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Éthique et conflits d'intérêts des sénateurs

Quatrième rapport du comité--Ajournement du débat

31 octobre 2024


Honorables sénateurs, je prends la parole en ma qualité de présidente du Comité sénatorial permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs au sujet du quatrième rapport du comité, qui a été déposé au Sénat le 10 octobre 2024.

Le 7 décembre 2023, le Sénat a adopté un ordre de renvoi autorisant le comité à examiner, afin d’en faire rapport, le cas de privilège concernant la séance du 9 novembre. Je ne relaterai pas ces événements à ce moment-ci. Les sénateurs peuvent lire les débats des 9 et 21 novembre ou consulter la décision de la présidence du 5 décembre 2023 pour connaître les détails.

Cet ordre de renvoi était unique à deux égards. Premièrement, les questions de privilège sont généralement renvoyées à notre Comité du Règlement. Deuxièmement, il demandait au comité d’examiner à la fois les obligations des sénateurs dans l’exercice de leurs fonctions et la nécessité éventuelle de mettre à jour notre Règlement et nos procédures en conséquence.

Dès le début de notre étude, les membres du comité ont compris que notre mandat visait la prévention. Ainsi, aucun sénateur n’a été invité à témoigner au sujet des événements particuliers du 9 novembre ou en réponse à ces événements. Le comité a plutôt choisi de faire appel à des universitaires, à des autorités parlementaires et procédurales et à des juristes qui travaillent dans le domaine de l’éthique et de la déontologie. Dans un premier temps, le comité a estimé qu’il était important de décrire les mécanismes qui existent déjà pour traiter les questions de conduite entre sénateurs. Il s’agit notamment de faire un recours au Règlement ou de soulever une question de privilège, de présenter une plainte dans le cadre du Code régissant l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs ou de la Politique du Sénat sur la prévention du harcèlement et de la violence .

De façon tout à fait délibérée, le présent rapport ne contient aucune conclusion et aucune observation sur la conduite d’un sénateur relativement à une violation alléguée des privilèges. Le comité a plutôt étudié attentivement les questions soulevées ce jour-là dans l’espoir que nos observations puissent servir de base solide à une discussion plus vaste sur les normes de civilité au Sénat.

L’étude nous rappelle que les sénateurs sont censés toujours respecter les normes de conduite les plus élevées. Les sénateurs sont également censés participer activement aux travaux du Sénat, notamment en débattant de questions d’importance nationale, en prenant position sur des questions de politique et des mesures législatives controversées et, parfois, en défendant avec zèle des positions politiques, tant dans le cadre des délibérations du Sénat que sur diverses tribunes publiques.

Pour que nous puissions nous acquitter de nos fonctions, le privilège parlementaire nous garantit la liberté de parole lorsque nous participons aux travaux du Sénat. Il nous protège également contre toute tentative d’intimidation ou d’obstruction lorsque nous participons à de tels travaux.

La plupart du temps, ces deux attentes peuvent coexister. Les questions controversées sont débattues respectueusement, et des points de vue opposés peuvent être exprimés sans que les sénateurs se sentent menacés ou intimidés. Cependant, les événements du 9 novembre et les comportements subséquents ont dépassé les limites du désaccord politique. Ils ont également soulevé des questions sur la définition de ces limites dans le Règlement actuel du Sénat, où elles ne seraient pas correctement exprimées, sur les critères à employer pour trancher les allégations de conduite inappropriée entre sénateurs et sur les personnes qui ont l’autorité de se prononcer à ce sujet.

Les membres du Comité sont reconnaissants à tous les témoins qui ont présenté des témoignages réfléchis et qui ont souligné les difficultés que rencontrent d’autres organismes législatifs et professionnels dans la codification des normes de conduite.

Dans le cas des règles d’éthique et de conduite du Sénat, notre rapport a noté que le code exige que le comité entreprenne un examen complet tous les cinq ans. Par conséquent, nous devons nous réjouir que des débats aussi nécessaires que celui-ci aient lieu afin de déterminer si les normes de conduite inscrites dans le code sont toujours adéquates. Nous croyons que ces réflexions permettent au code d’évoluer, tout en veillant à ce qu’il continue de refléter les aspirations de tous les sénateurs sur le plan éthique.

Un thème récurrent dans nos discussions concernait une approche de notre régime d’éthique fondée sur des principes, par opposition à une approche fondée sur des règles. Sur ce point, nous avons beaucoup entendu parler du Parlement du Royaume-Uni, où les parlementaires doivent respecter des principes éthiques de haut niveau dont l’application dans toutes sortes de situations fait l’objet de lignes directrices détaillées. Bien que les principes énonçant des aspirations qui figurent dans notre code aient pu servir le Sénat au cours de la dernière décennie, le comité a l’intention de déterminer si des règles, des directives ou des lignes directrices plus détaillées seraient utiles pour préciser les attentes.

La liberté de parole est devenue un thème important au cours de notre étude. Le comité considère qu’il est indispensable que les sénateurs puissent participer pleinement aux débats et exprimer leurs opinions dans le cadre des travaux parlementaires et en dehors de ceux-ci. Les sénateurs jouissent d’une certaine souplesse quant à ce qu’ils sont autorisés à se dire les uns aux autres pendant les délibérations et à la manière dont ils le disent, et il doit en être ainsi. La difficulté est de savoir où tracer la ligne entre, d’une part, des propos incisifs et percutants et, d’autre part, des propos déplacés ou intimidants. Nous reconnaissons également que toute tentative de codifier des règles de conduite concernant les propos tenus par les sénateurs — dans les débats ou en privé — nous oblige à trouver le difficile équilibre entre le maintien des normes de conduite les plus élevées et la protection de la liberté de parole.

Comme les sénateurs le savent, le conseiller sénatorial en éthique est chargé de mener des enquêtes et d’appliquer le code, tandis que le comité, lui, est chargé de fournir des directives générales et de recommander des sanctions ou des mesures correctives au Sénat en vue d’une décision définitive. Le Comité estime que les décisions relatives aux allégations de conduite inappropriée entre sénateurs doivent rester du ressort exclusif des sénateurs. Néanmoins, nous avons été intrigués par la présence de simples citoyens au sein du comité de déontologie de la Chambre des Lords et nous souhaitons en savoir davantage sur leur rôle.

Enfin, le comité a demandé aux témoins si le cadre actuel du code permettait de régir la conduite des sénateurs sur les médias sociaux.

Même si les témoins semblaient d’accord pour dire que cette conduite devait être soumise à l’application de règles, certains estimaient que le code avait déjà une portée suffisamment étendue pour régir les cas d’inconduite sur les médias sociaux, tandis que d’autres ont fait valoir que des mesures supplémentaires s’imposaient afin d’ajouter le concept de conduite appropriée dans les médias sociaux.

Honorables sénateurs, je dois vous rappeler qu’il s’agit d’un rapport provisoire qui ne contient aucune conclusion ou recommandation. Nous ne demandons pas au Sénat de l’adopter, ni aux sénateurs de prendre des décisions à ce stade-ci, car nous estimons que notre rapport n’a fait qu’effleurer ces questions importantes.

Nous espérons que notre rapport suscitera d’autres discussions et une réflexion sérieuse qui encouragera tous les sénateurs à songer à l’évolution que devrait connaître notre régime d’éthique. Dans cet esprit, je conclurai en disant que le comité a l’intention d’entreprendre bientôt son examen périodique du code.

Conformément à l’ordre de renvoi qui nous a été adressé le 7 décembre 2023, nous espérons que tous les sénateurs prendront le temps de lire notre rapport parce qu’il fournit de l’information importante pour mettre en contexte les questions que nous souhaitons examiner. De plus, le rapport permettra de déterminer quelles sont les mises à jour nécessaires, le cas échéant, pour renforcer les dispositions relatives à la conduite dans notre code et réaffirmer les obligations des sénateurs afin qu’ils respectent les principes relatifs à l’éthique dans l’exercice de leurs fonctions.

Merci.

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