Le Code criminel
Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Ajournement du débat
7 juin 2022
Propose que le projet de loi S-248, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, j’aimerais vous faire part de quelques observations au sujet du projet de loi S-248, le projet de loi d’intérêt public du Sénat que j’ai déposé jeudi dernier.
Le projet de loi vise à modifier certains articles du Code criminel ayant trait à l’aide médicale à mourir afin de permettre à une personne atteinte d’une maladie, d’une affection ou d’un handicap graves et incurables de faire une déclaration écrite pour consentir à l’avance à l’aide médicale à mourir.
Ce projet de loi est le résultat de nombreuses années de mûre réflexion et de consultations approfondies auprès de dizaines d’intervenants, d’organisations, d’experts et, plus important encore, de personnes ayant l’expérience de cas vécus.
L’année dernière, le Sénat a adopté un amendement à un projet de loi du gouvernement à propos des demandes anticipées. Malheureusement, cet amendement a été rejeté par le gouvernement. Néanmoins, je suis fière de faire une nouvelle tentative après une année additionnelle d’étude où de plus amples consultations ont été menées.
Mon intention est de vous présenter de brèves observations sur le projet de loi et de vous donner plus de détails en prévision de notre retour à l’automne, quand nous pourrons approfondir nos débats et notre examen de cette mesure législative. Cependant, je crois qu’il est nécessaire de déposer le projet de loi maintenant pour deux raisons. Le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir s’est penché sur les questions relatives aux demandes anticipées, aux mineurs matures, aux cas où la seule affection sous-jacente est un trouble mental, à l’état des soins palliatifs et à la protection des Canadiens handicapés. Cela fait une décennie que des rapports fédéraux et des rapports de groupes d’experts sont publiés sur ces questions, plus particulièrement sur les demandes anticipées. Il y a une foule d’avis sur ces questions, et des recommandations ont été faites en faveur des demandes anticipées, mais nous ne savons toujours pas si le comité entendra d’autres témoins au sujet des demandes anticipées d’ici l’échéance établie pour la publication du rapport, en octobre. Je ne suis donc pas sûre que l’examen permettra de cerner d’éventuelles lacunes dans la loi.
Nous devons obtenir des précisions juridiques sur la question. Il y a quelques semaines, le gouvernement du Québec a présenté un projet de loi sur les demandes anticipées. C’est un projet de loi raisonné qui s’appuie sur les recommandations du rapport du comité transpartisan du Québec sur la fin de vie. Ce rapport et le projet de loi subséquent ont établi un cadre et un échéancier pour les demandes anticipées, ainsi que des exigences relatives à la tenue d’un registre et au processus de modification et d’authentification d’une demande anticipée. J’estime que ces mesures assurent un bon équilibre entre les mesures de sauvegarde et le respect de l’autonomie de la personne. Toutefois, si ce projet de loi est adopté au Québec, il y aura un écart entre les exemptions prévues dans le Code criminel à l’égard de l’aide médicale à mourir et le cadre législatif provincial relatif aux demandes anticipées. Évidemment, cette situation suscite des inquiétudes quant à la responsabilité criminelle et pourrait donner lieu à une contestation devant la Cour suprême du Canada. L’objectif est donc de commencer à se pencher sur cette question pour prévoir et prévenir toute ambiguïté entre les dispositions fédérales et provinciales. Un comité sénatorial pourra rassurer chacun d’entre nous et, je l’espère, la population canadienne, car son but serait de faire un travail de renseignement, d’anticipation et de préparation, et de nous donner à tous le temps de nous pencher de plus près sur les questions juridiques.
Selon moi, une demande anticipée donnerait droit à une mort digne. Le public l’appuie déjà. Comme le gouvernement a été un peu réticent à prendre les devants, je crois que c’est l’occasion de le faire. C’est notre responsabilité, en tant que législateurs, de faire le gros du travail, d’examiner la manière de fournir des mesures de sauvegarde et de tracer la voie à suivre. Il me tarde de travailler avec vous pour combler les lacunes des lois sur l’aide médicale à mourir.