Projet de loi modifiant la Loi électorale du Canada et le Règlement adaptant la Loi électorale du Canada aux fins d’un référendum (âge de voter)
Deuxième lecture--Suite du débat
27 avril 2023
Honorables sénateurs, j’interviens au sujet du projet de loi S-201.
Avant de présenter mes arguments, il convient de rappeler quelques éléments de contexte.
Le projet de loi a été présenté dans cette enceinte le 24 novembre 2021. Le concept a — dans plusieurs projets de loi — une histoire intéressante qui, je pense, mérite d’être prise en considération.
Le projet de loi a été présenté la dernière fois — avant cette fois‑ci — au Sénat au cours de la dernière session. Il a été envoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour y être étudié, mais le comité ne s’est pas réuni en raison de la dissolution. C’est la troisième fois — peut-être que ce sera la bonne — que la sénatrice McPhedran présente ce projet de loi au Sénat.
Ce qui est intéressant, cependant, c’est que ce projet de loi a été présenté ou rétabli neuf fois à la Chambre des communes en raison de prorogations, de dissolutions, et ainsi de suite. Sur ces neuf fois, le projet de loi a atteint l’étape de la deuxième lecture une seule fois. Cela s’est d’ailleurs produit au cours de la présente session de la législature.
Le projet de loi C-210 est la version de la Chambre des communes. Le 28 septembre 2022, la Chambre a rejeté le projet de loi C-210 en deuxième lecture par une bonne marge, 77 pour et 246 contre.
Encore une fois, il s’agit de la seule version du projet de loi qui soit parvenue à l’étape de la deuxième lecture en neuf tentatives à la Chambre. Tout cela pour dire que, à neuf reprises, la Chambre des communes a clairement montré qu’elle n’était pas chaude à l’idée d’appuyer cette proposition. Elle l’a même déjà fait à l’étape de la deuxième lecture au courant de la présente législature, par les mêmes députés qui sont actuellement en poste. Voilà quelques renseignements qui, à mon avis, valaient la peine d’être rappelés à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-201.
Il est aussi utile de rappeler que, lorsque le Sénat adopte un projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, il souscrit dans les faits au principe du projet de loi et veut le renvoyer au comité pour que celui-ci l’étudie plus en profondeur. L’autre solution, par rapport à l’adoption de la mesure législative à l’étape de la deuxième lecture, c’est de la rejeter. Nous avons toujours la possibilité de la rejeter à cette étape. Cela voudrait dire que nous ne souscrivons pas au principe du projet de loi.
Voici un passage des pages 131 et 132 de l’ouvrage La procédure du Sénat en pratique :
À la deuxième lecture, le débat vise essentiellement le principe ou le bien-fondé du projet de loi. Ce débat cherche alors à répondre à des questions telles : « Est-ce une bonne politique? », « Devrait-on aller de l’avant? » et « Est-ce que ce sera une bonne loi? ». Les orientations générales du projet de loi sont l’objet principal du débat, et non pas la particularité du contenu de ses dispositions.
C’est rare que le Sénat rejette un projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, mais s’il y en a un qui mérite de l’être, sénateurs, c’est bien celui-là. Je m’explique.
Commençons par les raisons d’ordre pratique. Les comités disposent d’un temps limité pour étudier les projets de loi d’initiative parlementaire, alors je vois mal pourquoi nous prendrions du temps pour étudier un texte qui porte sur un sujet qui a déjà été rejeté par l’autre endroit. Celui-ci a été saisi d’une mesure législative qui traitait exactement du même sujet, et les députés qui l’ont rejeté sont exactement les mêmes que la dernière fois.
Passons maintenant à l’aspect juridique. Si nous adoptons ce projet de loi et le renvoyons à l’autre endroit, il sera vraisemblablement jugé irrecevable à cause de la règle selon laquelle on ne peut pas se prononcer deux fois sur la même question pendant une session parlementaire. Il se peut donc fort bien que le Président juge ce projet de loi irrecevable, ce qui veut dire que nous — c’est-à-dire les comités et le Sénat — aurions perdu un temps précieux à discuter d’un texte pour lequel la Chambre pourrait nous répondre : « Qu’est-ce que vous faites? Nous avons déjà étudié cette question-là. »
Troisièmement, il y a le principe. Je crois que compte tenu de sa teneur, ce n’est pas un projet de loi qui devrait provenir du Sénat, car il porte sur l’élection des députés à la Chambre des communes. Nous devrions nous en tenir à notre rôle de Chambre de second examen objectif lorsque le sujet porte sur les élections fédérales. À mon avis, ce serait irrespectueux de la part du Sénat de chercher de manière proactive à modifier le processus électoral des députés fédéraux, mais ce n’est que mon avis.
Comme je l’ai dit, puisque nos collègues élus qui siègent actuellement à la Chambre des communes ont récemment rejeté cette proposition par une écrasante majorité, je crois qu’ils se poseraient des questions sur le respect dont nous faisons preuve à leur égard.
Chers collègues, ce n’est pas de gaîté de cœur que je présente une vision aussi négative d’un projet de loi présenté par une de nos honorables collègues, mais il arrive parfois des cas — comme celui‑ci — où, selon moi, le Sénat doit prendre des mesures décisives. Je sais que la sénatrice McPhedran aimerait que ce projet de loi fasse l’objet d’un vote. Depuis quelques mois déjà, pendant la préparation du plumitif, elle cherche à savoir quand le Sénat votera au sujet de son projet de loi. Je suis prêt à voter contre ce projet de loi dès que le Sénat le mettra aux voix, aujourd’hui même si c’est le cas. Merci.
Sénateur Tannas, puis-je vous poser une question?
Certainement.
Merci beaucoup. Il n’y a actuellement pas de projet de loi semblable au Sénat. Avez-vous pensé au fait qu’un certain nombre de commentaires formulés récemment sur divers projets de loi dans cette enceinte ont porté sur l’importance de l’indépendance du Sénat pour qu’il puisse tenir ses discussions, mener ses études comme les sénateurs l’entendent et ne pas être dicté par ce qui se passe à l’autre endroit — je ne devrais pas employer le mot « dicté » —, mais inutilement influencé par ce qui se passe à l’autre endroit?
J’essaie de comprendre pourquoi vous insistez sur ce point, alors que je crois vous avoir déjà entendu plaider vigoureusement en faveur de l’indépendance du Sénat.
Le corollaire de cette question est le suivant : comment se fait-il que vous pensiez que c’est une bonne idée que le Sénat n’écoute pas les jeunes qui veulent s’adresser à nous à l’étape de la deuxième lecture? Pourquoi leur opposer un refus? Pourquoi les exclure?
Ce sont de très bonnes questions. Comme vous l’avez mentionné, il n’y a aucun autre projet de loi semblable au Sénat. L’autre endroit a rejeté le projet de loi, donc il n’y en a pas non plus.
Je le répète, ma position repose d’abord sur le principe des chances de succès du projet de loi. Je pense qu’elles sont nulles. Selon moi, nous perdons notre temps avec ce projet de loi. Il pourrait être intéressant d’entendre les témoignages de jeunes gens devant un comité pour en discuter. Nous pourrions approfondir le sujet dans le cadre d’une étude. Nous pourrions aussi préparer un document à l’intention de l’autre endroit aux fins de lecture. Peut-être que cela les amènerait à revoir leur position.
Toutefois, il reste à régler le problème de la règle selon laquelle on ne peut pas se prononcer deux fois sur la même question pendant une session parlementaire. Même si toutes les étapes étaient franchies dans l’autre endroit, que le comité menait à bien tous ses travaux et entendait tous les témoins — nourrissant ainsi leurs espoirs —, le projet de loi pourrait tout simplement être rejeté. C’est le résultat le plus probable. Cette règle est plutôt claire.
Troisièmement, les comités disposent d’un temps limité pour accomplir leurs travaux. Je dirais même que nous manquons de temps, du moins, dans la session parlementaire en cours. Peut-être qu’il y aura une prorogation. Peut-être même qu’il y aura une élection générale. Qui sait? Nous avons tous le sentiment de manquer de temps dans la législature actuelle.
Je pense que nous devons être attentifs à ce à quoi nous consacrons notre temps. C’est pour ces raisons que je fais cette recommandation.
J’ai une question à poser. Comment peut-on considérer qu’il s’agit de la même question si cette question n’a pas été soulevée au Sénat? Étant donné que la question a été soulevée à la Chambre des communes et non ici, craignez-vous que l’application par le Sénat d’une tactique procédurale qui devrait être déterminée par la Chambre des communes, dans l’éventualité où ce projet de loi y parviendrait, ne crée un dangereux précédent et n’interfère avec les limites de compétence qui stipulent que chaque Chambre est maîtresse de son propre domaine?
Merci pour cette question, sénatrice McCallum. Je ne prétends pas qu’il y ait autre chose que le bon sens qui nous empêche d’aller de l’avant. Nous pourrions adopter le projet de loi en deuxième lecture. Nous pourrions l’examiner en troisième lecture. Admettons que nous l’adoptions, cela ne signifie pas que le projet de loi sera adopté.
Par conséquent, s’il s’agit d’un exercice théorique, si telle est l’idée, je suggère de faire une étude en comité plutôt que de présenter un projet de loi qui mourra au Feuilleton de la Chambre des communes.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-201, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et le Règlement adaptant la Loi électorale du Canada aux fins d’un référendum relativement à l’âge de voter.
Je remercie la sénatrice McPhedran d’avoir présenté cette initiative et d’avoir travaillé sans relâche sur ce dossier. J’aimerais commencer par une citation de Mme Diane Redsky, une citoyenne des 40 Premières Nations de Shoal Lake qui a reçu un diplôme en droit honorifique de l’Université de Winnipeg en 2022.
À propos de ce projet de loi, Mme Redsky a écrit ceci :
En 4e année, j’ai reçu un prix pour un discours que j’avais fait sur le thème « Pourquoi les enfants devraient-ils avoir le droit de vote ». J’étais déjà consciente, malgré mon jeune âge, de l’injustice qu’il y avait à ce que des décisions touchant à mon avenir soient prises sans que j’aie mon mot à dire, et j’étais fermement convaincue que ce n’était pas normal. J’estime toujours que les jeunes devraient avoir leur mot à dire sur les questions qui ont une incidence sur leur avenir. Nos aînés nous rappellent toujours que, pour qu’une décision soit respectueuse et responsable, elle doit tenir compte des sept prochaines générations. En fixant l’âge minimal requis pour voter à 16 ans, nous contribuerions tous à bâtir un avenir meilleur pour l’ensemble de la population.
Mme Redsky s’est dernièrement retirée de ses fonctions de directrice générale du Centre Ma Mawi Wi Chi Itata, à Winnipeg, où elle défendait des dossiers autochtones et faisait preuve de leadership à cet égard. Elle est une figure de proue et une visionnaire de renom au Canada, où elle s’attaque depuis longtemps aux divers problèmes touchant les Autochtones de Winnipeg, et ce, dans toutes les sphères de la santé, de la justice, de l’éducation et des services sociaux.
Depuis 1993, elle travaillait dans le secteur des services sociaux et elle y faisait aussi du bénévolat. Elle est devenue une grande défenseure des Autochtones, des enfants et des femmes. Elle a participé à la création d’une multitude de programmes novateurs qui ont contribué à la santé des communautés.
Chers collègues, Mme Redsky est la même femme distinguée, passionnée et bienveillante que la jeune femme qui voulait voter à l’âge de 14 ans afin qu’elle puisse attirer l’attention sur les inégalités dont elle était victime. Imaginez un instant à quel point notre société pourrait évoluer si nous permettions aux jeunes de voter, car ils nous feraient profiter de leur vision encore intacte de la vie et de leur point de vue rafraîchissant. Cette avancée se traduirait, comme l’a dit la sénatrice McPhedran dans sa première intervention, par « la revitalisation de notre démocratie ».
Honorables sénateurs, du point de vue d’une iskwêw crie et d’une femme, ce projet de loi permettrait aux jeunes d’exprimer, avec intelligence et esprit critique, leurs inquiétudes sur l’avenir du monde. Ce serait l’aboutissement de leurs démarches que de pouvoir participer à notre régime démocratique.
Ceux qui ont pris part aux tables rondes organisées par la sénatrice McPhedran savent que les jeunes appréhendent cette éventualité avec respect et prudence. Pendant la semaine qui leur est consacrée, les jeunes Autochtones ont pris contact avec les parlementaires afin de leur faire part des priorités auxquelles ils voudraient que le gouvernement donne suite. Parmi les thèmes qui revenaient le plus souvent, mentionnons la santé mentale et le bien-être; l’eau, la terre et l’énergie; l’accès à une éducation de qualité et adaptée culturellement; de même que la souveraineté autochtone et la revitalisation culturelle.
Ces jeunes ont su exprimer clairement leurs inquiétudes et en expliquer les répercussions sur leur vie. Ils percevaient leur travail comme une grande responsabilité et un privilège et tous, ils ont indiqué avoir conscience qu’ils ont un rôle à jouer pour leur collectivité, pour leur pays et pour la planète.
Chers collègues, en 1991, la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis a étudié la question de l’abaissement de l’âge du vote à 16 ans. Les raisons de soutenir un changement comprenaient le fait d’éviter la discrimination fondée sur l’âge en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés et d’encourager la jeunesse pendant que les jeunes étaient encore à l’école et pouvaient participer à l’éducation civique.
En 1991, la commission a mené des sondages d’opinion publique sur l’abaissement de l’âge du vote et a constaté que la plupart des Canadiens, y compris les adolescents, n’étaient pas en faveur de cette proposition. La commission a suggéré de réexaminer de temps à autre la question de l’âge du vote à mesure de l’évolution de la société.
La société a changé au point que les jeunes et les adultes sont très préoccupés par leur avenir, et à juste titre. Le moment est venu de réexaminer l’abaissement de l’âge du vote.
Chers collègues, les Canadiens ont passé leur vie dans l’endroit le plus prospère et le plus privilégié de la planète. Dans son livre Thinking like a Mountain, Robert Bateman déclare, à la page 32 :
Agir de manière noble consiste certainement à prendre de bonnes décisions pour l’avenir de nos petits-enfants, mais bon nombre d’entre nous semblent avoir oublié comment penser ainsi. Un dicton autochtone nord-américain pourrait nous éclairer à ce sujet : « Il ne faut pas seulement planifier l’avenir de la génération actuelle, mais bien celui des sept prochaines générations. » Est-ce que cela semble impossible à une époque où les négociants à la bourse planifient les quelques prochaines secondes, où les PDG gèrent principalement leur entreprise en fonction des bénéfices à court terme, et où les politiciens semblent incapables de se projeter au-delà des prochaines élections?
Il poursuit ainsi :
Mais les questions provenant de la vision opposée sont plus fortes : pouvons-nous vraisemblablement continuer de vivre comme nous le faisons actuellement, en dilapidant les ressources de la planète comme s’il n’y avait pas de lendemain? Notre espèce va-t-elle survivre à sa propre surconsommation incessante?
Depuis plusieurs années, les jeunes s’inquiètent de l’état de la Terre mère, une situation à laquelle nous sommes parvenus à la suite de décisions prises par des adultes. Il est temps que nous travaillions avec nos jeunes, avec ceux qui vont hériter de ce monde.
Le bulletin d’information d’avril 2021 du David Asper Centre for Constitutional Rights contenait un article rédigé par Sara Nematallah intitulé « Voting Age Challenge Update », dans lequel elle écrivait ceci :
En novembre 2019, le David Asper Centre for Constitutional Rights et l’organisme Justice for Children and Youth, en partenariat avec d’autres organismes de protection des droits des enfants, ont entrepris de remettre en question l’âge minimal pour voter établi dans la Loi électorale du Canada, L.C. 2000, ch. 9. [...]
Le David Asper Centre utilise la décision Frank c. Canada rendue par les tribunaux en 2019 pour démontrer le caractère inconstitutionnel de l’âge actuel du vote. Le jugement rendu indique ce qui suit :
Étant donné que le vote est un droit politique fondamental, et que le droit de voter est un principe de base de la démocratie canadienne, toute restriction du droit de vote doit faire l’objet d’un examen minutieux et ne saurait être tolérée sans justification impérieuse.
Dans la lettre d’information du David Asper Centre, des experts dans les domaines des théories politiques, du droit international, des sciences cognitives et des sciences sociales ont appuyé l’argument suivant :
[...] les écrits théoriques, les études sociologiques et les études scientifiques produits par ces experts dissipent de nombreuses idées erronées sur le vote des jeunes, notamment le mythe selon lequel les jeunes de moins de 18 ans n’ont pas la capacité cognitive de voter, et le mythe voulant que permettre aux jeunes de voter nuit à la démocratie en permettant à des jeunes non informés et non intéressés de participer au processus démocratique [...] Les études en sciences sociales sur les processus psychologiques et cognitifs de la dernière décennie démontrent que les jeunes, dès l’âge de 14 ans, développent des capacités de raisonnement complexe de niveau adulte qui leur permettent de prendre des décisions de vote de la même qualité que les adultes, et les pays où l’âge de voter a été abaissé en dessous de 18 ans ont rapporté que les jeunes sont un groupe de votants engagés et informés et que leur inclusion n’a pas eu d’effets négatifs sur la démocratie. Bien que ces experts abordent la question de l’âge de voter sous divers angles, ils s’entendent généralement sur le fait qu’utiliser l’âge de 18 ans comme indicateur de la compétence démocratique est arbitraire et ne peut être justifié par ce que nous savons actuellement de la prise de décision chez les jeunes.
Chers collègues, nous devons accepter le fait qu’il n’existe aucune justification convaincante pour continuer à étouffer la voix des jeunes. Au contraire, nous devons les écouter et les aider à devenir des citoyens du monde épanouis en sachant qu’ils ont la capacité de réussir et en les aidant à devenir politiquement actifs. Nous pouvons le faire en soutenant le projet de loi S-201.
N’oublions pas non plus la question des mineurs matures et de leur capacité à prendre des décisions de vie ou de mort, que nous savons imminente. On leur permettra en effet de prendre des décisions de vie ou de mort, mais ils n’auront pas le droit de vote.
Honorables sénateurs, j’ai le privilège de vous faire part des propos que j’ai entendus en 2015, avant que je ne devienne sénatrice, de la part d’élèves de trois classes de 6e année à l’école intermédiaire Bruce, dans la division scolaire de Winnipeg. Ils m’avaient invitée à leur parler des pensionnats autochtones, et ils avaient réalisé une initiative appelée Projet du cœur.
Dans l’une des salles de classe, un groupe avait fabriqué un inukshuk à partir de tuiles individuelles, et le jeune garçon qui était le porte-parole m’a dit :
Nous avons choisi l’inukshuk parce qu’il s’agit d’un signe qui montre le chemin. Nous avons choisi des couleurs en accord avec les valeurs. Les bras sont rouges parce qu’ils représentent le courage et la compassion. Les jambes sont bleues parce que le bleu représente la paix; on ne peut pas mener sans la paix.
Le dernier garçon à prendre la parole ce jour-là a dit :
Je ne peux pas partir sans vous montrer mon travail. Ma tuile a pour thème le yin et le yang. La vie est une question d’équilibre et nous vivons des expériences positives et négatives. Nous apprenons à accepter cette réalité et nous apprenons des deux, car même les expériences négatives ont beaucoup à nous apprendre.
Ces élèves sont probablement à l’université aujourd’hui, mais je dirais qu’ils se préparent depuis longtemps à devenir des citoyens socialement responsables.
Honorables collègues, les jeunes se font dire constamment qu’ils sont les leaders de demain, qu’ils sont notre avenir. N’ayons pas peur d’aller au-delà de ces discours creux afin de prendre des mesures concrètes et de ne pas seulement leur servir de vaines paroles. Si nous voulons prendre au sérieux notre responsabilité de représenter les personnes qui sont marginalisées et qui n’ont pas voix au chapitre, alors nous devons relever le défi en agissant dès maintenant. Que nous osions l’admettre ou pas, nous devons reconnaître que les jeunes font partie des sans-voix que nous devons nous efforcer de représenter. Y a-t-il un moyen plus efficace et plus utile de le faire qu’en appuyant une initiative qui les pousse à devenir des citoyens engagés capables d’exercer leur droit de faire des choix qui auront une incidence sur leur vie et sur leur avenir?
Donnons aux jeunes et aux spécialistes la possibilité de se faire entendre en renvoyant ce projet de loi à un comité. Profitons de cette occasion de nous pencher sur cette forme de discrimination fondée sur l’âge pour veiller à ce que les jeunes soient traités d’une façon qui favorise la compréhension, le respect, l’équité, la diversité, l’inclusion et la réconciliation. Kinanâskomitin, merci.