Projet de loi modifiant certaines lois et un règlement relatifs aux armes à feu
Rejet du vingt et unième rapport du Comité de la sécurité nationale et de la défense
7 mai 2019
Chers collègues, j’interviens aujourd’hui pour parler du rapport que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a publié sur le projet de loi C-71.
Je tiens tout d’abord à féliciter la présidente du comité, la sénatrice Boniface, pour son excellent travail; le greffier, qui y a consacré de longues heures, les analystes de la Bibliothèque du Parlement; le parrain du projet de loi au Sénat, le sénateur Pratte; ainsi que tous les sénateurs qui ont pris part aux audiences.
Permettez-moi d’affirmer tout d’abord, de façon claire et non équivoque, que j’appuie les objectifs fondamentaux du projet de loi C-71 qui, comme l’a fait remarquer le ministre Goodale à l’autre endroit, consistent à donner la priorité à la sécurité publique et à l’action policière tout en traitant de façon juste et raisonnable les propriétaires et les commerces d’armes à feu respectueux de la loi.
Le reproche que je fais à ce projet de loi est qu’il n’atteint pas ces objectifs. Il ne renforce pas la sécurité publique, il ne facilite pas le travail de la police et il ne traite certainement pas les propriétaires et les commerces d’armes à feu respectueux de la loi de façon juste et raisonnable. Le comité constate au contraire qu’il affaiblit la sécurité publique en consacrant des ressources précieuses et limitées à des fonctions bureaucratiques inutiles, qu’il affaiblit l’efficacité de la police en alourdissant le fardeau bureaucratique de celle-ci, qu’il n’offre pas de nouveaux outils utiles pour la prévention, l’application de la loi, les enquêtes ou la condamnation des activités criminelles, qu’il menace les propriétaires d’armes à feu respectueux de la loi de sanctions criminelles pour des actes qui n’ont aucun rapport avec la sécurité publique et qu’il donne un fondement légal à la confiscation de la propriété des Canadiens sans possibilité de remboursement.
Le comité a entamé ses audiences le 18 février et a tenu six réunions. Toutes, sauf deux, ont duré entre six et huit heures. Au total, nous avons siégé plus de 30 heures et entendu 81 témoins représentant tous les points de vue sur la question, dont deux ministres.
Qu’on soit d’accord ou non avec le rapport du comité, le comité a fait une excellente étude du projet de loi et notre approche est empreinte d’une collégialité rarement vue dans cette assemblée. Pour tout dire, les amendements apportés au projet de loi ont été possibles uniquement parce qu’ils étaient appuyés par tous les caucus : les conservateurs, les sénateurs du groupe des sénateurs indépendants, les indépendants et les sénateurs libéraux indépendants. Les modifications n’étaient pas motivées par la partisanerie, mais par un réel désir de réduire au minimum les effets négatifs du projet de loi tout en maximisant son utilité.
Honorables sénateurs, nous sommes tous conscients que, si le gouvernement n’aime pas les amendements que nous avons faits au comité, il peut les retirer. Il a le nombre pour lui à l’autre endroit et, s’il croit qu’il a le mandat des électeurs de punir les propriétaires d’armes à feu tout en laissant le champ libre aux gangs et aux meurtriers, il peut faire exactement cela et en subir les conséquences en octobre.
Toutefois, que le Sénat désavoue le travail de l’un de ses comités, c’est du jamais vu, sauf dans un cas : lorsque la majorité du gouvernement au Sénat agit par intérêt partisan pour protéger le gouvernement en place.
Le sénateur Gold nous a donné quelques exemples de rejets d’un rapport de comité par le Sénat, notamment les rapports concernant le projet de loi C-36, Loi concernant la sécurité des produits de consommation, et le projet de loi C-25, Loi modifiant le Code criminel concernant la restriction du temps alloué pour détention sous garde avant prononcé de la peine. Or, chers collègues, voici le problème avec ces exemples : le projet de loi C-36 a été étudié par le Sénat en 2010 et le projet de loi C-25, en 2009. Autrement dit, les rapports de comité mentionnés par le sénateur Gold ont été rejetés par le Sénat uniquement parce que le gouvernement de l’époque détenait la majorité au Sénat. Voilà deux exemples parfaitement acceptables d’un gouvernement exerçant le pouvoir de sa majorité au Sénat pour orienter les projets de loi dans la direction qu’il souhaite emprunter afin de protéger ses intérêts partisans.
Chers collègues, si les sénateurs d’en face veulent admettre qu’ils sont effectivement les sénateurs libéraux de Justin Trudeau, alors nous, de ce côté-ci de la Chambre, conviendrons qu’ils ont le droit de rejeter ce rapport. Or, si vous continuez de vous pavaner en poussant avec outrecuidance de hauts cris, en insistant sur le fait que vous devez rejeter ce rapport pour sauver le pays et le Sénat de la ruine, alors, pour l’amour du ciel, épargnez-nous la comédie prétentieuse de votre indépendance et de votre caractère non partisan. Je trouve cette duplicité exaspérante.
De plus, je soupçonne qu’il n’y a, dans l’ensemble du pays, qu’environ 58 personnes...
J’invoque le Règlement.
Sénatrice Lankin, souhaitez-vous invoquer le Règlement?
Oui. Votre Honneur, nous entendons souvent des accusations injustes portées contre les intentions des honorables sénateurs dans cette enceinte. Je ne crois pas que ce soit approprié, mais j’en entends, jour après jour. Actuellement, des termes comme « duplicité » et d’autres observations commencent, il me semble, à dépasser les limites définies pour les propos « vifs ou offensants », tel qu’il est écrit dans le Règlement.
Je demanderais à Votre Honneur au moins de mettre en garde les sénateurs à ce moment de l’année, car, à mesure que la session avance, il y a de plus en plus de tensions. Ce n’est pas utile pour notre climat de travail. Ce qui est encore plus pertinent, c’est que c’est peut-être une violation du Règlement. Je vous remercie.
La sénatrice Lankin soulève un bon point par rapport aux propos offensants. Le mot « duplicité », en soi, n’est pas offensant; toutefois, s’il est utilisé à l’endroit d’individus, en particulier les membres de cette Chambre, cela frôle de très près ce qui pourrait être qualifié d’inacceptable. Je demande donc que de tels mots ne soient pas utilisés au cours du débat.
Je vous remercie. Comme ce mot ne revient pas dans le reste de mon discours, tout devrait bien aller.
Comme j’allais le souligner, je soupçonne qu’il n’y a, dans l’ensemble du pays, qu’environ 58 personnes qui croient à cette supposée « indépendance ». Elles se trouvent toutes ici même, au Sénat.
J’ai entendu de nombreux discours partisans pendant ma longue vie en politique et près de 10 ans au Sénat. Mais c’est seulement au cours des trois dernières années que j’ai commencé à entendre des discours partisans prononcés par des personnes qui affirment, haut et fort, n’être aucunement guidées par la politique. L’autre jour, par exemple, une sénatrice supposément « indépendante » est intervenue à propos des amendements apportés par le comité au projet de loi C-71. Elle a dit ceci :
[...] je crains que, pour certains, les amendements étaient motivés par des raisons politiques plutôt que sociétales.
Cette sénatrice a été nommée par un premier ministre libéral après une vérification minutieuse de la base de données du parti, la Libéraliste, comme on l’appelle.
Le cabinet du premier ministre a reconnu qu’au moins un tiers des sénateurs du Groupe des sénateurs indépendants nommés par M. Trudeau avaient l’habitude de verser des dons au Parti libéral et de le soutenir.
Chers collègues, je n’ai rien contre le fait que le premier ministre nomme des personnes au Sénat en fonction de leurs allégeances politiques et partisanes. Ce sont plutôt la malhonnêteté et l’hypocrisie qui me posent problème.
Je ne porte pas d’accusations. Je dis que cela me pose problème.
En fait, les sénateurs d’en face sont rendus tellement cyniques que, lorsqu’un sénateur conservateur intervient, ils présument que ses paroles ne sont que discours partisan. Ils n’écoutent même pas ce qu’il dit. Sénateurs, veuillez écouter ceci.
Un exemple parfait de ce que j’avance s’est produit la semaine dernière. Il était question de ma motion concernant SNC-Lavalin et j’ai dit ce qui suit :
[...] il y avait des signes de tentative d’ingérence politique dans le système judiciaire, plus particulièrement dans un procès criminel décrit par certains comme étant la poursuite la plus importante et la plus grave de l’histoire moderne du Canada [...]
Tandis que je prononçais ces mots, un membre du Groupe des sénateurs indépendants s’est esclaffé et s’est moqué du commentaire, le qualifiant d’exagération partisane, ignorant totalement, je présume, que je citais l’ancienne ministre libérale Jane Philpott.
Chers sénateurs, au moins, les sénateurs libéraux indépendants sont honnêtes à propos de leur affiliation idéologique et politique. Les membres du Groupe des sénateurs indépendants, quant à eux, insistent pour se présenter comme exempts de toute partisanerie et pour nous décrire comme empoisonnés par le sectarisme. Toutefois, ils n’ont plus aucune impartialité réelle par rapport aux questions. Leur seul objectif consiste à protéger l’illusion de leur indépendance.
Je soutiens que cette illusion les sert mal. Elle entraîne immanquablement un manque de cohérence dans leurs arguments, laquelle est causée par la myopie idéologique, qu’on appelle plus couramment l’étroitesse de vues.
Je vais en donner quelques exemples. Pendant environ 80 heures, le comité a entendu les témoignages de 31 personnes. Dans son discours à l’étape du rapport sur le projet de loi, le sénateur Gold a été incapable de se souvenir d’un seul argument qui aurait remis en question la position du gouvernement. Voici ce qu’il a dit :
Je voterai contre le rapport parce que, selon ma compréhension des règles et des principes qui régissent ma charge constitutionnelle à titre de sénateur, il serait inapproprié d’accepter un rapport qui ravage un projet de loi gouvernemental qui donne suite à des engagements électoraux et qui a été étayé par des éléments de preuve crédible présentés au comité.
Honorables sénateurs, cela n’a aucun sens. Des témoignages entendus par le comité ont-ils appuyé la position du gouvernement? Oui.
Y a-t-il eu des éléments de preuve étayant la position du gouvernement? Absolument aucun.
Les témoins experts et les amateurs de tir sportif ont souligné à maintes reprises au comité l’absence de tels éléments de preuve. Ils nous ont suppliés de voir au-delà de l’écran de fumée émotif pour réaliser que le projet de loi ne repose que sur des aspirations et qu’il n’est fondé sur aucune statistique ou donnée empirique claire. C’est un ensemble disparate de promesses pour se donner bonne conscience, et les sénateurs indépendants sont d’avis que le Canada devrait l’accepter sans poser de question, tout simplement parce que le gouvernement a remporté des élections.
Je ne suis pas d’accord. Des promesses ridicules comme celles voulant que « le budget s’équilibre tout seul » ou que « cibler les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois réduise la criminalité » devraient être dénoncées, et non appuyées, par le Sénat.
Je vais vous donner un autre exemple d’étroitesse de vues. La semaine dernière, une sénatrice du Groupe des sénateurs indépendants est intervenue dans cette enceinte et a dit :
[...] qu’elles soient utilisées convenablement ou de façon illégale, les armes à feu ne servent qu’à une chose : tuer.
Permettez-moi de répéter :
[...] qu’elles soient utilisées convenablement ou de façon illégale, les armes à feu ne servent qu’à une chose : tuer.
Chers collègues, je pourrais répéter cette phrase une troisième fois, mais elle n’aurait toujours pas de sens. Les armes à feu ne servent qu’à tuer? La sénatrice n’a-t-elle jamais entendu parler des jeux olympiques? Ne sait-elle pas qu’ils comprennent une discipline qu’on appelle le tir? Ne sait-elle pas qu’il s’agit de tir avec une arme à feu? Y a-t-il d’autres sénateurs qui pensent que les armes à feu ne servent qu’à tuer? Les sénateurs indépendants n’ont-ils jamais entendu parler de la Fédération de tir du Canada ou de la Fédération internationale de tir sportif? Qu’en est-il du tir au skeet ou du tir à la volée avec fosse? Est-il question de tuer? Ici même, à l’extérieur de ces portes, il y a des membres du Service de protection parlementaire qui risqueraient leur vie et qui l’ont déjà risquée pour protéger la vôtre et la mienne. Je ne pense pas qu’on devrait les accuser de porter une arme à feu simplement pour tuer.
Qu’en est-il des dizaines de milliers de Canadiens qui aiment aller au champ de tir la fin de semaine pour pratiquer le tir sportif? L’arme à feu qu’ils possèdent ne sert-elle qu’à tuer? Est-ce que tuer est l’unique raison pour laquelle ils ont économisé l’argent qui leur reste après impôts et ils se sont acheté une arme? Et qu’en est-il des autres personnes faisant partie des 2,1 millions de Canadiens qui possèdent un permis d’arme à feu? Sont-ils tous des tueurs potentiels? L’absurdité de tels propos est incompréhensible.
Puis, certains sénateurs cherchent à donner l’impression qu’ils s’opposent au rapport du comité sur le projet de loi C-71 en raison d’une quelconque pureté idéologique et d’un engagement indéfectible envers la démocratie. J’ai bien hâte de voir l’automne prochain si le Groupe des sénateurs indépendants aura autant de considération pour le mandat électoral qu’obtiendra Andrew Scheer en devenant premier ministre. D’après moi, ils ont tellement peur que ce scénario se concrétise qu’ils feront rapidement le don maximal au Parti libéral.
Chers collègues, je suis absolument convaincu que l’ensemble des sénateurs souhaitent faire le nécessaire pour réduire la violence armée. Cependant, le Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense devait déterminer si ce projet de loi permet d’atteindre cet objectif. La majorité des membres du comité en sont arrivés à la conclusion que ce n’était pas le cas. Les amendements que nous avons proposés visaient à ce que cet objectif puisse être atteint en conservant ce qu’il y avait de bon dans ce projet de loi très imparfait.
Je suis déçu de voir que, après tout le temps et les efforts que le comité a consacrés à ce dossier, le parrain du projet de loi, le sénateur Pratte, s’est rangé du côté de ses collègues libéraux pour tenter de torpiller le rapport du comité simplement parce qu’il ne cadrait pas avec son point de vue. Le sénateur Pratte a eu l’occasion de faire valoir ses arguments, à l’instar de tous les membres du comité. Il souhaite maintenant rejeter le travail du comité tout en le remerciant de l’avoir accompli. Je comprends que le parrain du projet de loi, le sénateur Pratte, puisse se sentir obligé de respecter son engagement envers le gouvernement, mais je m’en voudrais de ne pas signaler aussi que, en rejetant le rapport du comité, il compromet l’échéancier législatif que les leaders au Sénat ont approuvé.
Le projet de loi C-71 doit passer à l’étape de la troisième lecture d’ici le 9 mai, mais il faut que le rapport soit adopté par le Sénat pour respecter cette date. Si le sénateur Pratte souhaite faire dérailler toute l’entente parce qu’il n’est pas arrivé à ses fins, je lui suggère fortement de consulter au préalable ses leaders, le sénateur Harder et le sénateur Woo. À mon avis, la mesure législative n’arrive toujours pas à accroître la sécurité publique et elle continue à pénaliser inutilement les propriétaires d’armes à feu respectueux des lois.
Je suis désolé de vous interrompre, monsieur le sénateur, mais votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous plus de temps?
Vingt secondes.
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Toutefois, les amendements proposés par le comité apportent une certaine amélioration, et le rapport devrait être adopté par le Sénat. Bien entendu, cela n’empêche pas que d’autres amendements soient proposés à l’étape de la troisième lecture, comme c’est le droit de tous les sénateurs de le faire.
Le peu de temps dont je dispose à l’étape du rapport m’empêche de discuter de l’importance des amendements que nous avons apportés à ce projet de loi. J’encourage donc tous les sénateurs à lire les transcriptions de l’étude article par article. Chers collègues, je crois que le rapport du comité sur le projet de loi C-71 devrait être adopté, conformément à la pratique habituelle de cette Chambre, et je vous encourage à voter en faveur de son adoption.
Sénatrice Dupuis, souhaitez-vous poser une question?
Oui.
Sénateur, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus pour répondre à des questions?
Oui, si les sénateurs d’en face veulent bien me les accorder.
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Monsieur le sénateur Plett, accepteriez-vous de répéter la phrase qui suit, la phrase dans laquelle vous avez affirmé dans votre discours que les sénateurs libéraux ont l’honnêteté de dire un certain nombre de choses? La phrase qui suit commence par les termes « Les sénateurs indépendants ». J’ai observé que, lors de l’interprétation simultanée de l’anglais au français, la phrase a été complètement écourtée et elle n’a pas de sens. Je voudrais que les Canadiens et les Canadiennes puissent entendre et comprendre le vrai sens de cette phrase. Merci.
Je dois d’abord bien comprendre la question. Pouvez-vous la répéter?
Madame la sénatrice, j’essaie de voir, mais je ne suis pas certain de la phrase que vous voulez que je répète. Je serais heureux de la répéter.
Vous comprendrez, sénateur Plett, que je ne veux pas paraphraser vos propos. C’est pour cette raison que j’ai dit que cette phrase se trouvait à peu près à la moitié des 15 minutes et 20 secondes qu’a duré votre discours. Il s’agit de la phrase qui suit celle dans laquelle vous dites très clairement que les sénateurs libéraux indépendants ont l’honnêteté de présenter leur position ou de dire un certain nombre de choses. Je ne veux pas vous paraphraser. La phrase suivante commence par « Les sénateurs indépendants ».
Je suis désolé que cela me prenne un peu de temps, madame la sénatrice.
Si personne n’a de question à poser, je serais heureux de rester ici pendant cinq minutes et de chercher la phrase en question.
Sénateur Plett, je constate que le sénateur Pratte, le parrain du projet de loi, souhaite poser une question, de même qu’un certain nombre d’autres sénateurs. J’aimerais donner au parrain du projet de loi l’occasion de poser une question, si vous pouvez trouver la phrase en question.
Je vais écouter le sénateur Pratte tout en cherchant, si cela vous convient.
Vous pouvez faire deux choses en même temps. C’est très impressionnant.
Sénateur Plett, à la fin de votre discours, vous avez dit que nous devons appuyer le rapport parce que c’est la pratique habituelle. Or, le sénateur Gold a fourni des exemples, et j’en ai d’autres, où un rapport a été rejeté. C’est arrivé à maintes reprises. Il y a quelques années, lorsqu’il a été appelé à trancher par rapport à un tel cas, le Président Charbonneau a dit : « Lorsque nous [renvoyons un projet de loi au comité], c’est essentiellement dans le but d’obtenir un avis [de ce dernier], mais d’après moi, le Sénat n’est pas tenu de respecter cet avis. Autrement dit, le Sénat doit rester maître de ses décisions. »
Êtes-vous d’accord avec le Président Charbonneau?
Sénateur Pratte, je maintiens ce que j’ai dit : si une des deux Chambres décide de rejeter un rapport pour des considérations partisanes et politiques, comme le gouvernement de l’époque l’a fait en 2009-2010, alors cela devrait pouvoir se faire.
Si vous permettez, Votre Honneur, j’ai retrouvé la phrase que cherchait la sénatrice Dupuis. Je crois que vous vouliez parler de la phrase où je disais « qu’au moins, les sénateurs libéraux indépendants sont honnêtes à propos de leur affiliation idéologique et politique ». Est-ce bien celle-là?
J’ajoute ensuite que les membres du Groupe des sénateurs indépendants, quant à eux, tiennent tellement à se présenter comme exempts de toute partisanerie et à nous décrire comme empoisonnés par le sectarisme qu’ils n’ont plus aucune impartialité réelle par rapport aux questions. Leur seul objectif consiste à protéger l’illusion de leur indépendance.
Je regrette, sénatrice Forest-Niesing, mais le temps de parole du sénateur Plett est encore écoulé. J’ignore s’il demandera cinq minutes de plus, ni même si cela lui sera accordé.
Je m’en remets aux sénateurs d’en face. Je n’y tiens pas particulièrement, mais comme je me suis adressé à la sénatrice qui souhaite prendre la parole, je crois que ce serait bien de demander cinq minutes de plus.
Cinq minutes de plus, honorables sénateurs?
Est-ce d’accord, honorables sénateurs?
Je vous remercie de votre indulgence, sénateur.
Revenons sur le sujet du rapport. Je constate que les amendements proposés éliminent en fait trois des propositions phares du projet de loi C-71 — la vérification des antécédents, les autorisations de transporter une arme à feu, les pouvoirs de classification —, toutes les trois des mesures prévues explicitement dans la plateforme électorale libérale de 2015.
Afin d’établir un précédent à ce sujet, monsieur, pouvez-vous nous dire si vous considérez que la plateforme électorale d’un gouvernement est un facteur important à prendre en compte quand vient le moment de formuler des recommandations d’amendements à un projet de loi, dont le principe a été adopté — ce qui pourrait être très important advenant que votre souhait se concrétise et qu’il y ait un changement de gouvernement?
Comme vous êtes une sénatrice indépendante, je suis convaincu que la réalisation ou non de ce souhait ne vous fait ni chaud ni froid.
Sénatrice, je crois que le Sénat est la Chambre de second examen objectif. Je pense que nous pouvons tous convenir que, dans cette Chambre, nous devrions être en mesure d’amender des projets de loi si nous y relevons des lacunes. Il est pratique courante de proposer des amendements, même à des projets de loi qui visent à remplir des promesses électorales du parti au pouvoir. Comme je l’ai dit dans mon discours, la plateforme électorale du premier ministre prévoyait notamment que le budget s’équilibrerait de lui-même. Cela ne s’est pas produit. Je pense donc que nous avons tout à fait le droit d’amender un projet de loi.
Plus tôt aujourd’hui, pendant la période des questions, j’ai demandé au ministre s’il était d’accord pour que nous adoptions le projet de loi, puis que nous le renvoyions à l’autre endroit, où le gouvernement décidera si la Chambre de second examen objectif a proposé de meilleures idées que les siennes.
Je ne demande pas aux sénateurs de rejeter maintenant le projet de loi C-71. Je leur demande d’accepter un rapport qui a été adopté par un comité au-delà des allégeances politiques, de l’envoyer à l’autre endroit et de permettre aux ministres Goodale et Blair ainsi qu’au premier ministre de l’examiner. S’ils nous le renvoient en disant qu’ils rejettent tous nos amendements, nous devrons prendre acte de ce message.
Je ne pense pas que ce processus soit inacceptable. Évidemment, vous êtes tout à fait libre de voter pour ou contre ce rapport, mais nous avons entièrement le droit de tenter d’amender un projet de loi comme bon nous semble.
Sénateur Plett, puis-je vous poser une autre question?
Je suis heureux que vous soyez revenu sur le projet de loi C-71 dans votre discours, en particulier sur les témoignages. Un médecin s’est prononcé contre le projet de loi. J’ai recensé les organisations : l’Association canadienne des médecins d’urgence, la Société canadienne de pédiatrie, la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers, et Médecins canadiens pour un meilleur contrôle contre les armes à feu. En tout, ces organismes semblent représenter environ 5 000 cliniciens.
Je me demande pourquoi vous pensez que le témoignage d’un médecin l’emporte sur celui de tous les autres médecins que représentent ces groupes?
Merci, sénateur. Je ne crois pas que c’est ce que j’ai dit. J’ai indiqué qu’un côté disposait de statistiques à l’appui de sa position, mais que l’autre n’en avait pas.
Je n’ai pas dit que croyais une personne plus qu’une autre. Je ne le dis toujours pas, d’ailleurs.
Honorables sénateurs, le temps de parole du sénateur Plett tire de nouveau à sa fin.
Sénateur Plett, demandez-vous plus de temps?
Non.
Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.
À mon avis, les non l’emportent.
Je vois deux sénateurs se lever.
Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?
Que diriez-vous de 15 minutes?
Quinze minutes. Est-ce d’accord, honorables sénateurs?
Le vote aura lieu à 17 h 54.
Convoquez les sénateurs.
La motion, mise aux voix, est rejetée :
POUR
Les honorables sénateurs
CONTRE
Les honorables sénateurs
ABSTENTIONS
Les honorables sénatrices
Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?
(Sur la motion du sénateur Pratte, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance, avec dissidence.)