Aller au contenu

Éthique et conflits d'intérêts des sénateurs

Premier rapport du comité--Ajournement du débat

23 novembre 2023


Propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au nom du Comité sénatorial permanent de l’éthique et des conflits d’intérêts des sénateurs au sujet de son premier rapport, qui présente les observations et les recommandations du comité à propos du rapport d’enquête du conseiller sénatorial en éthique sur la conduite du sénateur Michael L. MacDonald.

Le rapport d’enquête porte sur la conduite du sénateur MacDonald dans la soirée du 16 février 2022, lorsqu’il a adressé à un citoyen des commentaires qui ont été enregistrés et diffusés sur les médias sociaux et les médias nationaux. Au cours du mois qui a suivi, des sénateurs ont adressé au conseiller sénatorial en éthique neuf demandes visant la tenue d’une enquête afin de déterminer si, ce soir-là, le sénateur MacDonald avait manqué à ses obligations aux termes du Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs.

Le conseiller sénatorial en éthique a entrepris un examen préliminaire et, le 21 juin 2022, il a informé le sénateur MacDonald qu’il mènerait une enquête sur l’affaire. Le 18 juillet 2023, le conseiller sénatorial en éthique a remis son rapport d’enquête à votre comité, qui a déposé le rapport auprès du greffier du Sénat le même jour. Dès lors, le rapport est devenu un document public.

Dans son rapport d’enquête, le conseiller sénatorial en éthique a conclu que la conduite du sénateur MacDonald a contrevenu aux paragraphes 7.1(1) et 7.1(2) du code en raison des propos et du langage qu’il a tenus lorsqu’il s’est adressé au citoyen en question pendant cette soirée de février. En outre, le conseiller sénatorial en éthique a jugé que le sénateur MacDonald a enfreint les paragraphes 48(7), 7.1(1) et 7.1(2) ainsi que l’article 7.2 et du code à cause de son manque de collaboration tout au long du processus d’enquête.

Après avoir reçu le rapport du conseiller sénatorial en éthique, votre comité s’est réuni rapidement, comme l’exige le code, le 4 août 2023, pour commencer son étude, qui est la principale priorité du comité depuis cette date. Votre comité s’est réuni huit fois pour examiner le rapport d’enquête, a rencontré le sénateur MacDonald, s’est penché sur ses observations écrites et orales, a convenu des sanctions appropriées et a préparé sans tarder le présent rapport.

Avant de passer aux recommandations énoncées dans le rapport, il est important de vous informer que cette étude est le fruit d’un travail très sérieux et d’un examen minutieux de la part de tous les membres du comité. Le rapport reflète les opinions et les conclusions de votre comité.

Je tiens également à souligner que l’examen du rapport d’enquête du conseiller sénatorial en éthique par votre comité et l’examen des recommandations du comité par le Sénat lui-même font partie du processus d’application global énoncé dans le code. Le code indique clairement qu’à la suite d’une enquête, seul le conseiller sénatorial en éthique détermine si un sénateur a manqué à ses obligations au titre du code. Dans le cadre de son examen, votre comité est également censé donner au sénateur qui fait l’objet de l’enquête l’occasion de se faire entendre. Lorsque le conseiller sénatorial en éthique conclut qu’un sénateur a enfreint le code, on s’attend à ce que votre comité recommande des mesures correctives ou des sanctions appropriées et qu’il présente ces recommandations au Sénat.

La dernière étape, c’est l’examen du rapport et des recommandations de votre comité par le Sénat. Il incombe au Sénat d’exercer le pouvoir final et exclusif en ce qui concerne les mesures correctives et les sanctions.

Cette dernière étape commence aujourd’hui.

Il importe de rappeler aux honorables sénateurs que le Règlement du Sénat fixe des délais précis pour l’étude des rapports du comité qui concernent un sénateur. Ces règles visent à garantir une réponse rapide de la part du Sénat ainsi que le respect du droit du sénateur qui fait l’objet du rapport à être entendu. Par conséquent, la motion portant adoption du rapport présentée aujourd’hui ne peut pas être mise aux voix avant le cinquième jour de séance suivant la présentation de la motion, à moins que le sénateur qui fait l’objet du rapport se soit exprimé.

Le Règlement prévoit aussi que le Sénat doit prendre une décision sur le rapport au plus tard le 15e jour de séance suivant la présentation de la motion visant son adoption.

Dans son rapport d’enquête, le conseiller sénatorial en éthique fait état de deux infractions au code. Premièrement, il conclut que, pendant la soirée du 16 février 2022, le sénateur MacDonald n’a pas « adopt[é] une conduite qui respecte les normes les plus élevées de dignité inhérentes à la charge de sénateur », comme l’exige le paragraphe 7.1(1) du code. Il conclut aussi que le sénateur Macdonald ne s’est pas :

[abstenu] de tout acte qui pourrait déprécier la charge de sénateur ou l’institution du Sénat.

 — comme l’exige le paragraphe 7.1(2) du code.

Il est important de rappeler à tous les honorables sénateurs, en particulier à ceux qui ont récemment été nommés au Sénat, que l’article 7.1 fait partie d’une série de modifications qui ont été adoptées par le Sénat entre 2008 et 2014 pour réaffirmer son engagement de même que celui de chaque sénateur à respecter les normes de conduite les plus élevées.

Plus précisément, les modifications de 2014 ont établi des règles de conduite générale et de comportement éthique pour les sénateurs. À l’époque, le Sénat a renommé le document Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs afin de rappeler que le respect des normes de conduite les plus élevées exige davantage que la simple prévention des conflits d’intérêts.

Pour renforcer ce changement, le Comité sur l’éthique et les conflits d’intérêts a également émis une directive à l’intention du conseiller sénatorial en éthique, qui stipule :

Cette règle de conduite générale s’applique à toute conduite d’un sénateur, qu’elle soit ou non directement liée à ses fonctions parlementaires, pouvant être contraire aux normes les plus élevées de dignité inhérente à la charge de sénateur et/ou pouvant déprécier la charge de sénateur ou l’institution du Sénat.

Ces modifications et cette directive s’appliquent à la situation du sénateur MacDonald dans la mesure où les questions qui se posent dans son cas concernent le comportement éthique du sénateur, y compris dans sa vie personnelle et ses activités non sénatoriales. C’est ce qui a permis de conclure que la conduite du sénateur MacDonald le 16 février 2022 a enfreint les dispositions du code relatives à l’éthique.

Le conseiller sénatorial en éthique a également conclu que le refus du sénateur MacDonald de collaborer à l’enquête entrait en violation avec les paragraphes 7.1(1) et (2) du code. La conduite du sénateur MacDonald contrevenait en outre à l’article 7.2, qui dit que « [l]e sénateur exerce ses fonctions parlementaires avec dignité, honneur et intégrité ».

Le paragraphe 48(7), de son côté, précise que « [l]es sénateurs sont tenus de collaborer sans tarder avec le conseiller sénatorial en éthique dans toute enquête ».

Honorables sénateurs, j’aimerais m’attarder légèrement sur la question de la collaboration. Ce n’est pas au comité d’établir si le sénateur MacDonald a enfreint le code ou pas, mais au conseiller sénatorial en éthique.

Le comité estime toutefois qu’il est de sa responsabilité de rappeler à tous les sénateurs la nature essentielle de la collaboration avec le conseiller sénatorial en éthique.

Le comité est conscient que, du moins au début, le sénateur MacDonald avait réellement mal compris ses obligations dans le cadre du processus d’enquête. Quoi qu’il en soit, tous les sénateurs sont censés comprendre les obligations et les devoirs que leur impose le code, y compris relativement au processus d’application. Qu’un sénateur ignore l’existence de ce processus ne lui permet pas de se soustraire à ses obligations, y compris celle de collaborer aux enquêtes. Le comité a constaté que, même si le conseiller sénatorial en éthique a maintes fois expliqué le processus au sénateur MacDonald, celui-ci a gardé le cap et refusé de collaborer.

Honorables sénateurs, le code est un instrument issu du Sénat lui-même. Il a été adopté afin de maintenir la dignité et l’intégrité inhérentes au poste de sénateur et d’éviter que les agissements des sénateurs ne nuisent à l’institution. Refuser de collaborer à une enquête équivaut à contester l’autorité du Sénat sur la conduite de ceux-là mêmes qui le composent.

Ayant considéré la nature et l’étendue des infractions constatées par le conseiller sénatorial en éthique, et ayant tenu compte des observations du sénateur MacDonald, le comité a ensuite entrepris de déterminer quelles seraient les mesures correctives ou les sanctions appropriées. Le code prévoit une liste non exhaustive de mesures ou de sanctions que le comité peut recommander au Sénat. Pour déterminer laquelle de ces mesures est appropriée dans les circonstances, le comité a appliqué les critères énoncés dans son cinquième rapport, publié en 2019, soit que le comité tienne compte de ce qui suit :

la gravité du manquement et son effet sur la capacité du sénateur de continuer à remplir ses fonctions parlementaires;

les répercussions du manquement sur d’autres sénateurs et sur l’honneur, la dignité et l’intégrité de l’institution du Sénat;

la confiance du public à l’égard du Sénat.

Ayant appliqué ces critères, le comité présente deux recommandations. Premièrement, il recommande que le Sénat ordonne au sénateur MacDonald de présenter des excuses sincères et sans réserve au Sénat pour avoir enfreint les paragraphes 7.1(1) et 7.1(2) du code relativement à sa conduite le 16 février 2022, et pour avoir enfreint les paragraphes 7.1(1) et 7.1(2), l’article 7.2 et le paragraphe 48(7) du code relativement à son manque de coopération dans l’enquête du conseiller sénatorial en éthique.

Nous recommandons également que le Sénat ordonne au sénateur MacDonald de publier ses excuses sur sa page Web du Sénat et sur son site Web personnel, ainsi que sur ses comptes de sénateur et ses comptes personnels dans les médias sociaux.

Recommander à un sénateur de s’excuser pour avoir manqué à ses obligations éthiques est une mesure qui n’a rien de nouveau ou d’inhabituel. Cette possibilité figure déjà dans la liste non exhaustive des mesures correctives et des sanctions qui sont prévues dans le code. Le comité a déjà formulé des recommandations semblables.

Votre comité recommande deuxièmement que le Sénat blâme le sénateur MacDonald pour avoir enfreint les paragraphes 7.1(1) et (2) du code relativement à sa conduite le 16 février 2022 et pour avoir enfreint les paragraphes 7.1(1) et (2), l’article 7.2 et le paragraphe 48(7) du code relativement à son manque de collaboration dans l’enquête du conseiller sénatorial en éthique.

Le blâme est l’un des moyens officiels que peut prendre un organe législatif pour désapprouver la conduite d’un de ses membres. Le blâme joue un rôle important au Sénat dans la mesure où il est consigné dans les comptes rendus officiels, où il rappelle les valeurs communes des sénateurs, où il permet de dénoncer certains comportements et où il vise à dissuader les autres sénateurs d’agir de la même façon. En adoptant cette sanction, le Sénat signifierait qu’il convient lui aussi, à l’instar du comité, que le sénateur MacDonald a manqué à ses devoirs de sénateur. Le blâme rappellerait en outre qu’il est important de respecter le code que tous les sénateurs se sont engagés à respecter.

Il convient de noter qu’en 2020 ce comité a recommandé le blâme dans des circonstances semblables, affirmant qu’avec l’adoption d’une telle sanction « le Sénat montrerait qu’il partage l’avis du comité, à savoir que le sénateur [...] ne s’est pas conduit de manière appropriée […] »

Dans le cas en question, le Sénat s’est rallié à la recommandation de blâme du comité.

En terminant, chers collègues, si vous n’avez pas encore lu les rapports du conseiller sénatorial en éthique et du comité, je vous encourage à le faire. Tous les sénateurs doivent respecter les obligations énoncées dans le code. Le Sénat ainsi que tous ses membres ont l’obligation de servir l’intérêt public. Cette obligation impose une responsabilité accrue aux membres de cette institution, qui doivent tenir leurs collègues responsables de leur conduite. Merci.

Son Honneur la Présidente [ + ]

Honorables sénateurs, conformément à l’article 12-29(2) du Règlement, nous ne pouvons pas encore prendre une décision au sujet de ce rapport. À moins qu’un sénateur ne veuille proposer l’ajournement, le débat sera ajourné d’office jusqu’à la prochaine séance du Sénat.

Est-ce d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Conformément à l’article 12-29(2) du Règlement, la suite du débat sur la motion est ajournée à la prochaine séance.)

Haut de page