La Loi concernant le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement
Projet de loi modificatif--Quinzième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international--Suite du débat
10 décembre 2024
Honorables sénatrices et sénateurs, cela n’aura échappé à personne dans cette Chambre : la marraine du projet de loi, la sénatrice Gerba, et le principal porte-parole, le sénateur Harder, qui a accepté à l’étape de la deuxième lecture de remplacer le sénateur Plett à ce titre, sont deux membres d’un même groupe parlementaire agissant en qualité de principaux porte-parole, mais ils ont une position opposée à l’égard d’un même projet de loi. C’est, je crois, du jamais-vu au Sénat. En effet, jusqu’en 2015, cela n’aurait pas été possible dans un Sénat marqué essentiellement depuis 1867 par le duopole entre le Parti libéral et le Parti conservateur, ces deux partis échangeant à tour de rôle les positions de soutien du gouvernement et d’opposition, au gré des résultats électoraux. Non seulement le Sénat actuel a brisé ce duopole avec la présence de quatre groupes parlementaires, mais trois de ces groupes sont non affiliés à un parti politique reconnu. Comme son modèle d’origine, la Chambre des lords, notre institution évolue.
Comme leader du Groupe progressiste du Sénat, je voudrais remercier la sénatrice Gerba et le sénateur Harder pour tous les efforts déployés afin de faire connaître les motifs de leurs positions opposées. Ils ont su mettre de l’avant leurs convictions respectives dans le respect mutuel, qui est une valeur fort importante. Ce faisant, ils nous ont tous fait bénéficier d’arguments différents qui ont enrichi le débat. Je souligne aussi que le fait que la marraine et le porte-parole soient des membres du même groupe montre le haut degré d’indépendance de chacun des sénateurs et sénatrices du Groupe progressiste du Sénat, une caractéristique dont je suis fier. J’ajoute que cela n’a jamais affecté le bon fonctionnement de notre groupe et la bonne tenue de nos échanges.
Je remercie également le sénateur Boehm d’avoir dirigé une étude approfondie au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. La libéralisation de l’accès aux marchés et la préservation d’un secteur agricole canadien fort sont des questions complexes qui méritent une sérieuse considération.
Je passe maintenant aux motifs qui m’amènent, non pas comme leader, mais comme sénateur indépendant du Québec, à voter non au rapport qui nous est proposé.
Premièrement, le fait que le Bloc québécois soit l’initiateur d’un projet de loi visant à protéger la gestion de l’offre n’est pas un motif en soi pour le rejeter ou en retarder la considération. En d’autres mots, contrairement à certains commentaires que j’ai pu entendre, les convictions souverainistes des députés du Bloc québécois ne devraient jouer aucun rôle dans l’examen attentif que nous effectuons dans cette Chambre.
D’ailleurs, les députés du Bloc québécois ne sont pas les premiers à avoir présenté des projets de loi afin de protéger la gestion de l’offre. En fait, la première tentative remonte au 4 novembre 2004, durant la 38e législature, avec le dépôt du projet de loi C-264, intitulé Loi sur la reconnaissance et la promotion de la gestion de l’offre de produits agricoles, qui a été présenté par le député libéral de Kitchener—Conestoga, Lynn Myers. Ce même projet de loi a été repris en 2006, durant la 39e législature, par l’honorable Wayne Easter, député libéral de l’Île-du-Prince-Édouard.
En somme, le projet de loi C-282, comme tous les autres projets de loi d’initiative parlementaire, doit être apprécié en fonction de sa finalité, de son contenu et de ses impacts, et non de la vision constitutionnelle de son auteur.
Par ailleurs, il est impératif que nous assumions, en tant que sénateurs, notre responsabilité constitutionnelle d’examen attentif des projets de loi, et ce, pour ceux qui, comme moi, soutiennent le rôle actuel du Sénat, indépendamment des partis politiques et des élus. Cela est particulièrement vrai pour les projets de loi rédigés par des députés qui n’ont pu bénéficier de l’expertise de la fonction publique, d’une rédaction effectuée par des légistes du ministère de la Justice et d’une analyse menée par des ministères, le Bureau du Conseil privé et le Cabinet. Sur ce point, je suis d’accord avec les commentaires du sénateur Woo. Pour ce genre de projet de loi, le Sénat ne doit pas hésiter à proposer des amendements qui visent à corriger sincèrement des erreurs matérielles, à dissiper des ambiguïtés réelles ou à vraiment améliorer l’atteinte de l’objectif du projet de loi. Les membres de l’autre endroit doivent comprendre et respecter ce rôle.
Deuxièmement, je tiens compte de l’étendue de l’appui qu’a obtenu ce projet de loi à l’autre endroit. Je rappelle que les députés du Bloc québécois ne représentent qu’une petite partie des sièges à la Chambre des communes, plus exactement 33 sur 337, soit à peine 10 %. Par conséquent, aucun projet de loi présenté par l’un d’eux ne peut arriver au Sénat sans recevoir l’appui d’au moins 136 autres députés. Le projet de loi C-282 a, de fait, reçu à l’étape de la troisième lecture l’appui de 262 des 313 députés qui ont participé au vote, y compris les leaders du Parti libéral du Canada, du Parti conservateur du Canada, du Nouveau Parti démocratique et du Parti vert.
Le fait que le projet de loi ait obtenu un si vaste appui montre qu’il est perçu comme étant dans l’intérêt de l’ensemble du pays. Je tiens compte aussi du fait que le projet de loi avait et a toujours le soutien du Cabinet.
Dans une lettre envoyée le 4 octobre dernier à tous les membres du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international et à tous les leaders des groupes au Sénat, la ministre de la Promotion des exportations, du Commerce international et du Développement économique, l’honorable Mary Ng, écrivait que ce projet de loi « a fait l’objet d’un examen rigoureux et d’un débat au Cabinet ».
Je note aussi que, le 20 novembre dernier, le premier ministre a déclaré ce qui suit à l’autre endroit :
La réalité, c’est que le Sénat est en train de faire son travail, est en train de regarder le projet de loi. Nous n’accepterons aucun projet de loi qui minimise ou qui abolit l’obligation de la Chambre de protéger la gestion de l’offre dans tout accord commercial à venir. Nous sommes sans équivoque là-dessus. Quel que soit le travail du Sénat, la volonté de la Chambre est claire.
Le premier ministre continuait ainsi :
Monsieur le Président, j’ai souvent rencontré des sénateurs et je vais continuer d’en rencontrer. Sur cet enjeu-là, je veux être absolument sans équivoque et très clair : nous allons toujours protéger la gestion de l’offre, quelle que soit l’opinion des augustes sénateurs.
Enfin, je prends acte d’une lettre datée du 26 novembre dernier qui nous a été envoyée à tous et qui était signée conjointement par des ministres et des députés de tous les partis reconnus à la Chambre des communes, sauf le Parti conservateur du Canada, qui réaffirmait la nécessité d’adopter ce projet de loi dans sa version originale.
Troisièmement, je voterai contre ce rapport parce que son adoption enverra le message que le Parlement est fortement divisé sur la nécessité de protéger notre système de gestion de l’offre.
Autrement dit, l’adoption de ce rapport signalera aux négociateurs des États-Unis et d’autres pays comme le Royaume-Uni et les pays de l’Union européenne que le Parlement canadien n’est pas résolu à protéger son système de gestion de l’offre et pourrait leur permettre de réclamer avec succès de nouvelles concessions concernant l’accès au marché canadien pour leurs produits laitiers, leurs œufs, leur poulet et leur dinde.
En réalité, si ce rapport est adopté, notre pays et nos négociateurs compétents se trouveront dans une position plus faible que si aucun projet de loi n’avait été présenté à la Chambre des communes.
Quatrièmement, je voterai contre le rapport parce que je pense qu’il est légitime pour un pays — je dirais même que c’est le devoir de chaque pays — d’adopter des mesures qui protègent autant que possible sa capacité à produire localement des aliments pour ses citoyens au lieu de devenir de plus en plus dépendant de sources étrangères.
Comme l’a déclaré l’Union nationale des fermiers, la souveraineté alimentaire est une question d’importance nationale. En refusant d’ouvrir davantage son marché aux produits laitiers, aux œufs, au poulet et à la dinde, le Canada protège sa capacité à produire des sources de protéines de haute qualité sur son territoire pour nourrir les Canadiens au lieu de dépendre des chaînes d’approvisionnement étrangères. Comme nous l’avons vu pendant la pandémie, il n’est pas souhaitable de dépendre des importations pour les produits vitaux.
Comme vous le savez, à la suite de la négociation des derniers accords commerciaux, environ 18 % des produits laitiers et 11 % des poulets sont maintenant importés. Il ne faut pas se leurrer, s’il y a de nouvelles concessions, c’est tout le système de la gestion de l’offre des produits laitiers qui risque sérieusement de s’effondrer. Nous perdrions alors un secteur important pour notre sécurité alimentaire.
Passons maintenant à la cinquième raison pour laquelle je vais voter contre le rapport. D’un point de vue juridique, je ne vois aucune différence entre l’adoption d’un projet de loi distinct prévoyant que le gouvernement du Canada ne doit pas accorder davantage l’accès aux produits laitiers, aux œufs, au poulet et à la dinde et la modification de la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, comme le propose ce projet de loi. Le but est exactement le même : protéger les sources canadiennes de nourriture et, par conséquent, conserver un degré plus élevé de souveraineté alimentaire. Nous devons restreindre davantage l’accès étranger au marché canadien pour ces produits — les produits laitiers, les œufs, le poulet et la dinde. C’est ce que propose le projet de loi C-282.
Soit dit en passant, cela ne veut pas dire qu’il ne faudrait pas améliorer le fonctionnement du système de gestion de l’offre à l’intérieur de nos frontières. J’ai été stupéfait de voir les énormes quantités de lait qu’on jette chaque année. Je suis également préoccupé par les restrictions qui empêchent l’innovation. Toutefois, ces questions doivent être traitées par des améliorations au système de gestion de l’offre à l’intérieur de nos frontières. Ce n’est pas en ouvrant davantage nos frontières aux produits étrangers qu’on résoudra ces problèmes. Par contre, nous pourrions ainsi mettre en péril notre autonomie alimentaire.
Sixièmement, je voterai contre le rapport, compte tenu du fait que mon rôle constitutionnel est d’abord de représenter ma province dans le cadre de l’étude de la législation fédérale. Je ne peux voter sans tenir compte de la perspective québécoise lorsqu’elle fait l’objet d’un large consensus respectueux de la Charte des droits et libertés et de notre Constitution.
Les productions sous gestion de l’offre représentent 35 % des recettes de l’agriculture québécoise. Le plus grand regroupement agricole au Québec, l’Union des producteurs agricoles (UPA), dont j’ai rencontré le président tout récemment, insiste pour que le projet de loi soit adopté sans amendement. Il en va de même de divers représentants d’entreprises de transformation qui achètent les produits sous gestion de l’offre et qui m’ont parlé de la sécurité de l’approvisionnement en produits de qualité que leur assure la gestion de l’offre, de même que la prévisibilité des prix.
Je note aussi que le gouvernement du Québec considère la gestion de l’offre comme un pilier de l’économie agricole québécoise et de la vitalité rurale de la province. Les gouvernements québécois successifs ont souligné la nécessité de protéger la gestion de l’offre des pressions extérieures, en particulier lors des négociations commerciales.
Je prends aussi bon acte du fait que l’Assemblée nationale a adopté pas moins de six résolutions en faveur de la protection de la gestion de l’offre dans le cadre de négociations commerciales internationales. Permettez-moi de vous citer celle du 10 mars 2021, qui a été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale, où il existe plusieurs partis politiques qui n’ont pas les mêmes programmes :
Que l’Assemblée nationale rappelle le rôle crucial du secteur agricole dans l’économie du Québec et dans le développement de ses régions;
Qu’elle souligne qu’elle est favorable à la protection de la gestion de l’offre pour les producteurs d’œufs, de lait et de volailles;
Qu’elle demande au gouvernement du Canada de protéger intégralement le modèle de gestion de l’offre dans le cadre des accords internationaux à venir.
Enfin, je prends note que, selon un sondage Abacus réalisé en novembre 2023, 92 % des Québécoises et Québécois sont d’avis qu’il s’agit d’une très bonne chose ou d’une bonne chose d’avoir de la production locale provenant des fermiers qui travaillent dans le cadre de la gestion de l’offre.
En fait, le seul leader politique québécois qui est opposé à la protection de la gestion de l’offre est Maxime Bernier, du Parti populaire du Canada.
Pour moi, qui suis sénateur du Québec, le choix est facile. Je voterai contre le rapport. Chers collègues, je vous invite à faire le même exercice en ce qui concerne la province ou le territoire que vous représentez. Par exemple, l’Ontario est le deuxième plus grand bénéficiaire de la gestion de l’offre. En effet, selon Statistique Canada, 22 % du revenu total de tout le secteur agricole de l’Ontario a été généré par le système de gestion de l’offre en 2023.
Dans les provinces atlantiques, selon Statistique Canada, les revenus provenant des produits soumis à la gestion de l’offre représentent 76 % des revenus totaux du secteur agricole à Terre-Neuve-et-Labrador, 52 % en Nouvelle-Écosse, 25 % au Nouveau-Brunswick et 16 % dans l’Île-du-Prince-Édouard. Dans ces provinces, la gestion de l’offre est considérée comme essentielle pour la survie des fermes familiales à petite échelle. Le système garantit que ces agriculteurs reçoivent une rémunération équitable et que les consommateurs de la province reçoivent des aliments de haute qualité lorsqu’ils achètent des produits locaux. Protéger ces agriculteurs et ces consommateurs des pressions exercées par les produits importés favorise la résilience économique locale.
En 2023, en Colombie-Britannique, toujours selon Statistique Canada, 34 % des recettes agricoles ont été tirées de la vente de produits soumis à la gestion de l’offre. La gestion de l’offre garantit qu’une grande partie des agriculteurs britanno-colombiens reçoivent une juste rémunération pour leurs produits et continuent à produire des produits laitiers, des œufs, du poulet et du dindon.
De plus, la gestion de l’offre s’harmonise parfaitement avec les impératifs écologiques de notre époque, en favorisant des chaînes d’approvisionnement plus courtes.
Soit dit en passant, le même sondage d’Abacus dont j’ai parlé plus tôt montre que 94 % des Canadiens considèrent également que c’est une bonne chose que les aliments soient produits par des agriculteurs dans le cadre du système de gestion de l’offre du Canada. C’est un pourcentage encore plus élevé qu’au Québec, où le taux d’approbation est de 92 %.
En conclusion, je terminerai comme j’ai commencé : en affirmant, comme je l’ai fait au début de mon intervention, la nécessité de maintenir le respect et l’indépendance des sénateurs. Le moment est venu de voter sur ce rapport, et reconnaissons notre liberté de voter de la manière que nous jugeons la meilleure pour notre province, notre territoire ou notre région.
Merci beaucoup. Meegwetch.
La sénatrice Miville-Dechêne a une question. Acceptez-vous de répondre à une question, monsieur le sénateur Dalphond?
Oui, je répondrai à quelques brèves questions et je donnerai peut-être quelques brèves réponses.
Vous avez essayé, pendant toute votre allocution, de nous faire croire que ceux qui sont contre le projet de loi ou ceux qui ont des réserves sont contre la gestion de l’offre. Or, vous le savez très bien : ce sont deux choses différentes.
On peut souscrire à un système de gestion de l’offre, mais ne pas trouver que ce projet de loi est le meilleur outil pour protéger la gestion de l’offre, étant donné les risques qui viennent avec. Il me semble que votre argumentaire a une certaine faiblesse.
Deuxièmement, vous avez fait référence à des résolutions de 2021 qui protègent la gestion de l’offre, alors que le projet de loi n’était pas en jeu. Il y a eu des projets de loi, alors tout cela fait partie de l’histoire.
Bien sûr, la gestion de l’offre est un système que l’immense majorité au Québec — y compris moi — aime, parce qu’il comporte toutes sortes d’avantages, mais vous parlez de tous ceux qui sont pour la gestion de l’offre. Le gouvernement du Québec ne s’est pas prononcé sur le projet de loi C-282, si je ne m’abuse. En fait, je ne l’ai pas entendu se prononcer. Donc, on ne peut pas parler d’unanimité au Québec. Il y a différentes opinions et vous avez parfaitement le droit aux vôtres, mais je ne crois pas que vous pouviez prétendre que ceux qui ne sont pas en faveur de ce projet de loi sont contre la gestion de l’offre.
Merci de la question et des commentaires.
La gestion de l’offre repose sur trois éléments : le premier est le contrôle de la production, qui évite des surplus qui feront tomber les prix, le deuxième est la fixation des prix et le troisième est le contrôle des importations.
Le contrôle des importations est la clé du système de gestion de l’offre. Si vous perdez le contrôle de l’importation, c’est la fin du système. Ce projet de loi s’attaque à une chose : des concessions additionnelles en matière d’importation. Il protège le troisième élément qui compose le système de la gestion de l’offre. Sans ce troisième élément, il n’y a plus de gestion de l’offre; ne nous berçons pas d’illusions. Tous ceux qui sont pour le maintien du système de gestion de l’offre doivent logiquement dire qu’ils sont pour le maintien des limites à l’importation, parce que sans cela on va détruire la gestion de l’offre, notre autonomie alimentaire et notre souveraineté alimentaire.
Une proportion de 18 % de la production du marché des produits laitiers au Canada est maintenant ouverte aux marchés externes. On sait très bien qu’il y a des surplus de lait en quantité phénoménale aux États-Unis. Des millions de litres de lait — de gallons, comme ils les appellent — sont détruits aux États-Unis. Le Wisconsin a un excès de production de lait, alors ils veulent avoir accès au marché canadien pour l’envoyer ici.
À partir de quel moment notre système est-il affaibli au point de s’écraser? On en est là. Tous les fermiers et toutes les organisations que j’ai rencontrés disent que, à 18 %, c’est critique. Si vous ouvrez encore plus les frontières, c’est la fin du système. On ne peut pas dire qu’on est en faveur du système de gestion de l’offre, mais qu’il faut ouvrir les frontières. C’est incompatible. On en est rendu à ce point. La dernière fois qu’on a ouvert les frontières, on a payé des compensations à coup de milliards de dollars aux secteurs laitiers et à d’autres. Il faut tracer une ligne et cette loi le fait : plus de concessions en matière d’importations.
J’ai une sous-question à poser. Quand même, depuis les dernières négociations portant sur le libre-échange — j’ai participé à une réunion d’information avec Chrystia Freeland pour la dernière négociation —, les négociateurs ont tout fait pour conserver le maximum de cette gestion de l’offre. Vous avez raison : il y a eu des concessions pour lesquelles il y a eu des compensations. On n’est pas à 100 %, mais à 82 % du marché. Ce n’est pas la fin de la gestion de l’offre.
On peut décider que c’est terrible. Je sais que c’est dramatique pour les producteurs de lait de vivre avec ce manque d’assurance. C’est le cas pour beaucoup d’autres cultivateurs et beaucoup d’autres agriculteurs. Le Canada est fait de plusieurs productions agricoles et de plusieurs productions de céréales et autres. Il me semble que la gestion de l’offre est essentielle, mais elle existe dans un cadre canadien où ce n’est pas le seul lobby qui existe. Je crois qu’il est très important d’essayer de trouver un équilibre. Or, je pense qu’on ne peut pas faire cette équation en disant que ce projet de loi est la seule façon de protéger la gestion de l’offre, parce que vous avez à la table des négociateurs qui ont le mandat de protéger la gestion de l’offre et qui font tout ce qu’ils peuvent. Si tout cela éclate à cause de différents facteurs politiques, nous ne serons pas plus avancés, comme vous le savez.
Je ne sais pas si vous aviez une question ou si vous faisiez plutôt des commentaires, mais je peux vous répondre une chose. La Chambre des communes a adopté plusieurs résolutions qui demandaient aux négociateurs de ne pas faire de concessions. Malgré les résolutions adoptées à l’unanimité à la Chambre des communes, des concessions ont été faites. Cette fois, on est allé une étape plus loin et on a adopté une loi pour éviter que les motions adoptées à la Chambre des communes ne soient considérées que comme des vœux pieux. Donc oui, on trace une ligne dans le sable et cette question de l’accès aux marchés dans ces quatre secteurs ne sera pas sur la table. Il faudra parler d’autres choses.
La semaine dernière, le président de la Fédération canadienne de l’agriculture disait beaucoup regretter que certains groupes au sein de la fédération, notamment certaines associations de producteurs de bœuf, soient contre le projet de loi, mais il a affirmé que la fédération dans son ensemble était toujours derrière le projet de loi.
Honorables sénateurs, je serai bref. Je n’avais pas l’intention de participer à ce débat, mais je vais le faire brièvement. Je dois dire que je me retrouve dans une situation inhabituelle : je suis d’accord avec le sénateur Dalphond. Je voterai contre le rapport et les amendements.
Je tiens à souligner ce qui suit : je sais que la gestion de l’offre pose de nombreuses difficultés. Ce système est loin d’être parfait, mais c’est de loin le seul système dont nous disposons qui assure la sécurité alimentaire de notre pays. Il a soutenu une industrie qui doit faire face à une vive concurrence de la part d’un secteur agricole américain fortement subventionné. Nous ne pouvons pas l’oublier. Les Européens subventionnent leur industrie agricole de manière disproportionnée. Les Américains le font également. Je pense que, au Canada, nous avons adopté une approche différente depuis de nombreuses années. Oui, il y a certains problèmes du point de vue des intérêts des consommateurs. En même temps, je pense qu’un équilibre a été atteint.
Pourquoi ai-je ressenti le besoin de dire quelques mots? C’est à la suite des questions soulevées par la sénatrice Miville-Dechêne. Je pense que nous devons être très prudents. À plusieurs reprises, les Américains ont essayé d’affaiblir la gestion de l’offre. Ils en ont fait un point de discorde dans un grand nombre de négociations.
La renégociation de l’Accord Canada—États-Unis—Mexique approche à grands pas. Nous allons en amorcer l’examen avec un premier ministre qui, à l’heure actuelle, est en position précaire par rapport à un président en position de force qui est également un négociateur fort habile. Les Américains et lui cherchent toutes les occasions de trouver une faille dans le camp canadien. Nous savons tous qu’on se livre à des manœuvres politiques par rapport au projet de loi C-282, mais en fin de compte, si nous montrons aux Américains avant même de commencer les négociations que nous sommes disposés à plier l’échine, qu’ils peuvent exploiter cette faille parce que le Parlement n’appuie pas de façon homogène et à l’unanimité une défense solide du secteur agricole canadien dès le début des négociations, alors nos chances de réussite sont nulles avant même d’arriver à la table des négociations. Il faut toujours négocier à partir d’une position forte, et non d’une position faible.
Je crois que nous ne rendons pas service à ceux qui vont examiner l’Accord Canada—États-Unis—Mexique l’an prochain. Dans le passé, le Canada a amplement montré sa capacité à négocier face aux meilleurs négociateurs américains, mais jamais nous n’avons montré dès le début des négociations la division du Parlement à l’égard de ce dossier. Voilà ce qui se produit. La Chambre n’était pas divisée parce que les députés comprennent la complexité politique. Le Sénat est divisé parce que, en tout respect, nous ne nous conformons pas à la complexité politique et nous ne la comprenons pas.
Je voulais simplement exprimer ce point de vue. Voilà pourquoi je voterai contre ces amendements. Merci beaucoup.
Nous venons de nous rendre compte que le sénateur Housakos avait proposé l’ajournement du débat sur ce rapport.
Vous aviez perdu le droit de débattre et je tenais à le signaler. Cependant, je m’en suis rendu compte un peu trop tard.
Votre Honneur, vous allez devoir interrompre le sénateur Housakos sur un autre point, car vous l’avez autorisé à parler. Il est toujours plus facile de demander pardon que de demander la permission.
Honorables sénateurs, j’ai enfin l’occasion de prendre la parole sur ce projet de loi. On m’a accusé de retarder son adoption. Tout Ottawa pense que Don Plett retarde la démocratie, et j’ai attendu très longtemps. Enfin, le sénateur Dalphond a prononcé son discours, ce qui me permet maintenant d’ajouter mes observations au compte rendu. J’espère que M. Perron, à l’autre endroit, écoute mon discours ce soir et qu’il réalise que je suis intervenu à la première occasion qui s’est présentée sur ce projet de loi. Il s’agit réellement de ma première occasion.
Je tiens à féliciter le sénateur Dalphond. Le sénateur Housakos dit qu’il n’est pas souvent sur la même longueur d’onde que le sénateur Dalphond. Je félicite le sénateur Dalphond. Je suis le chef d’un caucus, et le sénateur Dalphond est le chef d’un caucus dans lequel un sénateur, qui est assis juste à côté de lui, a proposé un amendement qui, de toute évidence, crée beaucoup de problèmes pour ce projet de loi. De plus, tout juste derrière le sénateur Dalphond se trouve la marraine du projet de loi. Le sénateur Dalphond a une dizaine de sénateurs qui sourient et qui aiment son leadership. Sénateur Dalphond, nous devons nous rencontrer pour que vous me montriez comment vous faites. Vous faites un excellent travail, sénateur Dalphond, pour maintenir l’unité de votre groupe.
Honorables collègues, je tiens à intervenir dans ce débat. Je serai bref également.
Tout d’abord, j’aimerais faire une mise en contexte au sujet du travail effectué au comité lors de l’étude article par article. Normalement, je n’assiste pas aux réunions du Comité des affaires étrangères et du commerce international, mais je l’ai fait le 6 novembre pour l’étude article par article. J’admets ne pas avoir assisté au débat. J’ai des opinions sur ces questions. J’ai certainement mon opinion sur la gestion de l’offre. J’ai déjà dit que je ne pense pas qu’il s’agisse d’un projet de loi sur la gestion de l’offre. Il s’agit d’un projet de loi sur le commerce international. Quoi qu’il en soit, je n’ai pas assisté aux réunions du comité, sauf lors de l’étude article par article, pendant laquelle j’ai assisté pour la première et unique fois à une réunion sur le projet de loi C-282.
En toute honnêteté, j’y suis allé simplement en tant que membre d’office du comité, puisque je suis le leader de l’opposition au Sénat. Évidemment, le leader du gouvernement au Sénat était aussi présent en tant que membre d’office, et rappelons qu’il s’agit d’un projet de loi d’initiative parlementaire.
Le projet de loi C-282 n’est pas un projet de loi d’initiative ministérielle. Si c’était le cas, je me serais assurément attendu à ce que le leader du gouvernement soit présent au comité pour appuyer le projet de loi et voter en sa faveur, mais ce n’est pas le cas. À ce moment-là, je ne pensais pas que le sénateur Gold devait utiliser son droit de vote en tant que membre d’office à l’égard de ce projet de loi. En toute honnêteté, le sénateur Gold m’a toujours informé de sa présence, me donnant ainsi l’occasion de m’y rendre également, de sorte qu’il ne m’a jamais pris par surprise. Je tiens à ce que cela soit bien clair.
Dans sa décision sur le droit du sénateur Gold à imposer la fixation de délai, le président de l’époque, le sénateur Furey, a déclaré que le sénateur Gold était le leader du parti gouvernemental au Sénat. Telle a été la décision qu’a prise le président Furey lorsque nous avons contesté le fait que le sénateur Gold puisse imposer la fixation de délai.
Voilà pourquoi il doit être considéré comme le leader d’un parti reconnu — comme l’a dit le président Furey —, ce qui a ouvert la porte à la fixation de délai. S’il est le leader d’un parti reconnu, ce parti est le parti du gouvernement qui, bien sûr, est le Parti libéral du Canada en ce moment.
Le projet de loi C-282 a été présenté à la Chambre par un député du Bloc québécois, même pas par un député du Parti libéral. Le sénateur Gold aurait pu faire valoir qu’en tant que leader du gouvernement libéral au Sénat, il a le devoir de représenter les intérêts du Parti libéral et de ses députés en votant au comité, mais le projet de loi C-282 a été présenté par le Bloc québécois. Le vote à la Chambre sur cette mesure n’a même pas été soumis à la discipline de parti. Les députés libéraux étaient libres de voter selon leur conscience, et certains ont voté contre le projet de loi.
Que le sénateur Gold veuille nous informer de la position du gouvernement sur un projet de loi est une chose. Il n’y a rien de mal à cela. Le sénateur a voté il y a à peine une demi-heure sur un projet de loi d’initiative parlementaire, et il a voté comme moi, ce qui est en soi un miracle. Cependant, c’est une tout autre chose pour lui d’utiliser ses droits en tant que membre d’office du comité pour se prononcer sur le projet de loi C-282. Je ne crois pas que c’était approprié. Bien sûr, en vertu du Règlement du Sénat, le sénateur Gold peut assister à toute réunion de comité et voter en tant que membre d’office, mais il vote rarement, voire jamais, en comité sur les projets de loi d’initiative parlementaire ou les projets de loi d’intérêt public du Sénat. C’est pourquoi j’ai estimé devoir contrebalancer le vote du sénateur Gold à la séance du comité, pour faire valoir que sa décision de voter sur le projet de loi C-282 n’était pas conforme à ce qu’il avait fait par le passé et ne correspondait pas, selon moi, à ce qu’il devait faire.
Quoi qu’il en soit, que le sénateur Gold ait voté sur l’amendement n’a eu aucun effet sur le résultat du vote. Je crois que c’était 10 voix contre 3; je suppose donc que cela aurait été 9 voix contre 3. Oh, non, j’ai voté moi aussi. Donc, mon vote aurait été soustrait lui aussi, et le résultat aurait été 9 voix contre 2. Je suis plombier, pas mathématicien.
Le deuxième point que je voudrais faire valoir, c’est que, que l’on appuie l’amendement ou non, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international a joué précisément le rôle du Sénat qui consiste à étudier des amendements aux mesures législatives pour améliorer ou approuver les projets de loi. Comme je l’ai dit par le passé, le Sénat outrepasse ses prérogatives quand les sénateurs présentent de nouveau des amendements que la Chambre des communes a déjà examinés et rejetés. C’est ce que nous avons vu au cours des dernières semaines avec le projet de loi C-275 et le projet de loi C-280.
Bien sûr, certains font valoir que l’amendement au projet de loi C-280 n’a pas été présenté en fin de compte, mais il a été examiné, et nous le savons tous, il a été rejeté. Dans le cas du projet de loi C-275, l’amendement a été retenu, mais je crois que la Chambre l’avait rejeté à au moins à deux reprises, alors nous devrions accepter sa décision en pareil cas.
Soyons clairs : les amendements du comité aux projets de loi C-275 et C-280 auraient dû être rejetés par le Sénat, car ils avaient déjà été examinés et rejetés par la Chambre.
En ce qui concerne le projet de loi C-282, l’amendement n’avait pas été étudié auparavant. Lorsque j’ai pris la parole sur le projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, le 11 avril, j’ai clairement indiqué que je soutenais pleinement le système de gestion de l’offre canadien, mais le projet de loi C-282 n’est pas un projet de loi sur l’avenir du système de gestion de l’offre. La sénatrice Miville-Dechêne, je crois, l’a souligné. Il s’agit d’un projet de loi sur le commerce, purement et simplement.
À la fin de mon discours à l’étape de la deuxième lecture, j’avais exhorté les membres du comité à :
[...] soumettre [le projet de loi] à un examen objectif sérieux, car, bien qu’il découle de bonnes intentions, je crains qu’il ne produise pas les résultats souhaités par son parrain.
Les membres du comité ont bien étudié le projet de loi et ils se sont d’ailleurs rendu compte qu’il entraînerait des conséquences néfastes.
À mon humble avis, les choses ont considérablement changé depuis le 21 juin 2023, date à laquelle le projet de loi C-282 a été mis aux voix à l’étape de la troisième lecture à la Chambre des communes. Nous avons désormais l’avantage de savoir qui sera à la Maison-Blanche lorsque l’Accord Canada—États-Unis—Mexique sera renégocié et nous avons une très bonne idée de ce que nos partenaires commerciaux penseront du projet de loi C-282, s’il est adopté sans amendement.
Les Américains nous ont très clairement fait savoir qu’en adoptant le projet de loi C-282, le Canada enverrait un très mauvais signal. En fait, on pourrait soutenir que l’adoption du projet de loi C-282 nuirait au système de gestion de l’offre, ce qui va carrément à l’encontre de l’objectif de ce projet de loi. C’est ce à quoi je penserai lorsque je voterai sur le rapport du comité.
Tandis que nous nous lançons dans la difficile renégociation d’un accord commercial avec notre principal partenaire commercial, le projet de loi C-282, dans sa forme initiale, serait-il bon pour le Canada? Je pose la question plus directement: le projet de loi C-282, dans sa forme originale, est-il bon ou mauvais pour le système de gestion de l’offre?
Le 20 janvier, il y aura un nouveau président des États-Unis. Dans quelques mois, chers collègues, Pierre Poilievre sera au pouvoir au Canada, quoi que vous en pensiez et que vous l’aimiez ou non.
On peut prévoir que Pierre Poilievre sera au pouvoir d’ici six mois avec presque autant de certitude qu’on peut prévoir que Donald Trump deviendra président des États-Unis d’Amérique. M. Trump a déjà été élu; donc à moins que quelqu’un ne lui tire dessus d’ici là, il sera président.
Je suis désolé si c’était antiparlementaire, sénateur Gold.
Pierre Poilievre fera face au gouvernement des États-Unis dans le cadre de l’examen de l’Accord Canada—États-Unis—Mexique. Je suis absolument convaincu qu’il sera en mesure d’obtenir le meilleur accord possible pour le Canada. Je suis absolument convaincu que — comme il l’a dit récemment — il combattra le feu par le feu au cours de ces négociations. Je suis absolument convaincu que le premier ministre Pierre Poilievre défendra notre secteur agricole et notre système de gestion de l’offre.
Justin Trudeau a commis une énorme erreur tactique quand l’Accord de libre-échange nord-américain, l’ALENA, a été renégocié. Comme il le fait toujours en matière d’affaires étrangères, il a décidé de profiter de l’occasion pour plaire à son électorat. Il a proposé à Donald Trump un nouvel accord assorti de toutes sortes de belles idées de la gauche sur les questions autochtones, syndicales, environnementales et LGBTQ. Il est arrivé avec toutes les jolies propositions qu’il a pu trouver.
Bien sûr, les Américains ont rapidement jeté cela à la poubelle, et le Canada a dû essayer de sauver les meubles à la dernière minute, signant essentiellement un accord qui avait été négocié entre le Mexique et les États-Unis. Trudeau a fait des concessions sur les produits laitiers, même s’il avait promis de ne pas le faire.
Justin Trudeau est un idéologue. Donald Trump est un président qui conclut des transactions. Nous avons besoin d’un premier ministre qui peut négocier avec les États-Unis, et non leur faire la leçon. Nous avons besoin d’un premier ministre dont l’objectif est d’obtenir le meilleur accord pour le Canada, et non un accord qui sera louangé par des universitaires de gauche aux États-Unis.
Heureusement, Pierre Poilievre sera là quand viendra le temps de s’asseoir à la table des négociations.
Chers collègues, je viens d’une région agricole, c’est donc dire que lorsque je ne suis pas ici, je m’occupe presque quotidiennement de dossiers touchant à l’agriculture et à l’industrie agricole. Je vais à l’église le dimanche matin, et j’aperçois d’un côté un producteur laitier — l’un des plus grands producteurs laitiers de tout l’Ouest canadien. De l’autre côté, il y a un producteur de dindes. Plus loin, il y a un producteur de céréales, un éleveur de bovins et un éleveur de porcs. Tous les secteurs agricoles sont représentés dans ma collectivité et dans le Sud-Est du Manitoba.
Les producteurs laitiers et les producteurs de poulet disent que nous avons besoin de la gestion de l’offre. Les producteurs de porc disent que nous avons besoin d’un marché libre et que nous n’avons pas besoin de la gestion de l’offre. J’ai des amis des deux côtés.
Chers collègues, je me range du côté de mes amis. Ils ne viennent pas me voir le dimanche matin pour me dire : « Pourquoi ne nous avez-vous pas soutenus? » Ils savent que nous faisons de notre mieux pour le pays.
Les gens soumis à la gestion de l’offre comprennent qu’ils ne peuvent pas avoir tout ce qu’ils veulent. Les producteurs de porcs comprennent que nous devons protéger une partie de nos acquis, et nous avons fait un excellent travail à ce chapitre. Nous avons fait un excellent travail avec les gouvernements libéraux précédents. J’ai critiqué le gouvernement libéral actuel parce que je ne lui trouve pas grand-chose de bon.
Tout à l’heure, nous avons parlé du premier ministre libéral qui a précédé celui-ci. Quand je me couche le soir, je rêve que Jean Chrétien est le premier ministre actuel au lieu de celui que nous avons en ce moment.
Nous avons déjà débattu de ces questions. Nous avons appuyé la gestion de l’offre et nous continuons de l’appuyer.
Le sénateur Dalphond nous a mis au défi de nous adresser à nos provinces et de parler en leur nom. Je parle au nom de ma province quand je dis que nous ne pouvons pas menotter un premier ministre. Nous ne pouvons pas envoyer quelqu’un qui a les mains liées à la table des négociations.
Comme je ne suis pas très bon au poker, il est possible que je ne bluffe pas assez bien en ce moment. Toutefois, je ne sais vraiment pas si je dois voter pour ou contre ce projet de loi, car je trouve des points positifs aux deux opinions. Vraiment.
Plus tôt aujourd’hui, on a laissé entendre que c’est peut-être parce que j’ai élevé la voix et que j’ai un peu trop insisté que certains sénateurs n’ont pas voulu suivre mon avis et voter comme je l’avais suggéré. Pendant six ans et demi, mon tempérament et le ton de ma voix l’ont incité à voter d’une certaine façon. Je vais donc le berner, comme tous les autres sénateurs. Je ne vais révéler à personne comment je vais voter. Vous allez vous retrouver devant un dilemme.
N’ayez pas l’air aussi triste, sénateur Gold. Souriez un peu. S’il vous plaît. Il est 22 h 30. Je vais très bientôt proposer l’ajournement du Sénat, et vous pourrez aller vous coucher, mais pour l’instant, je vais continuer de parler.
Chers collègues, je ne vais pas recommander que vous votiez pour ou contre le rapport de ce comité.
À l’autre endroit, les députés de mon caucus ont voté à 56 voix contre 49 en faveur de ce projet de loi à l’étape de la troisième lecture. Le vote des députés de mon caucus va encore être divisé la prochaine fois. Je vais moi aussi voter pour ou contre le moment venu. Ici, les membres de notre caucus sont libres de voter comme bon leur semble. Je vais voter comme bon me semble. Ce vote, comme tous les autres votes au Sénat et au sein de notre caucus, n’est pas soumis à la discipline de parti, car nous sommes vraiment indépendants.
Merci beaucoup, chers collègues.
Le sénateur Plett accepterait-il de répondre à une question?
J’en serais absolument ravi, sénateur Yussuff.
Il se fait tard, mais tant qu’on s’amuse, aussi bien en profiter.
J’essayais de suivre la logique dans votre discours, et je dois admettre en toute honnêteté que vous m’avez égaré en cours de route. J’aimerais revenir sur certaines choses que vous avez dites au sujet de la renégociation de l’ALENA, qui est devenu l’Accord Canada—États-Unis— Mexique.
J’ai participé à ce processus. À ce moment-là, j’ai trouvé incroyable que tout le monde au pays fasse front commun, y compris les premiers ministres des provinces, le milieu des affaires, le mouvement syndical, le gouvernement fédéral ainsi que l’opposition à la Chambre des communes. On ne voyait au Canada aucune division par rapport aux enjeux qui touchaient le pays, notamment les travailleurs, le secteur agricole et le secteur industriel de l’ensemble du pays.
Corrigez-moi si je me trompe — et les gens pourront vérifier ce qui a été dit à la suite des négociations —, mais je crois que presque tous les journaux et tous les secteurs de la société ont trouvé les résultats remarquables, étant donné que nous avions affaire à un président qui se disait essentiellement prêt à déchirer l’accord. Nous avons réussi à renégocier l’accord pour améliorer les choses, ce que les gens ne croyaient pas possible.
D’après ce que je comprends des négociations, il s’agit d’une voie à double sens. Ce n’est pas une voie à sens unique. Je n’arrive pas à comprendre certaines des critiques que vous formulez à l’encontre du dernier accord renégocié, compte tenu du succès que nous avons obtenu en tant que pays, et pas seulement de mon point de vue en tant que représentant des travailleurs et de membre du comité de l’ALENA, ou encore, en passant, parce que j’ai travaillé avec certains de vos collègues que je considère comme de bons amis, comme Rona Ambrose, M. Moore et un certain nombre d’autres personnes qui ont participé au processus.
Je reconnais que, lorsque le président désigné Donald Trump entrera en fonction, il rouvrira de nouveau l’accord et nous participerons au processus.
La question fondamentale que je souhaite vous poser est la suivante : j’ignore de quel échec vous parlez, mais je pense également qu’il est fondamental que nous fassions front commun en tant que pays, à la fois dans cette enceinte et dans l’autre, pour reconnaître le danger, car une grande partie de nos exportations dépendent de la réussite du Canada et de la poursuite de l’accès à ce marché. Je serais honoré de vous entendre m’éclairer sur les critiques formulées à l’encontre du succès du dernier accord.
Le problème avec les questions qui durent 10 minutes, lorsqu’il est 22 h 30, c’est qu’on finit par oublier sur quoi elle portait au moment d’y répondre.
Sénateur Yussuff, vous avez commencé votre intervention en disant que vous ne m’aviez pas bien compris. On m’a accusé de beaucoup de choses dans ma vie, mais très rarement de ne pas m’avoir compris. En général, j’exprime clairement ce que je veux dire et je ne pense pas avoir été si peu clair cette fois-ci. Néanmoins, je vais essayer de répondre à cette question.
Comme je l’ai dit, je crois que le premier ministre Trudeau a essentiellement signé un accord dont les États-Unis et le Mexique avaient déjà convenu, qu’il est arrivé en retard à la table des négociations et qu’il s’est fait dire de signer le document. À mon avis, le Canada ne s’en est pas très bien tiré.
Pour ce qui est de passer en revue l’ensemble de l’Accord Canada—États-Unis—Mexique, je suis désolé, sénateur Yussuff, mais je ne peux pas le faire dans le temps que nous avons ou celui que vous et moi voulons passer ici. Je dirai simplement que je crois que notre premier ministre est arrivé tard dans les négociations, comme je l’ai affirmé très clairement. Il avait trois, quatre ou cinq points à l’ordre du jour, mais les États-Unis les ont jetés à la poubelle. Nous n’avons pas beaucoup avancé, par exemple, dans le dossier du bois d’œuvre au cours des dernières années. Je préférerais que quelqu’un en position de force se présente aux négociations pour faire valoir la possibilité d’un nouvel accord.
Cela dit, n’oublions pas une chose. Le président élu s’attribue essentiellement le mérite d’avoir négocié le dernier accord. C’est son accord. Je ne sais pas exactement ce qu’il va demander, mais, si nous devons changer des choses comme la gestion de l’offre, cela le fera réfléchir.
Il a menacé d’imposer des tarifs douaniers au Canada. Il nous a clairement fait comprendre que nous devons régler deux aspects. Le premier ministre actuel ne promet pas de s’y attaquer, à part l’achat d’hélicoptères que nous recevrons un moment donné, après que Donald Trump aura quitté ses fonctions.
Et un premier ministre qu’il qualifie de gouverneur.
C’est vrai. Le président élu a demandé deux choses : de mettre un terme à l’immigration illégale aux États-Unis et de mettre un terme à la contrebande transfrontalière de fentanyl, deux choses. Personne n’a pipé mot.
Vous avez dit que les médias ne nous ont pas fait beaucoup de mauvaise publicité. J’espère que vous ne vous en remettez pas à ce que disent les médias de gauche. Les médias de gauche ne critiquent pas assez le premier ministre pour le tour de passe-passe stupide qu’il essaie actuellement de mettre en place avec la TPS. Ne nous en remettons pas au jugement positif ou négatif des médias, car la dernière chose sur laquelle je souhaite compter, c’est l’opinion des médias de gauche au sujet du premier ministre.
Avec tout le respect que je vous dois, je ne crois pas qu’on peut qualifier le Globe and Mail de « média de gauche », à moins que vous et moi ne nous méprenions sur son rôle.
En toute honnêteté — et je parle au nom de tous les Canadiens —, je pense que nous avons essentiellement fait un bon travail avec le dernier accord négocié, compte tenu de la situation avec laquelle nous devions composer. Nous n’avons pas demandé de renégociations. C’est le président Donald Trump qui l’a fait.
Nous devions défendre notre accès au marché américain, et nous avons essentiellement accompli un bon travail. Je ne pense pas qu’il mérite d’être critiqué. Nous y sommes parvenus grâce à notre unité nationale, qui nous a permis de parler d’une seule voix et de travailler ensemble à la réalisation d’un objectif plus vaste.
Ne pensez-vous pas que c’est la même approche qui garantira le succès des négociations, quelles qu’elles soient, lorsque le président décidera de s’asseoir à la table des négociations, s’il décide de le faire?
En fait, on a imposé des tarifs douaniers aux industries canadiennes de l’acier et de l’aluminium qui, pourtant, n’avaient jamais eu de pratiques commerciales déloyales par rapport aux États-Unis. Nous n’avons pas subventionné ces industries. Malgré cela, le président des États-Unis leur a imposé des tarifs douaniers. Or, nous nous en sommes servis avec succès. Les industries canadiennes de l’aluminium et de l’acier sont les industries les plus modernes du pays, et elles emploient des milliers d’hommes et femmes partout au Canada.
Je crois parfois que, même si nous devons participer, il est juste de prôner et de soutenir que nous avons mené de bonnes négociations pour le pays. Nous avons réussi. Tous les premiers ministres provinciaux conviendraient que les dernières négociations ont été fructueuses, même si vous n’êtes pas d’accord.
Je n’ai entendu aucune question, sénateur Yussuff. Vous voulez lancer un débat pour déterminer si les négociations ont été fructueuses. Je dis que non. Vous dites que oui.
Vous avez dit : « Eh bien, ne le croyez-vous pas? » Non, je ne le pense pas. C’est pour cette raison que j’ai dit tout ce que j’ai dit tout à l’heure.
Vous avez dit : « Avec tout le respect que je vous dois. » Je vais dire la même chose, sénateur Yussuff. Avec tout le respect que je vous dois, je pense que nous avons un premier ministre faible. Je pense qu’il doit être remplacé. Je pense que le président élu n’a pas caché que certaines choses allaient changer. Soit nous changeons, soit nous serons laissés pour compte. Ils sont nos plus grands partenaires commerciaux.
Est-ce que nous avons des choses qu’ils veulent? Absolument. Ce n’est pas une voie à sens unique, et le président élu le sait. Nous devons toutefois être en position de force.
Je ne crois pas, sénateur Yussuff, que le premier ministre possède les qualités que vous voyez en lui; personnellement, je ne les vois tout simplement pas. Je préférerais que ce soit Pierre Poilievre qui négocie avec Donald Trump plutôt que la tête en l’air irresponsable qui nous dirige en ce moment. Je suis désolé. J’espère avoir fait le tour de la question.