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Projet de loi sur la protection financière pour les producteurs de fruits et légumes frais

Projet de loi modificatif--Troisième lecture--Ajournement du débat

5 décembre 2024


L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) [ + ]

Propose, au nom du sénateur MacDonald, que le projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (fiducie réputée — fruits et légumes périssables), soit lu pour la troisième fois.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition)

Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-280, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (fiducie réputée — fruits et légumes périssables). Comme vous le savez, chers collègues, le projet de loi C-280 poursuit un objectif double. D’une part, il établit une fiducie réputée pour les produits agricoles périssables au Canada, ce qui donnera la priorité aux paiements destinés aux fournisseurs de fruits et de légumes frais en cas d’insolvabilité de l’acheteur. Grâce à cette protection, les agriculteurs, les distributeurs et tous les fournisseurs dans la chaîne d’approvisionnement des denrées périssables auraient un mécanisme sécurisé et fiable pour récupérer les sommes impayées.

D’autre part, le projet de loi C-280 aiderait à permettre au Canada de regagner son statut de partenaire commercial privilégié en rétablissant la réciprocité avec les États-Unis au titre de la Perishable Agricultural Commodities Act des États-Unis.

Dans son témoignage devant le Comité sénatorial des banques, Massimo Bergamini, le directeur général des Producteurs de fruits et légumes du Canada, a souligné que ces mesures sont nécessaires. Voici ce qu’il a dit :

Les préoccupations que nous soulevons aujourd’hui et que nous soulevons depuis près de 40 ans ne sont pas théoriques. La faillite en 2023 de Lakeside Produce à Leamington, en Ontario, a laissé plus de 188 millions de dollars de dettes aux producteurs et aux fournisseurs. L’effondrement de l’entreprise a provoqué de vifs remous au sein de la communauté des producteurs, certains producteurs individuels signalant des pertes allant jusqu’à 500 000 $...

... en factures non payées. Il a poursuivi ainsi :

Pour les exploitations agricoles familiales de petite et moyenne taille, ces pertes ont été [...] dévastatrices.

Si [le] projet de loi C-280 [avait] été en place, [il aurait] offert une protection financière bien nécessaire contre la perte catastrophique de revenu.

Chers collègues, les Canadiens ont eu accès au système de règlement des différends prévu par la Perishable Agricultural Commodities Act des États-Unis pendant près de 70 ans, à partir de 1937, en payant seulement des frais d’inscription de 100 $. Aucun autre pays n’a bénéficié de ce traitement préférentiel. Cependant, lorsque le département de l’Agriculture des États-Unis a intégré une fiducie à cette loi en 1984, il a accepté la réciprocité en fonction de la capacité du Canada à fournir trois services clés à l’industrie des fruits et légumes frais des États-Unis : premièrement, un service d’inspection géré par le gouvernement; deuxièmement, l’octroi obligatoire de licences et le règlement des différends; et troisièmement, des outils de protection contre l’insolvabilité comme la fiducie de la Perishable Agricultural Commodities Act.

On a peu contesté les deux premiers points, mais le troisième, la protection contre l’insolvabilité, n’existait pas, ce qui était problématique. Au cours des 30 années suivantes, l’industrie américaine des fruits et légumes exerça des pressions sur le Canada en ce sens. Pendant cette période, les Canadiens purent bénéficier d’un accès complet à titre de créanciers privilégiés en cas d’insolvabilité aux États-Unis, mais rien de comparable ne fut offert aux marchands américains qui vendaient leurs produits sur le marché canadien.

Dans les années 1990, les discussions commencèrent à s’accélérer entre les parties prenantes canadiennes et américaines afin de régler les différends en matière de commerce et les litiges que la situation suscitait dans le secteur des fruits et légumes frais. Le système américain de la Perishable Agricultural Commodities Act servit de modèle pour créer un cadre semblable au Canada, mais on ne trouva aucune solution.

En 1999, la Corporation de règlement des différends dans les fruits et légumes, un organisme sans but lucratif, fut officiellement mise sur pied en vertu d’une entente entre les gouvernements canadien et américain et les intervenants de l’industrie. L’objectif était d’encadrer les règlements des différends, l’uniformisation des échanges commerciaux et les protections financières pour les vendeurs et les acheteurs de fruits et légumes frais menant des activités en Amérique du Nord.

Au cours des 15 années qui suivirent, la Corporation de règlement des différends dans les fruits et légumes joua un rôle important dans le commerce transfrontalier, contribuant à maintenir la confiance dans le marché des fruits et légumes en réglant efficacement les différends et en favorisant des pratiques commerciales équitables. Cependant, les lacunes du processus de faillite et d’insolvabilité ne furent pas résolues.

En 2014, Industrie Canada a mené un examen de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. L’Alliance pour les fruits et les légumes frais, dans un mémoire présenté par, dirigée en partie par la Corporation de règlement des différends dans les fruits et légumes, a attiré l’attention d’Industrie Canada sur les modifications à apporter à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité afin de résoudre le différend. Dans son mémoire du 14 juillet 2014, elle décrit les difficultés auxquelles l’industrie des fruits et légumes frais doit faire face et les efforts considérables et soutenus qui ont été déployés pour établir un mécanisme de protection des paiements pour l’industrie. Elle a passé en revue les diverses propositions qui avaient été faites pour corriger le déséquilibre entre les États-Unis et le Canada, et elle a noté ce qui suit :

Selon les avis juridiques et l’expérience d’autres administrations, la façon la plus efficace de protéger les vendeurs de fruits et légumes frais au Canada est de créer une fiducie statutaire réputée limitée pour garantir les biens et les rendre accessibles en cas de faillite.

En réponse aux préoccupations selon lesquelles une telle fiducie réputée aurait une incidence sur les réclamations des employés en vertu des dispositions de la Loi sur le programme de protection des salariés de 2008, l’Alliance pour les fruits et légumes frais a dit que des études avaient montré que de telles réductions de crédit ne se produiraient pas. Elle a parlé de la crainte qu’une fiducie réputée réduise le bassin d’actifs disponibles pour les autres créanciers, y compris les banques, et fasse ainsi augmenter le coût d’emprunt.

Une fois de plus, rien n’a démontré qu’une telle chose se produirait. En fait, l’Alliance pour les fruits et les légumes frais a indiqué ceci : « Aux États-Unis, la Perishable Agricultural Commodities Act a eu pour effet global d’accroître la garantie des prêts, et non de la réduire. » L’Alliance pour les fruits et les légumes frais a aussi noté « un solide consensus en faveur de la création d’une fiducie réputée » pour la chaîne d’approvisionnement en fruits et légumes frais, et qu’il fallait agir de toute urgence.

Malheureusement, aucune mesure n’a été prise. Trois mois plus tard, le verdict est tombé. Dans une lettre datée du 1er octobre 2014, l’administrateur adjoint de l’USDA Fruit and Vegetable Program a informé les représentants canadiens qu’étant donné que le Canada n’avait pas de « mécanisme de résolution des différends comparable à celui établi aux États-Unis », à compter de cette date, les expéditeurs canadiens perdaient leur statut privilégié et que, pour déposer une plainte, ils devaient désormais déposer une garantie équivalant à 200 % de la valeur de la plainte, comme c’est le cas pour tous les autres pays.

Cette décision était manifestement une mesure de représailles contre le Canada, qui, pendant des décennies, avait échoué à créer une quelconque forme de protection par fiducie contre l’insolvabilité pour tous les fruits et les légumes frais expédiés au Canada à partir des États-Unis. Les Américains ne demandaient pas au Canada d’établir un système identique à celui de la Perishable Agricultural Commodities Act, mais seulement d’offrir une protection réciproque aux exportateurs américains.

À l’époque, la Corporation de règlement des différends dans les fruits et légumes a déploré l’absence d’action gouvernementale au nom de son industrie. Elle a déclaré ce qui suit :

La révocation du traitement préférentiel du Canada pourrait être renversée, mais cela exigera la mise en œuvre d’un outil de protection en cas d’insolvabilité simple et sans frais, comparable à la fiducie [de la Perishable Agricultural Commodities Act]. Nous espérons que les élus canadiens réagiront favorablement et comprennent que les États-Unis ne cherchent qu’à encourager un traitement de ses expéditeurs semblable à celui dont jouissent les expéditeurs canadiens aux États-Unis depuis longtemps.

Chers collègues, c’était il y a 10 ans.

Aujourd’hui, nous sommes enfin saisis d’un projet de loi qui corrigera les injustices et donnera aux producteurs d’ici l’espoir que la réciprocité sera enfin rétablie. Ce projet de loi est bien reçu par le département de l’Agriculture des États-Unis et bénéficie du soutien, chers collègues, de tous les partis politiques à la Chambre des communes, de tous les ministres et de tous les députés, ainsi que de l’ensemble de l’industrie des fruits et légumes.

Chers collègues, ce projet de loi a été longuement débattu. À mon avis, presque tout ce qui est pertinent à ce sujet a été dit. Aujourd’hui, chers collègues, je vous demande également votre soutien. Le projet de loi promet d’établir la réciprocité qui est attendue depuis longtemps. J’espère que vous voterez aujourd’hui — j’ai bien dit « aujourd’hui », chers collègues — en faveur du projet de loi C-280 à l’étape de la troisième lecture et que vous soutiendrez notre secteur agricole.

Merci, chers collègues.

L’honorable Bernadette Clement [ + ]

Je propose l’ajournement du débat.

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

L’honorable sénatrice Clement, avec l’appui de l’honorable sénatrice Petitclerc, propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat. Vous plaît‑il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les non l’emportent.

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie? Par défaut, la sonnerie retentira pendant une heure. Le vote aura lieu à 18 h 33. Convoquez les sénateurs.

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