs familles et de leurs collectivités, ils doivent suivre les conseils en matière de santé publique et respecter dorénavant l’exigence de rester chez eux pendant 14 jours. Cela signifie qu’ils ne doivent pas rendre visite à leurs amis et à leur famille.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Je vous remercie d’être avec nous aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.

Ma question s’adresse à Mme Hajdu, ministre de la Santé, et porte sur les services offerts aux Canadiens en ce qui a trait à la santé mentale.

[Traduction]

Je pense que nous sommes tous conscients de cette urgence sanitaire, mais j’ai quelques inquiétudes en ce qui concerne les services de santé mentale. Existe-t-il un plan pour que les gens aient plus facilement accès à ces services, afin de les aider en cas de problèmes de santé mentale? La situation actuelle est très anxiogène. Certaines personnes ressentent du stress, de la peur et de l’anxiété parce qu’elles craignent de devoir affronter l’inconnu à l’avenir. En outre, nous devons penser aux personnes qui éprouvent actuellement des problèmes de santé mentale.

Existe-t-il un plan, une stratégie d’aide? Peut-être qu’il faudrait offrir plus de services, plus de lignes d’écoute et d’assistance, et augmenter le financement des groupes à but non lucratif qui viennent en aide aux personnes vulnérables. Je vous serais reconnaissant de nous donner un peu plus de détails à propos de ce que nous avons comme plan.

Mme Hajdu : Merci beaucoup, madame la sénatrice. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous débattons de ce projet de loi aujourd’hui. Nous voulons atténuer la peur et l’anxiété que vivent les Canadiens par rapport à différentes sphères de leur vie. Ils craignent évidemment de contracter le virus et s’inquiètent de ses effets possibles sur leur santé et leur sécurité, mais ils sont aussi extrêmement préoccupés par les pertes de revenus et la durée de l’auto-isolement. Il est très difficile de répondre à toutes ces questions. Même en cette période extraordinaire, nous constatons que d’autres pays dans le monde essaient de répondre à ces questions et que, parfois, il n’y a tout simplement pas de réponse facile.

Je suis heureuse que vous ayez souligné l’incroyable fardeau que cette crise représente pour la santé mentale des Canadiens, et c’est un aspect qui me préoccupe. Lorsque je me couche le soir, je pense aux enfants qui vivent dans des familles aux prises avec des difficultés. Je pense aux gens qui souffrent de toxicomanie et qui sont maintenant isolés, sans pouvoir sortir pour recevoir les soins dont ils ont besoin. Je pense aux personnes qui vivent déjà avec d’importants troubles de santé mentale, pour qui la crise aggrave la situation. Nous prenons un certain nombre de mesures, notamment en collaborant avec des organismes sans but lucratif. La ministre de l’Égalité des genres travaille sur des mesures de soutien pour les organismes qui viennent en aide aux familles et aux femmes susceptibles d’être victimes de violence conjugale ou d’une autre forme de violence.

Dans les jours à venir, nous lancerons un outil virtuel pour la santé mentale auquel les Canadiens pourront accéder gratuitement. Cet outil leur permettra au moins d’acquérir des compétences qui pourraient les aider à calmer leur anxiété et leurs craintes. La contribution de tous est nécessaire. C’est pourquoi j’exhorte les Canadiens à être gentils les uns envers les autres. Les gouvernements ne pourront pas tout régler par eux-mêmes. Les Canadiens devront travailler ensemble, se soutenir mutuellement, être à l’écoute les uns des autres, être gentils les uns envers les autres, ne pas stigmatiser certaines communautés, et comprendre que toutes les personnes, peu importe leur situation, tentent de leur mieux de donner un sens à ce qui se passe actuellement et que nous aurons tous besoin d’aide pour traverser cette épreuve.

Votre question est extrêmement importante. Plus la pratique de distanciation sociale sera longue, plus nous observerons des problèmes graves de santé mentale et du stress au sein de la population. Il incombera à tous les Canadiens de continuer de tendre la main aux autres, surtout ceux qui n’ont souvent personne dans leur vie.

[Français]

Le sénateur Dalphond : Je remercie les ministres d’être présents. Ma question s’adresse au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.

[Traduction]

Monsieur le ministre, de plus en plus de Canadiens s’inquiètent de ce qui se passe aux États-Unis, où on semble hésiter sur les mesures à prendre, alors que nous avons mis en place des mesures rigoureuses. Au Québec, en particulier, dont je suis originaire, nous partageons une longue frontière avec l’État de New York, où la situation, à cause de la pandémie, est alarmante. Il y a deux choses qui nous inquiètent et j’aimerais que vous nous disiez ce que vous en pensez. D’abord, il faut que la chaîne d’approvisionnement ne soit pas rompue. Dans quelle mesure peut-on se fier à la chaîne d’approvisionnement quand on sait que, du côté américain de la chaîne d’approvisionnement, rien n’est fait pour juguler la pandémie?

Ensuite, quelles mesures prenons-nous pour éviter que la chaîne d’approvisionnement ne contribue à la contamination de davantage de Canadiens et à la propagation du virus au Canada? Nous apprécions que les camions traversent la frontière le plus vite possible, mais je suppose que nous aimerions qu’ils ne soient pas des vecteurs de la maladie quand ils traversent la frontière.

M. Blair : Merci, monsieur le sénateur. Je conviens que les questions que vous posez sont très importantes et qu’elles ont été au centre de notre planification et de la mise en œuvre des mesures que nous avons prises pour limiter les déplacements non essentiels à travers notre frontière.

(1250)

C’est une mesure importante que nous avons mise en place et qui nous démarque. Elle a une incidence considérable. En comparant les données d’une année à l’autre, nous avons constaté une diminution de 80 % chez les voyageurs qui viennent au Canada par avion en provenance des États-Unis. Pour ce qui est des voyages par voie terrestre, nous avons observé une baisse d’environ 71 % du volume des déplacements sur les autoroutes, ce qui est assez significatif.

Par ailleurs, je peux vous assurer que nous effectuons un suivi quotidien. Bien qu’il y ait eu une certaine diminution du nombre de semi-remorques qui traversent la frontière dans les deux sens, cette diminution est presque entièrement le résultat d’usines qui ferment parce que leurs travailleurs ne sont pas en mesure de se rendre à leur travail non essentiel.

Nous surveillons attentivement tous les aspects des infrastructures essentielles pour nous assurer qu’elles peuvent être maintenues. Cela inclut les chaînes d’approvisionnement, les transports, les services publics dans l’ensemble du pays, les services de santé et les services de sécurité. Tous les aspects des infrastructures essentielles font l’objet d’une surveillance très attentive. Je suis convaincu que nous avons été en mesure de maintenir ces chaînes d’approvisionnement.

En ce qui a trait aux personnes qui conduisent des camions ou des trains pour transporter des produits de part et d’autre de la frontière, je peux vous dire, monsieur le sénateur, que nous les avons exemptées de la période obligatoire de 14 jours de quarantaine, mais nous prenons des mesures pour qu’elles restent en santé en accomplissant ce travail essentiel. Nous leur avons fourni des informations et nous collaborons étroitement avec leur association afin que ces personnes surveillent rigoureusement leur propre état de santé et qu’elles mettent en pratique les mesures d’hygiène appropriées et pratiquent la distanciation sociale pour se protéger. Si elles présentent des symptômes, elles cesseront immédiatement de travailler. La situation sera suivie de près.

Monsieur le sénateur, le maintien des chaînes d’approvisionnement demeure un défi, mais nous surveillons la situation au jour le jour. Je peux vous dire que la circulation des camions est très fluide à la frontière; les chaînes sont maintenues.

Le sénateur Dalphond : S’agit-il d’un système d’autodéclaration? Le chauffeur de camion annonce-t-il en traversant la frontière qu’il se sent bien? Subit-il un examen et un suivi?

M. Blair : On fait des vérifications. Premièrement, ils doivent avoir les documents appropriés pour pouvoir traverser la frontière et être reconnus comme travailleurs essentiels. Nous leur donnons des renseignements sur les symptômes à surveiller et sur les autres mesures qu’ils peuvent prendre pour assurer leur sécurité. Ils sont soumis à une vérification rigoureuse de la part des agents frontaliers du Canada, mais ils sont autorisés à entrer au pays pour y accomplir le travail essentiel qu’ils doivent encore y accomplir.

Le sénateur Housakos : Je souhaite la bienvenue aux ministres. Comme beaucoup de Canadiens, nous sommes très inquiets de voir que le Canada semble tarder à agir au lieu d’être proactif. C’est l’impression que nous avons depuis le début. On s’est demandé, par exemple, pourquoi le Canada avait attendu aussi longtemps avant d’imposer des restrictions en matière de voyages et pourquoi on n’avait pas mis en place des processus de dépistage plus rigoureux dans les aéroports et à la frontière.

Nous ne pouvons plus revenir en arrière, évidemment. Nous avons fait les mêmes erreurs que de nombreux autres pays et nous devons faire face à des circonstances exceptionnelles. Cependant, pour réussir à aplatir la courbe, nous devons anticiper la prochaine catastrophe qui nous guette.

Honnêtement, messieurs et madame les ministres, en tant que parlementaires, il y a matière à sérieusement nous inquiéter. Une de mes collègues a parlé plus tôt de la situation des travailleurs de la santé sur le terrain. Je suis bien au fait de cette situation, puisque ma femme compte parmi ces travailleurs et elle travaille 15 heures par jour depuis 15 jours, sans jour de repos. Son personnel est stressé. C’est une question qu’elle m’a posée directement. Sur le terrain, dans les hôpitaux de la province, la sûreté des infrastructures est inadéquate pour le personnel, des cabines aux postes de triage. Il n’y a que des infrastructures de base. Il faudrait construire des installations pour répondre aux incidences du virus. Il n’y a pas assez de masques. Il n’y a pas assez de blouses d’hôpital. Il n’y a pas assez de respirateurs pour ce qui s’en vient, si l’on se fie à ce qui s’est passé dans certains des pays qui ont été touchés avant nous.

Il n’y a pas assez de trousses de test. C’est aussi ce qui explique que nous ne sachions pas présentement quelle est l’ampleur réelle de la propagation du virus ou quelles sont les régions touchées, entre autres.

Si on analyse l’évolution de la courbe en se basant sur les données des autres pays, on constate que les cas augmentent maintenant de manière exponentielle. Le gouvernement a confirmé que nous disposons d’un peu plus de 5 000 respirateurs. Que se passera-t-il dans quelques semaines si plus de 10 000 Canadiens doivent être hospitalisés? Les travailleurs en milieu hospitalier, comme mon épouse, devront commencer à décider qui va mourir et qui va vivre, qui va recevoir un respirateur et qui va être intubé. Nous nous sentirions plus rassurés si le gouvernement pouvait faire davantage que de répéter des phrases comme « Nous nous penchons sur la question », et « Nous évaluons la situation avec les provinces ».

En 2008, le Comité sénatorial de la sécurité nationale et de la défense a publié un rapport sur la protection civile. On s’est penché sur les réserves d’urgence, plus particulièrement la réserve nationale stratégique d’urgence de Santé Canada. À l’époque, la réserve se composait de huit entrepôts et de 1 300 réserves de matériel établis stratégiquement dans l’ensemble du pays. On compte 165 hôpitaux de campagne, comprenant chacun 200 lits, qui pourraient entrer en fonction dans un délai de 24 heures. Pouvez-vous nous dire également ce qu’on trouve dans ces réserves et si on est prêt à déployer ces ressources? Sont-elles mises à jour? A-t-on étudié sérieusement la possibilité de faire appel aux militaires et de fournir les infrastructures de soutien nécessaires à notre système de santé, qui était déjà débordé partout au pays avant l’épidémie de coronavirus? Nos établissements employaient déjà leurs capacités maximales. A-t-on envisagé de recourir aux Forces armées canadiennes pour établir et organiser des centres de triage et des hôpitaux de fortune, et pour fournir à ces établissements les lits, les trousses de dépistage, les respirateurs, l’équipement et le soutien nécessaires, au cas où le Canada serait débordé par le nombre de patients, comme on l’a vu en Italie et dans d’autres pays? Je remercie les ministres.

Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénateur. Tout d’abord, je remercie la Dre Tam et l’Agence de la santé publique du Canada de leur travail incroyable pour nous aider à traverser cette période très difficile et à prendre des décisions extrêmement difficiles.

Je ne souscris pas à votre évaluation selon laquelle nous n’avons pas une longueur d’avance sur d’autres pays. Bien sûr, d’autres pays ont des systèmes de gouvernance différents qui leur permettent de prendre des mesures plus strictes. Cependant, en tant que démocratie qui utilise des données scientifiques et probantes, je fais grandement confiance au leadership de la Dre Tam et de l’Agence de la santé publique du Canada pour gérer la situation du mieux possible.

Pour ce qui est de la vive progression du nombre de cas, nul pays n’est préparé pour le genre de prévalence qui accompagne cette pandémie. C’est la raison pour laquelle le monde entier est en situation de crise. Quel que soit le pays, les systèmes de santé ont du mal à répondre aux besoins et à satisfaire la demande des malades, en particulier des personnes gravement malades. Voilà pourquoi nous travaillons si fort en ce moment pour aplanir la courbe. Nous savons que c’est notre meilleure chance. Notre meilleure chance consiste à prévenir que des gens tombent gravement malades tous en même temps. Nous espérons échelonner sur une plus longue période la propagation de la maladie au Canada. Cela ne veut pas dire que moins de gens seront malades. Par contre, ils ne seront pas tous malades en même temps, ce qui aidera à alléger le fardeau des professionnels de la santé tels que votre épouse et tant d’autres au pays. Il est compréhensible que ces gens soient alarmés, car ils doivent composer avec des pressions énormes pour préparer les hôpitaux et tous ces systèmes qui n’ont pas été conçus pour une prévalence comme celle que nous risquons de connaître au Canada et qui s’observe dans d’autres pays.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos invités. Ma question s’adresse au ministre Blair et comporte deux volets. À l’heure actuelle, quel est l’état de la situation dans les pénitenciers canadiens en ce qui concerne la propagation du virus? Y a-t-il beaucoup de gens qui sont atteints? Quels moyens prenez-vous pour protéger les agents correctionnels, qui font un travail extraordinaire? On sait que, par le passé, votre gouvernement ne les a pas toujours écoutés. Comment allez-vous protéger nos agents correctionnels dans les pénitenciers?

[Traduction]

M. Blair : Merci beaucoup, sénateur. Ce matin, il n’y avait aucun cas de COVID-19 confirmé dans nos établissements correctionnels. Nous poursuivons la planification avec les autorités de la santé publique. Tous nos établissements ont un plan d’urgence.

Nous donnons également de la formation à nos agents. Nous nous assurons qu’ils disposent d’un stock d’équipement de protection individuelle adéquat pour répondre à leurs besoins.

Sénateur, je comprends votre inquiétude. De par sa situation, la population carcérale constitue un groupe particulièrement vulnérable. Nous communiquons avec les représentants du Service correctionnel du Canada et avec les syndicats qui représentent ses employés pour veiller à ce que ces derniers aient le soutien dont ils ont besoin pour s’acquitter de leur important travail. Nous nous soucions également beaucoup de la sécurité de la population carcérale. Des mesures spéciales sont adoptées. Ainsi, il y a plusieurs jours, le Service correctionnel du Canada a interdit toutes les visites. Nous avons imposé des limites sur les déplacements et les transfèrements de détenus entre établissements.

(1300)

Des mesures importantes sont prises à l’intérieur des établissements pour réduire le risque que la maladie y soit introduite. Nous nous préparons en conséquence. Comme vous le savez sans doute, les établissements disposent d’installations sanitaires. Ils ont aussi des procédures bien établies pour contenir les maladies et les virus qui entrent dans le milieu carcéral, car c’est un défi de taille auquel ils doivent faire face régulièrement. Comme la ministre de la Santé l’a souligné, il s’agit d’un virus sournois. Comme il est beaucoup plus insidieux et plus difficile à contenir, nous prenons des mesures très vigoureuses.

J’ai aussi demandé à la commissaire du Service correctionnel du Canada et à la présidente de la Commission des libérations conditionnelles du Canada d’examiner les façons de réduire le nombre de personnes qui pourraient être exposées au virus. Je leur ai aussi demandé d’envisager la possibilité de prendre des mesures pour faciliter la libération anticipée de délinquants non dangereux, par exemple. Nous examinons un certain nombre de mesures qui pourraient réduire le risque assez élevé qui existe dans les établissements correctionnels.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’ai une autre question. Pourquoi avez-vous pris la décision de fermer temporairement le passage du chemin Roxham? La majorité des Canadiens voudraient qu’il soit fermé définitivement.

[Traduction]

M. Blair : Nous avons un partenariat de longue date avec le Québec, qui fournit un hébergement temporaire aux personnes qui traversent la frontière de manière régulière et qui font une demande d’asile. Le Québec nous a indiqué que l’isolement de 14 jours pour ces personnes présente de grandes difficultés.

Nous sommes en discussion avec d’autres organismes qui s’occupent des réfugiés. Par exemple, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et l’Organisation internationale pour les migrations ont interrompu la réinstallation des réfugiés. Pour ceux dont le dossier est en attente, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada est intervenu et a fait les arrangements nécessaires pour que ceux qui ont déjà fait une demande soient logés de manière à ce qu’une période d’isolement de 14 jours soit possible.

Nous travaillons aussi avec nos homologues des États-Unis. En nous fondant sur les mesures temporaires en place pour restreindre les déplacements non essentiels entre les deux pays, nous avons convenu de renvoyer des individus, ce qui a eu des effets considérables et presque immédiats. Une personne a été renvoyée du Canada vers les États-Unis et une personne a été renvoyée des États-Unis vers le Canada. Nous avons constaté que la mise en œuvre de cette mesure temporaire décourage les personnes de venir au pays.

Si nous avons décidé de prendre cette mesure maintenant, c’est parce que nous sommes confrontés aux nombreux défis que présente l’endiguement de cette maladie. Nous croyons que restreindre de façon appropriée la circulation des personnes à la frontière canado-américaine est la bonne chose à faire à l’heure actuelle.

Le sénateur Campbell : Ma question s’adresse à la ministre de la Santé. Nous avons discuté brièvement de la santé mentale, de l’isolement et de l’importance de prendre soin de soi-même. La question que je pose peut ne pas sembler particulièrement profonde, mais les gens peuvent-ils sortir pour faire de l’exercice ou simplement se promener en toute sécurité? Ces choses demeurent-elles possibles? Si c’est le cas, comment conseille-t-on aux Canadiens de le faire?

Mme Hajdu : Je vous remercie, sénateur. Il y a eu beaucoup de malentendus à ce sujet. Les gens pourront trouver plus d’information sur notre site Web; je crois qu’il sera mis à jour aujourd’hui même afin que les gens y voient plus clair.

Du point de vue de la santé, le meilleur conseil qu’on puisse donner aux gens qui ne sont pas malades, c’est de sortir prendre l’air. Cela dit, les personnes qui présentent des symptômes, même si elles n’ont pas été testées positives à la COVID-19, doivent absolument demeurer à la maison, s’isoler et suivre les consignes de la santé publique jusqu’à ce que leur test se révèle négatif ou qu’on leur confirme qu’elles ne sont plus malades. Les personnes qui se sentent bien et qui n’ont aucun symptôme, elles, sont au contraire encouragées à aller marcher dehors.

Quelqu’un m’a donné un bon truc hier pour savoir si on est à six pieds les uns des autres : six pieds, c’est l’équivalent d’un bâton de hockey. La plupart des Canadiens savent instinctivement combien mesure un bâton de hockey. C’est donc la distance que l’on doit conserver avec la personne la plus près de soi. Les membres d’une même famille qui vivent ensemble et qui ne présentent aucun symptôme n’ont évidemment pas besoin de garder leurs distances, mais si vous marchez avec ami, organisez-vous pour qu’il y ait toujours six pieds entre vous deux ainsi qu’entre vous et les autres passants. Si les gens pensent au bâton de hockey, ils pourront se tenir à six pieds de ceux qui passent près d’eux.

L’air frais est bon pour la santé. Passer du temps à l’extérieur est par ailleurs un bon moyen de chasser l’ennui. C’est aussi bénéfique pour la santé mentale. Les gens rentrent rassérénés et mieux en mesure de s’attaquer aux problèmes auxquels ils font face pendant cette période extrêmement angoissante et anxiogène. Nous continuerons de donner des directives, dans une optique de santé publique, pour que les gens sortent marcher en toute sécurité. Je vous remercie de la question. Je sais qu’elle préoccupe de nombreux Canadiens. Merci, monsieur le sénateur.

Le sénateur Campbell : Merci, madame la ministre.

Le sénateur Ngo : Ma question s’adresse à la ministre de la Santé. Comme la COVID-19 se répand à une vitesse alarmante, nous savons que cette situation sans précédent pourrait durer des mois. En ce moment même, certaines régions d’Asie sont aux prises avec une deuxième vague de cas.

La semaine dernière, la Dre Tam a affirmé que le Canada devrait se préparer à une deuxième vague. Actuellement, combien de mois le gouvernement s’attend-il à ce que la situation se poursuive? Sommes-nous prêts pour une nouvelle vague?

Mme Hajdu : Merci, sénateur. Je pense que c’est la question que se posent tous les Canadiens — en fait, tous les citoyens du monde. Comment sortir de la situation dans laquelle se trouve la planète?

Par exemple, Wuhan, la ville qui a été la première touchée par l’épidémie, commence à assouplir certaines de ses mesures d’isolement et de restriction des services, et adopte progressivement des mesures pour relancer l’économie et la vie quotidienne des citoyens. Pour autant, la situation continuera d’être délicate en l’absence de vaccin, de traitement ou de progrès scientifique en matière d’immunité. Il y a beaucoup de choses intéressantes qui sont faites, toutes sortes de mesures de dépistage. Certes, nous utilisons actuellement des tests de dépistage, mais des recherches sont également menées dans le domaine de la sérologie pour déterminer combien de personnes ont été exposées et le niveau d’immunité qu’elles pourraient avoir.

Je rappelle aux honorables sénateurs que ce virus est avec nous depuis trois mois et que la science n’a rien de simple. Les recherches scientifiques prennent du temps et avant qu’il y ait une percée, il faut un certain degré de certitude. À cet égard, je tiens à remercier tous les chercheurs et les scientifiques du monde entier qui travaillent sans relâche, y compris les scientifiques canadiens qui sont à l’avant-garde des efforts déployés pour obtenir des réponses à vos questions, sénateur. Malheureusement, nous ne les avons pas encore.

Je vais présenter plus tard aujourd’hui au Cabinet certains de nos scénarios les plus optimistes. Ils ne sont pas nécessairement ceux que les Canadiens aimeraient entendre. La Dre Tam a été très claire et moi aussi. Ce n’est pas une question de quelques semaines. Nous parlons, comme vous l’avez indiqué, de quelques mois. Je pense que le monde entier cherche une solution pour se sortir de cette situation beaucoup plus rapidement, mais nous devrons compter sur les scientifiques et les chercheurs pour nous aider à y arriver en toute sécurité.

Le sénateur Ngo : Qu’en est-il de la deuxième vague? Sommes-nous prêts?

Mme Hajdu : Sénateur, présentement, nous nous préparons pour la première vague. Il m’est difficile de dire si nous serons prêts pour la seconde vague, alors que nous déployons des efforts colossaux pour nous préparer en vue de la première vague qui s’apprête à déferler. Lorsque viendra la deuxième vague, nous aurons en main davantage d’information. Ce que les Canadiens et tous les habitants de la planète peuvent espérer, c’est que la recherche et la science nous donneront un remède qui pourrait, par exemple, atténuer la gravité de la maladie chez les plus vulnérables et leur éviter des conséquences dramatiques, dont la mort, et qu’un vaccin soit découvert afin d’immuniser la population.

Le sénateur Ngo : Ma prochaine question s’adresse au ministre Blair. Nous avons fermé la frontière aux étrangers le 18 mars. Le 9 mars, Israël avait déjà fermé la sienne et imposé la quarantaine obligatoire à tous les voyageurs — la quarantaine obligatoire, pas volontaire. Pourquoi le Canada n’a-t-il pas agi plus tôt?

M. Blair : Merci, sénateur. Je signale que nous avons en fait mis en place les premières mesures de dépistage amélioré dans les aéroports internationaux du pays le 22 janvier. Nous avons mis en place un processus de dépistage pour tous les voyageurs en provenance de la région de Wuhan, le foyer de contamination en Chine. Nous avons étendu ce processus au début février. Nous adaptons notre intervention en fonction de l’évolution de la situation et conformément aux conseils de l’Organisation mondiale de la santé et des très compétents responsables de la santé publique du Canada. Nous prenons les mesures voulues à mesure qu’elles s’imposent.

(1310)

Le sénateur Cotter : Je voulais poser une question à la ministre Hajdu au nom de ma collègue la sénatrice Boyer, mais votre réponse à la question de la sénatrice Moodie concernant les travailleurs de première ligne du domaine de la santé était si complète, tout comme votre réponse à une question que je n’avais même pas posée dans mon préambule, que j’aimerais saisir l’occasion pour poser une question au ministre Blair au nom de ma collègue la sénatrice Pate et moi-même. C’est en quelque sorte le revers de la médaille par rapport à votre réponse à la question du sénateur Boisvenu au sujet de la situation dans les prisons canadiennes.

De nombreux professionnels de la santé travaillant dans les prisons canadiennes expriment des préoccupations quant aux risques pour les populations de détenus. Notre angle d’attaque à l’égard du virus consiste à chercher à protéger les personnes vulnérables, en particulier celles qui cohabitent à l’étroit. Monsieur le ministre Blair, beaucoup de personnes sont condamnées à servir une peine d’emprisonnement pour un comportement antisocial. Toutefois, ces personnes n’ont pas été condamnées à risquer de contracter une maladie grave, voire mortelle. À mon avis, ces personnes représentent l’une de nos populations les plus vulnérables. Beaucoup ont également un état de santé qui fait d’elles des personnes à risque.

Dans une certaine mesure, vous avez manifesté l’intérêt de nouer le dialogue avec la Commission des libérations conditionnelles, entre autres. Vous, ainsi que vos homologues provinciaux, disposez d’une série d’outils pour vous aider à gérer de telles circonstances. La libération conditionnelle en est une; la prérogative royale de clémence en est une autre; et la libération anticipée des prisonniers en est une troisième. Voilà des stratégies qui permettent de traiter les cas de prisonniers qui sont renvoyés en détention préventive et qui sont particulièrement vulnérables parce qu’ils ne sont pas réellement coupables d’une infraction dans ces circonstances.

J’aimerais savoir sur quoi portaient les discussions que vous avez eues avec vos homologues et les mesures qui ont été mises en œuvre pour réduire le nombre de détenus dans les prisons et les centres correctionnels fédéraux. J’aimerais aussi savoir si vous avez des statistiques concernant les résultats obtenus jusqu’à présent.

M. Blair : Malheureusement non, monsieur le sénateur, je n’en ai pas, mais je peux vous parler de certaines des mesures que nous avons prises.

J’ai eu une réunion avec les responsables du Service correctionnel et de la Commission des libérations conditionnelles hier. Je leur ai demandé de réfléchir à toutes les solutions possibles et à tous les pouvoirs qui sont à leur disposition pour mettre en place les mesures appropriées afin de réduire le nombre de personnes se trouvant dans cette situation précaire dans nos prisons.

Je peux aussi vous dire que nous avons eu des discussions avec tous nos homologues provinciaux et territoriaux à propos des populations en détention préventive. Le déplacement des détenus d’un établissement à un autre pose un risque particulier parce que c’est souvent ainsi que la maladie se propage.

Nos établissements correctionnels fédéraux ont des procédures très rigoureuses en matière de confinement cellulaire dans ces cas-là. Par exemple, l’Établissement de Bowden est actuellement en confinement cellulaire partiel à cause de la grippe. Des tests y ont été effectués et il ne s’agit pas de la COVID-19. Par contre, il y a des cas de grippe dans ces établissements. Des protocoles ont été mis en place pour traiter ces personnes.

Je tiens à vous assurer que nous sommes conscients de la vulnérabilité de cette population. Des mesures ont été prises au sein même des établissements pour réduire la probabilité d’apparition de la maladie et pour protéger la population carcérale et les personnes qui travaillent avec elle, dans ces établissements.

Par ailleurs, nous avons aussi des plans en place pour le cas où cette maladie entrerait dans ces établissements. À ce stade, nous réfléchissons sérieusement à la manière de tirer les gens de cette situation précaire. Nous travaillons là-dessus.

Le sénateur Cotter : À quel point ces populations de détenus qui ne sont pas à risque ont-elles été réduites?

M. Blair : Comme je l’ai dit, je sais qu’il est question, pour un certain nombre de cas, de faciliter les libérations anticipées. Cela dit, nous étudions ces pouvoirs et la pertinence de ces mesures en ce moment. La sécurité publique demeure une priorité dans la prise de ces décisions, mais nous accordons autant d’importance à la sécurité des personnes dans le système carcéral. Nous prendrons les mesures nécessaires et nous ferons tout en notre pouvoir pour assurer leur sécurité.

Le sénateur Smith : Je souhaite la bienvenue aux ministres et à la Dre Tam. La sénatrice Marshall de Terre-Neuve, qui ne peut pas être ici aujourd’hui, m’a demandé de poser la question suivante en son nom.

De nombreux articles ont souligné l’arriéré des tests de dépistage de la COVID-19. Il y a aussi des inquiétudes, comme nous l’avons soulevé, au sujet des trousses de dépistage et du manque de personnel qui est en mesure de faire passer les tests, de les interpréter et de communiquer les résultats des patients.

En réduisant temporairement le fardeau réglementaire associé aux tests diagnostiques, les scientifiques qui ne travaillent pas dans le système de santé publique pourraient mettre à contribution leurs compétences et leurs autres ressources, sous la supervision du personnel de la santé publique.

Madame la ministre, le gouvernement a-t-il envisagé la possibilité d’élargir temporairement le cadre des tests de dépistage de la COVID-19 pour permettre aux scientifiques à l’extérieur du système de santé publique de mettre à contribution leurs ressources?

Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénateur. Je répondrai d’abord à votre dernière question, puis je demanderai à la Dre Tam de parler un peu de la stratégie de dépistage. Bien sûr, il y a de nombreux articles, ainsi que de nombreux épidémiologistes et virologistes de salon, ces jours-ci, et il serait intéressant d’entendre ce qu’a à dire la Dre Tam sur la stratégie de dépistage du Canada.

Je dirai que, oui, nous sommes parvenus à supprimer les obstacles réglementaires à l’acquisition de nouvelles trousses de dépistage novatrices, accélérant ainsi le processus. En fait, Santé Canada travaille avec des fabricants pour mettre sur le marché des tests commerciaux de diagnostic. Le 13 mars, Santé Canada a reçu deux demandes de tests de diagnostic, l’une de Roche Diagnostics, et l’autre, de Thermo Fisher Scientific. Ces demandes ont fait l’objet d’un examen accéléré, et les professionnels de la santé peuvent maintenant accéder à ces tests par l’entremise de notre Programme d’accès spécial. Nous travaillons avec diverses autres compagnies pour ce faire, ainsi que pour accroître notre capacité d’utiliser des trousses de dépistage provenant de diverses sources.

Si nous avons le temps, je pense qu’il serait approprié de donner la parole à la Dre Tam pour qu’elle parle de la stratégie et de la capacité de dépistage du Canada.

Dre Tam : Je crois que ces capacités augmentent presque quotidiennement. Jusqu’à aujourd’hui, plus de 142 000 personnes ont subi un test, et ce nombre continue d’augmenter. Bien des gens se demandent si c’est suffisant et pourquoi on ne peut pas faire comme en Corée du Sud. Or, le Canada est un pays qui, par rapport au nombre d’habitants, effectue plus de tests que bien d’autres pays. Par rapport au nombre d’habitants, le Canada se classe probablement au troisième rang au chapitre du nombre de tests effectués, juste derrière quelques pays qui, en toute franchise, sont dans des circonstances différentes. L’Italie devance le Canada de peu, mais sa situation est très grave. Quant à la Corée du Sud, comme elle a dû faire face à une grave épidémie, elle a effectué plus de tests. Au Canada, on effectue des tests depuis que l’on a appris l’existence de l’épidémie, et on s’est procuré la technologie nécessaire très rapidement.

L’une des forces du système canadien, c’est que les activités de dépistage ne se font plus seulement au laboratoire de Winnipeg, mais aussi dans les laboratoires provinciaux. Nous espérons qu’une révision rapide de la réglementation nous permettra de décentraliser davantage les activités afin de faciliter l’accès à ces tests. Le laboratoire de Winnipeg contribue au contrôle de la qualité. Il faut que ce test permette de détecter efficacement le virus.

Nous prenons ces mesures tout en nous efforçant d’obtenir plus de matériel comme des écouvillons et des réactifs. Nous faisons tout cela actuellement.

Je collabore aussi avec les médecins-hygiénistes en chef et les directeurs des laboratoires de santé publique pour l’élaboration des lignes directrices. Notre but, c’est de tester les bonnes personnes au bon endroit et au bon moment. On ne veut pas gaspiller les ressources des laboratoires en testant des personnes qui n’en ont peut-être pas besoin. Les détenus et le personnel des établissements correctionnels font partie des priorités. Les travailleurs de la santé et les établissements de soins prolongés aussi. Il faut absolument tester tous ces gens, qu’ils aient des antécédents de voyage ou non, en utilisant nos méthodes de tests communautaires.

Tout cela est en cours actuellement, et notre stratégie évolue constamment. Le monde entier s’efforce de composer avec la multiplication des cas, et je dirais que le Canada compte parmi ceux qui y mettent le plus d’ardeur.

[Français]

Le sénateur Cormier : Monsieur et madame les ministres, je vous remercie d’être parmi nous.

[Traduction]

Mes questions s’adressaient au ministre des Finances, mais j’aimerais vous les poser puisque, comme nous le savons, le secteur des arts et de la culture est essentiel au maintien de communautés saines et sûres.

(1320)

Les personnes travaillant dans ce secteur sont durement touchées par cette pandémie, qui a entraîné la fermeture de toutes les installations. L’industrie culturelle dépend essentiellement des travailleurs autonomes, des employés contractuels et des pigistes, dont le travail est souvent sporadique ou axé sur des projets dans des organismes sans but lucratif.

Étant donné les critères d’admissibilité aux paiements de soutien du revenu énoncés dans la partie 2 du projet de loi que nous venons d’adopter, pouvez-vous confirmer si ces travailleurs, qui sont particulièrement vulnérables, bénéficieront de cette aide? Par ailleurs, étant donné la persistance de la crise, le gouvernement envisage-t-il la mise en place d’un fonds d’urgence pour aider les travailleurs touchés tout au long de l’arrêt des activités artistiques et culturelles au Canada?

M. Blair : Je ferai de mon mieux pour répondre à cette question. On a posé une question semblable au ministre des Finances, hier soir. Il a dit que les particuliers qui ont gagné 5 000 $ au cours de la dernière année et qui n’ont plus de revenus en raison de cette maladie — soit parce qu’ils sont tombés malades ou parce qu’ils ont été mis à pied — seraient admissibles au soutien. Je suis convaincu que les personnes qui travaillent dans les secteurs canadiens des arts et des activités culturelles recevront du soutien. Nous sommes conscients que les concerts ont été annulés et que les théâtres et les galeries d’art sont fermés. Il est très difficile pour ces personnes, qui jouent un rôle essentiel dans notre société, de continuer à gagner leur vie à cause de cette maladie. Elles seront admissibles au soutien.

Le sénateur Cormier : Je suis particulièrement préoccupé par le critère de 14 jours dans le projet de loi, selon lequel on ne doit pas gagner d’argent pendant 14 jours consécutifs. Nous savons que ce n’est pas de cette façon que fonctionnent les choses dans le secteur culturel, alors c’est une de mes préoccupations.

M. Blair : Je connais de nombreuses personnes du secteur de la culture et je sais que leur travail revêt un caractère sporadique. Je porterai cette question à l’attention du ministre des Finances et je m’engage à avoir cette discussion. Nous savons que de nombreux Canadiens se retrouveront dans cette situation difficile. Selon moi, il y a de l’aide pour eux : il faut juste nous assurer qu’elle est facilement accessible.

Le sénateur Cormier : Merci. Pouvez-vous confirmer que les organismes à but lucratif et sans but lucratif qui composent l’industrie culturelle canadienne seront admissibles aux subventions salariales temporaires prévues dans la partie 1 du projet de loi? De plus, envisagez-vous un soutien à long terme pour ces organismes?

M. Blair : Vous me pardonnerez, monsieur le sénateur, mais, je le répète, j’hésite à le confirmer sans d’abord consulter les fonctionnaires du ministère des Finances. Toutefois, je crois que c’est le cas. Nous affirmons que les mesures que nous avons mises en place aujourd’hui sont absolument nécessaires dès maintenant. Nous nous sommes également engagés à continuer à évaluer les besoins des Canadiens, notamment pour le rétablissement de l’économie et du secteur culturel, après cette crise sanitaire. Nous prendrons les mesures nécessaires pour appuyer les institutions et les Canadiens.

Le sénateur Plett : Monsieur le ministre Blair, ma question concerne la GRC. Nous savons que la Division Dépôt à Regina a suspendu les activités de presque toutes les troupes et que les détachements ont apporté des changements aux services offerts directement au public. D’autres changements ont-ils été mis en œuvre au sein de la GRC en réponse à la COVID-19? Quels sont les changements envisagés, le cas échéant?

M. Blair : J’ai justement consulté la commissaire hier, sénateur, afin de connaître la teneur du plan de poursuite des activités de la GRC et les mesures qu’elle prend pour faire face à la crise qui secoue le pays. Comme vous le dites vous-même, la GRC a accéléré les choses afin que certains étudiants puissent obtenir leur diplôme plus tôt que prévu. C’est par nécessité que la Division Dépôt n’a pas eu le choix de suspendre ses activités.

Comme je le disais tout à l’heure, de nombreux agents de la GRC sont déployés aux quatre coins du pays pour mieux répondre aux besoins. Nous sommes conscients que, dans les circonstances actuelles, l’arrivée d’inconnus dans une localité éloignée présente son lot de difficultés. Pour la sécurité des policiers et de la population locale, la GRC adapte ses politiques et ses procédures afin que ses agents demeurent là où ils sont au lieu de faire une rotation comme ils en ont l’habitude.

La GRC a été très rigoureuse dans sa planification. Si vous me permettez, j’ai même une note de service qui porte là-dessus. Si je n’ai pas le temps de vous la transmettre aujourd’hui, nous pourrons en rediscuter plus tard, vous et moi.

On m’a indiqué que les plans de continuité des activités de la GRC sont en place et que cette dernière travaille avec ses partenaires provinciaux afin d’acquérir et de leur fournir du matériel de protection personnelle, par exemple. La GRC donne de la formation à tous ses membres pour leur permettre de faire leur travail en toute sécurité. Comme je l’ai mentionné, la protection des localités isolées et du Nord pose un problème particulier; il faut s’assurer que les employés qui reviennent de l’étranger s’isolent avant de retourner dans la localité où ils travaillent.

La GRC, comme tous les ministères et organismes, a pris différentes mesures. Avant d’envoyer quelqu’un quelque part, elle s’assure que les vérifications nécessaires sont faites afin d’éviter que la personne apporte la maladie dans la collectivité où elle travaille.

Le sénateur Plett : Merci. De par la nature même de leur travail, les agents de la GRC entrent en contact avec la population tous les jours. Lundi, quand je me suis rendu en voiture à l’aéroport, j’ai été chanceux d’être accompagné de mon épouse, car elle me force à respecter la limite de vitesse. Je suis passé devant un contrôle radar effectué non pas par la GRC, mais plutôt par le service de police de Winnipeg. Cependant, des contrôles radar sont aussi possibles sur l’autoroute.

Quelles mesures de protection les agents doivent-ils prendre lorsqu’ils interceptent un véhicule? J’ai trouvé étrange la présence d’un contrôle radar à cet endroit. La GRC réalise-t-elle des opérations de ce genre? Les agents disposent-ils de l’équipement nécessaire dans leur véhicule pour se protéger eux-mêmes et pour protéger les automobilistes qu’ils interceptent?

M. Blair : Les policiers ont reçu des directives et disposent de l’équipement nécessaire pour faire leur travail. Pour être franc, je ne suis pas du tout étonné qu’ils fassent toujours respecter la loi afin de maintenir la sécurité sur les routes. La semaine dernière était la Semaine nationale de la prévention de la conduite avec les facultés affaiblies. Ce genre de travail est crucial et doit se poursuivre. Les policiers ont la responsabilité de nous protéger contre les dangers et les risques, quels qu’ils soient.

Nous sommes conscients de l’importance du travail accompli par les premiers intervenants. Beaucoup d’efforts de planification et de préparation sont déployés pour assurer la sécurité des policiers, des pompiers, des agents des services médicaux d’urgence et des autres travailleurs de première ligne qui risquent de contracter la maladie en raison de leur contact avec la population qu’ils servent. Nous veillons à leur fournir la formation, les informations et l’équipement dont ils ont besoin pour faire leur travail de manière sécuritaire.

Cependant, comme je l’ai dit, la maladie ne s’est pas largement répandue dans ces groupes jusqu’ici. Par conséquent, nous avons axé nos efforts sur les professionnels de la santé en particulier, pour qu’ils disposent de l’aide et de l’équipement nécessaires. Toutefois, comme la maladie se propage rapidement dans la population, les premiers intervenants intensifient leurs efforts et leurs interventions pour faire en sorte d’accomplir leurs tâches de manière sécuritaire.

Le sénateur Plett : En conclusion, permettez-moi d’exprimer notre reconnaissance envers les pompiers, la GRC et le service de police de Winnipeg. Nous sommes de tout cœur avec eux. Merci beaucoup.

Le sénateur Dean : Merci, messieurs les ministres et madame la ministre. Merci, Dre Tam, de votre excellent travail de chef de file. Merci pour la collaboration très étroite entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux.

Il est important de ne pas oublier que, avant 2004, l’Agence de la santé publique du Canada n’existait pas, et le poste d’administrateur en chef de la santé publique non plus. Songeons un peu à ce que serait la situation actuelle sans votre agence et sans administratrice en chef de la santé publique. Prenons un instant pour y réfléchir.

J’ai une brève question à vous poser, madame la ministre Hajdu, sur les mesures prises pour augmenter l’effectif des professionnels de la santé à l’échelle provinciale. Nous mettons beaucoup l’accent sur cette question, et les professionnels de la santé, y compris les infirmiers, assument une énorme responsabilité et font une immense contribution.

Avez-vous l’impression que, à l’échelle provinciale et territoriale, on fait le nécessaire pour aider ces professionnels en planifiant l’augmentation de leur effectif? Voilà ma question.

Mme Hajdu : Merci beaucoup, sénateur. Je voudrais souligner que la raison pour laquelle le Canada peut agir en partenariat comme nous l’avons fait est que nous avons une Agence de la santé publique du Canada et une administratrice en chef de la santé publique. Je ne saurais trop remercier la Dre Tam pour les conseils qu’elle nous a prodigués concernant la gestion de cette question en tant que pays.

Nous savons que les professionnels de la santé, comme l’ont indiqué de nombreux sénateurs, sont tendus et inquiets; au fur et à mesure que la courbe deviendra prononcée, la capacité va évidemment être un problème.

(1330)

Les provinces et les territoires mettent en œuvre de nombreuses mesures pour accélérer le recrutement de professionnels de la santé et élargir les modèles de prestation pour faire face à l’augmentation du nombre de patients. On facilite notamment l’octroi de licences pour permettre aux infirmières et aux médecins retraités ou inactifs d’ailleurs au pays d’être plus rapidement déployés dans les régions les plus touchées. On crée de nouveaux codes de facturation pour les médecins et on supprime les limites de facturation pour permettre une augmentation des soins virtuels, y compris le dépistage virtuel de la COVID-19, celui-ci étant susceptible d’avoir des retombées considérables sur notre capacité à accéder aux médecins au XXIe siècle. Dans la même veine, on pourra élaborer des lignes directrices en matière de soins virtuels pour promouvoir la poursuite des soins de routine tout en maintenant la distanciation sociale, qui protège patients et médecins. Voilà des pistes de solution aux problèmes évoqués par des sénateurs au sujet des personnes qui ont des besoins urgents en matière de soins de santé, mais qui ont du mal à consulter un médecin. Il faudra enfin garantir que les professionnels de la santé puissent pratiquer en utilisant des champs d’activité complets ou élargis, par exemple en permettant aux pharmaciens de renouveler les ordonnances, aux infirmières auxiliaires autorisées de procéder à des prélèvements et aux ambulanciers de procéder au dépistage de la COVID-19.

Nous continuons à collaborer avec les provinces et les territoires afin de trouver des moyens novateurs de trouver les professionnels dont nous avons besoin en première ligne et d’utiliser tous les outils possibles pour accélérer l’accès aux soins.

S’il y a un aspect positif à cette crise, c’est la rapidité avec laquelle les provinces et les territoires se tournent vers l’innovation, notamment en ce qui concerne la prestation des soins de santé. À mon avis, ce sera l’une des conséquences de la COVID-19. Évidemment, nous ne pouvons rien célébrer pour l’instant, mais je pense que lorsque nous regarderons cette génération et cette époque, nous verrons que c’est à ce moment-là que nous avons réellement pris des mesures pour changer la façon dont nous fournissons les soins de santé, de manière à les rendre plus accessibles à tous dans l’ensemble du pays. Je vous remercie, sénateur, de cette question très pertinente.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, le comité siège maintenant depuis 90 minutes. Conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, je suis obligée d’interrompre les délibérations afin que le comité puisse faire rapport au Sénat.

Monsieur et madame les ministres, au nom de tous les sénateurs, je vous remercie de vous être joints à nous aujourd’hui et de nous avoir aidés dans nos travaux relativement à la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19. Je tiens également à remercier les fonctionnaires.

Des voix : Bravo!

La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que je déclare au Sénat que les témoins ont été entendus?

Des voix : D’accord.


[Traduction]

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.

Rapport du comité plénier

Son Honneur la Présidente intérimaire suppléante : Honorables sénateurs, le comité plénier, qui a été autorisé par le Sénat à entendre la ministre de la Santé et le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile relativement à la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19, signale qu’il a entendu lesdits témoins.

[Français]

La sanction royale

Son Honneur le Président suppléant informe le Sénat qu’il a reçu la communication suivante :

RIDEAU HALL

Le 25 mars 2020

Monsieur le Président,

J’ai l’honneur de vous aviser que la très honorable Julie Payette, gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite au projet de loi mentionné à l’annexe de la présente lettre le 25 mars 2020 à 12 h 18.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’assurance de ma haute considération.

La secrétaire de la gouverneure générale et chancelière d’armes,

Assunta Di Lorenzo

L’honorable

Le Président du Sénat

Ottawa

Projet de loi ayant reçu la sanction royale le mercredi 25 mars 2020 :

Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19 (projet de loi C-13, chapitre 5, 2020)

[Traduction]

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Peter Harder (coordonnateur législatif suppléant du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 21 avril 2020, à 14 heures.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président suppléant : Par conséquent, l’honorable sénateur Harder, avec l’appui de l’honorable sénateur Dean... Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Le Sénat

Motion concernant les Comités des finances nationales, des affaires sociales, des sciences et de la technologie et de la régie interne, des budgets et de l’administration—Consentement non accordé

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5g) du Règlement, je propose :

Que, nonobstant l’article 12-2(2) du Règlement, toute pratique habituelle et l’ordre du 25 février 2020, les honorables sénateurs Duncan, Forest, Boehm, Galvez, Klyne, Loffreda, Deacon (Ontario), Mockler, Marshall, Smith, Tannas et Griffin soient nommés à titre de membres du Comité sénatorial permanent des finances nationales, remplaçant les membres actuels, et qu’ils continuent à siéger au comité, sous réserve de toute modification à la composition du comité conformément à l’article 12-5 du Règlement ou par décision du Sénat;

Qu’il soit entendu que le président actuel du Comité sénatorial permanent des finances nationales demeure président, pendant qu’il est toujours membre du comité, jusqu’à décision contraire du comité;

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, toutes les actions entreprises conformément aux parties 3, 8 et 19 de la Loi sur les mesures d’urgence visant la COVID-19, une fois qu’elle reçoit la sanction royale, de même que les dispositions et l’application de ladite loi en général;

Que, nonobstant l’article 12-2(2) du Règlement et toute pratique habituelle, les honorables sénateurs Dasko, Forest-Niesing, Kutcher, Mégie, Moodie, Omidvar, Petitclerc, Manning, Poirier, Seidman, Campbell et Black (Ontario) soient nommés à titre de membres du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, sous réserve de toute modification à la composition du comité conformément à l’article 12-5 du Règlement ou par décision du Sénat;

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner, afin d’en faire rapport, la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19;

Que le gouvernement soit autorisé à déposer auprès du greffier, en suivant le processus établi à l’article 14-1(6) du Règlement, tout rapport ou document ayant trait à sa réponse à la pandémie de COVID-19 et aux actions entreprises conformément à la Loi sur les mesures d’urgence visant la COVID-19, une fois qu’elle reçoit la sanction royale, de même que les dispositions et l’application de ladite loi, y compris tout rapport régulier déposé à la Chambre des communes à ce sujet, et que le Comité sénatorial permanent des finances nationales et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soient autorisés à prendre en considération ces documents aux fins des études conformément au présent ordre;

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou pratique habituelle, et à la lumière des circonstances exceptionnelles de la pandémie actuelle, aux fins des études conformément au présent ordre, le Comité sénatorial permanent des finances nationales et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soient autorisés, durant toute période où le Sénat est ajourné, à se réunir par vidéoconférence ou téléconférence, si cela est techniquement faisable, les sénateurs et les témoins pouvant participer aux réunions par ces moyens, et ces réunions étant réputées à toutes fins des réunions du comité en question et les sénateurs prenant part à ces réunions étant réputés à toutes fins présents à la réunion;

Que, outre les conditions fixées dans le paragraphe précédent, le Comité sénatorial permanent des finances nationales et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soient également autorisés à tenir des réunions par vidéoconférence ou par téléconférence aux fins d’une séance d’organisation conformément à l’article 12-13 du Règlement ou d’élection à la présidence, sous réserve des dispositions du paragraphe précédent du présent ordre;

Que, nonobstant les dispositions du cinquième paragraphe de l’ordre du 11 mars 2020, qui autorise certains membres d’un Sous-comité du programme et de la procédure à donner instruction qu’une réunion d’un comité soit convoquée, dans le cas du Comité sénatorial permanent des finances nationales et du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, les dispositions dudit paragraphe s’appliquent également de façon à permettre aux membres du Sous-comité du programme et de la procédure du comité en question, autre que le président, de donner instruction qu’une réunion du comité en question soit convoquée aux fins de l’étude conformément au présent ordre, et, si une telle demande est faite au cours d’une période où le Sénat est ajourné, la réunion soit convoquée au moment prévu dans ce paragraphe dudit ordre ou, si cela est techniquement faisable, à midi le troisième jour dans la période du lundi au vendredi après réception par le greffier du comité de la lettre, selon la première éventualité;

Que, aux fins des études autorisées par le présent ordre, le Comité sénatorial permanent des finances nationales et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soient autorisés à se réunir même si le Sénat siège à ce moment-là ou est ajourné, l’application des articles 12-18(1) et 12-18(2) du Règlement étant suspendue à cet égard;

Que, nonobstant toute disposition du Règlement ou pratique habituelle, et à la lumière des circonstances exceptionnelles de la pandémie actuelle, le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration soit autorisé, durant toute période où le Sénat est ajourné, à se réunir par vidéoconférence ou téléconférence, si cela est techniquement faisable, les sénateurs et les témoins pouvant participer aux réunions par ces moyens, et ces réunions étant réputées à toutes fins des réunions du comité et les sénateurs prenant part à ces réunions étant réputés à toutes fins présents à la réunion;

Que le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration soit autorisé à se réunir même si le Sénat siège à ce moment-là ou est ajourné, l’application des articles 12-18(1) et 12-18(2) du Règlement étant suspendue à cet égard;

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales et le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soient autorisés, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat tout rapport sur les études autorisées par le présent ordre, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, lesdits rapports étant alors réputés avoir été présentés ou déposés au Sénat.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : Non.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement n’est pas accordé.

(1340)

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, avant de lever la séance, je demanderais au Sénat d’être indulgent.

[Français]

Premièrement, je tiens à remercier tous nos collègues pour leur présence ici aujourd’hui et pour le travail extraordinaire qu’ils font dans cette Chambre, alors que nous vivons des moments très difficiles. Je sais que je parle au nom de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes en souhaitant bonne chance et bon courage à notre gouvernement et à notre administration.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je tiens à remercier chacun de vous d’être venu aujourd’hui en ces circonstances extrêmement difficiles. Je vous remercie du travail extraordinaire que vous avez accompli pour la démocratie et pour l’institution que représente le Sénat. Je sais que tous les Canadiens se joignent à moi pour souhaiter au gouvernement et à la branche exécutive tout le courage et toute la bonne fortune nécessaires pour nous guider au meilleur de leurs connaissances à travers cette crise.

Que Dieu vous bénisse et qu’il bénisse le Canada.

(À 13 h 45, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 21 avril 2020, à 14 heures.)

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