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L'étude sur les questions relatives aux banques, au commerce et à l'économie en général

Cinquième rapport du Comité des banques, du commerce et de l'économie et demande de réponse du gouvernement--Ajournement du débat

7 mars 2023


L’honorable Pamela Wallin [ + ]

Propose :

Que le cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie, qui a été déposé au Sénat le mercredi 15 février 2023 soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre des Finances étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport.

 — Honorables sénateurs, la présentation de ce rapport arrive à point nommé. En effet, le pays traverse une période d’inflation rapide, marquée par des augmentations drastiques du coût de la vie, et notre rapport met en lumière la série de décisions et de circonstances qui nous ont conduits à cette situation et ce que nous pouvons mieux faire pour éviter que cette situation se reproduise. Les témoignages de divers économistes et du gouverneur de la Banque du Canada lui-même ont mis en évidence le caractère inquiétant de l’état de notre économie, ainsi que les mesures à prendre. En tant que membres du comité, nous avons consacré beaucoup de temps et d’efforts à ce dossier, et c’est pourquoi nous espérons que les décideurs en prendront bonne note et y répondront. Je vous remercie de votre attention.

L’honorable Larry Smith [ + ]

Honorables sénateurs, c’est un privilège pour moi de parler du rapport exceptionnel du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie intitulé L’état de l’économie canadienne et l’inflation.

Je tiens à souligner les efforts inlassables déployés par notre présidente, la sénatrice Wallin, notre vice-président, le sénateur Colin Deacon, les membres du comité, ainsi que les analystes et le personnel de soutien dévoués afin de produire ce rapport exhaustif. J’encourage vivement tout le monde à prendre le temps de lire ce rapport, car il témoigne de l’excellent travail effectué par nos comités sénatoriaux et, ce qui est tout aussi important, des changements économiques que connaissent l’Amérique du Nord et le Canada.

Au cours de neuf réunions, notre comité a entendu les témoignages de 18 témoins. Deux anciens gouverneurs de la Banque du Canada, Mark Carney et David Dodge, le gouverneur actuel de la Banque du Canada, Tiff Macklem, l’ancien directeur parlementaire du budget, Kevin Page, et le directeur parlementaire du budget actuel, Yves Giroux, ont partagé avec nous, à tour de rôle, leur perspective sur la situation économique actuelle. De plus, nous avons entendu des économistes, des universitaires et des experts en matière de politiques monétaires et fiscales nous donner leur opinion.

L’ensemble considérable de connaissances et de conseils d’experts présentés dans ce rapport permet de comprendre les nombreux enjeux urgents à l’heure actuelle, que ce soit le rôle des politiques monétaires et budgétaires, la crise du logement, le fardeau réglementaire, la faiblesse des investissements, la croissance de la productivité, l’absence de concurrence et le vieillissement de la population.

Malgré des divergences d’opinion sur les divers sujets, y compris les causes de l’inflation, la portée des mesures de relance budgétaire et la façon dont le gouvernement fédéral peut travailler pour s’attaquer aux divers problèmes existants, j’aimerais aborder brièvement deux domaines où notre comité a obtenu un fort appui.

Premièrement, un des principaux points que j’ai retenus est la nécessité pour les politiques budgétaires du gouvernement fédéral d’agir de façon cohérente avec les politiques monétaires de la Banque du Canada, surtout pendant une crise inflationniste. De plus, la Banque du Canada doit déployer des efforts conscients et continus pour maintenir la transparence à l’égard de ses décisions stratégiques.

Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque du Canada, s’est prononcé sur le rôle des politiques monétaires et budgétaires dans le contexte actuel. Il a déclaré ceci aux membres du comité :

[...] il est contre-productif d’avoir des politiques budgétaire et monétaire qui se contredisent. En langage familier, si l’on met un pied sur le frein dans le cadre de la politique monétaire, il est insensé d’appuyer l’autre pied sur l’accélérateur.

Bien que l’ampleur de l’intervention de la Banque du Canada pour lutter contre l’inflation ait fait l’objet d’un débat au cours de l’étude, il est clair qu’un resserrement de la politique monétaire est nécessaire et il appartient à la Banque du Canada, en tant qu’institution indépendante, de maintenir l’inflation entre 1 et 3 %, comme l’exige son mandat. Autrement dit, en ce qui concerne la politique monétaire, son pied doit être sur le frein.

Ce qui m’a préoccupé, cependant, c’est le manque de transparence dans les communications de la Banque du Canada concernant certaines de ses décisions stratégiques pendant la période d’incertitude qu’a été la pandémie de COVID-19, notamment l’affirmation selon laquelle l’inflation serait transitoire, et sa réaction à l’évolution de la conjoncture économique, qui a été lente comparativement à celle des autres banques centrales.

Bien sûr, avec le recul, on peut dire que les décisions stratégiques prises par la Banque du Canada n’étaient pas faciles, comme l’a indiqué le gouverneur dans son témoignage. Toutefois, cela renforce la nécessité pour le Parlement de suivre de près le travail de la banque à l’avenir.

Sur le plan financier, un débat animé a eu lieu sur l’ampleur de la réponse du gouvernement fédéral à la crise de la COVID-19. En général, les témoins ont convenu que des mesures de soutien étaient nécessaires pour que l’économie continue de fonctionner, mais que ces mesures devraient maintenant être progressivement éliminées et que toute dépense supplémentaire en réponse à la crise de l’inflation devrait être mineure et temporaire, afin d’apporter une aide ciblée aux Canadiens vulnérables. Si le gouvernement fédéral maintient des mesures de dépenses à grande échelle, il ne fera qu’ajouter à la flambée inflationniste que la Banque du Canada s’efforce vigoureusement d’éteindre.

Jack Mintz, de l’Université de Calgary, a fait écho à ce constat en soulignant l’écart entre la politique budgétaire et la politique monétaire du Canada :

La politique budgétaire ne concorde toujours pas avec la politique monétaire. La politique monétaire est axée sur la stabilité des prix et l’augmentation des taux d’intérêt pour réduire le taux d’inflation, mais la politique budgétaire fédérale ne concorde pas suffisamment avec nos objectifs de politique monétaire.

Pour parler métaphoriquement, nous devons relâcher l’accélérateur en ce qui concerne notre politique budgétaire.

Le deuxième et dernier sujet que j’aimerais aborder brièvement est le vieillissement de la population canadienne et les changements qu’il entraîne pour notre main-d’œuvre et notre économie dans son ensemble.

Selon Statistique Canada, en juillet 2022, un Canadien sur cinq, ou environ 7,3 millions de personnes au Canada, avait au moins 65 ans. Chers collègues, il vaut la peine de répéter que plus de 20 % de la population canadienne actuelle a atteint l’âge de la retraite. Cette proportion est à un sommet historique depuis la tenue de recensements au pays.

Cette évolution démographique ralentira la croissance de la population active, aura une incidence négative sur la productivité et exercera une pression à la hausse sur les prix et les taux d’intérêt à moyen terme, selon M. Dodge.

Même si, au cours de notre étude, il y a eu un consensus à propos de la hausse du niveau d’immigration pour combler cette lacune, j’ai été frappé par les observations du M. Mintz, qui a souligné ceci :

Nous connaissons un vieillissement rapide de la population, et ce n’est pas seulement au Canada. C’est dans tous les pays à revenu élevé et dans nombre de pays à revenu moyen. Les marchés internationaux de la main-d’œuvre seront de plus en plus concurrentiels [...]

Compte tenu de la réalité, qui est celle d’un bassin de main‑d’œuvre décroissant, nous devons également nous tourner vers d’autres moyens plus créatifs pour combler cet écart et ces lacunes sur le plan de la main-d’œuvre, grâce à l’adoption d’un programme de requalification et à la réintégration des travailleurs retraités sur le marché du travail.

De nombreux témoins partageaient ce sentiment, dont Janet Lane, directrice, Human Capital Centre, Canada West Foundation, qui a répondu à ma question sur le sujet :

Je pense que nous devons absolument inciter une plus grande partie de la main-d’œuvre vieillissante à rester sur le marché du travail.

Pour certaines personnes — par exemple, dans les métiers —, le travail physique proprement dit ne sera plus tout à fait possible, mais leurs compétences et leur expertise sont très utiles pour la formation de la prochaine génération.

Les données relatives au recyclage et au maintien sur le marché du travail des personnes ayant l’âge de prendre leur retraite sont extrêmement encourageantes, et les recherches remontent à plusieurs décennies. Une revue de la littérature publiée en 2016 dans la revue Analyse de politiques et intitulée Understanding Employment Participation of Older Workers: The Canadian Perspective a mis en évidence le fait que l’accès à des programmes de formation adaptés pour les travailleurs âgés jouait un rôle important dans la rétention des travailleurs. Cependant, l’article note qu’une très petite proportion des organisations au Canada s’engage réellement dans la production de ces types de programmes de formation. Quelle belle occasion à saisir!

Chers collègues, j’aimerais conclure en disant qu’à notre avis, la pandémie de COVID-19 devrait accélérer le sentiment d’urgence avec lequel nous affrontons les nombreux problèmes persistants auxquels notre pays doit faire face en ce moment, qu’il s’agisse du rôle des politiques fiscales et monétaires, du vieillissement de la main-d’œuvre, du fardeau réglementaire, de la crise du logement ou du sous-financement chronique. Je crois que ce rapport exhaustif présente un excellent cadre pour tous les pouvoirs publics et pour l’industrie en ce qui concerne la situation actuelle et la façon dont nous pouvons aller de l’avant dans l’après-pandémie. Merci beaucoup.

Je me demande si le sénateur Smith accepterait de répondre à une question.

Sénateur Smith, je me demande si vous seriez d’accord avec moi pour dire que vous venez de résumer un des meilleurs rapports que le Comité des banques a produit ces derniers temps. Je crois que personne d’autre que vous n’aurait pu mieux résumer la situation. Êtes-vous d’accord?

Le sénateur Smith [ + ]

Merci beaucoup. Votre facture est dans le courrier.

Je crois que ce qui est important, dans tout cela, c’est que les comités sénatoriaux font un excellent travail. On ne reconnaît pas leur contribution, et ce n’est pas nécessairement ce qu’ils recherchent. Ce que nous voulons, c’est que les gens comprennent le message et qu’ils s’en servent pour améliorer notre pays.

Je crois qu’il est vraiment important pour nous, en tant que groupe, que nous nous fassions connaître et que nous discutions entre nous pour faire en sorte que nous comprenions tous quelque chose au sujet de nos collègues et de ce que les autres comités font. Je crois que c’est tout simplement fantastique. Merci.

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