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DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — L'Ukraine--Les agissements de la Russie

24 février 2022


L’honorable Denise Batters [ - ]

Honorables sénateurs, je condamne aujourd’hui la Russie pour l’invasion injustifiée de l’Ukraine. Nous sommes tous horrifiés par les images qui sont parvenues d’Ukraine dans les heures qui ont suivi l’invasion. L’Ukraine est assiégée de toutes parts. Ses citoyens se terrent dans des tunnels de métro et se rassemblent et se recueillent pour prier parce qu’aucune autre option ne semble s’offrir à eux pour l’instant.

En tant que petite-fille d’immigrants ukrainiens qui ont trouvé refuge au Canada il y a 100 ans, cette invasion me bouleverse profondément. Je suis allée en Ukraine en 2014 à titre d’observatrice lors des élections présidentielles qui ont eu lieu cette année-là. J’ai été frappée par la profonde gratitude qu’exprimaient les Ukrainiens à l’égard de leur démocratie émergente et j’ai été touchée par les villageoises âgées qui apportaient des fleurs fraîches aux bureaux de scrutin pour remercier les autorités de leur donner l’occasion d’exercer leur droit démocratique de voter. Honorables sénateurs, aujourd’hui, mes pensées vont à ces Ukrainiennes du troisième âge.

Le Canada ne peut abandonner les Ukrainiens à la folie de Vladimir Poutine. Nous devons condamner de la façon la plus vigoureuse qui soit l’invasion brutale et entièrement injustifiée de l’Ukraine orchestrée par Poutine, et nous condamnons également le mépris flagrant dont Poutine fait preuve à l’égard des obligations de la Russie aux termes du droit international. Toutefois, nous ne pouvons nous contenter d’observer et de condamner les actes abominables du dictateur qu’est Poutine. Le Canada doit intervenir maintenant pour défendre la paix et la liberté en Ukraine.

Pendant des années, les autorités ukrainiennes ont imploré le Canada de leur fournir des armes défensives, mais le gouvernement Trudeau ne leur en a pas fourni. Il a seulement accepté de fournir quelques armes défensives à la veille de l’invasion. Elles ont été fournies si tard que je ne sais même pas si elles parviendront à se rendre aux soldats ukrainiens sur le terrain. Aujourd’hui, le président ukrainien Volodimir Zelenski a demandé à tous les citoyens ukrainiens en mesure de le faire de prendre les armes contre les forces de Poutine. Les retards et l’étalage de vertu du gouvernement Trudeau sont inefficaces face à une menace aussi monumentale.

Le 13 février, le premier ministre a publié le gazouillis suivant : « On va défendre avec vigueur la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. » C’était le même jour où les instructeurs canadiens en Ukraine se sont dirigés vers la frontière polonaise et où l’ambassade du Canada à Kiev a été évacuée. Qu’ont signifié toutes ces paroles et celles prononcées par d’autres dirigeants occidentaux pour le peuple ukrainien? Nous pouvons en voir les résultats aujourd’hui, et cela me brise le cœur.

Le moins que nous puissions faire, maintenant, c’est d’ouvrir nos frontières aux centaines de milliers d’Ukrainiens qui fuient leur pays. L’opposition officielle appuiera cette motion, mais j’implore le gouvernement canadien de comprendre que l’heure n’est pas aux paroles sans valeur. Il est de notre devoir moral d’agir maintenant pour aider le peuple ukrainien.

[Note de la rédaction : La sénatrice Batters s’exprime en ukrainien.]

L’honorable Stan Kutcher [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en éprouvant une profonde tristesse pour les citoyens ukrainiens ainsi que pour le reste du monde libre. Je suis inquiet pour les Ukrainiens, notamment pour ma famille qui vit là‑bas, comme c’est le cas de beaucoup de sénateurs et de gens dans notre pays libre et prospère.

Ce matin, j’ai examiné une carte. Elle montrait les endroits qui ont été ciblés par des attaques de missiles et des attaques aériennes : Kiev, Lviv et tout près de Ternopil. Ma famille se trouve là-bas.

Nous sommes témoins d’un acte criminel commis contre l’Ukraine. Il s’agit d’une atteinte à la primauté du droit international ainsi qu’aux valeurs de tous ceux qui vivent dans une société démocratique libre, et il faut s’y opposer. Bien que notre opposition soit tardive, elle doit être totale et percutante, et il faut agir sur‑le‑champ.

L’invasion n’est pas une surprise. Elle n’est pas le fruit de la réaction impulsive d’un esprit dérangé, mais l’aboutissement d’un subterfuge qui a pris des années à préparer, des années pendant lesquelles nous et le reste du monde libre aurions pu agir, mais ne l’avons pas fait, des années pendant lesquelles les signes étaient évidents, mais nous ne les avons pas vus ou, pire encore, nous avons choisi de ne pas les voir, ou bien nous avons encouragé ce forfait. Il n’est pas surprenant que, plus tôt cette semaine, M. Trump ait loué le génie de M. Poutine et que Fox News s’en soit pris au Canada et ait vanté les mérites de la Russie.

Malheureusement, bien des Canadiens n’ont peut-être pas conscience de la manière dont agissent les dictateurs. La Russie s’emploie depuis longtemps à déstabiliser les démocraties occidentales, y compris le Canada, souvent en s’ingérant dans les élections et en attisant le populisme et le libertarisme. Comme l’Institut Macdonald-Laurier et l’organisme DisinfoWatch l’ont signalé, pendant la pandémie, la Russie a intensifié la propagande anti-vaccin et promu les discours qui mettent en doute l’existence de la COVID, la légitimité des protocoles canadiens de santé publique et l’innocuité des vaccins. Elle a aussi incité les gens à contester les mesures sanitaires qui visent pourtant à les protéger, eux et l’ensemble de la population.

Ma famille ne connaît que trop bien ces techniques. La déstabilisation de gouvernements légitimes qui nuisent aux intérêts de la Russie a toujours été un trait caractéristique de ce régime. J’ai des liens profonds avec l’Ukraine. Mes parents étaient des réfugiés de la Seconde Guerre mondiale. Ils ont vécu la tyrannie, la vraie. Ils ont tout perdu. La plupart des membres de ma famille ont été envoyés dans les goulags. Ceux qui ont survécu ont été mis au ban de la société. Certains ont réussi à se refaire une place; d’autres, non.

Honorables sénateurs, ne nous laissons pas berner par la Russie. Veillons à ce qu’elle ne déstabilise pas notre pays et ne mette pas en pièces la primauté du droit sur la scène internationale. Nous devons être solidaires de l’Ukraine et agir dès maintenant, sans plus attendre.

Comme le dit l’hymne national de l’Ukraine, la liberté de ce pays n’a pas encore disparu.

[Note de la rédaction : Le sénateur Kutcher s’exprime en ukrainien.]

Faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour qu’il en reste ainsi. Merci et d’akuju.

L’honorable Peter M. Boehm [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour vous dire ce que vous savez déjà. Le monde a changé hier soir, et pas pour le mieux. L’invasion éhontée, non provoquée et injustifiée de l’Ukraine par la Russie contrevient à toutes les normes et à toutes les règles de droit international ainsi qu’aux accords déjà conclus et viole la Charte des Nations unies. Elle est contraire à tout comportement décent et civilisé et doit être condamnée de façon catégorique. Cette invasion a été méticuleusement planifiée, et les instances de la Russie visant à trouver une solution diplomatique étaient profondément cyniques et pernicieuses. Que le pays possédant le plus grand territoire du monde cherche à redessiner des frontières internationales établies et acceptées au moyen d’une guerre d’agression pour obtenir encore plus de territoire, comme la Russie l’a fait en envahissant et en annexant la Crimée en 2014, dépasse l’entendement. Cela témoigne du besoin tordu de Vladimir Poutine de réécrire l’histoire et d’une volonté expansionniste jamais vue depuis l’Allemagne d’Hitler.

Je soutiens les mesures prises par notre gouvernement et les efforts concertés des pays du G7, sous la présidence de l’Allemagne, ainsi que des partenaires de l’OTAN visant à mettre de la pression sur le régime autocratique de M. Poutine et à prendre des mesures contre celui-ci. On a beaucoup parlé de tyrans dernièrement, chers collègues. Monsieur Poutine en est un.

Mes premiers contacts avec la Russie ont eu lieu lorsque je me suis joint à notre service extérieur. C’était à l’époque de l’Union soviétique. J’ai regardé et, comme bon nombre d’autres personnes, j’ai été encouragé par la mise en place de réformes telles que la glasnost et la perestroïka; tous ces nouveaux mots que nous avons appris et qui signifiaient le changement et l’ouverture vers une société plus libre en Russie en 1989.

J’ai travaillé avec l’ancien premier ministre Jean Chrétien en vue du Sommet du G7 de 1995 à Halifax. Le président russe Boris Yeltsin avait alors été invité à participer à une réunion. C’était une importante initiative qui a éventuellement mené à la création du G8. Tout le monde avait l’impression que l’époque de l’antagonisme était chose du passé, et qu’on pouvait maintenant collaborer à de nombreux projets et initiatives.

J’ai eu l’honneur d’être le représentant personnel, ou sherpa, de l’ancien premier ministre Stephen Harper à l’occasion de ce qui est devenu le dernier Sommet du G8 à Lough Erne, en Irlande du Nord, en juin 2013. M. Harper revenait de Dublin et avait émis certains commentaires controversés au sujet de la valeur des discussions du G8 alors qu’un des membres était manifestement déphasé. Je me souviens en effet que M. Poutine dominait les discussions en matière de politique étrangère avec son point de vue particulier sur la crise en Syrie, à l’exclusion de presque tout autre sujet. Les autres leaders étaient exaspérés et l’opinion de M. Harper s’est révélée juste.

En 2014, ce fut au tour de la Russie d’être l’hôte du Sommet du G8 à Sotchi. J’ai participé à une réunion de sherpas à Moscou en janvier, puis tout a pris fin. La Russie venait d’envahir et de prendre la Crimée, puis avait mis en place des forces interposées dans la région du Donbas, en Ukraine. À la demande de M. Harper, les leaders du G7 se sont réunis en marge du Sommet sur la sécurité nucléaire à La Haye, en mars, où j’ai aussi agi à titre de sherpa, et une décision a été prise. Le G8 est redevenu le G7, travaillant ensemble pour le bien commun de la planète.

Chers collègues, la Russie est passée de paria mondial à partenaire, puis de nouveau à paria. Ses gestes sont injustifiés, inacceptables et répréhensibles.

Unissons-nous pour condamner cette scandaleuse violation de la souveraineté et de l’indépendance de l’Ukraine.

Faisons front commun et soutenons le gouvernement légitime de l’Ukraine et son peuple fort et résilient. Merci.

L’honorable Paula Simons [ - ]

Honorables sénateurs, je suis Edmontonienne. Je commence ainsi parce que tous les habitants d’Edmonton ont des origines ukrainiennes, de près ou de loin. Comme beaucoup d’Edmontoniens, mes racines familiales sont profondément liées à l’Ukraine.

Ma mère s’appelle Oli Dyck et elle est née en Ukraine, dans une communauté mennonite allemande nommée Felsenbach, qui est située dans la province du Dnipropetrovsk. La mère de mon père s’appelait Reisa Hardashnikov et elle est née dans la communauté juive de Poltava. En raison des aléas de l’histoire, les branches juive et allemande de ma famille ont quitté l’Ukraine pour émigrer en Alberta. Ce n’est pas entièrement le fruit du hasard, car les vagues d’immigrants allemands, ukrainiens et juifs de l’Alberta étaient étroitement liées.

Aujourd’hui, quelles que soient nos racines, nous devons nous unir comme nation canadienne devant l’invasion complètement injustifiée de l’Ukraine par la Russie afin de soutenir nos amis et alliés canado-ukrainiens en cette période de terreur et d’incertitude.

Notre solidarité envers le peuple ukrainien ne doit pas se limiter à des mots — à moins qu’ils soient accompagnés d’un réel engagement, un engagement à imposer des sanctions concrètes à la Russie, un engagement que le Canada collaborera avec ses partenaires de l’OTAN et tous ses autres alliés pour envoyer un message clair au gouvernement Poutine que nous ne tolérerons pas cet acte de guerre.

Il y a des mesures que nous pouvons mettre en place ici même pour nous protéger contre les agressions plus subtiles de la Russie, notamment la campagne de propagande sophistiquée déjà visible sur Facebook et Twitter qui vise à miner notre détermination et à voiler la vérité. Nous devons résister à la propagande et à la désinformation de la Russie par l’entremise, entre autres, des chaînes RT et Fox News. Parce qu’il ne faut pas se leurrer : cette guerre ne se déroule pas seulement sur le sol ukrainien; des attaques sont aussi commises dans la blogosphère, les médias sociaux et les chaînes de télévision. Dans un monde virtuel sans frontières, le Canada, malgré la distance géographique qui le sépare de Kiev, est aussi un champ de bataille.

Nous devons nous armer de bon sens et de volonté. Comme le sénateur Boehm l’a dit, le monde a changé en une nuit. Le temps est venu d’ouvrir les yeux, d’unir nos forces et de protéger nos foyers et nos droits, non seulement ceux du Canada et de l’Ukraine, mais ceux du monde que nous aimons.

Merci, hiy hiy.

Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui à titre de fière Canadienne d’origine ukrainienne de troisième génération. Mes grands-parents ont quitté l’Ouest de l’Ukraine et se sont installés au Manitoba, dans la communauté rurale de Pine Ridge, en 1909. Ma famille est donc au Canada depuis un siècle. Je n’ai plus de parenté en Ukraine, mais j’ai une solide identité ukrainienne et je chéris les liens qui me rattachent à mes amis et aux membres de ma famille, surtout dans ma ville, Winnipeg.

J’ai été absolument ravie de serrer la main du président Zelenski en 2019, lorsqu’il était ici, à Toronto, pour la Conférence sur les réformes en Ukraine.

Toujours en 2019, j’ai eu l’honneur de participer à un panel pendant le Congrès des femmes ukrainiennes tenu à Kiev. J’ai alors vu de mes propres yeux que, comme je le lisais dans les livres depuis des années, l’Ukraine était en train de devenir une société ouverte et plurielle, dans laquelle les gens pouvaient militer en faveur de changements sociaux et voter à des élections libres.

Cette nouvelle Ukraine était très différente de celle que j’avais vue lors de mon premier voyage, en 1987, pendant les jours sombres de la fin du régime soviétique.

Depuis la chute de l’Union soviétique, l’Ukraine s’est engagée sur la voie de la démocratie et d’une économie ouverte. Ce chemin a été parsemé d’une multitude de détours, de réussites et de difficultés, mais la direction à suivre est devenue plus claire et plus ferme au cours de la dernière décennie.

Vladimir Poutine déteste cette vision occidentale. Son objectif : détruire cette nouvelle Ukraine et la replonger dans les jours sombres d’un régime autoritaire.

La Russie a déclaré la guerre à l’Ukraine aujourd’hui, et l’histoire du monde a changé. Il y a maintenant un monde avant le 24 février 2022 et un monde après le 24 février 2022. La paix qui régnait auparavant en Europe est maintenant terminée.

Cette invasion menace l’ordre international, la primauté du droit et la démocratie. Le monde libre doit se rallier à la cause ukrainienne et le faire immédiatement.

Il faut imposer des sanctions plus sévères contre l’économie et les banques russes et les biens des oligarques. Il faut aussi saisir les actifs russes en Occident.

L’Ukraine a besoin de plus d’aide pour se procurer des armes afin de se défendre. Ses amis et ses alliés doivent mettre en place une zone d’exclusion aérienne au-dessus de l’espace aérien ukrainien.

L’Ukraine aura besoin de soutien économique et d’aide humanitaire au cours des jours à venir.

Dans les années 1930, le monde a été lent à reconnaître le danger que posait Adolf Hitler pour notre civilisation. Nous ne pouvons pas commettre de nouveau cette erreur. Merci.

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