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Recours au Règlement

Report de la décision de la présidence

25 avril 2023


L’honorable Leo Housakos [ + ]

J’invoque le Règlement au sujet des articles 2-9(1) et 2-9(2) du Règlement du Sénat. Votre Honneur, mon recours au Règlement se rapporte à une intervention au Sénat qui, à mon avis, a provoqué un différend entre deux sénateurs. Au cours du débat dans cette enceinte, il y a un sénateur qui, à mon avis, a été calomnié et offensé. C’est quelque chose qui est visé par l’article 2-9(2) du Règlement.

Votre Honneur, cela fait presque 15 ans que je siège au Sénat, et je n’ai jamais vu autant de partisanerie et d’attaques personnelles aussi malveillantes que ces derniers temps. Nous sommes au Parlement. Au fil des ans, nous avons eu des discussions très acerbes. J’étais Président de cette assemblée quand bon nombre de ces débats acerbes entre le gouvernement et l’opposition ont eu lieu. Je vais vous dire que l’opposition libérale n’y allait pas de main morte à l’époque. On y trouvait des débatteurs redoutables, des gens comme le sénateur Mercer, la sénatrice Fraser et le sénateur Mitchell. La sénatrice Cordy jouait alors très bien son rôle au sein de l’opposition officielle.

Nous siégions tard au mois de juin et l’opposition faisait ce qu’elle pensait devoir faire au nom des Canadiens. Nous étions majoritaires dans cette Chambre et nous faisions ce que nous pensions avoir été mandatés pour faire par les élus. Pourtant, à aucun moment nous n’avons mis en doute les motivations de chacun. À aucun moment nous n’avons accusé les leaders de l’opposition officielle de mentir ou de nous induire en erreur. C’est pourtant ce qui s’est passé ce soir, Votre Honneur.

Un sénateur était en train de parler, le Président lui avait donné la parole — un honorable sénateur — et, dans le feu d’un débat politique partisan, nous savons qu’il y a du chahut et que nous nous laissons parfois emporter, mais je pense qu’il est tout à fait inacceptable qu’un sénateur parle de manière désobligeante d’un autre sénateur, en mettant notamment en doute son intégrité et en affirmant que le rappel au Règlement que ce sénateur a présenté à ce moment-là est un mensonge.

Je sais que vous avez récemment entrepris une réflexion approfondie sur ce qui relève du langage parlementaire et ce qui n’en relève pas, Votre Honneur. Je m’attends à ce que nous ayons une décision à ce sujet aussi rapidement que nous avons eu une décision sur la façon dont nous utilisons le temps alloué.

Il y a également une tradition — corrigez-moi, Votre Honneur, si je suis dans l’erreur — voulant que, lorsqu’un sénateur pointe un autre sénateur du doigt de façon méprisante pendant un débat, la présidence le rappelle à l’ordre. C’est ce qui se faisait quand je suis arrivé ici et lorsque j’étais Président. Je sais, Votre Honneur, que vous nous accordez beaucoup de latitude en ce qui concerne les débats et le Règlement, mais je crois que nous avons tous la responsabilité de comprendre que nous pouvons être en désaccord sur les dossiers abordés. Nous ne sommes pas du même côté de l’échiquier politique, bien qu’il y ait ici un nombre écrasant d’indépendants. La vérité, c’est que nos points de vue divergent dans le cadre de tous les débats. C’est notre travail. C’est ce que nous sommes censés faire. Nous sommes ici pour le faire avec conviction.

Je suis quelqu’un qui aime les débats passionnés. J’aime participer à des débats stimulants, et c’est quelque chose que j’encourage, tout comme le choc des idées. Si je dépasse les bornes, je m’attends à ce que le Président me rappelle à l’ordre, et je serai le premier à présenter des excuses si je prête des intentions à un sénateur, ou si je fais preuve d’un comportement indigne d’un sénateur.

C’est avec une certaine hésitation que je prends la parole, Votre Honneur. À l’avenir, si nous ne calmons pas les esprits, et si nous ne respectons pas le décorum et les règles de base de cette institution, le débat continuera de nous mener sur une pente glissante.

Il s’agit d’un important recours au Règlement, et je vous laisse, Votre Honneur, le soin d’agir en conséquence.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) [ + ]

Votre Honneur, à titre de précision, ai-je raison de dire que comme votre décision vient d’être maintenue, nous débattons actuellement de la motion no 96? Est-ce bien cela?

Son Honneur le Président [ + ]

Le sénateur Housakos a pris la parole au sujet d’un rappel au Règlement. Je ne vous avais pas encore invité à prendre la parole à l’étape du débat.

Est-ce qu’un autre sénateur souhaite faire un commentaire au sujet du rappel au Règlement du sénateur Housakos?

L’honorable Claude Carignan [ + ]

Je suis d’accord avec mon collègue le sénateur Housakos. Cette enceinte est une Chambre honorable. Ce lieu est un modèle, au Canada, où nous débattons de façon respectueuse. Lorsqu’on prend la parole pour exprimer une opinion, présenter un point de vue ou, dans ce cas-ci, appuyer une motion du leader de l’opposition, on s’attend à ce que notre point de vue soit écouté avec respect. Lorsque le débat est terminé ou que les cloches sonnent pour un vote par appel nominal, on ne s’attend pas à ce qu’une personne franchisse l’allée, vienne nous voir, nous pointe du doigt et argumente de façon intimidante. Comme l’a dit le sénateur Housakos, je n’ai jamais vu une telle chose en 14 ans.

Nous nous devons d’être respectueux les uns envers les autres. Nous devons respecter les opinions de chacun, en vertu des règles. Nous en avons appelé de votre décision. Les honorables sénateurs ne le réalisent peut-être pas, mais votre rôle n’est pas le même que celui du Président de la Chambre des communes. Une fois que ce dernier rend une décision, elle est finale. Or, le Président du Sénat est un sénateur comme les autres. Il a droit à son opinion et nous avons droit à la nôtre. C’est pourquoi les sénateurs ont le droit d’en appeler de la décision de la présidence. Le Président de la Chambre est un sénateur comme les autres. Il peut même prendre part au débat et voter. Le Président est un sénateur comme les autres, et nous avons le droit d’exprimer notre désaccord sans nous exposer à des menaces ou à de l’intimidation ou sans nous faire pointer du doigt. Nous devons respecter les règles. Nous devons nous respecter les uns les autres. Nous sommes une Chambre honorable et nous devons nous comporter de façon honorable, conformément aux règles du débat.

Le sénateur Gold [ + ]

Au sujet du rappel au Règlement.

Je vous présente mes excuses, chers collègues. Qu’il s’agisse de moi ou de n’importe quel autre sénateur, cela fait des années que les membres de l’opposition chahutent les intervenants lorsqu’ils tentent de prendre la parole. Dans le cadre du débat actuel, le sénateur Plett a mis en doute mon intégrité. Il a dit que j’avais induit cette Chambre en erreur, ce qui est faux. Il a dit que j’avais présenté cette motion à des fins personnelles — je crois que « pour servir ses propres intérêts » étaient ses mots exacts. Cela en dit très long sur ses motifs. Cela m’attriste de devoir prendre la parole pour rappeler à cette Chambre ce que nous avons tous entendu.

Je crois que ce qui s’est passé après le vote est quelque chose que tout parlementaire digne de ce nom ne peut tout simplement pas tolérer. Je ne crois pas qu’on puisse qualifier cela d’intimidation, comme vous l’avez dit. À cet égard, Votre Honneur, j’espère que vous pourrez régler ce rappel au Règlement rapidement.

Il ne s’agit là que d’une autre tentative de la part de l’opposition pour retarder les travaux et nous priver, en tant que sénateurs, de notre droit démocratique de nous prononcer au sujet d’un projet de loi dont nous sommes saisis depuis très longtemps. Elle empêche le Sénat de faire son travail pour les Canadiens. Merci.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) [ + ]

Je n’avais pas l’intention d’intervenir dans le cadre de ce recours au Règlement. J’allais m’en remettre à votre décision. Pour une raison que j’ignore, le leader du gouvernement — on peut espérer qu’il portera dorénavant et définitivement le titre de leader du gouvernement... D’ailleurs, nous adresserons certainement une demande à cette fin au Comité de la régie interne en l’informant que tout a changé maintenant, que le sénateur Gold est maintenant leader du gouvernement, comme vous l’avez déterminé dans votre décision, bien entendu. Cela dit, ce n’est pas de cela que je veux parler.

Le sénateur Gold vient de mentionner mes paroles comme si elles étaient pertinentes dans ce recours au Règlement. J’ai tenu ces paroles au sujet du sénateur Gold dans le cadre de mon recours au Règlement. Il a eu l’occasion de débattre de ces paroles, et il l’a fait avec vigueur et fermeté.

Votre Honneur, comme je l’ai dit plus tôt aujourd’hui, je ne suis peut-être pas toujours d’accord avec mes collègues du Sénat, mais je défendrai à mort leur droit à leur opinion.

Le sénateur Gold a une opinion au sujet de notre échange. La mienne diffère. Je l’ai exprimée au Sénat et il a exprimé la sienne, et elles étaient complètement opposées. De toute évidence, l’une d’entre elles n’est inévitablement pas entièrement correcte, et l’autre est peut-être entièrement fausse. Je n’en suis pas certain. J’avais une opinion à propos d’une chose, et d’après ce qu’il dit, il en avait une opinion différente.

Votre Honneur, ce n’est absolument pas l’objet du recours au Règlement. L’échange que le sénateur Gold et moi avons eu ici concerne un recours au Règlement que j’avais légitimement soulevé au sujet d’une question qui traîne depuis sept ou huit ans.

Le sénateur Housakos puis le sénateur Carignan ont parlé d’un problème vécu par d’autres sénateurs, pas du fait que le sénateur Gold ait fait des commentaires possiblement désobligeants à mon égard. Je ne m’offusque pas de ce que le sénateur Gold ait pu dire dans ses discours et j’espère qu’il ne s’offusque pas de ce que j’aurais pu dire dans les miens. J’espère cependant, Votre Honneur, que vous ferez complètement abstraction de ce que le sénateur Gold vient de dire au sujet du recours au Règlement, parce cela n’avait absolument rien à voir avec le recours en question.

L’honorable Raymonde Saint-Germain [ + ]

Je suis médusée par le fondement de ce rappel au règlement. En ce qui me concerne, on a fait référence à des événements contemporains qui auraient eu lieu aujourd’hui. Mon souvenir est que, pendant que des sénateurs parlaient, plusieurs voix commentaient les propos de ce côté de la Chambre. Je n’ai aucun souvenir d’avoir entendu, avant la suspension, un commentaire désobligeant ou d’avoir été témoin d’une attitude menaçante, comme on vient de l’affirmer, de la part de quelque sénateur que ce soit. Si le Sénat a suspendu sa séance, à mon avis, il n’y a pas lieu de soulever un rappel au Règlement.

L’honorable Julie Miville-Dechêne

J’ai été très surprise par le rappel au Règlement du sénateur Housakos et le discours du sénateur Carignan sur la question du respect. Il est très rare que, de ce côté-ci de la Chambre — enfin, cela n’arrive pas.

Pendant la période des questions, de l’endroit où je suis assise, j’entends toujours, de façon générale, des bruits et des commentaires qui font preuve d’un manque de respect constant à l’égard des réponses du sénateur Gold.

Je vous dis cela, parce que d’où je suis, je vois tout. Donc s’il y a eu un manque de respect — ce dont je doute — dans l’échange dont vous parlez, c’est une situation que l’on voit quotidiennement pendant la période des questions, absolument.

Son Honneur le Président [ + ]

Honorables sénateurs, le rappel au Règlement que le sénateur Housakos a soulevé et sur lequel deux ou trois autres collègues ont pris la parole est un rappel au Règlement très étroit. Je sais que nous pourrions passer bien plus longtemps ici à écouter d’autres observations, mais je pense en avoir entendu assez pour prendre la question en délibéré. Il y a également une décision qui sera rendue bientôt concernant le langage au Sénat, mais je pense en avoir entendu assez pour ce soir. Je vous remercie, chers collègues, de vos observations.

Nous reprenons le débat sur la motion no 96.

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