Le Code canadien du travail—Le Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles
Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat
30 mai 2024
Propose que le projet de loi C-58, Loi modifiant le Code canadien du travail et le Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je suis heureuse de lancer le débat à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-58, Loi modifiant le Code canadien du travail et le Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles. Ce projet de loi vise à instaurer un régime d’équilibre en ce qui concerne l’interdiction de recourir aux travailleurs de remplacement durant une grève ou un lockout dans les industries sous réglementation fédérale. De plus, il prévoit une disposition qui régit le moment opportun et les étapes à respecter pour conclure une entente relative au maintien des activités et la prise de décisions par le Conseil canadien des relations industrielles qui aurait une incidence sur la nature du travail à maintenir pendant une grève et les situations que j’ai mentionnées.
Chers collègues, à la fin des années 1970, je me suis jointe à la fonction publique de l’Ontario, en tant qu’employée au ministère des Services correctionnels. Très rapidement, je me suis investie au sein de la section locale de mon syndicat, à mon lieu de travail. Par la suite, je suis devenue membre de l’exécutif de cette section du syndicat et, éventuellement, déléguée provinciale à la Division des services correctionnels du Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario, que j’appellerai l’OPSEU, pour la suite de mes observations.
Quelques années plus tard, au milieu d’une ronde de négociations hargneuses — qui n’étaient pas en fait des négociations contractuelles, mais des négociations visant à établir une nouvelle unité de négociation collective pour les agents correctionnels, distincte des autres divisions de la fonction publique de l’Ontario —, je me suis retrouvée au microphone, lors d’une réunion d’urgence de la Division des services correctionnels, en train de présenter une motion visant à déclencher une grève illégale à l’échelle de la province. Oui, j’ai bien dit « illégale ». À l’époque, les fonctionnaires ontariens n’avaient pas le droit de faire la grève, et les différends liés à la négociation des conventions collectives étaient soumis à l’arbitrage exécutoire.
J’étais loin de me douter que, 10 ans plus tard, je serais députée provinciale et ministre, et que je présenterais et que je ferais adopter un projet de loi accordant le droit de grève aux travailleurs syndiqués de la fonction publique de l’Ontario.
Au début des années 1980, j’ai quitté la fonction publique de l’Ontario et je suis allée travailler pour le syndicat dont j’ai parlé — l’OPSEU — et j’ai fini par devenir négociatrice pour un certain nombre de contrats d’unités de négociation à l’échelle de la province dont j’étais responsable. Les négociations, les différends, l’arbitrage, les grèves, les règlements et le rétablissement des relations de travail entre les employeurs et les employés après les différends, c’est dans mon ADN, pour ainsi dire.
Aujourd’hui, plus de 40 ans plus tard, j’ai l’honneur de parrainer au Sénat ce projet de loi tant attendu — le projet de loi C-58 —, qui interdit le recours à des travailleurs de remplacement pendant une grève dans le secteur privé sous réglementation fédérale et qui exige que les parties concluent un accord de maintien des activités avant le début d’une grève ou d’un lockout.
Je vais d’abord décrire le projet de loi. Dans un premier temps, je vais préciser à qui il s’applique et à qui il ne s’applique pas.
Le projet de loi C-58 s’applique aux organismes du secteur privé sous réglementation fédérale visés aux parties I, II, III et IV du Code canadien du travail.
Je vais vous donner quelques exemples. La liste est longue, mais vous comprendrez rapidement de qui il est question : le transport aérien, les banques, les services portuaires, les chemins de fer, la radiodiffusion, la télédiffusion, les services de transport routier, les systèmes de télécommunications et certains organes de gouvernance des Premières Nations. Un certain nombre de secteurs industriels sont visés par le projet de loi, mais n’oubliez pas qu’il est question de secteurs sous réglementation fédérale.
Ce secteur compte environ 22 000 employeurs. J’ai été étonnée par ce chiffre. Il y a plus de 300 000 employés syndiqués. En réalité, il y en a davantage, mais je parle des employés syndiqués qui seraient concernés par l’application du projet de loi.
Voici à qui le projet de loi ne s’appliquerait pas. Il ne s’appliquerait pas aux services publics sous réglementation fédérale, comme les fonctionnaires fédéraux des différents ministères. Il ne s’appliquerait pas non plus au Parlement, que ce soit la Chambre des communes — l’autre endroit, comme on l’appelle ici — ou le Sénat.
Étant donné que je pense que c’est une question que beaucoup de gens se posent, je vais expliquer pourquoi il en est ainsi : ce sont des modifications apportées au Code canadien du travail et aux règlements qui régissent le CCRI. Le cadre législatif pour les fonctionnaires fédéraux et le Parlement est établi dans une loi entièrement différente. Nous nous concentrons sur les modifications du Code canadien du travail à ce stade-ci. Nous verrons si ces questions seront abordées à l’avenir dans le cadre d’un projet de loi d’initiative ministérielle ou d’un projet de loi d’initiative parlementaire; pour l’instant, nous traitons du Code canadien du travail.
Bref, le projet de loi comporte deux aspects principaux. Il interdit aux employeurs d’utiliser des travailleurs de remplacement pendant les grèves, une mesure prise par les travailleurs, ou les lockouts, une mesure prise par les employeurs.
Il en est ainsi parce que le projet de loi vise à établir une relation plus équilibrée entre les employés et les employeurs — les employeurs et leurs travailleurs — dans une situation de grève ou de lockout. Je voudrais revenir sur ce point, mais il faut garder à l’esprit que ce dont nous parlons et ce que nous recherchons ici, c’est une question d’équilibre. Grâce à des changements, le projet de loi rééquilibre la relation. Bien sûr, il y a des gens qui auront des opinions divergentes sur ce qui constitue un juste équilibre, ce qui est toujours le cas lorsque nous étudions un projet de loi et écoutons les partisans et les détracteurs de ce projet de loi.
En 2015, la Cour suprême du Canada a affirmé que les dispositions relatives à la liberté d’association de la Charte canadienne des droits et libertés garantissaient le droit de grève. Dans la décision de la Cour suprême, la juge Abella, l’une de mes personnes préférées du monde entier, a écrit :
L’histoire, la jurisprudence et les obligations internationales du Canada confirment que, dans notre régime de relations de travail, le droit de grève constitue un élément essentiel d’un processus véritable de négociation collective.
La juge poursuit ensuite en citant Otto Kahn-Freund et Bob Hepple, qui ont déclaré :
Le pouvoir des travailleurs de cesser le travail équivaut à celui de la direction de cesser la production, de la réorienter, de la déplacer. Le régime juridique qui supprime la liberté de grève met les salariés à la merci de l’employeur. Là réside tout simplement l’essentiel.
La citation de ces deux experts s’arrête là.
Bref, selon certains, le recours à des travailleurs de remplacement peut porter atteinte au droit de grève.
Chers collègues, au cours de mes années de travail au sein du mouvement syndical et en tant que négociatrice, j’ai fait toutes sortes d’expériences : j’ai participé à des piquets de grève, j’ai négocié le règlement de litiges et j’ai agi comme arbitre. Et je dois vous dire que la grève est la toute dernière option que les travailleurs envisagent.
Parfois, je pense que les gens qui n’ont pas vécu ou n’ont pas été dans cette situation ne comprennent pas. Ils voient la situation de loin et croient qu’il s’agit simplement des syndicats qui montrent les dents et qui retirent à l’employeur la possibilité de poursuivre sa production.
Or, quand on regarde la situation de près, on remarque que les travailleurs perdent leur salaire et leurs avantages sociaux. Cela a un impact direct sur la vie de leur famille et de leur communauté. Il s’agit d’une solution de dernier recours qui est très difficile à choisir.
J’espère que nous garderons cela à l’esprit pendant que nous réfléchissons à un juste équilibre et à ce que propose le projet de loi. Il ne faut pas considérer les employeurs ou les syndicats comme un bloc monolithique. N’oublions pas qu’il s’agit de personnes. Ce sont des personnes qui travaillent dans un but précis et qui subviennent à leurs besoins, à ceux de leurs familles et de leur communauté.
La deuxième question qui est abordée dans le projet de loi C-58 — il s’agit d’un nouveau régime qui est mis en place, un processus — est celle des moyens et des délais pour arriver à une entente entre les parties ou à une décision arbitrale par le Conseil canadien des relations industrielles concernant les activités liées au travail qui doivent être maintenues en cas de grève ou de lockout. Il s’agit d’activités que l’on qualifie souvent d’activités nécessaires pour prévenir un danger immédiat et grave pour la sécurité ou la santé du public.
L’article 84 contient un certain nombre de dispositions, mais le Code canadien du travail prévoit déjà que les parties doivent élaborer des accords ou des arrangements sur le maintien des activités. L’expérience a toutefois montré que, lorsque les parties sont impliquées dans le processus de négociation et qu’elles se concentrent sur les discussions pour tenter de parvenir à un accord, ces questions de maintien des activités professionnelles ne sont souvent pas abordées avant qu’il ne soit très clair que le différend est inévitable et qu’aucun accord ne sera manifestement possible. Il peut donc s’écouler beaucoup de temps avant que ces accords ne soient mis en place, ou lorsqu’il y a un différend sur le maintien des activités, afin que les perspectives de l’employeur et des travailleurs soient prises en compte pour la demande au Conseil canadien des relations industrielles afin qu’il prenne une décision et fasse une déclaration sur les activités qui doivent être maintenues.
Comme nous l’indique le passé, ce processus du Conseil canadien des relations industrielles est extrêmement long. On pourrait se demander, à juste titre, pourquoi il en est ainsi. À mon avis, c’est essentiellement une question de ressources disponibles. Parfois, il faut aussi tenir compte de la complexité et de la nature de l’enquête qui doit être faite, mais la capacité d’une personne à y parvenir est souvent ce qui est en cause. Certaines années, il y a quelque temps, les délais moyens étaient de 250 jours à partir de la demande jusqu’à l’émission d’une directive par le Conseil canadien des relations industrielles. À une autre année, les délais étaient bien inférieurs, mais ils étaient quand même de 150 jours. Cela demeure un processus extrêmement long à la suite de ce qui peut être une très longue série de négociations acrimonieuses.
L’une des choses qui se passent dans les cas de grèves, de lockouts et d’échecs des négociations collectives, ce sont les ressentiments et les sentiments négatifs qui s’enracinent. Plus le processus s’étire, plus ce type d’acrimonie a le temps de se développer et d’empoisonner le milieu de travail.
Nous devons nous rappeler que, au bout du compte, les parties devront à nouveau travailler ensemble pour une même entreprise. Même si elles ont évidemment des raisons différentes pour le faire, elles ont aussi des points en commun.
Au fil des ans, les employeurs, les travailleurs et leurs syndicats ont fait valoir la nécessité d’un processus qui fixe les échéances appropriées, et il y a eu de nombreuses discussions sur la forme que devraient prendre ces échéances. Le projet de loi répond à ce besoin et met en place, pour la première fois, une série d’étapes et fixe le nombre de jours prévus pour chaque étape. Les parties doivent commencer à négocier une entente dans les 15 jours suivant l’avis de négociation et le début des négociations.
En cas de différend et de renvoi au Conseil canadien des relations industrielles, que ce soit à la suite d’une plainte ou de pressions exercées sur le ministre afin qu’il effectue un renvoi, ce qu’il a le pouvoir de faire en vertu du projet de loi, le conseil dispose alors d’un temps limité pour rendre une décision. Il y a des détails là‑dessus, et je serai heureuse de répondre à des questions si les gens veulent plus de détails à ce sujet.
Afin de créer un équilibre, le projet de loi prévoit aussi des exceptions qui permettraient aux employeurs de recourir à des travailleurs de remplacement. Les paramètres seront mieux définis que dans le passé. Avant, il y avait une phrase qui tenait sur une seule ligne. C’était très difficile de trancher, car c’était très subjectif. Maintenant, cette mesure législative présente des dispositions très claires concernant les exceptions possibles à l’interdiction de recourir aux travailleurs de remplacement. Ce serait pour parer à une menace pour la vie, la santé ou la sécurité de toute personne; à une menace de détérioration grave des biens ou des locaux de l’employeur; ou à une menace de graves dommages environnementaux touchant les biens ou les locaux de l’employeur.
Les employés de l’unité de négociation visée par une interdiction de recourir aux travailleurs de remplacement n’ont pas le droit de franchir les piquets de grève. Il ne faut pas oublier l’unité de négociation. Dans certaines circonstances, toutefois, il y a une exception à cette règle dans ce projet de loi. En effet, les employés de l’unité de négociation seraient autorisés à traverser les piquets de grève au besoin pendant une grève ou un lockout afin de veiller à ce que l’arrêt de travail ne constitue pas un risque imminent et grave pour la sécurité ou la santé du public.
Par conséquent, en créant un équilibre, cette mesure législative tente d’accorder la priorité à la santé et la sécurité du public, selon les dispositions détaillées que je viens d’énumérer concernant les exceptions à l’interdiction du recours à des travailleurs de remplacement.
Au fil des ans, le Conseil canadien des relations industrielles a reçu des demandes ou des renvois de ministres ainsi que d’un éventail d’industries en vue de régler des désaccords concernant une entente sur le maintien des activités. Je vous en ai donné quelques exemples tout à l’heure.
J’aimerais vous donner un exemple pour que vous sachiez ce dont il est question ici. Le 22 juillet 2014, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, un syndicat qui représente les scientifiques et les professionnels qui travaillent dans des industries sous réglementation fédérale, a présenté une demande au Conseil canadien des relations industrielles en vertu de l’article 87.4 du Code canadien du travail. Le syndicat demandait une ordonnance pour trancher les dossiers en suspens entre lui et un employeur, en l’occurrence Énergie atomique du Canada limitée, qu’on désigne habituellement par l’acronyme EACL.
L’acronyme de l’entente sur le maintien des activités est EMA. Je n’ai pas besoin d’apprendre d’autres acronymes à ce stade-ci de ma vie, mais pour faire ce travail, nous n’avons parfois pas le choix.
Pour la petite histoire, une fermeture a eu lieu pour des raisons d’entretien courant. Elle n’était pas le résultat d’un conflit de travail. Il s’agissait d’un entretien courant qui a été effectué en novembre 2007 à la centrale nucléaire de Chalk River. Cette centrale relève d’Énergie atomique du Canada limitée et de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Vous vous en souvenez peut-être. En tant qu’ancienne ministre de la Santé, j’ai suivi l’évolution de la situation. Cette fermeture a entraîné une pénurie mondiale de radio-isotopes. Les enjeux étaient considérables. Le Canada n’était pas le seul pays touché. Comme je l’ai dit, il y a eu une pénurie mondiale, ce qui montre l’importance que ce secteur revêt non seulement pour notre pays, mais aussi pour le reste du monde.
Revenons à ce qui s’est passé en 2014, le conseil a déterminé que le critère de l’intérêt public associé à l’article 87.4 du Code canadien du travail — et il s’agit là d’une interprétation et d’un précédent importants — exige que la partie affirmant qu’il n’y a pas de danger pour la santé ou la sécurité publique porte le fardeau de la preuve. Nous parlons maintenant de la manière dont les dossiers sont tranchés, de l’application régulière de la loi et du concept du fardeau de la preuve.
Soit dit en passant, je trouve cette décision très intéressante parce qu’elle impose un fardeau de la preuve. En effet, si vous affirmez qu’il n’y a pas de danger ou de menace pour la sécurité publique, votre partie, quelle qu’elle soit — cette affirmation ayant été faite par les deux côtés dans des circonstances différentes —, a le fardeau de prouver ce qu’elle avance.
À mon avis, c’est là une autre partie du régime qui fait passer la sécurité publique et l’intérêt public avant les intérêts de l’employeur, du syndicat ou des syndiqués par rapport à un litige donné.
Il y a beaucoup d’autres exemples. Heureusement, mon bureau a parcouru le site Web du Conseil canadien des relations industrielles pour tenter de trouver des exemples. Ce n’est pas facile, mais les gens qui le désirent peuvent en trouver. Il y a des décisions qui concernent notamment NAV CANADA, le Canadien National et l’Administration de l’aéroport international du Grand Moncton. Il y a un certain nombre de décisions qu’on peut consulter.
J’aimerais maintenant parler du processus qui a mené à l’élaboration du projet de loi et à son adoption à l’autre endroit.
Dans le cadre de son entente de soutien et de confiance avec le Nouveau Parti démocratique, le gouvernement s’est engagé à présenter :
[...] un projet de loi d’ici la fin de 2023 pour interdire le recours à des travailleurs de remplacement, ou « briseurs de grève », lorsqu’un employeur syndiqué d’une industrie sous réglementation fédérale a mis ses employés en lockout ou est en grève.
Dans le budget de 2023, il s’est de nouveau engagé à améliorer le processus de maintien des activités.
La consultation sur l’ensemble du projet de loi s’est déroulée entre octobre 2022 et janvier 2023. Au cours de cette période, une série de tables rondes a été organisée. Des employeurs, des syndicats et d’autres parties intéressées se sont manifestés. À la suite de ces consultations, un rapport résumant les discussions a été publié en septembre 2023.
Parfois, après avoir participé à ce type de consultations ou à l’élaboration d’une politique ou d’une loi, nous prenons du recul, nous examinons le rapport sur les consultations et nous avons l’impression de ne pas avoir parlé assez fort ou de ne pas avoir été entendus. J’ai entendu des plaintes provenant des deux parties dans ce dossier, mais les consultations ont été faites et un rapport a été publié.
J’ai passé du temps à discuter avec l’un des principaux représentants du patronat et des associations d’entreprises — une personne très réfléchie. Nous avons tous deux abordé ces discussions en sachant que nous venons d’horizons différents et que nous avons des points de vue différents sur la meilleure démarche. Pour moi, ce sont toujours les conversations les plus fécondes, car elles nous donnent l’occasion d’apprendre, d’écouter et de comprendre le point de vue de l’autre.
Je voulais comprendre. Vous vous souviendrez que j’ai dit que les employeurs et les syndicats semblaient généralement en faveur des nouvelles dispositions concernant le processus de maintien des activités ou la résolution des litiges à cet égard. Il n’y a pas un tel accord en ce qui concerne la question délicate de l’interdiction des travailleurs de remplacement, même si l’on prévoit des exceptions et ce genre de choses.
Cela ne m’étonne pas, et je pense que cela ne devrait étonner personne. Le projet de loi à l’étude tente d’établir un équilibre et de permettre des négociations collectives libres et équitables. Le représentant des employeurs avec lequel je me suis entretenue a clairement indiqué que de nombreux employeurs pensent qu’il existe un équilibre soigneusement établi en l’état actuel de la loi, avant tout changement qui pourrait résulter du projet de loi s’il devait être adopté.
Vous ne serez pas surpris d’apprendre que si vous parlez aux représentants des travailleurs syndiqués, aux syndicats et à leurs défenseurs, ils vous diront que l’équilibre n’existe pas à l’heure actuelle — que les choses penchent en faveur des employeurs et que les travailleurs sont abandonnés à leur sort, parfois pendant de longues périodes de temps, lorsque l’on fait appel à des travailleurs de remplacement.
Pensons par exemple aux travailleurs du Port de Québec, qui sont en grève depuis 18 ou 19 mois. On a eu recours à des travailleurs de remplacement et la grève se poursuit.
Dans d’autres cas où il existe une réglementation provinciale — je ne parle pas des dispositions du Code canadien du travail —, il y a des grèves. Une petite entreprise de télécommunications en Colombie-Britannique s’est syndiquée, et l’employeur a contesté ce processus. Les travailleurs ont fait la grève pendant trois ans pour obtenir une première convention collective, tandis que l’entreprise continuait d’exercer ses activités. En fin de compte, les travailleurs ont gagné leur cause grâce à la décision d’une commission des relations de travail — il faudrait que je vérifie laquelle — qui a déterminé que les mesures prises contrevenaient aux obligations de l’employeur.
Il s’agit là d’un dossier provincial, mais c’est un exemple. Il existe de nombreux exemples de grèves qui se sont prolongées pendant une durée indéterminée parce que l’employeur a eu recours à des travailleurs de remplacement.
Dans l’ensemble, lorsque j’écoute les deux parties s’exprimer, cela me rappelle le travail que j’ai fait au fil des ans pour lutter contre la pauvreté et défendre les droits des travailleurs, en avançant l’argument de l’augmentation du salaire minimum. Lorsque quelqu’un au gouvernement parle d’augmenter le salaire minimum, d’un côté, on nous dit immédiatement que cela va faire disparaître des emplois et entraîner la faillite de petites entreprises et, de l’autre côté, on nous dit que c’est nécessaire pour protéger les travailleurs contre l’inflation et le coût de la vie, afin qu’ils puissent subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles et contribuer à l’économie en gardant leur pouvoir d’achat.
Chaque fois que cet enjeu refait surface, que ce soit dans une province ou ailleurs, les arguments ne changent jamais. Ce serait bien si, à un moment donné, nous pouvions mettre fin aux discours ronflants qui polarisent afin de mieux comprendre qu’elles sont les répercussions et les défis.
Tout cela se produit dans la conjoncture économique actuelle. Quand il y a un différend sur cet enjeu, il faut examiner les conditions économiques qui le sous-tendent. On ne peut pas prendre les mêmes arguments réchauffés de chaque partie et les appliquer à toutes les situations parce qu’elles ne sont tout simplement pas les mêmes — bien que, parfois, le débat donne cette impression.
J’utilise cet exemple, mais quand je dis « arguments réchauffés », je ne fais pas référence à la position des employeurs et des travailleurs syndiqués dans le contexte de ce projet de loi. J’ai un immense respect pour la position du patronat. Je dois toutefois vous dire que, à la lumière de mon expérience personnelle à examiner les éléments de preuve des travailleurs syndiqués, l’argument selon lequel le système actuel n’est pas équilibré — et qu’il faut rétablir un équilibre — a beaucoup de mérite. C’est pourquoi je suis heureuse de parrainer ce projet de loi.
Pour comprendre comment les gens étayent leurs arguments, il faut examiner les données empiriques. Eh bien, les amis, comme pour beaucoup de questions que nous examinons, il existe peu de données empiriques à ce sujet. Les deux parties présentent habituellement des rapports. J’ai lu des rapports présentés par des syndicats, dans lesquels ils mentionnent leurs sources et ce qu’ils ont examiné, et j’ai examiné des rapports sur lesquels s’appuient des employeurs, comme celui de l’Institut Fraser. Dans, ces rapports, on se demande essentiellement s’il y aura davantage de grèves et si les grèves dureront plus longtemps, ce qui occasionnerait davantage de jours perdus à cause des arrêts de travail. Les deux parties ont des interprétations différentes, qui reposent sur des données probantes, mais il est question d’un très petit nombre d’études.
Il est également important de garder à l’esprit que ces études portent sur les provinces canadiennes où une mesure législative semblable a été adoptée. Il n’y en a que deux : la Colombie-Britannique et le Québec. Le Québec dispose d’une telle mesure législative depuis 1977 environ, et la Colombie-Britannique a adopté une mesure législative semblable au début des années 1990.
Alors que j’essaie de donner un sens à des données qui, à mon avis, ne sont convaincantes ni pour une partie ni pour l’autre, je vous rappelle que la fréquence des grèves dépend beaucoup plus des conditions économiques auxquelles les parties sont confrontées au moment considéré et de la durée de l’arrêt de travail. Comme je l’ai dit, dans les cas où on fait appel à des travailleurs de remplacement, l’arrêt de travail dure beaucoup plus longtemps. Toutefois, cela ne préoccupe pas les employeurs parce qu’ils ont des travailleurs et que leurs activités se poursuivent à peu près normalement. Il s’agit peut-être d’une généralisation excessive, car chaque cas est unique.
Les cas qui ont été étudiés relèvent tous de la compétence provinciale; ils ne correspondent pas à ce que nous voyons ici. Par conséquent, aucune de ces données ne peut s’appliquer aux secteurs sous réglementation fédérale, car il n’a jamais été interdit de recourir à des travailleurs de remplacement dans les secteurs relevant de la compétence fédérale. Si on se reporte aux exemples de décisions du Conseil canadien des relations industrielles, ou CCRI, que j’ai donnés, on constate que la situation des employeurs assujettis à la réglementation fédérale diffère grandement de celle des employeurs relevant de la compétence provinciale.
Pour conclure sur la question de l’équilibre, je voudrais que nous nous souvenions tous que dans les secteurs fédéraux dont nous parlons, le gouvernement a toujours la possibilité de présenter une mesure législative de retour au travail. Je siège ici depuis plus de huit ans et j’en ai été témoin deux fois.
Certaines mesures dictent quand c’est autorisé. Il est important de se rappeler que la Charte protège la liberté d’association, le droit de grève et le moment où l’on peut faire la grève. Au cours des débats sur cette question, nous avons débattu en comité plénier à quelques reprises. Si je me souviens bien, des représentants de Postes Canada et du port de Montréal ont comparu. Le sénateur Gold et moi-même n’étions pas du tout d’accord quant à l’interprétation de la Constitution. Je ne suis pas une grande spécialiste. Je ne suis ni avocate ni experte en matière constitutionnelle, contrairement à lui. Des contestations judiciaires sont en cours et nous verrons ce qu’il en ressortira. Toutefois, je pense que dans ces deux cas, le gouvernement a agi prématurément car il n’avait pas respecter les conditions lui permettant de faire adopter une loi forçant le retour au travail. À mon avis, c’était une violation des droits garantis par la Charte.
Il faut que nous nous rendions compte qu’avec le temps les jugements et la jurisprudence permettent aux parties d’en arriver à une bien meilleure compréhension de ce qui est admissible et de ce qui ne l’est pas.
Pour revenir à la question du processus, le projet de loi C-58 a été présenté à la Chambre des communes en novembre 2023. La Chambre des communes a consacré six séances à l’étude à l’étape de la deuxième lecture entre novembre 2023 et février 2024.
À la Chambre, plus de 20 députés ont fait part de leurs réflexions et de leurs points de vue au sujet du projet de loi. Après les interventions des députés, il y a eu 53 échanges de questions et de réponses, au cours desquels de nombreux autres députés ont posé des questions. Cela a duré jusqu’au 27 février 2024.
Le projet de loi a franchi l’étape de la deuxième lecture — je veux que vous prêtiez attention au résultat — par 318 voix contre 0. À l’étape de la deuxième lecture, je le répète, aucun député n’a voté contre. Le projet de loi a ensuite été renvoyé à un comité pour étude.
Je vois un sourire narquois de l’autre côté de la Chambre, et je comprends ce qui le provoque.
Le projet de loi a été étudié au Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées, à l’autre endroit, du 21 mars 2024 au 2 mai 2024. Le comité y a consacré six séances. Il a entendu 37 témoins et a reçu 20 mémoires d’autres parties intéressées.
Pendant l’étude article par article, le comité a adopté un petit nombre d’amendements, des amendements importants, mais peu nombreux. En d’autres mots, je dirais que le projet de loi n’est pas très complexe. Vous serez pour ou contre. Des raisons justifient certains de ces amendements. Encore une fois, je peux les expliquer en réponse à des questions.
À l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-58, cinq intervenants ont pris la parole, et il y a eu 22 échanges dans les périodes réservées aux questions et aux observations. Le 27 mai 2024 — lundi dernier —, le projet de loi a été adopté à l’autre endroit par un vote de 316 voix contre 0, encore une fois.
Je souligne le processus pour une raison. Souvent, lorsque nous entendons au Sénat qu’une mesure législative a été adoptée par tous les partis dans un contexte de gouvernement minoritaire — toutes ces choses s’additionnent et finissent par représenter quelque chose de non négligeable —, certains se demandent ce qui s’est passé. Était-ce un accommodement politique? L’adoption de la mesure législative a-t-elle été précipitée? Une étude adéquate a-t-elle été menée? Ce sont des questions que nous nous posons, à juste titre.
J’ai présenté le processus pour que vous constatiez qu’il y a eu amplement de discussions — je ne parle pas de la qualité des échanges ou de ce genre de choses. Ce que je dis, c’est qu’il y a eu un débat approfondi, une étude exhaustive et des discussions concluantes à l’étape de la troisième lecture.
Voilà où nous en sommes. C’est à notre tour. C’est à notre tour d’examiner ce projet de loi, de le renvoyer au comité et, espérons-le, de procéder à un examen approfondi de la mesure législative. À l’étape de la deuxième lecture, là où nous en sommes, nous examinons le principe du projet de loi. Je dois vous dire que j’appuie de tout cœur le principe de ce projet de loi. J’attends avec impatience l’examen du projet de loi par le comité.
Lorsque j’ai commencé mon intervention aujourd’hui, j’ai fait un retour en arrière. Alors que je termine mon intervention, je vous prie de bien vouloir m’accorder un moment supplémentaire.
En 1992, j’étais membre du Cabinet du gouvernement de l’Ontario. Ce n’était pas mon ministère, mais j’étais très heureuse en tant que membre du Cabinet de soutenir la présentation et l’adoption d’un projet de loi antibriseurs de grève pour la main-d’œuvre réglementée par la province de l’Ontario. C’était en 1992.
Malheureusement, en 1995, l’abrogation de cette loi a été l’une des premières mesures prises par le gouvernement conservateur nouvellement élu dirigé par le premier ministre Mike Harris, avec un programme qu’il a appelé la « Révolution du bon sens » — chaque fois que j’entends le slogan de la campagne sur le bon sens à l’autre endroit ou dans cette enceinte, je ressens quelque chose s’apparentant à un choc traumatique. En ce qui concerne les slogans, il m’arrive de penser : — quel est le dicton? — plus ça change. Je vous laisse le compléter.
Je suis honorée et heureuse de marrainer ce projet de loi. Je suis heureuse qu’on me l’ait demandé. Je dois vous dire que, pour moi, cela me permet en quelque sorte de boucler la boucle et de tourner la page sur cette question, en plus de mettre en évidence une réalité que j’ai connue toute ma vie dans la fonction publique et qui me frustre — mais nous ne pouvons rien y changer : les choses peuvent prendre beaucoup de temps dans le monde des politiques publiques, de la politique et de l’élaboration des lois.
Nous vivons un moment historique grâce à ce projet de loi, qui est attendu et en faveur duquel on exerce des pressions depuis longtemps afin de rétablir l’équilibre vers des négociations collectives justes et libres assurant la capacité d’exercer le droit de grève, qui est protégé par la Charte. Nous vivons un moment historique.
Je ne sais pas encore qui est le porte-parole de l’opposition pour ce projet de loi, mais j’ai hâte de l’entendre. J’ai hâte que le projet de loi soit renvoyé à un comité pour qu’il l’étudie et en discute, ce que nos comités font si bien. Je ne sais pas, mais je soupçonne que le projet de loi pourrait être renvoyé au Comité des affaires sociales. Je sais que ses membres sont minutieux. Je me réjouis à l’idée que le projet de loi soit étudié comme il se doit.
Il s’agit d’un projet de loi important. J’attends avec impatience la contribution d’autres sénateurs au débat, puis le renvoi du projet de loi à un comité.
Votre Honneur, merci. Meegwetch.
J’aurais une question à poser à la sénatrice Lankin. Est-ce qu’elle accepterait d’y répondre?
Oui.
Il semble que mon leader trouvait que j’avais encore du temps libre, malgré les huit comités, alors je serai le porte-parole pour ce projet de loi.
Je n’ai pas encore eu le privilège de recevoir le breffage des fonctionnaires, comme c’est l’habitude, mais j’ai tout de même une question. Il y a eu un amendement par rapport à l’entrée en vigueur. Ce devait être 18 mois, mais maintenant, c’est 12 mois. Avez-vous une idée de la raison de cet amendement? Pourquoi est-ce maintenant 12 mois avant l’entrée en vigueur?
Merci. Oui, il y a eu des pressions lors de l’étude en comité à l’égard d’un tel amendement, principalement de la part du Bloc québécois, en raison, je crois, de ce qui est en vigueur au Québec depuis 1977 par rapport aux lois de retour au travail et du vaste appui du public à l’égard de ce régime de relations de travail au Québec. Selon le Bloc québécois, 18 mois, c’est trop long pour rétablir l’équité.
Cependant, le Conseil canadien des relations industrielles a dit qu’il lui faut du temps pour renforcer les capacités et former plus de personnel. Il lui faut plus de ressources pour être en mesure de respecter une échéance de moins de 18 mois.
Lors des échanges à ce sujet, on a dit au CCRI qu’il avait 12 mois, mais que le gouvernement s’engageait à fournir les ressources nécessaires pour qu’il puisse embaucher et former du personnel en vue de mettre le système en place. Ce n’était pas parfaitement acceptable pour les membres du comité qui souhaitaient essentiellement que ce soit mis en place dès la sanction royale. Voilà pour l’autre aspect.
Comme c’est souvent le cas lors de ce genre de négociations, on a coupé la poire en deux et fixé un délai de 12 mois, mais le gouvernement s’est engagé à fournir les ressources nécessaires pour que le CCRI puisse renforcer ses capacités afin de respecter le délai.
J’ai une question complémentaire au sujet du maintien des services essentiels. Je vois que l’on prévoit un processus de négociation en parallèle dans un court délai après l’avis de négociation, afin d’établir quels sont les services essentiels en cas de grève ou de lock-out.
Y a-t-il eu des craintes exprimées par des parties par rapport à ce processus en parallèle, qui pourrait s’étirer dans le cadre d’une double négociation d’une convention collective et de services essentiels?
Je pense que la réponse à cette question est non, de mon point de vue. C’est un bon argument, car vous remarquerez que l’un des amendements au projet de loi porte sur le délai. En effet, le projet de loi prévoyait un délai de 90 jours pour que le Conseil canadien des relations industrielles agisse après avoir reçu une demande de plainte ou un renvoi par le ministre. Il devait avoir 90 jours pour répondre.
Comme je l’ai dit plus tôt dans mon discours, il y a eu des années où les réponses prenaient en moyenne 250 jours ou 150 jours à arriver — bien plus, en tout cas, que les 90 jours prévus. Cette disposition a été élaborée avec le Conseil canadien des relations industrielles et les fonctionnaires du ministère, puis le Cabinet l’a acceptée et l’a inscrite dans le projet de loi.
Certains députés ont estimé que ce délai était beaucoup trop long et que la possibilité de retarder les grèves ou les lockouts était préjudiciable au processus, qui devrait se dérouler de manière plus efficace et plus rapide. Ils ont proposé 45 jours.
Le délai de 90 jours a été réduit à 82 jours. En regardant cela, on peut se dire : « Quoi? Une différence de huit jours? Pourquoi? »
Voici ce que j’ai appris au cours de ce processus, et il est important de le comprendre. Vous y avez fait allusion lorsque vous avez parlé du processus de négociation collective.
Tout d’abord, la partie émet un avis de négociation collective. À partir de ce moment, les négociations peuvent se poursuivre aussi longtemps que les parties le souhaitent, jusqu’à ce qu’elles parviennent à un point où soit elles ont conclu une entente, soit elles ont décidé qu’il est impossible de résoudre leur différend à la table de négociation. Elles doivent alors émettre un avis de différend.
À ce moment, le ministre a jusqu’à 15 jours — mais cela prend rarement aussi longtemps — pour décider s’il nomme des services de conciliation ou de médiation de la fonction publique fédérale. Ce point a été soulevé à maintes reprises à l’autre endroit, car nous disposons de services de conciliation et de médiation très efficaces. En fait, 96 % des différends sont résolus par l’entremise de ce processus. Seulement 4 % des différends — un sous-groupe de l’ensemble des accords conclus — passent à la prochaine étape, ce qui signifie la possibilité d’un vote de grève ou d’un lockout, selon le cas.
Le processus de conciliation dure 60 jours, à moins que les parties décident mutuellement de le prolonger. Il peut ensuite être suivi d’une médiation, selon l’écart qui sépare les parties. Le processus de médiation peut durer aussi longtemps que les parties sont disposées à le poursuivre, si des progrès sont réalisés. Il est toujours préférable d’avoir une convention collective négociée; je pense que nous convenons tous de ce point. Cela permet d’éviter les arrêts de travail, qu’il s’agisse d’une grève ou d’un lockout, et l’acrimonie qui en découle. Les meilleures ententes sont celles que les parties peuvent conclure elles-mêmes.
Bien que cette étape puisse durer longtemps, elle doit se poursuivre pendant 21 jours avant que l’une ou l’autre des parties puisse donner un avis de grève ou de lockout. Je suis sûre que vous savez parfaitement qu’une fois qu’un avis est donné, il faut attendre 72 heures avant de pouvoir déclencher la grève ou le lockout. Parfois, les parties prennent plus de temps. Parfois, cela les pousse à recommencer à négocier. Il y a tout cela, mais il faut attendre au moins 72 heures.
Si vous additionnez tout cela, sénateur Carignan, vous obtenez un intervalle minimal de 97 jours pendant lequel les parties peuvent suivre toutes les étapes et atteindre un point où il pourrait y avoir une grève ou un lockout.
Examinons maintenant votre préoccupation concernant la création d’un processus de négociation parallèle dans le but de conclure une entente sur le maintien des activités. Une fois que l’avis de négociation est donné, le projet de loi prévoit un délai maximal de 15 jours, que les parties parviennent à une entente ou non. Ce n’est pas comme si les parties ignoraient quels seront les éléments de contention ni comme s’ils n’avaient jamais connu pareille situation auparavant. Parfois, il existe une entente type, et si rien n’a changé, c’est ce qui sera adopté, souvent avec l’accord des deux parties. Si ce n’est pas le cas, une demande est présentée, ou, encore une fois, il y a la possibilité d’un renvoi ministériel.
Du début à la fin — je constate que la Présidente se lève —, ce processus prendra en tout moins que les 82 jours actuellement prévus dans le projet de loi. Cette négociation s’effectue séparément la plupart du temps. Je ne crois pas qu’il y ait une redondance...
Le temps de parole de la sénatrice est écoulé.