Projet de loi no 1 d'exécution du budget de 2022
Troisième lecture--Ajournement du débat
22 juin 2022
Propose que le projet de loi C-19, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022 et mettant en œuvre d’autres mesures, soit lu pour la troisième fois.
— Honorables sénateurs, c’est avec plaisir que je participe au débat à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-19, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022 et mettant en œuvre d’autres mesures (la Loi no 1 d’exécution du budget de 2022).
Parmi les mesures proposées dans ce projet de loi figurent de nombreuses mesures budgétaires récentes qui jouent un rôle essentiel dans le plan du gouvernement visant à faire croître l’économie et à rendre la vie plus abordable pour les Canadiens tandis qu’ils continuent de se remettre de la pandémie de COVID-19.
Dans ce discours, je reviendrai brièvement sur les mesures importantes touchant le logement, l’emploi et l’équité de notre système fiscal. De plus, je profiterai de ce discours pour aborder d’autres mesures, comme la taxe sur les produits de vapotage et les mesures fiscales touchant le climat.
Je terminerai en faisant la lumière sur les observations qui découlent des rapports des comités qui ont étudié les différentes parties du projet de loi C-19, et plus particulièrement celles du rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Je crois qu’il est important de prononcer dans cette Chambre certains passages de ce rapport percutant.
La première section traite du soutien à l’accessibilité et de la disponibilité des logements.
Nous savons notamment, honorables sénateurs, que les Canadiens ont besoin de logements pour prospérer, et le Canada n’en compte tout simplement pas assez. Pour faire face à cette situation, le gouvernement a présenté dans le récent budget fédéral un plan ambitieux en matière de construction de logements. Ce plan vise à doubler le nombre de logements que nous construirons au pays au cours des 10 prochaines années.
Bien évidemment, un effort national sera nécessaire pour concrétiser ce projet. Le gouvernement travaillera de concert avec ses partenaires de tous les ordres de gouvernement et offrira des paiements importants aux provinces et aux territoires, conformément à ce qui est proposé dans le projet de loi C-19. Jusqu’à 750 millions de dollars pourraient ainsi aider les municipalités à faire face au manque à gagner engendré par la pandémie en matière de transport en commun et de logement. Le financement serait offert à condition que les provinces et les territoires versent une contribution équivalente à celle du gouvernement fédéral et accélèrent la cadence, en collaboration avec leurs municipalités, pour construire plus de logements pour les Canadiens.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-19 rendrait également le marché du logement plus équitable. Nous savons, par exemple, que les investisseurs étrangers achètent activement des biens immobiliers résidentiels au Canada. Le projet de loi prévoit donc d’interdire l’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens pendant deux ans. Cette mesure permettrait de veiller à ce que les logements servent de résidences pour les familles canadiennes, et non d’actifs financiers spéculatifs.
Toujours dans l’optique de rendre le marché immobilier plus équitable, le projet de loi éliminerait l’ambiguïté que peuvent créer les règles actuelles en ce qui concerne l’application de la TPS ou de la TVH dans le cas des cessions de contrat de vente. En effet, toutes les cessions de contrat de vente faites par des contribuables seraient taxables. De plus, le projet de loi uniformiserait le traitement fiscal entourant l’achat d’une nouvelle maison.
À l’heure actuelle, quand une personne cède un contrat de vente, la TPS et la TVH s’appliquent dans certains cas, mais pas dans d’autres, selon la raison qui a motivé l’achat de la maison.
À titre d’exemple, il n’y a pas de TPS ou de TVH si l’acheteur avait, au départ, l’intention de vivre dans la maison en question. Cela laisse aux spéculateurs la possibilité de cacher leurs intentions initiales et de créer, pour toutes les personnes qui participent à la cession de contrat de vente, de l’incertitude quant à la nécessité de payer ou non la TPS ou la TVH. En outre, les règles actuelles entraînent l’application inégale de la TPS ou de la TVH au prix total et final d’une habitation neuve. Pour remédier à cette situation, le projet de loi C-19 modifierait la Loi sur la taxe d’accise afin de rendre taxables aux fins de la TPS ou de la TVH toutes les cessions d’un contrat de vente relativement à un immeuble d’habitation à logement unique ou à un logement en copropriété, neuf ou ayant fait l’objet de rénovations majeures.
Sur le plan du logement, le projet de loi C-19 rendrait également plus abordables les maisons dans lesquelles les gens vivent déjà. Au cours des dernières années, le crédit d’impôt pour l’accessibilité domiciliaire a permis de compenser une partie des coûts de rénovation et d’amélioration des résidences afin de les rendre plus sécuritaires pour les aînés et les personnes handicapées. Afin de mieux soutenir la vie autonome, le projet de loi C-19 doublerait la limite annuelle du crédit pour la porter à 20 000 $, ce qui rendrait plus abordables d’autres modifications et rénovations importantes. Ces améliorations, qui s’appliqueraient à l’année 2022 et aux années d’imposition ultérieures, fourniraient jusqu’à 1 500 $ d’aide fiscale supplémentaire. Dans l’ensemble, le projet de loi C-19 offre aux Canadiens une série de mesures qui favorisent la disponibilité et l’abordabilité des logements.
Abordons l’importance d’investir dans une main-d’œuvre solide. Les investissements contenus dans le budget de 2022 dépassent grandement le cadre de l’immobilier. Le projet de loi C-19 prévoit des investissements dans une main-d’œuvre plus solide et en pleine croissance.
Il fera en sorte qu’il soit plus facile pour les immigrants qualifiés, dont notre économie a besoin, de s’installer au Canada. Il permettra d’améliorer la capacité du gouvernement à sélectionner les candidats dans le bassin du système Entrée express qui correspondent aux besoins des entreprises canadiennes.
Le projet de loi C-19 propose d’introduire une déduction relative à la mobilité de la main-d’œuvre pour les gens de métier, qui permettrait aux travailleurs admissibles de déduire les dépenses admissibles jusqu’à 4 000 $ par année en frais de déplacement et de relocalisation temporaire. Rendre plus abordables les déplacements des gens de métier vers leur lieu de travail aiderait à réduire les pénuries de main-d’œuvre dans certaines régions de notre pays.
Le projet de loi C-19 prévoit également l’introduction de 10 jours de congé de maladie payé pour les travailleurs du secteur privé sous réglementation fédérale, ce qui aidera un million de travailleurs à protéger leur famille, leur milieu de travail et leur emploi.
Le projet de loi C-19 permettrait de faire progresser les efforts du gouvernement en vue de renforcer le système fiscal pour les Canadiens et de s’assurer que chacun paie sa juste part. Par l’entremise du projet de loi C-19, le gouvernement créera donc une taxe sur les véhicules de luxe et les avions neufs dont le prix de détail est supérieur à 100 000 $ et sur les bateaux neufs valant plus de 250 000 $.
Le projet de loi C-19 aidera également à lutter contre les crimes financiers complexes, comme le blanchiment d’argent, la corruption et l’évasion fiscale, en donnant accès à des données précises et actuelles sur les personnes qui possèdent et contrôlent les sociétés. Les sociétés fictives canadiennes peuvent servir à dissimuler la propriété réelle d’actifs, y compris des entreprises et des biens dispendieux. Ce changement à la loi accélérera la création d’un registre public consultable des sociétés constituées en vertu d’une loi fédérale avant la fin de 2023, soit deux ans plus tôt que ce qui était prévu au départ, afin de lutter contre les activités illégales.
Cela aiderait également à empêcher le recours à des sociétés fictives dans le but d’éviter les sanctions, tout en permettant de localiser et de geler des actifs financiers. Cette mesure est d’autant plus pertinente que le Canada met tout en œuvre, avec ses alliés, par l’entremise du nouveau Groupe de travail sur les élites, les mandataires et les oligarques russes, pour cibler les actifs mondiaux des élites russes et des individus qui agissent en leur nom.
Au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du développement international, les fonctionnaires ont décrit le processus qui serait suivi pour confisquer et disposer des biens saisis. Le ministre serait responsable de déterminer quels biens peuvent être saisis, de s’adresser à un tribunal pour obtenir une ordonnance de confiscation, et de donner avis aux parties qui peuvent avoir un intérêt dans l’objet de la saisie.
En ce qui concerne la reprise économique, certaines mesures faisant partie du projet de loi C-19 s’inscrivent dans la continuité d’une reprise économique adaptée aux besoins de différents secteurs qui ont été durement touchés pendant la pandémie.
Bon nombre de productions cinématographiques et magnétoscopiques réalisées au Canada ont connu des retards au cours de cette période. Le projet de loi C-19 accorderait une période supplémentaire pour engager des dépenses admissibles et prolonger certaines dates d’échéances relatives aux crédits d’impôt disponibles dans ces circonstances.
En 2019, environ 1 540 et 550 sociétés ont eu droit respectivement au Crédit d’impôt pour production cinématographique ou magnétoscopique canadienne (CIPC) et au Crédit d’impôt pour services de production cinématographique ou magnétoscopique (CISP). Un nombre comparable d’entreprises pourrait donc potentiellement se prévaloir de ces reconductions. Une autre modification qui se trouve dans la première partie du projet de loi C-19 permettrait à l’Agence du revenu du Canada (ARC) d’accepter les demandes tardives de Subvention salariale d’urgence du Canada, de Subvention d’urgence du Canada pour le loyer et du Programme d’embauche pour la relance économique du Canada. Ces programmes sont, depuis leur lancement, assujettis à des échéances strictes qui sont parfois mal adaptées à la réalité que vivent les Canadiens. Cette mesure permettrait donc à l’ARC de tenir compte des circonstances exceptionnelles, au moyen d’une analyse cas par cas, lorsque cela est approprié, afin de reconnaître l’admissibilité d’une personne malgré sa demande tardive.
Les programmes offerts par le gouvernement en réponse à la pandémie, y compris la Subvention salariale d’urgence du Canada, la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer, la Prestation canadienne pour les travailleurs en cas de confinement et le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, ont énormément contribué à maintenir l’économie canadienne à flot. Selon le rapport publié récemment par le Fonds monétaire international au titre de l’article IV, les mesures décisives et l’aide financière sans précédent ont contribué à limiter les conséquences économiques et à protéger des emplois au Canada.
Afin de mettre en œuvre les programmes destinés à soutenir les Canadiens et l’économie pendant la pandémie, le gouvernement a dû faire des emprunts exceptionnels. Le total des emprunts effectués du 23 au 31 mars 2021, au titre de l’alinéa 46.1c) de la Loi sur la gestion des finances publiques, s’élevait à 6,3 milliards de dollars. Du 1er avril au 6 mai 2021, le total des emprunts au titre de cet alinéa s’élevait à 2,1 milliards de dollars. Les montants empruntés au titre de l’alinéa 46.1c) sont exclus du calcul de la limite d’emprunt du gouvernement au titre de la Loi autorisant certains emprunts, et ils ne sont donc pas visés par les mêmes obligations en matière de reddition de comptes et de transparence que les autres montants empruntés dans des circonstances normales.
Étant donné que la période où nous devions faire face à des circonstances exceptionnelles a pris fin, le gouvernement propose que les emprunts exceptionnels effectués à partir du printemps 2021 soient traités comme des emprunts ordinaires afin que l’on indique de façon plus transparente l’état de la dette du gouvernement et que des comptes soient rendus au Parlement sur le total des emprunts. Le gouvernement a suivi un processus semblable à l’automne 2020 par rapport aux emprunts exceptionnels effectués entre le 1er avril et le 30 septembre 2020.
Parlons maintenant de la santé des Canadiens. En matière de santé, la partie 2 modifie la Loi sur la taxe d’accise afin que les règles d’admissibilité au remboursement élargi de la TPS/TVH pour les hôpitaux reconnaissent le rôle croissant des infirmières et infirmiers praticiens dans la prestation de services de soins de santé dans toutes les régions du Canada, y compris celles qui ne sont pas éloignées. Ce remboursement sera disponible pour les hôpitaux, organismes de bienfaisance ou organismes à but non lucratif offrant des services de soin de santé avec la participation active ou la recommandation d’un médecin, ou d’un infirmier ou d’une infirmière.
Rappelons aussi que le projet de loi C-19 prévoit un paiement ponctuel de 2 milliards de dollars pour réduire les arriérés dans le système de santé, par l’intermédiaire du Transfert canadien en matière de santé. Ce paiement sera distribué aux provinces et aux territoires de façon proportionnelle, selon le nombre d’habitants.
Le gouvernement du Canada propose également des mesures qui permettront de prévenir les mauvaises habitudes de santé à long terme chez les jeunes au moyen d’obstacles économiques. La partie 3 du projet de loi C-19 propose de modifier la Loi de 2001 sur l’accise de même que des lois et règlements connexes, afin de mettre en place un nouveau cadre de droits d’accise pour les produits de vapotage.
Ce nouveau cadre exigerait que les fabricants de produits de vapotage obtiennent une licence d’accise de l’Agence du revenu du Canada et qu’un timbre d’accise soit apposé à tous les produits de vapotage qui arrivent sur le marché canadien pour la vente au détail.
L’amendement comprend également des règles administratives et d’application à l’égard du nouveau cadre visant à ce que celui-ci s’applique aux produits de vapotage importés. De nombreux intervenants, comme la Société canadienne du cancer, exhortent les sénateurs à appuyer le projet de loi C-19 pour faire en sorte que les produits de vapotage soient taxés dès que possible. En effet, certaines statistiques sont très inquiétantes, surtout chez les jeunes.
Chers collègues, les résultats de l’enquête nationale sur le tabac, l’alcool et les drogues chez les élèves du secondaire indiquent que le taux de vapotage a plus que triplé sur une période de quatre ans, passant de 9 à 16 %, puis à 29 %. De récentes études canadiennes et étatsuniennes montrent des tendances à la hausse alarmantes. Quand on pense que certains produits peuvent contenir jusqu’à 50 milligrammes de nicotine, il est troublant de constater qu’une nouvelle génération développe une dépendance à la nicotine en consommant des produits de vapotage.
Les produits de vapotage sont particulièrement abordables, et les jeunes se soucient beaucoup du coût des produits. Nous savons que les taxes sur le tabac ont permis de réduire le tabagisme chez les jeunes et la même logique s’applique aux produits de vapotage. Une taxe devrait donc contribuer à réduire la consommation de ces produits chez les jeunes.
Cependant, dans l’intérêt de la santé publique, le gouvernement doit envisager une stratégie globale de lutte contre la consommation de nicotine chez les Canadiens en général. Idéalement, cette taxe serait accompagnée d’autres mesures, comme une réglementation imposant une limite au taux de nicotine que ces produits peuvent contenir, comme c’est le cas pour le cannabis, une restriction imposée à la promotion et aux saveurs offertes, ainsi que d’autres initiatives d’éducation et de prévention.
À cette fin, la partie 3 du projet de loi modifie également la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces pour permettre au gouvernement fédéral de conclure des accords de coordination de la taxation des produits de vapotage avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Les provinces et les territoires peuvent aussi jouer un rôle dans cette stratégie nationale dans leurs champs de compétence, notamment en réglementant l’âge légal de consommation de ces produits et l’octroi de licences aux établissements.
Le projet de loi C-19 continuera d’aider les Canadiens dans la lutte contre les changements climatiques. En 2019, le gouvernement a instauré un prix national sur la pollution par le carbone pour s’assurer qu’il n’est plus possible de polluer gratuitement partout au Canada. Dans les provinces où la redevance fédérale sur les combustibles s’applique, tous les produits directs sont remis aux Canadiens et aux communautés. Environ 90 % de ces produits profitent directement à la population par l’intermédiaire des paiements de l’incitatif à agir pour le climat.
La majorité des familles reçoivent plus d’argent qu’elles n’en paient au système fédéral grâce au remboursement de l’Incitatif à agir pour le climat. Le projet de loi C-19 modifierait les modalités de paiement de l’Incitatif à agir pour le climat, qui est maintenant un crédit d’impôt remboursable que les habitants de l’Ontario, du Manitoba, de la Saskatchewan et de l’Alberta réclament chaque année dans leur déclaration de revenus, et qui deviendrait un crédit versé tous les trois mois à compter de juillet de cette année. Le premier versement serait double et inclurait les redevances sur les combustibles pour les deux premiers trimestres de l’exercice 2022-2023.
Pour favoriser la croissance du secteur canadien de la fabrication de technologies propres, le projet de loi C-19 aiderait aussi les Canadiens et les entreprises d’ici à profiter de la transition mondiale vers une économie propre en réduisant de moitié le taux d’imposition des entreprises qui fabriquent des technologies à zéro émission.
Le projet de loi C-19 propose également une mesure visant à élargir la déduction pour l’allocation du coût en capital pour y inclure le nouveau matériel de production d’énergie propre. La mesure exclurait l’équipement alimenté principalement par des combustibles fossiles — par exemple, les systèmes de cogénération alimentés par des combustibles fossiles et les systèmes à cycle combiné améliorés alimentés par des combustibles fossiles —, imposerait une exigence d’efficacité aux systèmes alimentés par des déchets et limiterait la proportion admissible de combustibles fossiles qui peuvent être utilisés par des équipements admissibles.
Je vais maintenant parler des mesures de protection pour le Canada.
Le projet de loi C-19 modifierait la Loi sur les mesures spéciales d’importation et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur pour renforcer et améliorer l’accès au système canadien de recours commercial. Ce système permet l’imposition de droits antidumping ou compensateurs sur des importations pour protéger les producteurs nationaux contre les dommages causés par les marchandises sous-évaluées ou subventionnées, garantissant ainsi des conditions concurrentielles plus favorables aux entrepreneurs et aux travailleurs canadiens.
Le système de recours commercial permet aussi l’application de mesures de sauvegarde pour protéger les producteurs nationaux contre les dommages causés par l’afflux de produits à juste prix. À ce stade de notre histoire, ces mesures cruciales sont essentielles à notre économie.
La section 20 du projet de loi C-19 modifierait la Loi sur les douanes pour autoriser l’Agence des services frontaliers du Canada à procéder à l’exécution et au contrôle d’application de cette loi par voie électronique. Elle définirait aussi l’expression « importateur officiel » et prévoirait que cet importateur soit solidaire du paiement des droits, au même titre que l’importateur ou la personne autorisée à faire une déclaration en détail ou provisoire de marchandises, selon le cas, et le propriétaire des marchandises. Cela rendrait le système canadien plus équitable et efficace.
Dans le cadre de l’Accord Canada—États-Unis—Mexique (ACEUM), le Canada a accepté de modifier la Loi sur le droit d’auteur, afin de faire passer la durée générale de protection du droit d’auteur de 50 à 70 ans après la mort de l’auteur, d’ici la fin de l’année 2022. La durée de protection générale s’appliquera à un large éventail d’œuvres. Cela permettra au Canada de respecter ses obligations, de se retrouver sur un pied d’égalité avec ses partenaires commerciaux et de créer de nouvelles possibilités d’exportation pour l’industrie créative canadienne et le contenu canadien, tout en continuant à protéger les auteurs.
Le projet de loi C-19 modifierait la Loi sur la concurrence pour mieux protéger les consommateurs et pour que les marchés soient plus justes et équitables. Le gouvernement a décidé d’entreprendre cette modernisation en deux phases.
Dans le cadre de la première phase, les modifications ciblées proposées dans le projet de loi C-19 permettront au Canada de se conformer davantage aux pratiques exemplaires internationales et fourniront des avantages immédiats et tangibles aux consommateurs et aux entreprises. De manière générale, les modifications que propose le gouvernement permettront de renforcer les pouvoirs d’enquête du Bureau de la concurrence; d’interdire, pour motif pénal, la fixation des salaires et les accords connexes; d’augmenter les amendes maximales et les sanctions administratives pécuniaires; de préciser que l’affichage de prix partiel constitue une indication fausse ou trompeuse; d’élargir le champ des pratiques commerciales qui peuvent constituer un abus de position dominante; de permettre l’accès privé au Tribunal de la concurrence pour remédier à un abus de position dominante; enfin, d’améliorer l’efficacité des avis de fusion et d’autres dispositions.
Dans la deuxième phase, le gouvernement organisera de vastes consultations et procédera à un examen approfondi afin de poursuivre la réforme en tenant compte de changements encore plus radicaux.
J’aimerais maintenant parler du travail — dont je suis très fière — accompli par tous les comités vers la vérité et la réconciliation.
Dans mon discours à l’étape de la deuxième lecture, j’ai reconnu et remercié les membres et les présidents des six comités qui ont réalisé une étude préalable de certaines portions du projet de loi C-19, de même que les membres et le président du Comité des finances, qui ont étudié l’intégralité du projet de loi, une tâche longue et pénible. Les rapports des divers comités sont importants pour mettre en contexte les mesures et jettent parfois les jalons de futures études à l’égard de certains dossiers. On ne peut tout régler au moyen d’un projet de loi d’exécution du budget, mais l’information contenue dans ces rapports est précieuse pour la suite de nos travaux.
Avant de conclure mon discours, j’aimerais souligner un rapport que je trouve particulièrement important et percutant et que je vous invite tous à lire. Je parle du rapport déposé par le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Le comité a formulé quelques observations concernant la section 3 de la partie 5, qui propose l’abrogation de la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations.
Les Premières Nations ont réclamé à répétition l’abrogation et le remplacement de cette loi, et le gouvernement fédéral est maintenant tenu de le faire en vertu de l’entente de règlement pour régler les recours collectifs relatifs à l’eau potable dans les communautés des Premières Nations, approuvée par la Cour fédérale et la Cour du Banc de la Reine du Manitoba dans une décision conjointe rendue le 22 décembre 202. Ainsi, l’abrogation de la loi dans le projet de loi C-19 n’est pas litigieuse. Toutefois, il est important d’insister sur les observations du comité concernant l’accès à l’eau potable pour toutes les communautés au Canada. Le rapport dit :
Le comité trouve alarmante la crise de l’eau qui continue d’affliger certaines Premières Nations au Canada, une crise inacceptable qui cause des maladies graves, des problèmes de santé mentale et des souffrances inutiles.
On peut ensuite lire ceci dans le rapport :
Le comité rappelle la nécessité impérieuse d’avoir accès à de l’eau potable salubre pour toutes les Premières Nations.
Depuis novembre 2015, 132 avis permanents de faire bouillir l’eau ont été levés. Il y a eu beaucoup de progrès au cours des dernières années, mais le pays doit faire bien mieux et travailler en partenariat et en collaboration avec ses interlocuteurs autochtones pour trouver des solutions à la crise. Il y a encore à ce jour 34 avis permanents de faire bouillir l’eau dans 29 communautés.
Afin d’améliorer la situation, le comité a fait la suggestion suivante :
Le comité fait observer qu’il existe des solutions novatrices, pilotées par les Premières Nations, en ce qui concerne les infrastructures d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées [...] Le gouvernement du Canada pourrait y participer, notamment en facilitant la conclusion de partenariats entre les secteurs public et privé pour fournir des infrastructures aux Premières Nations de manière plus générale. La construction d’infrastructures permet de créer des emplois et peut offrir des débouchés économiques et des possibilités de formation pour les collectivités concernées. Par ailleurs, le gouvernement du Canada pourrait évaluer les coûts et les avantages des investissements dans les infrastructures en fonction du bilan socioéconomique général par rapport au coût que cela représente.
Je profite de l’occasion pour souligner que le 21 juin était la Journée nationale des peuples autochtones. Les observations présentées dans ce rapport nous rappellent la pertinence de cette journée nationale et l’importance de travailler à la reconnaissance de la vérité quant à la façon dont le Canada a traité les peuples autochtones dans le passé et à la façon dont il les traite aujourd’hui.
En conclusion, le projet de loi C-19 contient un large éventail de mesures visant à investir dans les Canadiens et à soutenir certaines de leurs plus grandes priorités.
En investissant dans les Canadiens, il contribuera à la croissance de notre économie, il soutiendra la création d’emplois et il renforcera notre reprise économique dans le sillage de la pandémie de COVID-19 et d’autres défis mondiaux actuels.
Je vous invite à voter en faveur du projet de loi d’exécution du budget et je vous remercie de votre attention.
Je vous remercie de cet excellent résumé et des détails que vous avez fournis. J’ai vraiment apprécié. J’aimerais poser une question si vous le permettez.
Comme vous le savez puisque vous siégez au Comité des finances, la dernière partie de votre discours porte sur des questions que nous posons chaque année. Des rapports annuels sont publiés sur les avis de faire bouillir l’eau et sur les problèmes d’infrastructure. Il ne fait absolument aucun doute que de passer de 132 à 34 avis concernant l’eau indique que la situation s’améliore véritablement et qu’on est sur la bonne voie.
Cependant, j’ai pris connaissance du rapport et j’ai encore du mal à accepter qu’il reste 34 avis de faire bouillir l’eau et que le problème n’est pas encore réglé. Cette question me chicote un peu, particulièrement lorsqu’on visite des communautés autochtones qui donnent des chiffres extrêmement élevés. Pour ce qui est de l’aspect financier, il va sans dire qu’un financement s’impose.
À la fin, vous avez commencé à parler des intervenants et des partenaires. En toute franchise, comment envisagez-vous qu’on fasse lever ces 34 derniers avis concernant l’eau?
Je vous remercie de votre question. Ma réponse ne relève pas du projet de loi C-19, mais pour avoir participé aux réunions du Comité des finances et à certaines des réunions du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, je sais que le gouvernement éprouve des difficultés. Les 32 derniers avis de faire bouillir l’eau qui sont encore en vigueur présentent plus de problèmes que ce qui était escompté. Ce sont les 32 derniers, mais ils sont les plus difficiles à régler. Parfois, c’est simplement à cause de l’emplacement de la communauté des Premières Nations ou des industries qui se trouvent autour d’elle.
Le gouvernement travaille d’arrache-pied pour trouver des solutions pour ces communautés et pour enfin éliminer tous les avis de faire bouillir l’eau.
En ce qui concerne les intervenants, c’est là que je vois la beauté du travail qui se fait. Le gouvernement travaille avec les Autochtones et les forme pour établir, maintenir et comprendre les bilans hydriques, être conscients de l’environnement où ils vivent et déterminer les risques que cet environnement peut poser pour l’eau.
Il travaille avec toutes les Premières Nations pour résoudre ces problèmes d’avis de faire bouillir l’eau. Il travaille avec chacun de ces groupes et avec les membres des collectivités afin de vraiment faire avancer les choses de manière à ce que ces derniers puissent assumer la gestion à long terme de l’eau potable et des eaux usées. Ces solutions sont à long terme. On les attend depuis longtemps et elles prennent du temps à mettre en œuvre, mais une fois que ce sera fait, ce le sera — nous l’espérons — pour aussi longtemps que les systèmes peuvent supporter ces changements.
Il y a aussi l’entretien des systèmes au fil des années. Ce n’est pas parce que vous avez construit un système que vous pouvez le laisser là jusqu’à ce que vous deviez tout remplacer. Vous devez l’entretenir et vous devez mettre de l’argent dans le système pour garder à jour la technologie, les sources d’eau et tout ce qu’il faut.
C’est un projet de grande ampleur, mais je dirais que le gouvernement a fait beaucoup au cours des 10 dernières années. Il reste encore beaucoup à faire, mais les choses avancent.
La sénatrice accepterait-elle de répondre à une autre question?
Bien sûr.
J’ai presque l’impression que je devrais vous applaudir, car je sais à quel point il est difficile de parrainer le budget et de lui faire franchir toutes les étapes.
Il reste toutefois une partie du document budgétaire qui me pose un gros problème. Il s’agit de l’ajout de modifications au Code criminel qui visent à criminaliser le négationnisme et la banalisation de l’Holocauste. Comme je n’ai pas pu poser la question au représentant du gouvernement, je vous la pose. Pourquoi ces modifications ont-elles été ajoutées dans le projet de loi d’exécution du budget, et devrions-nous nous inquiéter du fait que cette modification au Code criminel, qui porte atteinte au droit constitutionnel à la liberté d’expression, a été en quelque sorte glissée dans le budget, d’où on ne peut l’extraire afin d’en débattre adéquatement?
Merci de votre question, qui est importante.
Tout d’abord, selon ce que j’en sais, c’est la communauté juive qui en a fait la demande. Certains disent qu’une telle mesure est inutile et d’autres, qu’elle est importante et qu’elle doit figurer dans le projet de loi. Je ne peux parler au nom du gouvernement, mais je crois que l’ajout de cette infraction au Code criminel était un moyen de démontrer aux Canadiens que le gouvernement considère ce sujet prioritaire.
Il y a plusieurs façons d’aborder la question de la liberté de la presse. Je crois qu’il faut examiner tous les points de vue. La constitutionnalité de cette disposition sera probablement contestée. Je crois qu’il faudra peut-être la modifier, mais je suis persuadée que lorsque le gouvernement a projeté de l’ajouter au Code criminel, c’était pour envoyer un message fort sur l’islamophobie aux Canadiens. C’est un problème qui existe au Canada et, selon moi, ailleurs dans le monde.
Abstraction faite du bien-fondé de la modification, je dois avouer que depuis que je me suis exprimée à ce sujet dans cette enceinte la semaine dernière, j’ai été submergée de commentaires de membres de la communauté juive d’un bout à l’autre du Canada — y compris des enfants et des petits-enfants de survivants — qui, comme moi, pensent que c’est une stratégie imprudente.
Je m’inquiète de la présence de ce changement dans un projet de loi d’exécution du budget. J’ai eu le privilège de siéger au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles quand il a examiné cet enjeu et qu’il a convoqué le ministre Lametti pour lui poser des questions. Je m’inquiète néanmoins du fait qu’en apportant une modification au Code criminel par l’entremise d’un projet de loi d’exécution du budget, nous nous privons de la possibilité d’un débat plus exhaustif sur cet enjeu.
Je vous remercie de votre question. Le projet de loi d’exécution du budget sert aussi à instaurer des mesures prévues dans le budget. Le budget a été déposé en avril dernier et il présentait de l’information sur les mesures que le gouvernement souhaite mettre en œuvre. C’est la raison pour laquelle cette mesure apparaît dans le projet de loi d’exécution du budget.
Que nous considérions ou non que le projet de loi d’exécution du budget ou la loi d’exécution du budget est la meilleure avenue pour ce faire, il n’en demeure pas moins que c’est le moyen retenu par le gouvernement pour mettre en œuvre les mesures prévues dans le budget... il les a présentées dans la loi d’exécution du budget. Si vous consultez le budget et les nombreuses mesures qu’il contient, vous constaterez que celles-ci ne figurent pas toutes dans la loi d’exécution du budget, car il n’y en a qu’un certain nombre qui nécessite des changements.
C’est la réponse logique que je peux vous offrir.
Sénatrice Moncion, accepteriez-vous de répondre à une autre question?
Volontiers.
Je vous remercie de tout le travail que vous accomplissez dans ce dossier. Les personnes qui prennent la responsabilité de parrainer la loi d’exécution du budget ont toute mon admiration. Je suis d’accord avec ce qui vient d’être dit au sujet des projets de loi omnibus, mais je suis aussi consciente que, dans un contexte de gouvernement minoritaire, le temps est précieux.
Je souhaite revenir à la question concernant l’accès à l’eau potable pour les Premières Nations. Je suis certaine que cela vient de la façon dont j’ai compris vos propos, mais j’ai d’abord trouvé préoccupant de vous entendre dire que le gouvernement travaillait avec les Premières Nations dans le but de les aider, par exemple, à mieux connaître l’environnement et ses liens avec l’eau potable — je suis certaine que vous conviendrez avec moi que le gouvernement pourrait beaucoup apprendre des Premières Nations à ce sujet —, mais vous avez ensuite mentionné quelques éléments de plus, qui m’apparaissent faire partie d’un renforcement des capacités. C’est un aspect essentiel pour certaines communautés, et les ressources requises à cette fin doivent être prévues. Les ressources nécessaires à la viabilité continue des systèmes — donc aux rénovations, aux nouvelles technologies et ainsi de suite — doivent être disponibles.
Pourriez-vous décortiquer pour moi les dispositions budgétaires et me dire comment elles permettront de résoudre rapidement la trentaine de cas difficiles qu’il reste à régler?
Merci de cette question. C’est une bonne question. En abrogeant la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations, on donne plus de pouvoirs aux Premières Nations pour qu’elles puissent s’approprier le dossier et avoir plus de liberté pour travailler au sein de leurs communautés afin de résoudre les problèmes d’eau. Je pense que c’est plus à cet égard, et le gouvernement continue de travailler avec les communautés pour trouver des solutions.
Étant originaire du Nord, je vous donnerai l’exemple de la réserve de Kashechewan, dans le Nord de l’Ontario, dont la situation a été difficile à résoudre en raison de la débâcle annuelle de la rivière et du système d’alimentation en eau qui n’est pas viable en raison de son emplacement. Lorsque l’on est à Ottawa, on ne sait pas nécessairement tout ce qui se passe dans une communauté et quand le gouvernement travaille avec une nation autochtone.
Je comprends ce que vous dites quand vous parlez de renforcement des capacités, et je pense que la solution pour l’eau est plus vaste que le simple fait de mettre en place un système et d’espérer que le système va fonctionner. Il s’agit de renforcer les capacités et les communautés. Il s’agit de travailler avec les Premières Nations, de leur donner la liberté de travailler et de trouver des solutions, et de travailler avec le gouvernement.
Je tiens à m’excuser auprès de mes collègues des Premières Nations parce que je ne réponds peut-être pas de la meilleure façon, mais je fais de mon mieux.
Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-19, la loi d’exécution du budget.
Honorables sénateurs, le Canada est confronté à de nombreux défis. L’inflation est à son taux le plus élevé depuis 40 ans et devrait continuer d’augmenter. Les taux d’intérêt sont à la hausse. Les Canadiens sont parmi les plus endettés au monde, et l’augmentation des taux d’intérêt rendra leur hypothèque et leurs autres dettes plus chères à rembourser.
Le gouvernement a également augmenté sa dette, qui est maintenant de 1,6 billion de dollars. Les intérêts sur cette dette coûteront maintenant plus cher. Il n’y a pas d’engagement envers un retour à l’équilibre budgétaire. Notre dette de 1,6 billion de dollars sera transférée à nos enfants, nos petits-enfants et même nos arrière‑petits-enfants. Notre dette sera leur problème.
Le PIB du Canada par habitant a augmenté de 0,8 % par année de 2007 à 2020, ce qui nous place dans le troisième quartile des pays à l’économie avancée. Autrement dit, nous étions presque au bas du classement, sans être au plus bas.
Comme il est indiqué dans le document budgétaire du gouvernement cette année, l’Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, prévoit que le Canada sera l’économie avancée qui aura le pire rendement entre 2020 et 2060. Notre compétitivité est en déclin, l’innovation de notre secteur privé est faible et l’investissement dans nos entreprises est stagnant. Notre PIB par habitant est de 12 % inférieur à celui des pays les plus performants de l’OCDE. Notre productivité est de 18 % inférieure à celle des pays les plus performants de l’OCDE.
Notre pays a besoin d’un plan pour régler ses problèmes économiques et créer la richesse dont nous avons besoin pour soutenir notre bien-être économique et social.
Les Canadiens et la Banque du Canada se rendent compte que l’inflation, qui, jusque‑là, ne dépassait pas la cible annuelle de 2 % fixée par la Banque du Canada, est maintenant devenue un problème économique majeur. La Banque du Canada restait convaincue que le niveau d’inflation observé en 2021 était temporaire, et ce, même si certains économistes tiraient déjà la sonnette d’alarme au sujet de la montée de l’inflation. D’ailleurs, lors de sa récente conférence de presse, au début de juin, le gouverneur de la Banque du Canada a prévenu que le taux d’inflation allait probablement encore augmenter, et c’est ce qui est arrivé.
L’inflation a eu des conséquences désastreuses pour les Canadiens, en particulier les gens à faible revenu et à revenu fixe. En mai, le taux d’inflation était de 7,7 %, le plus fort taux depuis 1983. Le prix des aliments a augmenté de 8,8 %. Les Canadiens ont payé leurs aliments plus cher en mai dernier qu’en mai 2021. Le prix des fruits frais, des légumes, de la viande, du pain et des pâtes alimentaires a augmenté. Même le prix d’une tasse de café a augmenté de 13,7 % comparativement à l’année dernière. Les consommateurs ont par ailleurs payé l’essence 48 % plus cher en mai dernier qu’il y a un an.
En avril, le salaire horaire des employés a augmenté en moyenne de 3,3 %, ce qui veut dire que, en moyenne, les prix ont augmenté plus rapidement que les salaires, et les Canadiens ont vu leur pouvoir d’achat diminuer.
Lorsqu’il est arrivé au pouvoir, en 2015, le gouvernement voulait d’abord aider la classe moyenne et ceux qui s’efforçaient d’en faire partie. Pensons notamment à des budgets comme le budget de 2016, intitulé « Assurer la croissance de la classe moyenne », le budget de 2017, intitulé « Bâtir une classe moyenne forte », et le budget de 2018, intitulé « Égalité et croissance pour une classe moyenne forte ».
Nous avons même eu une ministre de la prospérité de la classe moyenne. À mon avis, plus personne ne ressent cette « prospérité de la classe moyenne », maintenant que l’inflation a atteint 7,7 %.
L’inflation touche beaucoup de Canadiens, qui doivent choisir entre acheter de la nourriture, payer leurs factures ou faire leurs paiements hypothécaires. On apprend par de nombreux reportages dans les médias que certains Canadiens vivent des situations extrêmement difficiles et que le recours aux banques alimentaires est à la hausse.
Pour comprendre la manière dont l’inflation et la hausse des prix contribuent aux difficultés financières ou influence les décisions financières des Canadiens, Statistique Canada a mené, du 19 avril au 1er mai, une enquête sur le Portrait de la société canadienne. D’après les résultats, trois Canadiens sur quatre disent que la hausse des prix a des répercussions sur leur capacité de régler leurs dépenses quotidiennes. La plupart des Canadiens ressentent les effets de l’inflation, mais ceux qui ont un revenu faible se soucient davantage de la hausse des prix, qui les touche plus que les autres. C’est la hausse du prix des aliments, qui ont augmenté de 9,7 %, qui touche le plus les Canadiens.
Au Comité des finances, quand on a demandé à la ministre des Finances quelles mesures étaient incluses dans le budget pour compenser les conséquences de l’inflation, elle a répondu que l’inflation était un phénomène mondial et elle a souligné certains éléments annoncés dans le budget, comme le programme de soins dentaires et le versement supplémentaire de 500 $ aux Canadiens pour qui l’abordabilité du logement constitue un problème.
Bien que l’aide financière offerte à certains groupes de la société canadienne soit certainement la bienvenue pour ceux qui l’obtiennent, l’inflation touche tous les Canadiens et le gouvernement doit prendre des mesures pour la contrer.
Le 8 juin, la Banque du Canada a publié sa Revue du système financier, qui porte sur l’inflation et la hausse des taux d’intérêt, ainsi que sur les vulnérabilités actuelles et émergentes. Afin de contrôler l’inflation, la banque a déjà augmenté les taux d’intérêt et indiqué qu’elle avait l’intention de continuer à le faire.
L’endettement élevé des ménages et le prix élevé des maisons ne sont pas de nouvelles vulnérabilités. Nous suivons l’endettement des ménages et le prix des maisons depuis des années, et la Banque du Canada, la Société canadienne d’hypothèques et de logement et même le Fonds monétaire international avaient déjà indiqué qu’ils représentent de grandes vulnérabilités de l’économie canadienne. Cependant, les ménages font maintenant face à une hausse des taux d’intérêt, ce qui alourdira leurs prêts hypothécaires et les autres types de dettes. Les Canadiens très endettés pourraient avoir de la difficulté à rembourser leurs dettes. Si l’économie ralentit et si le taux de chômage augmente, encore plus de Canadiens auront des problèmes à rembourser leurs dettes.
Le gouverneur de la Banque du Canada a dit que plus de Canadiens se sont surendettés pour acheter une maison durant la pandémie et qu’ils se retrouvent ainsi davantage exposés aux hausses de taux d’intérêt. De plus, les Canadiens qui ont acheté lorsque les prix étaient élevés pourraient voir la valeur de leur maison diminuer. Il y a aussi un risque que la valeur de leur maison soit inférieure au prêt hypothécaire contracté.
La semaine dernière, la Réserve fédérale des États-Unis a augmenté son taux directeur de 75 points de base — la plus importante hausse en 25 ans — alors que la banque centrale américaine tente de ralentir l’inflation aux États-Unis.
La Banque du Canada doit faire sa prochaine annonce sur les taux d’intérêt le 13 juillet, et certains économistes prévoient qu’elle appliquera elle aussi une hausse plus marquée des taux d’intérêt.
Une récente enquête sur les dettes menée par la Banque Manuvie du Canada a révélé que 18 % des propriétaires interrogés n’ont déjà plus les moyens de payer leur maison. Il est également ressorti de l’enquête qu’un Canadien sur cinq s’attend à ce que la hausse des taux d’intérêt ait des effets négatifs importants sur leur dette hypothécaire et leur situation financière générales.
Cependant, les Canadiens ne sont pas les seuls à devoir composer avec une augmentation de la dette. Le gouvernement accuse lui aussi une dette importante, qui dépasse 1,6 billion de dollars. Les frais de service de la dette augmenteront donc en conséquence. Bien que le gouvernement ait déclaré que ces frais s’élèveraient à 20 milliards de dollars en 2021, il prévoit qu’ils passeront à 42,9 milliards de dollars en 2026-2027. De surcroît, selon ses récents rapports, le directeur parlementaire du budget s’attend à ce que ces frais augmentent encore plus.
En mai dernier, le projet de loi C-14 a augmenté le plafond d’endettement du gouvernement, le faisant passer de 1,168 à 1,831 billion de dollars. Même si certains parlementaires ont été alarmés par cette hausse, la ministre des Finances a dit ceci au Comité des finances de la Chambre des communes le 11 mars dernier :
Nous indiquons […] le maximum que le gouvernement peut emprunter.
Nous ne disons pas que le gouvernement va emprunter cette somme […]
Maintenant, à peine 15 mois plus tard, on nous dit que la dette atteint 1,6 billion de dollars. Nous sommes en bonne voie d’atteindre ce plafond de 1,8 billion. En fait, il semble que le gouvernement s’empresse de le faire.
Alors que le gouvernement s’endette de plus en plus, on nous a assuré que le service de la dette publique demeurera faible. Cependant, nous savons maintenant que les taux d’intérêt augmentent rapidement, à l’instar du service de la dette du gouvernement. Après examen les documents financiers du gouvernement de ces deux dernières années et demie, on constate que le service de la dette augmente considérablement. Les prévisions indiquées dans les deux derniers budgets et dans les deux dernières mises à jour économique de l’automne nous montrent qu’il y a des préoccupations croissantes concernant l’augmentation des frais d’intérêt.
La mise à jour économique de l’automne 2020, qui a été publiée en décembre 2020, indiquait que, selon les estimations, le service de la dette publique pour cet exercice s’élèverait à 22,4 milliards de dollars. Quatre mois plus tard, cette somme a été portée à 25,7 milliards de dollars dans le budget de 2021, et elle a atteint 26,9 milliards de dollars dans le budget de cette année. Sur une période de 18 mois, les estimations du gouvernement pour le service de la dette pour cet exercice ont donc augmenté de 4,5 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 20 %.
Une autre question se pose en ce qui concerne le service de la dette publique. Nous savons tous que le gouvernement a emprunté énormément au cours de la pandémie, et une grande partie de cette dette a été acquise par la Banque du Canada. En fait, les achats d’obligations de l’État réalisés par la Banque atteignaient presque la somme d’un demi-billion de dollars, avant que la banque ne cesse d’acquérir ces obligations.
En 2021, le gouvernement a fait état d’un service de la dette s’élevant à 20,4 milliards de dollars. Toutefois, il a également divulgué, dans les Comptes publics, des pertes nettes totales de 19 milliards de dollars en lien avec l’achat, par la Banque du Canada, d’obligations du gouvernement du Canada sur le marché secondaire.
J’ignore pourquoi cette perte de 19 milliards de dollars est inscrite comme un revenu négatif, puisqu’il est évident que cela fait partie du service de la dette. Ainsi, les frais de service de la dette pour 2021 s’élèvent non pas à 20,4 milliards de dollars, comme l’a déclaré le gouvernement, mais plutôt à 39 milliards de dollars.
Au 1er juin 2022, la Banque du Canada détenait toujours 397 milliards de dollars d’obligations du gouvernement du Canada. La Banque du Canada a indiqué qu’elle n’achèterait pas d’autres bons, mais qu’elle laisserait plutôt les bons existants arriver à échéance. Alors, ils seront essentiellement rayés du bilan financier de la Banque du Canada. Toutefois, certains observateurs jugeront inadéquat ce rétrécissement passif du bilan financier de la banque à mesure que les bons arrivent à échéance. Le mois dernier, le conseil de l’Institut C.D. Howe en matière de politique monétaire a exhorté la banque à accélérer le processus en vendant les bons.
Or, lors d’une réunion récente du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, le gouverneur de la banque a affirmé que, si elle vendait les obligations du gouvernement qu’elle détient, la banque enregistrerait une perte de 20 milliards de dollars, qui serait assumée par le gouvernement du Canada, comme le prévoit l’entente d’indemnisation conclue entre le gouvernement et la banque. Ces 20 milliards de dollars s’ajouteraient au déficit du gouvernement.
Plus tôt ce mois-ci, la Banque mondiale affirmait que la plupart des pays se dirigent vers une récession et elle nous a mis en garde contre le retour possible de la stagflation, une conjoncture économique où l’inflation est élevée et la croissance est faible. La banque a affirmé que la croissance économique mondiale devrait ralentir d’ici la fin de l’année et que la plupart des pays devaient se préparer à une récession.
Également plus tôt ce mois-ci, on rapportait dans les médias que l’économie du Royaume-Uni s’était contractée de façon inattendue en avril, ce qui a accentué le risque que l’économie du pays connaisse un recul au deuxième trimestre.
Le Canada sort à peine de la pandémie, qui a causé un choc financier majeur à l’économie du pays. Il serait temps de reprendre le contrôle des dépenses et de nous préparer pour le prochain choc.
Même si personne ne peut prédire l’avenir, le gouvernement a emprunté et dépensé des sommes colossales pour soutenir l’économie canadienne pendant la pandémie. Il est temps de faire le ménage des finances, mais le gouvernement continue de dépenser et d’emprunter, comme s’il ne voyait pas l’orage qui se pointe à l’horizon.
Honorables sénateurs, à l’instar de certains projets de loi budgétaires précédents, le projet de loi C-19 propose plusieurs modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu, qui compte maintenant plus de 3 000 pages. La Loi de l’impôt sur le revenu est une mesure législative complexe et inefficace où se sont accumulé un ensemble disparate de crédits, d’incitatifs et de solutions rapides. Le régime fiscal permet entre autres aux gouvernements d’atteindre certains objectifs stratégiques par l’ajout à la Loi de l’impôt sur le revenu des crédits ou des déductions, ou l’octroi de prestations à certains groupes. Ainsi, au fur et à mesure que des modifications y sont apportées, la loi devient de plus en plus compliquée.
Le dernier examen gouvernemental du régime fiscal remonte à 1967. Oui, c’était il y a 55 ans. Bien des choses ont changé au cours des 55 dernières années. Le monde a vu les frontières être repoussées, la technologie a révolutionné le mode de vie, les gens vivent plus longtemps et la nature du travail a changé. Le temps est venu de revoir notre régime fiscal; je dirais même qu’on a trop attendu.
Nombre d’organisations nationales et internationales, y compris les comités de la Chambre des communes et du Sénat, ont recommandé à maintes reprises que le gouvernement actualise le régime fiscal. Le régime actuel est truffé de problèmes. Il est devenu inutilement encombrant pour les contribuables canadiens, les entreprises et les fiscalistes. Même l’Agence du revenu du Canada, qui s’occupe d’appliquer la Loi de l’impôt sur le revenu, éprouve des difficultés à fournir les bonnes réponses aux questions de la population.
Nous avons besoin d’un régime fiscal simple et facile à comprendre pour les contribuables et les entreprises, un régime qui encourage l’investissement et la création d’emplois, et qui renforce la compétitivité du Canada dans le monde. Nous devons être en meilleure position pour soutenir la concurrence pour des emplois et attirer les talents et les investissements avec un régime fiscal juste, simple et efficace.
Avant d’aborder certains articles du projet de loi C-19, je tiens simplement à faire une observation sur la nature omnibus de celui-ci. Premièrement, le projet de loi C-19 est un projet de loi omnibus. Il fait 440 pages. Les modifications proposées à la Loi de l’impôt sur le revenu sont très techniques et nombreuses. Vu qu’elles modifieront la Loi de l’impôt sur le revenu, très compliquée et comptant elle-même 3 000 pages, l’étude du projet de loi C-19 serait une tâche herculéenne pour n’importe quel comité du Sénat.
La « Loi sur la taxe sur certains biens de luxe » est un projet de loi gigogne. Il représente 175 des 440 pages qui forment le projet de loi C-19 et il n’aurait jamais dû être inclus dans ce projet de loi omnibus. La « Loi sur la taxe sur certains biens de luxe » aurait dû être déposée au Parlement en tant que projet de loi distinct afin d’être étudiée et débattue comme il se doit. Il est honteux que le gouvernement n’ait pas étudié les répercussions économiques de la taxe proposée pour déterminer les effets qu’elle aura sur les travailleurs, les entreprises et l’économie.
La partie 5 du projet de loi C-19 propose 32 mesures et comprend des modifications à de nombreuses autres lois. Chacune de ces 32 mesures mérite une étude détaillée. Cependant, en raison de leur portée, l’étude des mesures contenues dans la partie 5 du projet de loi C-19 nécessitait à elle seule plus de temps que ce qui était prévu pour tout le projet de loi.
Bien que diverses parties du projet de loi C-19 aient été renvoyées à un certain nombre de comités aux fins d’étude, le temps alloué était très limité. On s’attend à ce que nous nous contentions du temps alloué et que nous approuvions aveuglément le projet de loi.
La partie 4 de la loi d’exécution du budget propose de mettre en œuvre la « Loi sur la taxe sur certains biens de luxe », qui imposera une taxe supplémentaire sur certains véhicules, avions et bateaux. Il s’agit d’une mesure législative complexe. Comme je l’ai déjà dit, elle compte 175 pages et contient 157 articles. Elle n’aurait pas dû être incluse dans le projet de loi omnibus d’exécution du budget de 440 pages. Elle aurait plutôt dû être déposée en tant que projet de loi distinct afin d’être étudiée et débattue séparément par le Parlement, comme je l’ai dit plus tôt.
La « Loi sur la taxe sur certains biens de luxe » impose une taxe sur la vente au détail, la vente, la location ou l’importation de certaines voitures de luxe et de certains avions personnels dont le prix est supérieur à 100 000 $, ainsi que de bateaux dont le prix est supérieur à 250 000 $. La taxe sera calculée selon le moins élevé des deux montants suivants : 10 % de la valeur totale du bien ou 20 % de la valeur qui dépasse le seuil de prix applicable, qui est de 100 000 $ pour les voitures et les avions personnels et de 250 000 $ pour les bateaux. La taxe entrera en vigueur le 1er septembre 2022. Le directeur parlementaire du budget estime que cette taxe générera des recettes de 87 millions de dollars cette année, car une partie de l’année est déjà écoulée, et de 163 millions de dollars l’année prochaine.
Les représentants de l’industrie aérospatiale n’appuient pas cette « Loi sur la taxe sur certains biens de luxe » et estiment qu’elle entraînera la perte de 1 000 emplois canadiens et des pertes de revenus pouvant atteindre 1 milliard de dollars pour les entreprises du pays. Ils ont indiqué que la taxe n’affectera pas seulement les grandes entreprises, mais bien les entreprises de toutes les tailles, dans toutes les régions, tout le long de la chaîne d’approvisionnement canadienne. Certains fabricants reçoivent déjà des annulations de commandes en raison de la taxe imminente.
Cette taxe arrive à un moment où l’industrie aérospatiale se remet toujours de la pandémie. Cette industrie demande au gouvernement d’entreprendre une évaluation de l’incidence économique afin de déterminer l’effet que cette taxe aura sur l’industrie aérospatiale, ses employés et l’économie. Cette taxe inquiète aussi l’Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale, qui la juge malavisée, car elle vise le secteur manufacturier. Cette taxe va nuire aux emplois, et ses effets négatifs sur les emplois surpassent largement tout effet positif qu’elle pourrait avoir. L’association s’inquiète aussi du fait qu’il n’y a eu aucune évaluation de l’incidence sur les emplois et souligne qu’une telle évaluation doit avoir lieu.
En résumé, selon des témoins, cette taxe de luxe désavantagera les compagnies aérospatiales canadiennes sur le marché international et entraînera une baisse des ventes qui se traduira par des pertes d’emplois. Les témoins ont dit que d’autres pays ont instauré des taxes semblables, mais qu’ils ont dû les abroger ou les modifier.
Lors de son témoignage au sujet de cette taxe de luxe, l’Association canadienne des manufacturiers de produits nautiques a indiqué qu’une étude de l’incidence économique réalisée par Ernst & Young et l’économiste Jack Mintz prévoit que la taxe proposée entraînerait une baisse des recettes d’au moins 90 millions de dollars pour les concessionnaires de bateaux et la perte d’au moins 900 emplois équivalents temps plein. L’étude a conclu que la loi sur la taxe sur certains biens de luxe aurait principalement des répercussions sur les travailleurs à revenu moyen, car ces derniers ne pourraient plus assurer la fabrication ou la réparation des bateaux haut de gamme au Canada. Par ailleurs, cette taxe menace la survie du secteur canadien de la fabrication de bateaux, qui subit déjà depuis des années les contrecoups de la concurrence de l’étranger. Il ne faut pas oublier que cette taxe causera la perte d’emplois dans les marinas et les ateliers d’entretien.
En 1991, le Congrès américain avait adopté une taxe de 10 % sur les nouveaux bateaux d’une valeur de plus de 100 000 $ vendus aux États-Unis. Au cours du premier trimestre de l’année, les ventes de nouveaux bateaux de plus de 100 000 $ ont chuté de 89 %, ce qui a entraîné une perte massive d’emplois et de multiples faillites. Au bout du compte, la taxe a été abolie.
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a étudié la loi sur la taxe sur certains biens de luxe et il a présenté son rapport au Sénat hier. Voici un extrait de ce rapport :
Après avoir entendu les témoignages de certains groupes, notamment l’Association des industries aérospatiales du Canada et l’Association nationale des manufacturiers de produits nautiques, notre comité été surpris d’apprendre que le gouvernement n’a pas réalisé d’étude sur les impacts économiques de la taxe proposée, y compris sur le niveau d’activité et d’emploi dans ces secteurs.
Notre comité recommande donc que le ministère des Finances, avant d’appliquer cette taxe, fasse une telle étude et qu’il informe notre comité de ses résultats, y compris ses consultations auprès des secteurs touchés.
De plus, advenant que l’application de cette taxe ait des répercussions négatives sur le niveau d’activité et/ou d’emploi dans ces secteurs, nous demandons au gouvernement de réagir rapidement et de prendre des mesures d’atténuation ou, si nécessaire, de supprimer cette taxe.
La section 6 de la partie 5 du projet de loi C-19 propose de modifier la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces afin d’autoriser un versement supplémentaire de 2 milliards de dollars aux provinces et territoires par l’intermédiaire du Transfert canadien en matière de santé, la répartition étant fondée sur un montant égal par habitant. Cette somme vise à aider les provinces et les territoires à rattraper les retards dans les chirurgies et les autres procédures médicales qui ont été reportées à cause de la pandémie. En plus des 2 milliards de dollars proposés dans le projet de loi à l’étude, le gouvernement a versé 500 millions de dollars en 2019-2020 et 4 milliards en 2020-2021 pour atténuer la pression que subissait le système de soins de santé en raison de la COVID-19, ce qui comprenait les retards concernant les procédures médicales.
Le Transfert canadien en matière de santé est le plus grand transfert fédéral aux provinces et aux territoires. Il aide à payer les coûts liés aux soins de santé. Ce transfert est estimé à 45 milliards de dollars cette année, et passera à 56 milliards de dollars en 2026-2027. Les premiers ministres provinciaux et territoriaux demandent d’avoir une augmentation de 28 milliards de dollars, qui dépasse de loin l’augmentation de 11 milliards de dollars prévue au cours des quatre prochaines années.
Les provinces et les territoires ne sont pas tenus de faire rapport au gouvernement fédéral de ce qu’ils font avec l’argent, mais les conditions établies dans la Loi canadienne sur la santé doivent être respectées.
De plus, selon notre note d’information sur cette partie du projet de loi, le premier ministre s’est engagé à discuter avec les provinces et les territoires de la force, la durabilité — un terme intéressant — et la résilience à long terme du système de soins de santé après la pandémie. La question du coût de la viabilité de notre système de santé universel est fréquemment soulevée.
À l’aide des données de l’Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, l’Institut Fraser a récemment comparé le rendement de 28 pays à revenus élevés de l’OCDE ayant un système de santé universel, afin d’établir le rendement du système canadien par rapport à celui de ses pairs. Il s’est servi de 40 indicateurs représentant quatre grandes catégories : disponibilité des ressources, utilisation des ressources, accès aux ressources et qualité et rendement clinique.
L’étude a conclu que le Canada dépensait davantage pour la santé que la majorité des pays à revenus élevés de l’OCDE ayant un système de santé universel. En tenant compte des personnes de plus de 65 ans, le Canada arrive au deuxième rang de ces 28 pays du point de vue des dépenses en santé par rapport au pourcentage du PIB et au huitième rang du point de vue des dépenses en santé par habitant. Bien que le Canada compte parmi les pays ayant les dépenses en santé les plus élevées des pays de l’OCDE, son rendement dans deux des quatre catégories, c’est-à-dire la disponibilité des ressources et l’accès aux ressources, est généralement inférieur à celui de la moyenne des pays de l’OCDE, alors que son rendement varie dans les deux autres catégories, c’est‑à-dire l’utilisation des ressources et la qualité et le rendement clinique.
L’étude a conclu qu’il existe un déséquilibre entre la valeur des soins de santé que les Canadiens obtiennent et la somme relativement élevée d’argent qu’ils consacrent à leur système de santé. Cette question sera certainement abordée par le premier ministre lorsqu’il rencontrera les premiers ministres provinciaux.
La section 7 de la partie 5 du projet de loi C-19 propose de modifier la Loi autorisant certains emprunts et la Loi sur la gestion des finances publiques afin d’inclure les emprunts extraordinaires de 2021 dans le montant maximal du pouvoir d’emprunt et de ne plus traiter ce montant comme des emprunts extraordinaires aux fins des exigences de déclaration.
La section 7 propose également de modifier la Loi sur la gestion des finances publiques afin de changer les exigences de déclaration des montants d’emprunts extraordinaires de sorte que ces montants ne doivent plus être déposés séparément à la Chambre des communes dans un délai de 30 jours, mais plutôt être déclarés dans le Rapport annuel sur la gestion de la dette. En vertu de la loi actuelle, les emprunts extraordinaires doivent être déclarés dans les 30 jours de séance suivants l’approbation du gouverneur en conseil. Les emprunts extraordinaires se sont chiffrés à 288 milliards de dollars en 2020 et à 8,4 milliards de dollars en 2021. Les deux rapports ont été déposés en temps opportun dans le délai de 30 jours prévu par la loi.
Le gouvernement propose maintenant que les emprunts extraordinaires soient signalés dans le Rapport sur la gestion de la dette de Finances Canada. Il s’agit du même rapport que nous avons attendu pendant une année complète, le gouvernement ayant repoussé le dépôt de son Rapport sur la gestion de la dette de mars 2021 à mars 2022. Essentiellement, le gouvernement a conclu que le dépôt des emprunts extraordinaires est trop opportun et que cette information devrait être incluse dans un rapport qui peut être retardé jusqu’à un an, comme ce fut le cas cette année.
Le gouvernement propose cet amendement sous le prétexte d’améliorer la reddition de comptes. Cependant, si le gouvernement était vraiment sincère dans sa volonté d’améliorer la reddition de comptes, il aurait dû modifier la Loi sur la gestion des finances publiques pour exiger que le rapport sur la gestion de la dette soit déposé plus tôt que le délai d’un an actuellement prescrit.
Le projet de loi C-19 propose aussi de modifier la Loi autorisant certains emprunts. Cette loi porte sur les emprunts consolidés du gouvernement et des organismes d’État. Cependant, les rapports à ce sujet ne doivent être présentés que tous les trois ans. Il s’agit d’un rapport triennal, et je pense que c’est le seul rapport obligatoire au gouvernement qui soit triennal; tous les autres rapports sont annuels. La somme des emprunts consolidés du gouvernement n’est pas facilement accessible, et je le sais parce que j’ai essayé de la trouver.
Puisque les rapports sont produits tous les trois ans, le total des emprunts consolidés est déterminé en recueillant des renseignements dans les comptes publics du gouvernement de même que dans les états financiers et les autres renseignements financiers des organismes d’État. Il faut examiner beaucoup de renseignements, ce que j’ai fait avant Noël, et trouver le montant soi-même; habituellement, c’est une estimation.
Quand nous avons reçu des fonctionnaires du ministère des Finances au Comité des finances nationales, je leur ai demandé le montant de la dette consolidée, et ils ont répondu 1,6 billion de dollars. Ce montant de 1,6 billion de dollars que j’ai mentionné plus tôt dans mon discours vient des fonctionnaires du ministère des Finances. C’était écrit dans un document gouvernemental, quelque part. Je ne sais pas où. J’ai vérifié auprès du directeur parlementaire du budget et de la Bibliothèque du Parlement, mais je ne crois pas que ce chiffre soit publié où que ce soit.
Si le gouvernement voulait vraiment améliorer la reddition de comptes, il aurait dû apporter des modifications à la Loi autorisant certains emprunts de manière à ce qu’elle exige que l’on rende des comptes sur la dette consolidée chaque année, plutôt qu’à tous les trois ans, comme c’est le cas actuellement.
La section 12 de la partie 5 édicte la Loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens, laquelle interdit l’achat d’immeubles résidentiels au Canada par des non-Canadiens pendant une période de deux ans, et certaines exceptions sont prévues à l’article 4 de la loi proposée.
Le coût des logements au Canada a considérablement augmenté dans les dernières années, en raison notamment des faibles taux d’intérêt, d’une pénurie d’immeubles résidentiels et d’un taux d’inflation élevé. Les gouvernements fédéral et provinciaux peinent à maintenir le prix des logements à un niveau abordable.
Le projet de loi fournit une définition, à l’article 4 de la loi, qui dit ceci : « [...] il est interdit à tout non-Canadien d’acheter, directement ou indirectement, tout immeuble résidentiel ». Le coupable de cette infraction est passible d’une amende maximale de 10 000 $. De plus, sur demande du ministre, on peut rendre une ordonnance obligeant la vente de l’immeuble résidentiel. Si l’immeuble est vendu, les propriétaires ne doivent pas recevoir un montant supérieur à celui qu’ils ont payé pour l’acheter.
Il n’y avait pas assez de temps pour étudier en profondeur le projet de loi et ses implications. Cependant, je me préoccupe du pouvoir de discrétion qui est accordé au ministre de prescrire par la réglementation. Par exemple, le ministre peut exempter de l’interdiction certaines catégories de citoyens et modifier la définition de certains termes clés. En conséquence, des règlements peuvent modifier le fonctionnement de l’interdiction dans la pratique.
On se préoccupe également que l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels empiète sur la compétence provinciale ou établisse de la discrimination en fonction de la nationalité. Il reste à voir si cette interdiction permettra vraiment d’augmenter le nombre d’immeubles résidentiels disponibles pour les Canadiens ou de modérer le prix des logements. L’inflation et la hausse des taux d’intérêt pourraient bien contribuer davantage à modérer les prix dans le secteur du logement.
La section 3 de la partie 5 du projet de loi propose d’abroger la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations. Cette partie du projet de loi a été renvoyée pour examen au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, qui a déposé son rapport au Sénat le 10 juin. À l’instar de la sénatrice Moncion, ce rapport m’a beaucoup frappé.
Dans son rapport, le comité s’est dit alarmé de la crise inacceptable de l’eau qui demeure un fléau pour les Premières Nations à l’échelle du Canada et qui cause de graves maladies, des problèmes de santé mentale et des souffrances inutiles. Le rapport poursuit ainsi :
Les Canadiens seraient choqués et auraient honte s’ils savaient comment le gouvernement du Canada a traité les Premières Nations en ce qui concerne la question de l’eau.
Le rapport donne des exemples précis de problèmes que vivent des Premières Nations par rapport à l’accès à l’eau potable, y compris des poursuites contre le gouvernement du Canada concernant l’approvisionnement en eau potable dans certaines collectivités des Premières Nations. Bien que le comité ait dit reconnaître que le gouvernement fédéral prend d’importantes mesures pour régler la question des avis à long terme concernant la qualité de l’eau potable, il a précisé qu’il demeure extrêmement préoccupé par le fait que des Premières Nations aient dû recourir à des poursuites judiciaires pour obtenir un financement fédéral afin de s’assurer d’un approvisionnement en eau potable de qualité.
Le comité a conclu son étude de cette partie du projet de loi en disant ce qui suit :
En ce qui concerne l’approvisionnement en eau des Premières Nations, le comité estime que le gouvernement du Canada a porté atteinte à l’honneur de la Couronne ainsi qu’à ses relations de traité et de nation à nation.
De l’avis du comité, le ministre devrait rendre compte publiquement des solutions apportées à la crise de l’eau qui touche les Premières Nations. De plus, « l’application de toute solution doit faire l’objet d’une évaluation, sinon le statu quo risque d’être maintenu ».
Honorables sénateurs, la section 30 de la partie 5 du projet de loi propose de mettre en œuvre la première série de changements nécessaires pour respecter l’engagement du gouvernement de créer un registre public et consultable de la propriété effective d’ici 2023. À l’heure actuelle, des sociétés fictives anonymes canadiennes peuvent être utilisées pour dissimuler la véritable identité des propriétaires d’entreprises. Cette situation facilite leur utilisation pour mener des activités illégales comme le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale. Pour contrer ces activités, les autorités doivent avoir accès en temps opportun à des renseignements exacts sur les véritables propriétaires de ces entités.
Plus précisément, les modifications proposées à la Loi canadienne sur les sociétés par actions obligeront des sociétés privées fédérales à envoyer les renseignements sur leurs propriétaires bénéficiaires à Corporations Canada, et ce, annuellement à la suite d’un changement. Cela permettra à Corporations Canada de fournir cette information à un organisme d’enquête ou à une entité autorisée.
Le gouvernement parle depuis plusieurs années d’un registre de la propriété effective accessible au public. L’information contenue dans un tel registre serait extrêmement utile pour intenter des poursuites contre une personne pour blanchiment d’argent et évasion fiscale, et elle aiderait le gouvernement à percevoir, selon certaines estimations, des milliards de dollars en recettes fiscales.
Le budget de l’année dernière a prévu 2 millions de dollars pour la mise en œuvre d’un registre public de la propriété effective des entreprises d’ici 2025. À l’époque, le Comité des banques avait dit craindre que les modifications proposées et la somme de 2 millions de dollars prévue était insuffisante pour mettre en œuvre ce registre d’ici 2025. Cette année, le gouvernement accélère la date de mise en œuvre du registre de la propriété effective, qui est maintenant fixée à la fin de 2023, dans à peine 18 mois.
Le gouvernement a aussi indiqué que le registre sera maintenant mis en œuvre au moyen d’une approche en deux temps. La première étape englobera ces modifications; et la deuxième étape, d’autres modifications qui seront divulguées dans un projet de loi d’exécution du budget présenté cet automne.
Par ailleurs, le gouvernement a indiqué que cette approche en deux temps permettra de mener les consultations nécessaires auprès des intervenants. Même si des consultations ont déjà eu lieu en 2020, il y a plusieurs questions en suspens concernant le nouvel engagement du gouvernement à mettre en œuvre le registre avant la fin de l’année prochaine. Plus précisément, le gouvernement a adopté cette nouvelle approche en deux temps sans fournir de renseignements détaillés concernant les plans et les objectifs de chaque phase. En outre, aucun financement n’a été prévu pour la mise en œuvre du registre. Même si on avait consacré 2 millions de dollars dans le budget de l’an dernier à la mise en œuvre du registre, cette somme n’était pas suffisante et cet argent n’a finalement pas été dépensé. Bien qu’il soit louable de vouloir mettre en œuvre le registre d’ici la fin de l’année prochaine, cet objectif doit être atteint dans seulement 18 mois. Le gouvernement a de nombreux défis à relever avant cette échéance.
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a été chargé d’examiner cette partie du projet de loi et s’est dit préoccupé par cette approche en deux temps. Le comité a également proposé que le gouvernement prenne des mesures complémentaires pour assurer le succès de la mise en œuvre du registre en collaborant avec les provinces et les territoires, en attribuant suffisamment de ressources financières et humaines et en continuant à étudier la possibilité d’utiliser des avocats comme actionnaires afin de protéger l’identité des propriétaires bénéficiaires.
Point particulièrement intéressant, la commission Cullen, qui a mené une enquête publique sur le blanchiment d’argent en Colombie-Britannique, a publié son rapport la semaine dernière. Selon la commission, le régime fédéral de lutte contre le blanchiment d’argent est inefficace et la province de la Colombie-Britannique doit suivre sa propre voie. Le commissaire Cullen a déclaré que l’agence chargée par le gouvernement fédéral de cerner les menaces financières, le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada, ou CANAFE, est inefficace. Il a dit que, comparativement à ceux d’autres pays dotés d’un régime comparable, les résultats du CANAFE laissent à désirer. Vu la date d’échéance fixée par le gouvernement pour mettre en œuvre la première phase, nous devrions pouvoir évaluer les progrès du régime dans le cadre de notre étude du budget de 2023.
Le budget de cette année annonce deux examens des dépenses censés procurer au gouvernement et aux contribuables des économies de 9 milliards de dollars sur cinq ans. L’objectif du premier examen consiste à réduire les dépenses prévues dans le contexte d’une relance plus forte. Le gouvernement estime que cet exercice permettra d’économiser 750 millions de dollars par année pendant quatre ans, à compter de l’an prochain, pour des économies totales de 3 milliards de dollars. Le gouvernement a promis de nous informer de la progression de cet examen dans sa mise à jour économique et budgétaire de 2022.
La seconde initiative consistera en un examen stratégique mené par le président du Conseil du Trésor. Cette initiative évaluera l’efficacité des programmes en ce qui a trait à l’atteinte des principales priorités du gouvernement. Elle doit également cerner les occasions de faire des économies et de réaffecter les ressources. Ce deuxième examen devrait permettre des économies de 6 milliards de dollars sur trois ans à partir de 2025. Le budget de l’année prochaine devrait comprendre une mise à jour au sujet de ces économies. Ce qui m’inquiète le plus, c’est que les 9 milliards de dollars d’économies potentielles doivent servir à réduire le coût des nouveaux programmes sur cinq ans, comme l’indique le budget. Si ces économies de 9 milliards de dollars ne sont pas réalisées en tout ou en partie, les manques seront couverts par le gouvernement, ce qui fera croître le déficit anticipé.
Comme les examens des dépenses antérieurs n’ont pas porté leurs fruits, notamment celui du budget de 2017 et celui de l’Énoncé économique de l’automne de 2019, on s’attendra du gouvernement qu’il réalise vraiment ces économies cette fois-ci. L’initiative lancée en 2017 avait en fait mené à des dépenses accrues et aucune information n’a pu être trouvée au sujet de l’initiative de 2019.
Le directeur parlementaire du budget a mis en doute ces initiatives et mentionné qu’il faudrait des restrictions budgétaires majeures pour arriver à de telles économies. En outre, l’examen des rapports ministériels sur le rendement mené par le Comité des finances révèle que la qualité des données sur le rendement produites par les ministères et les organismes rendra l’examen beaucoup plus difficile à mener.
Compte tenu de l’invasion de l’Ukraine, le gouvernement a annoncé une augmentation substantielle du budget pour les dépenses militaires. Le budget de 2022 prévoit 6 milliards de dollars sur cinq ans au titre des priorités en matière de défense et un investissement additionnel de 2 milliards de dollars pour favoriser un changement de culture au sein des Forces armées canadiennes, améliorer la cybersécurité et soutenir l’Ukraine. Dans le budget, aucune précision n’est donnée sur l’utilisation des 6 milliards de dollars sur cinq ans, mais dans le plan budgétaire, on indique que cet investissement permettra d’augmenter la contribution du Canada à ses principales alliances et de renforcer les capacités des Forces armées canadiennes.
En 2017, le gouvernement a présenté sa politique en matière de défense et a réservé 164 milliards de dollars sur 20 ans, pour la période de 2017 à 2037, aux dépenses en immobilisations du ministère de la Défense nationale. Toutefois, les renseignements financiers révèlent que, entre 2017 et 2021, le ministère a enregistré un déficit — entre ce qui avait été prévu dans la politique de défense et ce qui a réellement été dépensé — ou une sous-utilisation de fonds de 10 milliards de dollars pour les projets d’immobilisations. Les plans ministériels révisés indiquent que ce déficit de 10 milliards de dollars sera maintenant reporté aux années à venir, plus précisément à la période de 2023 à 2028. Voilà le contexte. C’est ce que je voulais souligner.
Plus tôt cette semaine, le gouvernement a annoncé qu’il investira 4,9 milliards de dollars au cours des six prochaines années dans la modernisation du NORAD et l’amélioration de notre système de défense continental. Il s’est engagé à investir 40 milliards de dollars dans le NORAD au cours des vingt prochaines années. Le gouvernement doit préciser si le manque à gagner de 10 milliards de dollars dans les dépenses de 2017 à 2021, qui est maintenant reporté aux années futures, sera la source de financement de l’initiative du NORAD ou si l’initiative a besoin de nouveaux fonds. Ces questions sont importantes, car nous devons savoir quels effets les initiatives postbudgétaires auront sur les déficits prévus par le gouvernement, tels que divulgués dans le budget de 2022.
Il n’y a pas que le NORAD qui nécessite un financement important. Les Forces armées canadiennes ont de vieux avions, de vieux navires, des sous-marins d’occasion qui sont rarement opérationnels et une pénurie de recrues. En outre, pour que le Canada atteigne la cible de 2 % du PIB en dépenses de défense qui a été fixée par l’OTAN, le gouvernement devra dépenser de 13 à 18 milliards de dollars de plus par an au cours des cinq prochaines années. Je me contenterai de dire que les Forces armées canadiennes et le gouvernement du Canada ont des défis à relever pour protéger notre pays.
Chaque année, le gouvernement lance de nouveaux programmes qui coûtent des milliards de dollars ou il élargit considérablement des programmes existants. Je parle notamment de programmes d’infrastructure de plusieurs milliards de dollars, comme le Programme d’infrastructure Investir dans le Canada de 187 milliards de dollars et le Secrétariat fédéral sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants de 30 milliards de dollars, qui a été lancé l’an dernier et qui promet de réduire les frais de garde, de créer 250 000 nouvelles places en garderie et de créer environ 55 000 nouveaux postes d’éducateurs de la petite enfance d’ici 2026.
L’année dernière, 1,5 milliard de dollars ont été prévus dans le budget pour l’Initiative pour la création rapide de logements afin d’assurer la construction de 4 500 nouveaux logements abordables en 12 mois. L’initiative est prolongée cette année pour faire construire au moins 6 000 nouveaux logements abordables à un coût estimé à 1,5 milliard de dollars. Cette année, le gouvernement s’est également engagé à verser 10 milliards de dollars dans l’initiative qui vise à rendre le logement plus abordable et qui a pour objectif de faire construire 100 000 nouveaux logements au cours des cinq prochaines années. Cependant, tous ces chiffres sont des projections. Ce sont des estimations. Et nous ne voyons jamais les rapports qui nous disent ce qui s’est réellement passé. Les projets d’infrastructure ont-ils réellement été construits? Et où ces projets sont-ils réellement situés? Dans quelles collectivités? Les logements ont-ils été réellement construits? Dans quelles collectivités? Ces logements sont-ils occupés? Combien de places en garderie ont été créées jusqu’à présent?
Honorables sénateurs, voilà les questions que nous devrions poser et voilà les renseignements que nous devrions chercher. C’est cela, la reddition de comptes. La partie la plus facile est de dire que nous avons l’intention de faire quelque chose. La partie difficile consiste à obtenir des résultats.
Chaque année, les ministères et les organismes gouvernementaux publient leurs rapports sur les résultats ministériels. Cependant, les renseignements fournis dans bon nombre de ces rapports ne suffisent pas pour indiquer les résultats réellement obtenus avec le financement reçu. Tout simplement, les rapports sur les résultats ministériels ne fournissent pas les renseignements qu’ils sont censés fournir. Le gouvernement, ses ministères et ses organismes devraient présenter des rapports sur leurs programmes et démontrer que l’argent alloué a réellement atteint son objectif. Les rapports sur les résultats ministériels ne servent plus à la reddition de comptes.
Honorables sénateurs, en terminant, je tiens à remercier la sénatrice Moncion de ses deux interventions sur le projet de loi d’exécution du budget. Je voudrais également remercier tous mes collègues du Comité des finances nationales, le président et le vice‑président, ainsi que tout le personnel qui nous a soutenus au cours de nos nombreuses réunions d’étude du budget. Merci, honorables sénateurs.
Sénateur Boehm, si vous avez une question, la sénatrice Marshall devra demander davantage de temps.
J’ai effectivement une question, Votre Honneur.
Sénatrice Marshall, demandez-vous cinq minutes de plus pour répondre à des questions?
Oui.
Le consentement n’est pas accordé.
J’aimerais d’abord féliciter les sénatrices Moncion et Marshall, respectivement marraine et porte‑parole du projet de loi C-19. Je tiens à prendre la parole brièvement à l’étape de la troisième lecture de ce projet de loi.
J’aborderai trois points.
J’aimerais d’abord traiter, comme plusieurs d’entre vous l’ont fait — mais j’aimerais le faire à ma manière —, des questions liées aux déficits démocratiques que posent les projets de loi omnibus d’exécution du budget.
Cette pratique provoque des accrocs au processus démocratique et, comme vous le savez, la raison est la suivante : elle limite les débats et les amendements qu’il pourrait parfois être légitime d’apporter aux projets de loi qu’on nous présente.
En effet, il est beaucoup plus complexe pour le Sénat d’amender le budget que d’amender un projet de loi spécifique, et le temps fixé pour étudier un projet de loi est beaucoup plus limité.
En général, le Sénat adopte le budget du gouvernement sans proposer d’amendements, mais les projets de loi omnibus nous amènent à voter en faveur du budget, même s’il contient des dispositions qui ne sont pas directement liées à la politique fiscale et budgétaire du gouvernement, dispositions auxquelles on pourrait vouloir s’opposer, comme le soulignait la sénatrice Simons.
Un bref survol des projets de loi d’exécution du budget, depuis les débuts du XXIe siècle, montre que ces projets de loi « mammouths » sont assez récents dans l’histoire du Parlement canadien.
Pour prouver mon point, permettez-moi de citer un article du journaliste Bill Curry, du Globe and Mail, paru aujourd’hui et intitulé : « Le Sénat indique dans des rapports qu’il est préoccupé par les projets de loi d’exécution du budget volumineux avant le vote final au sujet du projet de loi C-19 ». Voici ce qu’il a écrit :
Selon une recherche effectuée par la Bibliothèque du Parlement, on a parlé pour la première fois d’un projet de loi d’exécution du budget en 1991. Pendant les années 1990, il s’agissait de courts documents d’une douzaine de pages chacun.
Les projets de loi d’exécution du budget ont commencé à prendre de l’ampleur pendant la décennie suivante, mais c’est en 2009 et 2010 qu’ils ont atteint plusieurs centaines de pages, alors que le gouvernement était aux prises avec une crise économique mondiale.
C’est donc à l’époque du gouvernement Harper que nous avons vu les premiers projets de loi « mammouths ». À l’époque, on s’en souviendra, le ministère des Finances n’annonçait pas à l’avance ce qui allait figurer dans le projet de loi d’exécution du budget. Les parlementaires étaient souvent surpris de voir ce qu’il pouvait contenir et les ajouts de dernière minute qu’on pouvait y trouver. Je vous donne quelques exemples : dans le projet de loi d’exécution du budget de 2014, on retrouvait des modifications au Code du travail en matière de santé et sécurité, qui avaient été développées sans que les parties aient été consultées.
Dans le projet de loi sur le plan d’action économique de 2015, on retrouvait des dispositions qui modifiaient la Loi sur l’immigration et les réfugiés. On y retrouvait aussi des modifications à la Loi sur l’abolition du registre des armes d’épaule, ce qui a mis fin au débat sur ces questions avec certaines provinces, dont le Québec, qui voulaient garder les données existantes dans le registre.
Voilà des exemples de mesures législatives qui ne devraient pas faire partie d’un projet de loi d’exécution du budget, mais qui mériteraient plutôt de suivre leur propre parcours législatif.
Le gouvernement libéral a adopté — en 2017, je crois — une pratique très semblable, voire la même pratique que le gouvernement conservateur qui l’avait précédé, à la nuance près que les parlementaires sont maintenant prévenus des dispositions législatives qui seront présentées dans le projet de loi d’exécution du budget. Dans le cadre du discours du budget, toute la série de mesures législatives qui seront présentées figure dans une annexe. Cela nous permet de nous préparer.
Le processus est donc plus transparent; il n’est pas plus acceptable pour autant, car ces projets de loi contiennent plusieurs éléments qui n’ont pas vraiment de lien avec le budget. Comme je le disais plus tôt, pensons aux modifications au Code criminel, dans le cas de l’Holocauste, à la modification à la Loi sur les juges, ou encore à la modification à la Loi sur le Parlement; cela fait bien notre affaire, mais ce genre de modifications ne devraient pas se retrouver là.
De plus, ces projets de loi sont souvent trop lourds. D’ailleurs, plusieurs témoins, notamment au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, ont affirmé que certaines sections de la partie 5 du projet de loi, comme la section sur la concurrence, mériteraient d’être présentées dans un projet de loi à part entière.
Bref, ce n’est pas parce qu’un projet de loi a une incidence financière qu’il mérite d’être incorporé au budget, et le fait de retrouver autant de thématiques dans le budget qui ne sont pas liées directement à l’énoncé budgétaire n’est pas une bonne pratique, même si la pratique est plus transparente qu’auparavant.
Il faut se demander pourquoi et comment les gouvernements en sont arrivés là.
On sait que si cette pratique existe, c’est pour faciliter l’adoption de mesures législatives qui, autrement, seraient plus difficiles à faire accepter.
Est-ce aussi en raison de l’élection d’un gouvernement minoritaire? Est-ce la pandémie de COVID-19 ou l’ampleur du programme législatif? Selon moi, ce ne sont pas des excuses valables pour continuer d’augmenter la portée des projets de loi d’exécution du budget.
Une répartition plus équilibrée du dépôt des projets de loi du gouvernement tout au long de l’année fait partie, à mon avis, d’une solution en vue de remédier à l’ampleur des projets de loi « mammouths » d’exécution du budget.
J’invite donc les universitaires et les spécialistes de sciences politiques à donner leur perspective et à proposer des solutions.
Une chose est cependant certaine, et c’est pour cette raison que j’interviens aujourd’hui : si cette pratique continue à prendre de l’ampleur, elle nourrira davantage le scepticisme de la population à l’endroit de notre institution.
Cela dit, je voterai évidemment en faveur de l’adoption du projet de loi C-19, mais je veux profiter de l’occasion pour demander au gouvernement de ne pas inclure, dans le prochain projet de loi d’exécution du budget, un projet de loi qui soutiendra la réforme de l’assurance-emploi. C’est d’ailleurs mon deuxième point.
Dans le discours du budget, le gouvernement a annoncé qu’il rendra public son plan à long terme pour l’avenir du programme d’assurance-emploi après que les consultations seront terminées.
Comprenons-nous bien. Il serait inapproprié d’inclure ce plan dans un projet de loi d’exécution du budget et les raisons sont évidentes. Nous aurions de la difficulté à mener une étude approfondie sur cette réforme, qui est fondamentale pour la vitalité de notre marché du travail. Nous ne pourrions pas connaître les répercussions régionales et suggérer des ajustements à valeur ajoutée.
Cependant, j’aimerais en profiter pour insister sur la nécessité de mener un processus de consultation itératif auprès des partenaires du marché du travail, car ce sont eux qui financent entièrement ce programme social. Ce que j’ai proposé dans le projet de loi S-244 que j’ai récemment présenté amènerait un ajout essentiel à la Commission de l’assurance-emploi. Cela pourrait grandement contribuer à améliorer la réforme du programme d’assurance-emploi. Il propose de renforcer le dialogue social au sein de la Commission de l’assurance-emploi. Un processus de consultation itératif comme celui dont il est question peut s’avérer extrêmement utile et novateur dans ce contexte. Je poursuivrai mon travail dans ce dossier à notre retour, en septembre. Je rappelle, comme vous le savez peut-être, que le projet de loi S-244 a reçu l’appui des principaux intervenants du marché du travail, dont le Congrès du travail du Canada et la Chambre de commerce du Canada.
Je pense que le Sénat peut jouer un rôle important dans le dossier de l’assurance-emploi parce qu’il compte un groupe de sénateurs bien informés qui s’investiraient dans la réforme. Nous pourrions avoir le temps de faire une étude approfondie, surtout si le gouvernement nous demande de procéder à une étude préalable du projet de loi.
En terminant, je tiens à souligner que le Sénat peut faire une différence dans la qualité de la législation. Il l’a fait par le passé. Le Sénat a exercé son influence en étudiant le projet de loi C-19, même s’il n’y a pas apporté d’amendements. C’est mon troisième point.
Rappelons que lorsque le projet de loi C-19 a été déposé à la Chambre des communes, la partie 5 comprenait 32 sections. Elle en compte maintenant 31.
Nous sommes reconnaissants au sénateur Yussuff de son leadership, grâce auquel nous avons pu persuader le gouvernement et la ministre Qualtrough de retirer la section 32; elle portait sur la création d’un nouveau conseil d’appel de l’assurance-emploi qui aurait remplacé le processus d’appel relevant du Tribunal de la sécurité sociale du Canada. Cette section a été éliminée en raison des objections unanimes exprimées par les associations syndicales et les associations d’employeurs.
Le gouvernement était sûrement de bonne foi en proposant une réforme. Il souhaitait que cette dernière réponde aux doléances des travailleurs et des employeurs. Cependant, il a raté sa cible.
Si les propositions visant à renforcer le dialogue social à la Commission de l’assurance-emploi qui étaient prévues dans le projet de loi S-244 avaient été en vigueur, le gouvernement n’aurait pas raté sa cible. Les parties prenantes auraient pu signaler les situations problématiques dès le départ et proposer une réforme du tribunal qui aurait vraiment répondu aux besoins.
En terminant, je veux souligner l’énorme travail que tous les sénateurs ont accompli dans l’étude du projet de loi C-19. Je tiens plus particulièrement à féliciter la marraine du projet de loi, la sénatrice Lucie Moncion, ainsi que la porte-parole, la sénatrice Elizabeth Marshall. Merci. Meegwetch.
Honorables sénateurs, j’ai bien aimé les observations de la sénatrice Bellemare sur les projets de loi omnibus, mais il y a une autre section intéressante dans ce projet de loi.
Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour parler de la section 13 du projet de loi C-19, la loi d’exécution du budget, qui vise à poursuivre le programme de modernisation du Sénat lancé par le gouvernement en 2016 afin de rendre cette institution plus indépendante. Cette section comprend des modifications à la Loi sur le Parlement du Canada et d’autres changements.
La section 13 tient compte des mesures qui ont été prises pour assurer l’indépendance de la Chambre haute et renforce ces mesures en apportant des changements clés, notamment en modifiant les indemnités annuelles supplémentaires que reçoivent les sénateurs occupant des postes de direction et en prévoyant l’obligation de consulter les leaders de tous les groupes reconnus au Sénat au sujet des nominations de certains hauts fonctionnaires et agents du Parlement.
Honorables sénateurs, comme nous le savons, ces modifications ne datent pas d’hier. Elles ont d’abord été proposées l’année dernière, au Sénat, dans le cadre du projet de loi S-4, puis après les dernières élections de 2021, dans le cadre du projet de loi S-2, puis à l’autre endroit, dans le cadre du projet de loi C-7, pour être finalement incluses par le gouvernement dans la loi d’exécution du budget actuellement à l’étude. Ces modifications tiennent compte des modifications importantes qui ont été apportées au Règlement du Sénat depuis 2016 afin que l’on puisse reconnaître d’autres groupes que le gouvernement et l’opposition officielle.
Nombre de nos collègues ont travaillé fort pour apporter ces changements. Je remercie tous les leaders du Sénat, en particulier nos leaders, les sénateurs Woo et Saint-Germain, des efforts considérables qu’ils ont déployés au fil des années, ainsi que les sénateurs Harder et Gold de nous avoir permis d’en arriver à ce point.
Mon objectif aujourd’hui est de parler brièvement de l’évolution du Sénat et de la façon dont les Canadiens perçoivent la Chambre haute.
Au cours de mes 30 ans de carrière consacrés au domaine de l’opinion publique, j’ai eu l’occasion d’étudier, d’analyser et de consulter les Canadiens sur les nombreuses propositions avancées au fil des ans pour réaliser la réforme du Sénat.
En 1987, l’accord du lac Meech incluait une courte liste de dispositions, dont l’une aurait donné aux provinces la possibilité de soumettre des noms au premier ministre pour pourvoir des postes au Sénat. Cet accord a été enterré en 1990.
En 1992, l’accord de Charlottetown incluait dans sa liste beaucoup plus longue de dispositions des articles visant à mettre en place un Sénat « triple E » : un Sénat qui serait élu, égal et efficace. Cet accord est mort dans la foulée d’un référendum national qui a échoué cette année-là.
En 2011, le premier ministre Harper a présenté un projet de loi prévoyant un mandat limité pour les sénateurs et des propositions visant à permettre aux provinces d’organiser des élections sénatoriales. Cette réforme est également devenue lettre morte lorsque la Cour suprême a statué, relativement au renvoi de 2014, que de tels changements nécessiteraient des modifications constitutionnelles.
M. Harper savait alors, comme nous le savons encore aujourd’hui, à quel point il est difficile de modifier la Constitution. En fait, un récent sondage Environics montre que seulement 35 % des Canadiens seraient prêts à rouvrir la Constitution dans le but d’apporter des changements au Sénat. Il faudrait un soutien public beaucoup plus important que cela pour que nous nous engagions à nouveau dans cette voie.
Chers collègues, de mon vivant, la seule grande réforme du Sénat qui a véritablement fonctionné a été l’initiative du premier ministre Trudeau de créer un Sénat indépendant.
Je veux faire quelques observations au sujet de l’opinion publique et parler un peu de ce que les Canadiens pensent du Sénat.
Premièrement, il y a encore des difficultés avec la façon dont le public voit le Sénat dans son ensemble. En examinant les sondages d’opinion nationaux menés par Nanos Research l’an dernier, j’ai essayé de creuser un peu pour comprendre quelles sont les sources de mécontentement du public par rapport au Sénat.
Voici les raisons pour lesquelles les Canadiens ont une mauvaise opinion du Sénat. Certains critiquent le fait que nous ne soyons pas élus, et ils préféreraient que les sénateurs soient élus. D’autres affirment que le Sénat est encore trop partisan, et d’autres soulignent encore les scandales qui remontent à de nombreuses années. Cependant, la critique qui revient le plus souvent, c’est que les Canadiens ne voient pas notre travail comme un usage optimal des fonds publics. Ils ne savent pas exactement ce que nous faisons, mais ils pensent que nous coûtons peut-être trop cher. Ils ne sont pas tout à fait certains, et c’est la critique la plus importante de toutes.
Chers collègues, nous n’avons pas réussi à bien expliquer la nature de notre travail acharné, notre but et le rôle de second examen objectif, et il faut continuer de faire mieux à cet égard. En ce qui concerne le Sénat indépendant, toutefois, il y a beaucoup de commentaires positifs de la part des Canadiens.
Selon le sondage mené l’an dernier par la firme Nanos, la plupart des gens approuvent le nouveau processus de nomination au Sénat, en place depuis 2016. Selon les données recueillies, 80 % des Canadiens pensent qu’il s’agit d’un changement positif et d’une bonne chose que les nouveaux sénateurs siègent en tant que membres indépendants du Sénat et qu’ils ne prennent pas part aux activités d’un parti politique. De plus, 67 % des répondants saluent le nouveau processus de sélection ouvert pour choisir les sénateurs, et 79 % d’entre eux accueillent favorablement le fait que les candidatures sénatoriales soient maintenant examinées par un comité indépendant.
Surtout, chers collègues, les Canadiens veulent que les gouvernements futurs continuent de rendre le Sénat plus indépendant. Trois quarts des Canadiens, soit 76 %, veulent que les prochains gouvernements maintiennent les changements apportés au processus de nomination, et seulement 3 % des Canadiens souhaitent que nous revenions à l’ancienne méthode de nomination.
Chers collègues, il nous reste encore du travail à faire. Nous devons continuer à accroître la sensibilisation au rôle unique du Sénat dans la gouvernance et à rendre le Sénat plus indépendant et non partisan. Plus la population en sait sur l’indépendance du Sénat, plus les attitudes sont positives.
Je conclurai en disant que les réformes favorisant l’indépendance sont de bon augure pour notre institution. La section 13 du projet de loi C-19 est une étape vitale vers la reconnaissance du Sénat indépendant et le maintien de cette reconnaissance dans l’avenir. Je vais voter oui. Merci.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-19, Loi no 1 d’exécution du budget de 2022, qui est présenté par le gouvernement. Je remercie tous les sénateurs qui sont intervenus jusqu’à maintenant de leurs discours inspirés.
En tant que membre du Comité des finances nationales et du Comité des banques, j’ai eu le plaisir de plonger dans l’examen en profondeur de ce projet de loi de près de 500 pages. En tout, nous avons tenu huit réunions et nous avons entendu plus de 75 témoins. Nous avons reçu plusieurs mémoires, et j’ai également lu les rapports des six comités qui ont mené des études préalables sur des parties du projet de loi. Je vais maintenant tenter de bien compléter les autres discours que nous avons déjà entendus.
Étudier un projet de loi d’exécution du budget est toujours une tâche à la fois stimulante et intimidante, une tâche qui inclut généralement l’examen d’une longue liste d’initiatives stratégiques, de modifications liées à l’impôt sur le revenu et de diverses autres mesures. Le projet de loi C-19 ne fait pas exception.
Nous connaissons tous le dicton suivant : quand on se compare, on se console. Effectivement, l’économie canadienne fait bonne figure lorsqu’on la compare à celle de nos alliés du G7. Par exemple, le Fonds monétaire international a révisé ses projections de croissance en avril, y apportant une légère baisse. Au niveau global, on prévoit une croissance de 3,6 %, alors qu’au Canada, il est plutôt question d’une hausse de 3,9 %, ce qui nous permet de devancer les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Union européenne. Ces projections sont encourageantes.
Bien que l’économie canadienne roule à plein régime, plusieurs Canadiens demeurent dans des situations précaires et difficiles. L’inflation est, en grande partie, responsable de plusieurs ennuis pour les Canadiens qui craignent de ne pas pouvoir joindre les deux bouts. Heureusement, il y a quelques mesures dans le projet de loi C-19 qui allégeront le fardeau financier de certains d’entre eux.
Il y a quelques mesures dans le projet de loi C-19 que j’accueille favorablement et qui, à mon avis, contribueront à alléger certaines des pressions financières et des difficultés économiques avec lesquelles les Canadiens sont aux prises actuellement à cause, en partie, des pressions inflationnistes que nous subissons. J’ai bon espoir que certaines de ces mesures permettront de créer de la richesse et d’accroître la productivité au Canada.
Par exemple, je pense à la déduction pour la mobilité de la main-d’œuvre destinée aux gens de métier, qui a été bien couverte et qui vise à permettre aux travailleurs de déduire des dépenses admissibles pouvant aller jusqu’à 4 000 $ par année. J’ai parlé à de nombreux entrepreneurs qui ont encore du mal à trouver des travailleurs. Cette mesure devrait aider et, espérons-le, résoudre certains des retards. Les pénuries de main-d’œuvre ne sont pas le seul problème. En effet, les retards dans la chaîne d’approvisionnement continuent aussi d’avoir des répercussions négatives, comme nous l’avons tous constaté et vécu.
De plus, j’appuie l’engagement du gouvernement d’offrir un plus grand soutien aux personnes handicapées, notamment par l’entremise du crédit d’impôt pour l’accessibilité domiciliaire. Cette mesure devrait aider 10 000 familles canadiennes et permettre à des aînés et à des personnes handicapées de vivre et vieillir chez eux. J’appuie également l’élargissement des critères d’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées, et je serais favorable à l’élargissement futur d’un autre crédit d’impôt remboursable.
Nous savons tous que l’offre de logements et l’abordabilité représentent de gros problèmes au Canada. Je ne mâcherai pas mes mots : il s’agit d’une crise qui nécessite notre attention immédiate. Heureusement, il y a quelques mesures dans le projet de loi C-19 qui portent sur le logement, à savoir les sections 4 et 12 de la partie 5. La section 4 autorise le ministre des Finances à verser aux provinces une somme totale n’excédant pas 750 millions de dollars pour faire face aux déficits et besoins — municipaux ou autres — en matière de transport en commun et améliorer l’offre de logements et l’accès à des logements abordables. C’est un point très important.
La section 12 interdit l’achat d’immeubles résidentiels au Canada par des non-Canadiens. Il s’agit d’une nouvelle mesure qui interdit aux étrangers d’investir dans des logements canadiens pendant deux ans. L’interdiction s’appliquerait également à certaines sociétés et entités étrangères, et empêcherait toute personne non admissible de contourner l’interdiction en ayant recours à des sociétés privées.
Je tiens aussi à saluer brièvement l’engagement du gouvernement à avancer de deux ans la création d’un registre de la propriété effective accessible au public, en apportant des modifications à la Loi canadienne sur les sociétés par actions. La section 30 de la partie 5 du projet de loi exigera que les sociétés privées envoient de manière proactive à Corporations Canada des renseignements sur leurs propriétaires bénéficiaires. Le registre sera créé en deux temps, et nous nous attendons à ce qu’il y ait d’autres changements cet automne dans le deuxième projet de loi d’exécution du budget de 2022. Au comité, des fonctionnaires d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada ont expliqué que le gouvernement fera d’autres consultations auprès des intervenants, ce qui est extrêmement important.
Je crois que, le temps venu, il sera important que le Comité sénatorial des banques se penche sur les modifications proposées à la phase 2 pour s’assurer, entre autres, qu’aucune échappatoire ne permette aux étrangers de créer des sociétés fictives pour contourner les mesures prévues à la section 12 en vue d’interdire l’achat d’immeubles résidentiels au Canada par des non-Canadiens. Je sais que notre collègue le sénateur Downe partage cette préoccupation et a écrit à la ministre Freeland à ce sujet.
Évidemment, ces trois mesures s’ajoutent à une autre mesure liée au logement que nous avons adoptée la semaine dernière dans le cadre du projet de loi C-8, soit la Loi sur la taxe sur les logements sous-utilisés, qui générera, selon les estimations du gouvernement, 735 millions de dollars de revenus au cours des cinq prochaines années. Les fonctionnaires qui ont comparu devant le Comité des finances nationales ont fait valoir que la section 12 s’inscrit dans la série de mesures annoncées par le gouvernement dans le budget de 2022 afin d’améliorer les résultats en matière de logement abordable pour les Canadiens et de freiner la demande chez les investisseurs étrangers.
On m’a assuré que ces mesures ne sont qu’une partie d’un ensemble d’initiatives, puisqu’il reste beaucoup de travail à faire dans ce dossier. Taxer les propriétaires étrangers ne résoudra pas la pénurie de logements et il est peu probable que cela réglera les problèmes en matière d’abordabilité. Vu la hausse récente et anticipée des taux d’intérêt, le logement risque de devenir de plus en plus inaccessible pour les Canadiens. Environ un Canadien sur quatre craint que les taux d’intérêt croissants le forcent à vendre son habitation.
J’espère que le Comité des banques du Sénat prendra le temps, cet automne, d’explorer les possibilités, les défis et les risques qui se présentent dans le secteur et de faire des recommandations au gouvernement sur la manière de rendre le logement plus abordable, disponible et accessible.
Je comprends que le gouvernement fédéral puisse être limité dans ce qu’il peut réellement faire pour résoudre la crise du logement, puisque de nombreuses responsabilités relèvent des ordres de gouvernement provincial et municipal, comme les questions de zonage et de permis. Je respecte les champs de compétence, mais je crois aussi que la fédération canadienne fonctionne mieux et peut réaliser de grandes choses lorsque tous les ordres de gouvernement travaillent de concert. Le dossier du logement est une de ces questions où la collaboration est cruciale. Une solution possible pourrait être de lier le financement offert aux provinces pour le transport en commun à une augmentation de l’offre de logements. Cette offre de logements est actuellement rationnée par les provinces et les municipalités. La question est trop compliquée pour être abordée en peu de temps, mais nous l’étudierons plus en profondeur et je ferai des commentaires à ce sujet plus tard.
Les médias ont abondamment parlé de la Loi sur la taxe sur certains biens de luxe, à la partie 4 du projet de loi, au sujet de laquelle j’ai des réserves. En apparence, cela peut sembler être une bonne politique. Comme l’a soutenu le gouvernement lorsqu’il a présenté cette taxe dans le budget de 2021, ceux qui peuvent se permettre des biens de luxe ont les moyens de payer un peu plus de taxes. On estime que cette mesure amènerait une augmentation des recettes fédérales de 749 millions de dollars sur cinq ans.
Des représentants des industries aérospatiale et maritime nous ont dit au Comité des finances nationales que cette mesure nuirait à l’économie et à des milliers de familles canadiennes. On a dit de cette mesure qu’elle risquait d’entraîner des pertes d’emplois et des pertes de revenus pour des entreprises partout au pays. Je n’entrerai pas dans les détails, mais de nombreuses chaînes d’approvisionnement seraient évidemment touchées. On nous a également rappelé que les États-Unis avaient instauré une taxe similaire sur les bateaux au début des années 90, mais qu’ils avaient abrogé celle-ci à peine quelques années plus tard. Il est toujours possible d’apprendre des autres pays de la planète, en particulier de notre plus important partenaire commercial.
Les fonctionnaires du ministère des Finances ont indiqué qu’il ne devrait pas y avoir d’impact sur la croissance de l’économie en général, mais ils ont reconnu que des secteurs précis, dont les secteurs de l’automobile, des bateaux et des avions, subiraient un plus grand impact. Je crois que le gouvernement n’a peut-être pas pensé à toutes les conséquences qu’aurait cette mesure sur les travailleurs de ces secteurs, sur les revenus de ventes et sur la réputation du pays à l’international.
Je ne dis pas qu’il faudrait abroger cette mesure du projet de loi C-19 — quelques observations ont été faites dans le rapport que nous avons produit au Comité des finances nationales et vous pouvez vous y référer —, mais je ne peux m’empêcher de remettre en question l’évaluation des impacts économiques que le gouvernement a menée pour justifier cette mesure. Je crois qu’il sera très important que les sénateurs au sein du Comité des finances nationales suivent la mise en œuvre de cette taxe et les impacts qu’elle aura sur l’emploi afin de réagir très rapidement advenant que cet impact soit négatif.
Nous avons discuté des taxes d’accise et des taxes sur les « vices », mais que puis-je ajouter rapidement? J’ajouterai ceci : selon les Comptes publics du Canada, entre 2016 et 2021, les recettes tirées des taxes sur le tabac s’élevaient à près de 16 milliards de dollars et à un peu plus de 9 milliards de dollars pour les taxes sur l’alcool. Ce sont des recettes considérables pour le Trésor public. En ce qui concerne les taxes qui s’appliquent maintenant aux produits du vapotage, les recettes qui en découleront au cours des cinq prochaines années généreront environ 654 millions de dollars. Je tiens simplement à souligner l’importance de ces taxes.
En ce qui concerne la concurrence et la croissance, lorsque la ministre Freeland a déposé son budget à l’autre endroit le 7 avril, elle a reconnu que la productivité et l’innovation représentent le talon d’Achille de l’économie canadienne. Je suis tout à fait d’accord avec elle et je crois que le projet de loi C-19 aurait pu en faire davantage pour s’attaquer au problème. Le milieu des affaires est du même avis. Il y a évidemment certaines mesures, comme les modifications apportées à la section 15 de la partie 5 de la Loi sur la concurrence, qui pourraient ouvrir la voie à un marché plus concurrentiel. Selon le gouvernement, ces changements pourraient se traduire par une baisse des prix des biens et des services, un plus grand choix pour les consommateurs, de meilleurs emplois bien rémunérés — il n’y a jamais assez d’emplois bien rémunérés — et un environnement qui stimule l’innovation et la productivité des entreprises.
C’est une bonne nouvelle, car nous savons tous que la concurrence profitera au consommateur, et le consommateur, je le dis souvent, est le moteur de toute reprise économique et de toute économie. Si nous regardons vers le Sud, la plus grande économie du monde et notre plus grand partenaire commercial, le consommateur y représente les deux tiers de l’économie. Au Canada, c’est près de 60 % de l’économie. Étant donné l’importance du consommateur, toute mesure ou modification qui lui est favorable est toujours très bien accueillie.
Il est également important que le gouvernement s’engage davantage auprès des intervenants, du milieu des affaires et d’autres acteurs afin de déterminer ce qui doit être fait de plus pour que le Canada suive le rythme de ses concurrents mondiaux. Nous devons être une destination attrayante, un endroit qui encourage les entreprises à innover et qui donne aux travailleurs canadiens une chance de prospérer. Nous devons également mettre en place des conditions très favorables pour promouvoir les investissements nationaux et étrangers.
En conclusion, honorables sénateurs, alors que nous regardons vers l’avenir et que nous examinons comment le Canada peut, devrait et doit gérer la reprise, nous devons tourner notre attention vers la compétitivité globale du Canada. Je l’ai déjà dit et je le répète : il est beaucoup plus facile de distribuer la richesse que d’attirer et de créer de la richesse. C’est la même chose dans le monde des affaires. Si on demande à des dirigeants de réduire les dépenses, ils s’empresseront de le faire. Si on leur demande d’augmenter les ventes, ce sera un peu plus difficile.
Le Canada a besoin d’un plan pour remédier à la faiblesse de sa productivité et de sa croissance. Par la même occasion, nous devons trouver des moyens d’accroître nos revenus et commencer à nous attaquer à la dette et aux déficits. Je ne vais pas parler de chiffres, car la sénatrice Marshall l’a déjà fait. Elle me regarde d’ailleurs en souriant et en hochant la tête. Je tiens aussi à remercier les sénatrices Moncion et Marshall, qui ont fait un excellent travail en tant que marraine et porte-parole du projet de loi.
Pendant que j’y suis, je remercie tous mes collègues des comités des finances et des banques. J’y apprends constamment de nouvelles choses. Je suis vraiment privilégié. Toutefois, la meilleure façon d’augmenter nos revenus consiste à stimuler l’économie.
Chers collègues, je vais voter en faveur du projet de loi C-19. J’ai l’impression que la plupart des mesures qu’il contient auront un effet positif sur notre économie, même si j’espérais davantage de mesures pour stimuler la productivité et la compétitivité du Canada. Le projet de loi C-19 est néanmoins un bon pas en avant et un rappel qu’il reste beaucoup de travail à faire. Les belles paroles ne suffisent pas. Il est facile de parler, mais il faut passer à l’action. Faisons bouger les choses. Je suis heureux d’apporter ma contribution et de faire du bon travail aux côtés de mes collègues des comités des finances et des banques. Merci pour tout votre travail.
Honorables sénatrices et sénateurs, permettez-moi de remercier la sénatrice Moncion et la sénatrice Marshall de leur travail exceptionnel lors de l’étude de ce projet de loi.
Chers collègues, comme vous le savez, à quelques reprises, j’ai interpellé le gouvernement du Canada sur sa manière d’accorder la priorité aux besoins financiers et aux droits des personnes qui vivent avec un handicap, soit pour déplorer les lenteurs dans la mise en œuvre des programmes d’aide durant la pandémie, soit pour insister sur l’urgence de relancer la création d’une nouvelle prestation canadienne pour les personnes en situation de handicap. Notre rôle de sentinelle nous oblige à signaler ces manquements ou toute autre promesse non tenue. Cependant, lorsque c’est le cas, nous avons aussi la responsabilité de saluer toute mesure qui allège le lourd fardeau des Canadiens et des Canadiennes qui vivent avec un handicap.
Le projet de loi C-19 nous donne l’occasion de le faire en proposant d’étendre les critères d’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées, qui est une porte d’entrée vers de nombreux autres services de soutien, notamment le Régime enregistré d’épargne-invalidité et la Prestation pour enfants handicapés.
Aujourd’hui, je prends quelques minutes pour saluer ces modifications en question et, à la fois, pour partager le soulagement des Canadiens qui attendaient impatiemment, et depuis longtemps, l’amélioration de cette mesure fiscale. La Bibliothèque du Parlement nous informe qu’environ 45 000 familles et individus pourront ainsi bénéficier du CIPH et avoir accès plus aisément à d’autres prestations connexes.
Déjà, en 2018, vous vous le rappellerez peut-être, le Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie, sensibilisé par le travail du sénateur Munson, s’est penché sur ce crédit d’impôt. Les difficultés pour y accéder étaient de notoriété publique, particulièrement dans le cas des personnes ayant des limitations liées aux fonctions mentales. Nous avions appris à l’époque qu’il était courant qu’un certificat médical attestant qu’une personne satisfaisait à tous les critères d’admissibilité ait été rejeté de manière inexplicable. Nos recommandations d’alors insistaient sur la nécessité de supprimer les barrières, de rendre les critères d’admissibilité plus équitables et cohérents et de faire preuve de plus de compassion dans l’administration du programme.
Les changements proposés dans le projet de loi d’exécution du budget répondent en partie à nos demandes. Non seulement le projet de loi facilitera l’évaluation de l’admissibilité et réduira les temps d’attente, mais, surtout, il accroîtra l’accès à cette mesure fiscale. De façon générale, une personne est admissible au crédit d’impôt pour personnes handicapées si elle a une ou plusieurs déficiences mentales ou physiques graves et prolongées qui restreignent considérablement sa capacité d’exercer des activités de base de la vie quotidienne.
La première série de modifications contenues dans le projet de loi C-19 est en fait une actualisation de la liste des éléments qui sont considérés comme étant des fonctions mentales essentielles aux activités de la vie courante. Cette liste a beaucoup été critiquée en raison de son manque de clarté et de cohérence face à plusieurs situations de la vie de tous les jours.
L’autre changement principal à saluer concerne ce qui peut être inclus dans le calcul des heures à consacrer par semaine aux soins thérapeutiques essentiels. À l’heure actuelle, certaines activités ne sont pas comptabilisées. Par exemple, l’alimentation et les activités liées à l’exercice physique qui sont nécessaires pour administrer un médicament et assurer le dosage sécuritaire des aliments médicaux et des formules médicales ne sont pas admissibles.
Ce ne sera plus le cas une fois que le projet de loi C-19 sera adopté. Encore mieux, la nouvelle catégorie d’activités inclurait aussi le temps consacré aux rendez-vous pour recevoir des soins en raison de sa déficience. Il serait également possible de calculer le temps consacré par une autre personne pour aider la personne sous thérapie si celle-ci n’est pas en mesure de le faire elle-même en raison de l’impact de son handicap. En ce moment, tout bénéficiaire doit suivre une thérapie essentielle au moins trois fois par semaine, pendant un total d’au moins 14 heures par semaine. La fréquence requise pour l’administration de ces soins serait réduite de trois fois à deux fois par semaine.
Une des autres bonnes nouvelles qu’apporte ce projet de loi est que, grâce à un amendement adopté à l’unanimité par le Comité des finances de l’autre endroit, les personnes atteintes de diabète de type 1 pourraient désormais être automatiquement admissibles au CIPH.
La Dre Michèle Hébert, présidente de l’organisme Bourgeons en éclat et militante pour les droits de la famille à Santé des enfants Canada, se réjouit de ces progrès. Voici ce qu’elle a dit :
Cette modification prend en compte le temps considérable qu’il faut pour coordonner les soins. Cette situation est en grande partie attribuable à des problèmes dans les processus administratifs et de soumission des demandes. Pensons aux formulaires manquants, au fardeau de la bureaucratie, aux exigences relatives à la soumission d’une nouvelle demande, au refus, à l’obtention de l’approbation du médecin prescripteur ou aux interprétations de la machine bureaucratique quant à la satisfaction des critères d’admissibilité afin d’obtenir cet important crédit d’impôt.
Le Dr Marc-André Dugas, chef du département de pédiatrie du Centre Mère-Enfant Soleil du CHU de Québec et membre du conseil d’administration de Santé des enfants Canada, a déclaré ce qui suit :
[...] ce changement est bienvenu, car il allégera le fardeau administratif pour les familles et les fournisseurs de soins, en plus de diminuer les difficultés des jeunes familles au moment où elles essaient courageusement de gérer cette maladie.
Il y a encore des barrières. Les critères d’admissibilité seront assouplis. Toutefois, pour remplir le formulaire dans le but de bénéficier du crédit d’impôt, des Canadiens déboursent, auprès de certains consultants, jusqu’à 30 % des remboursements d’impôt générés par une demande qu’ils ont réussi à faire accepter, et ce, malgré l’adoption de la Loi sur les restrictions applicables aux promoteurs du crédit d’impôt pour personnes handicapées en 2014 — j’ai bien dit 2014 — et la publication des règlements en 2021, soit neuf ans plus tard. Les règlements qui devaient plafonner à 100 $, les frais que les promoteurs du CIPH peuvent accepter ou facturer pour ces services ont été suspendus jusqu’à nouvel ordre par un juge de la Colombie-Britannique, dans l’attente de l’issue d’une contestation constitutionnelle.
Il reste des obstacles, des barrières. Que ce soit le coût des équipements, des traitements ou des services, la dure réalité est que cela coûte toujours cher d’être en situation de handicap.
Cela dit, il fait plaisir de réaliser que les personnes vivant avec un handicap participent maintenant à la conversation comme jamais auparavant. Il y a trois ans hier, l’ambitieuse et historique Loi canadienne sur l’accessibilité, a reçu la sanction royale. Cette loi, basée sur le principe du « rien sans nous », a donné le ton en montrant qu’un Canada exempt d’obstacles est possible d’ici 2040. D’ailleurs, il est réaliste d’espérer que les provinces suivront le pas dans les secteurs réglementés sous leurs compétences.
Le discours du Trône de 2020 a annoncé le développement d’un plan pour l’inclusion des personnes handicapées, dont la nouvelle Prestation canadienne pour les personnes handicapées est une des principales composantes.
En terminant, j’applaudis les propositions énoncées dans le projet de loi C-19. Toutefois, il est frustrant et décevant que l’étude à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-22 n’ait pas encore commencé à l’autre endroit. Par conséquent, j’exhorte le gouvernement à accorder la plus haute priorité à ce projet de loi à la reprise des travaux en septembre prochain. Alors que nous nous préparons à la pause estivale, il ne faut pas oublier que — comme plusieurs autres personnes l’ont dit avant moi — la pauvreté n’est jamais en vacances pour 22 % des Canadiens vivant avec un handicap. Merci.
J’aimerais féliciter et remercier la marraine du projet de loi, la sénatrice Moncion, et la porte-parole officielle, la sénatrice Marshall, ainsi que le président et les membres du comité.
Je voulais simplement revenir un instant sur la taxe sur les biens de luxe, qui s’appliquerait notamment aux secteurs aéronautique, nautique et automobile.
Comme vous le savez, il s’agit d’une promesse électorale phare du gouvernement actuel, qui, malheureusement, nous semble mal ficelée. En effet, au cours de nos travaux, nous avons été très étonnés de constater que les fonctionnaires du ministère des Finances, des gens par ailleurs extrêmement compétents, étaient incapables de justifier l’existence de cette taxe, qui, comme on le sait, pourrait s’avérer très dommageable pour l’industrie aérospatiale et ses travailleurs.
Les fabricants d’aéronefs sont venus nous dire au comité que, telle qu’elle est conçue, la taxe aura un effet important sur l’ensemble du secteur de l’aérospatiale. Ils estiment les pertes à 1 milliard de dollars en revenu et ils affirment que 1 000 emplois directs pourraient être perdus. Il est important de mettre tout cela dans un contexte plus global, alors que l’industrie aérospatiale canadienne a perdu près de 30 000 emplois, rien qu’en 2020, et que la contribution du secteur au PIB du Canada a diminué de 6,2 milliards de dollars.
Notre premier réflexe a été de demander ceci au ministère des Finances : « Si on s’apprête à mettre en jeu 1 000 emplois directs et 1 milliard de dollars en revenu avec cette taxe de luxe, peut-on imaginer qu’une étude sur les revenus anticipés a été réalisée pour évaluer si les bénéfices dépassent les inconvénients? » À notre grand étonnement, on nous a répondu que ces études n’existaient pas, et puisque je sais que vous êtes tout aussi étonnés de cela que les membres du Comité des finances, je vais vous citer l’extrait pertinent.
Le 31 mai, nous recevions M. Phil King, directeur général de la Division de la taxe de vente au ministère des Finances. Je lui ai demandé ce qui suit, et je cite :
À la suite des consultations, l’Association des industries aérospatiales du Canada a fait savoir qu’elle estime que la taxe pourrait entraîner la perte d’environ 1 000 emplois au Canada et des pertes de ventes se chiffrant entre 500 millions et 1 milliard de dollars.
Lors de vos consultations, avez-vous fait une estimation de l’impact de cette taxe sur les emplois au Canada dans le secteur de l’aéronautique? Je n’ai rien contre le fait de taxer les plus riches; c’est une question d’équité sociale. Toutefois, a‑t‑on évalué l’impact sur les travailleurs?
Sa réponse a été la suivante, et je cite :
La réponse directe est non, le ministère n’a pas estimé l’impact économique sur les secteurs de l’automobile, de la construction nautique ou de l’aéronautique, ce qui tient à plusieurs raisons.
D’abord, il y a peu d’autres exemples de telles taxes dont nous pouvons nous inspirer pour examiner les répercussions, et la littérature économique sur ce type de taxe est plutôt mince. C’est notamment le cas dans le secteur de l’aéronautique.
Nous n’avons donc pas d’estimation portant expressément sur les impacts possibles, mais nous avons, à tout le moins, consulté assez longuement l’industrie et entendu parler de certains des impacts que le sénateur a évoqués.
Que l’on se comprenne bien : le projet de loi C-19 introduit une taxe sur les biens de luxe pour aider le gouvernement à rééquilibrer son budget, après les dépenses importantes et nécessaires qu’il a dû faire pendant la pandémie. L’idée est de mettre les mieux nantis à contribution, selon le gouvernement. Cette taxe s’applique à différents biens, dont les aéronefs produits principalement au Québec. Toutefois, le gouvernement n’est pas en mesure de dire si cette taxe rapportera plus que ce qu’elle coûtera sur le plan des pertes d’emplois, de l’assurance-emploi, de la réduction du PIB, et cetera.
C’est quand même assez étonnant qu’un pays du G7 agisse ainsi, par essai-erreur, sans prendre la pleine mesure de l’effet potentiellement déstructurant que pourrait avoir cette taxe sur un des fleurons de l’économie québécoise.
J’avoue que l’absence d’étude coût-bénéfice, même sommaire, tend à renforcer l’argument de ceux qui prétendent que cette taxe de luxe est surtout un gadget électoral permettant au gouvernement de montrer qu’il s’attaque à la portion de 1 % des contribuables les plus riches.
Si l’objectif est de favoriser le retour à l’équilibre budgétaire en mettant à contribution les mieux nantis, personnellement, je crois qu’il aurait été plus efficace de bonifier l’impôt sur le revenu pour mieux cibler les plus riches, de revoir certaines échappatoires fiscales et de revisiter nos conventions fiscales avec certaines juridictions complaisantes. Toutefois, je dois l’avouer, d’un point de vue électoral, c’est moins spectaculaire qu’une taxe sur les biens de luxe.
Je dois dire que l’absence d’une analyse coût-bénéfice nous inquiète beaucoup. C’est pour cette raison que le Comité sénatorial permanent des finances nationales a ajouté une observation à son rapport sur le projet de loi C-19, notamment afin de recommander au ministère de Finances de faire une véritable étude sur l’effet de cette taxe sur le marché des aéronefs au Canada et sur ses répercussions sur l’emploi, avant d’appliquer cette taxe au secteur aéronautique.
Par ailleurs, comme plusieurs comités l’ont souligné, tout comme plusieurs collègues, il est déplorable que nous soyons contraints d’étudier un projet de loi si important et si volumineux en si peu de temps.
Par le passé, nous avons dénoncé à plusieurs reprises l’utilisation de ces projets de loi omnibus pour faire adopter des mesures qui n’ont rien à voir avec le budget. Par exemple, comme on l’a évoqué au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, il est aberrant que l’on glisse des modifications au Code criminel pour contrer l’antisémitisme dans un vaste projet de loi d’exécution du budget.
Honorables sénateurs, je veux être clair. Je crois qu’il est nécessaire que nous adoptions le projet de loi C-19 afin d’aider les pensionnés, les chômeurs, les étudiants, les travailleurs et, de manière générale, les Canadiennes et les Canadiens. Toutefois, je ne veux pas que cet appui soit interprété comme un cautionnement des actions du gouvernement, qui a malheureusement pris la mauvaise habitude de bousculer les parlementaires en leur imposant des délais trop serrés pour étudier des projets de loi complexes contenant des centaines de mesures qui, souvent, n’ont rien à voir avec le budget. Cette pratique est déplorable et est assurément incompatible avec les prétentions d’un gouvernement qui se dit en faveur de la transparence et de la saine gestion des finances publiques. Merci. Meegwetch.
Honorables sénateurs, tout d’abord, je remercie la sénatrice Moncion de jouer le rôle de marraine du projet de loi et d’avoir présenté un excellent discours. Je tiens aussi à remercier la sénatrice Marshall. Je crois que nous profiterons de ses examens judicieux — possiblement les meilleurs — des budgets pendant seulement quatre autres budgets. Nous vous sommes tous reconnaissants, sénatrice Marshall, du temps que vous prenez pour décrire les différents éléments de façon fiable, peu importe qui parraine le projet de loi.
Chers collègues, je parlerai du projet de loi C-19, la Loi no 1 d’exécution du budget de 2022, qui porte sur le budget de 2022 intitulé : Un plan pour faire croître notre économie et rendre la vie plus abordable. Il a été décrit comme suit :
Le plan d’investissements ciblés et responsables établi par le gouvernement du Canada pour créer des emplois et favoriser la prospérité aujourd’hui, et bâtir un avenir économique plus fort pour tous les Canadiens.
Je me réjouis toujours de voir le gouvernement investir dans l’innovation, mais l’innovation n’assurera pas, à elle seule, la prospérité de nos petits-enfants et des générations futures. Pour que les sommes consacrées à l’innovation nous procurent un bon rendement, il faut aussi adapter les politiques gouvernementales, notamment celles qui touchent l’approvisionnement, ainsi que les règlements et les lois.
Il n’y a pas de temps à perdre. Des pays du monde entier sont en concurrence pour profiter des possibilités économiques qu’offre la transformation mondiale associée à la numérisation et aux changements climatiques. Nous ne sommes pas en bonne posture en ce moment. L’OCDE prévoit qu’en matière de rendement économique, le Canada sera en queue de peloton jusqu’en 2030 puis pendant les trois décennies suivantes.
Je vais donc aborder trois points qui, je l’espère, contribueront à attirer l’attention sur ce qui est nécessaire pour générer un rendement économique à partir de l’innovation.
Premièrement, le gouvernement doit catalyser et accélérer l’investissement privé dans l’innovation.
La pandémie a mis en évidence le potentiel d’innovation des gouvernements, mais j’ai le sentiment que nous sommes revenus à une situation où l’innovation est l’exception et non la norme. Nous devons commencer à appliquer avec agilité, rapidité et envergure une optique d’innovation aux problèmes sociaux et économiques les plus répandus.
Le gouvernement a un rôle à jouer pour générer des investissements privés et accélérer l’innovation dans le secteur privé, parce que, malheureusement, nos talents d’inventeur dépassent grandement nos talents d’innovateur. Nous avons un fabuleux moteur de recherche, mais il nous manque toujours la courroie de transmission qui convertira toute cette puissance de recherche en possibilités, en emplois et en prospérité dont les Canadiens ont de plus en plus besoin.
Atteindre cet objectif a été et demeure difficile. La vice-première ministre Freeland a déclaré dans son discours du budget que l’innovation et la productivité sont le talon d’Achille de l’économie. Je suis d’accord avec elle. En effet, de nombreux gouvernements, quelle que soit leur affiliation politique, ont été incapables de s’attaquer efficacement à ce problème, qui n’est pas nouveau au Canada.
Ce problème a également été mis en évidence par le Groupe d’action sénatorial pour la prospérité, présidé par le sénateur Harder. Notre rapport a fait ressortir les deux points suivants. Premièrement, sur une période de 50 ans, la croissance de la productivité du Canada a diminué considérablement. En 1970, le PIB par heure de travail du Canada était d’environ 1 $ de moins que celui des États-Unis et 1 $ de plus que la moyenne du G7. En 2019, le PIB par heure de travail du Canada était de 18,10 $ de moins que celui des États-Unis et de 9,50 $ de moins que la moyenne du G7.
Deuxièmement, en 2019, les entreprises canadiennes ont investi environ 15 000 $ par travailleur dans la machinerie, les bâtiments, l’ingénierie, l’infrastructure et la propriété intellectuelle. Cependant, les entreprises des pays de l’OCDE ont investi en moyenne 21 000 $ par travailleur — 40 % plus que le Canada —, et aux États-Unis, c’était 26 000 $ par travailleur — près de 75 % plus que le Canada. C’est un indicateur de la productivité de ces travailleurs et de notre prospérité à l’avenir.
Selon l’OCDE, en 2020, parmi tous les pays du G7, le Canada avait le plus faible taux d’investissement des entreprises en pourcentage du total des investissements. De plus, il avait le plus haut niveau d’investissement des ménages et le deuxième niveau d’investissement du gouvernement en pourcentage du total des investissements, comparativement à tous les pays du G7, en 2020.
C’est sur ce dernier point que j’aimerais que vous vous concentriez. Le Canada présente le plus haut niveau d’investissement des ménages et le plus faible niveau d’investissement des entreprises, alors qu’il affiche un niveau d’investissement du gouvernement parmi les plus élevés. Si nous voulons remplir les engagements du budget de 2022, qui propose un plan d’investissements ciblés et responsables pour créer des emplois et favoriser la prospérité aujourd’hui et bâtir un avenir économique plus fort pour tous les Canadiens, alors le gouvernement doit trouver des façons efficaces de mobiliser et d’accélérer les investissements privés dans l’innovation. Nous devons assurer cette transition rapidement, sinon, nous n’aurons pas les moyens et les ressources nécessaires pour promouvoir la recherche.
Deuxièmement, il est urgent de promouvoir la concurrence. Dans la dernière année, nous avons ravivé le débat sur les mesures législatives et les politiques du Canada en matière de concurrence. Vous savez tous à quel point je suis reconnaissant des efforts exceptionnels que le sénateur Howard Wetston a déployés pour faciliter les consultations et les débats entourant la Loi sur la concurrence.
J’ai donc été ravi de voir les dispositions du projet de loi C-19 qui visent à modifier la Loi sur la concurrence. La section 15 propose des modifications à la Loi sur la concurrence afin d’ériger en infraction criminelle la fixation des salaires et les accords connexes, de permettre l’accès privé au Tribunal de la concurrence pour remédier à un abus de position dominante et d’élargir la portée des mesures contre l’abus de position dominante. Ces modifications sont les bienvenues et permettront de poursuivre les efforts nécessaires pour réformer la Loi sur la concurrence.
Cependant, j’ai été ravi quand le gouvernement a clairement défini les changements apportés à la Loi sur la concurrence comme étant une « mise de fonds » sur ce qui nous attendait. Je n’étais pas le seul. Le Comité des banques l’était aussi et il a eu la réflexion suivante :
Le comité estime que le gouvernement du Canada doit impérativement, et dans les plus brefs délais, mettre en œuvre l’engagement prévu dans le budget de 2022 de mener de vastes consultations sur le rôle et le fonctionnement de la Loi sur la concurrence et son régime d’application.
Une consultation plus vaste sur cette loi s’avère essentielle. La concurrence touche tous les Canadiens. Il est donc important de tenir de vastes consultations pour entendre un large éventail de points de vue sur la manière de réformer cette loi importante, et pas seulement ceux des intervenants traditionnels qui ont le plus à gagner du statu quo. Il faut aller bien plus loin.
Au-delà des changements à la Loi sur la concurrence, comme en a parlé le sénateur Loffreda, il faut adopter une approche pangouvernementale pour concevoir des politiques favorisant la concurrence et uniformiser les règles du jeu pour l’ensemble des nouveaux arrivants, en plus d’offrir une valeur accrue aux consommateurs canadiens, surtout dans les secteurs où il y a domination par de gros joueurs, comme celui des banques et des entreprises de télécommunications.
À cette fin, le Bureau de la concurrence a publié un modèle d’évaluation de l’incidence sur la concurrence et un guide étape par étape pour l’évaluation de la concurrence, qui peuvent être des outils essentiels pour les législateurs et les organismes de réglementation. Les fonctionnaires doivent les utiliser et leur accorder la priorité pour identifier les pratiques, les politiques et les règlements anticoncurrentiels à l’échelle du gouvernement et pour faire en sorte qu’ils favorisent la concurrence.
L’économie n’atteindra jamais son plein potentiel à moins que les gouvernements deviennent plus novateurs, plus ouverts aux changements et plus réfractaires à tolérer les réponses comme « ce n’est pas la façon dont nous fonctionnons ».
Je passe à mon troisième et dernier point, qui porte sur la modernisation de la réglementation. Vous m’avez entendu en parler dans mon discours à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-6 plus tôt cette semaine. Le Canada a un énorme problème de mesures réglementaires coercitives. Selon les données de 2018 de l’OCDE, le Canada arrive au premier rang des pays de l’OCDE en ce qui a trait au recours à ce type de réglementation, et ce n’est pas une bonne nouvelle. En raison de leur conception, ces mesures réglementaires éliminent la possibilité d’innover parce qu’elles définissent le processus à suivre.
Je tiens à préciser clairement que je ne suis pas en faveur de la déréglementation. Je suis plutôt en faveur d’une réglementation efficace et d’une modernisation de la réglementation qui contribuent énormément à favoriser l’innovation, à accroître les investissements et à accélérer la croissance des entreprises, tout en protégeant les consommateurs contre les risques qui surviennent rapidement quand la réglementation demeure stagnante dans notre monde en évolution constante.
Si vous ne comprenez pas l’ampleur du fardeau administratif découlant de notre approche en matière de réglementation, je vous invite à écouter de nouveau le discours que vient de prononcer la sénatrice Petitclerc. Il y a des problèmes généralisés dans la façon dont nous nous gouvernons.
En conclusion, nous devons être profondément déterminés à mettre en place une courroie de transmission efficace qui convertira toute la capacité que nous confère notre moteur de recherche en possibilités, en emplois et en prospérité. Une concurrence accrue crée des débouchés pour les nouveaux joueurs novateurs, qui encouragent ensuite les entreprises en place à investir dans l’innovation au lieu de chercher à augmenter les dividendes, les primes et les rachats d’actions. Ce sont là les avantages d’une concurrence accrue. De nouvelles occasions de concurrence augmentent les investissements, ce qui stimule davantage l’innovation et apporte les changements nécessaires pour accroître la productivité.
Cependant, l’innovation n’entraînera pas une croissance de la productivité si nous ne modernisons pas notre réglementation afin que les entreprises puissent adopter de nouvelles pratiques novatrices qui protègent également les consommateurs. C’est la croissance de la productivité qui permettra de réaliser la promesse du budget de 2022. C’est elle qui favorisera notre croissance économique et rendra la vie plus abordable.
Toutefois, cela fait 40 ans que nous faisons fausse route. Ce n’est pas facile d’apporter des changements, mais nous n’avons pas le choix. Voici un extrait d’une lettre d’opinion publiée récemment dans le Hill Times, le professeur Ken Coates, de l’Université de la Saskatchewan :
Rafistoler les politiques novatrices actuelles ne permettra pas de transformer l’économie nationale en force économique créative. Les gouvernements doivent repenser entièrement leurs approches et trouver des politiques novatrices en matière d’innovation.
Une économie novatrice nécessite un gouvernement novateur. Le Canada est déjà un chef de file du G7 pour ce qui est des investissements des impôts collectés. Toutefois, notre pays est à la traîne de l’OCDE concernant la mise à jour des politiques, des règlements et des lois qui permettent de convertir efficacement ces investissements en débouchés, en emplois et en prospérité.
Il faut doubler voire tripler les mesures prévues dans le projet de loi C-19 pour réformer la Loi sur la concurrence et renforcer les bonnes intentions contenues dans le projet de loi S-6 concernant la modernisation de la réglementation.
J’espère que vous voyez maintenant à quel point ces éléments peuvent nous aider à respecter les engagements pris dans le budget de 2022. J’appuie le projet de loi C-19, que je considère comme un acompte de tout le travail que nous devons faire pour optimiser le rendement sur le capital investi du gouvernement en matière d’innovation. Je vous remercie, chers collègues.