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DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — La Journée mondiale contre le travail des enfants

10 juin 2021


L’honorable Julie Miville-Dechêne

Honorables sénateurs, je prends la parole pour marquer la Journée mondiale contre le travail des enfants, qui aura lieu ce samedi. Alors que ce fléau connaissait un recul de près de 40 % de 2000 à 2016, le travail des enfants a recommencé à augmenter et la pandémie accélère la tendance.

Cent soixante millions d’enfants sont forcés de travailler partout sur la planète, et près de la moitié d’entre eux le font dans des conditions dangereuses. En raison du confinement et de la perturbation des chaînes d’approvisionnements, les écoles ont fermé et des parents ont perdu leur gagne-pain, ce qui a poussé plus d’enfants à mettre leur sécurité, leur dignité et leur développement en péril pour aider leur famille.

Human Rights Watch vient de tracer un portrait saisissant dans son rapport intitulé Je dois travailler pour manger, et pour lequel les témoignages de 80 enfants du Ghana, de l’Ouganda et du Népal ont été recueillis. Avant la pandémie, des milliers d’enfants travaillaient déjà dans les mines d’or du Ghana, même si la loi l’interdit. Il y a pire : les enfants expliquent qu’ils concassent l’or, s’étouffent avec la poussière, et manipulent du mercure toxique. Solomon, âgé de 14 ans, dit qu’il a mal partout, car il transporte des poches de minerai du fond de la mine à la surface, 12 heures par jour.

Les enfants ont faim. En Ouganda, Florence, âgée de 13 ans, a commencé à travailler, car la faim la tenaillait, sa famille survivant de porridge et de thé. Florence et ses huit frères et sœurs ont cessé d’avoir accès aux repas offerts par l’école, qui a fermé.

Au Népal, durant le confinement, plusieurs enfants ont confié avoir commencé à travailler au moins 10 heures par jour dans des manufactures de tapis. Dans le rapport, Gita, âgée de 14 ans, explique la difficulté du tissage : ses doigts brûlent à force de nouer des fils, ses yeux lui font mal, car elle doit suivre un patron, et elle a vraiment mal aux jambes à force d’être assise.

La lecture de ce rapport m’a rendue honteuse. Comment peut-on, en tant que Canadiens, être au courant et profiter du travail des enfants, et même l’accepter sans tout faire pour combattre ce fléau lié notamment à la pauvreté?

La pandémie s’avère aussi dramatique pour les filles en Asie du Sud. Les mariages précoces et forcés ont plus que doublé l’an dernier en Indonésie, augmentant ainsi les risques pour les filles de vivre dans la pauvreté, la violence, et la maladie, car elles tombent enceintes trop jeune. Les parents, eux-mêmes appauvris, disent aux petites filles : « Ton travail, c’est d’être une épouse et une mère. »

Il n’y a pas de solution simple à cette réalité tragique. Le Canada a les moyens de contribuer davantage à l’aide directe aux familles pauvres. Notre gouvernement et nos entreprises doivent également faire preuve de diligence dans leur chaîne d’approvisionnement pour débusquer le travail des enfants et les aider à retourner à l’école.

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