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LA STbr ET LE PROCESSUS D'APPROBATION DES MÉDICAMENTS

Rapport intérimaire

Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts

Le président : L’honorable Leonard J. Gustafson

Le vice-président : L’honorable Eugene F. Whelan, c.p., o.c. 

Mars 1999


COMPOSITION DU COMITÉ

 

L’honorable Leonard J. Gustafson, président
L’honorable Eugene F. Whelan, c.p., o.c., vice-président

et 

Les honorables sénateurs :

Chalifoux, Thelma Robichaud, Fernand, c.p.
Fairbairn, Joyce, c.p. Rossiter, Eileen
*Graham, Alasdair B., c.p. (ou Carstairs, Sharon) Sparrow, Herbert
Hays, Daniel Spivak, Mira
*Lynch-Staunton, John, c.p. (ou Kinsella, Noel A.) Stratton, Terry
Rivest, Jean-Claude Taylor, Nicholas

 

*Membres d’office

 

Note : Les honorables sénateurs Ghitter, Mahovlich et Milne ont été membres ou ont assisté à des séances à diverses étapes de cette étude.

 

Personnel du Service de recherche parlementaire, Bibliothèque du Parlement :

Mme June Dewetering et M. Frédéric Forge
Attachés de recherche

 

 Le greffier du comité
Blair Armitage


ORDRE DE RENVOI

 

Extrait des Journaux du Sénat du jeudi 14 mai 1998 :

L’honorable sénateur Whelan, c.p., propose, appuyé par l’honorable sénateur Robichaud, c.p. (L’Acadie-Acadia),

QUE le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, l’hormone de croissance recombinante bovine et ses effets sur la santé des humains et des animaux.

Après débat,

La motion, mise aux voix, est adoptée.

 

Le greffier du Sénat
Paul Bélisle


TABLE DES MATIÈRES

 

SOMMAIRE

LISTE DES RECOMMENDATIONS

LISTE DES SIGLES

Introduction

Le processus d’approbation des médicaments

A. Le processus
B. Le processus et la STbr
C. Conclusions

Les témoignages concernant la STbr

A. L’innocuité de la STbr pour les humains
B. L’innocuité de la STbr pour les animaux
C. Autres aspects de la STbr

La gestion à la Direction générale de la protection de la santé de Santé Canada

A. Résoudre les différends
B. Comité consultatif mixte de gestion du programme
C. Accès à l’information
D. Normes de rendement

Accès à l’information

A. Pour le Comité
B. Pour le public

Conclusion

ANNEXE 1

DÉFINITION DU PRINCIPE DE PRUDENCE ET DE LA GESTION DU RISQUE

A. Principe de prudence
B. Gestion du risque

ANNEXE 2

LA COMMISSION DU CODEX ALIMENTARIUS ET LE COMITÉ MIXTE D’EXPERTS DES ADDITIFS ALIMENTAIRES

ANNEXE 3

ACCÈS À L’INFORMATION

ANNEXE 4

TÉMOINS


SOMMAIRE

Le 5 mai 1998, le Sénat du Canada a adopté à l’unanimité une motion exhortant le gouvernement à différer d’au moins un an l’homologation de la somatotropine bovine recombinante (STbr), jusqu’à ce que les risques à long terme pour la santé publique soient connus.

La somatotropine bovine recombinante est un produit vétérinaire non thérapeutique, issu du génie génétique, qui accroît la production de lait chez la vache. Depuis plus de 10 ans, l’effet à long terme de la STbr sur les animaux et sur l’homme fait l’objet de controverse. En 1990, Santé Canada a reçu la demande d’un fabricant qui voulait vendre la STbr au Canada. Quand le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a commencé à tenir des audiences publiques le 4 juin 1998, Santé Canada n’avait pas terminé son examen de la STbr. Pendant l’étude des effets de la STbr sur l’homme et sur les animaux, le Comité a entendu Monsanto Canada, des scientifiques et des fonctionnaires de Santé Canada, des scientifiques étrangers, des producteurs et des transformateurs de lait ainsi que des groupes d’intérêt public. En outre, plus de 400 Canadiens ont écrit au Comité.

Le Comité s’est fait expliquer le processus d’approbation des médicaments du Canada, à la fois en termes généraux et dans le cas particulier de la STbr. De l’avis de certains témoins, Monsanto ne répondait pas aux normes de présentation de données qui sont applicables aux nouveaux médicaments. En outre, de l’avis des évaluateurs du Bureau des médicaments vétérinaires de Santé Canada, les aspects touchant la sécurité pour l’animal et pour l’homme n’ont pas tous été traités correctement dans l’évaluation de drogue nouvelle réalisée par le Ministère.

Le 14 janvier 1999, Santé Canada a annoncé son refus d’approuver la vente de la STbr au Canada, en citant les résultats de deux comités experts formés pour évaluer l’hormone. Immédiatement, Monsanto a annoncé son intention de poursuivre ses efforts pour faire approuver le produit. Convaincu de la nécessité de nouvelles études, le Comité recommande qu’on n’autorise pas la STbr tant qu’on n’aura pas examiné d’études à long terme sur la santé humaine. Il recommande également que Santé Canada envisage de demander l’étude déjà réclamée sur l’innocuité et l’efficacité du produit pour l’animal.

De nombreux témoins ont dit au Comité leur inquiétude face au processus d’autorisation des produits pharmaceutiques en général. Certains Canadiens estimeraient que c’est l’industrie, plutôt que le public canadien, qui constitue le véritable client de Santé Canada. Le Comité prend cette inquiétude au sérieux et formule plusieurs recommandations destinées à renforcer la confiance du public. Il recommande que le gouvernement procède à une évaluation du processus d’autorisation des produits pharmaceutiques, et que Santé Canada explore des mécanismes de consultation publique permanente. On recommande également la création d’un mécanisme de débat public permanent sur les aspects économiques, commerciaux, sociaux, moraux et autres des produits pharmaceutiques et des instruments médicaux.

Plusieurs témoins ont signalé la possibilité que l’industrie privée influence le processus d’approbation et le risque de conflit d’intérêts; ils ont mentionné également l’impact potentiel des décisions prises par des organismes internationaux. Des témoins ont contesté la participation de l’industrie au Comité consultatif mixte de gestion du programme du Bureau des médicaments vétérinaires ainsi que sa présence à la Commission du Codex Alimentarius et au Comité mixte d’experts sur les additifs alimentaires. Nous estimons que les Canadiens doivent recevoir l’assurance que la décision d’autoriser un produit pharmaceutique est prise au pays. Il recommande que ce soit les évaluateurs de Santé Canada qui prennent cette décision, en reconnaissant que l’opinion des groupes externes et des organes internationaux peuvent compléter l’examen. Pour rassurer la population sur le processus d’approbation, le Comité recommande également le respect intégral des directives de Santé Canada en matière de conflit d’intérêts lors de la nomination des membres aux groupes de travail externes et de représentants canadiens aux organes internationaux.

Des témoins ont fait part des problèmes de gestion au Ministère, et formulé des allégations de pressions, de coercition, de vol de documents et de loi du silence. Le Comité estime que les meilleures décisions sont prises dans une atmosphère de confiance et recommande que les fonctionnaires de Santé Canada comparaissent devant lui afin de le renseigner sur les mesures prises pour résoudre ces problèmes.

Enfin, le Comité a eu du mal à recevoir l’information de Santé Canada. Convaincu que les comités parlementaires ont besoin d’une information complète pour s’acquitter de leur responsabilité face aux Canadiens, il recommande que les ministères fédéraux répondent de la façon la plus rapide et complète possible aux demandes d’information des comités en utilisant le huis clos pour les renseignements privatifs.

Le comité entend tenir d’autres audiences pour entendre les témoignages de comités experts qui ont évalué la STbr et d’autres parties qui ont exprimé des inquiétudes persistantes.


LISTE DES RECOMMENDATIONS

  1. Le Comité recommande que Santé Canada s’assure de la pleine conformité à ses directives en matière de conflits d’intérêts. En cas d’apparence de conflits d’intérêts, Santé Canada devrait déclarer publiquement pourquoi il accepte la nomination de personnes à l’égard desquelles il y a apparence de conflit (page 10).

  2. Le Comité recommande que les décisions concernant l’innocuité des médicaments pour les humains, et l’innocuité et l’efficacité des médicaments pour les animaux, soient laissées aux évaluateurs de Santé Canada (page 12).

  3. À la suggestion de certains témoins, le Comité recommande que le gouvernement évalue le processus d’approbation des médicaments de Santé Canada pour s’assurer qu’il protège pleinement la santé et la sécurité des humains et des animaux. Cette évaluation devrait être faite par des experts indépendants, soit de concert avec toute vérification de suivi menée par le vérificateur général du Canada à la Direction générale de la protection de la santé, soit en vue d’un examen ultérieur du vérificateur général (page 14).

  4. Le Comité recommande de n’émettre aucun avis de conformité pour la STbr avant que le fabricant présente les études à long terme que le groupe d’examen interne sur la STbr de Santé Canada juge comme de l’information manquante dans sa présentation ou qu’un examen de ces études indique plus précisément s’il y a des risques pour la santé humaine (page 19).

  5. Le Comité recommande que Santé Canada réclame l’étude exigée par les évaluateurs de l’ancienne Division des médicaments endocriniens, antiparasitaires et du système nerveux central, pour satisfaire aux dispositions de l’alinéa C.08.004.(2) du Règlement sur les aliments et drogues (page 20).

  6. Le Comité recommande qu’une fois la santé humaine et animale, et l’innocuité du produit assurées, le gouvernement établisse un mécanisme continu favorisant le débat public des questions économiques, commerciales, sociales, morales et autres entourant les médicaments et les instruments médicaux analysés par Santé Canada. Ce mécanisme devrait faire intervenir au besoin l’Agence canadienne d’inspection des aliments et pourrait résulter de l’Initiative de transition de la Direction générale de la protection de la santé (page 23).

  7. Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts recommande que les fonctionnaires de Santé Canada soient rappelés devant lui en juin 1999 au plus tard pour l’informer des mesures prises pour résoudre les problèmes de gestion relevés dans le présent rapport (page 24).
  8.  

  9. Le Comité recommande qu’un ministère fédéral auquel un comité parlementaire réclame de l’information réponde à cette demande complètement et le plus rapidement possible. L’information sur laquelle le ministère estime avoir des droits de propriété devrait être présentée au Comité à huis clos, justification de confidentialité à l’appui (page 26).

  10. Le Comité recommande que Santé Canada, en particulier la Direction générale de la protection de la santé, envisage des moyens permettant de poursuivre de la consultation du public, et de lui conserver l’accès à l’information, après l’Initiative de transition (page 26).

LISTE DES SIGLES

AC :

un avis de conformité

BMV :

Bureau des médicaments vétérinaires

CEE :

Certificats d’études expérimentales

CMEAA :

Comité mixte d’experts des additifs alimentaires

DIH :

Division de l’innocuité pour les humains

DNR :

Drogue nouvelle de recherche

FAO :

Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture

FDA :

Food and Drug Administration

IGF-1 :

Facteur 1 de croissance de substances apparentées à l’insuline

OMC :

Organisation mondiale du commerce

OMS :

Organisation mondiale de la santé

PDN :

Présentation de drogue nouvelle

rBGH :

Hormone de croissance recombinante bovine

SNC :

Système nerveux central

STbr :

Somatotropine bovine recombinante

UE :

Union européenne


Introduction

Le 5 mai 1998, le Sénat du Canada a adopté une motion unanime, présentée par l’honorable sénateur Eugene F. Whelan, c.p. o.c., et appuyée par l’honorable sénateur Céline Hervieux-Payette, c.p., exhortant le gouvernement « à attendre au moins un an avant d’autoriser l’utilisation de la STbr ... et, par la suite, aussi longtemps que des études scientifiques n’auront pas été élaborées, appliquées et menées à terme, dont les conclusions permettront au gouvernement soit de déterminer exactement les risques à long terme pour la santé des Canadiens et des Canadiennes ou, autrement, de leur garantir publiquement que l’utilisation de cette hormone de croissance ne comporte pas de risque pour leur santé ». Suite à cette motion, le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a ouvert, le 4 juin 1998, des audiences publiques sur les effets de la STbr sur la santé et la sécurité des humains et des animaux. Cette étude n’est pas la première étude parlementaire sur la STbr; en 1994, le Comité permanent de l’agriculture de la Chambre des communes a tenu des audiences sur la question et recommandé que, « pour donner à l’industrie laitière le temps de s’ajuster et répondre au besoin du public de s’informer davantage concernant la STbr, ... le gouvernement fédéral légifère un moratoire d’un an sur l’utilisation de la somatotropine bovine au Canada. » Il a aussi recommandé que « la période de moratoire d’un an serve à examiner de plus près l’impact de la STbr synthétique sur : les coûts et les avantages pour l’industrie laitière canadienne; la santé animale, y compris les contraintes exercées sur les animaux de destination; la génétique animale; et les réactions des consommateurs américains et toute question de santé humaine d’actualité. ».

La somatotropine bovine recombinante (STbr), ou hormone de croissance recombinante bovine (rBGH) comme on l’appelle aussi, a semé la controverse, au Canada et à l’étranger, pendant plus d’une décennie. Santé Canada n’a pas approuvé la vente ou l’utilisation de la STbr au Canada. Médicament vétérinaire non thérapeutique issu du génie génétique, cette hormone permettrait une augmentation de la production laitière atteignant de 10 à 15 p. 100 lorsque administrée à des vaches allaitantes. Selon plusieurs sources, y compris des présentations faites devant le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, les effets potentiels de l’hormone à long terme sur les animaux auxquels on l’a administrée et sur les humains qui ont consommé les produits de ces animaux sont controversés.

Au cours de son étude, le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a entendu des représentants de Monsanto Canada, un fabricant de médicaments qui veut vendre la STbr au Canada; des chercheurs et des cadres supérieurs de Santé Canada; des chercheurs des États-Unis et de l’Australie, des producteurs laitiers, des entreprises de transformation des produits laitiers; et des groupes d’intérêt public de divers pays. En outre, plus de 400 Canadiens ont fait part par écrit de leurs préoccupations concernant la STbr. Le présent rapport résume les témoignages entendus par le Comité et contient des recommandations à plusieurs égards. Même si Santé Canada a annoncé le 14 janvier 1999 qu’il n’approuvera pas la vente de STbr au Canada, le Comité formule des recommandations précises concernant la STbr; ces recommandations pourraient être importantes à la lumière de l’intention de Monsanto de poursuivre ses efforts en vue de l’homologation du produit. Le Comité formule également des recommandations concernant l’homologation des médicaments en général, puisque son étude a fait ressortir certaines préoccupations relatives au processus d’approbation.

Le Comité est d’avis que ces audiences et le présent rapport jetteront de la lumière sur la question de l’utilisation de la STbr au Canada et à l’étranger, et sur le processus d’approbation des médicaments. À la lumière des renseignements rendus publics par le Sénat du Canada, deux sénateurs américains, plusieurs groupes de défense de l’intérêt public et d’autres intervenants exhortent la U.S. Food and Drug Administration de revoir ses conclusions concernant la STbr. De plus, le Comité espère que ses recommandations aideront Santé Canada à faire en sorte que le public et l’industrie aient davantage confiance dans son processus d’approbation des médicaments.


Le processus d’approbation des médicaments

A. Le processus

Seule Santé Canada est responsable d’approuver la vente de tout médicament nouveau au Canada, y compris la STbr. Le Ministère administre la Loi sur les aliments et drogues et son règlement, qui régissent les médicaments thérapeutiques et non thérapeutiques destinés aux humains et aux animaux. Le règlement interdit à quiconque de vendre un médicament nouveau ou d’en publiciser la vente à moins de respecter plusieurs conditions. Avant qu’un médicament nouveau puisse être utilisé, son fabricant doit déposer une présentation de drogue nouvelle (PDN) et Santé Canada doit avoir émis un avis de conformité (AC). Le règlement exige une évaluation de l’innocuité, de la pureté, de l’efficacité, de l’activité et de la stabilité du médicament. De plus, le fabricant doit fournir des données scientifiques qui démontrent que le médicament est efficace et sans danger lorsqu’il est utilisé suivant le mode d’emploi indiqué sur l’étiquette. La disposition C.08.002.(2) du Règlement stipule qu’il faut produire, entre autres choses, des rapports détaillés sur les tests effectués pour établir l’innocuité du médicament nouveau lorsque ce dernier est utilisé aux fins et dans les conditions recommandées; le règlement ne précise toutefois pas quel type d’étude il faut entreprendre. Selon le groupe d’examen interne de la STbr de Santé Canada, la norme en matière de présentation de drogue nouvelle est un ensemble de données comprenant des rapports d’études sur les effets aigus, subaigus et chroniques du produit, d’études de reproduction sur deux générations et d’études tératologiques. Dans le cas d’un médicament pour animaux destinés à l’alimentation, on exige aussi des analyses des résidus pour confirmer les périodes recommandées de retrait du médicament avant la mise en marché du lait ou de la viande.

Santé Canada est tenue par la loi de prendre en considération chaque présentation de médicament, et doit examiner l’information et les données scientifiques fournies par le fabricant. Dans le présent examen, seules les considérations scientifiques sont pertinentes. Si la PDN satisfait à toutes les exigences pertinentes, Santé Canada doit émettre un avis de conformité. Si, toutefois, la présentation ne satisfait pas aux exigences, Santé Canada doit en aviser le fabricant et lui donner la possibilité de compléter l’information ou les données scientifiques demandées. Une fois que la présentation est complète et que son contenu est satisfaisant, Santé Canada émet un avis de conformité. Les évaluateurs de médicaments vétérinaires doivent s’assurer que toutes les questions d’innocuité et d’efficacité ont été réglées avant que l’avis de conformité puisse être émis. Des avis de conformité conditionnels, permettant au fabricant de faire la preuve de l’innocuité de son produit dans le cadre d’un programme de surveillance après approbation, ou du respect de toute autre condition rattachée à l’avis de conformité, ne peut être émis à l’égard des médicaments vétérinaires.

Le Bureau des médicaments vétérinaires (BMV) qui relève de la Direction des aliments de la Direction générale de la protection de la santé, est chargé de l’application de la partie de la Loi sur les aliments et drogues et de son règlement qui porte sur les médicaments vétérinaires. Au sein du BMV, la Division de l’innocuité pour les humains (DIH) évalue les aspects touchant l’innocuité pour les humains de tous les médicaments vétérinaires pour animaux destinés à l’alimentation; la Division de l’évaluation des produits pharmaceutiques, anciennement la Division des médicaments endocriniens, antiparasitaires et du système nerveux central (SNC), évalue l’innocuité et l’efficacité des médicaments pour les animaux cible.

 

B. Le processus et la STbr

Depuis 1984, Monsanto, Elanco et Cyanamid ont fait des demandes à Santé Canada concernant des produits à base de STbr. Ils ont demandé en particulier d’émettre des certificats d’études expérimentales (CEE) à des chercheurs pour mener à bien des projets précis et de faire l’évaluation clinique des drogues nouvelles de recherche (DNR), et ils ont soumis des présentations de drogues nouvelles (PDN) dans le but de commercialiser leurs produits. En octobre 1985, Santé Canada a émis le premier certificat d’études expérimentales pour un produit à base de STbr, concluant que le lait des animaux auxquels on avait administré de la STbr ne présentait aucun danger pour la santé humaine. En 1986, le Ministère a avisé les fabricants que la viande des vaches expérimentales pouvait être vendue à des fins de consommation humaine sans délai de retrait concernant les résidus du produit.

Avant l’annonce du 14 janvier 1999 de Santé Canada, la seule présentation de produit à base de STbr qui est actuellement à l’étude par Santé Canada porte sur le Nutrilac; Monsanto Canada, le fabricant, avait soumis une PDN en février 1990. En mars 1988, Elanco Canada soumettait une PDN pour son produit à base de STbr. Toutefois, à la demande d’Elanco, la demande a été mise en attente en mai 1996 jusqu’à ce qu’on sache ce qu’il adviendrait de la présentation de Monsanto.

Le 12 mars 1990, 21 jours après le dépôt de la présentation de drogue nouvelle de Monsanto, le chef de la Division de l’innocuité pour les humains a écrit au fabricant pour l’aviser qu’il avait satisfait à toutes les exigences en matière d’innocuité pour les humains. En 1995, la Division des médicaments endocriniens, antiparasitaires et du système nerveux central (maintenant la Division de l’évaluation des produits pharmaceutiques) a toutefois refusé à trois reprises d’approuver le produit, alléguant le manque de preuves concernant son efficacité et son innocuité pour les animaux. Les évaluateurs ont fait état des risques potentiels pour les vaches, qu’il s’agisse de mammites, de problèmes de reproduction et de malformations congénitales. Ils ont aussi conclu que le fabricant n’avait pas réussi à démontrer que le produit entraînait une augmentation de la production de lait et ont mis en doute le plan des études qui sous-tendaient la présentation.

En septembre 1996, cinq représentants de Santé Canada ont rencontré deux représentants de Monsanto Canada et trois représentants de Monsanto US pour établir les conditions et le calendrier d’approbation de la STbr. Ils ont convenu, entre autres choses, que l’examinateur principal serait un examinateur du BMV qui serait affecté à plein temps à l’évaluation et serait assisté par un comité consultatif spécial du BMV. En août 1997, les cadres supérieurs de la Direction générale de la protection de la santé s’attendaient à ce que les questions de l’innocuité et de l’efficacité du produit pour les animaux seraient réglées et que l’examen serait complété à l’automne de la même année. Même si le Ministère n’a légalement pas le pouvoir de retarder la publication d’un avis de conformité lorsqu’un examen est complété, il a décidé, de concert avec les représentants de Monsanto, de reporter l’homologation de la STbr jusqu’à ce que la question de son innocuité pour les humains soit évaluée lors d’une réunion du Comité mixte d’experts des additifs alimentaires (CMEAA) prévue pour février 1998. Le CMEAA est un groupe consultatif de la Commission du Codex Alimentarius, un organisme international de normalisation en matière d’alimentation créé en 1962 par l’Organisation mondiale de la santé et par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.

Étant donné que les évaluateurs du BMV ont exprimé des réserves selon lesquelles ils n’avaient pu faire le tour de tous les aspects touchant l’innocuité pour les humains et les espèces cible lors de l’évaluation de la présentation, la Direction générale de la protection de la santé a mis sur pied un groupe d’examen interne en janvier 1998. Le groupe d’examen était composé de deux chercheurs du Bureau des médicaments vétérinaires, d’un chercheur du Bureau de l’innocuité des produits chimiques et d’un autre chercheur de la Direction des produits thérapeutiques. Son mandat était d’examiner les données sur l’innocuité pour les humains et de relever les lacunes sur le plan méthodologique et scientifique. Le groupe d’examen interne a produit deux rapports : le premier rapport sur l’analyse des lacunes, daté du 21 avril 1998, était unanime; le second rapport sur l’examen interne de la STbr, daté du 10 juin 1998, a été signé par les deux chercheurs de Santé Canada n’appartenant pas au Bureau des médicaments vétérinaires.

Entre-temps, la Direction générale de la protection de la santé a commandé à des tiers des évaluations pour faciliter la prise de décisions. Les représentants de Santé Canada ont dit au Comité que ce genre d’évaluation est courante. Deux comités consultatifs d’experts, un chargé d’examiner les aspects de la santé animale et de l’efficacité du produit sous la direction de l’Association canadienne des vétérinaires, et l’autre chargé des aspects de la santé humaine sous la direction du Collège Royal des médecins et chirurgiens du Canada, ont été mis sur pied pour examiner le dossier de la STbr. Les représentants de Santé Canada ont dit au Comité que ces deux organismes ont été choisis pour superviser les comités consultatifs d’experts parce qu’ils ont la réputation d’être compétents, éminents et intègres.

Le 7 septembre 1998, Santé Canada a annoncé qu’une décision concernant l’homologation de la STbr ne serait rendue qu’après la rencontre de la Commission du Codex Alimentarius à Rome, en juin 1999. Il a aussi indiqué que, selon les conclusions de ces comités externes, d’autres études à long terme pourraient être nécessaires. Le 14 janvier 1999, Santé Canada annonçait sa décision de ne pas approuver la STbr et a fait savoir que sa décision était fondée sur « plus de neuf ans d’études détaillées sur l’innocuité de la STbr pour les animaux et les humains, et sur l’examen des conclusions de deux comités externes indépendants ». Le Comité a l’intention de tenir d’autres audiences sur la question de la STbr et d’entendre les témoignages de ces comités consultatifs d’experts.

Le Comité d’étude de la santé humaine a constaté que la consommation des produits des animaux auxquels on avait administré de la STbr ne comportait aucun risque important pour la santé humaine. Il a aussi conclu " que la STbr ne présente aucun risque de cancérogenèse, que le facteur de croissance de substances apparentées à l’insuline, l’IGF-1, induit par la STbr, est négligeable par rapport à l’IGF-1 à l’état naturel, qu’il est peu vraisemblable d’observer une résistance accrue aux antibiotiques et que le risque de réactions allergiques est faible. " Toutefois, le comité a aussi indiqué que, à son avis, Monsanto « devrait être invité à répéter les études de toxicité de la STbr de 90 jours et à explorer s’il y a un risque réel de réactions d’hypersensibilité au seuil de 0,1 mg/kg/jour. »

Le Comité d’étude des effets de la STbr sur la santé animale a toutefois constaté " des risques accrus de mammites, d’infertilité et de boiterie pouvant atteindre respectivement 25, 18 et 50 p. 100. Ces risques accrus et la détérioration générale de la santé de l’animal se traduisent par une augmentation de 20 à 25 p. 100 du risque d’élimination génétique du troupeau ".

Certains membres du Comité ont souligné les risques de conflit d’intérêts au sein de ces deux comités consultatifs d’experts. Par exemple, le Conseil des Canadiens, dans la déclaration qu’il a déposée au Comité, a fait remarquer que le Comité constitué par le Collège royal des médecins et chirurgiens comprend au moins un membre dont les services de conseil ont été rémunérés par Monsanto depuis 1993. À noter toutefois que les membres des deux comités ont rempli des déclarations sur les conflits d’intérêts qui ont été examinées par la direction et le contentieux de Santé Canada. Les représentants du Ministère ont indiqué au Comité que toutes les questions de conflits d’intérêts avaient été examinées et réglées.

Le Comité s’inquiète de l’incidence que les allégations de conflits d’intérêts pourraient avoir, notamment sur la confiance du public dans l’intégrité du processus d’approbation des médicaments. Le présent rapport revient constamment sur la nécessité de renforcer la confiance du public. C’est pourquoi

  1. le Comité recommande que Santé Canada s’assure de la pleine conformité à ses directives en matière de conflits d’intérêts. En cas d’apparence de conflits d’intérêts, Santé Canada devrait déclarer publiquement pourquoi il accepte la nomination de personnes à l’égard desquelles il y a apparence de conflit.

Les membres du Groupe d’examen interne de Santé Canada ont dit au Comité qu’ils avaient relevé des lacunes dans la méthodologie d’évaluation du BMV. Le Rapport sur l’analyse des lacunes, puis le Rapport sur l’examen interne du dossier de la STbr précisent en quoi le traitement de la présentation de la STbr a été atypique. Les auteurs ont constaté que :

  • le fabricant n’avait pas été tenu de produire des études de toxicité chronique, de cancérogénécité ou de fertilité/reproduction/tératogénécité, et que les motifs pour le soustraire à ces exigences n’avaient été fournis que huit ans après l’approbation de l’examen par le chef de la Division de l’innocuité pour les humains;
  • la conclusion initiale de la Division de l’innocuité pour les humains, voulant que le lait et la viande des vaches traitées à la STbr soient sans danger pour la consommation humaine, était fondée sur une preuve qui n’a pas été décrite avec assez de détail pour qu’on puisse déterminer si elle était valable. La preuve n’était pas suffisante pour justifier la conclusion. Les problèmes d’innocuité pour les humains relevés lors de l’examen de la présentation d’Elanco n’ont pas été soulevés lors de l’examen du produit de Monsanto;
  • la Division des médicaments endocriniens, antiparasitaires et du SNC (maintenant la Division de l’évaluation des produits pharmaceutiques) s’est souvent dite inquiète que les lacunes du plan expérimental compromettent la fiabilité de l’ensemble des données, ce qui aurait dû inciter la Division de l’innocuité pour les humains à réexaminer l’ensemble des données fournies pour en vérifier l’exactitude; et
  • lorsqu’on a refusé d’émettre un avis de conformité quant à l’efficacité et à l’innocuité du produit pour les animaux en 1995, on a demandé au fabricant de produire une étude dont la méthodologie a été présentée et examinée, mais qui n’a jamais été réalisée.

Pour s’acquitter de leur obligation juridique, les évaluateurs de Santé Canada doivent examiner toute présentation de drogue nouvelle en faisant preuve de diligence raisonnable. Selon le Dr Michelle Brill-Edwards, membre de l’Alliance for Public Accountability et anciennement premier médecin responsable de l’homologation des médicaments d’ordonnance au sein de la Direction générale de la protection de la santé, quand Santé Canada émet un avis de conformité quant à l’innocuité d’un produit pour les humains, le Ministère reconnaît juridiquement qu’il a assumé son rôle avec diligence raisonnable, qu’il a examiné la présentation en profondeur et qu’il n’a plus d’autres questions à poser concernant l’innocuité pour les humains. Selon le Dr Brill-Edwards, le dossier de la STbr n’a pas été traité avec une diligence raisonnable puisqu’une lettre a été envoyée au fabricant 21 jours après sa présentation sans contenir de preuve que le produit avait été examiné quant aux risques qu’il présentait pour la santé humaine. Les deux comités consultatifs d’experts créés par la Direction générale de la protection de la santé peuvent s’opposer aux décisions des chercheurs du ministère qui font preuve de diligence raisonnable. Le Comité est d’avis que l’attitude des évaluateurs du BMV, qui doutaient de la validité de l’ensemble des données et ont refusé d’émettre un avis de conformité concernant l’innocuité et l’efficacité du produit pour les animaux, est la bonne.

Comme l’a dit au Comité le Dr Thea Mueller, un membre du groupe d’examen interne de la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada, les questions scientifiques se sont perdues dans le conflit interne que les présentations concernant la STbr ont fait naître au sein du BMV. En effet, le Dr Shiv Chopra, un autre membre du groupe d’examen interne et évaluateur du BMV, a déclaré au Comité que lui et d’autres évaluateurs avaient fait l’objet de pressions et avaient été forcés d’approuver des médicaments d’innocuité douteuse, dont la STbr. Le Dr Margaret Haydon a déclaré que , à l’époque où elle était évaluatrice de médicaments à base de STbr, des dossiers avaient disparu de son classeur verrouillé. La question du climat de travail au BMV est abordée plus en détail plus loin dans le rapport.

À cause de ces lacunes méthodologiques et du climat entourant le processus, le Comité craint que les Canadiens et les Canadiennes perdent confiance dans la réglementation canadienne en matière de protection de la santé, qui est considérée comme une des meilleures dans le monde. Selon le Comité, les évaluateurs de Santé Canada sont suffisamment compétents pour faire un examen indépendant de tout médicament en faisant preuve de diligence raisonnable. Le Comité reconnaît que les décisions, avis et analyses fournis par des comités consultatifs externes et des organismes internationaux peuvent compléter l’examen interne de Santé Canada, mais il estime qu’ils ne doivent pas remplacer le processus d’évaluation au sein du Ministère. En dernier ressort, la responsabilité doit incomber à Santé Canada. Le Comité ne saurait insister suffisamment sur l’importance de s’assurer de la confiance du public dans le processus d’approbation des médicaments et dans l’innocuité des aliments. Par conséquent,

  1. le Comité recommande que les décisions concernant l’innocuité des médicaments pour les humains, et l’innocuité et l’efficacité des médicaments pour les animaux, soient laissées aux évaluateurs de Santé Canada.

 

C. Conclusions

Même si la question actuellement à l’étude porte sur l’évaluation et l’approbation de la STbr, le Comité est d’avis qu’il faut se poser des questions plus fondamentales sur la façon dont le processus d’approbation des médicaments fonctionne ou ne fonctionne pas. Il faut répondre à ces questions dans les plus brefs délais. Plusieurs témoins ont dit au Comité que Santé Canada sera probablement appelé, au cours de la prochaine décennie, à d’approuver un nombre grandissant de produits issus du génie génétique. En fait, le Dr Joseph Losos, sous-ministre adjoint de la Direction générale de la protection de la santé à Santé Canada, a dit au Comité que, au cours de la prochaine décennie, on prévoit dans certains secteurs des augmentations de 200 à 500 p. 100 du nombre de produits issus du génie biotechnologique. Par conséquent, il faut résoudre maintenant tous les problèmes concernant le processus.

Le Comité est au fait de l’Initiative de transition de la Direction générale de la protection de la santé. Selon le document de discussion de juillet 1998 de Santé Canada, Protection de la santé pour le XXIe siècle : Le renouvellement du Programme fédéral de la protection de la santé, la Direction générale de la protection de la santé (DGPS) mènera, au cours des deux ou trois prochaines années, un processus d’examen, de consultation et de renouvellement concernant ses activités de protection de la santé afin de trouver des moyens nouveaux et meilleurs pour protéger la santé des Canadiens et des Canadiennes durant le prochain siècle. Le Comité consultatif scientifique, composé de chercheurs indépendants, de professionnels de la santé, de défenseurs des droits des consommateurs et d’autres compétences en matière de santé publique, a été créé pour donner au ministre de la Santé des conseils indépendants d’ordre scientifique, technique et politique.

Certains membres du Comité s’inquiètent du fait que la présentation des essais et des données concernant un médicament nouveau est laissée au fabricant. Le problème, c’est la perception du public. On risque en particulier de miner la confiance du public si l’essai d’un médicament est laissé aux soins du fabricant. Cette façon de procéder peut être préoccupante, mais elle n’est pas nouvelle. Le Comité reconnaît que des personnes et des organismes autres les scientifiques de Santé Canada sont capables de s’acquitter de cette tâche et est d’avis qu’il faut trouver un mécanisme pour convaincre les Canadiens et les Canadiennes que le client de la Direction générale de la protection de la santé, ce sont eux et non le fabricant du médicament. Selon le Comité, il faut permettre aux évaluateurs de médicaments de Santé Canada de faire leur travail sans donner l’impression que l’industrie ou la direction de Santé Canada les forcent à approuver des médicaments d’innocuité douteuse. Même si la direction de Santé Canada a l’obligation de s’assurer que les évaluations sont faites dans des délais raisonnables, son premier devoir est de s’assurer de l’innocuité des produits et de faire régner un climat permettant aux évaluateurs de faire preuve de diligence raisonnable dans l’accomplissement de leur travail.

Les représentants de Santé Canada ont répété devant le Comité que la population canadienne est et sera toujours le client. Néanmoins, la Coalition canadienne pour la santé a déclaré que, « selon un nombre croissant de preuves, le mandat mis en oeuvre par la haute direction de Santé Canada est biaisé pour servir les intérêts de l’industrie au lieu de l’intérêt public. Toutes les preuves montrent que l’industrie est le client ... » . Il va sans dire qu’en faisant preuve de plus de transparence, en consultant la population et en tenant compte de leur opinion, la Direction générale arriverait à convaincre davantage les Canadiens et les Canadiennes qu’elle est là pour les protéger tout en soutenant le fabricant. Selon le document de discussion de juillet 1998, « si l’industrie doit assumer davantage de responsabilités concernant l’innocuité des produits et les normes de fabrication, les Canadiens et Canadiennes veulent avoir l’assurance que la grande priorité demeurera la santé publique ». Le Comité est entièrement d’accord.

Le Comité convient également de la pertinence à cet égard d’une question soulevée dans le document de discussion : « Comment veillons-nous à ce que l’indépendance et l’efficacité soient préservées quand nous collaborons avec des scientifiques et des établissements du secteur privé? » Même si le Comité reconnaît que, pour des raisons fiscales, il a fallu réduire l’aide à la recherche au Canada, il est d’avis qu’il faut trouver des mécanismes pour garantir une telle indépendance dans les faits et dans les perceptions. Le Comité reconnaît également les préoccupations de certains témoins à l’égard du recouvrement des coûts, puisque l’industrie assume 70 p. 100 du coût d’homologation des médicaments. Cela aussi peut inciter le public à se demander si c’est l’industrie ou la population canadienne qui est le client de la Direction générale de la protection de la santé.

Le témoignage du Dr Mueller est éloquent à cet égard. Elle a dit au Comité qu’effectivement, dans le domaine de la réglementation, on se fie beaucoup aux données fournies par le fabricant et qu’il y aurait peut-être lieu de faire des vérifications et des bilans, et de demander à l’entreprise de mener ses études de telle façon qu’il soit possible d’établir, avec un niveau de confiance suffisant, que les données reflètent fidèlement la réalité. Le Comité est d’avis qu’il faut faire de telles vérifications et de tels bilans le plus souvent possible.

Le Comité connaît l’intention du Conseil consultatif scientifique d’étudier le processus d’examen des médicaments. Le Conseil sonde actuellement les intéressés, surtout pour déterminer : si le processus est opportun, efficient et efficace; si le public a un accès juste, raisonnable et opportun à l’information sur les présentations de médicaments et sur l’innocuité et l’efficacité des médicaments; si Santé Canada doit poursuivre ses efforts d’harmonisation et de collaboration avec les organismes de réglementation des pays étrangers concernant le processus d’examen des médicaments; quelle est la relation entre l’imposition de droits d’examen des médicaments et leur effets sur le processus; et quels devraient être les principes à suivre dans le processus d’examen des médicaments. Même si une telle étude est pertinente, le Comité est d’avis qu’il faut faire davantage.

De plus, le Comité est au fait du rapport du vérificateur général de mai 95 sur la gestion d’un projet de réforme à la Direction générale de la protection de la santé, et du suivi de décembre 1998. Ce dernier rapport indique que, dans la plupart des domaines, il reste à la Direction générale de la protection de la santé du travail à faire pour régler complètement les problèmes. Selon le Comité, il conviendrait d’inclure une évaluation du processus d’approbation des médicaments dans le suivi du vérificateur général et de faire l’évaluation une fois les recommandations du Conseil consultatif scientifique mises en oeuvre. Par conséquent, peu importe si le Conseil consultatif scientifique entreprend l’étude du processus d’examen des médicaments,

  1. à la suggestion de certains témoins, le Comité recommande que le gouvernement évalue le processus d’approbation des médicaments de Santé Canada pour s’assurer qu’il protège pleinement la santé et la sécurité des humains et des animaux. Cette évaluation devrait être faite par des experts indépendants, soit de concert avec toute vérification de suivi menée par le vérificateur général du Canada à la Direction générale de la protection de la santé, soit en vue d’un examen ultérieur du vérificateur général.

Le Comité conserve un intérêt à l’égard de cette question et d’autres préoccupations relevées dans le rapport, et continuera de suivre le dossier.

Enfin, le Comité veut souligner que certains témoins craignent que le processus d’approbation des médicaments comporte un élément de prévisibilité, de manière que les fabricants de médicaments continuent de demander l’homologation au Canada et fournissent ainsi aux Canadiens les mêmes médicaments qui sont offerts à l’étranger. M. David Dodge, sous-ministre de Santé Canada, a indiqué que, si le processus est compromis au Canada ou que les concepteurs de médicaments nouveaux jugent que c’est le cas, ces derniers n’essaieront pas d’enregistrer leurs produits ici. Les consommateurs et les agriculteurs canadiens n’auraient alors pas accès à des produits offerts ailleurs.


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