Projet de loi de crédits no 6 pour 2020-2021
Deuxième lecture
30 mars 2021
Propose que le projet de loi C-26, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2021, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-26, Loi de crédits no 6 pour 2020-2021. Permettez-moi de vous donner un aperçu du Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l’année se terminant le 31 mars.
Comme les sénateurs le savent très bien, chaque année, le gouvernement dépose jusqu’à trois budgets supplémentaires des dépenses qui décrivent les nouveaux plans de dépenses qui s’ajoutent au Budget principal des dépenses, qui est déposé avant le début de l’exercice financier.
Cette année, le président du Conseil du Trésor a déposé le Budget supplémentaire des dépenses (C) de 2020-2021 le 16 février. Il comprend un résumé des besoins financiers supplémentaires du gouvernement, ainsi qu’un aperçu des demandes de financement importantes et des initiatives horizontales.
Chers collègues, je ne saurais trop insister sur l’importance du budget des dépenses pour la démocratie et l’obligation du gouvernement de rendre des comptes. Tous les Canadiens et les parlementaires qui les représentent ont le droit de savoir comment les fonds publics sont dépensés afin de pouvoir demander des comptes au gouvernement.
D’ailleurs, en raison des circonstances extraordinaires causées par la pandémie, plusieurs changements ont été apportés à la présentation du Budget supplémentaire des dépenses (C) afin d’améliorer la transparence. Par exemple, il comprend une liste détaillée de mesures législatives sur la COVID-19 dans la partie 1 et des renseignements supplémentaires sur les dépenses prévues liées à la réponse du gouvernement à la COVID-19 dans une annexe en ligne.
Honorables sénateurs, je m’attends à ce que vous trouviez l’annexe en ligne particulièrement utile, car on y effectue le rapprochement des dépenses de 159,5 milliards de dollars indiquées dans le budget des dépenses et du financement de 275,2 milliards de dollars annoncé dans le cadre du Plan d’intervention économique pour répondre à la COVID-19. Le document inclut également une comparaison entre les dépenses totales prévues pour 2020-2021 dans l’Énoncé économique de l’automne 2020 et les dépenses prévues pour 2020-2021 dans le budget des dépenses.
Pour plus de transparence et de simplicité, ce budget des dépenses ainsi que les autres données gouvernementales relatives aux finances, au personnel et aux résultats sont également accessibles dans l’InfoBase du GC, un outil de visualisation de données en ligne qui traduit des données complexes dans un format simple.
Honorables collègues, en ce qui concerne ce budget des dépenses, le gouvernement s’engage à fournir aux parlementaires et aux Canadiens le plus d’information possible.
J’aimerais maintenant parler plus en détail de la teneur du Budget supplémentaire des dépenses.
Ce budget indique comment le gouvernement a investi dans l’économie et de quelle façon les mesures d’aide relatives à la pandémie de COVID-19 ont contribué à la relance économique.
Les dépenses prévues s’élèvent à 13,4 milliards de dollars, des dépenses qui, comme les honorables sénateurs le savent, sont exceptionnellement élevées par rapport à la normale. C’est à cause des mesures économiques et d’urgence qu’on a dû prendre à l’égard de la pandémie de COVID-19. Précisons notamment que 9,9 milliards de dollars, soit environ 74 % des dépenses prévues, ont été affectés aux mesures prises par le gouvernement pour répondre aux effets de la pandémie sur les Canadiens en ce qui a trait à la santé publique et aux conditions sociales et économiques.
Le budget comprend aussi, à titre d’information seulement, des détails sur une baisse, évaluée à 5,4 milliards de dollars, de l’ensemble des dépenses législatives prévues. Cette baisse tient compte à la fois d’une hausse de diverses dépenses législatives totalisant 18,6 milliards de dollars et d’une baisse des dépenses législatives de 24 milliards de dollars attribuable à la révision à la baisse des prévisions à la suite de l’Énoncé économique de l’automne 2020, ou encore à l’abrogation, le 31 décembre 2020, de la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national.
Dans l’ensemble, les besoins de financement pour les 10 principaux organismes représentent environ 90 % des dépenses votées demandées dans le budget.
Parmi ces 10 organisations, trois réclament plus de 1 milliard de dollars chacune pour appuyer leurs priorités. Il s’agit de l’Agence de la santé publique du Canada, 6,3 milliards de dollars; le Secrétariat du Conseil du Trésor, 1,7 milliard de dollars; et le ministère des Services aux Autochtones, 1,6 milliard de dollars.
On a dit à maintes reprises qu’aucune relation n’est plus importante pour ce gouvernement que celle qui existe entre le Canada et les Premières Nations. De plus, nous reconnaissons l’impact que la COVID-19 a eu sur les divers groupes autochtones du pays. C’est pourquoi le présent Budget supplémentaire des dépenses (C) prévoit 1,56 milliard de dollars en nouveaux crédits budgétaires pour le ministère des Services aux Autochtones.
De ce montant, près de 1,2 milliard de dollars sont affectés aux mesures d’intervention en cas de pandémie. Les fonds demandés dans le cadre de ce budget permettront au ministère des Services aux Autochtones de respecter ses priorités en intervenant d’urgence sur le plan médical et socioéconomique à l’égard de la pandémie dans les communautés autochtones.
Honorables sénateurs, permettez-moi d’énumérer deux des plus importantes dépenses proposées. Un montant de 525,7 millions de dollars servira à atténuer les pressions exercées sur les services de santé existants, à soutenir les mesures de santé publique prises par les communautés pour prévenir la propagation de la COVID-19 et à établir des structures temporaires d’isolement, d’évaluation et d’hébergement. Ce financement sera également utilisé pour faire en sorte que les communautés autochtones disposent d’un niveau approprié de ressources humaines en santé, de moyens de transport, de fournitures et d’équipements médicaux.
De plus, 383,8 millions de dollars seront consacrés à des mesures communautaires de prévention et d’intervention liées à la COVID-19, y compris le soutien aux aînés et aux membres vulnérables de la communauté, les mesures visant à combattre l’insécurité alimentaire, l’éducation et d’autres formes de soutien pour les enfants, l’aide en santé mentale et les services d’intervention d’urgence.
Chers collègues, les difficultés économiques engendrées par la pandémie ont été accrues. Afin d’atténuer les difficultés économiques, le gouvernement a investi 10,1 milliards de dollars dans la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE), 2,9 milliards de dollars dans la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants (PCREPA) et 780 millions de dollars dans la Prestation canadienne de maladie pour la relance économique (PCMRE).
Honorables sénateurs, dans l’ensemble, les budgets supplémentaires des dépenses (A), (B) et (C) pour 2020-2021 représentent un total de 159,5 milliards de dollars en autorisations de dépenses prévues pour les mesures liées à la COVID-19.
Honorables sénateurs, la santé, la sécurité et le bien-être de tous les Canadiens et Canadiennes ont été les priorités du gouvernement. Le Budget supplémentaire des dépenses (C) assure la transparence et la reddition de comptes quant à la façon dont le gouvernement prévoit utiliser les fonds publics pour offrir aux Canadiens les programmes et les services dont ils ont besoin.
Ces nouveaux plans de dépenses continueront d’apporter de l’aide aux personnes touchées par la COVID-19, tout en continuant d’appuyer l’économie et les Canadiens.
Enfin, je tiens à remercier tous les parlementaires qui ont travaillé de façon collaborative, que ce soit en personne ou virtuellement, au cours de cette période sans précédent. Je tiens à souligner en particulier le travail inlassable accompli par le Comité sénatorial permanent des finances nationales dans le cadre de l’examen approfondi du Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l’année se terminant le 31 mars 2021.
Merci. Meegwetch.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-26, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2021.
Le projet de loi propose qu’une somme additionnelle de 13,365 milliards de dollars soit prélevée sur le Trésor dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (C), le dernier budget des dépenses de l’exercice 2020-2021. Il était déjà assez difficile de surveiller et de scruter les dépenses du gouvernement en temps normal et la pandémie de COVID-19 est venue intensifier les choses pour tous les parlementaires.
Premièrement, la vague de programmes de dépenses liés à la COVID-19, dont l’adoption a été précipitée dans les deux Chambres du Parlement, a accordé aux ministères fédéraux des pouvoirs en vertu de diverses lois pour des périodes de temps variables. Même si ces mesures de dépenses étaient nécessaires dans notre lutte contre la COVID-19, elles ont ajouté un élément de complexité dans l’identification de la source d’une autorité spécifique. Cela était en partie attribuable au fait que les ministères n’avaient pas besoin de l’approbation du Parlement pour effectuer des dépenses dans le cadre du processus budgétaire détaillé.
Par exemple, la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national, adoptée dans le cadre du projet de loi C-13, qui accordait au ministre des Finances et au ministre de la Santé le pouvoir de dépenser sans exiger l’approbation du Parlement, a été abrogée avant la fin de 2020.
Cette expiration du pouvoir législatif a obligé les ministères à réviser leurs prévisions de programmes de dépenses législatives et à les inclure ensuite dans leurs documents liés au Budget supplémentaire des dépenses (C).
Lors de l’étude de ce Budget supplémentaire des dépenses au Comité sénatorial permanent des finances nationales, on a constaté que l’ajout d’un document de rapprochement rédigé par le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui alignait les mesures de dépenses de l’énoncé économique de l’automne 2020 sur les mesures du Budget supplémentaire des dépenses, était une amélioration notable par rapport aux années précédentes.
Cependant, un problème subsiste en ce qui concerne l’information sur les finances, et c’est la fréquence à laquelle elle est mise à jour et diffusée. Pour la plupart des programmes liés à la COVID-19, il est impossible d’accéder à des données de haut niveau et en temps voulu sur le rendement et les coûts réels. Non seulement cela empêche le Parlement de scruter les dépenses, mais les parlementaires n’ont pas la possibilité de suggérer des modifications pour améliorer l’efficience des programmes, dans l’éventualité où ces derniers ne seraient pas aussi efficients que prévu.
Au début de la pandémie, le ministère des Finances fournissait des mises à jour toutes les deux semaines sur les dépenses réelles des programmes liés à la COVID-19. Ces données étaient très utiles pour nous aider à surveiller l’efficacité de chacun des programmes. Lorsque le gouvernement a décidé de proroger le Parlement l’été dernier, cela a eu pour conséquence de mettre un terme à la publication de ces rapports essentiels. Malheureusement, les mesures législatives qui rendaient obligatoire la publication de ces rapports sont arrivées à échéance au mois de septembre dernier. Or, le ministère n’a pris aucun engagement pour reprendre cette pratique.
J’aimerais aussi attirer l’attention du Sénat sur une autre préoccupation : l’augmentation extraordinaire des fonds inutilisés au cours des cinq dernières années. Selon le rapport du directeur parlementaire du budget sur le Budget supplémentaire des dépenses (C) 2020-2021, le total des fonds inutilisés croît d’année en année, atteignant presque des dizaines de milliards de dollars en 2019-2020.
En général, examiner en vase clos combien d’argent un ministère dépense ou ne dépense pas afin d’évaluer son succès n’est tout simplement pas la meilleure approche. Selon M. Giroux, directeur parlementaire du budget, une telle approche pourrait inciter les ministères à succomber à :
[...] la « folie du mois de mars ». À mon avis, il est bien plus grave de dépenser pour dépenser à la fin de l’exercice pour être certain de ne pas avoir de fonds inutilisés.
Toutefois, je crains que l’augmentation des fonds inutilisés soit symptomatique d’un problème systémique plus vaste au sein du gouvernement fédéral, soit le manque de planification efficace des dépenses des programmes.
Pour souligner ce point, j’attire l’attention sur le plan Investir dans le Canada du gouvernement. Comme la plupart des sénateurs le savent, ce programme a vu le jour en 2016 dans le but de dépenser 188 milliards de dollars sur 12 ans dans les transports en commun, les infrastructures vertes, les infrastructures de commerce et de transport, les infrastructures sociales et, enfin, les collectivités rurales et nordiques. Le plan est divisé en petits projets, qui sont administrés par 21 organismes fédéraux, notamment de nombreux ministères, organismes et sociétés d’État. C’est Infrastructure Canada qui est l’organisme central responsable de planifier et de mettre en œuvre les divers projets ainsi que d’en faire rapport.
La vérification du plan effectuée par la vérificatrice générale, qui a été déposée au Parlement ce mois-ci, a révélé les problèmes suivants : premièrement, au cours des trois premières années, 9 milliards de dollars, soit 20 % des dépenses prévues, n’ont pas été dépensés et ont été reportés à des années subséquentes sans qu’il y ait de protocoles de surveillance en place.
La rapport indique ceci :
Aucune organisation ne surveillait les effets, sur l’ensemble du plan, du report des fonds inutilisés à des exercices ultérieurs. Cependant, si le décaissement des fonds est retardé et que les crédits non dépensés sont reportés chaque année, Infrastructure Canada et ses organisations fédérales partenaires risquent de ne pas pouvoir atteindre les objectifs du plan d’ici l’exercice 2027-2028. Cela pourrait alors entraver l’atteinte des objectifs globaux du plan, à savoir améliorer les résultats économiques, environnementaux et sociaux pour toute la population canadienne au cours de la période couverte par le plan.
Deuxièmement, le rapport du vérificateur général souligne le peu d’uniformité et de qualité des données fournies par les ministères et agences et il indique qu’elles ne suffisaient pas à expliquer les retards dans l’engagement des dépenses. À titre d’exemple, les données ne donnaient pas de renseignements complets sur les dates d’approbation, de début et de fin des projets, ni sur les paiements.
Le vérificateur général conclut qu’Infrastructure Canada et ses organisations fédérales partenaires — rappelons que 21 organisations participent à ce plan — ne pouvaient pas démontrer que le plan avait progressé ou était en voie d’atteindre les résultats attendus.
Cet exemple illustre clairement, je crois, la mauvaise planification qui mine de nombreux programmes fédéraux depuis des années.
Pour terminer, chers collègues, j’encourage le gouvernement à continuer d’améliorer le processus de communication des renseignements relatifs aux dépenses, qu’elles soient liées ou non à la COVID-19. Le directeur parlementaire du budget a notamment suggéré — et j’espère que nous serons tous favorables à cette idée — d’utiliser un document central, qui serait mis à jour en temps réel, pour faire le suivi des décisions en matière de dépenses annoncées par le gouvernement.
Lorsqu’on lui a demandé si une telle solution serait viable, le directeur parlementaire du budget a dit ceci au comité :
[...] nous pouvons vous fournir à vous, et à tous les Canadiens, des renseignements exhaustifs sur les dépenses gouvernementales associées à la COVID [avec] deux analystes [...] Ils ne peuvent pas présenter une mise à jour hebdomadaire [...] Toutefois, le gouvernement et ses centaines de milliers de fonctionnaires pourraient le faire.
J’exhorte également les organismes fédéraux à mettre en place des outils de planification plus robustes en ce qui concerne les programmes importants dont ils sont responsables. Une planification insuffisante entraîne des fonds non dépensés, puis des retards dans la prestation des programmes, ce qui peut avoir des conséquences négatives pour les bénéficiaires visés. Établir des cibles raisonnables, planifier en conséquence et mettre en place des protocoles rigoureux de production de rapports permettra, à mon avis, une meilleure utilisation des deniers publics, en plus de favoriser une culture de la transparence et de la reddition de comptes à tous les échelons.
Il est bien de dire que beaucoup a été fait — personne n’affirme le contraire — pendant cette terrible situation découlant de la pandémie. Il n’y a toutefois aucune excuse qui justifie une planification insuffisante et une exécution défaillante pendant la période la plus critique que nous aurons peut-être à vivre.
Merci beaucoup.
Je prends la parole au sujet du projet de loi C-26, la loi portant octroi de crédits pour l’administration publique fédérale et le Budget supplémentaire des dépenses (C) pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2021, dont le Comité sénatorial permanent des finances nationales a fait rapport la semaine dernière.
Ce budget des dépenses fournit les fonds indispensables au bon fonctionnement de plusieurs programmes fédéraux nécessaires. Dans le Budget supplémentaire des dépenses (C), le gouvernement réclame des dépenses budgétaires supplémentaires de 8 milliards de dollars, soit des dépenses à être votées de 13,4 milliards de dollars, partiellement compensées par une diminution des dépenses législatives prévues de 5,4 milliards. De ces montants, environ 9,9 milliards de dollars, ou les trois quarts, des dépenses votées sont consacrés à la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.
Le comité a tenu 4 réunions et interrogé 39 représentants de 12 organismes qui, au total, demandent des crédits votés d’environ 11 milliards de dollars dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, soit 83 % de l’ensemble des crédits votés demandés.
Le comité a aussi entendu le témoignage du directeur parlementaire du budget.
Lors de mon intervention, chers collègues, je vais vous faire part de mes trois principales sources de préoccupation, soit les problèmes de transparence avec le Crédit d’urgence pour les grands employeurs, les problèmes liés à la vaccination et à l’acquisition de vaccins; et le versement de nouvelles subventions au secteur pétrolier et gazier.
Premièrement, le Sénat, le Comité des finances nationales et les Canadiens manquent d’information en ce qui concerne le Crédit d’urgence pour les grands employeurs, qui a approuvé des prêts d’un peu plus de 1 milliard de dollars à quatre sociétés.
Ce programme est le premier et le seul en son genre au Canada qui exige que les emprunteurs divulguent des informations concernant les risques liés aux changements climatiques, qu’ils expliquent comment ils peuvent contribuer à l’atteinte de la carboneutralité au Canada d’ici 2050 au plus tard, mais aussi qui interdit le versement de dividendes et restreint le montant des primes versées au PDG. Il s’agit là de conditions importantes et nécessaires qui devraient d’ailleurs s’appliquer à toutes les formes d’aide financière gouvernementale.
Le Comité des finances nationales n’a pu faire un examen adéquat du programme de Crédit d’urgence pour les grands employeurs parce que le ministère des Finances refuse de divulguer les modalités précises des accords de prêts et les engagements pris dans le cadre de ceux-ci. Comme je l’ai dit, le programme exige que les emprunteurs publient un « rapport annuel de divulgation financière sur le climat ». Toutefois, comme on ne connaît pas les modalités à respecter, et sachant que plus d’un milliard de dollars en prêts ont été approuvés dans le cadre de ce programme, on ne peut dire que l’on rend suffisamment de comptes aux Canadiens.
Dans sa réponse, le ministère des Finances a indiqué ceci :
Les modalités et les engagements détaillés des accords de prêt sont confidentiels sur le plan commercial, et ne sont donc pas rendus publics.
Chers collègues, je trouve que c’est inacceptable et je continue de presser le ministère des Finances de nous donner les engagements précis, ainsi que tout renseignement confidentiel sur le plan commercial, après qu’ils auront été caviardés de façon appropriée.
Il me semble que ces engagements, qui devraient être les mêmes pour tous ceux qui ont contracté un prêt, ne sont pas de nature confidentielle sur le plan commercial. Je voudrais qu’on me présente un avis juridique indiquant si c’est le cas et, le cas échéant, qu’on fasse des arrangements pour que les engagements nous soient présentés à huis clos. Ce programme met en jeu des deniers publics et il doit par conséquent être assujetti à des exigences extraordinaires en matière de transparence et de reddition de comptes.
Deuxièmement, je m’inquiète de l’approvisionnement en vaccins et de la capacité de production intérieure. Vous pourrez en apprendre davantage à ce sujet dans une lettre d’opinion qui paraîtra demain dans le Hill Times.
Il est urgent que des vaccins et de l’équipement de protection individuelle soient développés et produits au Canada, comme l’a révélé l’ampleur de notre manque de préparation dans la réponse à la pandémie. Au cours des dernières décennies, en raison des coupes menées par le gouvernement Harper dans le financement de la recherche et du développement, le Canada a perdu sa capacité de mettre au point des vaccins. Ce manque de vision et cette négligence nous ont contraints à tenter de la rebâtir à la dernière minute.
En août 2020, le gouvernement a annoncé un investissement de 126 millions de dollars sur deux ans pour la construction d’une nouvelle installation de biofabrication au Centre de recherche en thérapeutique en santé humaine à Montréal, mais il continue de couvrir les coûts d’exploitation à hauteur de 20 millions de dollars par an. Nous devons tirer les leçons de cette grave erreur en donnant la priorité au financement de la recherche et du développement de base pour la recherche pharmaceutique dans nos institutions publiques afin qu’elles puissent réagir rapidement en s’associant à l’industrie et aux ONG dès qu’elles sont sollicitées.
Pour ce qui est de l’approvisionnement, au Canada, nous en sommes à un peu plus de 14 doses injectées pour 100 personnes. Nous nous situons au sixième rang des pays du G7, juste devant le Japon, un pays insulaire qui a géré la pandémie beaucoup mieux que nous. Ce grand retard s’explique en partie par le fait que les entreprises donnent la priorité au pays où elles exercent leurs activités. Les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne ont tous des installations de fabrication de vaccins sur leurs territoires et y ont donc un accès prioritaire.
En attendant, l’Agence de la santé publique du Canada a maintenant demandé un total de 9,2 milliards de dollars pour la recherche, le développement et l’achat de vaccins et de traitements. Les modalités de ces contrats n’ont toutefois pas été divulguées, ce qui nous a obligés, le personnel de mon bureau et moi-même, à fouiller dans les données concernant les importations de Statistique Canada pour apprendre que le Canada a payé la dose 38 $ en décembre et en moyenne 35 $ en janvier. Les modalités du contrat indiquent peut-être pourquoi nous payons 50 % de plus que l’UE.
La divulgation des contrats relatifs aux vaccins, y compris les prix et les conditions, est essentielle à la surveillance parlementaire obligatoire. De plus, il faut que nous puissions concevoir et produire des vaccins au pays en disposant des ressources appropriées, afin d’éviter de payer trop cher et de prévenir des infections et des décès inutiles.
Ma troisième et dernière préoccupation concerne mes questions et mes réserves qui subsistent au sujet de la transparence et de la responsabilité pour la subvention de 320 millions de dollars accordée à l’industrie des combustibles fossiles extracôtiers. Malheureusement, même si j’ai demandé à entendre des représentants du ministère des Ressources naturelles, aucun n’a été appelé pour justifier les demandes.
En septembre 2020, le gouvernement a accordé un paiement de transfert ponctuel à Terre-Neuve-et-Labrador pour soutenir l’extraction extracôtière de combustibles fossiles, sans imposer de restriction sur l’utilisation de ces fonds. Il s’agit là d’une subvention directe à l’industrie.
Charlene Johnson, PDG de la Newfoundland and Labrador Oil & Gas Industries Association, aussi appelée la NOIA, a déclaré :
[...] je peux dire que nous sommes heureux de voir les centaines de millions de dollars versés sans presque aucune condition, c’est une bonne nouvelle.
Vous pouvez vous imaginer ma surprise lorsque j’ai entendu parler de ce cadeau de 320 millions de dollars fait à une industrie dont le gouvernement s’est engagé à réduire progressivement les subventions. Nous avons entendu un autre témoignage de la NOIA durant l’étude du projet de loi S-3, portant sur le resserrement des règles pour les plateformes de forage. Mme Johnson a affirmé lors de cette rencontre que son industrie n’aurait pas de difficulté à trouver les fonds nécessaires pour couvrir les coûts de nouvelles règles de sécurité.
Selon la vérificatrice générale :
Il revient donc à Environnement et Changement climatique Canada de coordonner le recensement et l’analyse des mesures non fiscales fédérales favorisant le secteur des combustibles fossiles qui pourraient constituer des subventions inefficaces dans le contexte de l’engagement pris par le Canada en tant que membre du G20.
En juin 2018, le Canada s’est engagé à faire l’inventaire des subventions inefficaces aux combustibles fossiles et à faire parvenir le résultat à l’Argentine en vue d’un examen conjoint par les pairs. Si l’on considère que la plupart des pays ont réussi à faire ce travail en moins de deux ans, je vous annonce que nous sommes plus qu’en retard, chers collègues, au point que cela commence à être douteux.
Les entreprises qui ont besoin d’un prêt peuvent se prévaloir du Crédit d’urgence pour les grands employeurs, dont je parlais à l’instant. Elles devront alors rendre compte des risques que leurs activités posent pour le climat et dévoiler les primes versées à leurs hauts dirigeants, comme n’importe quelle autre entreprise du Canada. Les entreprises qui ont causé la crise climatique et qui se sont ensuite lancées dans une vaste campagne de désinformation à ce sujet ne méritent pas de traitement de faveur, alors que les autres secteurs d’activité du pays continuent d’en arracher.
En terminant, je presse une nouvelle fois le ministère des Finances de recommencer à publier ses rapports bimensuels sur les dépenses causées par la COVID-19 et je vous rappelle que les mécanismes de soutien et de relance doivent d’abord miser sur les Canadiens, et non sur les grandes sociétés. Nous pouvons avoir l’assurance que les fonds publics seront utilisés à bon escient si nous instaurons des balises strictes. L’argent de l’État doit servir à protéger l’environnement et à assurer le bien-être de la population, pas à multiplier les activités ultra-polluantes ou à enrichir les mieux nantis d’entre nous.
Comme le dit toujours le président du Comité des finances nationales, le sénateur Mockler, il ne devrait pas y avoir de plus grande priorité pour nous que la transparence, la responsabilité, la prévisibilité et la fiabilité des programmes du gouvernement, y compris des programmes de soutien financier créés dans la foulée de la pandémie de COVID-19.
Je suis entièrement d’accord.
Merci sénateur Smith, sénatrice Gagné et sénatrice Galvez de vos observations sur le projet de loi C-26. Mes observations porteront sur un certain nombre de mesures décrites dans le document du Budget supplémentaire des dépenses (C) à l’appui du projet de loi C-26.
Ma première observation concerne la radiation des prêts aux étudiants. Comme les années précédentes, Emploi et Développement social Canada demande la radiation des prêts aux étudiants, dont le montant s’élève cette année à 188 millions de dollars. Toutefois, contrairement aux années précédentes, les fonctionnaires du ministère n’ont pas été invités à comparaître devant le Comité des finances pour en discuter, mais certaines questions ont été posées aux fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor.
Le portefeuille des prêts aux étudiants s’élevait à 22 milliards de dollars à la fin du mois de mars de l’année dernière. En plus de radier des prêts aux étudiants chaque année, ce qu’étudie généralement le Comité des finances du Sénat, il arrive qu’on radie d’autres montants ou qu’on y renonce conformément à un projet de loi autre qu’un projet de loi de crédits.
Par exemple, l’année dernière, on a radié 26 millions de dollars en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, 371 millions de dollars en vertu de la Loi fédérale sur l’aide financière aux étudiants et 2 millions de dollars en vertu de la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants.
Puisque le Comité des finances n’a toujours étudié que les montants radiés en vertu de projets de loi de crédits comme le C-26, il a demandé à Emploi et Développement social Canada de lui fournir des renseignements supplémentaires sur des prêts radiés ou auxquels on a renoncés afin d’avoir un portrait complet du dossier des prêts aux étudiants.
Fait intéressant, le Bureau du directeur parlementaire du budget et le Bureau du vérificateur général du Canada ont tous deux publié des rapports sur les prêts aux étudiants au Canada. Le plus récent rapport du Bureau du vérificateur général du Canada a été publié il y a moins d’un an, en juillet 2020.
Toujours selon le Budget supplémentaire des dépenses (C), un financement de 200 millions de dollars a été octroyé au ministère des Finances pour l’achat d’actions de la Corporation de financement d’urgence d’entreprises du Canada, une société d’État créée en mai 2020. La sénatrice Galvez a parlé de cette corporation dans son discours. Il s’agit d’une filiale de la Corporation de développement des investissements du Canada, une autre société d’État.
La nouvelle Corporation de financement d’urgence d’entreprises du Canada a reçu le mandat d’aider à la mise en œuvre du Plan d’intervention économique du Canada pour répondre à la COVID-19, plus particulièrement afin d’apporter un soutien financier d’urgence aux grandes entreprises canadiennes faisant face à des difficultés financières en raison de la pandémie.
En date du 26 février dernier, quatre prêts totalisant 1 milliard de dollars avaient été accordés, et sur cette somme, 274 millions de dollars avaient déjà été utilisés.
Les représentants du ministère des Finances ont répondu à certaines questions par écrit, et leurs réponses figurent sur le site Web du Comité des finances nationales.
Ils ont aussi expliqué certains termes uniformisés ainsi que les conditions des prêts accordés aux emprunteurs, mais ont précisé que les modalités et conditions précises des ententes de prêts constituent des renseignements commerciaux confidentiels et qu’ils ne sont donc pas accessibles au public. La sénatrice Galvez a également soulevé ce point dans son discours.
Compte tenu du fait que d’importantes activités du gouvernement, notamment en ce qui a trait à la COVID-19, sont effectuées par des sociétés d’État, il est important que les parlementaires assurent une surveillance sur ce plan.
Le Budget supplémentaire des dépenses (C) est généralement facile à lire. Toutefois, le document ne comprend pas toutes les dépenses du gouvernement. Par exemple, les dépenses liées à la Subvention salariale d’urgence du Canada, aux prestations d’assurance-emploi et à l’Allocation canadienne pour enfants ne sont pas incluses.
Dans le Budget supplémentaire des dépenses (C), le Conseil du Trésor a effectué le rapprochement des montants du Budget supplémentaire des dépenses et de l’Énoncé économique de l’automne. Cependant, le problème demeure. Comme l’a déclaré le directeur parlementaire du budget, les budgets supplémentaires des dépenses ne comprennent pas toutes les dépenses prévues et ne brossent donc pas un tableau complet des sommes que dépensera le gouvernement.
J’ai soulevé à maintes reprises le problème de la communication inadéquate des renseignements sur les dépenses et je continuerai à le soulever au Sénat à l’avenir.
La demande de financement du Secrétariat du Conseil du Trésor fait état d’un transfert de fonds de six organisations, d’une valeur totale de 7 millions de dollars, pour le projet de solution de gestion des finances et du matériel. Des fonctionnaires ont indiqué que le projet a commencé en 2015, qu’il touche 14 ministères, qu’il a coûté 91 millions de dollars à ce jour et qu’on estime qu’il faudra encore 29 millions de dollars pour le terminer au cours du prochain exercice.
Il est important de faire le suivi de ces projets parce que ce sont des projets pluriannuels qui concernent plusieurs organisations. Si nous examinons le financement d’une année donnée, cela ne reflète pas l’ampleur du projet.
La vérificatrice générale du Canada a effectué un audit sur l’approvisionnement en solutions de technologie de l’information complexes au sein du gouvernement. Cet audit a fait l’objet d’un rapport publié le mois dernier. Au moment où la vérificatrice a fait son audit, le gouvernement menait 21 grands projets d’approvisionnement en systèmes de TI, dont la valeur dépasse 6,6 milliards de dollars. Ces projets touchent de nombreux ministères et organismes et ils sont échelonnés sur plusieurs années.
Le Bureau du dirigeant principal de l’information du Secrétariat du Conseil du Trésor assure une orientation stratégique et un leadership en matière de TI et appuie, guide et surveille les projets et programmes numériques.
Puisque le gouvernement assume encore les coûts liés au système de paye Phénix, qui est à la source de tant de problèmes, il est important d’exercer une surveillance pour ce type de projets de grande envergure qui sont échelonnés sur de nombreuses années et qui ont une incidence sur grand nombre d’entités.
L’Initiative du transport aérien régional est annoncée dans l’Énoncé économique de l’automne de 2020. Le projet de loi C-26 propose d’octroyer 44 millions de dollars au ministère de l’Industrie et à ses agences de développement régional pour financer l’Initiative du transport aérien régional. Dans cet énoncé économique, le gouvernement a proposé de fournir jusqu’à 206 millions de dollars sur deux ans pour l’Initiative du transport aérien régional.
Des représentants ont comparu devant notre Comité des finances le 8 mars — 23 jours avant la fin de l’exercice, le 31 mars. Les représentants n’ont pas été en mesure de fournir au Sénat des détails sur ce programme. Ils nous ont dit que l’Initiative du transport aérien régional n’avait pas encore été officiellement lancée et que le processus pour déterminer le financement n’avait pas encore été confirmé.
Il est très inquiétant qu’on n’ait pas encore planifié comment on allait utiliser une tranche de 44 millions de dollars du budget de 206 millions de dollars prévu pour ce programme alors que le tout doit être livré d’ici 23 jours.
Ce problème a été soulevé au cours des années précédentes et des membres du Comité des finances entendent creuser la question dans le futur.
Voilà qui conclut mon intervention au sujet du projet de loi C-26, honorables sénateurs. Je remercie les fonctionnaires de leur appui au cours des réunions du comité. Je tiens aussi à remercier les membres du Comité des finances des excellentes questions qu’ils ont posées durant les réunions sur le Budget supplémentaire des dépenses (C).
Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Des voix : D’accord.
Une voix : Avec dissidence.
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)