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La Loi sur les aliments et drogues
Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Suite du débat
20 mars 2024
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-252, qui encouragera des environnements alimentaires sains pour les enfants partout au Canada. Je suis heureux de dire que le gouvernement appuie totalement les objectifs du projet de loi C-252. J’aimerais aussi remercier la sénatrice Dasko, la marraine du projet de loi.
Nous savons tous que la nutrition joue un rôle essentiel dans la promotion de la santé, et nous savons que l’acquisition de saines habitudes alimentaires tôt dans la vie est importante pour soutenir la croissance et le développement des enfants. On sait aussi qu’une mauvaise alimentation pendant l’enfance nuit au développement physique et cognitif, et qu’elle constitue un facteur de risque de l’obésité et de maladies chroniques liées à l’alimentation.
Selon un sondage national, le régime alimentaire des enfants canadiens est riche en sodium, en sucres et en gras saturé. Les plus récentes données scientifiques de Santé Canada ont révélé des liens probants entre la consommation accrue de ces nutriments et leur impact sur des problèmes de santé spécifiques, comme l’hypertension artérielle, l’obésité, le diabète de type 2, la carie dentaire et les maladies cardiovasculaires.
Le maintien d’une saine alimentation est l’un des plus importants facteurs permettant de prévenir l’obésité et les maladies chroniques liées à l’alimentation. Des preuves démontrent que de nombreux facteurs de notre environnement alimentaire influencent notre capacité à choisir des aliments sains et à adopter de saines habitudes alimentaires.
Les aliments que nous avons à la maison et que nous retrouvons dans nos écoles, nos épiceries et nos restaurants peuvent avoir un impact majeur sur nos choix et, ainsi, faire de l’alimentation saine un défi pour plusieurs d’entre nous.
Par conséquent, restreindre l’exposition des enfants à la publicité portant sur les aliments contenant des quantités excessives de sodium, de sucre et de gras saturés contribuera à faire des choix alimentaires plus sains pour les enfants.
En appuyant le projet de loi C-252, nous pouvons contribuer à améliorer l’environnement alimentaire et favoriser de meilleures habitudes alimentaires chez les enfants. Il s’agirait d’une étape importante dans la lutte contre l’épidémie nationale d’obésité chez les enfants et la création d’environnements alimentaires plus sains.
Nous connaissons tous le pouvoir de la publicité, en particulier lorsqu’il s’agit d’influencer la consommation d’aliments et de boissons des enfants et les choix qu’ils font. Les enfants sont particulièrement sensibles à la publicité, et les moins de 13 ans le sont encore plus. Les petits de moins de 8 ans n’ont pas les capacités cognitives nécessaires pour reconnaître une publicité et en comprendre l’intention. À l’âge de 12 ans, la plupart des enfants comprennent l’intention persuasive de la publicité, mais ils n’ont pas encore les capacités cognitives nécessaires pour pleinement se protéger de son influence.
Les enfants évoluent dans un environnement où, chaque année, on dépense des centaines de millions de dollars en publicités pour des aliments et des boissons. Selon une analyse portant sur 57 catégories d’aliments sélectionnées, en 2019, les annonceurs ont dépensé environ 628,6 millions de dollars en publicité alimentaire au Canada. Des études ont montré que la grande majorité des publicités portant sur des aliments et des boissons, soit plus de 90 %, qui sont diffusées à la télévision ou sur les sites web préférés des enfants faisaient la promotion de produits qui nuisent à une alimentation saine. La restauration rapide est de loin la catégorie de produits alimentaires qui fait le plus souvent l’objet de publicité au petit écran.
Il est clairement établi que la publicité alimentaire influence de façon significative les attitudes des enfants, leurs préférences, leurs demandes d’achat et leurs habitudes de consommation. Ces effets se poursuivent souvent à l’âge adulte. Le projet de loi C-252 vise à interdire la publicité de certains aliments auprès des enfants de moins de 13 ans. Chers collègues, nous avons la responsabilité de veiller à ce que nos enfants grandissent en bonne santé et à ce que leur environnement les aide à faire des choix alimentaires sains.
En juin 2021, quatre associations professionnelles ont élaboré un nouveau code d’autorégulation en matière de publicité. Les annonceurs ont été invités à se conformer à ce nouveau code à partir de juillet 2023. Bien qu’il s’agisse d’un pas dans la bonne direction, nous devons reconnaître que des études internationales et canadiennes démontrent constamment que l’autorégulation de l’industrie n’est pas efficace pour réduire l’exposition des enfants à certaines publicités alimentaires. Les méthodes d’application de ces codes d’autorégulation sont généralement moins efficaces que les restrictions légales, puisqu’elles n’ont pas force de loi et qu’elles n’entraînent aucune conséquence significative pour ceux qui ne s’y conforment pas.
L’engagement visant à introduire des restrictions réglementaires à la publicité destinée aux enfants pour certains aliments s’harmonise avec les recommandations d’autorités mondiales en matière de santé, lesquelles préconisent de lutter contre la commercialisation des aliments destinés aux enfants par le biais de restrictions imposées par le gouvernement. Il est clair que nous devons prendre des mesures supplémentaires pour faire en sorte que tous les annonceurs soient soumis à la même interdiction de publicités alimentaires destinées aux enfants.
Le projet de loi C-252 comporte des similitudes avec l’ancien projet de loi S-228, qui a été étudié lors de la 42e législature. L’autre endroit et le Sénat avaient alors mené de vastes travaux en comité avec des intervenants au sujet de l’ancien projet de loi S-228. Les deux projets de loi — le projet de loi S-228 et le projet de loi C-252 — ont pour objectif de protéger les enfants contre les répercussions des publicités d’aliments sur les attitudes, les préférences, les demandes d’achat et les tendances de consommation des enfants en ce qui a trait aux aliments, et ce, en vue de promouvoir des choix alimentaires sains.
Le projet de loi C-252 propose que l’interdiction couvre principalement la publicité destinée aux personnes de moins de 13 ans. Cet amendement a également été mis de l’avant à l’autre endroit en 2018. On vise donc les personnes de moins de 13 ans plutôt que les personnes de moins de 17 ans pour répondre aux préoccupations de l’industrie concernant leur liberté de faire de la publicité pour les adultes. Le projet de loi C-252 exige également un examen parlementaire au bout de cinq ans pour évaluer l’efficacité de l’interdiction en vue de déterminer si on observe une augmentation de la publicité destinée aux personnes de moins de 17 ans.
Chers collègues, la principale différence entre l’ancien projet de loi S-228 et le projet de loi C-252 réside dans la caractérisation des aliments soumis à l’interdiction. Le projet de loi C-252 ne fait plus référence aux « aliments mauvais pour la santé » que certaines parties prenantes avaient signalé comme étant un problème de taille lors de l’étude du projet de loi S-228. Le projet de loi C-252 est très clair en ce qu’il vise à lutter contre la publicité concernant des aliments dont la teneur en sucres, en gras saturés ou en sodium est supérieure au taux réglementaire. En outre, plusieurs amendements importants ont été adoptés par le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes afin de clarifier l’interdiction et de garantir des pouvoirs suffisants pour l’élaboration d’un règlement. L’un de ces amendements importants est la modification du libellé de l’interdiction à l’article 7.1 proposé, qui évoque désormais les « [...] aliments réglementaires dont les taux de sucres, de gras saturés ou de sodium excèdent les taux réglementaires [...] »
Les responsables de Santé Canada ont apporté quelques éclaircissements sur la manière dont cela pourrait être mis en œuvre, et notamment sur le processus réglementaire robuste qui sera mis en place pour prescrire les types d’aliments et les taux de sucres, de gras saturés et de sodium qui seront visés. Le comité de l’autre endroit a entendu des témoignages sur l’approche scientifique que Santé Canada devrait adopter pour élaborer un modèle de profils nutritifs afin de déterminer quels aliments seraient soumis aux restrictions en matière de publicité. Cette approche s’appuierait sur des données similaires à celles qui sous‑tendent le Guide alimentaire canadien, et elle s’inspirerait des pratiques exemplaires en vigueur dans d’autres pays.
Un autre amendement a introduit un nouveau pouvoir de réglementation limitant les formes de publicité auxquelles l’interdiction s’applique. Cela permet d’adopter une approche progressive pour restreindre certaines publicités alimentaires destinées aux enfants. Lorsque l’on étudie les efforts déployés à l’étranger pour restreindre la publicité alimentaire destinée aux enfants, on constate que les pays appliquent souvent des restrictions en matière de publicité à des domaines particulièrement préoccupants. Par exemple, le Royaume-Uni concentre ses nouvelles restrictions en matière de publicité alimentaire sur la publicité télévisée et en ligne.
Le projet de loi C-252 comprend également une disposition d’entrée en vigueur, à une date fixée par décret du gouverneur en conseil, ce qui garantira que les règlements d’application seront en place en même temps. Ainsi, le projet de loi C-252 sera opérationnel dès son entrée en vigueur. Entretemps, le gouvernement entendra les parties prenantes lors des consultations sur la réglementation, ce qui est un élément essentiel garanti par les pouvoirs de réglementation prévus dans le projet de loi.
Comprendre et apprendre ce qu’ont vécu d’autres administrations dans ce domaine est essentiel. Depuis les années 1980, le gouvernement du Québec a restreint la publicité commerciale, sous toutes ses formes et dans tous les médias, pour tous les biens et services destinés aux enfants, à quelques exceptions près. En revanche, la portée du projet de loi C-252 et les restrictions qu’il contient sont axées sur la protection de la santé des enfants et ne concernent que la publicité de certains aliments destinés principalement aux enfants, et non tous les biens et services.
En conclusion, je crois que le projet de loi C-252 privilégie une approche ciblée et complète pour lutter contre l’épidémie nationale d’obésité infantile et favoriser un environnement alimentaire plus sain pour les enfants. Je pense que nous avons une occasion extraordinaire de changer les choses en faisant la promotion d’habitudes alimentaires et d’environnements alimentaires sains pour les enfants. En appuyant le projet de loi C-252, nous pouvons envoyer un message clair aux Canadiens : la santé et le bien-être des enfants est une priorité pour nous tous. J’exhorte mes collègues à renvoyer le projet de loi au comité le plus rapidement possible.
Merci.
Sénateur Gold, accepteriez-vous de répondre à une question?
Bien sûr.
Au sujet du code de la publicité sur les aliments et les boissons qui a été élaboré conjointement avec l’industrie, vous avez dit qu’il n’est pas suffisant pour atteindre les objectifs du projet de loi. Pourriez-vous préciser quelles sont les failles de ce code? Est-ce son caractère volontaire plutôt qu’obligatoire ou le fait que ses dispositions ne répondent pas aux objectifs du projet de loi C-252?
Je vous remercie de votre question. Bien que le code soit une mesure positive, je pense que son principal défaut, c’est qu’il s’agit d’un cadre d’autoréglementation. Comme je ne l’ai pas sous les yeux, je ne veux pas avancer d’hypothèse quant à son contenu.
Si je me souviens bien du débat sur le projet de loi précédent, il ne fait aucun doute que les normes de l’industrie seraient conformes à l’objectif de promouvoir des choix plus sains pour les enfants, mais je ne sais pas si elles visent autant que le projet de loi C-252 certains produits ainsi que les gras saturées, le sodium et les sucres contenus dans les aliments. C’est de l’information que le comité aura amplement l’occasion de découvrir.
Vous avez dit que le code d’autoréglementation pourrait répondre de manière adéquate à tous les objectifs de ce projet de loi. Le gouvernement serait-il disposé à incorporer la norme facultative dans la loi pour en faire une norme obligatoire au moyen du mécanisme dont nous disposons que l’on appelle l’« incorporation par renvoi », c’est-à-dire en prenant le travail effectué par l’industrie, les consommateurs et d’autres intervenants qui atteint le même objectif et en l’incorporant dans notre loi de manière à tenir compte du travail des divers intervenants?
Je vous remercie de votre question. Comme vous le savez, il s’agit d’un projet de loi d’initiative parlementaire, alors je ne suis pas entièrement au courant de ce que le gouvernement a l’intention de faire outre exprimer son appui au projet de loi. Cela dit, il sera possible de soulever cette question et d’en discuter au comité.
Le sénateur Gold accepterait-il de répondre à une autre question? Merci.
Vous avez mentionné que le code de conduite en matière de publicité destinée aux enfants a été imposé le 1er juillet 2023. Je dis « imposé », car un tiers en surveille l’application. Étant donné que ce code n’est en place que depuis huit mois, j’ai quelques questions.
Savez-vous combien de préoccupations ont été soulevées par l’industrie ou des particuliers depuis sa mise en œuvre le 1er juillet? Ne croyez-vous pas qu’il serait bon de laisser du temps au secteur des aliments et des boissons pour voir si son code de conduite obligatoire en matière de publicité destinée aux enfants fonctionne avant d’essayer une autre solution?
Merci de vos questions. Je sais que vous vous intéressez à cet enjeu et aux questions connexes.
Encore une fois, je pense qu’il serait plus judicieux de poser ces questions au comité, à des intervenants et à des fonctionnaires mieux à même de vous donner des réponses que moi.
Merci beaucoup.
Comme l’industrie a mis beaucoup d’efforts au cours des dernières années dans l’élaboration de ce code de conduite obligatoire, votre gouvernement entend-il travailler avec les annonceurs et se servir de ce code alors qu’il prépare la réglementation qui sera ultimement présentée?
Comme je l’ai mentionné dans mon discours, même si la marraine du projet de loi, la sénatrice Dasko, n’en a pas parlé depuis un certain temps, le processus réglementaire est un élément important du projet de loi, comme c’est souvent le cas. Le report de l’entrée en vigueur vise justement à donner à tous les intervenants l’occasion de prendre part au processus d’élaboration de ces importants règlements et de donner leur avis.