DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — Hommages
L'honorable Mobina S. B. Jaffer
12 juin 2024
Honorables sénateurs, nous saluons aujourd’hui une femme exceptionnelle et une sénatrice distinguée à la veille de sa retraite après 23 ans de service au Sénat du Canada. L’honorable Mobina Jaffer est un modèle pour beaucoup d’entre nous. Elle fait partie de ces grands noms auxquels nous faisons référence bien après leur départ de cette assemblée.
Mobina a en effet eu un parcours exceptionnel, elle qui, très tôt, a été victime de racisme et d’exclusion. Née en Ouganda dans une famille chiite ismaélienne pratiquante, ses parents et leurs six enfants ont été contraints de fuir la dictature ougandaise au début des années 1970. Cette expérience a fait d’elle une femme forte et résistante qui, dès sa jeunesse, a compris les torts épouvantables causés par le racisme, l’intolérance et la négation de la primauté du droit. Il ne fait aucun doute que cela l’a mise sur la bonne voie. Elle est ensuite devenue avocate et a servi la démocratie grâce à son travail de sensibilisation, puis en tant que parlementaire.
Ayant reçu une excellente formation à l’Université de Londres, où elle a obtenu une licence en droit, elle est la première femme d’origine sud-asiatique à exercer en pratique privée au Canada. Son excellence a été reconnue en 1998 lorsqu’elle a été nommée conseillère de la reine. Son expérience et sa connaissance approfondie des conflits internationaux ont, par la suite, été très utiles à notre pays, quand elle est devenue envoyée spéciale du Canada pour la paix au Soudan. Elle a aussi présidé le Comité canadien sur les femmes, la paix et la sécurité et, à ce titre, a été appelée à plaider devant le Conseil de sécurité des Nations unies.
Depuis bientôt huit ans, j’ai le privilège de côtoyer Mobina et de constater à quel point elle est une femme de principes pour qui la famille, la loyauté, le respect, l’éthique, la foi et l’ouverture aux autres sont fondamentaux. J’ai le privilège de côtoyer une grande Canadienne, une patriote, pour qui l’avenir du pays, l’essor de la démocratie et le vivre-ensemble dans notre société multiculturelle importent au plus haut point.
Le respect des deux langues officielles, un droit linguistique fondamental, est pour elle le ciment de l’unité du pays. C’est d’ailleurs avec fierté qu’elle nous a souvent parlé de sa famille, de sa fille, de son fils et de ses petits-enfants, qui s’expriment tous dans les deux langues officielles.
Je n’oublierai jamais son accueil chaleureux le 2 décembre 2016 à l’occasion de mon assermentation. Elle s’est approchée de moi et, dans un excellent français, elle m’a immédiatement offert son aide, comme une grande sœur. Depuis, elle m’accompagne contre vents et marées, ne manquant jamais de me témoigner sa sympathie et ses encouragements. Elle l’a fait pour moi et pour bon nombre d’entre nous.
Le temps est venu de remercier ma grande sœur et de lui dire au revoir. Ce n’est qu’un au revoir parce que nous nous retrouverons. Au nom du Groupe des sénateurs indépendants, je salue son excellence, son mérite et ses réalisations. Je profite de l’occasion pour lui exprimer notre appréciation pour avoir eu le privilège de servir avec elle et pour remercier son époux, ses enfants et ses petits-enfants de nous l’avoir prêtée. Je vous souhaite de nombreuses années de bonheur avec votre famille.
Je dis à ma sœur Mobina de savourer la satisfaction du devoir accompli. Chère Mobina, par mon entremise, tous vos collègues du Groupe des sénateurs indépendants vous félicitent de la mission accomplie. Nous vous aimons et vous serez toujours considérée comme l’une des nôtres. Merci.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage et exprimer ma reconnaissance à la sénatrice Mobina Jaffer, l’une des membres les plus travaillantes, les plus dévouées et les plus aimables de la Chambre haute du Canada.
La sénatrice Jaffer a été nommée sur la recommandation de l’ancien premier ministre Chrétien en 2001. Il convient de noter qu’elle a été la première sénatrice musulmane à siéger à la Chambre rouge.
Au cours des 23 dernières années, Mobina a été membre de nombreux comités sénatoriaux, et plus récemment présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Toutefois, son cœur et une grande partie de son travail ont toujours été axés sur les droits de la personne. Comme vous le savez, elle a fui l’Ouganda en 1972 pendant la période d’expulsion d’Idi Amin. Elle a été personnellement témoin d’horreurs perpétrées dans un pays où l’on ne respectait pas les droits de la personne. D’ailleurs, elle a failli perdre son père et son mari lors de la purge.
Quelle chance pour nous tous que le père de Mobina ait choisi le Canada comme destination après que sa famille a fui l’Ouganda. Sa carrière d’avocate — elle a été la première avocate sud-asiatique au Canada, comme l’a déjà mentionné notre collègue la sénatrice Saint-Germain —, son travail comme envoyée spéciale du Canada pour la paix au Soudan, sa présidence du Comité canadien sur les femmes, la paix et la sécurité et ses nombreuses invitations à s’exprimer sur des questions relatives aux droits des femmes et à la sécurité des femmes témoignent de la haute considération qu’elle a pour les causes qui lui tiennent le plus à cœur.
La sénatrice Jaffer est une source d’inspiration pour de nombreuses jeunes femmes, en particulier des immigrantes, qui ont été témoins de ses succès et qui ont vu dans son parcours des possibilités qui s’offrent à elles. Mobina croit sincèrement que son rôle est de redonner au suivant. Elle est au service du Canada et des Canadiens. Ses interventions, que ce soit au Sénat, aux comités, dans le cadre de conférences ou lors de discussions individuelles avec des collègues, sont toujours respectueuses et marquantes. Son amour pour le Canada, le pays qu’elle a choisi, sa lutte inlassable pour les droits de la personne, en particulier les droits des femmes, et sa défense vigoureuse de sa Colombie-Britannique bien-aimée ont toujours été au premier plan de sa carrière. Mobina ne relâche jamais ses efforts, même lorsqu’elle doit composer avec des problèmes de santé.
Sur une note personnelle, Mobina, je tiens à vous remercier de votre soutien et, surtout, de votre amitié, que vous m’avez offerte dès le premier jour de mon arrivée. Vous me manquerez beaucoup.
Alors que vous quittez le Sénat, je vous souhaite, en mon nom personnel et en celui du bureau du représentant du gouvernement, une retraite sous le signe du bonheur. Cela dit, je ne doute pas que, même en passant du temps avec votre mari, Nuralla, vos fils et vos petits-enfants — une occupation qui trône au sommet de votre liste de priorités —, vous serez amenée à relever de nouveaux défis.
Votre présence nous manquera à tous ici, Mobina. Merci.
Honorables sénateurs, au nom du caucus conservateur et de l’opposition au Sénat, ainsi qu’en tant que sénatrice venant aussi de la Colombie-Britannique, je prends la parole pour rendre hommage à notre collègue qui prend sa retraite, l’honorable Mobina Jaffer. Sénatrice Jaffer, c’est avec des sentiments partagés que nous vous rendons hommage parce que nous nous réjouissons que vous puissiez passer plus de temps avec vos proches, mais nous sommes également tristes que vous nous quittiez bientôt.
C’est un fait que notre collègue Mobina Jaffer est non seulement la première sénatrice musulmane à avoir été nommée au Sénat du Canada, mais elle est aussi la première sénatrice d’origine africaine et sud-asiatique, ainsi que la première femme d’origine sud‑asiatique à pratiquer le droit au Canada. Elle fait effectivement figure de pionnière dans l’histoire canadienne à bien des égards.
Tout au long de son illustre carrière, la sénatrice Jaffer a constamment prouvé son dévouement et son engagement envers le service public. Ses efforts inlassables pour défendre les droits de la personne et les gens marginalisés ont laissé une marque indélébile sur notre institution, ainsi que dans les annales de l’histoire du Canada. La sénatrice Jaffer a joué un rôle de premier plan dans la défense des droits des femmes. Ses efforts ont façonné des politiques. Elle a donné le goût à d’innombrables personnes de se mettre au service du public et elle a suscité chez d’autres personnes le désir de changer les choses.
Personnellement, je me souviens de mes débuts en tant que sénatrice nouvellement nommée. À la fin d’une séance, je me rappelle que la sénatrice Jaffer s’est arrêtée pour me parler alors que nous sortions du Sénat. Les sages paroles que vous avez prononcées avec sincérité et compassion à ce moment-là résonnent encore dans ma tête :
Soyez patiente. Vous finirez par savoir ce que vous êtes censée faire en tant que sénatrice. Une question ou une cause vous trouvera. Soyez patiente, et vous la découvrirez le moment venu.
Votre sourire chaleureux et votre gentillesse m’ont donné l’assurance que je trouverais bientôt mes repères et, effectivement, la première cause qui m’a menée à occuper un rôle déterminant — être la championne des anciens combattants de la guerre de Corée — m’a trouvée quelques mois plus tard. D’autres problèmes m’ont trouvée depuis, comme vous l’avez dit.
J’ai parfois répété à d’autres vos sages paroles, qui me guident encore aujourd’hui en me rappelant ce que je dois faire pour donner une voix à ceux qui n’en ont pas dans le cadre de mon travail de sénatrice dans ma région.
Sénatrice Jaffer, je vous remercie de votre amitié et de l’attention sincère que vous portez aux autres et à moi. Je vous remercie de votre service exemplaire. Votre dévouement envers notre pays ne sera pas oublié, et même si votre présence au Sénat du Canada nous manquera, nous vous souhaitons une belle retraite bien méritée. Que ce nouveau chapitre soit synonyme pour vous de santé, de joie et de temps de qualité avec vos proches.
Honorables sénateurs, si l’on effectuait un sondage parmi les parlementaires aujourd’hui afin de déterminer quel sénateur est le plus susceptible d’avoir une école nommée en son honneur, je suis certain que le nom de la sénatrice Jaffer serait le premier sur la liste.
Mes collègues leaders vous ont fait part des réalisations de la sénatrice Jaffer et de toutes les fois où elle a été une pionnière au cours de sa carrière. J’aimerais vous faire part de quelques réflexions personnelles sur cette femme et parlementaire remarquable.
Quand j’étais jeune, j’ai vécu en Ouganda pendant la période mouvementée où a eu lieu le coup d’État militaire d’Idi Amin en 1971 pour prendre le pouvoir. J’ai vu de mes propres yeux la terreur et le chaos qui ont mené à la déportation par décret en 1972.
La sénatrice Jaffer a souvent raconté son vécu et ses difficultés en tant que réfugiée, de même que les difficultés qu’elle a dû surmonter quand elle est venue au Canada. Cette femme remarquable et, bien sûr, toute sa famille, ont fait preuve de courage pour quitter leur pays natal, sous la contrainte, afin de reconstruire leur vie à partir de rien dans un pays étranger. Cela en dit long sur la force de caractère, la persévérance et la détermination de la sénatrice Jaffer. Je suis honoré de siéger en tant que l’un de ses pairs dans cette enceinte.
Je pense que sa foi inébranlable est l’une des caractéristiques qui lui ont permis de transformer l’adversité en réussite. En tant que musulmane ismaélienne, son engagement envers sa communauté et son héritage est remarquable et admirable. Dans sa volonté à faire preuve de générosité en prenant soin des autres et en offrant, sans hésitation, son temps et ses conseils avisés afin d’aider ses collègues du Sénat, elle a illustré les principes de sa foi.
Elle a été une véritable ambassadrice de sa communauté à travers de nombreuses déclarations dans cette enceinte, en montrant l’exemple grâce à sa compassion et à sa sollicitude envers ceux qui peuvent rarement se faire entendre. En tant que championne de la diversité, du multilinguisme et des droits de la personne, elle a ouvert la voie à ceux qui la suivront en remplissant son devoir de servir. Un jour, elle a écrit qu’elle devait son succès, ses honneurs, ses récompenses et ses réalisations aux valeurs qui lui avaient été inculquées en tant que musulmane ismaélienne et disciple de l’Aga Khan.
Voici une chose que j’ai découverte à mon arrivée au Sénat, il y a 11 ans : la sénatrice Jaffer est probablement la personne qui a le plus participé aux interpellations dans toute l’histoire du Sénat. Elle s’est servie très efficacement de ces occasions pour attirer l’attention sur des politiques et des causes qui nécessitaient l’attention de la nation. Je garde un souvenir très clair des « journées de la sénatrice Jaffer » au Sénat, alors qu’elle intervenait à propos de multiples interpellations dans la même journée. Elle parlait extrêmement vite, pour être certaine que tout ce qui devait être dit figurerait dans le compte rendu des débats, à l’intention d’une grande variété d’intervenants et d’audiences. C’était avant que les débats du Sénat ne soient télévisés et avant les médias sociaux. Comme on l’a déjà dit, elle a été la voix de ceux qui, au Canada et dans le monde entier, avaient besoin d’être entendus, d’être compris et d’avoir de l’espoir.
Sénatrice Jaffer, c’est aujourd’hui votre 8 401e journée de service au Sénat. Pendant chacune de ces journées, le Sénat et vos collègues sénateurs ont pu bénéficier de votre présence, de votre amitié, de votre contribution aux débats, de votre courtoisie, de votre générosité et de votre soutien indéfectible envers votre pays, le Canada.
Au nom du Groupe des sénateurs canadiens, je vous souhaite une retraite heureuse et reposante auprès de votre famille et de vos amis. Que Dieu vous protège, Mobina.
Honorables sénatrices et sénateurs, je suis heureux de participer à cet hommage à l’honorable Mobina Jaffer, qui célébrera demain le 23e anniversaire de sa nomination au Sénat.
En juin 2001, le Sénat était plutôt partisan. En la choisissant, le premier ministre Jean Chrétien nommait non seulement une femme engagée qui avait occupé divers postes au sein du Parti libéral, dont celui de présidente de la Commission libérale féminine nationale (CLFN), et qui avait été candidate lors des élections fédérales de 1993 et 1997, mais aussi la première sénatrice née en Afrique, la première sénatrice d’origine sud-asiatique et la première sénatrice musulmane : trois premières la même journée.
Elle sera ensuite une membre influente du Caucus libéral du Sénat, puis deviendra sénatrice non affiliée en 2018, avant de joindre les rangs du Groupe des sénateurs indépendants (GSI) en 2019.
C’est durant cette période de transition — sa période de transition — que j’ai fait la connaissance de Mobina et que j’ai découvert une voix passionnée pour les droits de la personne, la justice et la lutte contre la discrimination sous toutes ses formes.
Ces dernières années, j’ai eu le plaisir de travailler en étroite collaboration avec elle au sein du comité directeur du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. J’apprécie le leadership dont elle fait preuve au sein du comité, sa compréhension de la loi, son engagement à mettre fin à la discrimination et son insistance constante pour effectuer des analyses comparatives entre les sexes plus et pour obtenir davantage de données afin de mieux mesurer les répercussions de nos lois sur divers groupes et communautés.
Je tiens également à souligner que, en 2019, la sénatrice Jaffer a marrainé le projet de loi C-48, Loi sur le moratoire relatif aux pétroliers. Au Sénat, le vote final a été serré, mais il a marqué une étape importante dans l’affirmation de la Convention de Salisbury et il représente un important geste de réconciliation avec les Premières Nations de la région côtière.
En ce qui me concerne, la contribution la plus marquante de la sénatrice Jaffer reste sa défense vigoureuse des droits de la personne, du dialogue et de la solidarité. Dans le contexte actuel de la montée des discours haineux et du racisme, je conclurai en citant une déclaration des principaux groupes religieux de la Colombie‑Britannique incluse dans son premier discours en 2001, après le 11 septembre :
Nous exhortons tous les Canadiens à conjuguer leurs prières et leur bonne volonté, à se prémunir contre les préjugés et la haine, à s’entraider et à s’épauler.
Chers collègues, nous devons toujours garder ces mots à l’esprit.
Au nom des sénateurs indépendants du Groupe progressiste du Sénat, je vous souhaite, mon amie, une heureuse retraite et j’espère que vous pourrez passer du temps avec votre famille pendant que vous vous reposerez et que vous planifierez votre prochaine contribution à la société canadienne.
Mobina, à la réunion du Groupe canado-africain du Sénat tenue lundi, nous avons commencé à faire nos adieux, car il s’agissait de notre dernière réunion avec vous. La plupart d’entre nous n’ont tout simplement pas pu dire au revoir sur Teams sans verser une larme.
Je me suis parfois sentie seule dans cet endroit, mais, depuis le jour où je vous ai rencontrée, vous avez fait en sorte que je me sente moins seule. Parfois, lorsque je me sens comme cela dans cette enceinte, parce que nous sommes toutes les deux petites, je me redresse pour jeter un coup d’œil par-dessus la grosse pile de livres juste pour vous apercevoir; je me sens immédiatement plus calme, plus forte et mieux accueillie ici.
Ce n’est pas un endroit facile pour certains d’entre nous. Je sais que cela n’a pas été facile pour vous non plus. Ce que j’aime le plus chez vous, c’est votre franc-parler. Vous dites les choses exactement comme elles sont, sans essayer d’enjoliver quoi que ce soit. Vous me dites les choses franchement, mais en me rappelant toujours que vous me soutenez et que nous sommes sœurs. Ensuite, vous me dites que j’ai besoin de rouge à lèvres et vous me laissez partir. C’est parfait, parce que c’est exactement ce que vous êtes.
Ce qui m’impressionne le plus, c’est votre style de leadership. Vous êtes intelligente, mais modeste; pleine d’assurance, mais gentille; drôle, mais vulnérable; ferme, mais attentionnée. Nous avons pu le constater au centre de détention de Laval. Vous discutiez avec une détenue africaine. Vous étiez directe et ferme. L’instant d’après, vous avez commencé à parler en swahili. Nous avons vu la gentillesse et la douceur transparaître. Vous équilibrez tous ces traits importants de manière si belle et si habile, avec aisance et grâce.
De prime abord, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles était un environnement très intimidant pour moi. Lors de ma toute première réunion, j’ai failli faire demi-tour et partir. Comme vous êtes une avocate d’expérience — et conseillère de la reine, en plus —, vous avoir aux commandes en tant que présidente, et à mes côtés en tant que membre du comité, a facilité les choses. Vous m’avez appris à occuper cet espace.
Il y avait une jeune bénévole de ma campagne pour la mairie nommée Jersey, qui me ressemblait. Elle avait la même couleur de peau et les mêmes cheveux que moi. Une fois, dans la voiture, alors que nous faisions du porte-à-porte, elle s’est approchée du siège avant, m’a tiré sur les cheveux et m’a dit avec assurance : « Un jour, moi aussi, je me présenterai à la mairie. » C’est à ce moment‑là que j’ai compris l’importance de la représentation. Dans ma vie, je n’ai pas eu de mentors qui me ressemblaient.
À mon arrivée au Sénat, j’étais comme cette jeune fille sur la banquette arrière, alors que vous, Mobina, étiez la conductrice, ma mentore. Vous m’avez guidée et m’avez montré que j’avais aussi ma place ici.
Votre petit-fils, Ayaan Jeraj, m’a invitée à rencontrer les élèves de sa classe pendant le mois de l’histoire des Noirs. J’ai accepté avec grand plaisir. Il vous ressemble beaucoup. C’est un garçon au grand cœur qui a de l’éloquence, l’esprit vif et un bon sens de l’humour. Vos enfants et vos petits-enfants font aussi partie de votre legs. Vous leur avez montré la voie à suivre. Je suis sûre qu’ils vous ont aussi appris une chose ou deux.
Je suis très triste à l’idée de ne plus vous voir en train de consulter une pile d’ouvrages. Je sais cependant que je pourrai toujours vous téléphoner au besoin. Peu importe si vous partez à la retraite, vous resterez toujours ma mentore. Je sais que vous continuerez de me guider dans des moments difficiles, de m’encourager à poursuivre mon chemin et de m’apprendre beaucoup de choses.
Mobina, ma sœur, je vous souhaite de profiter pleinement de cette retraite bien méritée.
Honorables sénateurs, je prends la parole pour rendre hommage à la sénatrice Mobina Jaffer et j’ai du mal à exprimer mon admiration, mon respect et mon amour en seulement quelques mots.
Mobina, ma sœur, vous avez été une présence forte à la Chambre rouge. Vous avez un palmarès impressionnant de premières, comme nous l’avons entendu : la première sénatrice musulmane, la première sénatrice née en Afrique et la première sénatrice d’origine sud-asiatique.
Je sais qu’une génération de femmes d’Asie du Sud vous considère comme un modèle. En effet, vous avez ouvert la voie à beaucoup d’entre nous, femmes racisées.
Lorsque j’ai été nommée au Sénat en 2010, vous avez été la première à m’accueillir et à me soutenir. Depuis, je me suis adressée à vous à de nombreuses reprises pour obtenir des conseils en sachant que je pouvais toujours compter sur vous pour me guider.
Chers collègues, comme beaucoup d’entre vous le savent, notre travail comporte des défis. Lorsque j’ai eu besoin d’une oreille attentive, Mobina a été là pour moi. Je vous remercie pour votre amitié et votre soutien.
Parfois, les mots étaient inutiles entre nous, Mobina. Il suffisait de nous regarder, et je savais exactement ce que nous ressentions à propos d’un sujet de discussion.
Je voudrais citer Hafez, le poète persan, qui a dit : « Ton cœur et le mien sont de très, très vieux amis. »
J’ai admiré votre dévouement à la défense des droits de la personne au Canada et à l’étranger ainsi qu’à la célébration de la diversité de notre pays.
Vous n’avez jamais eu peur de poser des questions percutantes en comité ni de vous attaquer à des sujets difficiles à la Chambre rouge. Défendre les droits des populations vulnérables n’est pas une tâche facile, et pourtant, Mobina, vous avez continué à parler des droits des travailleurs migrants, de l’autonomie corporelle des femmes et de la sécurité, pour ne nommer que ces sujets-là.
En tant qu’immigrante au Canada, vous avez exprimé votre amour pour les langues maternelles, dont vous comprenez l’importance. Vous parlez vous-même six langues couramment.
En plus de défendre le bilinguisme dans tout le pays, vous avez également adopté le multiculturalisme de notre pays en présentant le projet de loi S-214, Loi instituant la Journée internationale de la langue maternelle. J’ai été ravie d’être la porte-parole pour ce projet de loi, car je crois que cette loi peut unifier davantage notre pays en soulignant que les langues maternelles de tous les Canadiens méritent d’être honorées et célébrées.
Votre présence m’a donné de la force. Nous avons partagé beaucoup de bons moments; nous avons voyagé ensemble, nous avons ri ensemble. Personne ne sait les défis auxquels nous avons fait face ensemble.
Au moment où vous vous apprêtez à prendre votre retraite, je ne veux pas vous dire au revoir, ma chère sœur. Au lieu de cela, je citerai Rumi :
Les adieux ne sont que pour ceux qui aiment avec les yeux. Parce que pour ceux qui aiment avec le cœur et l’âme, il n’y a pas de séparation.
Merci.
Honorables sénateurs, le récit du parcours qui nous a menés dans cette enceinte diffère pour chacun d’entre nous. Néanmoins, notre vie avant de siéger au Sénat influence le type de travail que nous faisons ici et notre présence façonne l’institution et les personnes qui nous succéderont.
J’interviens aujourd’hui pour rendre hommage à la sénatrice Mobina Jaffer qui prend sa retraite.
La sénatrice Jaffer a été nommée au Sénat en 2001 par le premier ministre Jean Chrétien. Sa formation en droit et ses antécédents personnels, après avoir quitté son pays d’origine, l’Ouganda, l’avaient bien outillée en tant que membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Au cours de son mandat au sein de ce comité, la sénatrice Jaffer a dirigé de nombreuses études importantes, dont une sur l’exploitation sexuelle des enfants et la nécessité d’une intervention nationale.
La sénatrice Jaffer s’est également portée à la défense du bilinguisme. Elle a non seulement participé à de nombreuses initiatives visant à encourager l’utilisation du français et de l’anglais dans les collectivités partout au Canada, mais elle a également parrainé le projet de loi S-214, qui désigne le 21 février comme la Journée de la langue maternelle.
La célébration du multilinguisme renforce la société diversifiée et multiculturelle du Canada. Mobina parle elle-même six langues, mais, plus important encore, elle écoute et comprend dans six langues.
En tant que Canadienne née à l’étranger, la sénatrice Jaffer représente bien tous ceux qui, pour des raisons très diverses, ont choisi de s’établir au Canada.
Comme d’autres l’ont dit, elle a été la première sénatrice musulmane, la première sénatrice née en Afrique et la première sénatrice d’origine sud-asiatique. Ainsi, elle a fait figure de précurseure pour ceux qui viennent d’arriver au Canada et qui aspirent à faire carrière en politique.
Mobina, ce fut un plaisir de travailler avec vous dans cette enceinte. Je vous remercie de votre amitié. Je vous souhaite de passer plus de temps à relaxer et à profiter de votre famille. Je suis sûr que votre mari Nuralla, vos enfants et vos petits-enfants, dont nous entendons beaucoup parler, seront heureux de vous voir près d’eux.
Nos nombreuses conversations et nos nombreux moments d’hilarité vont me manquer, mon amie. Ce fut un privilège de travailler avec vous.
Honorables sénateurs, je prends la parole afin de souligner les nombreuses contributions que notre collègue l’honorable Mobina Jaffer a faites au Sénat et sur la scène internationale, elle qui prendra bientôt sa retraite.
De nombreuses personnes ont déjà parlé des incroyables réalisations de la sénatrice Jaffer. Qui est donc cette Wonder Woman? La sénatrice Jaffer a immigré au pays dans sa jeunesse; c’est une avocate, une épouse, une mère et une grand-mère. Mobina est une féroce défenseure des droits de la personne, une diplomate pacifiste, une conférencière de renommée mondiale, une militante pour la paix, une femme d’affaires et — comme nous l’avons récemment appris — une productrice de volaille. Il n’y a pas d’autre choix que de qualifier une personne qui a accompli autant de choses de « Superwoman ». Mobina nous cache peut-être même qu’elle sait voler.
De sa voix douce, mais puissante, Mobina nous a transmis à de nombreuses reprises au Sénat le témoignage de filles et de femmes victimes d’agressions. Si elle a pu le faire, c’est parce qu’elle a une oreille compatissante et qu’elle est capable de se mettre à la place des autres et de communiquer ce qu’ils ont vécu de façon marquante. Elle a éveillé notre volonté de nous battre pour ces femmes. Elle s’est servie de son titre de sénatrice pour les défendre. Mobina peut écouter ces femmes en faisant preuve de beaucoup de compassion parce que, comme elle a elle-même été victime de discrimination, elle les comprend.
Je connais Mobina depuis 30 ans et j’admire le dévouement entier qu’elle apporte à chaque entreprise dans laquelle elle se lance.
Avant que je ne fonde en larmes, sur une note plus humoristique, la plupart des femmes rêvent d’avoir une pièce-penderie pour leurs chaussures. Eh bien, mes amis, je crois que Mobina a une pièce‑penderie pour les bijoux, ce qui me rend très jalouse.
Chère amie, chère Mobina, tu vas beaucoup me manquer. J’espère que tu passeras une belle retraite aux côtés de ton époux, de tes enfants et de tes petits-enfants qui t’aiment. Tu auras toujours une place chez Gary et moi et dans nos cœurs. Je t’embrasse, mon amie. Bonne retraite.
Sénatrice Jaffer, si tout le monde dit à quel point vous êtes gentille, cela doit être vrai. Étant donné que c’est l’une des phrases qui figurent dans mes notes, je vais commencer par cela. Ce n’est pas tous les hommages qui incluent la phrase « Vous avez été si gentille », mais c’est le cas du vôtre.
Nous avons entendu que la sénatrice Jaffer a été nommée en 2001 par le premier ministre libéral le plus conservateur du Canada, Jean Chrétien. Elle est fière — et c’est un sujet dont nous avons plaisanté au fil des ans, moi en tant que fier conservateur et la sénatrice Jaffer en tant que fière libérale. Elle est heureuse de le dire ouvertement, même en ces temps troublés.
La sénatrice Jaffer était la vice-présidente du Sous-comité du budget des dépenses du Sénat et des budgets des comités lorsque j’en étais le président en 2014 ou 2015. Ensemble, nous avons réalisé deux choses importantes qui perdurent pour le Sénat. La première était la budgétisation à base zéro, qui nous a permis de ramener le budget du Sénat à zéro et ensuite de l’accroître jusqu’à ce qu’il atteigne le niveau qu’il devrait avoir; il ne s’agissait pas seulement d’augmentations.
La deuxième était les travaux préliminaires sur la création du Comité permanent de l’audit et de la surveillance. La sénatrice Jaffer s’est trouvée au cœur de l’action juste après la publication du rapport du vérificateur général. Sénatrice Jaffer, je me souviens bien des occasions où nous parlions au téléphone le soir de ce qui s’était passé le jour même ou de ce qui se produirait le lendemain. Vous étiez toujours prête à veiller à ce que les changements exigés par le Sénat soient apportés. Ces changements perdurent.
Par ailleurs, je ne savais presque rien sur les musulmans ismaéliens. La sénatrice Jaffer m’a renseigné à ce sujet. Depuis, je me suis rendu compte qu’elle est l’une des principales porte-parole des musulmans ismaéliens au Canada. Des milliers, voire des millions, de personnes lui en sont reconnaissantes. Je vous en remercie.
En guise de conclusion, sénatrice Jaffer, vos contributions ont été précieuses, et, comme je l’ai dit, elles survivront évidemment à votre départ. Merci.
Comme la sénatrice Clement l’a dit plus tôt, nous avons tous pleuré lundi en lui disant au revoir. Je vais essayer de ne pas pleurer aussi.
Je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à ma sœur africaine, la sénatrice Mobina Jaffer. Elle est la première Africaine d’origine sud-asiatique — vous l’avez tous rappelé — et la première femme musulmane à avoir été nommée au Sénat du Canada.
Lorsque j’ai été nommée à cette auguste Chambre, je me suis précipitée pour lire sur les parcours des sénateurs. C’est ainsi que j’ai constaté que je n’étais pas la première Africaine d’origine à devenir sénatrice au Canada. Cependant, en parlant de la sénatrice Jaffer à des amis qui ne connaissent pas la diversité multiethnique et raciale du continent africain, plusieurs m’ont dit que la sénatrice Jaffer ne pouvait pas être considérée comme une Africaine, parce qu’elle n’était pas Noire, parce qu’elle était d’origine sud-asiatique.
Cela témoigne bien de la méconnaissance du continent africain, que plusieurs pensent être un continent habité seulement par des Noirs. Il m’a suffi de parler à la sénatrice Jaffer pour constater à quel point elle est fière de ses origines ougandaises et africaines. Chers collègues, on peut quitter l’Afrique, peu importe comment ni dans quelles conditions, mais l’Afrique ne nous quitte jamais. Arrivée au Canada comme réfugiée, l’honorable sénatrice Jaffer a consacré sa carrière à représenter et à défendre les intérêts de tous les Canadiens, en particulier ceux qui, comme elle, ont trouvé un nouveau foyer dans ce pays d’immigration qui nous a tous accueillis. Elle est arrivée au pays comme réfugiée, mais elle a tout fait, vous l’avez dit, et j’aurais pu répéter tout ce que vous avez dit.
Sénatrice depuis 23 ans, elle a su utiliser son histoire unique et sa voix puissante toujours chaleureuse pour inspirer et influencer les politiques qui ont façonné notre pays, pour que ce Canada que nous aimons tous devienne inclusif et diversifié. Merci.
La sénatrice Jaffer est une vraie maman africaine, qui incarne des valeurs de résilience, de sagesse, de compassion et de générosité. J’ai d’ailleurs porté ce sari que vous avez tous admiré pour lui montrer à quel point j’apprécie ses multiples cadeaux. Ma sœur Mobina, après autant d’années au service de ta communauté et des Canadiens, il est grand temps de profiter de ta retraite bien méritée auprès de Nuralla, de toute ta famille, tes petits-enfants et tes enfants qui sont présents ici. Nuralla, amour de sa vie, tu t’occuperas bien de Mobina au quotidien. Je sais que vous avez déjà prévu un long voyage en Afrique de l’Est, et je vous souhaite d’en profiter. Merci, Mobina.
Honorables sénateurs, je suis convaincue que la sénatrice Jaffer, notre amie, collègue et corévolutionnaire, ne se souvient pas de notre première rencontre.
Au début des années 1990, l’honorable Bertha Wilson, la première femme nommée à la Cour suprême du Canada, présidait le Groupe de travail de l’Association du Barreau canadien sur l’égalité des genres. À cette époque, la sénatrice Jaffer pratiquait le droit. Elle a déjà raconté que, malgré ses décennies d’expérience à être appelée à la barre et son titre d’éminente conseillère de la reine, les juges et les autres avocats la confondaient souvent avec une accusée ou une greffière. Les suppositions sexistes et racistes de ce genre disparaissent lentement, mais c’est grâce à vos nombreuses réalisations que les esprits évoluent.
Nous pouvons toujours compter sur vous, sénatrice Jaffer, pour dénoncer la discrimination dont vous et bien d’autres personnes avez été victimes et sensibiliser la population à ce sujet. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir toujours persisté, avec votre courage, vos talents, vos compétences et votre détermination, à ouvrir la voie à d’autres, comme un grand nombre de nos collègues l’ont exprimé.
Au cours des décennies qui ont précédé ma nomination, j’ai souvent comparu devant les comités du Sénat, en particulier le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. À l’époque, comme aujourd’hui, et maintenant en tant que présidente, sénatrice Jaffer, vous avez toujours su gouverner d’une main de fer. Toutefois, cela ne ressemble pas à une main de fer parce qu’elle est toujours revêtue du gant de velours le plus doux, le plus luxueux et le plus chic. Vous présidez sur des sujets divers, souvent très difficiles, en faisant en sorte que chacun se sente à l’aise et écouté. Vos interventions sont claires, perspicaces, stimulantes et toujours empreintes d’autorité, mais également de gentillesse, de grâce et de compassion.
Lorsque je suis entrée à la Chambre haute en 2016, votre générosité et votre gentillesse, dont tant d’autres ont parlé, à mon égard ont été immédiates et appréciées. En plus de me présenter à de nombreuses personnes, Mobina, vous avez veillé à ce que je sois invitée à autant de réunions et d’événements qu’il m’était possible de caser chaque jour et chaque semaine, même les semaines où je ne siégeais pas. Puis vous m’avez dit : « Il est temps de ralentir, Kim. Vas-y doucement. Ne t’occupe pas de tant de choses ». C’était vrai, que nous rencontrions des dignitaires étrangers ou que nous rendions visite à des écoliers, ainsi que ce jour merveilleux où nous avons dansé sur la pelouse de la Colline pour la Journée rose.
Votre intérêt sincère et votre esprit de collaboration font de vous une collègue, une mentore et une amie formidable et très appréciée. Vous avez également participé activement et fréquemment à l’initiative Des sénateurs vont en prison, ce qui a beaucoup plu au personnel des services pénitenciers et aux prisonniers — et à moi également.
Sénatrice Jaffer, nous vous présentons tous nos meilleurs vœux à l’aube du prochain chapitre de votre incroyable parcours. Nous vous souhaitons de ralentir et de relaxer, comme vous le méritez, et de faire tout ce qui vous rend heureuse, avec votre famille bien‑aimée et votre immense cercle d’amis et d’admirateurs.
Je remercie votre famille pour le privilège et la responsabilité qu’elle a eus de partager la femme extraordinaire que vous êtes avec tous ces gens. Je tiens à vous remercier alors que vous vous entamez une nouvelle phase de votre vie. Je ne peux pas imaginer les aventures et les projets extraordinaires que vous entreprendrez, mais j’espère pouvoir encore vous accompagner de temps en temps, mon amie.
Merci.
Honorables sénateurs, sénatrice Jaffer, lorsque les premiers ministres appellent des sénateurs dans cette auguste Chambre, ils ont parfois raison et parfois tort. Dans le cas de la sénatrice Jaffer, Jean Chrétien a trouvé le bon filon. Cela ne fait aucun doute dans mon esprit.
Dans ces hommages, nous avons passé en revue toutes les premières réalisations et les distinctions de la sénatrice Jaffer. L’une d’entre elles, qui n’a pas été mentionnée, mais qui doit l’être, c’est qu’elle fut choisie comme immigrante canadienne de l’année par le magazine Canadian Immigrant. Pourrait-il y avoir une candidate plus méritante? Cela indique également qu’elle est l’exemple même d’une grande Canadienne puisque, bien entendu, le Canada est une nation où nous sommes tous soit des immigrants, soit des enfants d’immigrants. La sénatrice Jaffer est un modèle qui montre que le travail acharné, les principes et la persévérance peuvent mener quelqu’un, depuis les débuts les plus modestes, à des réalisations étonnantes et à de grandes récompenses.
À mon arrivée au Sénat, des sénateurs m’ont influencé — toutes les figures de géant qui siégeaient déjà au Sénat —, et la sénatrice Jaffer était sans contredit de ce nombre. Elle était discrète, gentille, sincère et brillante. Peu importe son affiliation politique — elle a été tour à tour libérale, indépendante libérale, progressiste et non affiliée —, une chose a toujours distingué la sénatrice Jaffer : du début jusqu’à la fin de sa carrière sénatoriale, elle a toujours défendu ardemment les causes auxquelles elle croit. En fait, elle s’est battue pour ces causes, sans se soucier de la politique, de la position du leader de son parti ou des conflits entre les caucus. J’ai pu le constater personnellement.
Je l’ai également vue intervenir avec véhémence pour la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit, et ce, de manière inébranlable. Si j’ai embrassé quelques-unes de ces causes au fil des ans, sénatrice Jaffer, c’est parce que vous avez été pour moi une mentore et un modèle à cet égard.
Je dois dire ceci : chaque fois que je faisais de bonnes choses, la sénatrice Jaffer me prenait à part et me disait « sénateur Housakos, c’est très bien ». Cependant, chaque fois que je faisais des choses avec lesquelles elle n’était pas d’accord, elle me prenait à part et me sermonnait avec véhémence. Dans toutes les joutes oratoires que j’ai menées lors de débats sur des politiques publiques au Sénat, seule la sénatrice Jaffer parvenait à me donner invariablement l’impression, lorsque je tournais les talons après qu’elle m’ait fait des remontrances, qu’elle avait raison et que je devais m’améliorer. C’est une qualité particulière de la sénatrice Jaffer.
Sénatrice Clement, vous avez tout à fait raison. Le Sénat est implacable, tout comme la politique et la vie publique. J’ai vécu des moments difficiles ici, et la sénatrice Jaffer m’a pris à part — elle l’a fait à au moins deux reprises — et m’a fait profiter de sa sagesse avec gentillesse et sincérité. Sénatrice Jaffer, cela m’a marqué et m’a certainement donné la force de continuer. J’apprécierai toujours votre sagesse et votre gentillesse.
Dans quelques jours, vous quitterez cette enceinte en tant que sénatrice pour la dernière fois. Beaucoup de vos collègues auront du chagrin et déploreront votre départ. Je célébrerai, comme beaucoup d’autres — je célébrerai votre héritage, qui est si puissant et si fort qu’il se perpétuera bien longtemps après votre départ.
Je vous remercie. Que Dieu vous bénisse, ainsi que votre famille.
Honorables sénateurs, je suis très heureux de participer aux hommages rendus à la sénatrice Mobina Jaffer cet après-midi. J’ai la chance de la connaître depuis de nombreuses années — des décennies en fait —, car même si nous venons de régions différentes du pays, nous avons tous deux travaillé à faire avancer les questions d’immigration et de diversité longtemps avant notre arrivée au Sénat.
Dans cette enceinte, la sénatrice Jaffer a souvent parlé du rôle important des ismaéliens au Canada — sa communauté —, qui sont des disciples de Son Altesse l’Aga Khan. Dans cet esprit, je voudrais profiter de l’occasion pour souligner quelques caractéristiques de cette communauté dans le monde et au Canada.
Au niveau mondial, il s’agit d’une petite communauté qui se distingue par sa vision globale et par son leadership généreux et éthique dont la sénatrice Jaffer nous a souvent parlé.
L’ismaélisme est une branche de l’islam chiite, dirigée par le prince Karim Aga Khan, qui en est le 49e chef. Le réseau de développement de l’Aga Khan, une agence de développement international réputée, œuvre à l’élimination de la pauvreté dans le monde, à la promotion du pluralisme et à l’avancement de la condition féminine. Il se concentre principalement sur l’amélioration de la qualité de vie des personnes de toutes confessions dans des régions clés de l’Asie et de l’Afrique.
L’Aga Khan est citoyen d’honneur du Canada. Depuis longtemps, il visite notre pays et travaille avec des Canadiens. J’ai particulièrement apprécié l’un de ses célèbres commentaires sur la diversité du Canada : « Le monde a besoin d’autres pays comme le Canada. »
La sénatrice Jaffer a fidèlement parlé de Son Altesse chaque année en décembre à l’occasion de l’anniversaire de celui-ci et a souligné le travail important qu’il accomplit dans le monde entier. En effet, l’Aga Khan a collaboré avec des gouvernements canadiens pendant de nombreuses années. Il a notamment collaboré avec le premier ministre Pierre Elliott Trudeau pour faire venir des Asiatiques expulsés de l’Ouganda au début des années 1970, dont Mobina Jaffer et sa famille. Il a ouvert le Jamatkhana ismaélien de Burnaby avec le premier ministre Brian Mulroney en 1985. Il a travaillé sur le pluralisme avec le premier ministre Jean Chrétien en 2002. Surtout, le premier ministre Stephen Harper lui a accordé la citoyenneté honorifique en 2010. L’Aga Khan continue d’être une source de conseils sur les questions internationales et d’amitié pour le premier ministre Justin Trudeau. Bien sûr, il s’agit de dates historiques qui figurent également dans le calendrier de la sénatrice Jaffer.
Sur une note personnelle, Mobina, je vous remercie des conseils et des encouragements que vous m’avez prodigués au cours de l’année et demie qui s’est écoulée depuis ma nomination au Sénat. Sénatrice Jaffer, merci d’avoir servi le Canada et d’avoir souligné les grandes contributions des ismaéliens canadiens à ce pays.
Honorables sénateurs, comment qualifier notre très chère sénatrice Jaffer, une véritable sœur pour nous tous?
Majestueuse, énergique, déterminée et empathique.
Éloquente, précise et méticuleuse.
Partisane de l’importance d’allier la gentillesse et l’humanité pour fortifier l’âme.
Arborant un sourire éclatant et forte d’une concentration sans faille, elle illustre l’élégance de la parole et du contenu.
Animée d’une passion sans borne pour la défense des droits, elle donne dans cette vénérable enceinte un reflet fidèle de la jurisprudence canadienne. Elle habilite les oubliés et elle offre un clair sentiment de restitution.
Dotée d’une connaissance encyclopédique de tous les éléments, anciens ou contemporains, qui façonnent notre histoire, elle donne une subtile impression de saisir ce qui semble insaisissable et dissimulé derrière les murs de l’histoire.
Chère Mobina, vous avez certainement apporté une précieuse contribution au Sénat.
Vos interventions ont apporté un équilibre rafraîchissant aux discours parfois sombres tenus devant cette assemblée à laquelle nous avons tous appris à nous adapter.
Vos élans de joie triomphale laissent derrière vous un halo coloré qui influencera notre assemblée pendant des années.
Je suis fier de vous avoir appelée ma sœur et vous me manquerez. Vous avez joué un rôle de catalyseur et m’avez ouvert les yeux sur la profonde incidence de notre rôle de Chambre de second examen objectif qui devrait toujours être guidée par l’équité et la transparence.
J’admirerai toujours votre sagesse et vos principes. Vous êtes un phare lumineux et un solide point d’ancrage pour la communauté ismaélienne si chère à votre cœur ainsi que pour Son Altesse, l’Aga Khan, à qui vous offrez un rayonnement mondial.
Mobina, chaque fois que vous avez pris position à l’égard d’une question importante, vous n’avez jamais tergiversé un seul instant.
Merci. Qu’Allah vous bénisse. As-salam alaikum.
Honorables sénateurs, c’est un honneur de prendre la parole aujourd’hui pour rendre hommage à une honorable sénatrice qui est aussi une amie précieuse, une sœur, une leader et une mentor, j’ai nommé Mobina Jaffer.
Sénatrice Jaffer, je vous félicite de votre brillante carrière, qui a été parsemée de nombreux moments forts, comme votre nomination à titre de conseillère de la reine, votre rôle de présidente du Comité des droits de la personne et du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, ainsi que votre rôle d’émissaire spéciale du Canada pour la paix au Soudan. Comme beaucoup d’autres intervenants l’ont mentionné, vous avez souvent été la première à accomplir des choses marquantes et fantastiques.
Vous avez façonné votre carrière avec persévérance et détermination malgré des obstacles considérables, notamment le fait d’avoir été expulsée de votre pays, l’Ouganda, sans oublier les problèmes de santé qui vous ont empêchée de travailler aussi librement que vous le souhaitiez, ainsi que les problèmes posés par le racisme et le sexisme présents au Sénat. Malgré ces difficultés et ces défis, vous êtes devenue la législatrice efficace, forte et bienveillante que nous connaissons aujourd’hui.
Ces difficultés ne vous ont jamais réduite au silence. Vous n’avez jamais vacillé. Vous avez su transformer votre douleur en détermination. Je suis heureuse que vous n’ayez jamais abandonné. Malgré ces difficultés, vous êtes restée fidèle à vous-même, à votre famille, à votre foi et à vos valeurs.
Vous êtes restée humble et aimable malgré votre vive intelligence, votre sens politique, votre vaste expérience et les liens étroits que vous avez entretenus. Peu de gens peuvent passer des décennies dans le domaine politique et maintenir leur intégrité comme vous l’avez fait.
Votre héritage est considérable, chère amie, non seulement en raison des travaux législatifs que vous avez dirigés, mais également en raison de l’incidence que vous avez eue sur les personnes que vous avez rencontrées. Voilà pourquoi nous vous aimons et ne vous oublierons jamais.
Je suis honorée d’avoir travaillé avec vous en ma qualité de présidente du Groupe canado-africain du Sénat. Au nom de notre groupe, je vous félicite et vous remercie. Nous sommes fiers d’avoir pu vous compter parmi nos membres fondateurs. Nous espérons faire honneur à votre héritage.
Merci, chère amie. Vous me manquerez terriblement. Bonne retraite!
Honorables sénateurs, chaque jour, en entrant dans cette enceinte, je me rappelle le privilège que j’ai d’être au Sénat et de me réunir avec vous tous. Aujourd’hui, je suis particulièrement honorée de me joindre à mes collègues pour rendre hommage à notre chère amie la sénatrice Mobina Jaffer.
Les réalisations de la sénatrice Jaffer ont été soulignées par nombre d’entre vous. J’aimerais en souligner une seule : l’adoption de la Loi concernant les Guides du Canada.
Honorables sénateurs, j’ai choisi de mettre en lumière cette réalisation particulière de Mobina, non seulement parce que l’adoption de ce projet de loi a été l’un de ses premiers défis en tant que nouvelle coordinatrice du Groupe des sénateurs indépendants, mais aussi parce que les guides sont une organisation qui me tient à cœur et qui est également chère à de nombreux membres de cette enceinte : les sénatrices Deacon, Moncion et Sorensen — toutes des guides.
À l’époque où nous étions guides, une partie de notre loi disait : « La guide est une amie pour tous et une sœur pour toute autre guide. » C’est le cas de Mobina, comme en témoignent les hommages rendus dans cette enceinte. Mobina a été une sœur pour moi depuis le début. Souvent, lorsque nous souffrions du syndrome de l’imposteur, elle me soulignait, ainsi qu’à d’autres, en nous accueillant chaleureusement, que chaque voix dans cette auguste assemblée est importante. Elle soulignait l’importance de représenter nos régions et nos minorités, surtout lorsque cette région est une minorité, comme c’est parfois le cas.
Une guide doit être digne de confiance et d’une loyauté inébranlable. Lorsque nous étions guides, nous jurions fidélité à Dieu, à la reine et à notre pays. Notre honorable collègue est entièrement fidèle à elle-même, à ses convictions et au Canada. En tant que sénatrice, elle remplit fidèlement le mandat qu’on lui a confié de faire de son mieux pour offrir « [son] avis et [son] aide dans toutes les affaires importantes et ardues qui peuvent intéresser l’état et la défense du Canada ».
L’une des grandes responsabilités de la guide est de s’efforcer de lever le camp en laissant les lieux en meilleur état qu’à son arrivée. Sénatrice Jaffer, sachez que c’est exactement ce que vous avez fait. Vous avez laissé les lieux en meilleur état en laissant votre marque dans cette enceinte, et vous resterez toujours, pour le Canada et pour nous tous, une honorable sénatrice.
Sénatrice Jaffer, vous avez servi votre pays, les Canadiens, les Britanno-Colombiens, les musulmans, les immigrants et tout le monde dans cette enceinte avec dignité et honneur. Après nous avoir donné l’exemple avec bonté, sagesse et patience, vous quittez le Sénat en ayant véritablement fait de cette Chambre un endroit meilleur.
Tout en vous rendant hommage, nous devrions également remercier sincèrement tous les membres de votre famille, qui vous ont appuyée tout au long de votre parcours pour que vous puissiez être des nôtres. Sénatrice Jaffer, cette semaine, nous avons entendu des sénateurs citer des paroles de chansons, et je m’excuse pour la chanson accrocheuse que je m’apprête à citer. Comme c’est un jour où nous vous disons au revoir en vous offrant nos meilleurs vœux, cela me rappelle la dernière chanson que nous chantions autour du feu de camp lorsque nous étions guides :
[...] Je veux prendre mon temps,
[...] M’attarder plus longuement,
[...] Juste un peu plus longtemps avec vous.
[...] En cette soirée formidable,
[...] Il me semble incroyable
[...] Que ce soit...
... notre dernière avec vous.
Soyez assurée que vous avez laissé les lieux en meilleur état en vous montrant loyale, honorable et digne de confiance. Vous nous manquerez.
Je vous remercie du legs que vous laissez derrière vous. Merci, chère amie.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui, sur le territoire de la nation algonquine anishinaabe, pour me joindre au concert d’éloges au Sénat qui exprime notre admiration, notre respect et notre affection pour notre collègue adorée et remarquablement distinguée, l’honorable Mobina Jaffer.
En août 1972, le dictateur brutal de l’Ouganda, Idi Amin, a expulsé des dizaines de milliers de personnes d’origine sud‑asiatique, dont Mobina Jaffer, sa famille et de nombreux membres de sa communauté musulmane ismaélienne. En réaction à la crise, l’Aga Khan a demandé son aide à son ami et condisciple de Harvard, le premier ministre Pierre Elliott Trudeau. Ce que l’Ouganda a perdu, le Canada l’a gagné, puisque la sénatrice Jaffer et quelque 6 000 autres musulmans ismaéliens ont immigré au Canada. Elle n’a jamais oublié l’Afrique.
Nommée au Sénat du Canada en 2001, Mobina a été la première représentante de plusieurs groupes au Sénat : première sénatrice musulmane, première sénatrice née en Afrique, première sénatrice d’ascendance sud-asiatique. Elle est fière d’être Canadienne et loyale envers son pays. Cette fierté s’exprime nettement dans son engagement envers le bilinguisme et dans son propre attachement à l’apprentissage et à la pratique du français, en particulier dans cette enceinte. Cet attachement est ancré dans le respect qu’elle porte à ses compatriotes.
— et pour nos collègues francophones en particulier.
Honorables sénateurs, la sénatrice Mobina Jaffer, en véritable tisserande, a créé au fil des ans un manteau aux mille et une couleurs. En écoutant tous les hommages qui lui sont rendus aujourd’hui, nous avons entraperçu la trame de l’histoire remarquable de notre honorable collègue, surtout dans le cadre de ses fonctions au Sénat du Canada. Cependant, ces hommages ne nous ont permis d’entrevoir qu’une infime portion de la vie de la sénatrice Jaffer et des nombreuses facettes de sa personnalité. Nous savons déjà qu’elle fait preuve d’une élégance et d’un goût impeccable non seulement dans ses choix vestimentaires, mais aussi dans la vie en général.
Si je pense à ses valeurs et à ses réalisations, qui sont, si je puis me permettre, de véritables bijoux, nous voyons que celles-ci parent la trame de sa vie de façon plus impressionnante encore. Permettez‑moi de suivre un fil de cette trame.
Il s’agit de son engagement à l’égard des droits fondamentaux dans le contexte de la sécurité nationale et des mesures de lutte contre le terrorisme. Pour ceux qui ne le savent pas, la sénatrice Jaffer a été nommée au Sénat quelques jours après les attentats du 11 septembre. Ce fut une période sombre et anxiogène pour tous les Canadiens, qui a été particulièrement difficile pour les musulmans. Ces derniers étaient pointés du doigt et surveillés de près en raison des inquiétudes liées au terrorisme. En ce qui concerne la lutte contre le terrorisme et le projet de loi antiterroriste qui a été déposé en 2015 — le projet de loi C-51 —, la sénatrice Mobina Jaffer avait déclaré ceci aux médias : « Ce projet de loi n’assurera pas notre sécurité, ce n’est qu’un exercice de rhétorique qui nous divisera. »
Elle avait ajouté : « Je veux que nous travaillions ensemble, que nous nous protégions les uns les autres ».
Compte tenu des discussions actuelles sur la sécurité nationale, les craintes d’ingérence étrangère, et j’en passe, nous ferions bien de suivre le rappel de la sénatrice Jaffer.
Chers collègues, il est rare qu’une lieutenante-gouverneure soit présente ici même au Sénat pour reconnaître une collègue qui nous quitte et lui rendre hommage. Je suis très honoré de pouvoir, en son nom, dire quelques mots à la sénatrice Jaffer.
Voici une citation de Son Honneur Janet Austin :
Expulsée d’Ouganda en 1972 par le dictateur Idi Amin, elle a trouvé refuge au Canada et a mené une vie au cours de laquelle elle a accompli de grandes choses au service à la population, guidée par les principes de sa foi musulmane ismaélienne.
Tout au long de sa vie, elle a défendu avec conviction le pluralisme, les droits de la personne, la paix internationale et la prévention de la violence à l’encontre des femmes et des enfants.
Merci, sénatrice Jaffer, pour tout ce que vous avez fait pour favoriser la compréhension entre les différentes cultures.
Merci.
Chers collègues, la sénatrice Jaffer parle six langues avec sa voix, mais elle en parle des milliers avec son cœur.
Ardente défenseure des droits de la personne, particulièrement des droits des femmes, la sénatrice Jaffer a également montré un engagement indéfectible dans la défense des droits linguistiques tout au long de son parcours remarquable au Sénat.
Chère Mobina, vous avez notamment fait preuve d’un soutien inestimable lors de l’étude sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles au Comité sénatorial permanent des langues officielles, alors que vous étiez membre du comité directeur. Vous avez aussi fait des plaidoyers percutants concernant la nécessité de renforcer l’accès à l’immersion dans votre province, la Colombie‑Britannique. Dans une déclaration datant du 5 octobre 2017 vous affirmiez ce qui suit, et je cite :
[…] la crise de l’éducation en français et de l’immersion française dans ma province est sévère. Les jeunes, les immigrants et tous les Franco-Colombiens ont droit à une garantie quant à la possibilité de s’exprimer dans la langue de leur choix. Ce n’est pas seulement un enjeu d’éducation, c’est d’abord une question d’identité canadienne.
Madame la sénatrice Jaffer, nous comprenons pourquoi la communauté francophone de la Colombie-Britannique a toujours apprécié et reconnu votre travail, comme en fait foi ce message reçu hier de la part de la Fédération des francophones de la Colombie‑Britannique (FFCB), qui m’a prié de le partager avec vous dans cette Chambre. J’en cite un extrait :
[…] la sénatrice Jaffer a toujours été un appui déterminé pour notre communauté et nous nous rappelons avec émotion son enthousiasme pour la promotion de la Francophonie, loin d’Ottawa, sur les rives du Pacifique. Au nom de la communauté francophone, la présidente actuelle de la FFCB, Mme Marie-Nicole Dubois, lui est reconnaissante pour toutes ses années d’implication pour la pérennisation du fait français.
L’ancienne présidente de la FFCB, Mme Padminee Chundunsing, qui a eu le plaisir et le privilège d’œuvrer avec la sénatrice Jaffer pendant de longues années, tenait aussi à la remercier de son soutien et de ses interventions dans des dossiers comme l’immersion francophone, la bonification du Plan d’action pour les langues officielles et les centres d’emploi.
Très chère Mobina, tout au long de votre carrière, vous vous êtes également battue pour les droits des immigrants et des jeunes. Votre grande capacité d’écoute, votre esprit collaboratif et votre sens de la diplomatie font de vous un exemple pour nous tous.
Vous avez ce talent exceptionnel d’affirmer haut et fort vos points de vue, tout en gardant un large sourire et en faisant preuve d’une gentillesse et d’une élégance admirables.
Très chère Mobina, je conclurai en reprenant un extrait d’une déclaration que vous avez livrée dans cette Chambre en mars 2017 à l’occasion de la tenue du Parlement jeunesse francophone de la Colombie-Britannique. Vous affirmiez alors ceci, et je vous cite :
[…] je voudrais rappeler l’importance que nous devons accorder à l’opinion et aux différentes idées formulées par nos jeunes. Il est de notre devoir, en tant que sénateurs, de les écouter, de les encourager à s’impliquer et de leur rappeler que, peu importe leur genre, leur orientation sexuelle, leur religion ou leur âge, ils ont un rôle à jouer dans notre société; celle d’aujourd’hui, mais aussi celle de demain.
Nous prenons bonne note de votre message que nous faisons nôtre, madame la sénatrice. Nous vous souhaitons la santé, la joie et une multitude de moments heureux auprès des vôtres, à la hauteur de la générosité de votre cœur. Merci.
Honorables sénateurs, tant de choses ont été dites. Je tiens à mon tour à rendre hommage à l’honorable sénatrice Mobina Jaffer, féministe, passionnée et bienveillante.
Nous nous sommes connues il y a cinq ans et demi dans des circonstances difficiles. La sénatrice Jaffer était la marraine du projet de loi C-48, portant sur l’interdiction de pétroliers tout le long de la côte nord de la Colombie-Britannique, un travail qu’elle a dû interrompre abruptement pour des raisons médicales. Je n’avais pas d’expérience au Sénat et j’étais vice-présidente du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, où ce projet de loi controversé était étudié. On m’avait demandé de tenir la marraine informée, donc j’appelais régulièrement Mobina. Si je sentais qu’elle avait assez d’énergie, je lui parlais de l’atmosphère au comité, des conflits, des motions et de mes erreurs. Malgré ses épreuves, la sénatrice Jaffer me prodiguait des conseils et me disait surtout de ne pas trop m’en faire, car après tout, ce n’était que de la politique. Mobina restait toujours digne. Je la connaissais bien peu, mais son parcours et sa résilience m’ont vite conquise.
Plus tard, nous nous sommes retrouvées au comité dont elle était présidente, le célèbre Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, alors que je défendais mon projet de loi contre l’exposition des enfants à la pornographie en ligne. La sénatrice Jaffer était une présidente bienveillante, mais elle m’a remise à ma place à quelques reprises, notamment quand je me suis emportée contre un témoin. Mobina Jaffer a toujours cru que les projets de loi d’intérêt public du Sénat étaient des initiatives légitimes et elle a traité le mien avec sérieux. Le comité, formé de plusieurs juristes — peut être un peu trop —, était divisé. Cela n’a pas dû être facile pour elle en coulisse d’organiser cette étude en pleine pandémie et de s’assurer que les arguments pour et contre soient entendus équitablement.
En marge de tout cela, la sénatrice Jaffer a souvent eu des mots d’encouragement à mon endroit. Je me rappelle avoir songé, à un certain moment, à abandonner la bataille avant même l’étude article par article, étant donné le déluge de critiques. Elle m’a encouragée à aller jusqu’au bout, même si la possibilité d’échec était bien présente, parce que, disait-elle, il fallait protéger les enfants de ces préjudices en ligne et trouver la bonne façon de le faire. C’était à moi de trouver la façon de le faire. L’abandon n’était pas une option pour elle.
Bref, Mobina, je tiens en terminant à vous exprimer toute l’admiration et la tendresse que j’ai pour vous, chère collègue et presque voisine au Sénat, vous qui, par votre résilience, m’avez donné une leçon de vie. Bon vent, mon amie.
Honorables sénateurs, je me joins à vous pour saluer la carrière remarquable et la contribution durable de notre amie Mobina Jaffer. J’ai rencontré Mobina il y a 33 ans, en 1991, quand le juge Douglas Campbell, directeur du Western Judicial Education Centre, l’a invitée à venir en Saskatchewan pour rencontrer des partenaires qui concevaient un programme de formation judiciaire de trois jours sur la discrimination raciale, la discrimination sexuelle et les questions autochtones.
Lors de la conférence, Mobina a fait un discours tout à fait novateur. Nous avons aidé les juges à comprendre le contexte social dans lequel s’inscrivaient leurs décisions. Les juges peuvent errer quand ils ne comprennent pas le contexte social. Mobina a clairement présenté le concept d’intersectionnalité et la façon dont il peut avoir un effet cumulatif négatif sur les personnes racisées et marginalisées, en maintenant une iniquité perpétuelle.
L’histoire de Mobina est gravée dans ma mémoire. Elle a expliqué qu’elle avait travaillé pendant de nombreuses années contre la discrimination fondée sur le sexe et qu’après avoir fait d’énormes progrès, elle s’est retrouvée en tête de peloton avec d’autres femmes. C’est alors qu’elle a appris qu’elle devait commencer une autre bataille parce qu’elle était une femme de couleur.
Les leçons qu’elle a tirées de ces expériences ont été utiles et ont contribué directement à un nouveau modèle de formation judiciaire au Canada. Notre collègue, la sénatrice Jaffer, est une force d’action et de changement. Elle a toujours fait entendre haut et fort la voix des personnes marginalisées et vulnérables, y compris celle des minorités religieuses et des réfugiés. Voici ce que la sénatrice Jaffer a déclaré à propos de sa propre expérience :
Il y a très peu d’endroits dans le monde où un réfugié peut devenir sénateur — le Canada est le seul endroit que je connais où cela peut se produire [assurément] : cela m’est arrivé à moi.
Elle incarne la contribution des réfugiés qui défendent et renforcent les valeurs canadiennes que sont l’inclusion, la diversité et l’égalité des chances.
En effet, l’Aga Khan a fait remarquer que le Canada est la société pluraliste la plus réussie au monde. Mobina Jaffer est l’incarnation positive de cette observation.
Alors qu’elle prend sa retraite du Sénat, je réfléchis à la manière dont elle a enrichi le tissu même de la société canadienne. Mobina a eu une influence profonde sur la formation des juges et sur moi en tant que sénateur dès le premier jour.
Mobina, merci pour vos services extraordinaires, vos efforts passionnés pour défendre les causes qui vous sont chères et votre engagement inébranlable envers la justice. Félicitations, Mobina, pour votre illustre carrière.
Honorables sénateurs, très honorable sénatrice Jaffer, remontons dans le temps ensemble, il y a 20 ans. Imaginons que vous êtes une chercheuse à l’Université York et vous avez obtenu une petite subvention pour travailler avec des femmes afghanes qui ont fui les talibans pour bâtir une vie au Canada. Avec elles, vous organisez un atelier de développement du leadership. Ces femmes afghanes, bientôt canadiennes, vous demandent d’inviter des femmes parlementaires pour discuter des façons d’être des leaders au Canada. Vous envoyez donc une invitation à une longue liste de députées et de sénatrices. Deux députées et une sénatrice acceptent. La parlementaire de la Chambre rouge qui a accepté est la sénatrice Jaffer.
Lorsque je lui ai présenté les plages horaires possibles pour une présentation d’une heure, elle m’a demandé : « Quelle est la durée du programme? Combien de temps dure l’atelier? » Lorsqu’elle a appris que des femmes et des filles afghanes de différentes générations se rencontraient pendant deux jours entiers à l’université, puis se rendaient à Ottawa pour participer à une journée de réunions parlementaires, elle m’a répondu sans tarder : « Je serai là. » Lorsque j’ai cherché à confirmer sa présence pour une heure entière, elle a dit : « Je serai claire : j’y serai pour toute la durée de l’événement — c’est trop important. »
En plus de rester avec nous pendant les deux jours de l’atelier, la sénatrice Jaffer a elle aussi pris le train de Toronto à Ottawa. Pendant le parcours, nous avons continué les activités de développement. Elle m’a prise à part pour me dire ce qui devait se passer à notre arrivée à Ottawa ce soir-là.
Ainsi, ce soir-là, à l’hôtel d’Ottawa, alors que nous étions tous réunis pour préparer notre programme parlementaire, nous avons suivi le conseil de Mobina. Les femmes non afghanes se sont mises en retrait, et les femmes afghanes se sont mises en avant pour bien montrer que les voix des leaders le lendemain sur la Colline du Parlement seraient celles des femmes afghanes.
Je suis tellement reconnaissante pour les sept années que j’ai passées dans cette enceinte avec vous, Mobina, ainsi que pour votre sagesse, votre générosité, votre courage et vos innombrables gentillesses à mon égard et à l’égard de tant d’autres. Chère Mobina, merci, meegwetch, asante.