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Projet de loi de crédits no 4 pour 2022-2023

Deuxième lecture

13 décembre 2022


L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) [ - ]

Propose que le projet de loi C-36, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l’administration publique fédérale pendant l’exercice se terminant le 31 mars 2023, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd’hui pour présenter le projet de loi de crédits pour le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2022-2023.

Le gouvernement demande au Parlement d’approuver les dépenses votées prévues qui sont détaillées dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) par le biais du projet de loi de crédits qui nous est présenté aujourd’hui.

Comme le savent les honorables sénateurs, l’approbation par le Parlement du budget fédéral présenté sous l’égide de la ministre des Finances n’autorise pas le gouvernement à dépenser des fonds.

Ce sont plutôt les projets de loi de crédits qui sont les mécanismes par lesquels les paiements sur le Trésor sont autorisés pour livrer les programmes et services gouvernementaux.

Ainsi, il incombe à ceux et celles d’entre nous qui siègent au Parlement d’autoriser les dépenses du gouvernement par l’entremise du budget des dépenses et des projets de loi de crédits connexes, comme celui dont nous sommes saisis aujourd’hui.

Il est à noter que les montants votés dans ce Budget supplémentaire des dépenses représentent des prévisions ou plafonds maximaux « à concurrence de ».

Les dépenses réelles sont publiées dans les rapports financiers trimestriels, et les dépenses totales de 2022-2023 seront énumérées dans les Comptes publics du Canada, qui seront déposés après la fin de l’exercice.

Le budget des dépenses, ainsi que les comptes publics, les plans ministériels et les rapports sur les résultats ministériels — qui, je le rappelle, ont été déposés le 7 décembre —, fournissent des renseignements importants et nous aident, en tant que parlementaires, à examiner minutieusement les dépenses du gouvernement.

Chers collègues, cet examen minutieux est essentiel à une saine démocratie. Les Canadiens doivent savoir comment l’argent de leurs impôts est utilisé et avoir accès à une ventilation détaillée de ces dépenses. Il y a responsabilité lorsque le gouvernement est ouvert et transparent sur la façon dont l’argent des contribuables est dépensé. La responsabilisation et la bonne gouvernance vont de pair. La bonne gouvernance renforce donc la confiance du public dans le gouvernement.

Comme les honorables sénateurs le savent, le Budget supplémentaire des dépenses fournit des renseignements sur les besoins de dépenses supplémentaires. Ces exigences n’étaient pas suffisamment élaborées pour être incluses dans le Budget principal des dépenses ou ont été affinées pour tenir compte de développements récents.

À ce jour, pour le présent exercice, le Budget principal des dépenses 2022-2023 présente 397,6 milliards de dollars en dépenses budgétaires prévues, composées de 190,3 milliards de dollars en dépenses votées et de 207,3 milliards de dollars en dépenses législatives.

Le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2022-2023 propose un montant supplémentaire de 9,7 milliards de dollars en dépenses budgétaires prévues, composées de 8,8 milliards de dollars en dépenses votées et de 860 millions de dollars en dépenses législatives dans 26 organisations fédérales.

Le présent Budget supplémentaire des dépenses (B) fournit des renseignements sur des dépenses budgétaires prévues de 25,8 milliards de dollars, soit 20,8 milliards de dollars en dépenses votées et 5 milliards de dollars en dépenses législatives.

Pris ensemble, ces deux Budgets supplémentaires des dépenses proposent à peu près le même montant de nouvelles dépenses que l’an dernier. Cette année, cependant, de nombreuses initiatives n’étaient pas prêtes à temps pour le budget des dépenses du printemps; elles sont donc incluses dans le budget des dépenses de cet automne.

Bien que les autorisations législatives soient approuvées par le Parlement au moyen d’une loi distincte, elles sont incluses dans le présent Budget supplémentaire des dépenses afin de fournir des renseignements sur les dépenses totales prévues des ministères.

Dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, le gouvernement continue d’investir dans des secteurs prioritaires, tels que l’appui aux peuples autochtones, l’aide aux sinistrés et le logement abordable.

Notamment, huit organisations demandent chacune 500 millions de dollars ou plus. Il s’agit des ministères et organismes suivants : le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord, qui demande 6,3 milliards de dollars; le ministère des Services aux Autochtones, qui demande 2,2 milliards de dollars; le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, qui demande 1,7 milliard de dollars; le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui demande 1,4 milliard de dollars; l’Agence de la santé publique du Canada, qui demande 1,4 milliard de dollars; le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, qui demande 1,2 milliard de dollars; le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, qui demande 1,2 milliard de dollars; la Société canadienne d’hypothèques et de logement, qui demande 694,6 millions de dollars.

Chers collègues, permettez-moi de passer en revue quelques-uns des principaux secteurs de dépenses du Budget supplémentaire des dépenses.

Permettez-moi de commencer par le soutien du gouvernement aux peuples autochtones et à leurs communautés.

Chers collègues, ce gouvernement est profondément résolu à renouveler la relation de nation à nation avec les peuples autochtones, une relation fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la vérité, la coopération et le partenariat.

Les nations autochtones ont le droit à l’autodétermination et à l’autonomie gouvernementale, et aspirent à juste titre à rétablir des communautés fortes et saines. Dans le cadre du cheminement continu du Canada vers la réconciliation, le gouvernement fait les investissements nécessaires pour soutenir les peuples autochtones et leurs communautés.

Honorables sénateurs, ces investissements ont de réelles répercussions. Ils aident à régler des revendications de longue haleine, ils permettent de construire des infrastructures importantes, et ils soutiennent des services qui sont essentiels à la santé et au bien-être physique, mental, social et économique des communautés autochtones.

Honorables sénateurs, je tiens également à souligner que le gouvernement poursuit son important travail dans le but d’améliorer les infrastructures de logement, de soutenir l’éducation et la garde d’enfants et de répondre aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation.

Il va sans dire que des progrès importants sont réalisés. À titre d’exemple, grâce aux nouveaux investissements de 5,6 milliards de dollars annoncés depuis 2015, 137 avis concernant la qualité de l’eau potable à long terme ont été levés dans les réserves, et ce, en date du 1er décembre. Ces nouveaux fonds ont aussi permis de faire en sorte que 230 avis concernant la qualité de l’eau potable à court terme ne passent pas à des avis à long terme.

Dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (B), des fonds totalisant 6,3 milliards de dollars sont destinés au ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord. Cela représente une augmentation de 86 % par rapport au budget des dépenses du ministère à ce jour pour 2022-2023. Permettez-moi de fournir une ventilation des principales initiatives incluses dans cette somme.

Les sénateurs le savent, le gouvernement discute présentement avec différents groupes autochtones au sujet de contestations judiciaires.

Honorables collègues, je peux vous assurer que le gouvernement entend régler ces contestations au moyen d’un dialogue respectueux et de la médiation.

Le Budget supplémentaire des dépenses prévoit 3 milliards de dollars pour les règlements à l’amiable afin que le ministère soit en mesure de rapidement mettre en œuvre les ententes négociées, le cas échéant.

Un financement supplémentaire de 677,6 millions de dollars est prévu pour renflouer le Fonds de règlement des revendications particulières, et 673,5 millions de dollars sont attribués au règlement des revendications particulières relatives aux droits fonciers issus du Traité no 8 des Premières Nations de Blueberry River, de Doig River, d’Halfway River et de West Moberly.

Il convient de souligner que ces revendications particulières reposent sur ces doléances contre le gouvernement fédéral concernant des manquements allégués au respect des obligations historiques du Canada issues de traités ou une mauvaise gestion des terres et des biens des Autochtones.

Les revendications et les indemnités accordées par les tribunaux allant jusqu’à 150 millions de dollars sont payées à même le Fonds de règlement des revendications particulières. Le fonds doit donc être renfloué en prévision des paiements anticipés pour les ententes négociées et les indemnités accordées par les tribunaux.

Plus précisément, dans le Budget supplémentaire des dépenses, le gouvernement propose 673,5 millions de dollars pour les coûts d’indemnisation et d’administration des ententes de règlement relatives aux externats indiens fédéraux et à la rafle des années 1960.

Les réclamations relatives à l’enfance désignent une vaste catégorie d’actions en justice qui ont eu lieu par le passé et qui sont en cours contre le gouvernement du Canada. Cela comprend les expériences vécues par les demandeurs autochtones liées aux pensionnats, aux internats, aux hôpitaux indiens, à l’adoption et au placement en famille d’accueil. Le financement sera utilisé pour effectuer des paiements d’indemnité liés à la Convention de règlement relative aux externats indiens fédéraux et pour couvrir le coût de la gestion continue des réclamations relatives à l’enfance, y compris les paiements pour les ententes existantes.

Enfin, 458,2 millions de dollars sont affectés au logement des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Les fonds seront utilisés pour soutenir la planification et la préparation des sites, les nouvelles constructions, les réparations majeures et mineures, l’aménagement des terrains et des lots, le fonctionnement et l’entretien, le maintien des capacités et d’autres besoins liés au logement.

Honorables sénateurs, il est évident qu’il faudra du temps pour remédier à ces injustices historiques et répondre à ces besoins vitaux. Il reste que les investissements du gouvernement font une différence. Ils contribuent à réduire les inégalités qui existent entre les peuples autochtones et non autochtones au Canada.

Je voudrais maintenant parler du deuxième poste en importance dans le Budget supplémentaire des dépenses : le financement pour l’aide en cas de catastrophe. D’un océan à l’autre, les Canadiens ont été victimes de diverses catastrophes naturelles provoquées par les changements climatiques. Les données scientifiques sont claires : ces événements destructeurs se reproduiront, et sans des mesures soutenues pour contrer les changements climatiques, leur fréquence augmentera.

Alors que le gouvernement s’efforce d’établir un plan complet de lutte contre les changements climatiques, il se rend également compte que les Canadiens touchés par des catastrophes naturelles ont besoin d’aide et de soutien.

En cas de catastrophe naturelle de grande envergure, le gouvernement fournit une aide financière aux gouvernements provinciaux et territoriaux. Comme les honorables sénateurs le savent, le financement fédéral aux provinces et aux territoires est basé sur une formule de partage des coûts, avec un large éventail de dépenses admissibles. Cela comprend des mesures telles que le nettoyage et la réparation des infrastructures publiques, des biens des particuliers, des petites entreprises et des fermes.

Ce Budget supplémentaire des dépenses propose 1,5 milliard de dollars — sur les 1,7 milliard de dollars — pour les accords d’aide financière en cas de catastrophe afin d’aider la Colombie-Britannique à assumer les coûts d’intervention et de rétablissement à la suite des récentes catastrophes naturelles, y compris les inondations et les glissements de terrain de 2020 ainsi que les incendies, les inondations et les glissements de terrain de 2021.

Dans son rapport intitulé Remettre à flot : L’impact et la réponse aux inondations de 2021 en Colombie-Britannique, le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a fait la lumière sur les difficultés dans le Sud-Ouest de la Colombie-Britannique en ce qui concerne la protection contre les inondations et la préparation aux situations d’urgence. Je félicite le comité de son excellent travail.

Honorables sénateurs, bien que nous ayons fait beaucoup de chemin dans notre lutte contre la COVID-19, nous savons tous que la pandémie n’est pas encore terminée.

C’est particulièrement le cas dans les pays en développement, qui ont eu du mal à obtenir les tests et les traitements appropriés.

Le gouvernement croit que le Canada a un rôle important à jouer dans l’équité en matière d’accessibilité aux vaccins dans le monde.

C’est pourquoi ce Budget supplémentaire des dépenses propose d’accorder 732 millions de dollars au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, afin de fournir aux pays en développement des vaccins, des tests et des traitements pour lutter contre la COVID-19.

Ce financement sera utilisé pour acheter et distribuer des vaccins contre la COVID-19, des tests de diagnostic et des produits thérapeutiques, ainsi que pour renforcer la capacité des systèmes de santé des pays en développement.

Dans les pays où les taux de vaccination sont faibles, le financement soutiendra la livraison et la production de vaccins contre la COVID-19 ainsi que les campagnes de sensibilisation et d’information visant à accroître la confiance à l’endroit des vaccins.

Nous savons tous également que la COVID-19, qui est toujours en évolution, n’a pas dit son dernier mot ici, au Canada. Par conséquent, le Canada sera prêt.

Dans cette optique, on propose d’octroyer 696,2 millions de dollars à l’Agence de la santé publique du Canada.

Ce financement permettrait d’appuyer le développement continu et l’acquisition de doses de vaccin, y compris de nouvelles formulations, dans le but d’offrir la meilleure protection qui soit contre la COVID-19.

Grâce à ces investissements, nous continuerons de faire face aux répercussions de la COVID-19 au Canada et à l’étranger.

Honorables sénateurs, nous savons également que la pénurie de logements au Canada fait qu’il est difficile pour les Canadiens de trouver un logement abordable. Le budget de 2022 a proposé des mesures qui, en partenariat avec les mesures prises par d’autres ordres de gouvernement, mettront le Canada sur la voie du doublement de la construction de nouveaux logements et répondront aux besoins de logement du Canada au cours de la prochaine décennie.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B) prévoit le financement des mesures suivantes en matière de logement énoncées dans le budget de 2022 : 750 millions de dollars aux provinces et aux territoires pour le transport en commun et le logement, ce qui a été autorisé en vertu de la Loi no 1 d’exécution du budget de 2022; les 458,2 millions de dollars pour le logement des Inuits, des Métis et des Premières Nations signataires de traités modernes et d’ententes sur l’autonomie gouvernementale dont j’ai parlé plus tôt; 441,6 millions de dollars pour l’Initiative pour la création rapide de logements, qui vise à créer de nouveaux logements abordables pour les personnes et les populations vulnérables; et 10,3 millions de dollars pour l’élaboration conjointe d’une Stratégie sur le logement pour les Autochtones en milieu urbain, rural et nordique.

Mais ce Budget supplémentaire des dépenses va encore plus loin. En plus du financement annoncé dans le budget de 2022, je suis heureuse de dire que ce budget des dépenses contient également des fonds pour un certain nombre d’autres programmes de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, tels que 91,8 millions de dollars pour le Fonds d’innovation pour le logement abordable; 38 millions de dollars pour l’Initiative des terrains fédéraux, qui appuie le transfert de terres et d’immeubles fédéraux excédentaires pour les aménager ou les rénover en vue de leur utilisation comme logements abordables; et 27 millions de dollars pour l’Initiative de financement de la construction de logements locatifs.

En fin de compte, tous les Canadiens méritent de pouvoir vivre et élever leur famille dans un endroit sûr et abordable.

Honorables sénateurs, le financement proposé dans le présent budget des dépenses témoigne de l’engagement du gouvernement à l’égard des priorités au pays et à l’étranger, qu’il s’agisse d’investir dans les communautés autochtones, de fournir une aide financière en cas de catastrophe ou d’offrir des programmes de logement abordable.

S’il y a une chose que les événements ayant cours dans le monde actuellement nous ont apprise, c’est que nous sommes tous dans le même bateau. Le budget des dépenses montre que le gouvernement répond aux besoins immédiats, tout en continuant à faire des investissements à long terme qui profitent à toute la population canadienne.

Avant de conclure ce discours, je tiens à remercier encore une fois le Comité sénatorial permanent des finances nationales de l’étude qu’il a faite. Merci pour votre travail assidu. Je suis consciente du temps que vous avez consacré à l’étude des divers projets de loi à teneur financière tout au long de l’année, et tout particulièrement durant les périodes d’octrois de crédits. Votre contribution est fort appréciée. Chers collègues, je vous invite à adopter ce projet de loi sans délai.

Je vous remercie.

Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du quatrième projet de loi de crédits du gouvernement cette année, après les projets de loi C-16, C-24 et C-25.

Ce projet de loi de crédits demande l’autorisation de dépenser 20 milliards de dollars supplémentaires. En plus des 20 milliards de dollars demandés, le gouvernement a déjà l’approbation du Parlement pour dépenser 200 milliards de dollars, qui ont été approuvés par les trois projets de loi de crédits précédents. L’approbation de ce projet de loi portera à 220 milliards de dollars les dépenses approuvées par les projets de loi de crédits.

Il y a aussi 215 milliards de dollars approuvés par des lois autres que les projets de loi de crédits, comme le Transfert canadien en matière de santé par le biais de la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et les frais de la dette publique, qui sont approuvés par la Loi sur la gestion des finances publiques.

J’ai dit à plusieurs reprises dans cette enceinte que les parlementaires devraient consacrer plus de temps à l’examen des dépenses législatives. Les 215 milliards de dollars de dépenses législatives sont comparables aux 220 milliards de dollars demandés dans les projets de loi de crédits. Nous avons étudié les 220 milliards de dollars des projets de loi de crédits, mais il n’y a pas d’étude comparable concernant les 215 milliards de dollars de dépenses législatives.

Honorables sénateurs, les plans de dépenses du gouvernement changent souvent tout au long de l’année, ce qui complique la tâche des parlementaires quand vient le temps d’en faire l’examen. Pour vous donner une idée de la difficulté de suivre les dépenses du gouvernement, songe à ce qui suit. Avant le 1er avril, nous avons approuvé le premier projet de loi de crédits. Puis, nous avons reçu le projet de loi d’exécution du budget, qui approuve certaines, mais pas la totalité, des dépenses prévues dans le budget. En juin, nous avons reçu les deuxième et troisième projets de loi de crédits, qui se rapportaient au Budget principal des dépenses et au Budget supplémentaire des dépenses (A). En novembre, nous avons reçu l’énoncé économique de l’automne et le projet de loi C-32, qui vise à mettre en œuvre certaines des dépenses de cet énoncé et que nous étudions cette semaine.

En décembre, nous avons reçu un autre projet de loi de crédits qui était, lui, lié au Budget supplémentaire des dépenses (B). Il s’agit du projet de loi C-36, qui est à l’étude aujourd’hui. Ensuite, en mars, nous recevons un autre projet de loi de crédits fondé sur le Budget supplémentaire des dépenses (C), qui comprend certains postes budgétaires et certaines mises à jour fiscales.

Dans l’intervalle séparant chacun de ces projets de loi, d’autres projets de loi fourniront l’approbation parlementaire de dépenser de l’argent pour d’autres programmes. Par exemple, le projet de loi C-31, récemment adopté, autorise le gouvernement à dépenser pour une prestation dentaire pour les enfants et une prestation pour le logement locatif.

Pour compliquer davantage le processus, le gouvernement demande parfois l’autorisation pour une partie du financement d’un programme dans un premier projet de loi, et l’autorisation pour le reste du financement dans des projets de loi subséquents. C’est le processus qui a été utilisé pour les 30 milliards de dollars destinés au nouveau programme de garderies : 2,6 milliards de cette somme ont été approuvés dans la loi d’exécution du budget de 2021, tandis que l’autorisation pour le reste est demandée dans des projets de loi de crédits.

En outre, de nombreuses autres transactions s’effectuent hors des projets de loi de crédits et ne sont pas étudiées dans le cadre de notre examen des projets de loi de crédits et des documents budgétaires. Comme je l’ai mentionné plus tôt, jusqu’à présent cette année, les dépenses législatives excèdent les 200 milliards de dollars, les prestations d’assurance-emploi s’élèvent à 24 milliards de dollars et l’Allocation canadienne pour enfants représente également 24 milliards de dollars. Il y a également un certain nombre de transactions importantes qui ont une incidence sur les dépenses du gouvernement et qui ne sont pas incluses dans notre étude du budget des dépenses, des budgets supplémentaires des dépenses et des projets de loi de crédits.

Honorables collègues, si je vous explique le processus d’approbation des dépenses du gouvernement, c’est pour vous montrer qu’il est difficile d’assurer le suivi de ces dépenses. Le processus utilisé par le gouvernement pour obtenir l’approbation parlementaire de dépenser de l’argent est, selon Scott Brison, l’ancien président du Conseil du Trésor, « totalement irrationnel », ou « un désordre absolu », comme l’a déclaré le directeur parlementaire du budget dans un balado diffusé par The Hill Times. À sa défense, M. Brison a bien essayé de corriger le processus ou, du moins, d’harmoniser les divers éléments. Toutefois, après son départ, le gouvernement n’a pas poursuivi le travail pour simplifier le processus.

Le gouvernement a été élu en 2015 en présentant une plateforme dans laquelle il promettait de « [modifier] les mécanismes financiers parlementaires pour uniformiser et clarifier les pratiques comptables gouvernementales. » De plus, il s’engageait à assurer « la cohérence comptable entre le budget des dépenses et les Comptes publics. » Nous attendons toujours que le gouvernement honore son engagement.

Honorables sénateurs, il est temps que le gouvernement règle le problème du processus budgétaire ou, du moins, qu’il commence à le faire. En fait, il est grand temps qu’il le fasse.

Dans ce projet de loi de crédits, le gouvernement demande un financement supplémentaire de 20 milliards de dollars pour 89 ministères et organismes. Sept organismes demandent plus de 1 milliard de dollars chacun, et la Société canadienne d’hypothèques et de logement demande 695 millions de dollars. Il y a également 7 milliards de dollars en dépenses législatives qui ont déjà été approuvées dans le cadre d’autres lois. Ces 7 milliards de dollars comprennent 2 milliards de dollars pour un supplément ponctuel au Transfert canadien en matière de santé, un peu moins de 2 milliards de dollars pour l’aide à l’Ukraine, 1,8 milliard de dollars pour des tests de dépistage de la COVID-19 et 750 millions de dollars aux provinces et aux territoires pour le transport et le logement. Nous n’étudions aucune de ces dépenses.

L’un des engagements fondamentaux du gouvernement actuel est son engagement à faire preuve d’ouverture et de transparence et à rendre des comptes. J’ai souvent parlé au Sénat du manque d’ouverture et de transparence du gouvernement et du retard avec lequel il présente des documents où il rend des comptes sur ses activités comme les comptes publics, les rapports sur la gestion de la dette et les rapports sur les résultats ministériels. Les commentaires que j’ai faits jusqu’à présent aujourd’hui expliquent les difficultés qui apparaissent lorsqu’on essaie de faire le suivi dans le dédale des plans de dépenses du gouvernement.

L’Institut C.D. Howe, un groupe de réflexion très respecté, fournit régulièrement un bulletin sur l’utilité des budgets, des dépenses et des états financiers des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Le plus récent rapport, publié en septembre, a examiné les états financiers de l’exercice 2020-2021, ainsi que les budgets et les dépenses de l’exercice 2022-2023 des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

L’Alberta était en tête de la catégorie avec un A, suivie de près par le Yukon avec un A-. Dans la catégorie B, on retrouve la Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick, l’Ontario et le Québec. Dans la catégorie C, on trouve l’Île-du-Prince-Édouard et la Nouvelle‑Écosse. Dans la catégorie D, on retrouve le gouvernement fédéral, Terre-Neuve-et-Labrador, le Manitoba, la Colombie‑Britannique et les Territoires du Nord-Ouest. Il s’agit d’une amélioration pour le gouvernement fédéral, car l’année dernière, il avait obtenu la note F.

Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement fédéral, avec toutes les ressources dont il dispose, a obtenu la note F l’année dernière pour les documents de responsabilité financière et la note D cette année. Le gouvernement devrait être capable de faire mieux. Les Canadiens et les parlementaires méritent mieux.

Les rapports sur les résultats ministériels ont été publiés le 6 décembre, beaucoup trop tard pour être d’une quelconque utilité lors de notre examen du Budget supplémentaire des dépenses (B), du présent projet de loi de crédits C-36 et du projet de loi C-32. Un bref examen indique que 84 organismes ont établi 2 676 indicateurs ou objectifs de rendement, dont 1 331 ont été atteints, soit un peu moins de 50 %.

Nous n’avons toujours pas soumis les rapports sur les résultats ministériels à une étude approfondie, mais je peux donner une idée des difficultés que ce genre d’étude pourrait révéler. Le gouvernement a lancé une stratégie sur l’éducation préscolaire et les services de garde des enfants en 2020, dont le coût a été estimé à 30 milliards de dollars sur cinq ans. Les cibles, ou objectifs de rendement, prévoient une réduction de 50 % des frais moyens des services de garde d’ici la fin du mois en cours, la création de 250 000 places en garderie sur cinq ans ainsi que la création d’environ 50 000 postes en service de garde. Le ministère n’a pas établi d’objectifs de rendement pour établir chaque année le nombre de places en garderie ou de postes en service de garde supplémentaires qui auront été créés. Le ministère vérifie plutôt si l’accès à l’éducation préscolaire et aux services de garde a augmenté, et il se fixe un objectif de 40 000 places d’ici la date cible du 31 mars 2022.

Cependant, on constate qu’il n’y a tout simplement aucun résultat disponible dans les rapports sur les résultats ministériels de 2019-2020, 2020-2021 ou 2021-2022. Par ailleurs, aucun critère ou objectif de rendement n’a été prévu pour établir si les frais de garderie auront été réduits de 50 % d’ici la fin du mois en cours. Sans ce genre de données sur le rendement, le gouvernement ne peut pas savoir si la stratégie qu’il met en œuvre au coût de 30 milliards de dollars est efficace.

Dans son rapport sur le Budget principal des dépenses, le directeur parlementaire du budget a donné un aperçu de l’augmentation des dépenses relatives aux Autochtones dans les deux ministères concernés. Les dépenses de ces deux ministères combinés sont passées de 14 milliards de dollars en 2018-2019 à 57 milliards de dollars jusqu’à présent dans l’exercice en cours.

Une partie importante du financement de Services aux Autochtones Canada sert aux ententes à l’amiable, dont 20 milliards de dollars pour la compensation des enfants et des familles autochtones ayant subi des préjudices en raison du sous‑financement des services à l’enfance et à la famille. Le gouvernement et l’Assemblée des Premières Nations ont conclu une entente de principe pour le versement des fonds, mais le Tribunal canadien des droits de la personne n’a pas appuyé l’entente de principe. Les fonctionnaires de Services aux Autochtones Canada ont informé le Comité des finances et le gouvernement fédéral que l’Assemblée des Premières Nations demanderait une révision judiciaire de la décision du Tribunal canadien des droits de la personne de rejeter l’entente de 20 milliards de dollars.

Mes honorables collègues se souviendront peut-être que j’avais posé une question au sénateur Gold à ce sujet le mois dernier. Lors d’une récente réunion du Comité des finances, des représentants du ministère et du Conseil du Trésor ont assuré au comité que les 20 milliards de dollars sont gelés et qu’« ils demeurent dans notre système de crédits. [...] Ils sont destinés à l’indemnisation et ne peuvent pas être dépensés pour d’autres priorités ».

La semaine dernière, l’Assemblée des Premières Nations a adopté une résolution exhortant le Canada à placer un minimum de 20 milliards de dollars destinés à l’indemnisation dans un compte portant intérêt et à indemniser toutes les victimes visées à la fois par les décisions du tribunal et le recours collectif. Étant donné le financement important accordé aux deux ministères pour diverses réclamations et divers règlements, il est important que le Comité des finances poursuive sa surveillance de ces dépenses importantes.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B), qui soutient le projet de loi C-36, comprend 2 milliards de dollars de dépenses législatives pour le Transfert canadien en matière de santé. Cette somme s’ajoute aux 45 milliards de dollars prévus dans le Budget principal des dépenses. Ces 2 milliards de dollars ont été versés aux provinces pour réduire les retards accumulés du côté des interventions chirurgicales et des autres interventions pendant la pandémie.

Le Transfert canadien en matière de santé est le plus important transfert aux provinces et aux territoires pour les aider à financer les soins de santé. Notre système de soins de santé est en crise, et les provinces et les territoires ont demandé au gouvernement fédéral d’accroître de 28 milliards de dollars les fonds destinés aux soins de santé, ce qui, selon eux, ferait passer la part fédérale des dépenses en santé du taux actuel de 22 % des coûts à 35 %. Or, aucun document budgétaire ne prévoit le versement de fonds supplémentaires au titre du Transfert canadien en matière de santé.

Honorables sénateurs, le gouvernement se heurte à d’importants défis économiques, et il peine à assurer la prestation de services gouvernementaux de base. L’inflation s’est implantée, et les Canadiens ont du mal à suivre l’augmentation du prix des aliments, du carburant et d’autres produits essentiels.

Le 5 décembre, quatre universités canadiennes ont publié le Rapport annuel sur les prix alimentaires 2023, qui prévoit que le prix des aliments continuera d’augmenter de 5 à 7 % en 2023, les légumes, les produits laitiers et la viande étant ceux qui connaîtront la plus forte augmentation. Le recours aux banques alimentaires est en hausse partout au pays. Les taux d’intérêt continuent d’augmenter, alors que le gouvernement avait assuré aux Canadiens que ceux-ci demeureraient bas. Compte tenu de l’augmentation de l’inflation, les Canadiens doivent maintenant emprunter davantage pour joindre les deux bouts.

Les propriétaires voient leurs paiements hypothécaires augmenter. Certains Canadiens qui ont acheté un logement lorsque les prix de l’immobilier ont atteint un sommet ont maintenant des hypothèques dont le montant dépasse la valeur de leur logement.

La hausse des taux d’intérêt et l’augmentation des emprunts font également augmenter les coûts du service de la dette du gouvernement, à tel point que le programme du service de la dette du gouvernement est maintenant l’un de ses programmes les plus coûteux. En plus de ces contraintes économiques, les économistes prévoient une récession au début de 2023.

Les Canadiens n’ont pas accès aux soins de santé. Un grand nombre de Canadiens n’ont pas de médecin de famille, et les files d’attente pour obtenir des services dans les cliniques et les salles d’urgence sont longues. Les opérations chirurgicales et les services de diagnostic sont reportés, et nos fournisseurs de soins de santé sont débordés. Les conséquences du manque de services de santé sur nos enfants sont particulièrement inquiétantes. Les médicaments en vente libre pour les enfants sont en nombre insuffisant.

Le gouvernement est mis au défi de fournir d’autres services publics. Il y a des files d’attente aux bureaux des passeports. Les demandes d’aide financière et de services des anciens combattants accusent du retard, et sur les 2,2 millions de demandes d’immigration en attente, environ 1,2 million accuse du retard.

Même les demandes d’accès à l’information sont en souffrance, alors que l’objectif de la Loi sur l’accès à l’information est d’améliorer « la responsabilité et la transparence des institutions fédérales du Canada ». Le commissaire à l’information du Canada a récemment déclaré à un comité permanent de l’autre endroit que le gouvernement n’avait pas respecté les délais prescrits par la loi pour plus de 30 % des 400 000 demandes d’accès à l’information présentées l’année dernière.

Honorables sénateurs, les Canadiens attendent que leur gouvernement assume son rôle de leader. Combien de temps encore devront-ils attendre?

Son Honneur la Présidente intérimaire [ - ]

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Son Honneur la Présidente intérimaire [ - ]

L’honorable sénatrice Gagné, avec l’appui de l’honorable sénateur Gold, propose que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Son Honneur la Présidente intérimaire [ - ]

Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Gagné, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

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