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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 219

Le jeudi 19 septembre 2024
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le jeudi 19 septembre 2024

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Le décès de la très révérende l’honorable Lois M. Wilson, C.C., O.C., O.Ont.

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, avant de commencer nos travaux, j’invite les sénateurs à se lever pour observer une minute de silence à la mémoire de notre ancienne collègue l’honorable Lois M. Wilson, qui nous a quittés le 13 septembre 2024.

J’offre mes plus sincères condoléances à ses proches, au nom de tous les sénateurs et de tous ceux qui sont associés à cette enceinte.

(Les honorables sénateurs observent une minute de silence.)


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L’Association médicale canadienne

La réconciliation avec les peuples autochtones

L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler : Honorables sénateurs, hier, l’Association médicale canadienne a présenté des excuses historiques lors d’une cérémonie sur le territoire traditionnel des peuples Lekwungen, ce qui comprend les nations Songhees, Esquimalt et WSÁNEC.

L’association est revenue sur ses 150 ans d’histoire et sur les échecs systémiques dans le domaine de la santé qui ont eu de profonds impacts sur les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis, des impacts qui sont encore ressentis à ce jour.

Comme l’a exprimé le Dr Evan Adams, médecin des Premières Nations :

La vie des Autochtones au Canada est profondément influencée par le racisme [...] Les médecins doivent poser un regard réaliste sur le rôle du secteur médical dans les préjudices causés aux peuples autochtones tout au long de l’histoire du Canada. En tant que leaders du secteur de la santé, ils doivent prendre les devants et mettre en place des mesures pour réparer les préjudices passés tout en assurant un avenir plus équitable.

Certains se demandent peut-être en quoi consiste le racisme systémique en santé. Le système d’hôpitaux autochtones instillait le racisme systémique et la discrimination dans le système de santé canadien, parce qu’il favorisait la ségrégation et créait une situation où les patients autochtones recevaient des soins de piètre qualité et dangereux.

Des expériences médicales ont été menées sur les enfants autochtones dans les pensionnats, notamment des études sur les effets de la malnutrition et la privation des soins nécessaires. Des adultes autochtones ont été soumis à des expériences médicales sans leur consentement, notamment pour mettre à l’essai des vaccins et des traitements expérimentaux contre la tuberculose. Des Inuits ont été forcés d’aller contre leur gré dans des sanatoriums pour le traitement de la tuberculose loin de leur maison et du soutien de leur communauté sans jamais avoir donné de consentement éclairé. Bon nombre ont perdu la vie et leur dépouille n’a jamais été retournée à leur communauté.

Dans ses excuses, l’association reconnaît que le racisme, les stéréotypes négatifs, les répercussions intergénérationnelles, la méfiance, le manque d’accès adéquat aux services de soins de santé et la sous-représentation des Premières Nations, des Inuits et des Métis au sein de la profession médicale perpétuent encore aujourd’hui les préjudices causés aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis. L’association reconnaît qu’elle n’a pas respecté les normes éthiques et les normes de la profession médicale, s’engage à prendre des mesures pour améliorer la santé des Autochtones et s’engage à favoriser une véritable réconciliation.

Comme l’a dit le premier président autochtone de l’Association médicale canadienne, le Dr Alika Lafontaine, dans ces relations bilatérales, le fardeau du passé doit être partagé :

Il y a certaines parties de l’histoire dont les Autochtones doivent laisser les colons porter le fardeau. Cependant, à bien des égards, il est approprié et nécessaire que nous partagions le poids du changement.

J’ai eu le privilège de rencontrer la sénatrice Yvonne Boyer pour la première fois alors que j’étais présidente de l’Association médicale canadienne et qu’elle commençait à travailler au projet de loi S-250, Loi modifiant le Code criminel (actes de stérilisation).

En conclusion, je m’engage à porter ma part du poids de l’histoire et du changement.

Meegwetch, merci.

Des voix : Bravo!

L’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et le coopération en Europe

L’honorable Peter M. Boehm : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour parler de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ou OSCE, qui s’est tenue à Bucarest, en Roumanie, au début de l’été.

L’OSCE telle qu’on la connaît actuellement a été créée en 1995, 20 ans après le regroupement initial de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, créée à la suite des accords d’Helsinki, alors que la guerre froide était à son apogée.

L’OSCE, qui regroupe 57 pays d’Europe, d’Amérique du Nord et d’Asie centrale, se penche sur des questions comme les mesures d’alerte rapide, la prévention des conflits, la gestion des crises, le soutien à la démocratie — y compris l’observation des élections — et le redressement après un conflit.

Ces questions sont également abordées par l’Assemblée parlementaire, composée de délégués des parlements des pays membres.

De brefs discours sont prononcés et des résolutions sont débattues et font même l’objet d’un vote, fait remarquable au sein des instances parlementaires internationales.

Ce fut un grand honneur pour moi de participer à l’Assemblée de Bucarest, en compagnie de nos collègues du Sénat Judy White et Percy Downe ainsi que de plusieurs députés.

Notre délégation était dirigée par la Dre Hedy Fry, qui a assumé la direction des délégations canadiennes participant à ce genre d’événement pendant de nombreuses années, y compris l’année dernière, à Vancouver.

Nous avons été bien soutenus et conseillés par Andrew Lauzon, de la Direction des affaires internationales et interparlementaires du Parlement, ainsi que par Anne-Marie Therrien-Tremblay et Nicole Sweeney, de la Bibliothèque du Parlement.

Chers collègues, comme vous pouvez vous y attendre, la guerre en Ukraine a dominé notre ordre du jour, notamment en ce qui a trait à des résolutions concernant les sanctions, à la saisie et à la réaffectation d’actifs russes, au soutien aux organisations fournissant des services aux victimes de violence fondée sur le sexe, aux conséquences environnementales de la guerre, aux enfants ukrainiens kidnappés et à la sécurité alimentaire.

Les tensions actuelles entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et d’autres régions du Caucase ont également été abordées, de même que les développements concernant la démocratie naissante en Géorgie. La vulnérabilité de la Moldova a également été abordée.

Ni la Russie ni le Bélarus n’y ont participé, bien qu’elles soient membres de l’Assemblée parlementaire. D’ailleurs, la Russie s’efforce activement d’entraver les travaux de l’OSCE et les activités de l’organisation elle-même.

Nous avons discuté et travaillé avec d’autres parlementaires en espérant que nos délibérations et nos résolutions seraient portées à l’attention des pouvoirs exécutifs de nos gouvernements respectifs et qu’elles contribueraient à leurs délibérations politiques. Chers collègues, voilà ce qu’est une diplomatie parlementaire efficace.

(1410)

Sur une note personnelle, j’ai éprouvé une grande satisfaction à constater le dévouement et la détermination des parlementaires issus des pays qui bâtissent encore leur démocratie, qui se sont libérés du joug de l’autoritarisme et qui sont déterminés à ne pas retourner dans cette situation sombre et répressive.

Dans ma carrière précédente de diplomate, ce fut toujours un grand honneur pour moi de représenter le Canada. C’est toujours un grand honneur de le faire en ma qualité de parlementaire.

Merci.

Des voix : Bravo!

Terre-Neuve-et-Labrador

Le soixante-quinzième anniversaire de son entrée dans la fédération canadienne

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, c’est avec plaisir que je vous présente aujourd’hui le chapitre 80 de « Notre histoire ».

Chers amis, nous célébrons cette année une étape importante dans la création de notre pays : 2024 marque le 75e anniversaire de l’adhésion de Terre-Neuve-et-Labrador au Canada.

Le chemin vers la Confédération a été long et fastidieux. Aujourd’hui encore, certains habitants de notre province affirment que le référendum a été truqué et qu’à ce moment précis de notre histoire nous avons été dupés par le gouvernement britannique. En effet, beaucoup de gens pensaient qu’il était alors de connivence avec la clique d’Ottawa.

Habitée depuis des milliers d’années par les peuples autochtones, la région connue sous le nom de Terre-Neuve-et-Labrador a été brièvement colonisée par les Vikings vers l’an 1000 de notre ère, puis utilisée par les pêcheurs et les baleiniers européens à partir des années 1500. Pendant plusieurs siècles, des colons anglais et français ont établi des villages sur l’ensemble du territoire et se sont disputé les droits de pêche et le contrôle impérial. La France a renoncé à ses prétentions en 1713, mais a conservé certains droits de pêche jusqu’en 1904.

En 1825, en raison du grand nombre de colons anglais et irlandais permanents, la Grande-Bretagne a modifié le statut de Terre-Neuve, qui est passé de station de pêche à colonie officielle. En 1832, la colonie se voit accorder un gouvernement représentatif. Bien qu’une Chambre d’assemblée élue ait été créée, l’essentiel du pouvoir est détenu par le gouverneur nommé par les Britanniques et par ses conseils législatif et exécutif triés sur le volet. En 1855, Terre-Neuve est dotée d’un gouvernement responsable, le pouvoir étant transféré à la Chambre d’assemblée élue.

Puis, en 1869, deux ans après l’union de la province du Canada avec le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, les Terre-Neuviens ont voté pour déterminer s’il fallait ou non se joindre à la Confédération. L’idée a été rejetée catégoriquement.

Après les sacrifices de la Première Guerre mondiale, le Statut de Westminster a déclaré que le Dominion de Terre-Neuve était un pays indépendant au même titre que les autres au sein du Commonwealth britannique.

La Première Guerre mondiale et la construction du chemin de fer ont engendré une dette énorme due principalement aux banques canadiennes. La Grande Dépression a aggravé la situation, si bien qu’en 1933, l’Assemblée législative de Terre-Neuve a voté pour sa dissolution. La Grande-Bretagne a ensuite nommé une Commission de gouvernement composée d’un gouverneur et de six commissaires pour diriger temporairement le dominion.

Le 3 juin 1948, Terre-Neuve a tenu un référendum présentant trois options : le maintien de la Commission de gouvernement, le retour à un gouvernement responsable ou l’adhésion à la Confédération avec le Canada. C’est l’option du maintien de la Commission de gouvernement qui a recueilli le moins de voix. Elle a été écartée du second référendum, qui a lieu le 22 juillet. Les Terre-Neuviens ont voté à une courte majorité, soit 52,3 %, en faveur de l’entrée dans la Confédération. Notre destin était scellé. Terre-Neuve s’est jointe officiellement au Canada le 31 mars 1949.

Le philosophe allemand G. W. F. Hegel a dit que tout ce que l’histoire nous a appris, c’est que nous n’apprenons rien de l’histoire. Toutefois, le grand génie canadien Northrop Frye a affirmé que nous apprenons tout de notre géographie, qu’un peuple est formé par sa géographie et que l’endroit où nous vivons fait de nous ce que nous sommes.

Cela dit, les Terre-Neuviens-et-Labradoriens sont connus dans tout le pays pour leur générosité, leur gentillesse, leur sens de l’humour et leur éthique du travail. Nombreux sont les habitants de mon île qui ont aidé à bâtir ce grand pays et contribué à sa réussite.

Comme j’ai eu l’occasion de parcourir ces terres magnifiques et inhospitalières, je sais à quel point j’ai de la chance de vivre au Canada, mais soyez assurés que je suis avant tout un fier Terre-Neuvien-et-Labradorien. Cela ne devrait surprendre personne quand on sait que ma province est chaleureusement surnommée « le Rocher ».

Merci.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Carsten Sorensen, le mari de l’honorable sénatrice Sorensen, et de leur fils Connor.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le décès de Donald Marshall Jr.

L’honorable Rodger Cuzner : Honorables sénateurs, les Canadiens ont entendu pour la première fois le nom de Donald Marshall fils, ou Junior Marshall, en 1971, alors qu’il n’avait que 18 ans. Originaire de la Première Nation de Membertou, sur l’île du Cap-Breton, il a été accusé et condamné à tort pour le meurtre de Sandy Seale dans le parc Wentworth, à Sydney, en Nouvelle-Écosse.

Tout au long de ses onze années d’incarcération, Junior Marshall a clamé son innocence et, grâce à ses efforts soutenus pour laver son nom, il a finalement été acquitté en mai 1993 par la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse. Son affaire a fait de lui la première victime très médiatisée d’une condamnation injustifiée au Canada, ouvrant ainsi la voie à d’autres personnes comme David Milgaard et Guy Paul Morin. Ces années passées en prison ont eu des conséquences physiques, mentales, émotionnelles et spirituelles sur Junior.

J’ai appris à connaître Junior sur les patinoires du Cap-Breton, alors qu’il suivait les activités de hockey de sa famille. Il adorait se rendre à la patinoire, mais il trouvait la paix et le réconfort en parcourant les forêts du Cap-Breton et en pêchant dans les nombreux lacs et cours d’eau.

En août 1993, après avoir pêché et vendu des anguilles près d’Antigonish, il a été accusé et condamné pour avoir pêché hors saison et sans permis. Ce fut le début d’une bataille de six ans sur les droits issus de traités des Mi’kmaqs, qui, avec l’aide des chefs de la Nouvelle-Écosse et de l’Atlantique, est allée jusqu’à la Cour suprême du Canada.

Dans sa décision historique rendue en 1999, la cour a confirmé que la Couronne avait accordé des droits aux Mi’kmaqs, aux Malécites et aux Pescomodys, dans le cadre des traités de paix et d’amitié signés en 1761.

Cette semaine marque le 25e anniversaire de cette décision à l’incidence très importante. Votre ancien collègue le sénateur Dan Christmas a dit que le sentiment qui régnait ce jour-là dans la foulée de la décision n’était pas tant qu’on virait le monde à l’envers, mais plutôt qu’on le remettait à l’endroit.

Jane McMillan, de l’Université St. Francis Xavier, affirme que l’arrêt Marshall continue de permettre aux Premières Nations du Canada atlantique de renforcer leur capacité et leur autodétermination.

En tant que Néo-Écossais, je suis bien placé pour parler de la croissance et du développement des collectivités des Premières Nations. Tous les Néo-Écossais profitent de leur succès, et nous sommes enrichis par la célébration continue de leur riche histoire et de leur culture.

Aujourd’hui, nous nous souvenons de Donald Marshall fils et apprécions son courage et tout ce qu’il a fait pour son peuple. Que son souvenir soit pour nous tous une source de réconfort.

Des voix : Bravo!

L’été de 2024

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, je souhaite revenir un peu sur le splendide été canadien que nous avons passé avant qu’il ne s’achève. Même si l’été s’achève, je garderai longtemps le souvenir des expériences et des impressions mémorables dont je vais vous parler aujourd’hui.

J’ai fait, avec d’autres collègues, un voyage vraiment transformateur en Alberta, voyage qui était organisé par le sénateur Scott Tannas. J’étais déjà allée en Alberta, mais, cette fois-ci, j’ai pu la découvrir à travers le regard de collègues qui aiment cette province, la comprennent et s’efforcent de l’interpréter pour nous dans cette enceinte. J’en suis revenue avec des impressions très vives faites d’espace infini, de beauté et de grâce, mais aussi de complexité et de défis.

Rien ne se compare vraiment à la première vue enivrante du lac Louise ou au charme de Banff. Mais ce qui est vraiment beau, c’est de parler avec les gens — avec des huttériens, des agriculteurs qui s’inquiètent de l’avenir des prairies herbeuses, et des travailleurs du secteur pétrolier de Fort McMurray, qui se préoccupent pour l’environnement. Lorsque Jasper s’est embrasée par la suite, leur regard m’a amenée à voir les choses un peu différemment.

À Calgary, le sénateur Tannas a organisé une visite au Stampede. L’occasion marquait deux grandes premières pour moi, puisque j’ai profité de cette première expérience au Stampede pour acheter ma première paire de jeans. Ce n’est pas tout à fait mon style, comme vous le savez, mais j’ai été ravie de voir des cowboys me saluer de leur chapeau et me dire « Howdy, ma’am », comme dans les westerns.

À Edmonton, j’ai été époustouflée par l’énorme diversité et dynamisme de votre ville, sénatrice Simons, et notre visite au centre Indigenous Peoples’ Experience, qui est une expérience incontournable pour tous, m’a marquée de manière indélébile.

Je vous remercie, sénatrice Sorensen, d’avoir partagé avec moi votre Banff de carte postale. Je vous remercie aussi du fond du cœur, sénatrice Simons et, bien sûr, sénateur Tannas, ainsi que votre équipe, de cette incroyable visite.

Mon merveilleux été ne s’est toutefois pas arrêté là. Je me suis rendue en Nouvelle-Écosse en tant qu’invitée de la sénatrice Coyle. Bien entendu, ce n’est pas la Nouvelle-Écosse tout court. C’est la glorieuse et inoubliable Nouvelle-Écosse. J’ai visité le Musée canadien de l’immigration du Quai 21, qui m’a fait revivre l’histoire de notre pays dans le contexte de l’immigration. Ensuite, j’ai visité Antigonish, une ville parfaite quoique minuscule, où j’ai eu une conversation transformationnelle avec Tareq Hadhad, un réfugié qui a transformé sa cuisine en aire de fabrication puis en usine et qui a fait connaître sa marque mondiale Peace by Chocolate dans le monde entier. Merci, sénatrice Coyle.

(1420)

Bref, chers collègues, mon été a été inoubliable. J’espère que le vôtre l’a été aussi.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de John Bernard McNair, le fils de l’honorable sénateur McNair, et de Lisa Marie Auger, sa belle-fille. Ils sont accompagnés de ses petits-enfants, Amelia et John Auger McNair.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Présentation du vingt-sixième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L’honorable Brent Cotter, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 19 septembre 2024

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l’honneur de présenter son

VINGT-SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-291, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence (matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels), a, conformément à l’ordre de renvoi du jeudi 1 juin 2023, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,

BRENT COTTER

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 3025.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cotter, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi sur la Journée de sensibilisation aux maladies héréditaires du sang

Première lecture

L’honorable Jane Cordy dépose le projet de loi S-288, Loi instituant la Journée de sensibilisation aux maladies héréditaires du sang.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Cordy, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

Affaires juridiques et constitutionnelles

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier l’ajout de l’inuktut sur les bulletins de vote fédéraux

L’honorable Brent Cotter : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que conformément à l’article 18.1 de la Loi électorale du Canada, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, un projet pilote qu’Élections Canada souhaite réaliser pour ajouter l’inuktut sur les bulletins de vote fédéraux dans la circonscription du Nunavut;

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer des rapports sur cette étude auprès de la greffière du Sénat si le Sénat ne siège pas, et que les rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les travaux du Sénat

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2021, la période des questions commencera à 16 h 55.

[Traduction]

Dépôt de réponses à des questions inscrites au Feuilleton

Le logement, l’infrastructure et les collectivités—Les plaintes de harcèlement sur le lieu de travail

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 46, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant les plaintes de harcèlement sur le lieu de travail — Infrastructure Canada, la Banque de l’infrastructure du Canada, la Société canadienne d’hypothèques et de logement, les Ponts Jacques Cartier Champlain Inc. et l’Autorité du pont Windsor-Détroit.

Le Bureau du Conseil privé—Le Comité consultatif indépendant sur les nominations au Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 90, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant le Conseil consultatif indépendant sur les nominations au Sénat.

Les finances—La Mise à jour économique et budgétaire de l’automne 2019

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 91, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la Mise à jour économique et budgétaire 2019.

Les finances—L’Enquête sur la population active de Statistique Canada

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 92, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant l’Enquête sur la population active de Statistique Canada — Ministère des Finances Canada.

L’emploi, le développement de la main-d’œuvre et les langues officielles—L’Enquête sur la population active de Statistique Canada

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 92, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant l’Enquête sur la population active de Statistique Canada — Emploi et Développement social Canada.

L’innovation, les sciences et l’industrie—L’Enquête sur la population active de Statistique Canada

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 92, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant l’Enquête sur la population active de Statistique Canada — Innovation, Sciences et Développement économique Canada.

Le Bureau du Conseil privé—L’Enquête sur la population active de Statistique Canada

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 92, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant l’Enquête sur la population active de Statistique Canada — Bureau du Conseil privé.

Les finances—Le projet d’expansion de l’oléoduc Trans Mountain

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 95, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant le projet d’expansion de l’oléoduc Trans Mountain.

Les finances—Le projet de loi C-208

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 115, en date du 8 février 2022, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant le projet de loi C-208, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu.

Le Bureau du Conseil privé—Le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2020-2021

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 125, en date du 8 février 2022, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant le Bureau du Conseil privé.

Les finances—La Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 148, en date du 26 avril 2022, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures.

Les finances—Les discussions fédérales-provinciales

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 178, en date du 13 décembre 2022, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant les discussions fédérales-provinciales — Ministère des Finances Canada.

La sécurité publique, les institutions démocratiques et les affaires intergouvernementales—Les discussions fédérales-provinciales

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat)  dépose la réponse à la question no 178, en date du 13 décembre 2022, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant les discussions fédérales-provinciales — Bureau du Conseil privé.


(1430)

ORDRE DU JOUR

Projet de loi concernant la cybersécurité, modifiant la Loi sur les télécommunications et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable John M. McNair propose que le projet de loi C-26, Loi concernant la cybersécurité, modifiant la Loi sur les télécommunications et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que parrain du projet de loi C-26, Loi concernant la cybersécurité, modifiant la Loi sur les télécommunications et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

Chers collègues, ce projet de loi est d’une importance capitale. Les cybermenaces sont devenues omniprésentes dans notre société. Ces dernières années, nous avons assisté à des cyberattaques de plus en plus sophistiquées dans tout le pays. Elles mettent en péril nos infrastructures essentielles et nuisent à la capacité des Canadiens à vaquer à leurs occupations quotidiennes. Il existe de nombreux exemples de cyberattaques, et je voudrais mentionner brièvement quelques-uns d’entre eux.

En mai dernier, une grande chaîne de pharmacies a été la cible d’une attaque par rançongiciel et a dû fermer ses 79 magasins pendant plus d’une semaine. De nombreux Canadiens se sont retrouvés dans la situation difficile de ne pas pouvoir faire exécuter des ordonnances vitales sans avoir été prévenus à l’avance. En outre, les pirates ont divulgué des données sensibles volées à des employés.

Un exemple quelque peu différent est l’attaque par rançongiciel qui a mis hors service les systèmes informatiques de la bibliothèque publique de Toronto en octobre 2023. Voici un extrait d’un article de la CBC sur l’incident :

La bibliothèque publique de Toronto est le réseau de bibliothèques publiques urbaines le plus fréquenté au monde. Les membres ont fait environ 27 millions d’emprunts dans sa collection de 11 millions de documents en 2022 [...]

Toujours selon cet article, en octobre 2023, des cybercriminels ont crypté leurs systèmes informatiques et volé les données d’employés. La bibliothèque n’a pas payé de rançon pour restaurer ses systèmes. Elle a préféré les reconstruire, tout en gardant ses portes ouvertes au public.

La bibliothèque publique de Toronto offre des services essentiels, notamment l’accès à Internet et un havre public gratuit, en plus de prêter chaque jour des livres, des disques compacts et des DVD. Il a fallu quatre mois pour rétablir les services en ligne de la bibliothèque.

Au mois de mars dernier, la Ville de Hamilton, en Ontario, a été victime d’une attaque par rançongiciel qui a paralysé plusieurs de ses services en ligne. Les services essentiels de Hamilton n’ont pas été touchés, mais les cyberattaques contre les réseaux municipaux peuvent entraîner des situations dangereuses si elles visent les systèmes d’urgence, d’approvisionnement en eau ou de traitement des eaux usées.

En 2020, le réseau informatique de la Ville de Saint John a fait l’objet d’une attaque par rançongiciel qui a forcé l’administration à se déconnecter du reste du monde. Je vivais et travaillais à Saint John à l’époque et je ne me souviens que trop bien de cette attaque. Le 13 novembre, des pirates informatiques ont lancé une attaque par rançongiciel contre les systèmes informatiques de la Ville de Saint John. Lorsqu’elle l’a découverte, la Ville a immédiatement coupé ses liens informatiques avec le monde extérieur pour empêcher la propagation du virus et a mis en place un site Web temporaire pour assurer la reprise rapide des services municipaux. Des processus informatiques de rechange ont dû être conçus rapidement, ce que Saint John a réussi à faire avec brio.

Une analyse réalisée par une société d’experts indépendants a permis de déterminer qu’aucun renseignement d’identification, notamment les numéros de carte de crédit, les coordonnées bancaires et les numéros d’assurance sociale, n’avait été divulgué ou volé. De plus, malgré la cyberattaque, presque tous les services municipaux ont été maintenus avec un minimum de perturbations. Cela comprend les interventions d’urgence, la collecte d’ordures, l’approvisionnement en eau, le traitement des eaux usées, la réfection des routes, la gestion des tempêtes hivernales, les transports en commun et les réunions du conseil municipal. La Ville a rapidement établi que la réparation des systèmes existants n’était pas une option envisageable vu le degré de pénétration du virus. Au lieu de cela, elle a décidé de suivre l’exemple de la bibliothèque publique de Toronto et de mettre en place un réseau entièrement nouveau. Ce nouveau réseau leur permettrait de tirer profit des dernières innovations en matière de cybersécurité et de conception de réseau, tout en éliminant le risque de voir subsister des vestiges du virus.

Cet incident a contraint Saint John à améliorer ses cyberdéfenses. Le directeur municipal a souligné, dans une mise à jour adressée au conseil municipal, qu’il ne s’agit plus de savoir si une société ou une entité sera attaquée, mais plutôt quand. Il a ajouté :

[...] il ne fait aucun doute que les institutions avec lesquelles quiconque interagit seront victime de violations et que, parfois, vous ne le saurez même pas [...]

C’est pourquoi la Ville a partagé les leçons qu’elle a tirées de son expérience avec de nombreuses organisations des secteurs public et privé, ainsi qu’avec des intéressés aux niveaux provincial et fédéral.

Il y a également une augmentation de l’activité et des cyberattaques à l’échelon provincial. Plus tôt cette année, de nombreux incidents de cybersécurité ont été signalés sur les réseaux du gouvernement de la Colombie-Britannique. L’an dernier, Hydro-Québec a été victime d’un cyberincident sur son site Web. En 2021, le système de santé de Terre-Neuve-et-Labrador a été ciblé, ce qui a entraîné une importante panne de ses systèmes de TI.

Au niveau fédéral, un certain nombre de ministères ont également été ciblés au cours des derniers mois. Je suis sûr que nous nous souvenons tous de l’annonce faite par le gouvernement du Canada en 2020 nous apprenant que des auteurs de cyberattaques avaient eu accès à des renseignements personnels détenus par l’Agence du revenu du Canada et Emploi et Développement social Canada qu’ils avaient modifiés pour en retirer des gains financiers. Cette attaque a compromis les renseignements personnels sensibles de dizaines de milliers de Canadiens.

Chers collègues, de nos jours, il est essentiel pour tous les Canadiens d’être branchés en ligne afin de rester en contact avec leurs proches, de faire des affaires, de payer des factures et d’accéder aux services dont ils ont besoin. Aujourd’hui plus que jamais, les Canadiens comptent sur Internet dans leur vie quotidienne. Nos infrastructures essentielles sont de plus en plus interconnectées, interdépendantes et intégrées aux cybersystèmes, et les cyberattaques comme celles que je viens de mentionner ont de vastes répercussions sur notre pays.

Ces exemples de cyberattaques indiquent clairement que tous les secteurs sont menacés : nos banques, nos services publics, nos entreprises et nos gouvernements. En termes clairs, on parle de toutes nos infrastructures essentielles. Malheureusement, le nombre et le degré de complexité des attaques sont de plus en plus élevés. Le Centre de la sécurité des télécommunications a déclaré que la cybercriminalité est désormais la menace la plus répandue et la plus omniprésente pour la population et les entreprises au Canada.

Au début de l’année, le Centre canadien pour la cybersécurité, qui relève du Centre de la sécurité des télécommunications, s’est joint aux partenaires opérationnels du Groupe des cinq pour signaler que des cybercriminels parrainés par des États étrangers cherchent à se préparer à lancer des cyberattaques perturbatrices ou destructrices contre les infrastructures essentielles des pays membres. Les cyberactivités malveillantes telles que l’espionnage, le vol de données et de propriété intellectuelle et le sabotage constituent des menaces majeures pour la sécurité nationale et la stabilité économique du Canada. Comme ce fut le cas pour la Ville de Saint John, la question n’est plus de savoir « si » nos systèmes seront attaqués, mais bien « quand » les attaques auront lieu.

Permettez-moi d’être clair au sujet des lacunes stratégiques que le projet de loi C- 26 est censé combler. Tout d’abord, les ministres de certains secteurs d’infrastructures essentielles, comme ceux qui s’occupent des secteurs de l’énergie, des finances et des transports, ont tous un mandat en matière de sécurité. Ce n’est pas le cas du secteur des télécommunications, qui est manifestement vulnérable aux cyberattaques. Il convient de combler cette lacune. Deuxièmement, lors des consultations publiques de 2016 qui ont abouti à la stratégie nationale de cybersécurité de 2018, l’industrie a souligné la nécessité d’une réglementation en matière de cybersécurité, un espace qui n’a pratiquement pas été réglementé. Troisièmement, le gouvernement ne dispose pas actuellement d’une autorité juridique claire et explicite lui permettant d’imposer des mesures pour lutter contre les menaces ou pour corriger les vulnérabilités en matière de cybersécurité. Cela entrave considérablement notre capacité à riposter. Quatrièmement, les organisations ne sont pas tenues de signaler qu’elles ont été la cible d’une cyberattaque. Rendre les signalements obligatoires viendrait améliorer l’échange d’informations sur les cybermenaces entre le secteur privé et le gouvernement du Canada, dans l’intérêt de l’industrie et des gouvernements.

Le projet de loi C-26 comprend deux initiatives complémentaires qui aideront à doter les gouvernements et l’industrie des outils dont ils ont besoin pour répondre aux cybermenaces. La partie 1 modifie la Loi sur les télécommunications afin d’ajouter la promotion de la sécurité aux objectifs de la loi et de créer de nouveaux pouvoirs qui pourraient servir à protéger le système de télécommunications du Canada contre les menaces posées par les fournisseurs à haut risque. Cela permettra au secteur des télécommunications de s’aligner sur les autres secteurs d’infrastructure essentiels que sont l’énergie, les finances et les transports.

Les modifications apportées à la Loi sur les télécommunications autoriseront le gouverneur en conseil et le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie à ordonner, au moyen de directives de cybersécurité, aux fournisseurs de services de télécommunication de faire ou de s’abstenir de faire toute chose nécessaire pour sécuriser le système canadien de télécommunication.

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La partie 1 établit également un régime de sanctions administratives pécuniaires afin de favoriser le respect des décrets, arrêtés et règlements pris par le gouverneur en conseil et le ministre de l’Industrie pour sécuriser le système canadien de télécommunication. Surtout, elle prévoit des règles relatives au contrôle judiciaire de ces textes.

Le projet de loi permettra au gouvernement, si nécessaire, d’interdire aux fournisseurs canadiens de services de télécommunications d’utiliser des produits ou des services provenant de fournisseurs à haut risque, afin que ces risques ne soient pas transmis aux utilisateurs. Par exemple, si le projet de loi est adopté, il donnera au gouvernement la capacité d’interdire les produits ou les services provenant de fournisseurs chinois comme Huawei et ZTE.

En vertu de ces nouveaux pouvoirs, les fournisseurs de services de télécommunications pourraient se voir interdire l’utilisation de tous les produits et services provenant des fournisseurs désignés ou être obligés de retirer ces produits et services.

La partie 1 permet également au gouvernement de prendre des mesures de sécurité, tout comme d’autres organismes de réglementation fédéraux peuvent le faire dans leurs secteurs d’infrastructures essentielles respectifs.

La partie 2 du projet de loi C-26 édicte la nouvelle Loi sur la protection des cybersystèmes essentiels. Cette loi prévoit un cadre réglementaire intersectoriel qui oblige les opérateurs désignés dans les secteurs sous réglementation fédérale de la finance, des télécommunications, de l’énergie et des transports à protéger leurs cybersystèmes essentiels.

Entre autres choses, la partie 2 autorise expressément le gouverneur en conseil à désigner des services ou systèmes critiques; elle autorise le gouverneur en conseil à établir des catégories d’exploitants relativement aux services ou aux systèmes critiques; elle exige notamment que les exploitants désignés, entre autres, établissent et mettent en œuvre des programmes de cybersécurité, atténuent les risques associés aux chaînes d’approvisionnement et aux tiers, signalent les incidents de cybersécurité et, surtout, se conforment aux directives de cybersécurité. Elle prévoit aussi l’échange de renseignements entre les parties concernées. De plus, elle autorise le contrôle d’application des obligations prévues par la loi et prévoit des conséquences en cas de non-conformité.

La partie 2 apporte également des modifications corrélatives à certaines lois.

À l’heure actuelle, le moins que l’on puisse dire, c’est que le signalement d’incidents par les organisations manque de cohérence. C’est pour cette raison que le gouvernement fédéral n’a pas une idée claire de l’ampleur et de l’étendue des cyberattaques contre des infrastructures essentielles. Les Canadiens font confiance aux exploitants d’infrastructures essentielles et ils comptent sur eux pour leur offrir des services et protéger leurs données. Le signalement obligatoire des cyberincidents vise à aider les exploitants à assumer cette responsabilité.

Le gouvernement pourra fournir, en temps opportun, des renseignements sur les cybermenaces et des conseils sur l’atténuation des risques afin d’aider les exploitants à sécuriser leurs systèmes. La détection d’un risque par une organisation servira à la mise en place de mesures de prévention par une autre organisation.

De plus, cette partie du projet de loi C-26 vise également à servir de modèle aux partenaires provinciaux, territoriaux et municipaux afin qu’ils protègent les cyberinfrastructures essentielles des secteurs relevant de leurs compétences respectives. Idéalement, on pourrait ainsi éviter d’avoir un système disparate et harmoniser les programmes en cybersécurité d’un partenaire du gouvernement à l’autre.

Le projet de loi C-26 bénéficiait de l’appui de tous les partis à l’autre endroit, mais des intervenants ont tout de même suggéré quelques amendements afin de le renforcer. Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes a donc adopté un certain nombre d’amendements. Il s’agit notamment d’un amendement ajoutant une norme de caractère raisonnable pour l’émission des décrets ou arrêtés et des directives en matière de cybersécurité; d’un amendement mettant en œuvre des dispositions d’examen afin de garantir que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement puissent examiner les décrets, arrêtés et directives du gouvernement; d’un amendement exigeant que le ministre de l’Industrie et le ministre de la Sécurité publique déposent un rapport annuel sur les décrets, arrêtés et directives émis; d’un amendement faisant explicitement référence aux dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels; d’un amendement fixant à 72 heures le délai maximal dont disposent les exploitants d’infrastructures essentielles concernés pour signaler une attaque au Centre canadien pour la cybersécurité — ce qui, soit dit en passant, est conforme aux normes de notification américaines; et d’un amendement indiquant que le gouvernement fédéral s’engage à collaborer avec les provinces et les territoires. Par ailleurs, un amendement précise que les entreprises qui prennent toutes les mesures raisonnables pour protéger leurs cybersystèmes essentiels peuvent invoquer cette défense dans le cadre d’une procédure. Enfin, un amendement a mis à jour les dispositions relatives au partage d’informations afin de garantir que toutes les informations confidentielles fournies au gouvernement par les exploitants d’infrastructures essentielles réglementés resteront confidentielles.

Je suis d’avis que les amendements adoptés répondent de manière appropriée aux préoccupations soulevées sur la nécessité d’un contrôle et d’une transparence accrus, ainsi que sur la nécessité de protéger la vie privée.

Le projet de loi C-26 a été rédigé de manière à respecter la vie privée et les libertés civiles, tout en tenant compte de la nécessité d’assurer la sécurité des Canadiens ainsi que la sécurité nationale. Bien que la vie privée soit protégée par un certain nombre d’instruments constitutionnels et législatifs, les amendements apportés au projet de loi garantissent encore davantage que les renseignements personnels et la vie privée seraient protégés conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Le projet de loi précise également que les renseignements confidentiels doivent continuer à être traités comme tels par quiconque les reçoit lorsqu’il est nécessaire de les communiquer. En outre, les amendements adoptés renforceront la transparence et, ce faisant, permettront aux Canadiens de demander des comptes aux autorités.

Honorables sénateurs, de l’espionnage électronique aux rançongiciels, les menaces que font peser sur les Canadiens les cyberactivités malveillantes, y compris les cyberattaques, sont plus grandes que jamais. Le projet de loi C-26 aidera les exploitants d’infrastructures essentielles à mieux se préparer aux cyberattaques, à les prévenir et à y réagir. Alors que les réseaux 5G continuent d’être installés au Canada, le gouvernement s’est engagé à profiter des possibilités qu’ils offrent tout en protégeant les Canadiens des risques qui les accompagnent. Cela implique de prendre des mesures importantes pour protéger les cybersystèmes et les infrastructures dont tout le monde dépend.

Modifier la Loi sur les télécommunications afin d’ajouter la sécurité aux objectifs de la politique alignera les télécommunications sur d’autres secteurs essentiels de notre économie. Les modifications que l’on propose d’apporter à la Loi sur les télécommunications permettront au gouvernement d’exiger la prise des mesures nécessaires pour sécuriser le système de télécommunications du Canada, y compris en interdisant aux entreprises canadiennes d’utiliser des produits et des services provenant de fournisseurs à haut risque.

En outre, la nouvelle Loi sur la protection des cybersystèmes essentiels sera un grand pas en avant pour protéger les infrastructures essentielles du Canada. Elle intensifiera les échanges de renseignements entre l’industrie et le gouvernement en exigeant que les exploitants désignés des infrastructures essentielles signalent les incidents touchant la cybersécurité au Centre de la sécurité des télécommunications, au Centre canadien pour la cybersécurité et aux organismes réglementaires de l’industrie.

Avec une meilleure connaissance des menaces en ligne dans les secteurs des finances, des télécommunications, de l’énergie et du transport, des secteurs essentiels sous réglementation fédérale, le gouvernement sera mieux en mesure de prévenir les exploitants de l’existence possible de menaces pour que ceux-ci puissent prendre immédiatement des mesures afin de protéger leurs systèmes et de protéger les Canadiens.

Au XXIe siècle, la cybersécurité est une composante essentielle de la sécurité nationale. Il incombe au gouvernement de protéger les Canadiens contre les cyberattaques qui s’intensifient.

Nous sommes tous conscients que le retour à la normale après un incident de cybersécurité demande à la fois beaucoup d’argent et beaucoup de temps. Par conséquent, l’amélioration de la cybersécurité est un enjeu qui touche autant les intérêts du gouvernement que ceux du secteur privé. Néanmoins, un cadre de sanctions administratives pécuniaires a été ajouté et des dispositions relatives aux infractions sont établies dans les deux parties du projet de loi afin d’assurer le respect des arrêtés, des décrets et des règlements. Des amendes et des peines d’emprisonnement sont prévues pour les infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et ou par voie de mise en accusation.

Par exemple, la partie 1 créerait une infraction pour le non‑respect d’un règlement, d’un décret du gouverneur en conseil ou d’un arrêté du ministre de l’Industrie. La partie 2 du projet de loi créerait un certain nombre d’infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et d’infractions hybrides pour la violation de certaines dispositions de la loi. Ces infractions comprennent le non-respect de directives de cybersécurité, la communication d’information au sujet de l’existence ou du contenu d’une directive de cybersécurité et la communication de renseignements confidentiels dans des circonstances où la communication n’est pas permise par la loi. De plus, une organisation qui ne produit pas les rapports exigés ou qui n’établit pas de programme de cybersécurité s’exposera à des pénalités.

Chers collègues, disons-le franchement, tant que ce projet de loi n’est pas adopté, le Canada demeure une cible facile pour les cybercriminels. Nos alliés du Groupe des cinq sont déjà à des années-lumière en avance sur nous en matière de renforcement de la cybersécurité. Nous devons les rattraper. En résumé, la partie 1 du projet de loi C-26 garantit que le secteur des télécommunications peut être réglementé afin de sécuriser le système de télécommunications canadien, et que le gouvernement peut agir rapidement dans un secteur où les millisecondes peuvent faire la différence entre la sécurité et le risque.

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La partie 2 établit une approche intersectorielle de la cybersécurité dans quatre secteurs réglementés par le gouvernement fédéral.

En bref, ce projet de loi constituera la base de la sécurisation des infrastructures essentielles du Canada contre les cybermenaces en évolution rapide, tout en stimulant la croissance et l’innovation pour soutenir notre économie.

Soyons clairs : il ne manque pas d’acteurs malveillants qui, dans un but stratégique, financier ou criminel, cherchent à exploiter les vulnérabilités de nos cybersystèmes.

Aujourd’hui, nos cybersystèmes sont naturellement complexes et de plus en plus interdépendants avec d’autres infrastructures essentielles. Par conséquent, les failles de sécurité ont une grande portée. Les incidents tels que ceux que j’ai mentionnés précédemment ont des conséquences graves, durables et alarmantes pour les entités concernées, mais surtout pour les personnes dont la vie a été perturbée.

Une approche intersectorielle et systématique de la cybersécurité est nécessaire pour faire face à ce problème complexe. Je pense que ce projet de loi présente un bon équilibre.

Le projet de loi C-26 permettra au gouvernement de prendre des mesures contre les menaces qui pèsent sur la sécurité de nos secteurs des télécommunications, des transports, des finances et de l’énergie, et de veiller à ce que le Canada reste sûr, concurrentiel et bien connecté, tout en harmonisant nos pratiques avec celles de nos partenaires du Groupe des cinq.

Une fois de plus, chers collègues, la question n’est pas de savoir « si », mais « quand » nous prendrons une telle mesure.

J’espère que ce projet de loi sera adopté sans délai après un examen minutieux par le comité, et j’espère que mes collègues le soutiendront.

Merci, meegwetch.

L’honorable Colin Deacon : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur McNair de son discours convaincant à l’étape de la deuxième lecture de ce projet de loi. En effet, les acteurs malveillants sont nombreux et leurs méthodes sont plus sophistiquées que celles de la plupart des acteurs bienveillants. Vous avez présenté sous un jour favorable l’idée d’un ensemble continu et uniforme de systèmes normalisés pour assurer la cybersécurité et la sécurité nationale.

En particulier, en cas d’atteinte, l’exploitant est tenu de signaler le cyberincident au Centre de la sécurité des télécommunications dans les 72 heures, ce qui est une bonne chose. L’information concernant les atteintes à la cybersécurité serait ainsi toujours reçue par la même entité. En comparaison — et j’arrive ensuite à ma question —, en cas de communication non autorisée d’information, le projet de loi C-65 oblige les partis politiques à informer la personne concernée, non pas dans un délai précis, mais dès que possible, et ne les oblige aucunement à en aviser le Centre de la sécurité des télécommunications Canada.

Que pensez de cela? Avez-vous eu l’occasion de demander au ministre de la Sécurité, qui parraine les deux projets de loi, pourquoi les partis politiques sont traités différemment, alors qu’ils sont en possession d’un volume énorme de renseignements personnels sur tous les citoyens canadiens et sont sans doute la cible d’acteurs étrangers malveillants? Pourquoi cette disposition ne s’applique-t-elle pas à eux également? J’aimerais savoir ce que vous en pensez. Merci.

Le sénateur McNair : Je vous remercie de la question. Je n’ai pas d’information précise à ce sujet. Je n’en ai pas discuté avec le ministre, mais je consulterai les fonctionnaires afin d’obtenir une réponse pour vous.

Le sénateur C. Deacon : Merci.

L’honorable Denise Batters : Honorables sénateurs, je suis la porte-parole pour ce projet de loi, mais j’ai appris que le parrain allait prononcer son discours à peine une heure avant le début de la séance aujourd’hui. Étant donné que je pensais que le discours aurait lieu plus tard, je n’ai pas encore assisté à la séance d’information pour la porte-parole. Je ne suis donc pas aussi préparée que je l’aurais aimé pour poser des questions de fond. C’est un gros projet de loi : il compte 90 pages. J’aurais voulu en savoir plus sur certains aspects du projet de loi parce que j’ai l’impression que c’est une mesure législative importante qui a une vaste portée.

Ma première question, sénateur McNair, est la suivante. Comme vous l’avez décrit dans votre discours, le projet de loi inclut de nombreuses dispositions qui accordent des pouvoirs au gouverneur en conseil, c’est-à-dire au Cabinet. Vous avez dit que la partie 1 lui accorde le pouvoir de faire toute chose nécessaire pour sécuriser le système canadien de télécommunication. C’est le Cabinet qui détient ce pouvoir. La partie 2 autorise le gouverneur en conseil à faire toutes sortes de choses. Le projet de loi accorde de vastes pouvoirs au Cabinet, à l’organe exécutif du gouvernement.

Quel type de mécanisme de surveillance le projet de loi C-26 prévoit-il pour encadrer ces grands pouvoirs dans le domaine de la cybersécurité? Je vois qu’il est question d’un contrôle judiciaire dans le sommaire du projet de loi. Toutefois, comme vous le savez grâce à votre bagage juridique, des limites très importantes restreignent souvent l’application d’un contrôle judiciaire.

Le sénateur McNair : Je vous remercie pour votre question et votre commentaire, madame la sénatrice. Je m’excuse que vous n’ayez pas réalisé que nous allions passer à cette étape aujourd’hui. Je prends également note de vos observations sur les sections relatives au contrôle judiciaire. Il est nécessaire de présenter une demande dans ces cas.

Comme je l’ai indiqué, on peut compter sur l’examen mené par les deux organismes ainsi que sur l’ouverture ou la transparence du rapport annuel que les deux ministres déposeront. Je comprends qu’il est fait mention du gouverneur en conseil, comme vous l’avez dit, mais la loi prévoit des procédures pour soumettre une demande de contrôle judiciaire.

La sénatrice Batters : Je vous remercie. Je vais devoir examiner de plus près les aspects concernant le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement. Vous avez mentionné que cela a été fait à la suite d’amendements proposés par le comité de la Chambre des communes. Je me serais attendue à une surveillance parlementaire encore plus grande à ce sujet. Si c’est le cas, pourriez-vous voir ce qu’il en est et me tenir au courant?

Je passe maintenant à ma deuxième question. Pourriez-vous nous en dire plus sur les infractions criminelles dont une personne pourrait être accusée en vertu de cette loi?

Le sénateur McNair : Je vous remercie de la question. Je vais vous fournir de l’information à ce sujet. Les seuils ou les amendes maximales sont assez élevés, et il en a été question au comité de l’autre endroit, mais il y a une raison de veiller à ce qu’il y ait suffisamment de souplesse pour imposer des amendes adaptées en fonction des circonstances. Je vais obtenir l’information précise et je vous la ferai parvenir.

La sénatrice Batters : Vous n’avez pas l’information maintenant?

Le sénateur McNair : J’ai les dispositions législatives, mais au lieu de prendre le temps de les passer en revue maintenant, je vais fournir ma réponse plus tard.

L’honorable Paula Simons : Honorables sénateurs, je tiens à remercier le sénateur McNair d’avoir présenté ce projet de loi opportun et essentiel. Vous avez piqué ma curiosité lorsque vous avez parlé du pouvoir d’interdire des produits et des services. Vous avez cité Huawei comme exemple potentiel, et je voulais comprendre en quoi consiste l’interdiction des services. Je pense à l’article 15 du projet de loi, car je crois que c’est là que se trouvent les dispositions en question, mais j’aimerais bien comprendre. Cela pourrait-il, en principe, donner à un gouvernement le pouvoir d’interdire un service de médias sociaux comme TikTok, ou est-ce que ces dispositions ne s’appliquent qu’aux services utilisés par des exploitants désignés?

Le sénateur McNair : Je vous remercie de votre question. Je crois comprendre que cela ne s’applique qu’aux opérateurs désignés et pas aux autres exemples que vous avez mentionnés.

La position officielle du gouvernement concernant les services de télécommunications indique clairement qu’il considère certains fournisseurs comme étant à haut risque et qu’il a l’intention d’interdire l’utilisation de certains produits et services de ces fournisseurs.

La sénatrice Simons : Je suis encore un peu perplexe. Cela signifie-t-il qu’une entreprise de télécommunications comme Rogers, Bell ou TELUS ne pourrait pas vendre ou proposer des téléphones Huawei, mais que les gens pourraient les acheter en tant que consommateurs indépendants? Je tiens à préciser les choses, parce que je trouve TikTok problématique. J’ai cessé d’utiliser ce service bien avant que le gouvernement ne donne ces lignes directrices aux fonctionnaires, car j’étais préoccupée par ce que j’avais lu à son sujet. Je veux comprendre de quoi nous parlons exactement quand nous interdisons l’utilisation des services.

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Le sénateur McNair : Je crois qu’il s’agit de services et non de téléphones, comme dans votre exemple. En ce qui concerne les téléphones Huawei, je ne pense pas qu’une décision ait été prise à ce stade-ci. Il s’agit du contexte plus large des services rendus par le fournisseur à haut risque.

L’honorable Pat Duncan : Je vous remercie, sénateur McNair, pour cette présentation détaillée. Je suis heureuse d’avoir l’occasion de poser une question.

Il est question de fournisseurs à haut risque. En existe-t-il actuellement une liste? Je le demande parce que, comme tout le monde — j’en suis sûre — le sait parfaitement tant au Sénat qu’à l’autre endroit, les communications dans le Nord sont particulièrement vulnérables, et, dans certains cas, l’accès à des infrastructures comme Internet est inexistant, ou il y a une vulnérabilité particulière. Quand les réseaux existants de télécommunications tombent en panne, les gens se tournent en masse vers des solutions immédiates. Les technologies évoluent rapidement, et des solutions venant d’autres endroits et d’autres pays sont disponibles.

Existe-t-il, dans un bureau quelque part, une liste des fournisseurs à haut risque? Que se passe-t-il si le mal est fait? Quelles dispositions sont prévues pour les cas où des achats ont déjà été effectués?

Le sénateur McNair : Je vous remercie de votre question, sénatrice Duncan. Je ne suis pas au courant de l’existence d’une liste à ce stade. Je vérifierai auprès des fonctionnaires. Nous avons assisté à une séance d’information technique le premier jour de notre retour et nous leur avons posé cette question.

N’oubliez pas que cela n’inclut que les fournisseurs et exploitants sous réglementation fédérale du système de télécommunications avec lesquels le gouvernement traite à un niveau très élevé. En ce qui concerne les plus petits fournisseurs et exploitants qui ont fait des investissements, le gouvernement en tient compte lorsqu’il s’apprête à donner des instructions en matière de cybersécurité et il peut imposer différentes conditions relatives à l’échéancier. Cependant, en ce qui concerne le matériel qui a déjà été acheté, je crois comprendre que, s’il le juge à haut risque ou à risque, il souhaite qu’il soit retiré graduellement du système, sauf s’il est essentiel qu’il soit retiré immédiatement. Dans votre cas, je suppose que le gouvernement les laisserait utiliser le matériel qui fonctionne comme une solution.

La sénatrice Simons : Si le sénateur McNair accepte de répondre à une autre question, j’aimerais aborder le fait que notre contexte géopolitique est en constante évolution. L’ennemi d’aujourd’hui pourrait être l’allié de demain, et un allié peut devenir bien vite un ennemi juré.

Je suis curieuse de savoir comment nous allons en tenir compte — je suis certaine que le projet de loi l’explique, et je m’excuse de ne pas l’avoir examiné plus en profondeur. Quels sont les critères pour déterminer ce qui constitue un risque élevé?

À titre d’exemple, je pense à la dépendance mondiale à l’entreprise SpaceX d’Elon Musk et au système de satellites Starlink, qui inclut de nombreux éléments des télécommunications canadiennes. Compte tenu des positions politiques de plus en plus imprévisibles de M. Musk, que ferions-nous si quelque chose d’aussi essentiel à nos infrastructures de communication devenait une source de problèmes?

Le sénateur McNair : Bonne question, sénatrice Simons. Je n’ai pas de réponse à vous donner aujourd’hui.

Sachez que ce projet de loi, s’il est adopté, contient les pouvoirs nécessaires pour faire appliquer la loi. La prochaine étape sera la prise de règlements et la mise en place de certains des renseignements relatifs à la façon de procéder, et cela se fera en consultation, simultanément, avec les fournisseurs de services.

L’honorable Hassan Yussuff : Sénateur McNair, je tiens d’abord à vous remercier de parrainer un projet de loi pour la première fois. Je suis conscient de l’énorme responsabilité, des nombreuses lectures et du travail préparatoire qu’une telle chose implique. Il s’agit manifestement d’une mesure législative très complexe. Nous aurons l’occasion de l’examiner au comité de manière beaucoup plus approfondie que nous le faisons actuellement au Sénat.

Toutefois, je crois qu’il est juste de dire que les Canadiens craignent beaucoup, en général, les cyberattaques contre de nombreux services qu’ils utilisent dans tout le pays, qu’il s’agisse d’une banque, de leur propre gouvernement, d’un hôpital ou d’une administration municipale. Je comprends le point que vous avez soulevé en ce qui concerne les pouvoirs qui seront accordés au Cabinet et qui lui permettront d’accomplir certaines choses qu’il pourrait avoir à faire, mais qui ne sont pas encore décrites explicitement dans le projet de loi.

Voici ma question fondamentale. Je suppose que les ministères nous ont assuré que le projet de loi est conforme à la Charte à tous égards, notamment en ce qui concerne les pouvoirs qui pourraient être accordés par décret. Ces pouvoirs ne doivent pas franchir une ligne importante qui nous protège et qui garantit que nos droits fondamentaux sont protégés au titre de cette mesure législative.

Le sénateur McNair : Je vous remercie de la question, sénateur Yussuff. J’ai lu l’énoncé concernant la Charte, et le ministère confirme effectivement que le projet de loi est approprié. Il pourrait y avoir des contestations, mais, pour ce qui est des limites prévues dans le libellé actuel, le ministère est d’avis qu’elles sont raisonnables et justifiées dans une société libre et démocratique. Il s’agit d’atteindre un équilibre entre la protection de la vie privée et des libertés civiles et la protection des cybersystèmes et des infrastructures essentielles du pays.

La sénatrice Batters : Sénateur McNair, j’aimerais revenir sur ce que vous venez de dire étant donné que je ne me suis pas encore penchée sur cet aspect. L’énoncé concernant la Charte indique-t-il, comme vous le disiez, qu’il y a infraction, mais qu’elle est justifiée par l’article 1? Pouvez-vous préciser ce point, s’il vous plaît?

Le sénateur McNair : Je suis désolé si je n’ai pas été clair. Non, ce n’est pas ce que dit l’énoncé.

La sénatrice Batters : Que dit-il?

Le sénateur McNair : L’énoncé concernant la Charte indique que le projet de loi est approprié.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la Commission d’examen des erreurs du système judiciaire (Loi de David et Joyce Milgaard)

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable David Arnot propose que le projet de loi C-40, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence et abrogeant un règlement (examen des erreurs judiciaires), soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-40, Loi sur la Commission d’examen des erreurs du système judiciaire (Loi de David et Joyce Milgaard). Le projet de loi vise à créer une commission indépendante d’examen des affaires criminelles qui facilitera et accélérera l’examen des demandes de personnes qui pourraient avoir été condamnées à tort. À l’heure actuelle, le ministre de la Justice est responsable d’examiner les demandes de révisions pour erreur judiciaire. Grâce à ce projet de loi, une commission indépendante assumera ce rôle.

Ce n’est pas une idée nouvelle. En fait, la création d’une commission indépendante a fait l’objet de discussions dans cette enceinte il y a des années — en 2002 — dans le cadre du débat entourant le projet de loi C-15A. Ce projet de loi comprenait des modifications visant à réformer le processus d’examen par le ministre des erreurs judiciaires, entre autres réformes.

À l’époque, l’idée de créer une commission indépendante, calquée sur celle qui a été établie au Royaume-Uni, a recueilli beaucoup d’appuis ici, au Sénat, et aussi à l’autre endroit. Cependant, le gouvernement de l’époque a choisi de réformer le processus d’examen ministériel au lieu de créer un nouvel organisme indépendant du ministère de la Justice. Il a établi une distinction importante entre le rôle du secrétaire de l’Intérieur au Royaume-Uni en ce qui concerne la surveillance de la police et le rôle du procureur général du Canada, qui n’est pas responsable de l’application de la loi.

(1510)

Les appels à rendre le processus d’examen des erreurs du système judiciaire plus indépendant, efficace et transparent n’ont pas cessé, malgré les réformes de 2002 dans ce domaine du droit. En outre, le nombre d’erreurs judiciaires relevées et réparées au Canada est nettement inférieur au nombre de réparations accordées avec succès au Royaume-Uni.

L’analyse comparative entre les sexes plus préparée pour ce projet de loi souligne que la Criminal Cases Review Commission a reçu près de 32 000 demandes entre avril 1997 et avril 2024 en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord. Cela représente 27 ans d’expérience. Parmi ces demandes, 580 ont été renvoyées au tribunal et la condamnation a été annulée.

La Criminal Cases Review Commission écossaise a reçu plus de 3 200 demandes entre 1999 et mars 2024, ce qui a permis de renvoyer 96 affaires devant les tribunaux. Cela représente 25 ans d’expérience.

Au Canada, depuis 2002, date des dernières réformes de cette partie du Code pénal, jusqu’en juillet 2024, environ 200 demandes ont été soumises à un examen ministériel. Sur ces 200 demandes, 30 ont été renvoyées devant les tribunaux et 24 de ces 30 demandes ont donné lieu à un acquittement ou à l’annulation ou à la suspension d’une déclaration de culpabilité après le renvoi. Six demandes sont toujours en cours et n’ont pas été résolues.

Si on examine de plus près ces 30 demandes, on constate que seulement 7 des mesures de redressement ministérielles prises au Canada concernaient des demandeurs racisés et qu’aucune ne concernait une femme. Ces statistiques ne reflètent pas la démographie de la population carcérale du Canada.

Le rapport des consultations publiques organisées avant l’élaboration du projet de loi souligne que le système d’examen actuel n’a pas permis de fournir des mesures de redressement aux femmes, aux Autochtones et aux personnes noires dans une proportion correspondant à leur représentation dans les prisons canadiennes.

Selon le rapport de l’analyse comparative entre les sexes Plus, ou ACS+, il semble que ces groupes soient négligés et que les erreurs de justice les concernant n’aient pas encore été repérées et corrigées.

Dans ce contexte, il est important de garder à l’esprit l’effet cumulatif de l’intersectionnalité. Rappelons que les facteurs identitaires utilisés dans l’ACS+ vont au-delà du sexe de la personne. Ils comprennent des éléments tels que la race, l’appartenance ethnique, la religion, l’âge, les handicaps mentaux ou physiques, le revenu et l’éducation. L’analyse de ces caractéristiques personnelles et de leur intersection montre qu’elles peuvent contribuer à des condamnations injustifiées. Ces facteurs peuvent aussi avoir une incidence sur le nombre de possibles erreurs judiciaires qui n’ont pas encore été repérées et que la nouvelle commission pourrait prévoir.

En ce qui concerne le sexe, par exemple, on a constaté que des femmes victimes de mauvais traitements plaidaient coupable alors qu’elles auraient pu invoquer la légitime défense.

De même, il a été établi que la discrimination systémique au moyen d’une surveillance policière excessive était l’un des facteurs à l’origine de la surreprésentation des Autochtones et des Noirs dans le système de justice pénale du Canada.

Lorsque, dans le cas des femmes autochtones incarcérées, le genre croise le fait d’être autochtone, l’enquêteur correctionnel signale que la moitié des femmes condamnées au niveau fédéral sont des Autochtones, alors que les femmes autochtones représentent moins de 4 % des femmes au Canada.

Sénateurs, ce déséquilibre n’est pas nouveau pour nous. En fait, plusieurs de nos collègues ont déjà examiné de près les circonstances particulières, notamment les sénatrices Pate, Anderson, Boyer, Audette et Jaffer. Elles ont examiné attentivement les circonstances particulières de 12 femmes autochtones en tant qu’injustices et erreurs judiciaires qui devraient être examinées par le ministère de la Justice, la Commission du droit du Canada ou la nouvelle commission d’examen des erreurs du système judiciaire.

Le projet de loi C-40 comporte plusieurs éléments qui permettraient à la nouvelle commission d’examiner spécifiquement la situation des demandeurs autochtones et noirs, ainsi que d’autres questions liées à l’ACS+ en général. La structure de la nouvelle commission tiendrait compte de plusieurs facteurs, incluant ceux qui ont été soulevés lors des consultations publiques.

Premièrement, les recommandations sur la nomination des commissaires doivent chercher à refléter la diversité de la société canadienne. Elles devraient tenir compte de considérations telles que l’égalité entre les genres et répondre à la surreprésentation de certains groupes dans le système de justice pénale en incluant les peuples autochtones et les personnes noires.

Les commissaires doivent également posséder des connaissances et une expérience en rapport avec le mandat de la commission.

Une commission composée de commissaires issus de milieux et d’expériences de vie différents, reflétant particulièrement la diversité de la société canadienne, renforcera l’inclusion et élargira les perspectives dans le processus de prise de décisions. Elle contribuera également à renforcer la confiance des demandeurs, de la population en général et des communautés racisées en particulier à l’égard de l’organe d’examen.

La commission aura le devoir de mener des activités de sensibilisation auprès du grand public et des demandeurs potentiels, y compris ceux qui sont difficiles à atteindre ou qui ont été mal desservis dans le passé. Afin d’éliminer de manière proactive les obstacles à l’accès, ces activités de sensibilisation pourraient consister en des visites du personnel de la Commission dans les prisons et d’autres établissements correctionnels.

La mission de sensibilisation de la commission a pour but d’attirer l’attention de divers publics sur les erreurs judiciaires et sur la possibilité d’un réexamen des décisions de justice.

En définitive, l’intensification des efforts de sensibilisation devrait permettre d’augmenter le nombre de demandes et, de ce fait, de mieux détecter les erreurs judiciaires auxquelles il convient de remédier.

L’obligation de fournir des renseignements sur les erreurs judiciaires en général au public et aux demandeurs potentiels vise également à remédier aux problèmes systémiques qui sont à l’origine des erreurs judiciaires et à aider à prévenir d’autres incidents à l’avenir. Il est important de noter que la commission a l’obligation de publier ses décisions accompagnées d’informations sur les causes et les conséquences des erreurs judiciaires.

Soulignons que l’obligation de publier des commissaires vise à faire participer tous les acteurs du système judiciaire qui ont un rôle à jouer dans la prévention des erreurs judiciaires.

Le projet de loi précise également qui peut présenter une demande d’examen, afin que les jeunes soient admissibles, notamment ceux qui ont été déclarés coupables après avoir présenté un plaidoyer de culpabilité.

Sont aussi admissibles désormais les demandes présentées par les personnes à l’égard desquelles a été rendu un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. La commission aura également la possibilité de faire des exceptions à l’obligation d’épuiser les droits d’appel. Les facteurs à prendre en compte sont précisés dans le projet de loi.

Le projet de loi C-40 abrogera les règlements qui existent dans le cadre du régime actuel, lesquels ont été jugés onéreux à respecter, en particulier pour les demandeurs qui se représentent eux-mêmes, qui sont détenus, qui ont un faible niveau de scolarité, de faibles revenus, des problèmes de santé mentale, etc.

L’abrogation des règlements modifiera également les étapes actuelles de l’examen. Elle les simplifiera et réduira le temps nécessaire à l’évaluation des demandes, en particulier les moins complexes.

Essentiellement, le critère juridique de renvoi a été modifié de deux manières importantes afin d’améliorer l’accès à la justice en permettant aux tribunaux de réexaminer les affaires méritantes.

Tout d’abord, on a abaissé le seuil, qui stipulait auparavant que le ministre devait être convaincu qu’il y avait des motifs raisonnables de croire qu’une erreur judiciaire s’était probablement produite et qui, dans ce modèle, stipule que la commission doit avoir des motifs raisonnables de conclure qu’une erreur judiciaire a peut-être eu lieu.

Deuxièmement, « l’intérêt de la justice » du nouveau critère de renvoi exige que l’on prenne en compte les circonstances pertinentes pour le demandeur en particulier et non pas seulement les considérations pertinentes pour l’administration de la justice.

La loi stipule que la commission prend sa décision en tenant compte, entre autres facteurs, de la situation personnelle du demandeur et des difficultés spécifiques rencontrées par les demandeurs appartenant à certaines populations pour obtenir des mesures de redressement en cas d’erreur judiciaire.

Une attention particulière est donnée à la situation des demandeurs autochtones ou noirs. Parmi les exemples de situations personnelles et de difficultés spécifiques rencontrées par certaines populations, on peut citer l’identité autochtone, les répercussions du colonialisme et des pensionnats, le racisme systémique, le profilage racial, les effets de la violence entre partenaires intimes, ainsi que des problèmes sous-jacents comme la pauvreté, l’itinérance, la toxicomanie, la santé mentale, l’âge, le genre et les handicaps.

(1520)

La commission aura le pouvoir et les moyens de soutenir les demandeurs dans le besoin, notamment en leur fournissant des services communautaires tels que des services de traduction et d’interprétation, de la nourriture, un logement et une assistance juridique pour la soumission de la demande dans le cadre de ce nouveau processus.

Elle aura aussi des employés chargés de fournir des renseignements et des conseils aux demandeurs tout au long de la procédure d’examen.

En ce qui concerne le volet du mandat de la commission qui porte sur le soutien, il s’agit de faciliter l’accès à la justice et de répondre aux besoins particuliers des demandeurs, dont beaucoup, après des années d’emprisonnement, doivent faire face à des difficultés particulières en matière de réinsertion sociale.

La commission sera en mesure de fournir des services adaptés à la culture et aux besoins en matière d’accès, de manière décentralisée et pas nécessairement par voie électronique.

La commission sera également tenue d’informer les victimes. Il y aura un coordonnateur qui sera chargé d’offrir des services d’aide aux victimes et de leur fournir, autant que possible, l’information et le soutien dont elles ont besoin en tenant compte, le cas échéant, des facteurs de l’analyse comparative entre les sexes plus à considérer.

La commission sera également tenue d’adopter des politiques portant sur l’information transmise aux victimes et sur la participation des victimes, conformément à la Charte canadienne des droits des victimes.

La commission devra recueillir des statistiques liées aux facteurs de l’analyse comparative entre les sexes plus au sujet des demandeurs afin de suivre les tendances et de produire son rapport annuel au Parlement. Le contenu des rapports annuels de la commission permettra d’améliorer les mesures de transparence, de contrôle et de reddition de comptes à l’égard des travaux de la commission et d’apporter des améliorations au besoin.

Chers collègues, je crois que le projet de loi C-40 améliorera grandement le processus d’examen des erreurs du système judiciaire. Je pourrais en parler encore très longuement et entrer dans les détails en raison de l’expérience que j’ai accumulée à titre de procureur de la Couronne, de juge d’une cour provinciale, de commissaire aux traités et de commissaire aux droits de la personne.

Pour aujourd’hui, dans l’intérêt de faire progresser le projet de loi, je vous exhorte à renvoyer celui-ci au comité afin qu’il poursuive son cheminement au Parlement jusqu’à la sanction royale le plus rapidement possible.

Le projet de loi vise à régler des problèmes de longue date relatifs aux condamnations injustifiées en créant un bien meilleur mécanisme pour traiter ces situations et, ultimement, améliorer l’administration de la justice au Canada.

Merci.

Des voix : Bravo!

L’honorable Denise Batters : Merci pour ce discours, sénateur Arnot. J’aurais aimé en entendre plus. Il n’a duré que 15 minutes alors que vous en avez 45. Vous auriez pu parler de votre expérience passée, car ce projet de loi est important. Je sais que vous serez d’accord, surtout vu que vous êtes de la Saskatchewan où vous avez acquis une expérience juridique considérable. Je viens moi aussi de la Saskatchewan. Tous les habitants de cette province et beaucoup d’autres Canadiens sont au courant de l’affaire David Milgaard, qui est à l’origine de ce projet de loi.

Vous avez parlé du rapport sur l’analyse comparative entre les sexes plus. Ma première question est la suivante : c’est un document préparé par le gouvernement. Qu’y trouve-t-on au sujet des victimes de ces crimes, qui devraient en grande majorité être des femmes?

Le sénateur Arnot : Il m’est impossible de répondre à cette question de manière catégorique pour l’instant, mais je serai heureux de me pencher sur le sujet.

J’espère que ce projet de loi sera renvoyé au comité le plus rapidement possible. Il s’agit d’une mesure importante, d’un dossier important qu’il faut résoudre dans la société canadienne.

La sénatrice Batters : Pouvez-vous nous dire quelle est la rémunération prévue pour le poste de commissaire en chef à temps plein que crée le gouvernement dans cette nouvelle loi, ainsi que celle des quatre à huit autres postes de commissaires? On ne précise pas le nombre de commissaires. Il pourrait s’agir de postes à temps plein ou à temps partiel. Tous les titulaires de ces postes seraient nommés par le Cabinet, sur recommandation du ministre de la Justice.

Pouvez-vous nous dire quelle est la rémunération de ces postes?

Le sénateur Arnot : Je n’ai pas le montant exact de la rémunération proposée pour le poste de commissaire en chef ni pour les autres postes. On a prévu 83,9 millions de dollars, soit 18,7 millions de dollars par an, pour le fonctionnement de la commission. Je peux trouver les chiffres exacts.

J’espère que lorsque je poserai cette question en votre nom, on démontrera que le salaire est à la hauteur des responsabilités qu’auront ces commissaires, car il s’agit d’une lourde charge.

La sénatrice Batters : Pensez-vous qu’il est probable que la rémunération soit comparable à celle d’un juge d’une cour supérieure ou d’un poste du genre? Était-ce le sens de votre dernier commentaire?

Le sénateur Arnot : Je peux dire ceci : je pense que cette organisation doit être indépendante. Les commissaires doivent être indépendants et jouir de la plus grande indépendance judiciaire possible, comme on l’entend au Canada, car il est très important de maintenir la confiance dans l’impartialité du processus.

La sénatrice Batters : Merci. Vous avez brièvement fait référence au budget annuel. Vous avez dit qu’approximativement 83 millions de dollars, soit 18,7 millions de dollars par an, avaient été prévus pour les cinq prochaines années. C’était l’une de mes questions.

Certaines étapes importantes doivent être franchies avant que la commission puisse commencer son travail. J’ai une autre question à poser. Combien de temps faudra-t-il attendre après l’adoption du projet de loi? Combien de temps faudra-t-il avant que la commission puisse commencer ses travaux? Est-ce que ce sera des mois? Des années? Quel est l’échéancier prévu?

Le sénateur Arnot : Je ne suis pas en mesure de répondre à ces questions. J’espère que la commission pourra commencer ses travaux le plus rapidement possible. Une tâche colossale l’attend une fois qu’on lui aura conféré le pouvoir de mener des enquêtes approfondies. Elle aura beaucoup de responsabilités à assumer et devra faire appel à un certain nombre d’acteurs pour remplir son mandat.

Je ne sais pas s’il existe un délai prévu pour la mise en œuvre du projet de loi après son adoption. On pourrait croire que cela se ferait le plus rapidement possible, car tout retard ne fera que priver les gens du droit à un examen.

La sénatrice Batters : Merci. Je veux aussi vous parler d’un point que vous avez soulevé dans votre discours — je m’appuie sur ce que j’ai entendu jusqu’à maintenant alors que j’apprivoise mes fonctions de porte-parole pour cette mesure législative —, plus précisément du fait que le projet de loi abaisse le seuil pour les demandes d’examen. Selon le projet de loi C-40, le seuil est atteint si la commission :

[...] a des motifs raisonnables de conclure qu’une erreur judiciaire a pu être commise et si elle estime qu’il est dans l’intérêt de la justice de le faire [...]

Ce seuil est plus bas que sous le régime actuel, qui exige « des motifs raisonnables de conclure qu’une erreur judiciaire s’est probablement produite ».

Quelles pourraient être les répercussions de cette modification importante qui, selon vos propos, vise à assurer un meilleur accès à la justice à cet égard? Nous savons qu’il y a déjà d’importants délais judiciaires partout au Canada.

Compte tenu du nombre significatif de cas qui deviendraient admissibles à un examen et qui pourraient être entendus à nouveau devant les tribunaux en raison de ce nouveau seuil, quelles pourraient être les répercussions sur le problème déjà criant des délais judiciaires au Canada?

Le sénateur Arnot : Le projet de loi s’appuie sur un rapport publié en 2021 par l’ancien juge Harry LaForme et Juanita Westmoreland-Traoré, qui explique la nécessité d’assouplir les critères d’admissibilité.

Bien qu’on puisse penser que la barre a été quelque peu abaissée, elle demeure très élevée et doit être atteinte. Le professeur Kent Roach a témoigné devant le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles à quelques reprises. Selon lui, le projet de loi est un très bon départ.

Nous constaterons que, dans le contexte canadien, on ne peut pas répondre à toutes ces questions parce qu’il nous faut des commissaires qui sont des professionnels qualifiés et responsables.

(1530)

Seule l’expérience nous fournira les informations et les réponses à certaines questions que vous soulevez, ce qui est prévu par le projet de loi, qui exige la tenue automatique d’un examen quinquennal et d’un examen décennal. C’est à peu près tout ce que je peux dire en réponse à votre question pour l’instant.

L’honorable Brent Cotter : Le sénateur Arnot accepte-t-il de répondre à une question?

Le sénateur Arnot : Certainement. Accepterez-vous ma réponse?

Le sénateur Cotter : Je ne saurais dire encore.

J’aimerais d’abord faire une observation. Cette démarche est articulée autour de la condamnation injustifiée de David Milgaard et elle en est le reflet, mais il y a eu d’autres cas avant lui. D’ailleurs, le sénateur Cuzner a éloquemment mentionné aujourd’hui celui de Donald Marshall Jr. Cela nous rappelle que le problème est d’envergure nationale et que l’intention est d’y apporter une solution d’envergure nationale.

Vous connaissez également l’association d’avocats à la défense des personnes condamnées à tort, dirigée par l’éminent avocat de Toronto James Lockyer, qui a récemment été renommée Innocence Canada et qui est en voie de régler un certain nombre de dossiers. Savez-vous si le traitement de ces dossiers se poursuivra sous l’ancien régime ou si l’on effectuera une transition vers le nouveau modèle qui est assorti de cet élément d’indépendance? Connaissez-vous la réponse?

Le sénateur Arnot : Je ne peux pas vraiment donner de réponse détaillée. Je crois qu’une transition sera possible pour certains des dossiers qui sont déjà en cours de traitement. C’est l’intention. L’examen sera amélioré et plus indépendant.

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Le sénateur Cotter accepterait-il de répondre à une autre question?

Le sénateur Arnot : Oui.

La sénatrice Bernard : Oh, je suis désolée, sénateur Arnot. Vous avez tous deux les cheveux blancs.

Sénateur Arnot, permettez-moi d’en venir à ma question. Vous avez souligné dans votre allocution la surreprésentation des Autochtones et des Noirs dans les prisons. Nous savons que, pour beaucoup, pour certains, c’est le résultat d’une erreur judiciaire. Le sénateur Cuzner nous a rappelé aujourd’hui la déclaration de culpabilité injustifiée de Donald Marshall Jr., et l’examen de cette affaire a vraiment mis en lumière le rôle joué par le racisme systémique.

Comme nous le savons, le racisme systémique est très nuancé. Est-ce que le projet de loi aborde la question de la formation des commissaires à ces questions?

Le sénateur Arnot : C’est une très bonne question. Je ne pense pas que le projet de loi fasse mention d’une telle formation, mais il parle résolument de la nécessité que les commissaires viennent d’horizons divers. Je m’attends à voir des Canadiens noirs et des Canadiens autochtones dans cette commission, des personnes qui ont eu des expériences de cet ordre, qui peuvent comprendre les problèmes et s’assurer de l’équité du traitement dans le processus d’examen.

Bien sûr, la misogynie et le racisme jouent un rôle dans un certain nombre de déclarations de culpabilité injustifiées, et l’affaire des sœurs Quewezance, dont la sénatrice Pate a fait l’examen, en est un exemple classique.

Je ne peux pas avoir la certitude que ces commissaires… Ils ont des critères précis à ce sujet, parce que les Canadiens noirs et les Canadiens autochtones ont une bonne expérience ou ont beaucoup d’expérience — pas une bonne expérience — du racisme. Ils savent personnellement ce que s’est et peuvent le reconnaître. Par conséquent, ils le percevront quand ils y seront confrontés dans l’affaire d’un demandeur. Je n’en doute pas, mais je ne peux pas dire qu’il y a une formation particulière pour ces commissaires avant leur entrée en fonction. On peut espérer qu’ils seront des candidats de grande qualité. Je suis certain qu’ils auront une grande expérience de ces questions pour être efficaces et s’assurer que les Canadiens qui demandent un examen obtiennent une audition équitable.

La sénatrice Bernard : J’aimerais que le comité se penche sur cette question lorsqu’il étudiera ce projet de loi. Merci.

Le sénateur Arnot : Je participerai à l’étude. Je pense que mon collègue le sénateur Cotter présidera le comité et nous examinerons la question. On peut espérer que les commissaires ont une bonne compréhension du racisme avant d’être nommés.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Le Sénat

Autorisation aux comités mixtes de tenir des réunions hybrides

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 18 septembre 2024, propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement, tout ordre antérieur ou toute pratique habituelle, jusqu’à la fin de la journée le 30 juin 2025, tout comité mixte soit autorisé à tenir des réunions hybrides, les dispositions de l’ordre du 10 février 2022 concernant de telles réunions ayant effet;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’en informer.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 18 septembre 2024, propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 24 septembre 2024, à 14 heures.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(1540)

L’étude des populations de phoques

Huitième rapport du Comité des pêches et des océans et demande de réponse du gouvernement—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du huitième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, intitulé Assurer l’avenir de la chasse au phoque : passons à l’action, déposé auprès de la greffière du Sénat le 23 mai 2024.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition), au nom du sénateur Manning, propose :

Que le huitième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et océans, intitulé Assurer l’avenir de la chasse au phoque: passons à l’action, qui a été déposé auprès de la greffière du Sénat le jeudi 23 mai 2024, soit adopté et que, conformément à l’article 12-23(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport, en consultation avec le ministre des Affaires étrangères.

(Sur la motion de la sénatrice Clement, le débat est ajourné.)

La vie de Gordon Pinsent

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Manning, attirant l’attention du Sénat sur la vie de Gordon Pinsent.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je constate que cet article est au 15e jour. Au nom du sénateur Manning, j’aimerais proposer l’ajournement du débat pour le reste du temps dont il dispose.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

Le drapeau canadien dans le cadre de la célébration du Jour du drapeau national du Canada

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Cardozo, attirant l’attention du Sénat sur le drapeau canadien dans le cadre de la célébration du Jour du drapeau national du Canada.

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est au 15e jour et que la sénatrice White veut prendre la parole à son sujet. Par conséquent, je propose que le débat soit ajourné au nom de la sénatrice White, pour le reste de son temps de parole, jusqu’à la prochaine séance du Sénat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est‑il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Le débat est ajourné.)

[Français]

L’avenir de CBC/Radio-Canada

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Cardozo, attirant l’attention du Sénat sur l’avenir de CBC/Radio-Canada.

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Chers collègues, je prends la parole dans le cadre de l’interpellation lancée par le sénateur Cardozo sur l’avenir de CBC/Radio-Canada.

La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a annoncé au mois de mai la création d’un nouveau comité consultatif sur l’avenir de Radio-Canada en matière de financement, de gouvernance et de mandat.

Pourtant, la mission de Radio-Canada dans la loi actuelle est très simple. Elle ne comporte que trois points qui sont, dans l’ordre : renseigner, éclairer et divertir. Pour une radio ou une télévision publique, cette mission est d’une logique implacable et je ne vois pas comment on pourrait la modifier.

Je ne parlerai aujourd’hui que de Radio-Canada, où j’ai moi-même travaillé une trentaine d’années comme journaliste et, finalement, comme ombudsman, me prononçant publiquement sur les plaintes du public à l’endroit des journalistes. Je crois donc profondément à la nécessité d’un diffuseur public transparent, responsable et au service du public.

La Société Radio-Canada demeure un média indispensable, car c’est un vecteur de culture francophone. Le diffuseur public est écouté et regardé, moins par les jeunes, mais encore par une proportion significative de Québécois. Radio-Canada a 23,3 parts de marché en heures de grande écoute, comparativement à 26,8 pour TVA, son principal concurrent, mais l’écoute des bulletins de nouvelles à la télévision décline, comme dans les autres médias traditionnels.

Je dois d’abord vous dire que j’ai été fort déçue de la lenteur avec laquelle Radio-Canada et sa chaîne d’information continue, RDI, ont réagi au moment de la tentative d’assassinat contre l’ex‑président des États-Unis, Donald Trump, le 13 juillet dernier. À défaut de pouvoir être informée en français, je me suis rabattue sur les réseaux américains comme NBC ou ABC qui, évidemment, diffusaient en direct de longues émissions spéciales. Étant donné ses budgets plus importants que tous ceux de ses concurrents privés, Radio-Canada se doit d’avoir des réflexes plus aiguisés et plus rapides face à des événements imprévisibles.

Lors de sa création en 1995, RDI offrait des bulletins de nouvelles en direct 24 heures par jour. Même au milieu de la nuit, il y avait en place des journalistes, des chefs de pupitre, des animatrices qui intervenaient selon ce que l’actualité exigeait.

Inutile de dire que cette époque est révolue depuis bien longtemps, et ce n’est pas qu’une question de ressources. L’attentat du 13 juillet se passait en début de soirée, à un moment où la couverture journalistique aurait dû commencer presque instantanément. On a eu droit à une excellente émission spéciale 24 heures plus tard.

À mon avis, cet événement anecdotique reflète une triste réalité : depuis une vingtaine d’années, Radio-Canada a consacré presque tous ses efforts et ses investissements au divertissement plutôt qu’à l’information.

Chaque année, ou plutôt chaque saison, Radio-Canada lance de nouvelles séries dramatiques, de nouvelles émissions humoristiques et de variétés. Par contre, il est remarquable que la chaîne télévisée de Radio-Canada n’ait créé aucune nouvelle émission d’affaires publiques télé depuis l’émission Enquête, lancée en 2006, il y a 18 ans.

(1550)

Le 30 janvier dernier, alors qu’elle était interrogée par les députés au sujet des coupes appréhendées de 125 millions de dollars et de l’abolition de 800 postes à parts égales entre Radio-Canada et CBC, la vice-présidente de Radio-Canada, Dany Meloul, a été terriblement claire lorsqu’elle a déclaré : « Nous avons choisi de faire moins de coupes dans la production indépendante. »

À Radio-Canada, la production indépendante, c’est tout le divertissement : dramatiques, humour et variétés. La seule production interne qui existe encore à la télé de Radio-Canada, c’est l’information. Autrement dit, Mme Meloul et sa direction ont choisi de couper surtout dans l’information et de protéger le divertissement.

Pourtant, avec tous les conflits et les crises qui sévissent dans le monde, nous aurions bien besoin d’une émission hebdomadaire d’information internationale ou d’une émission sur les enjeux sociaux comme l’immigration, la violence conjugale ou les méfaits des médias sociaux pour les jeunes. En parlant de jeunes adultes, pourquoi pas ne pas créer une émission par et pour les jeunes qui traiterait de l’environnement et de l’avenir de la planète sur laquelle ils vivront?

Pour nous éclairer, pourquoi ne pas créer des émissions moins superficielles où l’on inviterait des spécialistes, des universitaires, des champions du domaine des affaires ou de la politique, qui nous amèneraient à réfléchir plus en profondeur sur le monde dans lequel nous vivons? Le seul grand plateau de la télévision publique est une émission de divertissement, soit Tout le monde en parle.

Bref, la mission de Radio-Canada doit continuer d’être la même, mais ce n’est pas suffisant : il faut aussi s’assurer que la direction de Radio-Canada mette en place une programmation qui y corresponde. Évidemment, les émissions qui renseignent ou qui éclairent risquent d’avoir de moins bonnes cotes d’écoute que les émissions de divertissement, mais la mission de Radio-Canada n’est pas d’être une championne des cotes d’écoute. En faisant moins de divertissement, Radio-Canada donnerait aux réseaux privés un peu d’oxygène et une plus grande part des revenus publicitaires, ce qu’ils réclament. Ce serait, à mon avis, un avantage pour tout le monde puisque, de toute façon, les revenus publicitaires ne représentent qu’une petite part des revenus de Radio-Canada. Au Manitoba, la patronne d’un journal francophone m’a expliqué, il y a quelque temps, à quel point le site Web régional de la SRC venait siphonner les maigres revenus publicitaires en région.

Pire encore, on assiste depuis plusieurs années à un déclin financier incroyable de nos entreprises de presse. Avec son financement assuré par les contribuables, non seulement Radio-Canada n’est pas à plaindre, mais elle devrait se montrer plus généreuse envers les autres. Par exemple, Radio-Canada est le seul réseau francophone qui peut compter sur un réseau de correspondants à l’étranger. Ce sont tous les contribuables canadiens qui paient pour ces bureaux à l’étranger, pas seulement ceux qui regardent Radio-Canada. Pourquoi les reportages des correspondants à Paris, à Istanbul ou en Asie ne seraient-ils pas offerts gracieusement aux réseaux privés? Ils ne seraient pas obligés de les diffuser, bien sûr, mais pourquoi priver leurs spectateurs d’un éclairage canadien sur ce qui se passe dans le monde?

Radio-Canada a même maintenant des journalistes qui ne produisent que de l’écrit sur son site Web. C’est tout de même remarquable pour une institution qui ne devrait se consacrer, selon son mandat, qu’à la radio et à la télévision. Bien sûr, Radio-Canada doit mettre sur son site les éléments radiophoniques ou télévisuels qu’elle souhaite y diffuser, mais Radio-Canada dispose maintenant de grosses équipes de rédacteurs et même des reporters qui font uniquement de l’écrit pour ce même site et se trouvent du même coup à faire concurrence à nos journaux, qui crèvent de faim. Pourquoi ne pas offrir gratuitement ces articles aux journaux francophones? Encore une fois, tous les contribuables canadiens ont payé pour ce matériel. Pourquoi n’auraient-ils pas le droit de lire ces articles dans leurs journaux quotidiens ou régionaux?

Je signale également qu’il est capital, à mon avis, de conserver et même d’accroître l’autonomie d’action et de décision du réseau français de Radio-Canada face à CBC dans un contexte où la centralisation est perçue comme une façon d’économiser et de protéger le réseau public de compressions budgétaires. J’ai pu constater, en travaillant dans cette institution pendant plus de 25 ans, que Radio-Canada et CBC ont des façons de faire bien différentes, et le succès du réseau français en dépend.

En résumé, j’insisterais sur deux choses. Premièrement, la mission de Radio-Canada doit demeurer la même, mais ses dirigeants doivent la respecter et offrir une programmation en conséquence. Deuxièmement, je souhaite que Radio-Canada continue d’avoir les ressources dont elle a besoin pour mener sa mission à bien, mais Radio-Canada, dont les contenus sont financés par tous les Canadiens, devrait offrir de les partager avec les journaux, les radios et les télévisions privées, parce qu’à notre époque et dans le monde dans lequel nous vivons, les Canadiennes et les Canadiens ont plus que jamais besoin d’être informés et éclairés. Merci.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

L’honorable Andrew Cardozo : La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Bien sûr, sénateur.

Le sénateur Cardozo : Merci, sénatrice Miville-Dechêne, pour votre discours très intéressant. Pouvez-vous développer votre idée sur le partage de contenu avec les autres radiodiffuseurs ou journaux?

La sénatrice Miville-Dechêne : J’en ai quand même parlé pendant quelques minutes, mais l’idée est que tous les contribuables financent les contenus de Radio-Canada et de CBC. Bien sûr, puisque Radio-Canada et CBC sont en concurrence avec les autres médias privés, elles gardent tout ce qu’elles font pour elles. Je songe particulièrement à l’information internationale, qui est ce qui coûte le plus cher à produire en télévision. Cela coûte extrêmement cher.

Au Québec, par exemple, nous avons trois réseaux de télévision. Pourquoi cette information ne serait-elle pas offerte aux autres médias? L’idée est d’informer les Québécois et les Canadiens. Ici, on a de l’information internationale financée pratiquement à 100 % par les contribuables, parce qu’il n’y a pas de publicité. L’information internationale n’est pas payante.

On cherche des idées nouvelles. C’est une idée nouvelle. À ce moment-là, pourquoi ne pas partager? Ce n’est pas évident que TVA ouvre son bulletin de nouvelles avec un reportage de Radio-Canada, ce n’est peut-être pas possible, mais cela pourrait peut-être intéresser de plus petites stations régionales.

Je suis pour le partage. J’ai travaillé à Radio-Canada. Nous avons des moyens tout à fait supérieurs à tous les autres. L’idée, c’est de partager. C’est la même chose pour les textes sur Internet. Je n’ai rien inventé. Les journaux se plaignent d’une concurrence déloyale de la part de Radio-Canada, dont le mandat original était la radio et la télévision.

Il est vrai que les choses ont changé, mais ce sont carrément des articles qui sont rédigés. Il y a des journalistes qui produisent de l’information qui n’est pas forcément diffusée à la radio ou à la télé.

Dans ce cas-ci, étant donné le nombre de journaux régionaux au Canada qui ont des difficultés, je crois que le partage serait une preuve de générosité de la part de Radio-Canada, qui devrait être de plus en plus généreuse dans un monde où il y a un écart énorme entre ses moyens et les moyens de tous les autres médias écrits, télévisuels et radiophoniques.

L’honorable Paula Simons : J’aimerais poser une question en français, mais cela se fera plus lentement. Lorsque j’étais une jeune réalisatrice à CBC à Edmonton, j’ai fait la connaissance de mes collègues qui travaillaient pour Radio-Canada. C’était vraiment difficile pour eux, parce qu’il n’y avait pas de ressources pour les petites stations à Edmonton comme à Montréal.

Pourriez-vous me dire comment vous pensez que Radio-Canada devrait partager les ressources? Il y a beaucoup de ressources pour le Québec, mais pour les petites communautés comme Edmonton, Bathurst ou Saint-Boniface, il est absolument nécessaire d’avoir quelque chose en français aussi.

(1600)

La sénatrice Miville-Dechêne : Je répondrai brièvement, parce qu’il y a d’autres questions. Personnellement, je suis favorable à une plus grande générosité de Radio-Canada envers les francophones qui vivent à l’extérieur du Québec.

Il est vrai qu’il y a beaucoup plus d’argent au Québec qui est consacré à l’information internationale. Évidemment, il y a des questions de pourcentage des populations francophones, il y a plus d’auditeurs et plus de gens au Québec, mais, conformément au mandat spécifique de Radio-Canada, il est très important de servir les gens et d’embaucher des francophones qui viennent de ces régions. C’est d’ailleurs quelque chose que j’ai souvent dit. C’est important d’avoir du français, mais plus particulièrement celui qui est parlé au Manitoba, en Alberta et en Acadie.

[Traduction]

L’honorable Donna Dasko : La sénatrice Miville-Dechêne accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui.

La sénatrice Dasko : Je voulais juste vous demander brièvement ce que vous pensez de la publicité. Vous en avez parlé brièvement, mais j’aimerais que vous donniez des précisions. Pensez-vous que Radio-Canada devrait continuer de compter sur la publicité? Vous avez peut-être aussi un avis sur la CBC. C’est une question très controversée. De toute évidence, d’autres médias ne reçoivent plus les revenus publicitaires qu’ils avaient l’habitude de recevoir, mais cet organisme-là, oui. Qu’en pensez-vous? Merci.

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénatrice Miville-Dechêne, votre temps de parole est écoulé. Est-ce que les sénateurs consentiraient à donner deux minutes de plus à la sénatrice pour qu’elle puisse répondre à la question?

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le consentement est accordé.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci, Votre Honneur. Oui, je crois que c’est une concurrence un peu difficile pour les médias privés, étant donné que Radio-Canada pige aussi dans le bassin de plus en plus étroit de la publicité. Au Québec, cela fait des ravages dans le secteur de la télévision, notamment au privé. Je pense que Radio-Canada devrait renoncer à la publicité, mais cela exigerait une certaine compensation de la part du gouvernement. Il est clair que les diffuseurs trouvent que c’est très difficile d’être en concurrence avec Radio-Canada, qui reçoit déjà des subventions.

L’honorable Leo Housakos (leader suppléant de l’opposition) : Sénatrice Miville-Dechêne, j’ai écouté votre allocution avec intérêt. Il est sûr et certain que vous êtes très favorable à Radio-Canada et à son importance pour la communauté francophone au Canada. Je partage complètement votre point de vue, mais vous n’avez pas parlé beaucoup de CBC, le réseau anglais. Vous avez laissé cela de côté.

À mon avis, la meilleure façon d’évaluer la capacité et l’importance d’une plateforme médiatique, c’est par les cotes d’écoute. Quand on regarde les cotes d’écoute de Radio-Canada, on voit qu’elles sont très fortes. Je regarde les cotes d’écoute de CBC et c’est épouvantable. Les cotes d’écoute sont en déclin depuis plusieurs années. En même temps, c’est le réseau anglais qui récolte la plus grande partie de l’enveloppe budgétaire et de l’argent des contribuables. Cela a bien plus de sens de mettre plus des fonds dans une plateforme comme Radio-Canada, qui, évidemment, répond à un besoin. Il faut limiter l’argent des contribuables attribué au réseau anglophone, qui a de moins en moins d’utilité pour les Canadiens.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci pour cette question qui n’est sûrement pas un piège. Je me suis concentrée sur Radio-Canada, parce que c’est ce que je connais le mieux. Ce que vous dites sur CBC est vrai : les cotes d’écoute sont moins importantes que celles de Radio-Canada. Cela dit, ce n’est pas la seule mesure. Il existe une culture canadienne. Les Canadiens anglophones ne peuvent pas compter uniquement sur les médias américains pour s’informer, car ils le font au détriment des médias canadiens. Je trouve cela dur à imaginer.

J’ai aussi un peu de difficulté à imaginer un pays — car je sais que, du côté des conservateurs, vous en avez parlé — qui abolirait CBC et garderait Radio-Canada. Radio-Canada sert les francophones et CBC sert les anglophones. Je suis tout à fait contre votre proposition. Je ne crois pas qu’on puisse mesurer l’importance d’une institution seulement par ses cotes d’écoute.

Le sénateur Housakos : Quelles sont les autres mesures? Évidemment, il y a une culture canadienne qui se manifeste souvent et tous les jours sur les différentes plateformes qui existent. Dans la langue anglaise, il y a plusieurs options et le choix de la communauté anglophone du Canada, c’est de moins en moins de regarder une émission diffusée sur le réseau CBC, qui coûte 1,4 milliard de dollars aux contribuables.

De l’autre côté de la médaille, il y a Radio-Canada. Excusez-moi, mais je vois deux entités très différentes : l’une qui sert la communauté francophone et l’autre qui sert les communautés anglophones. Les communautés anglophones ne veulent rien savoir de CBC et les communautés francophones partout au Canada embrassent de plus en plus ce produit. À mon avis, c’est une question de bon sens d’en éliminer une et de laisser l’autre aux contribuables, puisque c’est ce qu’ils veulent.

La sénatrice Miville-Dechêne : Imaginez-vous vraiment que les Canadiens accepteraient que Radio-Canada, qui sert une minorité francophone, continue d’exister et obtienne un plein financement et que l’on ferme CBC? Tout cela me semble assez difficile à imaginer. C’est un pays où il y a deux langues officielles qui doivent normalement recevoir des services. Alors, on verra bien, mais je vous avoue que je suis plutôt opposée à cette idée.

(Le débat est ajourné.)

L’équité en matière de santé mentale, d’abus de substances et de toxicomanie

Interpellation—Ajournement du débat

L’honorable Sharon Burey, ayant donné préavis le 19 juin 2024 :

Qu’elle attirera l’attention du Sénat sur les préoccupations persistantes concernant l’équité en matière de santé mentale, d’abus de substances et de toxicomanie au Canada.

— Honorables sénateurs, c’est un honneur et un privilège de présenter cette interpellation. Le 19 juin 2024, j’ai pris la parole pour attirer l’attention du Sénat sur les préoccupations persistantes concernant la parité en matière de santé mentale, d’abus de substances et de toxicomanie au Canada. Je veux remercier mon équipe, l’équipe de recherche de la Bibliothèque du Parlement, mes collègues du Sénat et les membres du personnel qui ont été si généreux de leur temps, alors qu’ils ont patiemment écouté mes idées et suggéré des façons de faire avancer cette question. Je tiens à remercier plus particulièrement les sénateurs Lankin, Kutcher, Boyer, Hartling, Bernard, Cordy, Batters, Brazeau, Greenwood, Coyle, Black, Osler, Patterson, McCallum et Seidman, ainsi que mon groupe, le Groupe des sénateurs canadiens.

Je veux également remercier les organisations et les personnes qui ont généreusement fourni leur expertise et donné de leur temps. Au cours des six derniers mois, nous avons rencontré environ 200 personnes et 30 organisations. Nous avons examiné 100 rapports et consacré plus de 600 heures de travail à cette question.

(1610)

Nous avons consulté la Commission de la santé mentale du Canada, l’Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux, le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, l’Association canadienne pour la santé mentale, le Centre de toxicomanie et de santé mentale, l’Agence de la santé publique du Canada, le Bureau du médecin hygiéniste en chef de l’Ontario, des organismes autochtones et des Premières Nations, des universitaires ainsi que des personnes ayant une expérience vécue, pour n’en nommer que quelques-uns. Certains de ces intervenants participeront aux discussions de la table ronde sur la parité en matière de santé mentale qui aura lieu le 20 septembre, à 13 heures. Je vous invite tous à y participer.

[Traduction]

La table ronde sera animée par le Dr Paul Roumeliotis, médecin hygiéniste en chef de l’Est de l’Ontario. Paul et moi avons été résidents en pédiatrie ensemble il y a 40 ans à l’Université McGill, à l’Hôpital de Montréal pour enfants. Qui aurait cru que, toutes ces décennies plus tard, nous travaillerions ensemble sur une question aussi monumentale?

Je tiens à saluer l’ancien sénateur Percy Mockler. Quelques mois après ma nomination, il est venu me voir à l’extérieur de la Chambre et, avec sa douce voix et ses yeux perçants, il m’a posé une question cruciale : qu’est-ce que je voulais accomplir ici, au Sénat? Ma réponse a été complètement instinctive : « Je veux travailler sur la parité en santé mentale », ai-je dit. Le sénateur a répondu : « Personne ne saura qui vous êtes tant que vous ne saurez pas de quoi vous vous souciez. »

Je vais expliquer pourquoi le moment est venu d’instaurer la parité en santé mentale. À aucun autre moment de notre vie, la question pressante du bien-être mental, de la santé mentale, de la toxicomanie et des dépendances n’a été à l’esprit et sur les lèvres de presque tous les Canadiens comme aujourd’hui. Pendant plus de 30 ans, j’ai été pédiatre spécialisée en santé mentale. J’ai constaté les longs délais d’attente et le manque de services de santé mentale et pour les troubles du comportement en milieu hospitalier et dans la collectivité. J’ai aussi vu les conséquences parfois dévastatrices de cette situation pour les enfants, les adolescents et leur famille. Je vais vous raconter deux ou trois histoires.

Par exemple, un enfant aux idées suicidaires — qui a tenté de sauter d’une voiture en marche parce qu’il ne voulait pas aller à l’école — était, au bout du compte, atteint d’un grave trouble de l’apprentissage non diagnostiqué. Je me souviens aussi d’un parent aux prises avec des problèmes de dépendance qui n’arrivait pas à trouver des services de garde pour suivre un traitement de la toxicomanie en consultation externe.

Je n’ai pas seulement traité des patients atteints de problèmes de santé mentale. Comme beaucoup d’autres Canadiens, ma propre famille a été touchée. En juillet 1976, nous avons quitté la Jamaïque pour immigrer dans ce grand pays. L’avenir était rempli de promesses étant donné que mes parents étaient tous les deux très instruits et que leur langue maternelle était l’anglais. Ils auraient dû facilement trouver de bons emplois dans leur domaine respectif, mais, comme beaucoup le savent, la transition n’est pas aussi simple qu’elle devrait l’être.

Mon père était un homme brillant, un orateur hors pair et un lecteur avide dont la bibliothèque était remplie d’ouvrages allant des textes économiques de John Kenneth Galbraith à l’histoire de la Grèce antique. Quatre ans après avoir émigré au Canada, il a reçu un diagnostic de dépression grave et de diabète. Lui qui était habituellement le premier à se lever le matin, qui était toujours bien mis, qui était extrêmement bien organisé et qui n’avait jamais manqué un jour de travail de sa vie, n’arrivait pas à sortir du lit. Ma famille n’avait jamais affronté quelque chose d’aussi difficile. Cependant, grâce à un médecin de famille extraordinaire, qui faisait même des visites à domicile, mon père a fini par s’en remettre.

Cette expérience est restée gravée dans ma mémoire et c’est probablement l’une des raisons pour lesquelles j’ai répondu à l’appel dans les années 1990 pour aider à mettre en place un programme de services en santé mentale et de services pour les troubles de comportement en milieu hospitalier et de stabilisation pour les enfants et les familles de ma communauté, avant de fonder ADHD Windsor en 2006.

De nombreuses personnes ont travaillé dur, essayant de fournir des soins pour des problèmes de santé mentale, d’abus de substances et de toxicomanie, mais les résultats que nous souhaitons tous — un accès universel et équitable aux services de traitement en santé mentale et de la toxicomanie, un modèle de soins échelonnés, un traitement fondé sur des données probantes, un soutien au sein de la communauté, et de meilleurs résultats quant au rétablissement — sont de plus en plus hors de portée.

La proportion de Canadiens âgés de 12 ans et plus qui ont déclaré avoir une santé mentale mauvaise ou passable a doublé entre 2018 et 2022. Au cours d’une année donnée, 6,7 millions de Canadiens — soit une personne sur cinq — souffrent d’une maladie mentale. À l’âge de 40 ans, ce chiffre passe à un Canadien sur deux. Les groupes marginalisés, les Noirs et les groupes 2ELGBTQIA+ présentent un risque accru de troubles de santé mentale. Les communautés autochtones sont confrontées à des niveaux épidémiques et records de maladies mentales, de troubles liés à l’abus de substances, de surdoses et de décès enracinés dans des traumatismes coloniaux, historiques, remontant aux pensionnats autochtones et actuels.

Comme nous devrions tous le savoir maintenant, 70 % des troubles de la santé mentale commencent pendant l’enfance. On estime à 1,6 million le nombre d’enfants et de jeunes au Canada qui souffrent d’un trouble mental. D’ailleurs, l’organisme Children’s Mental Health Ontario signale que 28 000 enfants ontariens sont sur des listes d’attente pour des services de santé mentale, et que certains attendent plus de deux ans avant d’avoir accès à des soins appropriés. C’est inacceptable.

Une étude de la Commission de la santé mentale du Canada a révélé que les coûts directs et indirects des maladies mentales se sont élevés à 90 milliards de dollars en 2021 et qu’ils devraient atteindre plus de 300 milliards de dollars d’ici 2041. Le Conference Board du Canada indique qu’en l’absence d’investissements opportuns, le coût à vie d’une seule cohorte d’enfants souffrant d’anxiété et de dépression à l’âge de 10 ans s’élève à près de 1 billion de dollars — j’ai bien dit billion avec un « B ». L’étude montre également que les investissements réalisés aujourd’hui dans le domaine de la santé mentale des enfants, en mettant l’accent sur des programmes accessibles et inclusifs pour les populations vulnérables, peuvent permettre d’économiser 28 milliards de dollars par an. En outre, un mémoire de l’Association canadienne pour la santé mentale souligne que chaque dollar consacré à la santé mentale rapporte de 4 à 10 dollars à l’économie.

C’est en raison de mes expériences personnelles et professionnelles que je m’engage à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour que cette question reste au haut de la liste des priorités du gouvernement fédéral et pour tous les Canadiens. J’espère être à l’origine d’une mesure législative qui fera de la parité en matière de santé mentale une obligation.

Chers collègues, comme vous, je sais que le rôle du gouvernement fédéral est de faire preuve de leadership en définissant un problème, en établissant un cadre et en affectant des fonds aux solutions possibles. Sachant que la prestation des soins de santé relève principalement de la compétence des provinces et des territoires, toute mesure législative fédérale devrait être élaborée en collaboration avec les différents ordres de gouvernement et les corps dirigeants autochtones.

En 2006, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a publié un rapport historique intitulé De l’ombre à la lumière : la transformation des services concernant la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada. J’étais présente lorsque le président du comité, l’ancien sénateur Michael Kirby, a présenté ces conclusions à Windsor. J’ai désormais le privilège d’être membre de ce comité et j’ai l’intention de poursuivre cet important travail.

Au cours de cette interpellation, j’espère que vous parlerez, estimés collègues, en partant de vos diverses expériences et de vos divers domaines d’expertise, de la manière dont nous pouvons sensibiliser les gens à l’importance capitale de la parité en matière de santé mentale, de votre définition de la parité, de la manière dont nous pouvons établir des liens tout au long de la durée de vie et à l’échelle de la société, et que vous discuterez du rôle de la santé comme déterminant social et de la manière dont nous pouvons définir des politiques et des mesures législatives fédérales qui peuvent faire de la vision de la parité une réalité.

Qu’entend-on par « parité »? Selon l’Association canadienne des travailleurs sociaux, la parité de santé mentale ou parité d’estime signifie :

valoriser la santé mentale autant que la santé physique afin de réduire les inégalités en matière de mortalité, de morbidité ou de prestations des soins.

En 1953, le Dr Brock Chisholm, premier directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, a déclaré que « sans santé mentale, il ne peut y avoir de véritable santé physique ».

La Loi canadienne sur la santé a pour objectif qu’on fournisse des soins de santé universels et intégraux afin de promouvoir le bien-être physique et mental des Canadiens. Le sens véritable de cette idée n’a toutefois jamais été concrétisé, d’où l’importance de cette interpellation.

Les recherches montrent très clairement qu’il y a un lien fondamental entre santé mentale et santé physique. À titre d’exemple, les patients atteints d’un diabète de type 2 sont deux fois plus susceptibles de souffrir de dépression que la population générale. Chez les patients déprimés, le risque de crise cardiaque est plus de deux fois plus élevé que dans la population générale. Les enfants aux besoins médicaux complexes risquent davantage de souffrir de troubles neurodéveloppementaux et de troubles de santé mentale que les autres enfants, et ils utilisent davantage les services de santé et les services sociaux.

(1620)

Le gouvernement fédéral a reconnu la nécessité d’agir. Il a promis des milliards de dollars et convenu de priorités communes avec les instances provinciales, territoriales et autochtones, mais, jusqu’à présent, les résultats laissent à désirer.

La lettre de mandat de 2021 du ministre de la Santé de l’époque dictait à ce dernier d’établir un transfert canadien permanent en matière de santé mentale afin d’élargir la prestation des services de santé mentale, conformément à la plateforme libérale, afin que :

[...] les soins de santé mentale [soient] traités de façon égale et intégrale dans le système public de santé universel du Canada.

Dans leur plateforme de 2021, les libéraux ont promis un investissement initial de 4,5 milliards de dollars. Le Fonds pour la santé mentale des jeunes annoncé dans le budget de 2024 est un bon départ, mais 500 millions de dollars sur cinq ans, c’est loin d’être suffisant.

En juin, l’Association canadienne pour la santé mentale a adressé une lettre ouverte au ministre de la Santé, Mark Holland, où elle déclare :

Le Canada a échoué à instaurer un cadre juridique fédéral permettant de traiter les soins de santé mentale et de santé liée à l’utilisation de substances de manière équivalente aux soins de santé physique.

Le Royaume-Uni et les États-Unis ont tous deux adopté une loi sur la parité en matière de santé mentale, ce qui change les choses. Au Canada, seulement 7 à 9 % des fonds pour les soins de santé sont consacrés à la santé mentale, alors que le Royaume-Uni y consacre 13 % de son budget.

Il n’y a pas de meilleur moment que maintenant pour maintenir cette question parmi les priorités des politiques publiques et du programme législatif. Ainsi, aujourd’hui, en nous appuyant sur le travail de ceux qui nous ont précédés, prenons le relais. Poursuivons sur la lancée de la Loi canadienne sur la santé et donnons suite au rapport Kirby; passons à l’étape suivante et continuons notre travail pour que l’équité en matière de santé mentale, d’abus de substances et de toxicomanie devienne une réalité au Canada, pour qu’on puisse enfin passer de l’ombre à la lumière.

J’ai hâte d’entendre vos histoires, vos idées et vos points de vue, et j’espère que vous envisagerez de participer à notre table ronde coparrainée par la sénatrice Seidman et le sénateur Kutcher demain, le 20 septembre.

Merci, meegwetch.

Des voix : Bravo!

L’honorable Ratna Omidvar : Sénatrice Burey, tout d’abord, je vous félicite pour vos arguments convaincants et pour le raisonnement logique que vous avez présentés avec passion. Je pense que cela fait toute la différence.

Ma question porte sur la reddition de comptes. Comme vous le savez, au Canada, les fonds affectés à la santé sont acheminés aux gouvernements provinciaux; il est arrivé par le passé que le gouvernement fédéral finance des services en matière de santé mentale. La difficulté réside dans la reddition de comptes. Le projet de loi que vous présenterez tiendra-t-il compte de cet aspect?

La sénatrice Burey : Merci beaucoup, et merci d’être intervenue pour donner une impulsion au projet de loi. Lorsque le projet de loi sera déposé, que ce soit à l’autre endroit ou ici, cet aspect sera pris en compte.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, le Sénat a épuisé l’ordre du jour, en dehors de la période des questions avec le ministre à 16 h 55.

Les sénateurs sont-ils d’accord pour suspendre la séance jusqu’à cette heure et pour la reprendre après une sonnerie de cinq minutes? Êtes-vous d’accord pour suspendre la séance jusqu’à ce que le ministre soit parmi nous?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Il en est ainsi ordonné. La sonnerie retentira à 16 h 50 et le Sénat siégera à 16 h 55 pour la période des questions.

(La séance du Sénat est suspendue.)

[Français]

(Le Sénat reprend sa séance.)

(1650)

Les travaux du Sénat

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, avant de procéder à la période des questions avec le ministre, je tiens à vous rappeler les durées fixées par le Sénat pour les questions et les réponses, conformément à l’ordre du 3 octobre 2023. Lors d’une période des questions sans ministre, la durée de la question principale et de la réponse sont limitées à une minute chacune, et la durée de la question supplémentaire et de la réponse sont limitées à 30 secondes chacune.

Lorsque le Sénat reçoit un ministre pour la période des questions, comme c’est le cas aujourd’hui, la durée de la question principale est limitée à une minute et celle de la réponse à une minute 30 secondes. La question supplémentaire et la réponse sont limitées à 45 secondes chacune. Dans tous ces cas, le greffier lecteur se lève 10 secondes avant l’échéance de ces délais.

Je tiens également à rappeler au Sénat que, conformément à l’article 2-7(2) du Règlement, lorsque la Présidente se lève, le sénateur qui a la parole doit s’asseoir, ce qui veut dire qu’il doit cesser son intervention jusqu’à ce qu’il soit reconnu de nouveau. Pour faciliter le respect de cette disposition, la Présidente a donné la directive que les microphones soient désactivés lorsque la Présidente se lève. Ceci ne s’applique pas lorsqu’un nouveau sénateur prend le fauteuil.

Je demande maintenant au ministre d’entrer et de prendre sa place.


PÉRIODE DES QUESTIONS

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2021, visant à inviter un ministre de la Couronne, l’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, comparaît devant les honorables sénateurs durant la période des questions.)

Les travaux du Sénat

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, nous accueillons aujourd’hui pour la période des questions l’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, pour qu’il réponde à des questions concernant ses compétences ministérielles. Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue.

Monsieur le ministre, comme je l’ai déjà indiqué au Sénat, la durée pour une question principale est limitée à une minute, et la durée de votre réponse est limitée à une minute 30 secondes. Pour la question supplémentaire, la durée de la question et de la réponse est limitée à 45 secondes chacune. Le greffier lecteur se lèvera 10 secondes avant l’échéance de ces délais. La période des questions sera d’une durée de 64 minutes.

[Traduction]

Le ministère de la Sécurité publique

La nomination d’un conseiller financier

L’honorable Leo Housakos (leader suppléant de l’opposition) : Monsieur le ministre, le 10 septembre, Mark Carney a accepté de devenir de facto ministre des Finances de votre gouvernement. Cependant, il n’est pas nommé par le Bureau du Conseil privé. Il travaille plutôt pour le Parti libéral du Canada et n’est donc pas assujetti à la Loi les conflits d’intérêts.

Une semaine après son entrée en fonction au Parti libéral, nous savons pourquoi on a établi cette distinction au sujet de « M. Taxe-sur-le-carbone Carney ». Le 17 septembre, M. Carney, en tant que président de Brookfield Asset Management, a conclu avec le gouvernement Trudeau une entente selon laquelle l’entreprise recevra 10 milliards de dollars de fonds publics pour créer un fonds d’actions aux fins de l’administration des pensions des Canadiens. Cette entente a été conclue une semaine plus tard.

En tant que ministre des Institutions démocratiques, aviez-vous des préoccupations au sujet de cette entente? Est-ce vous qui avez suggéré de ne pas nommer « M. Taxe-sur-le-carbone Carney » au Bureau du Conseil privé, ou est-ce Justin Trudeau? Qui a eu l’idée de faire travailler M. Taxe-sur-le-carbone Carney pour votre parti afin qu’il soit à l’abri de la loi qui, comme vous le saviez pertinemment, aurait autrement été enfreinte?

[Français]

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Madame la présidente, permettez-moi de vous saluer. Voir quelqu’un de ma province présider cette Chambre, cela me fait énormément plaisir. Merci de votre invitation.

[Traduction]

Sénateur Housakos, c’est étonnant. Vous répétez cette même expression ridicule, « M. Taxe-sur-le-carbone Carney », que j’ai entendue à l’autre endroit durant la période des questions pour parler d’un homme qui a servi le premier ministre Harper à titre de gouverneur de la Banque du Canada.

(1700)

J’aurais pensé que vous auriez été fier que d’éminents Canadiens s’impliquent bénévolement en politique. Si vous souhaitez faire une série de commentaires désobligeants sous le couvert du privilège et accuser le gouverneur Carney d’enfreindre des lois, vous êtes libre de le faire dans cette enceinte. Toutefois, il serait plus prudent de ne pas répéter cette accusation contre lui à l’extérieur de cette enceinte. Je suis heureux qu’il aide le gouvernement avec sa politique de croissance économique, et je pense que les Canadiens devraient être rassurés par le fait que des gens de ce calibre s’engagent bénévolement dans le processus politique. J’aurais pensé que vous, plus que quiconque, seriez heureux que des gens se portent volontaires pour participer à ce processus.

Le sénateur Housakos : Monsieur le ministre, la seule chose à laquelle M. Carney — « M. Taxe-sur-le-carbone Carney » — contribue, c’est faire croître le portefeuille des entreprises qu’il représente. C’est ce qu’il fait depuis le jour où il est entré en fonctions.

Lorsque vous étiez ministre des Pêches, vous avez eu votre propre scandale de conflit d’intérêts pour avoir accordé un permis de pêche lucratif à un membre de votre famille qui ne possédait même pas de bateau. Vous devriez donc savoir pertinemment pourquoi ces règles et ces lignes directrices en matière de conflit d’intérêts sont en place.

Si assujettir « M. Taxe-sur-le-carbone Carney » à nos lois en matière d’éthique n’était pas votre idée, avez-vous au moins tenté de déconseiller qu’on l’invite à travailler pour le Parti libéral du Canada plutôt que pour le gouvernement du Canada, ou approuvez-vous entièrement cela?

M. LeBlanc : Votre Honneur, j’hésite à corriger un parlementaire aussi expérimenté que le sénateur Housakos, mais il sait pertinemment que ce permis de pêche n’a pas été accordé, que la demande venait d’une communauté autochtone, et non d’un particulier. Encore une fois, si vous pouvez inventer des faits...

Comme je l’ai dit dans ma réponse précédente, je suis heureux que Mark Carney, qui a occupé des fonctions très importantes dans le domaine de l’économie auprès d’anciens gouvernements du Canada et de pays alliés européens, ait décidé d’offrir ses conseils à un parti politique. Cela choque peut-être certaines personnes. Cependant, je n’aurais pas pensé que le sénateur Housakos en ferait partie.

[Français]

Le Comité consultatif indépendant sur les nominations au Sénat

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le ministre, le 25 mai 2021, une question écrite a été inscrite au Feuilleton du Sénat au sujet du Comité consultatif indépendant sur les nominations au Sénat, un comité « indépendant ». Le comité ne s’est même pas donné la peine de produire un rapport concernant ses activités ou ses coûts en 2019 et en 2020, soit pendant deux ans.

On demandait dans la question écrite s’il avait présenté des rapports au gouvernement pendant ces deux années et, si oui, qui avait décidé de ne pas les publier et pourquoi. Hier, après trois ans et demi, une réponse a été déposée, et on nous apprend que tous les rapports du Comité consultatif indépendant sur les nominations au Sénat sont rendus publics sur son site Web; fin de la réponse. Peut-on vraiment parler de transparence lorsqu’on répond à ces questions? Ne croyez-vous pas que c’est une blague?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Au contraire, vous avez fait partie d’un gouvernement qui faisait preuve d’énormément moins de transparence par rapport aux nominations au Sénat. Alors, le gouvernement s’est engagé devant les Canadiens à avoir un processus indépendant.

D’ailleurs, les personnes qui siègent à ce comité consultatif sont en grande majorité nommées par les gouvernements provinciaux. Nous avons pensé que c’était une amélioration quant au processus de nomination.

Lorsque je regarde le Sénat aujourd’hui, je constate qu’il y a des hommes et des femmes d’une qualité extraordinaire qui ont été nommés par ce même processus. Nous en sommes très fiers, et je crois que les Canadiens ont bénéficié de ce processus.

Le sénateur Carignan : Je ne suis pas convaincu que vous ayez compris ma question — ce n’est certainement pas un problème de traduction.

Il n’y a pas eu de rapport déposé en 2019 et 2020 sur les activités du comité. Prenez-vous l’engagement de nous fournir ces rapports et de nous donner une vraie réponse à ces questions, ou devrons-nous passer par l’accès à l’information?

M. LeBlanc : Vous prendrez les mesures que vous croyez importantes, monsieur le sénateur.

Je vois les recommandations de ces comités consultatifs. C’est une question que je serai heureux de soulever auprès du Conseil privé en raison du statut précis de ces avis; je ne veux pas prétendre que, dans le cas où certaines personnes ne sont pas nommées, par exemple, on va dévoiler tous les rapports ou le processus suivi par ces comités, mais c’est avec plaisir que je poserai la question au Conseil privé.

Je crois que c’est une amélioration importante en matière de nominations au Sénat et de transparence. On a permis aux Canadiens de poser leur candidature pour siéger ici, là où je me trouve aujourd’hui, avec énormément de plaisir.

[Traduction]

L’ingérence étrangère

L’honorable Yuen Pau Woo : Bon après-midi, monsieur le ministre. Pouvez-vous nous dire où en est la mise en œuvre du projet de loi C-70, Loi sur la lutte contre l’ingérence étrangère, adopté à la va-vite au Sénat et de votre côté à la fin du mois de juin dernier? En particulier, quand aurons-nous l’occasion de passer en revue les compétences d’un candidat au poste de commissaire à la transparence en matière d’influence étrangère afin d’évaluer si cette personne sera en mesure de faire son travail sans stigmatiser les minorités visibles ou les soumettre à de la discrimination?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Par votre entremise, Votre Honneur, je remercie le sénateur de sa question. Je remercie les honorables sénateurs du travail qu’ils ont accompli pour adopter ce projet de loi, qui, de l’avis du gouvernement, représente l’une des plus importantes modernisations des capacités de renseignement du Canada.

Sénateur, vous avez parlé en particulier du commissaire à la transparence en matière d’influence étrangère, un des éléments essentiels du projet de loi. Je suis conscient de l’urgence — je l’ai déjà affirmé — de faire venir témoigner un candidat ici et à la Chambre des communes. Je trouvais que cet amendement assurant la contribution des parlementaires à ce processus était tout à fait sensé. Vous l’avez dit, le candidat devra avoir des compétences exemplaires.

Je partage entièrement vos préoccupations, et celles exprimées par de nombreuses autres personnes, au sujet de l’importance du fait que certaines communautés au Canada — notamment les minorités visibles — craignent que cette structure, pourtant appelée à les protéger, finisse par leur être nuisible.

Je poursuis mon travail avec le ministère et avec le Conseil privé afin de préparer une liste restreinte et je suis impatient de pouvoir communiquer au Sénat et à l’autre endroit le nom d’un éminent Canadien hautement qualifié qui, je l’espère, obtiendra votre bénédiction.

Le sénateur Woo : Je vais revenir à votre réponse et vous dire que l’adoption à la va-vite du projet de loi C-70 a suscité de vives inquiétudes de la part des groupes de défense des libertés civiles et des communautés ethniques minoritaires. Le dernier exemple en date est un article publié hier dans Options politiques par un dirigeant de l’Association musulmane du Canada. Que fait votre gouvernement pour prévenir ou atténuer les éventuels effets néfastes de cette loi excessive et draconienne?

M. LeBlanc : Votre Honneur, vous ne serez pas surpris d’apprendre que je ne souscris pas à la caractérisation faite par le sénateur à la fin de sa question. Je n’aurais pas utilisé les mots « draconienne » et « excessive ». Je pense qu’il s’agit d’une mesure législative efficace et ciblée qui a été rapidement approuvée. Vous avez choisi de dire qu’elle a été adoptée à la va-vite. Je ne me risquerais pas à penser que le gouvernement ferait adopter quelque chose à la va-vite au Sénat. Nous n’avons pas eu cette chance par le passé.

Je suis très reconnaissant du travail accompli au Sénat et à la Chambre des communes. Je peux en parler parce que j’ai été témoin du travail multipartite qui a été accompli à la Chambre des communes et je pense qu’il s’agit d’une réalisation législative importante.

Le travail forcé

L’honorable Julie Miville-Dechêne : Monsieur le ministre, des cargaisons de marchandises soupçonnées d’être le fruit du travail forcé sont bloquées à la frontière états-unienne. Selon des experts qui ont parlé à la CBC, ces cargaisons sont redirigées vers le Canada, où elles n’ont aucune difficulté à entrer au pays. Le sénateur américain Jeff Merkley, un démocrate de l’Oregon, a même reproché au Canada d’être la porte qui permet de faire entrer en catimini des marchandises interdites d’entrée sur le continent.

Le sénateur Merkley a proposé la solution suivante : que le Canada et les États-Unis mettent en commun une liste d’entreprises soupçonnées de recourir au travail forcé, et que les marchandises de ces entreprises soient automatiquement bloquées aux frontières de nos deux pays.

Votre gouvernement adoptera-t-il cette solution simple et efficace? Dans la négative, pourquoi?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Votre Honneur, par votre entremise, j’indique à la sénatrice que nous avons pris note de la suggestion du sénateur américain. J’ai parlé de cette question à John McKay, mon collègue de l’autre endroit, plus tôt aujourd’hui. Je travaille avec le ministère sur le premier rapport annuel que nous devons présenter conformément à la loi.

Lors de mes échanges avec des fonctionnaires de l’Agence des services frontaliers du Canada, qui relèvent de moi, et du ministère de la Sécurité publique, je leur ai demandé de me donner des options ayant un rapport direct avec la question que vous avez posée, madame la sénatrice, et avec le problème soulevé par les États-Unis.

(1710)

Madame la sénatrice, j’ai également parlé à plusieurs reprises au secrétaire américain à la Sécurité intérieure, M. Alejandro Mayorkas, qui est responsable des douanes et de la protection des frontières aux États-Unis. Il y a quelques mois à peine, lui et moi avons discuté d’une façon de nous assurer qu’il n’y a pas d’échappatoire, de sorte que les gens ne puissent pas faire indirectement ce que nous, collectivement, ne voulons pas qu’ils fassent directement. Je serais heureux de travailler avec vous et d’autres collègues sur la façon la plus pratique et efficace d’éviter exactement cela.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je parle toujours d’esclavage moderne, et vous y avez fait allusion. À ce jour, 6 000 entreprises ont soumis des rapports sur le risque de travail forcé dans leurs chaînes d’approvisionnement, comme l’exige le projet de loi S-211.

Cette nouvelle loi prévoit que vous devez faire rapport au Parlement au plus tard le 30 septembre, soit dans environ deux semaines, pour évaluer si la loi est respectée. Pouvez-vous nous dire approximativement combien d’entreprises visées par la loi n’ont pas fait de déclaration et si les rapports soumis respectent généralement les exigences de la loi?

M. LeBlanc : Votre Honneur, c’est une très bonne question. En commençant, madame la sénatrice, vous avez dit qu’il me restait environ deux semaines pour présenter ce rapport. Je suis convaincu que parmi toutes les personnes intéressées, vous attendez avec le plus d’impatience que ce rapport soit rendu public.

J’ai consulté des ébauches du travail en cours, en consultation avec le personnel compétent de mon ministère. Il serait toutefois mal avisé que je vous divulgue en primeur des extraits de mon propre rapport qui, bien sûr, sera déposé dans le respect de l’échéance fixée. Quand vous aurez pris connaissance de cette information et de bien d’autres dans le rapport que je déposerai d’ici à la date limite prescrite par la loi, je serai heureux de donner suite à toutes vos suggestions, le cas échéant.

Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement

L’honorable Scott Tannas : Bienvenue, monsieur le ministre. Je vous remercie de votre présence.

En ce qui concerne le rapport spécial que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement a publié sur l’ingérence étrangère dans les processus et les institutions démocratiques du Canada, le gouvernement a fourni une version non expurgée à tous les leaders de la Chambre des communes. Cependant, il n’a pas fait preuve de la même courtoisie à l’égard des leaders des groupes reconnus au Sénat. Allez-vous corriger cette situation et mettre une version non expurgée du rapport à la disposition des leaders du Sénat?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Votre Honneur, cette question a été posée lorsque j’ai comparu devant le Comité sénatorial de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants. Vous comprendrez que ce n’est pas moi qui décide de la manière dont on diffuse la version non caviardée de ce rapport en particulier. Un ensemble d’exigences en matière de sécurité est en place.

J’ai discuté de cette question avec des fonctionnaires du Bureau du Conseil privé. Ce rapport ne m’a pas été remis. Ce n’est pas moi qui décide de la manière dont la version non caviardée de ce rapport est diffusée et à qui elle est communiquée, mais je me ferai un plaisir de poser à nouveau la question.

Le sénateur Tannas : Il est encore plus curieux qu’il existe un processus qui échappe à votre contrôle, au sein du Bureau du Conseil privé. Pour une raison quelconque, Elizabeth May fait partie de cette liste, mais pas les leaders au Sénat.

Vous avez vraisemblablement lu la version non expurgée du rapport. Sans divulguer de noms, désigne-t-on nommément un sénateur dans le rapport?

M. LeBlanc : Monsieur le sénateur, je salue votre façon de poser la question, c’est très habile. Vous dites, d’un côté, « oh, je ne voudrais pas que vous... », mais aussi « vous savez, s’il fallait que je... ». Je comprends ce que vous dites, mais je ne peux évidemment pas répondre à cette question.

Pour ce qui est de la question précédente, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement relève du premier ministre. Il ne relève pas du ministre de la Sécurité publique. C’est le Bureau du Conseil privé qui conseille le premier ministre au sujet de ce travail.

J’ai aussi pris note des observations de la juge Hogue pour ce qui est de nommer des gens. J’ai vu ses commentaires publics. Il s’agit d’un sujet délicat. Je crois qu’il ne serait pas constructif, et qu’il serait peut-être même illégal, de faire indirectement ce que je ne peux pas faire directement.

La réforme du Sénat

L’honorable Marty Klyne : Monsieur le ministre, j’ai une question au sujet de la réforme du Sénat qui est en cours. En juin, la sénatrice Dasko nous a parlé d’un sondage qui indiquait que 69 % des Canadiens souhaitaient que les futurs gouvernements continuent de nommer des sénateurs indépendants. Seulement 5 % des Canadiens veulent un retour au système partisan.

En mai dernier, le représentant du gouvernement au Sénat a réussi à faire modifier le Règlement de façon à assurer le traitement équitable des groupes parlementaires indépendants au sein du nouveau système. Or, il n’y a toujours pas de règle au Sénat pour assurer l’équité, la transparence et l’application régulière de notre processus pour les projets de loi d’initiative parlementaire qui viennent de la Chambre des communes. Ces derniers peuvent facilement être la cible de mesures dilatoires.

S’agit-il d’un enjeu au sujet duquel vous voudriez qu’il y ait une réforme afin de garantir que les sénateurs nommés puissent voter sur les projets de loi des députés élus, comme l’avaient proposé des sénateurs conservateurs en 2014 et comme l’ont proposé le sénateur Dalphond et le sénateur Sinclair en 2020?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Votre Honneur, je vous remercie de cette question. J’ai également pris note de cette recherche sur l’opinion publique qui a été publiée. Il se trouve que je partage ce point de vue. Je pense que les Canadiens ont été bien servis par le très bon travail réalisé dans cette enceinte au cours des dernières années. Le processus de nomination et le type de femmes et d’hommes qui ont posé leur candidature pour servir dans cette enceinte et qui ont été sélectionnés par le premier ministre témoignent de l’efficacité de ce processus. J’en suis certainement très fier et j’ai été heureux de constater que les Canadiens l’étaient également.

Je pense également que le représentant du gouvernement fait un travail absolument formidable au Sénat, en plus de participer aux réunions du Comité du Cabinet chargé des opérations, que je préside. Il nous informe, par exemple, des changements au Règlement qu’il a proposés et des progrès qu’il réalise à cet égard en travaillant avec ses collègues ici.

Mes collègues du Cabinet sont toujours intéressés d’entendre le sénateur Gold le lundi après-midi, mais nous ne prétendons certainement pas donner des conseils aux sénateurs quant aux règles appropriées que vous décideriez d’adopter. Nous pensons qu’il serait utile et positif que le Sénat étudie les projets de loi d’initiative parlementaire qui viennent de l’autre endroit, mais je vous laisse le soin de choisir le mécanisme qui convient pour ce faire.

Je suis heureux de travailler avec le représentant du gouvernement, comme nous le faisons effectivement chaque semaine et parfois plusieurs fois par semaine. Il nous a tenus au courant de certains de ces changements au Règlement, que nous avons considérés comme très positifs.

Le sénateur Klyne : Le processus indépendant de nomination des sénateurs mis en place par le gouvernement a fait progresser la réconciliation en permettant à de nombreux peuples autochtones de mieux se faire entendre au Parlement et dans l’élaboration des lois fédérales, puisque le Sénat compte maintenant environ 10 % de sénateurs autochtones. Le gouvernement s’engagera-t-il à maintenir ce niveau de représentation et encouragera-t-il tout autre gouvernement à faire de même?

M. LeBlanc : Votre Honneur, plusieurs Canadiens autochtones très distingués se sont présentés et siègent maintenant au Sénat. Il y a eu des sénateurs autochtones dans le passé. Je pense au premier sénateur autochtone, Len Marchand, qui était un ami de mon père et que j’ai connu enfant, et qui est décédé il y a quelque temps. Des Autochtones servent honorablement au Sénat depuis longtemps.

Je me réjouis qu’un si grand nombre d’Autochtones siègent actuellement au Sénat. Je ne prétends pas parler au nom des futurs gouvernements. Je ne procède évidemment pas aux nominations, mais je suis heureux de voir le gouvernement choisir des Canadiens autochtones pour siéger au Sénat.

Le programme de rachat d’armes à feu

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Je croyais que le premier sénateur autochtone était le sénateur Gladstone, oui? D’accord.

Monsieur le ministre, selon une récente réponse écrite de votre ministère à mon collègue le sénateur Plett, le programme de rachat d’armes à feu du gouvernement NPD-Parti libéral a maintenant coûté aux Canadiens au moins 67 millions de dollars sans qu’une seule arme à feu ait été rachetée par votre gouvernement. Dans la réponse écrite, Sécurité publique Canada a déclaré qu’au 19 juin, votre ministère avait dépensé 56,1 millions de dollars pour ce programme. De même, la GRC a déclaré avoir dépensé un peu plus de 11 millions de dollars. C’est une somme incroyable à dépenser pour un programme qui n’existe pas encore et qui, en fin de compte, vise les propriétaires d’armes à feu titulaires de permis, formés et respectueux des lois au lieu des criminels.

Monsieur le ministre, allez-vous mettre fin à ce programme?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Non, Votre Honneur, absolument pas. En fait, nous sommes sur le point de lancer le programme. Il y aura d’abord la phase 1 dans les prochaines semaines, qui consistera à racheter auprès de magasins et de vendeurs bien au-delà de 10 000 armes à feu qu’ils ont en stock, mais qui sont maintenant illégales. Le gouvernement versera une compensation à ces entreprises et détruira ces armes à feu de style arme d’assaut.

Vous ne serez pas surprise d’entendre que je ne partage pas votre point de vue selon lequel nous ciblons les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois. Je comprends que vous répétez les arguments partisans du bureau de votre chef. Ce n’est pas le cas. Vous savez très bien que ce n’est pas le cas, madame la sénatrice. J’entends les mêmes déclarations à l’autre endroit, mais je suis heureux de répéter les réponses que nous y donnons. Les Canadiens appuient ces mesures. Nous sommes fiers du programme que nous lancerons. C’est une promesse électorale que nous avons faite aux Canadiens, et nous avons fait un excellent travail de préparation. J’ai hâte de présenter les détails du programme de rachat dans les prochaines semaines.

(1720)

La sénatrice Martin : Les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois sont inquiets, et il est important de tenir compte de leur inquiétude. La réponse de votre ministère montre que les consultants externes ont reçu près de 11,5 millions de dollars sur les 67 millions de dollars qui ont été dépensés. Monsieur le ministre, pourriez-vous déposer dans cette enceinte les renseignements concernant les contrats accordés aux consultants dans le cadre de ce programme et, pour chaque contrat, pourriez-vous fournir le nom du vendeur, la valeur du contrat, les dates de début et de fin et un résumé du travail effectué?

M. LeBlanc : Lorsque j’annoncerai le lancement du programme de rachat, nous donnerons de nombreux détails sur le fonctionnement du programme et sur le montant des indemnités qui seront versées.

Ce programme ne vise aucunement les sportifs ou les Autochtones qui chassent pour se nourrir ou qui pratiquent un sport. Il vise à retirer les armes de type militaire des rues. C’est une promesse électorale que nous avons faite. Nous reconnaissons que l’argent des contribuables doit être dépensé judicieusement, et c’est exactement ce que nous allons faire.

[Français]

Le taux de criminalité

L’honorable Leo Housakos (leader suppléant de l’opposition) : Monsieur le ministre, depuis 2015, la criminalité au Canada ne fait qu’augmenter. Ce n’est pas une opinion, mais bien des faits appuyés par Statistique Canada.

L’indice de gravité des crimes violents a augmenté de 6 % en 2021 et de 5 % en 2022. En ce qui concerne les agressions sexuelles de niveau 1, nous avons observé une hausse alarmante de 18 % en 2021 et une autre en 2022. Le taux d’homicides a augmenté de 8 % en 2022 et a atteint son plus haut niveau depuis 1992.

Monsieur le ministre, ces chiffres sont choquants, voire effrayants. Ils prouvent l’échec de votre gouvernement. Pourquoi devrions-nous croire que vous êtes encore en mesure d’assurer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens, alors que les statistiques montrent le contraire?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Je partage l’inquiétude du sénateur Housakos par rapport à l’augmentation du taux de criminalité au Canada. Cette hausse préoccupe considérablement tous les Canadiens et notre gouvernement. C’est pourquoi nous avons investi des ressources supplémentaires, que ce soit au sein de la GRC ou à l’Agence des services frontaliers du Canada. Nous travaillons avec des alliés du Canada pour faire cesser la criminalité transfrontalière et c’est un défi.

Nous avons renforcé certaines mesures du Code criminel en collaboration avec les premiers ministres des provinces. Je parle notamment du projet de loi C-48, qui concerne la réforme sur la mise en liberté sous caution. Je crois que les parlementaires devront toujours réfléchir sur la façon d’améliorer les lois et d’ajouter des ressources supplémentaires.

Je trouve quelque peu ironique que le sénateur Housakos pose une question sur l’augmentation de la criminalité tout de suite après en avoir posé une autre sur la façon d’abandonner certaines mesures de contrôle des armes à feu.

Je trouve cela ironique pour ce qui est du positionnement des questions.

Le sénateur Housakos : La véritable ironie, monsieur le ministre, c’est que votre gouvernement va d’échec en échec par rapport à ces dossiers.

Le projet de loi C-5 a autorisé le recours aux ordonnances de sursis pour des crimes graves, comme le harcèlement criminel et l’agression sexuelle. Le projet de loi C-75 assouplit les conditions de remise en liberté provisoire. Le projet de loi C-48 est une tentative précipitée de colmater la brèche que vous avez vous-même créée dans notre système de remise en liberté provisoire, qui est désormais déficient.

Comment pouvez-vous défendre le bilan de votre gouvernement, alors que les crimes violents augmentent au pays à cause de vos politiques et que leur taux augmente d’année en année depuis très longtemps?

M. LeBlanc : Je comprends la nature partisane, qui est de dire que ces augmentations inquiétantes du taux de criminalité sont attribuables au gouvernement. Je vois que le sénateur Housakos tente de faire ce lien, alors que c’est un défi auquel font face plusieurs autres pays.

Je reconnais la responsabilité du gouvernement d’appuyer nos forces de l’ordre et de leur fournir les outils et les ressources nécessaires pour combattre l’augmentation inquiétante du taux de criminalité. Nous allons continuer de faire tout ce qui est nécessaire, y compris, dans certains cas, entreprendre une réforme législative.

[Traduction]

Les répercussions de l’intelligence artificielle

L’honorable Rosemary Moodie : Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre. J’aimerais vous poser une question sur l’intelligence artificielle et la sécurité publique.

Comme vous le savez, l’intelligence artificielle s’appuie sur des données pour guider ses algorithmes, et les systèmes d’intelligence artificielle sont vulnérables aux biais, surtout s’ils utilisent des données de source ouverte. Selon le registre canadien de suivi de la gouvernance automatisée, le gouvernement utilise environ 303 outils automatisés. Plusieurs d’entre eux sont utilisés à l’Agence des services frontaliers du Canada, ou ASFC, et d’autres à la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC.

Les préoccupations au sujet des biais sont réelles. Si ces outils utilisés par les organismes de sécurité publique se basent sur des données biaisées, cela pourrait nuire considérablement à certaines personnes qui pourraient avoir à vivre toute leur vie avec les conséquences des décisions orientées par ces outils.

Le gouvernement utilise-t-il des données de source ouverte pour orienter les algorithmes des systèmes d’intelligence artificielle automatisés que vous employez, et quelles formations ou mesures de protection supplémentaires sont en place pour lutter contre ces biais potentiels?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Sénatrice, votre question est très pertinente. Il va sans dire que je partage votre préoccupation concernant le recours à l’intelligence artificielle ou concernant ces algorithmes qui pourraient, en fait, donner lieu à des biais. Nous travaillons tous sans relâche pour éliminer les préjugés systémiques au gouvernement et dans les institutions publiques. Nous ne voulons en aucun cas utiliser des technologies qui, paradoxalement, propageraient ou encourageraient ces préjugés.

Votre question est d’ordre technique. Je ne sais pas quels algorithmes en particulier sont utilisés ni si l’ASFC ou la GRC utilisent ces outils, mais je me ferai un plaisir de prendre note de cette question et de faire en sorte que Sécurité publique Canada, la GRC, l’ASFC et d’autres organismes chargés de l’application de la loi vous fournissent ces informations. C’est une très bonne question, et je ne me permettrais pas d’improviser une réponse à une question d’une telle importance.

Le Plan d’action national pour lutter contre le vol de véhicules

L’honorable Rosemary Moodie : Je reviens sur le vol de voitures, qui demeure un énorme fléau au Canada. En Ontario, les réclamations pour vol ont augmenté de plus de 524 % depuis 2018, et elles ont dépassé le milliard de dollars en 2023. Le gouvernement a annoncé un investissement important et un plan d’action qui visent à lutter contre ce problème. Les fonds alloués ont-ils été dépensés? Disposez-vous de données sur la réussite du plan à ce jour? Donne-t-il des résultats? D’autres mesures sont-elles prévues?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : La bonne nouvelle, madame la sénatrice, c’est que le plan a effectivement un effet positif. Nous ferons une annonce à ce sujet dans les prochaines semaines. J’ai parlé de ce dossier avec le solliciteur général de l’Ontario et le premier ministre Ford il y a 10 jours. L’utilisation des fonds alloués a commencé et se poursuit. J’ai rencontré le commissaire de la Police provinciale de l’Ontario, Thomas Carrique, qui est aussi président de l’Association canadienne des chefs de police. Il m’a parlé de la façon dont ils ont pu améliorer leur travail grâce aux dizaines de millions de dollars transférés par le gouvernement du Canada.

Équité Association et d’autres groupes vont publier des statistiques encourageantes à propos de ce problème. Cela dit, nous poursuivons nos efforts, car il reste du travail à faire.

L’ingérence étrangère

L’honorable Stan Kutcher : Monsieur le ministre, soyez le bienvenu. L’acte d’accusation publié aujourd’hui par le département de la Justice des États-Unis, qui porte sur le financement par le Kremlin d’une société américaine qui aurait reçu environ 10 millions de dollars de la Russie pour manipuler les espaces d’information canadiens et américains, indique que les fondateurs de la société étaient deux Canadiens. Ils ont utilisé ces fonds pour payer des entités canadiennes afin de promouvoir la désinformation russe et s’ingérer dans nos processus démocratiques.

Y aura-t-il des enquêtes approfondies sur les personnes qui, au Canada, ont reçu cet argent russe à ces fins et, dans l’affirmative, ces enquêtes ont-elles commencé?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Votre Honneur, je remercie le sénateur Kutcher de sa question. Je partage les préoccupations de nombreux Canadiens — de tous les Canadiens, j’espère — concernant cet exemple clair de désinformation utilisée comme outil d’ingérence étrangère par le gouvernement russe.

(1730)

Comme vous l’avez dit à juste titre, ils auraient transféré ces fonds par l’entremise de diverses sociétés fictives, plus précisément dans le but de promouvoir certaines opinions d’extrême droite dans les médias sociaux.

Je veux être prudent. J’ai reçu un appel du procureur général des États-Unis, Merrick Garland. Il a remercié le Canada pour sa collaboration avec le département de la Justice de son pays dans cette affaire. Nous avons discuté de ce que nous pouvions faire de plus ensemble pour contrer la désinformation et l’ingérence étrangère dans les processus électoraux.

En ce qui concerne les enquêtes menées par la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC, le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, ou d’autres organismes, sénateur, je préfère ne pas parler d’enquêtes particulières. La GRC est la mieux placée pour vous indiquer si des enquêtes sont en cours ou non. Je tiens à ce que ce soit clair que ce n’est pas à moi de le faire. Ce sont les organismes d’application de la loi qui peuvent répondre à ces questions.

Je peux vous assurer, sénateur Kutcher, et assurer à tous les autres sénateurs que nous allons continuer de soutenir les organismes d’application de la loi dans cet important travail, y compris nos partenaires des États-Unis et des autres pays du Groupe des cinq.

Le sénateur Kutcher : En septembre 2023, le Canada a ajouté le groupe de réflexion personnel de Poutine, le club Valdaï, et le conseil des affaires internationales de Russie à sa liste de sanctions. Selon certaines allégations, des Canadiens auraient collaboré avec ces organisations qui pratiquent la désinformation. Le gouvernement canadien demandera-t-il à la Commission sur l’influence étrangère d’enquêter sur les activités d’information et d’influence russes qui sont exercées dans notre démocratie et notre société et qui les ciblent, y compris les activités liées à ces deux organisations sanctionnées?

M. LeBlanc : Sénateur Kutcher, vous posez une autre question très importante. Vous avez souligné le rôle que la Russie a joué non seulement dans notre démocratie, mais aussi dans le monde entier. Comme le Service canadien du renseignement de sécurité et d’autres organismes l’ont dit publiquement, la Russie est l’un des principaux acteurs de l’espace de désinformation qui sert à déstabiliser les démocraties occidentales. Nous ne sommes pas à l’abri de cela.

Comme les sénateurs le savent, la Commission sur l’ingérence étrangère est une commission d’enquête indépendante. Le gouvernement ne la dirige pas, sauf dans l’établissement de son mandat, qui a été négocié avec tous les partis politiques à la Chambre des communes. La bonne nouvelle, c’est que j’ai participé à ce processus et je suis certain que, dans le cadre de son mandat, cette commission d’enquête publique se penchera précisément l’utilisation de la désinformation par des acteurs étatiques hostiles, comme la Russie. Je suis convaincu que la juge Hogue examinera les faits, et j’ai hâte de lire son rapport à la fin de décembre.

L’isthme de Chignecto

L’honorable Jim Quinn : Bienvenue, monsieur le ministre LeBlanc. Sans grande surprise, ma question porte sur l’isthme de Chignecto et le projet de loi S-273, que le Sénat a adopté par une forte majorité des voix en juin dernier. Ma question ne porte pas sur le financement ni sur le Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes. Elle porte sur le leadership dont doit faire preuve le gouvernement libéral pour ce qui est de reconnaître l’importance culturelle et historique de la région pour les Acadiens et les Premières Nations ainsi qu’en matière de réconciliation avec les Premières Nations en s’acquittant de son devoir de consulter de façon exemplaire, d’autant plus que l’isthme est important pour les déplacements et le transport de marchandises dont notre économie a besoin.

Dans une entrevue avec le Telegraph-Journal, vous avez dit que la démarche judiciaire de la province était frivole. En juin, le sénateur Gold a dit que le gouvernement ne peut appuyer le projet de loi tant et aussi longtemps que la cour n’aura pas tranché la question de la compétence. Qui dit vrai? La demande adressée à la cour est-elle frivole ou s’agit-il d’une question dont le gouvernement attend la réponse avant de déterminer s’il va appuyer ou non le projet de loi?

Il existe une solution : le gouvernement peut décider d’adopter le projet de loi S-273 et d’exercer ainsi le leadership que les intéressés souhaitent le voir exercer. Une telle décision procurerait la clarté que recherchent les provinces et, nul doute, rendrait la démarche judiciaire inutile. Pourquoi le gouvernement refuse-t-il d’appuyer le projet de loi S-273? Ne croyez-vous pas que la gestion des digues de l’isthme de Chignecto dans votre propre circonscription...

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Votre Honneur, je remercie le sénateur Quinn, par votre entremise, pour cette question. Je vous remercie pour votre travail dans cet important dossier. Mardi, j’ai été très fier d’annoncer un investissement historique de 325 millions de dollars pour soutenir les travaux que les provinces de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick souhaitent entreprendre dans cette zone névralgique.

J’ai déclaré publiquement — et je l’ai dit aux premiers ministres Houston et Higgs — que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse est totalement libre de renvoyer l’affaire devant la Cour d’appel de cette province. J’aurais préféré qu’il lance un appel d’offres pour ce projet au lieu de gaspiller de l’argent à payer des avocats afin qu’ils posent une question non contraignante à la Cour d’appel de la province. Je ne prétends pas parler au nom du premier ministre Houston, mais nous serons heureux de travailler avec eux afin de réaliser ce travail.

Le premier ministre Higgs, qui a déclenché des élections aujourd’hui, m’a assuré qu’il va accepter cet argent et mettre ces importants travaux en branle.

Je vais continuer de faire mon possible pour ce projet. Je comprends les enjeux qui entourent ce projet de loi. J’en ai discuté avec le représentant du gouvernement au Sénat. Nous sommes moins intéressés par les questions de champs de compétence. Ce qui nous intéresse, c’est de soutenir ce projet le plus rapidement possible, mais nous croyons que les provinces doivent elles aussi faire une contribution, et nous espérons qu’elles le feront.

Le sénateur Quinn : Dans ma question, je ne voulais pas parler de l’argent et savoir qui paie, ni discuter des négociations entre les autorités fédérales et provinciales pour savoir qui doit payer quoi, à quel endroit et à quel moment. Ma question porte sur les champs de compétence. Le gouvernement fédéral peut-il prendre les devants pour que nous appliquions une démarche uniforme dans des domaines tels que la consultation des Premières Nations et la protection du patrimoine culturel important dans cette région pour les Premières Nations et pour notre peuple acadien?

En tant que ministre responsable de la région, pourquoi n’intervenez-vous pas et ne soutenez-vous pas les personnes qui ont dit à notre comité qu’elles souhaitaient que le gouvernement fédéral assume ce rôle?

M. LeBlanc : Sénateur Quinn, vous avez raison de soulever la question des consultations avec les communautés autochtones, du soutien aux Acadiens et de l’importance du patrimoine acadien dans ce site particulier.

Il y a un an, alors que j’étais à Gaspé, au Québec, j’ai rencontré une famille gaspésienne qui m’a parlé de ses racines qui remontent à Beaubassin. Je partage donc tout à fait cette préoccupation.

Vous avez été haut fonctionnaire au Conseil du Trésor. Quand le gouvernement du Canada revendique sa compétence sur quelque chose, il en résulte habituellement un projet de loi. Je ne pense pas qu’il faille être naïf à ce sujet.

On peut discuter des champs de compétence. Je pense qu’il y a une obligation de procéder à des consultations; je partage totalement votre point de vue là-dessus. Toutefois, je pense que les provinces ont également l’obligation de contribuer à ce processus, et c’est ce que nous espérons qu’elles feront.

Les droits de la personne des délinquants purgeant une peine de ressort fédéral

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Je vous remercie d’être ici aujourd’hui, monsieur le ministre. En juin dernier, le Comité sénatorial permanent des droits de la personne vous a écrit pour exprimer ses préoccupations au sujet de la réponse insatisfaisante du gouvernement à son rapport intitulé Droits de la personne des personnes purgeant une peine de ressort fédéral.

La réponse n’a pas pris au sérieux les diverses recommandations du comité et semble ne pas en avoir tenu compte, ce qui est particulièrement troublant étant donné la nature, le degré et la gravité des violations des droits qui ont été constatées et entendues par le comité dans le cadre de son étude. Nous continuons de constater et d’entendre des cas lorsque nous visitons des prisons.

Monsieur le ministre, quand pouvons-nous nous attendre à une réponse complète au rapport du comité, qui indiquera clairement la position du gouvernement à l’égard de chaque recommandation et qui offrira une explication et donnera un échéancier des mesures à prendre?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Sénatrice, je vous remercie d’avoir soulevé la question des droits des détenus sous responsabilité fédérale. Comme vos collègues du comité et comme, je l’espère, un certain nombre de parlementaires, j’ai eu l’occasion de visiter des établissements correctionnels fédéraux. Je travaille avec le Service correctionnel du Canada sur des enjeux importants pour garantir le respect des droits des personnes qui purgent une peine dans une prison fédérale.

Différentes mesures sont en place. Nous avons évidemment bien pris en compte le travail effectué par le comité sénatorial. En ce qui concerne la réponse du gouvernement, la tradition ou pratique de longue date veut qu’on axe la réponse du fédéral sur une série de recommandations. Une partie des recommandations et des témoignages présentés dans le rapport du comité concernaient un certain nombre de ministères.

Je peux vous assurer que le Service correctionnel du Canada, dont je suis responsable, prend très au sérieux le rapport, les recommandations qu’il contient, le travail accompli et les témoignages entendus au comité. Nous cherchons toujours des façons de garantir le respect des droits des détenus des établissements correctionnels fédéraux. Votre rapport sera assurément pris en compte dans les efforts qui continuent d’être déployés.

La sénatrice Bernard : Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, nous ne voyons aucun signe que les recommandations sont prises très au sérieux. Nous pouvons assurément vous communiquer des demandes que nous envoient des prisonniers concernant le non-respect continuel de leurs droits. Le comité se fera un plaisir de se réunir avec vous et avec d’autres personnes pour examiner plus avant les recommandations et les réponses à apporter à ces préoccupations très graves.

(1740)

M. LeBlanc : Sénatrice, je vous remercie pour votre offre. Je serais heureux d’accepter une réunion avec vous et vos collègues au comité pour parler du rapport.

C’est avec plaisir que je me ferais accompagner par la commissaire du Service correctionnel du Canada ou par d’autres responsables qui devraient eux aussi prendre part à cette discussion.

Je partage entièrement la préoccupation exprimée dans le rapport et, comme je l’ai dit, elle a été exprimée par plusieurs des témoins qui se sont présentés devant votre comité. En tant que gouvernement, nous pouvons toujours poursuivre ce travail important.

Pour ce qui est du Service correctionnel du Canada, j’ai confiance dans le travail qu’il accomplit. J’ai vu le travail difficile que font ces femmes et ces hommes, mais je partage également votre sentiment concernant l’obligation qui est la leur de s’assurer que les droits des personnes dont ils ont la charge sont respectés.

La réforme de la libération sous caution

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le ministre, en juillet, les premiers ministres de chacune des provinces ont signé une lettre demandant au gouvernement de revoir à fond le projet de loi C-48, qui propose une piètre réforme de la libération sous caution. Leur demande fait suite au meurtre de Tori Dunn, âgée de 30 ans, qui a été poignardée à mort dans son domicile de Surrey, en Colombie-Britannique. Le présumé meurtrier avait été libéré de prison à peine quelques jours plus tôt, malgré ses longs antécédents criminels et le fait qu’il devait faire face à d’autres accusations.

Monsieur le ministre, pourquoi le ministre de la Justice et vous avez-vous rejeté aussi rapidement cette demande pourtant raisonnable des premiers ministres provinciaux?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Monsieur le sénateur, à titre de ministre des Affaires intergouvernementales, je m’entretiens souvent avec les premiers ministres des provinces. Comme je l’ai dit, le premier ministre Ford et moi-même avons discuté de cette question pas plus tard que vendredi, c’est-à-dire il y a 10 jours.

Nous avons travaillé en collaboration depuis la réunion du Conseil de la Fédération. Vous faites référence à la réunion du Conseil de la Fédération qui s’est tenue en juillet dernier. Il y a plus d’un an, le Conseil de la Fédération a lui aussi demandé de travailler avec nous pour apporter des amendements importants à la réforme sur la mise en liberté sous caution, ce que nous avons fait dans un esprit de collaboration avec les gouvernements provinciaux. Ce fut un exercice positif de la présente législature.

Nous cherchons toujours des moyens de garantir un juste équilibre entre le fait de respecter le droit constitutionnel des gens à la présomption d’innocence jusqu’à preuve du contraire, et le fait de reconnaître l’importante nécessité, pour la sécurité publique, de garder des personnes incarcérées avant leur procès. Cette décision, comme vous le savez, est principalement entre les mains de juges nommés par les gouvernements provinciaux. Elle peut être révisée par les cours supérieures. Il y a une procédure en place. Les procureurs provinciaux peuvent faire appel des décisions avec lesquelles ils sont en désaccord.

Il ne s’agit pas uniquement d’une séparation claire entre un instrument législatif et un autre. Il s’agit d’une question très importante pour la sécurité publique. Je partage cette préoccupation et je travaille avec les premiers ministres et d’autres personnes pour assurer un bon équilibre.

La sénatrice Martin : Selon une réponse à une question écrite présentée à l’autre endroit, en 2022, 256 personnes ont été accusées d’homicide alors qu’elles étaient en liberté sous caution ou sous une autre forme de libération conditionnelle, ce qui équivaut à 29 % de tous les homicides commis cette année-là.

Monsieur le ministre, que faudra-t-il de plus pour que le gouvernement libéral prenne les conséquences de ses politiques au sérieux? Allez-vous mettre fin à la politique du catch-and-release — sitôt arrêté, sitôt relâché?

M. LeBlanc : Sénatrice, quand vous utilisez l’expression catch-and-release, c’est une formule qui, là encore, a été pondue dans le bureau de votre leader ou par je ne sais pas trop qui. Comme le savent les sénateurs de ma province, le Nouveau-Brunswick, elle se rapporte habituellement à la pêche au saumon. C’est à ce domaine qu’il convient de la réserver.

Les décisions sont prises par des juges indépendants. Ce sont les procureurs qui s’opposent à la libération de certaines personnes, puis un processus judiciaire s’ensuit. Il y a des procédures d’appel. Le Parlement, lui, a la responsabilité de veiller à ce que les lois relatives aux récidivistes violents soient appropriées. Je suis heureux de continuer à travailler avec les parlementaires afin de bien faire les choses à ce chapitre.

[Français]

Les relations avec le gouvernement

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le ministre, vous êtes ministre des Affaires intergouvernementales. Le gouvernement Trudeau est, de loin, le gouvernement le plus centralisateur de l’histoire du pays. Il s’est immiscé dans la santé, les affaires sociales, les garderies, la gestion des universités, le choix des professeurs, la protection des consommateurs, la gestion de la forêt, les relations avec les municipalités et j’en passe. Vous n’avez aucune gêne à vous ingérer dans les champs de compétence des provinces, au point où le premier ministre Legault a demandé ce matin au Bloc québécois de vous congédier.

Quelle est votre vision du gouvernement fédéral? Êtes-vous un gouvernement supérieur aux provinces?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Pas du tout, sénateur. Au contraire, je fais toujours attention de parler d’ordre de gouvernement et non de niveau de gouvernement, précisément pour reconnaître exactement le point que vous soulevez. Cependant, notre gouvernement a décidé de collaborer avec les provinces partout au pays sur certaines priorités partagées.

J’ai une relation tout à fait constructive avec le ministre Jean-François Roberge. Je l’aime beaucoup. Je vais peut-être le voir la semaine prochaine à Montréal. Nous avons établi des relations cordiales et constructives avec nos homologues des provinces. Nous demeurons toutefois concentrés sur les besoins des Canadiens, que ce soit en matière de services de garde ou dans bien d’autres compétences parfois partagées. Quand il s’agit d’une compétence provinciale, on veut évidemment signer une entente avec les provinces afin de transférer des fonds fédéraux. Nous avons eu un certain succès à cet égard. Vous comprendrez que je ne peux pas parler ni pour le Bloc québécois ni pour le premier ministre Legault. Ils sont tout à fait capables de le faire pour eux-mêmes.

Le sénateur Carignan : Monsieur le ministre des Relations cordiales, votre collègue Marc Miller a dit cette semaine que trois premiers ministres provinciaux étaient des « nonos ». Personne ne l’a corrigé. Le premier ministre ne l’a pas corrigé et il ne s’est pas excusé. Il n’y a eu aucune excuse. Ce sont les mots que vous utilisez en public. En privé, comment les appelez-vous?

M. LeBlanc : Je les appelle mes collègues. J’appelle Jean-François, Jean-François. En privé, nous avons des discussions tout à fait cordiales et, je crois, constructives.

Vous avez oublié, monsieur le sénateur, de souligner que certains premiers ministres conservateurs ont complètement exagéré les chiffres sur les demandeurs d’asile potentiels qui seront transférés, ou pour lesquels nous allons travailler avec les gouvernements dans le but de les transférer dans leur province. Si un premier ministre conservateur décide de faire peur aux gens en exagérant de façon épouvantable l’ébauche d’un chiffre dans un document de travail, je suis d’avis que le fait que mon collègue décide de corriger le tir est tout à fait approprié.

Les répercussions de l’intelligence artificielle

L’honorable René Cormier : Bienvenue, monsieur le ministre. Monsieur le ministre, votre gouvernement investit dans le développement de l’intelligence artificielle, notamment par le biais de sa Stratégie pancanadienne en matière d’intelligence artificielle. Si cette technologie est capable de transformer la société canadienne, elle pose également des risques importants pour la protection et l’intégrité de nos institutions démocratiques. Dans ce contexte, monsieur le ministre, quelle stratégie interministérielle mettez-vous en place pour garantir que cette technologie ne compromette pas la sécurité et l’intégrité de nos institutions démocratiques? Surtout, comment vous assurez-vous que tous les ministères mettent la main à la pâte pour assurer l’intégrité de nos institutions démocratiques?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Sénateur Cormier, merci pour votre question très importante. Je partage votre inquiétude par rapport aux situations où l’intelligence artificielle peut miner la confiance des Canadiens dans nos institutions démocratiques ou alors, dans le pire scénario, contribuer d’une quelconque manière à ne pas avoir des institutions démocratiques qui sont irréprochables et qui font l’envie d’autres démocraties dans le monde. J’ai tout à fait confiance dans le travail d’Élections Canada. J’ai tout à fait confiance dans le travail des ministères.

Dans votre question, vous avez aussi évoqué l’importance de différents ministères au sein de notre gouvernement. Dans mon cas, ce sont des agences de sécurité et la GRC. Je sais que mon collègue le ministre responsable de l’innovation est énormément impliqué sur une base horizontale, pour utiliser un terme de fonctionnaire, auprès de différents ministères du gouvernement afin de s’assurer précisément que, comme vous l’avez dit, cette technologie qui peut révolutionner énormément de choses ne finisse pas par miner la confiance des Canadiens ou à nuire à notre pays en donnant raison aux adversaires du Canada, qui cherchent à semer le doute ou la désinformation.

Le système électoral

L’honorable René Cormier : Les élections fédérales arrivent à grands pas; je crois que c’est pour bientôt. Le projet de loi C-65, Loi sur la participation électorale, vise notamment l’utilisation malveillante de l’intelligence artificielle dans le processus électoral. Le projet de loi C-26 sur la cybersécurité a franchi l’étape de la deuxième lecture aujourd’hui.

À la lumière de votre mandat, comment pouvez-vous rassurer la population canadienne par rapport au fait que vous aurez tout en main, au moment des élections, pour assurer l’intégrité du processus électoral, monsieur le ministre?

(1750)

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Sénateur Cormier, c’est une très bonne question. Vous avez fait énormément plaisir à votre collègue le sénateur Carignan quand vous avez annoncé que les élections arrivaient à grands pas. Vous auriez dû voir son sourire. Il était presque aussi grand que le vôtre.

Je ne sais pas quand il y aura des élections. Nous n’avons pas l’intention de voter contre notre propre gouvernement.

Vous avez cité deux projets de loi importants visant à renforcer nos institutions démocratiques, dont le projet de loi C-65 que j’ai déposé. Ce projet de loi est un pas important que nous faisons dans le but d’améliorer la sécurité contre l’ingérence étrangère et d’augmenter la participation électorale. J’espère que nous aurons la chance d’adopter ces projets de loi dans les deux Chambres. Nous ne sommes pas responsables des dérapages qui se produisent dans notre assemblée. J’ai bien hâte de travailler avec tous les parlementaires.

[Traduction]

L’ingérence étrangère

L’honorable Peter M. Boehm : Monsieur le ministre, dans mon discours à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-70, j’ai fait une modeste proposition : que le gouvernement veille à ce que les parlementaires et leur personnel, dans les deux Chambres, assistent à des séances d’information détaillées sur les différences entre l’ingérence étrangère et l’influence étrangère, conformément à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques et à la Convention de Vienne sur les relations consulaires. Pensez-vous que c’est une bonne idée?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Je pense que c’est une excellente idée, monsieur le sénateur. Vous avez une longue expérience en tant que haut fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères. Vous êtes certainement mieux placé que moi pour connaître les détails de cette importante distinction, car c’est justement là où le bât blesse. Les activités diplomatiques normales que mènent les pays, de manière tout à fait acceptable, ne constituent pas de l’ingérence étrangère, car celle-ci implique forcément une intention malveillante. Dans bien des cas, l’ingérence s’exerce dans l’opacité, souvent au moyen d’agents mandataires. Comme vous avez déjà travaillé au ministère des Affaires étrangères, sénateur, vous connaissez sûrement des exemples que je ne connais pas.

Plus nous aiderons les gens à tirer au clair cette différence importante, mieux ils seront en mesure de participer adéquatement à un processus démocratique tout à fait normal et positif, de comprendre les points de vue des différents gouvernements et de rencontrer les diplomates qui défendent ces points de vue. Ainsi, les parlementaires de cette Chambre ou de la nôtre, ainsi que les gens qui travaillent avec eux, devraient avoir l’assurance qu’ils font les choses de la bonne façon et qu’ils sont capables de faire la distinction absolument cruciale entre une tentative malveillante de s’ingérer dans les affaires du Canada ou dans le processus démocratique et les activités tout à fait normales et protégées que le Canada mène dans d’autres pays et que nous invitons d’autres pays à mener au Canada également.

Le sénateur Boehm : Merci, monsieur le ministre. Seriez-vous prêt à demander à vos fonctionnaires de déterminer quelles sont les pratiques exemplaires dans d’autres pays — et je pense en particulier à nos partenaires du Groupe des cinq — et comment elles pourraient être appliquées ici?

M. LeBlanc : Tout à fait, monsieur le sénateur. Je le ferai avec plaisir. Une réunion ministérielle du Groupe des cinq est prévue la semaine prochaine. Je suis heureux de demander à mon ministère et à des groupes comme le Service canadien du renseignement de sécurité et d’autres de préparer des renseignements sur les pratiques exemplaires. Vous avez raison : le Groupe des cinq serait le meilleur endroit où commencer à examiner ces pratiques exemplaires. Je serais heureux de travailler avec les représentants compétents du Sénat et de la Chambre des communes pour mettre ces renseignements à la disposition des sénateurs et des personnes qui travaillent avec vous. Je le ferai avec plaisir, sénateur. Je vous remercie.

La cybersécurité

L’honorable Colin Deacon : Merci, monsieur le ministre, d’être avec nous. Il semble que les criminels internationaux considèrent que le Canada est un pays de plus en plus profitable où commettre des vols d’identité et de la fraude. Cela représente des risques importants pour la sécurité des citoyens et l’intégrité de notre économie. Même si le gouvernement a fait d’importants progrès pour ce qui est de renforcer notre cadre de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes, l’intelligence artificielle générative facilite déjà une cybercriminalité de plus en plus sophistiquée.

Ma question porte sur l’échec du Canada pour ce qui est de mettre à profit les solutions canadiennes. Votre mandat consiste notamment à travailler avec le ministre Champagne pour appuyer les entreprises à forte intensité de propriété intellectuelle ainsi que l’adoption et la mise à niveau de la technologie. Pourtant, selon une récente analyse de la Presse canadienne, les principales entreprises canadiennes de cybersécurité réussissent beaucoup mieux à vendre leurs produits lorsqu’elles font affaire avec des gouvernements étrangers plutôt qu’avec le gouvernement de leur propre pays.

Que fait le gouvernement pour faire en sorte que les investissements du Canada dans la recherche et l’innovation en matière de cybersécurité aident à protéger les Canadiens et pas seulement le reste du monde?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Je vous remercie de votre question, sénateur, et d’avoir souligné à juste titre le leadership de nombreuses entreprises canadiennes dans ce domaine important. Pour répondre à la question de l’intervenant précédent, nos partenaires du Groupe des cinq m’ont dit à quel point les organismes de renseignement et d’application de la loi dans leur pays apprécient le travail accompli par les entreprises canadiennes. Tout comme vous, il me semblerait bien curieux que nous vendions cette technologie ou ce savoir-faire à des gouvernements partenaires étrangers sans tirer profit de cette innovation ici au Canada.

Comme vous l’avez noté à juste titre, le ministre de l’Innovation et moi travaillons dans ce domaine. Une grande partie du travail est effectuée par le Centre de la sécurité des télécommunications — comme vous le savez, sénateur —, un organisme qui relève du ministère de la Défense nationale. Cependant, je serai heureux de retourner auprès de mes fonctionnaires et de discuter avec mes collègues Bill Blair et François-Philippe Champagne de la manière dont nous pouvons nous assurer que cette situation plutôt curieuse ne se poursuit pas.

J’ai également remarqué qu’un certain nombre d’établissements d’enseignement tels que l’Université du Nouveau-Brunswick et l’Institut Frank McKenna là-bas ont effectué un travail remarquable avec un certain nombre de partenaires du secteur privé. Je m’efforce d’encourager ce travail et je ne voudrais pas, par inadvertance, faire quelque chose qui le découragerait. Je serai heureux de donner suite à cette question très importante.

Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Savez-vous que le programme Solutions innovatrices Canada — qui vise à réunir les innovateurs du gouvernement et ceux des entreprises financées par le Canada afin de trouver des solutions novatrices aux grands problèmes canadiens — a été amputé de 50 % par votre gouvernement en février dans le cadre de la réaffectation des fonds? C’est l’un des problèmes concernant ces programmes qui fonctionnent — 1 $ investi dans ce programme a généré 1,50 $ de nouveaux impôts en cinq ans et 3 $ de croissance du PIB. Pourtant, ce programme a été amputé alors qu’il était l’un des moyens qui permettaient de réaliser une partie de ce travail. Il faut donc y prêter attention. J’espère que vous comprenez ce paradoxe.

M. LeBlanc : Monsieur le sénateur, le paradoxe auquel je faisais allusion, c’est que des entreprises canadiennes vendraient des technologies à d’autres gouvernements partenaires tout en étant incapables de faire la même chose ici. Je ne voudrais pas que vous attribuiez ce paradoxe aux décisions financières que prendrait ma collègue, la ministre des Finances. Ce n’est pas ce que j’ai dit.

Je reconnais que notre gouvernement a investi de manière significative dans les infrastructures de cybersécurité. Tous les gouvernements doivent le faire. Les entreprises privées le font massivement; les chefs d’entreprise me parlent souvent de leurs investissements dans ce domaine. Je suis donc heureux de chercher le meilleur moyen d’encourager un écosystème canadien du secteur privé qui soit très efficace et qui profite également aux entreprises canadiennes et au gouvernement du Canada.

L’influence étrangère dans les élections canadiennes

L’honorable Rodger Cuzner : Je vous remercie d’être ici, monsieur le ministre. Je sais que cette semaine marque la cinquième année de votre lutte acharnée contre le cancer et de vos traitements. C’est formidable de vous voir ici en bonne santé et de bonne humeur.

Nombre d’entre nous observent avec consternation ce qui se passe au sud de la frontière, où il semble y avoir un effort concerté pour saper les fondements des institutions démocratiques et, plus particulièrement, la confiance des États-Uniens dans leur système électoral. Je pense que les Canadiens continuent d’avoir confiance dans l’intégrité de leur système électoral, mais des questions ont été posées concernant l’ingérence étrangère. Je suppose que cela rejoint la question posée par le sénateur Cormier.

Pouvez-vous dire au Sénat quelles mesures votre gouvernement a prises afin de protéger l’intégrité de notre système électoral?

L’honorable Dominic LeBlanc, c.p., député, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales : Je vous remercie de votre question, sénateur Cuzner. Nous siégions tous les deux à l’autre endroit il y a cinq ans, quand j’ai été atteint d’un lymphome non hodgkinien très agressif. Vous avez raison : c’était hier le cinquième anniversaire du jour où un jeune Allemand de 20 ans m’a donné 570 millions de cellules souches à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont de Montréal. C’est grâce à cette réussite scientifique et médicale remarquable que je suis assis ici aujourd’hui et apparemment en bonne santé. Je vous remercie de le souligner. Quand les médecins attachent le sac de cellules souches à votre intraveineuse, ils disent : « Bienvenue à votre deuxième anniversaire de naissance. » J’ai donc eu 5 ans hier. Merci de le souligner, sénateur Cuzner.

(1800)

Vous avez tout à fait raison. Nous nous tournons vers les États-Unis et discutons avec le procureur général des États-Unis, comme je l’ai fait il y a deux semaines, et avec le secrétaire à la sécurité intérieure, de ce que nous pouvons faire pour apprendre les uns des autres en vue de renforcer nos institutions démocratiques.

J’ai une grande confiance dans la résilience et la force des institutions démocratiques canadiennes. C’est important de le dire, et on ne le dira jamais assez. J’ai la chance de voir de près le travail que font les agences de sécurité. Je constate la force et l’intégrité de nos institutions démocratiques. Je connais le travail accompli par Élections Canada et les organismes provinciaux chargés d’administrer les élections. Je vois aussi le travail remarquable que font les Canadiens pour comprendre et renforcer la capacité des institutions démocratiques à élire le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les administrations municipales.

Sénateur, comme vous l’avez souligné, depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons pris des mesures sans précédent pour rendre les institutions démocratiques plus résistantes à l’ingérence étrangère, en particulier. C’est en 2013 que le Service canadien du renseignement de sécurité a parlé publiquement pour la première fois du risque que pose l’ingérence étrangère. Notre gouvernement a été le premier à prendre des mesures sérieuses à cet égard.

Votre Honneur, votre greffier a oublié de se lever. Je croyais qu’il me permettait de...

Le sénateur Cuzner : Monsieur le ministre, le projet de loi C-65 modifie la Loi électorale du Canada, et je me réjouis des efforts déployés pour accroître la participation électorale. Pourriez-vous nous parler brièvement de certaines des dispositions de ce projet de loi?

M. LeBlanc : Sénateur Cuzner, je vous remercie à nouveau. Vos collègues ont parlé de ce projet de loi qui, selon nous, fait deux choses importantes. Nous avons suivi les recommandations du directeur général des élections et d’Élections Canada concernant le renforcement des institutions démocratiques contre l’ingérence étrangère en interdisant, par exemple, les cryptomonnaies et les cartes-cadeaux prépayées comme moyens de contribuer pour assurer une plus grande transparence du financement du processus électoral. Il s’agit souvent d’un moyen par lequel des acteurs hostiles cherchent à s’ingérer dans le processus démocratique canadien, et le projet de loi comporte donc des éléments importants à cet égard.

Il rend également plus accessibles des éléments comme les bulletins de vote postal. De plus en plus, les Canadiens veulent pouvoir participer aux élections au moyen du système postal d’une manière qui, bien entendu, assure le plus haut niveau d’intégrité. Ce ne sont là que quelques exemples, et il y en a bien d’autres, sénateur Cuzner.

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, le temps alloué à la période des questions est écoulé. Je suis certaine que vous vous joindrez à moi pour remercier le ministre LeBlanc d’avoir comparu devant nous aujourd’hui et pour souligner cinq ans de retour à la santé. Nous reprenons maintenant les délibérations interrompues au début de la période des questions. Merci, monsieur le ministre.

Des voix : Bravo!

(À 18 h 3, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 24 septembre 2024, à 14 heures.)

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