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LE SÉNAT — Le décès de Sa Majesté la reine Elizabeth II

Hommages

20 septembre 2022


L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à notre défunte souveraine, la reine Elizabeth II, qui est décédée le 8 septembre. Tant de choses ont été écrites et dites au sujet de la reine ces derniers jours. Mais après un règne de 70 ans à titre de monarque, des millions de kilomètres parcourus et des dizaines de milliers d’audiences, de rencontres fortuites et de promenades, il est normal qu’il y ait d’innombrables histoires à raconter. Allant de puissants chefs de gouvernement du monde entier à des commerçants écossais, le monde s’est souvenu de son sens aigu du devoir, de son sens de l’humour, de sa gentillesse, de sa sagesse et de sa dignité au cours de ses 96 années remarquables.

Elle a incarné une constance dans la vie de nombreux Canadiens tout au long de la précieuse histoire de notre pays. La reine Elizabeth II a visité le Canada 22 fois en tant que monarque, plus souvent que tout autre pays du Commonwealth. Elle a visité chaque province et territoire au moins une fois. Sa Majesté a lu deux fois le discours du Trône du gouvernement canadien, et chaque lecture marquait un moment important de son règne. La première fois était en octobre 1957, lors de sa première tournée royale au Canada en tant que monarque. Elle a assisté à l’ouverture de la session parlementaire du gouvernement du premier ministre Diefenbaker, lequel avait été élu en juin. La deuxième fois était en 1977, lors de son jubilé d’argent.

Cependant, le moment dont les Canadiens se souviennent le mieux est sans doute celui qui a eu lieu en avril 1982, lorsque plus de 30 000 personnes se sont rassemblées sur la Colline du Parlement pour la voir signer la Loi constitutionnelle de 1982. Après plus de 18 mois de négociations avec les provinces et l’adoption finale de notre loi constitutionnelle par la Chambre des communes et la Chambre des lords à Londres, en Angleterre, la Constitution du Canada a été rapatriée au pays. Nous avons regardé avec fierté Sa Majesté, le premier ministre, le ministre de la Justice et le registraire général signer le document historique.

L’amour de la reine Elizabeth pour les chevaux est légendaire. Elle a commencé à monter à cheval à l’âge de 4 ans, lorsqu’elle a reçu en cadeau un poney Shetland. En 1969, la Gendarmerie royale du Canada a offert à la reine une jument nommée Burmese.

Sa Majesté a monté Burmese pendant 18 années consécutives lors de la cérémonie de la parade du drapeau. Lorsque le cheval a pris sa retraite en 1986, la reine a décidé de ne plus monter de cheval lors de la cérémonie, puis elle a commencé à y participer à bord d’une calèche. Plus tard, lorsqu’on lui a demandé quel était son cheval préféré, elle a répondu sans hésitation « Burmese ».

Lorsqu’elle a eu 21 ans, en 1947, la princesse Elizabeth a promis que toute sa vie, qu’elle soit longue ou courte, serait consacrée à notre service, soit au service des peuples de la famille du Commonwealth. Elle a tenu cette promesse toute sa vie, qui, heureusement, a été longue. Moins de 48 heures avant son décès, elle a accueilli sa 15e première ministre britannique. Durant son règne, le Canada a élu 12 premiers ministres, et, plus remarquable encore, 179 personnes ont été premiers ministres dans son royaume au cours de ses sept décennies en tant que monarque.

La technologie a évolué rapidement au fil des ans et Sa Majesté s’est adaptée à la nouvelle réalité. En 1957, elle a été le premier monarque à diffuser un message télévisé de Noël. Le palais de Buckingham et la famille royale ont des comptes Facebook et Twitter, avec sa bénédiction.

Plus récemment, quand la pandémie de COVID-19 s’est abattue sur le monde, la reine a continué d’exercer ses fonctions à l’aide de la technologie. Elle a organisé des rencontres Zoom avec des organismes de bienfaisance, des chefs de gouvernement et des membres de sa famille. Elle a apporté du réconfort lors de son allocution télévisée portant sur la COVID-19, où elle s’est adressée à la Grande-Bretagne et au Commonwealth en ces termes : « [...] nous serons à nouveau avec nos amis, nous serons à nouveau avec nos familles et nous nous retrouverons à nouveau. » Ces paroles sont encore plus lourdes de sens aujourd’hui.

Au XXIe siècle, le rôle du monarque est, à bien des égards, symbolique. Toutefois, la reine Elizabeth a donné un véritable sens à ce rôle et à ce symbolisme. Elle réunissait les gens avec ses paroles, ses actions et ses gestes. La reine Elizabeth était admirée par des millions de personnes et, dans un monde où l’âge moyen de la retraite est de 66 ans, elle a travaillé pendant 30 ans de plus que la moyenne, demeurant tout aussi engagée à l’égard de son travail jusqu’à la fin.

Lors de la dernière soirée des célébrations de son jubilé de platine, elle a invité l’ours Paddington à prendre le thé. Ce charmant sketch est devenu magique et puissant, voire un peu prémonitoire. L’étincelle dans ses yeux lorsqu’elle a montré son sandwich à la marmelade et qu’elle a enfin divulgué au monde ce qu’elle gardait dans son éternel sac à main a fait rire la foule et les millions de téléspectateurs.

Juste avant que Queen — le groupe — ne monte sur scène, Paddington a pris un moment pour la regarder avec tendresse et dire ce que tous les téléspectateurs pensaient : « Merci pour tout. » Au Canada, nous la remercions également pour les 70 années durant lesquelles elle a incarné une diplomatie et un service chaleureux, sincères et dignes.

Alors que nous entrons dans une ère post-élisabéthaine, son dévouement et son sens du devoir, ainsi que son esprit, sa gentillesse et son sourire resteront gravés dans la mémoire des Canadiens de partout au pays, en particulier ceux qui ont eu le plaisir de lui parler lors d’une réception, de la rencontrer brièvement, de la voir de loin ou simplement de reconnaître l’affection sincère qu’elle portait à ce pays et à ses habitants. Elle aimait le Canada et le Canada l’aimait.

Au nom du Sénat du Canada, j’offre mes plus sincères condoléances au roi Charles III et à toute la famille à l’occasion du décès de leur mère, grand-mère et arrière-grand-mère, Sa Majesté la reine Elizabeth II.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) [ - ]

Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de joindre ma voix à celles des innombrables personnes qui ont exprimé leur profond chagrin en apprenant le décès de Sa Majesté la reine Elizabeth II et de rendre hommage à sa vie extraordinaire.

Je sais que des millions de personnes au Canada, au Royaume-Uni, dans le Commonwealth et partout dans le monde sont profondément touchées par le décès de Sa Majesté. Je suis persuadé que cette douleur que nous ressentons tous est beaucoup plus intense pour ses proches et ceux qui la côtoyaient, qui l’ont inhumée hier à l’occasion d’une magnifique cérémonie. Je tiens d’abord à offrir mes plus sincères condoléances aux membres de la famille royale, car, après tout, ils pleurent non seulement la perte de leur monarque, mais aussi celle d’une mère, d’une grand-mère et d’une arrière-grand-mère aimante.

Le décès de la reine Elizabeth II nous a tous laissés désemparés, en grande partie parce que nous sommes nombreux à être incapables de concevoir un monde dont elle ne ferait pas partie. Pour la plupart d’entre nous, elle a été la seule souveraine que nous ayons jamais connue, un symbole pérenne nous rappelant nos valeurs et une présence constante tout au long de décennies de grandes transformations.

Sa Majesté laisse un héritage incomparable qui a été défini d’abord et avant tout par son dévouement désintéressé pour l’institution qu’elle a servie. Même si elle s’est vue subitement projetée dans l’ordre de la succession au trône après l’abdication de son oncle, le roi Édouard III, la reine Elizabeth a accepté la responsabilité de la Couronne et s’est consacrée entièrement à son service. À 21 ans, lorsqu’elle était encore princesse, elle s’est engagée à consacrer sa vie à son peuple. Tout au long de son règne historique comme reine, elle n’a jamais fléchi — pas une seule fois — dans son engagement. Elle a porté le poids symbolique de la Couronne avec élégance et sans se plaindre.

Le règne de la reine Elizabeth II s’est étendu sur 70 ans. Elle était la souveraine au plus long règne du Canada; il s’agit d’un jalon important qu’on a souligné plus tôt cette année, lors du jubilé de platine de Sa Majesté. L’ensemble des Canadiens et des citoyens des pays du Commonwealth devraient être extrêmement reconnaissants d’avoir pu célébrer une occasion d’aussi grande importance et de faire partie de moments aussi précieux avec notre reine bien-aimée.

Quand elle a accédé au trône en 1952, le monde était très différent de ce que nous connaissons aujourd’hui. À l’époque, la planète se relevait à peine de cette grande catastrophe qu’avait été la Seconde Guerre mondiale. Tout au long de son règne, le monde a changé du tout au tout, et ce, plus d’une fois. Il y a eu le début de la guerre froide, les transformations sociales et culturelles des années 1960, l’effondrement de l’Union soviétique, les attaques du 11 septembre et la guerre contre le terrorisme, sans oublier la crise financière mondiale. Puis, il y a eu l’entrée et le retrait du Royaume-Uni dans l’Union européenne et, tout récemment, la pandémie de COVID-19. Sa Majesté a été témoin de tous ces chamboulements et elle a été notre pilier dans les périodes d’incertitude.

Sa Majesté s’est appuyée sur sa foi chrétienne inébranlable tout au long de son règne pour connaître la voie à suivre, peu importe les circonstances. Ses convictions religieuses transparaissaient souvent dans ses messages de Noël, qu’elle voulait empreints d’espoir et de confiance. Ses décisions prenaient appui sur cette solide foi, qui était un véritable phare pour nous tous.

En ce qui concerne l’histoire du Canada, la reine Elizabeth II a joué un rôle immense, en plus d’être une présence constante dans nos vies depuis le début de son règne. Douze premiers ministres canadiens se sont succédé pendant son règne. Au fil des ans, Sa Majesté a pris part à certains des moments les plus mémorables et des réalisations les plus remarquables du pays, et elle nous a aussi guidés pendant des périodes difficiles et incertaines.

Elle vouait aux Canadiens un amour et une affection évidents, que nous pouvions sentir en tout temps et particulièrement dans les moments difficiles. Elle nous a montré jusqu’à la fin que nous étions toujours présents dans ses pensées et dans son cœur. En effet, la dernière déclaration publique de Sa Majesté, faite quelques jours à peine avant son décès, s’adresse à la famille des victimes des terribles attaques survenues en Saskatchewan.

Parmi les divers pays dont elle était la reine, c’est le Canada qu’elle a visité le plus souvent. Nous avons eu le grand bonheur de l’accueillir pour 22 visites officielles. Chaque fois, des foules de Canadiens enthousiastes attendaient leur souveraine bien-aimée pour l’accueillir et lui offrir des messages de gratitude et de petits cadeaux. Dans ses interactions avec les Canadiens, la reine montrait, avec la bienveillance et la grâce qui la caractérisaient si bien, que cette appréciation était réciproque.

Je suis un fier Manitobain, et j’ai toujours attaché une grande importance aux visites que Sa Majesté a faites dans ma province. C’était de grandes occasions de réjouissances pour tous les Manitobains qui l’aimaient et l’admiraient profondément. Elle est venue au Manitoba six fois, d’abord à titre de princesse puis cinq fois en tant que reine.

Je souhaite parler d’une visite en particulier, celle qui m’a le plus marqué. Il s’agit de la dernière visite de la reine à Winnipeg, en juillet 2010. Sa Majesté et son époux, le duc d’Édimbourg, ont été accueillis en tant que premiers visiteurs officiels à atterrir à l’aéroport international James Armstrong Richardson. L’événement soulignait non seulement l’ouverture du nouvel aéroport, mais aussi la contribution des bénévoles aux activités de celui-ci.

Après un déjeuner avec le lieutenant-gouverneur du Manitoba de l’époque, ont eu lieu le dévoilement d’une statue de la reine, la cérémonie de plantation d’un arbre en l’honneur du jubilé de diamant de la reine et, enfin, un bain de foule pour saluer les Manitobains. Plus tard dans la journée, le couple devait se rendre à diverses célébrations pour le Musée canadien pour les droits de la personne.

En chemin vers leur lieu de rendez-vous, la reine et le prince Philip se sont arrêtés à l’esplanade Riel. Il importe de mentionner que c’était le milieu de l’été et, si ma mémoire est fidèle, une journée de juillet très chaude. Néanmoins, Sa Majesté a, par une chaleur de 30 degrés, parcouru à pied une distance considérable — plus d’un kilomètre — pour traverser le pont. Sa présence a toujours attiré les foules. Ce jour-là, de nombreux Manitobains ont eu l’occasion de voir Sa Majesté.

Je me souviens très bien que Sa Majesté a pris le temps de parler et d’échanger avec des dizaines et des dizaines d’enfants. Il n’est pas étonnant que les Manitobains, les Canadiens et, franchement, le monde entier aient aimé leur reine. La reine Elizabeth II devait avoir 84 ans à l’époque, et elle était pourtant solide comme un roc et une véritable force. Pendant plus d’une heure, elle s’est comportée avec grâce et élégance, comme elle l’a toujours fait tout au long de son remarquable règne.

Je garde un doux souvenir de cette visite, qui constitue un véritable témoignage de la force et du sens du devoir de Sa Majesté, qui a perduré jusqu’à la fin de sa vie.

Le décès de Sa Majesté marque la fin d’une époque, non seulement pour le Canada et le Commonwealth, mais aussi pour le monde entier. Elle a tellement apporté à tant de gens. Des millions de personnes ont bénéficié de la sagesse unique qu’elle seule était capable d’offrir grâce à la profondeur inégalée de ses expériences. Si nous pleurons son absence, nous devons aussi être reconnaissants pour les précieuses leçons qu’elle nous a données à travers son service et chérir les souvenirs qu’elle nous a laissés. Il nous reste à célébrer une vie véritablement remarquable, qui a été définie, avant tout, par le service, l’engagement et le leadership.

Alors que nous disons adieu à notre reine bien-aimée, nous entamons une nouvelle ère. Nous honorons la constance et l’engagement dont elle a fait preuve en regardant vers l’avenir, vers notre nouveau monarque, le roi Charles III.

Que Dieu protège le roi.

L’honorable Raymonde Saint-Germain [ - ]

Je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage, au nom du Groupe des sénateurs indépendants, à une femme au sens du devoir exemplaire, Sa regrettée Majesté Elizabeth II, dont le récent décès à l’âge de 96 ans nous attriste. Avant tout, j’exprime nos plus sincères condoléances à la famille royale, au peuple britannique ainsi qu’à toutes celles et à tous ceux — nombreux — à qui la reine inspirait respect et admiration.

Son départ aura mis un terme à 70 ans de règne. Cheffe du Commonwealth, elle a été la souveraine du Royaume-Uni, de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ainsi que des 14 pays du Commonwealth — dont le Canada —, un règne qu’elle a exercé avec une maîtrise et une constance incomparables.

On ne peut que reconnaître la force de cette femme et admirer son dévouement indéfectible au service public. Durant toutes ces années, elle a su respecter son devoir de réserve, elle qui, par sa culture et son intelligence, avait certainement des opinions fort bien documentées. Je pense qu’il s’agit là d’un principe fondamental pour la crédibilité de toutes les institutions parlementaires d’inspiration britannique, dont la nôtre.

Ce dévouement est ce que je retiens d’elle au premier chef, en plus de sa grande culture. La reine a manifesté à plus d’une occasion son attachement pour la francophonie ainsi que son amour et son respect pour la langue française, dans laquelle elle s’est souvent exprimée avec maîtrise.

En 1951, soit avant son couronnement, elle est venue au Canada en tant que princesse pour la première de ses nombreuses visites au pays. D’ailleurs, elle est venue en visite officielle à 22 reprises. Elle était accompagnée de son époux, le duc d’Édimbourg. Aussitôt arrivé à Montréal, le couple est monté à bord d’un train qui s’est arrêté à l’Anse-au-Foulon, dans la ville de Québec, un lieu qui a joué un rôle central dans la découverte du Canada et qui a une riche histoire, ayant notamment permis d’approvisionner la Grande-Bretagne en bois. Selon des reportages de l’époque, pendant sa visite, la princesse a pris le temps de déguster « une crème glacée à l’érable et aux noix avec un filet de sirop d’érable ». Comme elle n’était pas encore reine, elle pouvait s’accorder plus de liberté.

Symbole de stabilité, la reine a assumé ses fonctions de manière indéfectible malgré les crises qui sont survenues tout au long de son règne. Depuis le décès de son père, George VI, en 1952, soit l’année après sa visite à Québec, alors qu’elle n’avait que 25 ans, la reine Elizabeth II a incarné la continuité. À une époque où les choses évoluaient trop vite, elle était un point d’ancrage plutôt rassurant, compte tenu des innombrables bouleversements que nous avons vécus au fil des années.

Dans cette enceinte même, sa présence a toujours été symbolisée par la masse, qui a été le témoin de l’histoire parlementaire canadienne même avant la Confédération et qui continue de rappeler sa présence à chacune de nos séances. La masse actuelle a survécu à trois incendies à Montréal, ainsi qu’à l’incendie de 1916 qui a détruit l’édifice du Centre original du Parlement. C’est l’un des symboles les plus importants que nous avons hérités du système de Westminster. Cette masse a résisté au temps et aux épreuves, ce qui, à mes yeux, a toujours constitué une belle métaphore de la reine.

Dans le même ordre d’idées, je ne peux m’empêcher de me souvenir d’une conversation que j’ai eue avec l’huissier du bâton noir, M. J. Greg Peters, qui m’a fait part du généreux cadeau que la reine a fait au Sénat du Canada à l’occasion du 150e anniversaire de la Confédération. Il s’agit d’une restauration royale de la masse du Sénat réalisée au château de Windsor par les experts les plus réputés du monde.

L’accession au trône de la reine Elizabeth a également coïncidé avec la fin tant attendue de la période coloniale de l’Empire britannique. Elle a réussi à mener à bien cette transition du colonialisme du XIXe siècle vers la démocratie et l’état actuel du monde tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Plus important encore, elle l’a fait avec grâce et bonne volonté.

On se souviendra affectueusement de la reine comme une figure publique extraordinaire et une femme exceptionnelle avec une riche expérience, une grande intelligence et une vaste culture, qui a toujours assumé son rôle avec la résilience et la force intérieure nécessaires pour remplir ses devoirs tout en respectant le plus important : son devoir de réserve.

La vague d’hommages et de manifestations de chagrin lors de son décès montre que, en tant qu’être humain, elle était autant aimée que respectée dans l’ensemble des pays du Commonwealth et au‑delà.

La dignité de la reine, tout au long de son règne, est certes pour tous les parlementaires, et en particulier pour nous, membres du Sénat — Chambre de second regard objectif —, une source d’inspiration. Nous garderons d’elle l’image d’une femme qui symbolise une abnégation, une constance, un savoir-faire et un savoir-être exemplaires. Puissions-nous, en sa mémoire, nous rappeler que nous sommes au service d’un idéal supérieur à nous‑mêmes. Merci.

L’honorable Jane Cordy [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au nom du Groupe progressiste du Sénat pour exprimer, à notre tour, nos condoléances à la suite du décès de Sa Majesté la reine Elizabeth II.

Honorables sénateurs, il y a des moments de bouleversements où des choses qui nous semblaient auparavant inébranlables ne le sont plus. Encore une fois, nous sommes témoins d’une page d’histoire alors que notre cheffe d’État, le monarque britannique au règne le plus long, est morte le 8 septembre entourée de sa famille au château de Balmoral, en Écosse.

Pour une grande partie de notre vie, si ce n’est pas l’entièreté de celle-ci, la reine a été un visage familier sur les timbres et la monnaie. C’était presque impossible de voir un corgi sans penser à elle. Pour certains, elle était la femme qui a sauté d’un hélicoptère avec James Bond. Pour d’autres — comme le sénateur Gold l’a dit plus tôt —, elle était la grand-mère qui a bu le thé et mangé des sandwichs à la marmelade avec l’ours Paddington. Elle a été la première femme de la famille royale à servir en tant que membre actif à temps plein des forces armées britanniques. Elle s’adressait à nous de sa voix rassurante chaque Noël. Elle représentait un pilier inébranlable de force et de stabilité dans un monde aux changements inéluctables et inattendus.

Beaucoup a été dit au sujet du nombre incalculable d’événements qui sont passés dans l’histoire au cours du règne de la reine Elizabeth. Les transformations dont nous avons été témoins au cours de cette période de 70 ans sont remarquables. Son couronnement a été le premier à être télévisé et a donné lieu à la toute première diffusion télévisée transatlantique. En fait, on avait fait venir la pellicule par avion au Canada pour le diffuser sur les ondes de Radio-Canada. Quand on pense à la façon dont la nouvelle du décès de la reine s’est répandue à la suite d’un gazouillis de la famille royale, on constate à quel point notre paysage technologique a changé!

Les condoléances ont afflué de partout au Royaume-Uni, dans le Commonwealth et dans le monde, honorant la vie et l’héritage extraordinaires de feu Sa Majesté. Les hommages regorgent de mots tels que « grâce », « sagesse », « dévouement » et « charme ». D’aucuns racontent pour la première ou la ixième fois leur rencontre personnelle avec la reine. Dans toutes ces histoires, il est frappant de constater à quel point elle avait le don, en dépit du rôle monumental qu’elle occupait, d’établir un rapport personnel avec les gens.

Ces moments qui nous laissent entrevoir la personne derrière le titre prouvent qu’en plus de s’être si bien acquittée de ses fonctions publiques en tant que monarque, ce pour quoi elle est célébrée à juste titre, elle a également réussi à marquer à jamais le cœur et l’esprit de quiconque a eu la chance de croiser son chemin. Tant de nous ont ressenti ce lien, que nous ayons eu ou non le privilège de la rencontrer en personne. Je sais que des gens de toutes les provinces et de tous les territoires, notamment les résidants des villes où elle s’est arrêtée lors de ses visites au Canada, se remémorent le passage de Sa Majesté dans leur région avec énormément de fierté.

Évidemment, je ne fais pas exception. Je vous rappelle que ma province, la Nouvelle-Écosse, a eu le plaisir d’accueillir la reine Elizabeth à cinq occasions distinctes. Sa première visite officielle était en 1951, alors qu’elle était encore princesse. Au sujet de son passage à Cap-Breton, CBC News raconte :

Quand cette superbe jeune fille et son séduisant mari sont venus nous voir au Cap-Breton, c’était le plus grand jour que nous ayons jamais eu sur l’île.

Son dernier voyage en Nouvelle-Écosse remonte à 2010, et ce fut également sa dernière visite royale au Canada. Elle avait alors entamé sa tournée royale à Halifax et avait participé à plusieurs événements importants, dont la célébration du 400e anniversaire du baptême du grand chef Henri Membertou dans le cadre d’un événement culturel mi’kmaq, la célébration du centenaire de la Marine royale canadienne et la nouvelle inauguration de la résidence du gouverneur pour sa réouverture après rénovations.

La première visite officielle de la reine Elizabeth au Canada en tant que monarque a eu lieu en 1957. C’est la première fois qu’elle a inauguré la session parlementaire en lisant le discours du Trône dans la salle du Sénat. À cette occasion, elle a rappelé les paroles de « l’autre Élisabeth », qu’elle a citée en disant : « [L]a gloire de ma couronne aura été d’avoir régné entourée de votre amour. » Elle a ensuite déclaré :

Maintenant, ici, dans le Nouveau-Monde, j’aimerais vous dire, à mon tour, que mon plus grand désir est que, dans les années à venir, je puisse ainsi régner au Canada et rester ainsi présente à vos mémoires.

Chers collègues, je ne peux m’empêcher d’ajouter que le souhait de feu Sa Majesté a été exaucé.

Elle a également ouvert la troisième session de la 30e législature lors de sa tournée du jubilé d’argent en 1977. À cette occasion, elle a déclaré au Parlement :

Lors des dix voyages que nous avons faits ensemble au Canada en vingt-cinq ans, dont sept durant la dernière décennie, le Prince Philip et moi avons rencontré des milliers de Canadiens, de tous milieux et de tous âges, dans chaque province et territoire. Mes meilleurs souvenirs de ces voyages à travers le pays, je les dois à ces contacts personnels qui m’ont révélé la force énorme et l’étonnante diversité du Canada.

Comme on l’a souligné plus tôt, le dévouement de la reine aux contacts personnels sera son legs pour la postérité. À titre de monarque ayant fait le plus de voyages officiels de l’histoire, elle recherchait constamment ce genre d’expériences.

Sa Majesté a certainement rempli la promesse qu’elle avait faite à 21 ans, lorsqu’elle a déclaré que toute sa vie serait dédiée au service. D’ailleurs, la dernière photographie publique de la reine a été prise devant un foyer du château de Balmoral où la reine se tenait pour la nomination officielle de la nouvelle première ministre britannique, la quinzième à occuper ce poste sous le règne de la reine. Cette rencontre a eu lieu seulement deux jours avant le décès de la reine. Le lendemain, la dernière déclaration publique de la reine était publiée; elle s’adressait à la gouverneure générale et à la population du Canada pour offrir ses condoléances à la suite des attaques survenues en Saskatchewan et dire qu’elle pensait à la nation crie de James Smith et à la tragédie qu’elle avait vécue. Sa Majesté a exprimé sa douleur face à ce que nous vivions et c’est maintenant à nous d’exprimer notre douleur face à son départ.

Le deuil est une chose compliquée, et j’aimerais reconnaître que nous avons tous entretenu une relation différente avec la monarchie. Certains sont peut-être aux prises avec des émotions contradictoires ces jours-ci. Mes pensées accompagnent en particulier les peuples autochtones, car leur relation était une relation fondée sur des traités. Même si bien des sénateurs ont parlé du respect et de la compassion de la reine, c’est certain qu’il reste beaucoup de travail à faire dans le cheminement vers la réconciliation.

La reine a déjà dit que « le deuil est le prix que nous payons pour l’amour ». Au nom du Groupe progressiste du Sénat, j’offre mes sincères condoléances à la famille royale et à tous ceux qui pleurent la perte de ce monarque bien-aimé. Que son héritage de force, de stabilité et de service soit une inspiration pour nous tous.

Qu’elle repose en paix. Que Dieu protège le roi.

L’honorable Scott Tannas [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à feu Sa Majesté la reine Elizabeth II, reine du Canada et notre cheffe d’État. Au nom de mes collègues, je tiens à exprimer nos plus sincères condoléances au roi Charles III, à la famille royale, aux Canadiens et à tous les peuples du Commonwealth.

Au cours des 70 dernières années, elle a accompagné le peuple canadien tout au long de l’évolution de son pays vers la modernité et, aujourd’hui, la postmodernité. Lors de son accession au trône, Louis Saint-Laurent était premier ministre. Depuis lors, comme on l’a dit, elle a vu 13 premiers ministres canadiens se succéder. En fait, elle a accédé au trône à l’époque de Staline, Churchill, Truman, Mao Zedong et Nehru. L’accession au trône de cette jeune reine s’est donc déroulée à une époque incroyable.

Certes, elle a vu défiler son lot de dirigeants hauts en couleur, puisqu’elle a été reine à l’époque de Castro, Kennedy, Gorbatchev, Kadhafi, Idi Amin et bien d’autres. Elle a été présente lors de plusieurs jalons importants de la vie canadienne : l’ouverture de la voie maritime du Saint-Laurent en 1959, l’Expo 67, les Jeux olympiques de 1976 à Montréal, le rapatriement de la Constitution, le Stampede de Calgary en 1939 et 1951 en tant que princesse Elizabeth, et de nouveau en 1959, 1973 et 2005. Elle nous a également accompagnés lors des célébrations du centenaire de la Marine canadienne et de la GRC, pour ne nommer que celles-ci.

En 2010, elle a dit à Toronto que le développement du Canada en tant que pays a été remarquable. Ce pays vaste, riche et varié en a inspiré plus d’un et en a attiré beaucoup plus par son adhésion à certaines valeurs. Une partie d’entre elles sont inscrites dans la loi, mais j’imagine qu’il y en a tout autant se trouvant tout simplement dans le cœur des Canadiens ordinaires.

En tout, elle a visité le Canada 22 fois et elle a lu le discours du Trône à deux reprises dans notre ancienne enceinte, dans l’édifice du Centre, en 1957 et en 1977.

Même si sa mort était inévitable, son départ a été un choc parce qu’elle était présente dans notre vie depuis si longtemps. La grande majorité des Canadiens n’ont connu aucun autre souverain. Son image se trouve sur notre monnaie et sur des photographies dans des centres communautaires et des édifices publics partout au pays. Le fait qu’elle soit notre reine était une constante dans notre vie.

À l’écoute des hommages des derniers jours, deux thèmes se dégagent : sa volonté de servir et le grand respect que lui portaient les Canadiens et les gens du Royaume-Uni, de ses autres royaumes, du Commonwealth et d’ailleurs dans le monde. Comme nous le savons tous, initialement, il était hautement improbable qu’elle soit un jour notre souveraine. Un étrange détour du destin — l’abdication d’Édouard VIII — a changé son parcours et sa vie.

En 1936, alors qu’elle n’avait que 10 ans, le Telegraph-Journal l’a désignée l’enfant la plus importante de l’empire. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, elle s’est engagée dans le service territorial auxiliaire, le seul service militaire accessible aux femmes en Grande-Bretagne à l’époque, où elle a appris à réparer et à conduire des camions lourds. Elle a été la première femme de la famille royale à servir en temps de guerre. Les médias l’ont surnommée « la princesse mécanicienne ».

Devenue reine, elle s’est consacrée au service de son peuple, avec un engagement demeuré indéfectible. Pendant des décennies, elle a représenté la Couronne avec grâce et dévouement. Elle a été une source de stabilité en période de discorde politique et une source de réconfort vers laquelle se tourner dans les temps difficiles. Elle a été un rempart à la fois symbolique et, au besoin, concret pour la démocratie parlementaire. Ce fut particulièrement important lors de son dernier discours, prononcé au cours de la pandémie. Dans le chaos, elle nous a indiqué de sa voix rassérénante que tout irait bien et que nous nous retrouverions un jour.

Elle s’est rendue à six reprises dans ma province, l’Alberta. Elle a assisté à un match de la Ligue canadienne de football, lors duquel Edmonton a battu Winnipeg dans la demi-finale de l’Ouest. Désolé, sénateur Plett.

Elle a rencontré des dirigeants autochtones à de nombreuses reprises. Lors de sa dernière visite, en 2005, la route 2 a été rebaptisée route Queen Elizabeth II et le musée provincial de l’Alberta est devenu le Musée royal de l’Alberta. On a souligné qu’il a plu presque tous les jours pendant cette visite, parfois très fort, mais elle a persévéré et a respecté le programme malgré le temps.

Cet engagement envers le service et le Canada lui a valu le respect et l’admiration des Canadiens. Beaucoup ont des histoires merveilleuses à raconter au sujet de leur rencontre avec la reine.

Après avoir écouté les hommages rendus par tous mes collègues qui ont pris la parole avant moi et de nombreuses autres personnes du monde entier, je ne peux nier que la reine Elizabeth II était chérie. Il est également clair que la reine avait un faible pour le Canada.

Dans certains des hommages qui ont été rendus depuis son décès, on nous a rappelé le côté plus doux de la reine Elizabeth, que nous avons entrevu à quelques reprises. Ces dernières années, nous l’avons vue partir en mission avec James Bond pendant les Jeux olympiques de Londres. Elle a pris le thé avec l’ourson Paddington. Elle a répondu par deux mots puissants au défi de Barack Obama avant les Jeux Invictus.

Elle nous manquera beaucoup.

Nous souhaitons la bienvenue à notre nouveau roi, Charles III, en tant que nouveau chef d’État. Que son règne soit long et fructueux. Que Dieu protège le roi.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) [ - ]

Honorables sénateurs, c’est le cœur lourd que je prends la parole aujourd’hui au Sénat du Canada pour rendre hommage à un illustre personnage qui a marqué le monde, à une source d’inspiration pour beaucoup de gens et à une véritable leader : feu Sa Majesté la reine Elizabeth II, notre reine bien-aimée.

Notre souveraine, notre cheffe d’État et la commandante en chef des Forces armées canadiennes a effectué 22 visites officielles au Canada. Pendant près de la moitié de l’existence du Canada, elle a été notre reine, et le Canada occupait une place spéciale dans son cœur, de la même façon qu’elle occupait une place dans le cœur de nombreux Canadiens d’un océan à l’autre. Elle était une constante dans un monde en perpétuel changement, un modèle pour des millions de personnes et une présence apaisante et rassurante.

En février 1952, le roi George VI est mort, et la princesse Elizabeth a immédiatement accédé au trône à titre de reine. En 1965, elle a effectué la première visite d’État en Allemagne de l’Ouest, soit la première visite officielle faite à cet endroit par un membre de la royauté britannique depuis 1913. Cette visite importante a marqué le 20e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale ainsi qu’un changement d’orientation pour les deux pays.

En 1970, la reine a visité l’Australie et la Nouvelle-Zélande et elle est allée à l’encontre de siècles de tradition royale en circulant dans les rues pour saluer la foule en personne plutôt que de simplement la saluer de la main à distance. Elle a ouvert la voie à une nouvelle forme de tradition et de respect, pour laquelle les gens du monde entier l’ont félicitée.

La reine a également joué un rôle actif dans l’avancement de notre nation. Elle était présente à l’ouverture de la voie maritime du Saint-Laurent. Elle a présidé les célébrations qui ont marqué le centenaire du Canada, et a déclaré l’ouverture de nos premiers Jeux olympiques, qui se sont déroulés à Montréal, au Québec.

Un quart de siècle après qu’elle eu ouvert le Parlement du Canada, Sa Majesté a proclamé la Loi constitutionnelle du Canada en y apposant sa signature, enchâssant par le fait même notre Charte canadienne des droits et libertés. En outre, cette loi propulsait le Canada dans une nouvelle ère d’autonomie gouvernementale où les Canadiens pouvaient modifier leurs propres lois. Pendant les 70 années de son règne historique, Sa Majesté a agi avec humilité, grâce et dignité.

Il y a 50 ans, le 11 avril 1972, le jour de mon septième anniversaire, j’ai été déracinée de mon pays d’origine, la Corée du Sud. J’ai commencé l’école dès mon arrivée au Canada, en anglais. Même si c’était ma langue seconde, j’ai rapidement mémorisé la prière du Notre Père et l’hymne God Save the Queen, que nous récitions chaque matin avant les classes. Dans mon cœur d’enfant de 7 ans nouvellement arrivée dans un pays inconnu, j’étais rassurée de savoir que Dieu et la reine veillaient sur chacun d’entre nous, tous les jours.

Plus tard, en 2010, durant ma deuxième année dans mon rôle de sénatrice, j’ai assisté à la cérémonie de la fête du Canada dans notre capitale nationale en présence de Sa Majesté. Je me souviens clairement du moment où je lui ai fait la révérence quand elle est passée devant moi. Sa présence me réconfortait. Pour la petite immigrante de la Corée du Sud en moi qui rêvait de sa nouvelle vie au Canada, c’était très spécial de me retrouver sur le parterre gazonné devant le Parlement, en présence de notre souveraine. Ce fut sa dernière visite à Ottawa.

Sa Majesté avait déjà démontré son sens du devoir et du service ainsi que sa capacité d’abnégation bien avant son couronnement. En 1945, lors de la Seconde Guerre mondiale, alors qu’elle n’avait que 18 ans, elle est entrée dans l’armée britannique — au service territorial auxiliaire — à titre de mécanicienne. Elle était fière de servir son pays et de défendre la liberté et la démocratie.

À titre de sénatrice représentant la Colombie-Britannique et de grande patronne honoraire des anciens combattants de la guerre de Corée, j’offre mes sincères condoléances au nom des vétérans de la guerre de Corée et de la communauté coréenne du Canada. Nos distingués anciens combattants ont servi le Canada et la reine dans les forces aériennes, navales et terrestres pendant la guerre de Corée et lors des opérations de maintien de la paix après la signature de l’armistice. Lors de la bataille historique de Kapyong, les Canadiens ont combattu dans les rangs de la brigade du Commonwealth et ont même reçu une décoration du gouvernement américain pour leur bravoure — un motif de fierté qui a raffermi le sens du devoir et la fierté de servir la nation et la Couronne.

Nos vétérans pleurent tous le décès de la reine, qui était et sera toujours leur souveraine.

Nous nous engageons maintenant dans une nouvelle ère avec le roi Charles III, qui suivra l’exemple de sa mère en se dévouant au service avec loyauté et sens du devoir. J’offre mes sincères condoléances à Sa Majesté le roi Charles III et aux membres de la famille royale, qui pleurent le décès d’une mère, grand-mère, arrière-grand-mère, tante et sœur.

J’offre également mes condoléances aux populations des pays du Commonwealth et d’ailleurs dans le monde qui comme nous pleurent le décès de Sa Majesté la reine Elizabeth II.

Honorables sénateurs, veuillez vous joindre à moi pour souligner la vie et le service extraordinaires de feu Sa Majesté la reine Elizabeth II, qui a incarné l’espoir, la force, la détermination, la fougue et le sens du devoir, et dont le souvenir restera gravé à jamais dans les mémoires.

Que Dieu bénisse la reine et protège le roi.

L’honorable Denise Batters [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à feu Sa Majesté la reine Elizabeth II. Pendant sept décennies, cette souveraine exceptionnelle a servi la population avec dévouement et a constamment assuré une présence rassurante dans un monde incertain.

La reine a été une dirigeante forte et résiliente dans un monde largement dominé par les hommes. À la fois élégante et espiègle, la reine Elizabeth II a su apporter discrètement une touche de modernité au rôle traditionnellement réservé aux femmes de la royauté.

En tant que princesse, elle a été formée et a travaillé comme mécanicienne et conductrice de camion dans l’armée pendant la Seconde Guerre mondiale. Sous son règne, la loi sur la succession a finalement été modifiée de manière à ce que les mêmes règles de succession s’appliquent aux femmes et aux hommes de la royauté.

À trois occasions pendant son règne de 70 ans, Sa Majesté a invité une femme à former un gouvernement en tant que première ministre du Royaume-Uni — j’ajouterais que tous ces gouvernements étaient conservateurs —, et je crois qu’il était fort à propos que la toute dernière photographie publique de la reine, prise quelques jours seulement avant son décès, montre la souveraine accueillant avec un grand sourire la nouvelle première ministre du Royaume-Uni, Liz Truss.

Le Canada avait une place particulière dans le cœur de la reine Elizabeth, et cette dernière avait également une place particulière dans le cœur des Canadiens. Dans sa dernière déclaration publique, la reine Elizabeth exprimait ses condoléances et son soutien aux habitants de la Saskatchewan, notamment ceux de la nation crie James Smith et de Weldon, qui ont connu d’énormes pertes dans leurs communautés en raison des meurtres effroyables qui ont été commis récemment.

Je vis à Regina, la « ville reine », où l’on rend partout hommage à la reine Elizabeth : l’édifice reine Elizabeth II abrite l’hôtel de ville de Regina, et les jardins de la reine Elizabeth II servent d’écrin spectaculaire à l’Assemblée législative de la Saskatchewan.

La famille royale était très respectée chez nous. Mes sœurs et moi-même collectionnions les timbres-poste de tous les pays du Commonwealth portant des photos de la reine. Naturellement, lorsque nous étions petites filles, nous étions émerveillées par la splendeur de ses couronnes et de ses bijoux sur chaque photo d’elle. Nous étions enchantées lorsque ma mère nous a emmenées, ainsi que mon grand-père, voir la reine lors de sa visite à Regina en 1978.

Adulte, j’ai également eu la chance de voir la reine en personne lors de sa dernière visite en Saskatchewan en 2005. Mon conjoint, Dave, était alors député et nous avons attendu sur les marches de l’Assemblée législative sous une pluie battante pour apercevoir Sa Majesté. La reine et le prince Philip étaient venus commémorer le centenaire de la Saskatchewan et dévoiler la statue de la reine érigée dans les jardins de l’Assemblée législative.

La statue représentait la reine Elizabeth chevauchant Burmese, son cheval préféré, qui avait lui-même un lien avec la Saskatchewan. Burmese, qui est né à Fort Walsh, en Saskatchewan, avait été offert à la reine par la Gendarmerie royale du Canada en 1969. Sa Majesté a monté Burmese pour les magnifiques festivités de la parade du drapeau consacré, chaque année de 1969 à 1986.

La reine Elizabeth entretenait une relation particulière avec la GRC. En tant que commissaire en chef, elle était le membre de la GRC ayant servi le plus longtemps. Des membres de la GRC, dont le centre de formation national se trouve à Regina, siège de la GRC, ont eu l’immense honneur de conduire le cortège funéraire de la reine dans les rues de Londres hier.

En 2010, un an après le décès de mon mari Dave, le premier ministre de l’époque, Stephen Harper, m’a invitée à assister au dîner d’État de la reine Elizabeth à Toronto pour ce qui allait être la dernière visite de la reine au Canada. Lors de cet événement, j’ai été ravie de rencontrer brièvement Sa Majesté. Lorsque je lui ai dit que j’étais avocate-conseillère de la reine, elle s’est avancée, m’a fait un grand et beau sourire et m’a dit : « C’est vrai? Cela semble très prenant. »

Vous ne le savez peut-être pas, mais la tradition d’accorder la désignation spéciale de conseiller de la reine à des avocats d’expérience remonte à 1594, lorsque la reine Elizabeth I a nommé son conseiller, sir Francis Bacon, pour servir de conseiller juridique exécutif.

Bien entendu, le Sénat a une relation spéciale avec la reine. Ce ne sont pas les exemples qui manquent. La reine Elizabeth a en effet prononcé le discours du Trône au Sénat à deux reprises : une première fois en 1957, lorsque le Saskatchewanais John Diefenbaker était premier ministre, et la deuxième fois en 1977.

J’ai eu le privilège d’assister à la magnifique et émouvante cérémonie commémorative nationale qui a eu lieu hier à Ottawa en l’honneur de la reine. Je me joins d’ailleurs à tous les Canadiens pour offrir mes condoléances aux membres de la famille royale à la suite de cette immense perte qu’ils ont subie. En effet, ce n’est pas seulement une souveraine extraordinaire, mais aussi une mère, une grand-mère et une arrière-grand-mère qui est décédée. Le Canada partage votre chagrin et vous offre son soutien dans votre deuil. Que Dieu bénisse la reine Elizabeth et qu’il protège le roi.

L’honorable Pierrette Ringuette [ - ]

Honorables sénatrices et sénateurs, c’est avec une profonde tristesse que je prends la parole aujourd’hui afin de rendre un hommage solennel à feu notre reine, Sa Majesté Elizabeth II, décédée le 8 septembre et inhumée hier, à Windsor, sous l’œil de millions d’admirateurs peinés. Les Canadiens et les Canadiennes font partie de ces admirateurs, et avec raison.

Petite fille, je me laissais bercer par les rêves féeriques de princesses et de reines, comme si elles vivaient dans un monde enchanté, pour réaliser plus tard que ce n’était pas un monde enchanté, mais un segment de notre société vivant continuellement sous l’œil scrutateur du public, rempli d’attentes parfois irréalistes.

Soyez assurés que je n’ai pas de lien génétique avec la royauté, mais j’avoue avoir une admiration pour la reine Elizabeth II, cette mère, grand-mère et arrière-grand-mère qui n’a pas fléchi malgré les forts vents qui, à l’occasion, ébranlaient le palais de Buckingham.

C’est pourquoi, charmée par cette grande dame, j’avais l’impression qu’elle était comme une grand-tante vivant à l’étranger afin d’assumer ses responsabilités familiales et professionnelles. Cette grand-tante était toujours présente à nos réunions, aux grands moments de notre vie au Canada, et à chacune de ces occasions, nous nous réjouissions de sa présence, de son sourire, de son sens de l’humour, de ses marques d’affection profonde ainsi que de son soutien pour nos rêves, notre avenir.

Cette grand-tante et grande dame était une leader forte, posée, intéressée et dynamique. Elle avait un cœur bienveillant et rempli de compassion, particulièrement pour sa grande famille du Commonwealth, qu’elle a servie pendant 70 ans avec un dévouement irréprochable. Même dans ses derniers jours, elle a communiqué avec les Canadiens pour exprimer ses condoléances à la suite des tragédies meurtrières en Saskatchewan.

Son caractère noble a aidé notre nation à traverser des périodes difficiles. De façon réciproque, nous lui avons aussi signifié notre soutien et notre affection dans ses moments ardus, essentiellement par des actes et paroles qui se retrouvent auprès des membres de la famille ou d’amis proches.

Évidemment, je n’étais pas née lorsque cette grand-tante et grande dame a accédé au trône en 1952, mais son rayonnement, depuis, a inspiré des milliers de femmes de plusieurs générations à assumer des rôles de leadership. Le respect que je vous témoigne aujourd’hui en français pour cette grand-tante et grande dame reflète aussi la profonde affection qu’elle nous a témoignée, à nous, les Franco-Canadiens de partout au pays, par sa maîtrise et son usage du français lors de ses visites.

Quoique je n’aie jamais rencontré la reine, pour moi, l’ensemble de ses qualités renouvelle mon affection pour elle et mon impression qu’elle était bel et bien membre de la famille canadienne.

Comme vous, je me joins à tous les Canadiens pour offrir mes plus sincères condoléances aux membres de la famille royale et je les remercie pour leur soutien à la reine Elizabeth II pendant ses années de services au Canada.

Nous garderons de précieux souvenirs de la reine Elizabeth II, et que Dieu protège le roi.

L’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia [ - ]

Honorables sénateurs, c’est un véritable honneur et un privilège de prendre la parole devant cette illustre assemblée pour rendre hommage à Sa Majesté la reine Elizabeth II. En pensant à la présence singulière de Sa Majesté dans ma vie et dans celle de notre pays, une idée me revenait sans cesse, celle de sa constance absolue. Au cours de sept décennies de tumulte, d’événements tragiques et de changements presque inconcevables, Sa Majesté a apporté une constance à nos vies — un phare inébranlable de stabilité et de fermeté. Dans l’ensemble du pays, et même dans tout le kaléidoscope du Commonwealth, Sa Majesté est demeurée un symbole d’unité et un rappel important que nos divisions ne sont rien en comparaison de ce qui nous unit. Depuis le moment où elle a appris le décès de son père, à l’âge tendre de 25 ans, jusqu’à ses derniers jours à Balmoral, son château bien-aimé, elle est restée l’incarnation du devoir, de la loyauté, de la dignité, de la grâce et du service désintéressé.

En réfléchissant à ses qualités, j’ai pensé à l’équilibre parfois difficile à établir entre le devoir envers la Couronne et la réalité d’être la matriarche d’une famille grandissante. D’une manière imperturbable et implacable, elle a réussi à naviguer entre ces deux devoirs parallèles avec ce qu’on ne saurait appeler autrement que ténacité et amour résolus, guidée par un solide ancrage spirituel et par la grâce et la bonté de ses proches.

Ma province, Terre-Neuve-et-Labrador, a une conscience profonde du legs de Sa Majesté et des liens qu’elle avait avec la reine, des liens historiques étroits tissés de respect et de fierté. Mon épouse, Dianne Collins, et sa famille sont d’ardents monarchistes. Comme bon nombre de Terre-Neuviens, elle a pour Sa Majesté un amour profond et tangible.

J’ai constaté à quel point ce respect était indélébile quand j’ai commencé à faire des visites à domicile chez mes patients. J’y trouvais inévitablement un portrait de Sa Majesté occupant une place d’honneur sur le mur du salon, flanqué du portait de notre premier premier ministre, Joey Smallwood, et de celui du Dr John Olds, médecin et héros. Au fil des ans, j’ai offert mon propre portrait à bon nombre de mes patients. Cette offre n’a malheureusement pas trouvé preneur.

Le sénateur Ravalia [ - ]

L’amour indéfectible que Sa Majesté vouait au Commonwealth et son appui inébranlable envers les soins de santé et l’amélioration de l’accès aux études ont eu un effet direct sur mon cheminement personnel. Grâce à une éducation de base, aux ressources proposées par le British Council et aux bourses d’études, mon cheminement professionnel a été facilité; c’est ainsi qu’un garçon originaire de la Rhodésie peut aujourd’hui prendre la parole devant vous à titre de membre du Sénat du Canada.

J’ai été très ému lorsque j’ai reçu la médaille du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II, car elle m’a amené à réfléchir aux effets positifs qu’a eus la reine à la grandeur de la planète.

Je souhaite remercier l’huissier du bâton noir, qui tisse depuis plus de 30 ans des liens avec la monarchie et avec Sa Majesté. Je salue son engagement envers la monarchie et le service personnel exceptionnel qu’il lui offre en tant que membre de l’Ordre royal de Victoria. Merci, Greg.

L’annonce du décès de la reine Elizabeth a suscité de la douleur, une réaction viscérale et une impression d’irréalité. Celle qui avait été une présence constante dans la vie de tant de gens était soudainement disparue, ce qui a subitement ébranlé leur sentiment de stabilité, au point de susciter une tristesse tangible.

Je transmets mes condoléances à Sa Majesté le roi Charles III, à la famille royale et à tous ceux qui se sont réunis pour pleurer une souveraine estimée. Que Dieu la bénisse et que son âme repose en paix. Merci, meegwetch.

Honorables sénateurs, comme l’a dit hier l’ancienne gouverneure générale, la reine, qui avait de nombreuses qualités, agissait toujours avec intention. J’adore cette description. En effet, elle agissait toujours avec intention et elle se faisait voir, mais rarement entendre, en ce sens qu’on ne l’entendait jamais pontifier en public. Cependant, dans les coulisses, elle a amené et guidé des présidents et des premiers ministres non seulement à s’élever au-dessus de la politique, mais aussi à faire ce qu’il fallait.

J’ai eu la chance extraordinaire de rencontrer la reine à six occasions, car j’étais affectée aux visites royales et à la Constitution. Je suis honorée d’avoir reçu quatre médailles qui portent son nom. J’ai observé avec admiration la façon dont la reine a affronté les tempêtes. J’ai puisé des forces dans sa détermination d’acier et dans sa force de caractère lors des pires moments de la vie. Nous avons tous connu une annus horribilis.

La première fois que j’ai vu la reine, j’avais environ 5 ans. Ma sœur et moi avions des robes neuves identiques. Alors qu’elle passait en décapotable, elle ressemblait à une vedette de cinéma — c’est du moins ce que je pensais, n’ayant jamais rencontré de reine ou de vedette de cinéma. Toutefois, ma grand-mère n’était pas du même avis. Il fallait respecter la reine. Nous devions nous souvenir de son service pendant la guerre en tant que mécanicienne. Nous devions l’admirer en silence.

La seconde fois que je l’ai rencontrée, je rentrais d’un séjour de trois mois en Argentine, où j’avais couvert la guerre des Malouines. Son fils Andrew s’y était rendu pour s’y battre et pour servir au sein de la Marine royale. La reine effectuait une de ses nombreuses tournées royales du Canada. Cette fois-là, elle visitait la Colombie‑Britannique. Lloyd Robertson et moi faisions une couverture spéciale de la visite royale et on nous a invités à une petite réception à bord du yacht royal. Il m’était interdit d’aborder le sujet de la guerre, mais je l’ai fait. Le visage de Sa Majesté s’est immédiatement animé lorsqu’elle a parlé de la crainte d’une mère dont l’enfant part en guerre, et nous avons parlé aisément d’autres choses. Elle était toujours ainsi. Elle avait une capacité enviable de nous faire sentir — à des millions de personnes — que nous étions spéciaux.

Ces derniers jours, nous avons vécu notre deuil et nous avons souligné l’inévitable. Plus de cinq milliards de personnes ont regardé les funérailles. Cependant, alors que nous pleurions sa perte, nous avons aussi célébré sa vie, une vie non seulement bien remplie, mais également une vie de service.

J’ai eu de la peine pour la famille hier soir. Un de mes bons amis qui était avec eux m’a dit que ses enfants, et en particulier le roi Charles, étaient profondément tristes au moment de réunir la reine Elizabeth avec son mari, le prince Philip. Ils se sont comportés comme des enfants et Charles III, lui, comme un fils, pas comme un roi. Charles savait qu’il ne reverrait jamais sa mère et ne pourrait plus jamais lui demander conseil. Il savait qu’il n’y avait plus personne pour lui indiquer ce qu’il devait faire. C’était profondément triste.

Le roi Charles a parrainé plusieurs programmes auxquels je participe. L’Opération Entrepreneur du prince de Galles, parrainée par la Fondation du prince au Canada — que j’espère que le nouveau prince de Galles poursuivra — est un programme destiné aux anciens combattants qui ont besoin d’aide pour faire la transition à la vie civile. Le roi a également parrainé un programme destiné à sauver de jeunes écolières afghanes et à les amener à Saskatoon pour leur donner une deuxième chance dans la vie.

La reine était une femme d’exception : elle a été une source d’inspiration et elle a inventé la monarchie moderne. La monarchie ne sera jamais plus la même — c’est impossible. Elle a vécu sa vie avec intention et, ce faisant, elle a changé la nôtre. Son esprit vif, sa chaleur et sa grande intelligence devraient toujours nous guider. Elle était un véritable exemple de sens moral.

Alors que les attentes et les normes imposées aux dirigeants semblent diminuer dans le monde d’aujourd’hui, nous devrions maintenant chercher à les ramener à un niveau supérieur. Ce sera une marque de respect pour elle et une façon d’honorer les services incroyables qu’elle nous a rendus.

Merci, Madame. Vous nous quittez victorieuse.

L’honorable Michael L. MacDonald [ - ]

Honorables sénateurs, le jeudi 8 septembre, les Canadiens ont appris que Sa Majesté la reine Elizabeth II était décédée.

Même si une vie de 96 ans est certainement une vie bien remplie, la plupart d’entre nous pensaient qu’elle serait avec nous encore quelques années, car elle a occupé ses fonctions de façon si remarquable pendant si longtemps.

Comme la plupart des Canadiens, je ne me souviens d’aucun autre chef d’État. La princesse Elizabeth est montée sur le trône en février 1952, à la mort de son père, le roi George VI, plus de trois ans avant ma naissance, et elle n’a cessé depuis de faire partie de ma vie, de celle du Canada, du Commonwealth et du monde entier.

Comme l’a dit Louis Saint-Laurent — qui était alors premier ministre — à la Chambre des communes en février 1952 :

Et maintenant nous saluons notre nouveau monarque, Sa Majesté la reine Elizabeth II. Bien qu’elle soit jeune quant au nombre des années, Sa Majesté possède les qualités voulues pour suivre les traces de son illustre père […] Tous les députés sont convaincus, j’en suis certain, que la Couronne repose sur une tête qui lui apportera une gloire et un honneur nouveaux.

Le premier ministre Saint-Laurent lui-même serait impressionné par la clairvoyance de ses propos.

Hier, plus de 5 milliards de personnes dans le monde ont suivi les obsèques de la reine à la télévision — plus de la moitié de la population mondiale a suivi ses funérailles — ce qui témoigne de son influence sur le monde et du respect qu’elle inspirait.

J’ai eu l’occasion de me trouver en présence de Sa Majesté à plusieurs reprises. La première fois, c’était en 1994, lorsque le prince Philip et elle ont visité la forteresse dans ma ville, Louisbourg, en Nouvelle-Écosse. Les autres occasions où j’ai rencontré la reine ont eu lieu lors de sa dernière visite au Canada, en 2010, au cours de laquelle elle a dévoilé le vitrail du jubilé de diamant à l’entrée du Sénat, tenu une réception à Rideau Hall et participé aux célébrations de la fête du Canada avec nous sur la Colline du Parlement. J’ai eu le privilège d’être présent lors de tous ces événements.

Une partie de la visite royale de 2010 s’est déroulée en Nouvelle-Écosse, où la reine a inauguré la résidence nouvellement rénovée du lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse, qui est utilisée depuis 1800. Je me souviens très bien de cette journée. La météo était parfaite; il y avait une foule énorme et j’étais installé sur une plateforme d’observation en compagnie de l’ambassadeur américain et de sa femme.

La femme de l’ambassadeur était particulièrement enthousiaste à l’idée de pouvoir rencontrer la reine. Lorsque je lui ai demandé ce qu’elle pensait de l’événement, elle m’a répondu : « C’est merveilleux que la cheffe d’État du Canada soit la reine. » « Le Canada devrait garder son lien avec la monarchie, car c’est quelque chose qui le distingue des États-Unis », a-t-elle ajouté.

C’est vrai, la présence de la Couronne est un trait distinctif du Canada. Dans toutes les Amériques, du pôle Nord jusqu’à la pointe de l’Amérique du Sud, il n’y a que le Canada qui ne soit pas une république. Seul le Canada est une démocratie parlementaire au sein d’une monarchie constitutionnelle.

Notre loyauté envers la Couronne a joué un rôle fondamental dans la création du Canada en tant que pays. La Révolution américaine a créé non pas un, mais deux nouveaux pays, puisque les colonies de la Nouvelle-Écosse et du Québec ont refusé de se joindre aux Yankees rebelles et ont plutôt œuvré à bâtir un nouveau pays sous la protection et la continuité de la Couronne. Plus de 80 000 loyalistes, dont certains de mes propres ancêtres, sont partis vers le nord à destination du Canada après 1783, contribuant à jeter les jalons de notre grand pays.

Naturellement, les médias internationaux parlent de Sa Majesté comme étant la reine du Royaume-Uni. C’est compréhensible. Toutefois, cela n’a jamais défini sa relation avec le Canada. Elle était la reine du Canada, et notre relation avec la Couronne est directe : elle ne se fait pas par l’intermédiaire de Westminster et ne dépend ni du Royaume-Uni ni d’aucun autre royaume.

J’ai été attristé d’apprendre que Sa Majesté nous avait quittés et je pleure son décès. Cela dit, je garde à l’esprit l’héritage durable qu’elle a consciencieusement créé et la salue pour les services qu’elle a rendus au Canada ainsi qu’au Commonwealth.

Sa Majesté a servi admirablement l’ensemble du Commonwealth, mais elle a toujours gardé une place spéciale dans son cœur pour le Canada, où elle a effectué 22 visites officielles pendant son règne. Elle a toujours considéré le Canada comme son second chez-soi. C’était émouvant de voir les cavaliers de la GRC en tête du cortège funéraire sur le Mall, à Londres. C’était à la demande de Sa Majesté. Cela en dit long sur son attachement à l’égard du Canada. C’est un geste qui a transmis au reste du monde un message merveilleux au sujet de sa relation avec le Canada.

Plus de 5 milliards de personnes ont regardé la diffusion de la cérémonie d’adieu à la cheffe d’État du Canada. Aucun politicien élu ou chef d’État nommé au monde n’aurait pu obtenir ne serait-ce qu’une fraction de l’admiration et du respect dont bénéficiait la reine.

Comme les jeunes pourraient dire : « La reine était super! » Oui, elle l’était. Sa Majesté était vraiment une personne remarquable, et tous les Canadiens la remercient pour ses 70 années de service dévoué et désintéressé.

Que Dieu bénisse Sa Majesté et que Dieu ait son âme.

Que Dieu protège le roi.

L’honorable Tony Loffreda [ - ]

Honorables sénateurs, c’est le cœur lourd, mais avec beaucoup de gratitude et de respect, que je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à Sa Majesté la reine Elizabeth II, reine du Canada.

Nous reconnaissons tous l’importance de son décès et de ses répercussions historiques sur notre société, en particulier ici, au Canada, mais il ne faut pas oublier qu’une famille a également perdu un être cher. La douleur, la peine et la tristesse sont tout aussi dévastatrices, qu’elle eût été reine ou non. Tout comme des millions d’autres personnes, je transmets mes plus sincères condoléances à notre nouveau roi et à la famille royale à l’occasion de la perte de leur matriarche bien-aimée.

Je tiens également à offrir mes condoléances aux Canadiens et aux Canadiennes, ainsi qu’à la grande famille du Commonwealth et aux citoyens du monde entier qui pleurent le départ de notre reine.

Hier, lors de l’émouvante cérémonie commémorative qui s’est déroulée ici à Ottawa en l’honneur de Sa Majesté, l’ancien premier ministre Mulroney nous a rappelé que la reine considérait le Canada comme son foyer, et ce, à juste titre. Elle a visité le Canada plus que tout autre pays au monde, à l’exception du Royaume-Uni.

De ses plus de 20 visites officielles au Canada, celle dont je me souviens le plus vivement est celle de 1976. Je me souviens encore de sa présence aux XXIes Jeux olympiques à Montréal. Je n’avais que 14 ans. À l’époque, j’étais peut-être trop jeune pour comprendre pleinement la signification et les raisons de sa présence à Montréal. Cependant, lorsqu’elle a officiellement déclaré le début des jeux en français, j’ai ressenti un sentiment de fierté et d’appréciation pour ce qu’elle représentait et son engagement indéfectible envers notre peuple.

En effet, pendant 70 ans, Sa Majesté la reine Elizabeth II a été une présence constante et stabilisatrice dans nos vies et une voix pleine de raison, de force et de détermination. Son règne a été caractérisé par sa grâce, sa dignité et son dévouement au service public. Je la remercie de son admiration immuable de notre pays et de son dévouement indéfectible envers lui. Elle restera une source d’inspiration pour moi et pour beaucoup d’autres personnes qui partageaient ses valeurs et chérissaient son engagement altruiste à améliorer la vie de ses citoyens.

Ce n’est pas un secret que Sa Majesté était également très fière du statut bilingue de notre pays. Sa maîtrise de la langue française était impeccable et, en tant que Québécois, j’ai toujours été sensible à sa détermination à s’adresser aux Canadiens et Canadiennes dans les deux langues officielles.

Quand mes parents ont immigré ici en 1962, le Canada était considéré comme une terre d’espoir et de possibilités. C’était un jeune pays dynamique, une démocratie prospère qui s’inspirait du système de gouvernement britannique et une nation caractérisée par sa stabilité et son influence grandissante sur la scène internationale. Je remercie mes parents chaque jour d’avoir choisi le Canada et d’avoir prêté le serment de citoyenneté canadienne il y a bien des années, où ils ont juré fidélité et sincère allégeance à Sa Majesté. À bien des égards, la reine incarnait tout ce que ma famille cherchait lorsqu’elle a quitté sa mère patrie pour venir au Canada. Sa Majesté a été là à chaque étape à mesure que nous sommes devenus un pays moderne, florissant et dynamique du XXIe siècle.

Près de 60 ans plus tard, j’ai moi aussi juré fidélité et sincère allégeance à Sa Majesté la reine Elizabeth II quand j’ai été appelé au Sénat du Canada, comme tous les sénateurs. Ce fut un véritable honneur de servir sous le règne de Sa Majesté, et je continuerai de servir humblement la Couronne et Sa Majesté le roi Charles III au nom de tous les Canadiens.

Je sais qu’elle manquera énormément au monde entier, mais je suis également certain que notre nouveau roi perpétuera son œuvre et, comme il l’a dit lors de son discours inaugural en tant que nouveau souverain :

Et où que vous viviez au Royaume-Uni, ou dans les royaumes et territoires du monde entier, et quelles que soient vos origines ou vos croyances, je m’efforcerai de vous servir avec loyauté, respect et amour, comme je l’ai fait tout au long de ma vie.

Que Dieu bénisse la reine et que Dieu protège le roi.

L’honorable Paula Simons [ - ]

Honorables sénateurs, en 1867, année de la création du Canada, le grand essayiste britannique Walter Bagehot a publié son œuvre maîtresse intitulée La constitution anglaise. Bagehot y soutenait que le génie propre de la constitution résidait dans sa division du gouvernement en deux parties : les organes de dignité et les organes d’efficacité. La Chambre des communes et le Cabinet composés d’élus, disait-il, représentaient la partie « efficace » du gouvernement, celle qui faisait avancer les choses. Quant à elle, la Couronne, incarnée par la reine Victoria, était tout aussi importante, a-t-il dit, car elle représentait le mystère, la beauté et le romantisme. Son caractère théâtral était essentiel pour inspirer les gens et les rapprocher.

Pendant 70 années difficiles et transformatrices, la reine Elizabeth II a joué ce rôle théâtral et digne de reine du Canada : un symbole résolument non partisan, au-dessus de la mêlée politique quotidienne, l’incarnation de la Couronne et des meilleurs idéaux de la Constitution canadienne et de notre monarchie constitutionnelle.

Il y a quatre ans, j’ai prêté serment au Sénat. Je me souviens du frisson que j’ai ressenti en entendant les mots qui me désignaient comme Paula Simons, « fidèle et bien-aimée » de la reine.

Enfant, j’ai grandi avec Narnia et la Terre du Milieu, et je me suis soudain sentie transportée, comme si je prêtais serment à Cair Paravel ou au Gondor.

À cet instant, je ne prêtais pas serment à une gentille vieille dame. Je ne prêtais pas non plus le serment d’être loyale à une version dépassée de l’empire. Non. Ce jour-là, j’ai prêté serment à l’esprit et à l’idéal du Canada tel qu’incarné par la Couronne, un serment à Sa Majesté du chef du Canada.

Au cours des 12 derniers jours, de nombreux Canadiens ont longuement réfléchi à la signification de ce moment. Certains pleurent une femme qui a consacré sa vie au service du public, qui était l’un des titans politiques et culturels du XXe siècle et qui a aidé la Grande-Bretagne à faire la transition entre l’empire et le monde moderne. Sa mort, pour beaucoup, marque un virage profond et déconcertant. Comme la chute du mur de Berlin, c’est un changement qui a ébranlé nos certitudes et bouleversé notre conception du monde.

D’autres Canadiens, cependant, ont ressenti beaucoup d’ambivalence, d’aliénation, voire de colère, en repensant à l’héritage de la conquête, du colonialisme, de l’exploitation et de l’inégalité de classe que représentait l’Empire britannique au Canada et dans le monde. En tant que pays multiculturel moderne, nous devons reconnaître ce passé sombre et douloureux et en tenir compte lorsque nous planifions notre avenir ensemble.

Walter Bagehot, il faut le souligner, était un élitiste impérial de l’ère victorienne, et nous devrions interpréter ses écrits en tenant compte de ce contexte. Néanmoins, je suis d’accord avec lui. Notre monarchie constitutionnelle crée un certain équilibre avec notre gouvernement. La Couronne contribue à nourrir notre profonde envie de sacré, d’union, de mythologie et de solennité. Or, tout au long de sa vie, la reine Elizabeth a montré son caractère majestueux dans le respect rigoureux de son rôle constitutionnel restreint.

Je me souviens très bien de cette soirée où j’ai partagé un repas avec la reine. Je devrais plutôt dire cette soirée où la reine et moi avons simultanément mangé un repas dans la même grande salle.

C’était en septembre 2005. La reine et le prince Philip étaient à Edmonton pour célébrer le centenaire de l’Alberta. Mon époux et moi avions eu la chance d’être invités pour nous joindre aux dignitaires locaux qui accueillaient en grande pompe Leurs Majestés. Or le banquet ne se déroulait pas dans un hôtel luxueux ni dans un édifice patrimonial. La soirée avait eu lieu dans un centre de foire, l’AgriCom, où la Ville d’Edmonton avait l’habitude de tenir la foire agricole annuelle et les finales canadiennes de rodéo. Il est fort possible que de vieux relents d’odeur de fumier aient flotté dans l’air.

Mon époux s’était rentré le ventre pour mettre son vieux smoking, celui qu’il avait porté à notre mariage, tandis que j’avais enfilé la robe de soirée que je portais chaque année à Noël. Nous étions assis très, très loin de la table où prenaient place Leurs Majestés, mais nous pouvions les voir parfaitement sur des écrans géants. En effet, des caméras avaient été installées devant eux pour que tous les convives puissent être témoins de leurs moindres gestes.

J’ai pensé alors à quel point cela doit être étrange d’être à la fois la personnification de la Couronne et une femme très humaine qui fait de son mieux pour manger, tout en étant diffusée en direct, un dîner de bœuf de l’Alberta sans que rien ne vienne se coincer entre ses dents.

Le prix d’une telle apothéose est l’effacement du soi, et c’est essentiellement le prix qu’a payé la reine Elizabeth, avec élégance et patience. Elle a effacé son individualité personnelle et nous a permis de projeter sur elle nos propres craintes et espoirs, notre fureur et notre foi, peu importe si nous la voyions comme la personnification de tout ce que nous aimons dans le Canada, ou de tout ce que nous haïssons dans l’empire.

Dans la vie, et maintenant dans la mort, elle nous a offert sa dignité. Elle nous a offert sa majesté. Elle nous a offert sa magie. Elle était à la fois la grand-mère du monde et le symbole de nos idéaux nationaux. Elle a été la Couronne. Que Dieu bénisse sa mémoire.

L’honorable Marilou McPhedran [ - ]

En tant que sénatrice du Manitoba, je reconnais que je suis sur le territoire du Traité no 1, le territoire traditionnel des Anishinabes, des Cris, des Oji-Cris, des Dakotas et des Dénés, et de la patrie de la nation métisse.

En cette occasion solennelle, où les sénateurs ont la possibilité d’exprimer librement leurs réflexions sur cette dirigeante mondiale unique, je souhaite reconnaître l’histoire complexe du colonialisme incarné par le Commonwealth, que la reine Elizabeth II présidait, en soulignant que le Parlement du Canada est situé sur le territoire non cédé et non soumis des Premières Nations anishinabes et algonquines.

Nous nous trouvons ici aujourd’hui en compagnie d’impressionnantes dirigeantes de notre propre pays, dans une enceinte qui est devenue le deuxième Sénat au monde à atteindre la parité des genres. Des millions de petites filles du pays ont grandi en voyant le visage d’une femme monarque jour après jour, même dans les années où le Canada n’avait aucune personnalité féminine bien connue parmi ses dirigeants.

Nous ne pouvons pas quantifier l’impact qu’a eu la présence de Sa Majesté dans l’esprit et le cœur de ces millions de filles sur plusieurs générations, mais je sais que je suis loin d’être la seule à y associer ma propre conviction que j’ai le droit de pleinement m’épanouir en tant que personne de sexe féminin et que les droits des femmes et des filles sont des droits de la personne à part entière — des droits que toutes les femmes doivent non seulement revendiquer, mais aussi exercer, et cela ne s’applique pas seulement à celles qui sont privilégiées, comme nous ici présentes.

Pendant les 70 années et plus de ma vie, elle a été ma reine et elle le restera. Chère reine Elizabeth, puissiez-vous reposer en paix.

Que Dieu protège le roi. Merci, meegwetch.

L’honorable Marty Deacon [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à la vie et au travail de la reine Elizabeth II. Il est difficile d’expliquer comment une personne aussi connue a pu nous toucher personnellement, mais c’est pourtant le cas pour bon nombre d’entre nous.

En ce qui me concerne, cela a commencé à l’âge de six ans. En première année, j’étais très curieuse à l’égard de cette femme dont l’image était affichée bien en évidence sur le mur de notre classe : l’image d’une reine qui ne vivait pas au Canada. Si j’avais su à l’époque que j’allais la rencontrer à plus d’une occasion, je suis sûre que cela m’aurait emballé, mais aussi quelque peu angoissé.

Je retiens plus particulièrement deux de ces rencontres qui, selon moi, méritent d’être racontées. En 1994, les Jeux du Commonwealth se sont tenus au Canada, à Victoria. C’était la première fois que je participais à des jeux internationaux en tant qu’entraîneure, et l’expérience m’a fait prendre conscience de nombreux enjeux internationaux, le plus important étant le retour de l’Afrique du Sud aux Jeux du Commonwealth, puisque cela représentait la fin de l’apartheid et l’arrivée au pouvoir de Nelson Mandela. La reine était en visite pour les jeux, et elle a pris le temps de parler aux athlètes et aux entraîneurs de l’importance que revêtaient ces jeux en raison du retour de l’Afrique du Sud.

C’est à ce moment-là que j’ai appris à connaître le rôle que jouait la reine. Je parle non pas de son rôle sur la scène politique, mais de la capacité qu’elle avait d’influencer, d’encourager, d’écouter et de guider les gens avec bienveillance. Lors de ses rencontres et de ses discussions avec les athlètes, elle savait les inspirer, elle leur posait d’excellentes questions, et elle ajoutait parfois une touche d’humour à la conversation. Après ces jeux, j’ai voulu en savoir davantage sur la monarchie et sur son influence à l’intérieur et à l’extérieur du Commonwealth.

En 1998, la reine s’est rendue à Kuala Lumpur, en Malaisie, pour la fermeture des jeux. À cette époque, il y avait des tensions politiques causées, entre autres, par l’emprisonnement du vice‑premier ministre du pays pendant les jeux. Après 13 jours de compétition, j’ai emmené mon équipe manger au restaurant. Nous avons reçu un appel nous informant qu’à proximité, il y avait une manifestation politique qui devenait assez violente. On m’a ordonné de ramener mon équipe au village. Nous voulions nous mettre à l’abri, mais nous ne savions pas trop comment nous y prendre. Heureusement, ce n’est rien de moins que le cortège de la reine qui nous a permis de rentrer en toute sécurité au village des athlètes. C’était une façon étrange de rencontrer les membres de la famille royale — sous le signe de la sécurité —, mais ils étaient vraiment merveilleux. Quelques-uns des athlètes ont pris le thé avec la reine le lendemain dans le village des athlètes et se sont dits très inspirés par la reine et le duc d’Édimbourg.

J’ai également eu le plaisir d’être présente en 2012 dans le stade de Londres pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, lorsque la reine a sauté en parachute avec Daniel Craig. Ce moment a réellement montré son caractère plus léger et drôle.

Chers sénateurs, les Jeux du Commonwealth s’accompagnent d’une merveilleuse tradition. Tous les quatre ans, le jour du Commonwealth, la reine insère un message dans un bâton qui entame un voyage à travers tous les pays du Commonwealth, et qui est ensuite lu par la reine ou son représentant lors de l’ouverture des jeux. Le message que la reine a inséré dans le bâton pour les Jeux du Commonwealth de 2022 à Birmingham constitue désormais le dernier message de Sa Majesté au Commonwealth. Il dit ceci :

Au fil des années, le rassemblement d’un si grand nombre d’athlètes à l’occasion de ces « jeux amicaux » a donné lieu à des expériences mémorables, à des relations durables et même à des rivalités amicales! Cependant, ils nous rappellent avant tout les liens qui nous unissent, où que nous soyons dans le monde, en tant que membres de la famille des nations du Commonwealth.

Au cours de la longue vie de Sa Majesté, son extraordinaire dévouement et son attachement au sport au sein du Commonwealth ont été une source d’inspiration pour bien des gens, notamment les athlètes, les responsables, les bénévoles et les ouvriers, qu’elle a tous pris le temps de rencontrer lorsqu’elle a assisté aux jeux, soit 18 fois en tout.

La vision qu’avait Sa Majesté du Commonwealth en tant que famille de nations diverse et unie nous a toujours inspirés, et il restera de notre devoir et de notre mission collectifs de la concrétiser. Bien que sa vision soit née d’un sens inébranlable du devoir dans chacun des aspects de son rôle de souveraine, je ne peux m’empêcher de penser que le fait d’assister à ces jeux lui apportait également de la joie. Elle y affichait toujours un sourire qui contrastait avec l’image empreinte de sérieux qui décorait ma salle de classe en première année.

Chers collègues, après la cérémonie d’hier à la cathédrale Christ Church, j’étais incapable de partir à l’issue de la cérémonie. Je me suis sentie attirée vers le chœur de l’église. Je me suis assise devant la grande photo bien connue de la reine et je me suis demandé si nous étions vraiment conscients des véritables répercussions de sa vie. Mesurons-nous entièrement l’ampleur de sa disparition? Je ne pense pas que ce soit le cas. Cette vie et ce legs sont si complexes qu’ils continueront de nous servir longtemps.

Merci, meegwetch.

L’honorable Rosa Galvez [ - ]

Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage à Sa Majesté la reine Elizabeth II. Depuis son décès, des hommages, chez nous et autour du monde, se font entendre pour commémorer cette grande dame dévouée à son peuple, qui a toujours montré un sens inébranlable du devoir et de la responsabilité. Pendant plus de 70 ans, la reine Elizabeth II nous a démontré avec classe qu’un leader peut inspirer chez son peuple un énorme respect et une grande affection.

Au Canada, pour beaucoup de nos concitoyens, la reine représente un symbole de fierté et de respect. D’un autre côté, nous devons aussi reconnaître que la monarchie représente, pour plusieurs autres concitoyens, un symbole d’oppression et de souffrance. Ces deux différents groupes réagissent différemment à la triste nouvelle du décès de la reine, mais ils nous donnent également l’occasion d’entreprendre une réflexion au sein de la société canadienne. La grande majorité d’entre nous n’ont connu aucun autre monarque comme chef d’État du Canada. Le départ de la reine nous force à nous poser des questions existentielles qui nécessitent une profonde réflexion.

J’aimerais m’attarder sur la force de caractère de la reine. La reine Elizabeth II était une figure inspirante, en particulier pour les femmes du monde entier. Comptant parmi les dirigeants les plus reconnus et les plus admirés du monde, elle tenait lieu de modèle pour les femmes. Grâce à sa nature posée, mais forte, elle pouvait garder la tête haute parmi les plus grandes dirigeantes du monde.

La reine n’a jamais répugné à faire son devoir. Vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, elle a suivi une formation de mécanicienne, devenant la première membre féminine de la famille royale à servir ainsi son pays. Voyant les femmes de partout dans le monde participer à l’effort de guerre, elle a décidé de se joindre à elles par solidarité. Grâce à ses actes, elle nous a montré la voie à suivre.

Le 4 novembre 2008, la reine a visité la London School of Economics à l’occasion de l’inauguration d’un nouveau bâtiment. Après avoir écouté un exposé sur les effets dévastateurs de la crise financière mondiale, elle a courageusement demandé pourquoi personne n’avait vu venir le coup.

Le professeur Luis Garicano, de l’école de gestion, a répondu : « Chacun se fiait à l’autre et tous pensaient bien faire. »

Ne commettons plus jamais cette erreur.

Maintenant, c’est au tour de son fils, le roi Charles III, de prendre la barre de la monarchie et de suivre les traces de feu sa mère. La barre est haute pour le nouveau roi.

Nous espérons qu’il servira son peuple de façon aussi respectable que l’a fait la reine. Le roi apportera son propre style à la monarchie et il inaugurera une nouvelle ère de leadership. Nous avons déjà quelques indices quant aux questions qu’il chérit : la protection de l’environnement et la relation avec les peuples autochtones. Il en a fait preuve lors de ses nombreuses visites, ainsi que dans une lettre envoyée au grand Canadien David Suzuki. Pendant sa dernière visite au Canada, alors qu’il était prince, il a participé à une discussion importante sur la finance durable avec des leaders canadiens. J’espère que nous pourrons poursuivre cette conversation et que nous continuerons de mettre en lumière le besoin de protéger notre magnifique demeure, la Terre.

Chers collègues, j’aimerais terminer mon intervention en offrant mes sincères condoléances à la famille de la reine et aux gens qui l’aimaient. Nous tournons maintenant le regard vers l’avenir, en espérant que le roi Charles III laissera une marque positive sur notre monde. Merci, meegwetch.

L’honorable David Arnot [ - ]

Honorables sénateurs, je me joins à vous pour rendre hommage à feu Sa Majesté la reine Elizabeth II. Son dévouement au service et à la responsabilité liés à sa fonction et, par-dessus tout, sa relation avec les gens qui se tournaient vers elle pour obtenir espoir, force, courage et confiance étaient remarquables.

Elle était un modèle tenu en très haute estime et elle faisait systématiquement preuve de responsabilité et de respect. Elle était une souveraine accomplie. La Couronne, c’était elle. Elle a défendu l’honneur de la Couronne au sens le plus noble et le plus vrai de l’expression.

Au cours de ma vie, j’ai maintes fois eu l’occasion de réfléchir à ce que signifie l’honneur de la Couronne. Sa regrettée Majesté incarnait cet idéal puissant. Elle a placé la barre très haut pour nous tous ici en tant que serviteurs de la population canadienne. C’est ce niveau élevé que nous devons tous viser. Le pays et la démocratie canadienne comptent sur nous pour défendre l’honneur de la Couronne.

Comme je l’ai déjà dit :

Faire appel à l’honneur de la Couronne n’impliquait pas seulement le souverain en tant que personne, mais l’ensemble des principes traditionnels de justice fondamentale qui vont au‑delà des personnes et de la politique. C’est précisément cette distinction qui est aujourd’hui au cœur de nos idéaux en matière de « droits de la personne ».

Pour ma part, j’ai eu la chance de me trouver en présence de Sa Majesté à deux reprises dans ma vie : lors de sa première visite en Saskatchewan en tant que reine et lors de sa dernière visite. En juillet 1959, la reine a visité ma province. Je n’avais que 7 ans et mes parents, Gerry et Yvonne Arnot, nous ont amenés, ma sœur et moi, à l’Assemblée législative de la Saskatchewan, à Regina. Nous espérions entrevoir la reine et nous n’avons pas été déçus. Ce souvenir est gravé dans ma mémoire, parce que je me souviens de la foule, de l’énergie, du respect, des acclamations et de la joie tout autour de nous.

Quarante-six années plus tard, en 2005, la reine s’est rendue en Saskatchewan pour les célébrations du centenaire de la province. Le 5 mai 2005 a été une journée très spéciale pour ma famille et pour moi, et ce, pour deux raisons. À titre de commissaire aux traités, j’avais été invité à rencontrer la reine à Regina ce jour-là. Je résidais à l’hôtel Saskatchewan, tout comme la reine. À trois heures du matin, j’ai été réveillé en sursaut par la sonnerie bruyante du téléphone. C’était mon fils aîné, Michael Arnot, qui m’annonçait la naissance de notre premier petit-enfant, Owen. Nous espérions que cet appel n’avait pas dérangé la reine.

Plus tard ce matin-là, à la résidence du lieutenant-gouverneur, j’ai rencontré la reine en compagnie de mon épouse, Linda, de la regrettée Alma Kytwayhat, aînée vénérée du Traité no 6, et de notre bonne amie Colleen Cameron, de la Première Nation de Beardy et Okemasis.

Quand je repense à notre conversation avec la reine, je me souviens surtout du superbe sourire rempli de joie de l’aînée Alma Kytwayhat, sourire qui trouvait un écho très sincère et très ouvert chez la reine Elizabeth, dont les yeux bleus brillaient et pétillaient. C’est un moment que je n’oublierai jamais.

J’ai souvent entendu l’aînée Alma Kytwayhat parler avec détermination et mesure des traités et de la relation issue des traités et forgée par les parties : la Couronne, les Premières Nations et le Créateur. Les aînés disaient que nous sommes tous visés par les traités et que la reine Elizabeth représentait la grande mère blanche, c’est-à-dire Sa Majesté la reine Victoria, pendant le règne de laquelle la plupart des traités numérotés de l’Ouest canadien ont été conclus. Ces traités étaient un engagement à rassembler la population sous l’égide de la Couronne, tout comme nous sommes aujourd’hui rassemblés pour offrir nos hommages.

Je suis conscient que la Couronne demeure et que nous avons encore et toujours la responsabilité de préserver son honneur, surtout ici au Sénat.

Je me joins aux Canadiens de partout au pays et à tous les membres du Commonwealth qui parlent des beaux souvenirs qu’ils gardent de son règne et de la tristesse que leur inspire son décès.

[Note de la rédaction : Le sénateur Arnot s’exprime dans une autre langue.]

Thank you. Merci.

L’honorable Pat Duncan [ - ]

Honorables sénateurs, je me joins à vous et aux Canadiens pour rendre hommage à Sa Majesté la reine Elizabeth II en lui offrant nos humbles remerciements.

Des citoyens du Royaume-Uni, du Commonwealth et surtout du Canada — la deuxième patrie de Sa Majesté — ont partagé leurs histoires personnelles et leurs liens avec la défunte reine.

Chez nous, un document écrit en petits caractères et encadré était accroché au mur. On pouvait y lire ceci :

Par ordre du ROI, le nom du sergent de section TF Duncan de la Royal Air Force a été publié le 11 juin 1942 dans la London Gazette, comme cela a été mentionné dans une dépêche pour service distingué. Je suis chargé de faire part de la haute appréciation de Sa Majesté.

Ma mère, qui était alors Américaine, s’est enrôlée dans l’armée canadienne au même moment où la princesse Elizabeth s’est engagée dans l’armée britannique. Bien que mes parents n’aient jamais parlé de leur service pendant la guerre, la notion de service public — de service au public — incarnée par la reine faisait partie intégrante de nos valeurs familiales.

En tant que guide, j’ai eu l’honneur d’obtenir la décoration de Fourragère du Canada, qui m’a été remise par le représentant de la reine au Yukon, le commissaire James Smith. Lors des championnats nationaux de curling junior féminin, comme on les appelait à l’époque, nous avons porté un toast à la reine. En tant que députée de l’Assemblée législative du Yukon, j’ai prêté allégeance à Sa Majesté la reine, à ses héritiers et à ses successeurs. Hier, pour la toute première fois, j’ai porté les médailles qui m’ont été décernées par la reine.

Honorables sénateurs, les souvenirs de la reine et les rappels de la monarchie sont présents d’un bout à l’autre de notre pays et j’ai moi aussi ressenti le profond sentiment de perte à l’annonce du décès de la reine. D’autres personnes ont exprimé ces sentiments avec beaucoup plus d’éloquence que moi. Néanmoins, je tiens moi aussi à offrir mes sincères condoléances à sa famille, aux Canadiens, aux habitants du Royaume-Uni et, en fait, au monde entier.

Le Yukon a eu le privilège d’accueillir Sa Majesté une seule fois, en 1959. Lors de cette visite, le prince Philip s’était rendu à Mayo et à Dawson City, en pilotant lui-même l’avion pour s’y rendre. La reine, enceinte du prince Andrew, n’avait pas pu se joindre à lui, car elle souffrait de nausées. Plus tard, en 2001, j’ai accompagné le prince Charles pour une autre visite royale à Mayo.

En réfléchissant aux mots que je voulais prononcer aujourd’hui pour vous faire part de mon profond sentiment de perte à la suite du décès de Sa Majesté, je suis allée me promener avec notre compagnon canin spécial. Malheureusement, je n’ai pas emprunté un corgi. Je me promenais dans la forêt expérimentale Gunnar-Nilsson-et-Mickey-Lammers, chez moi, au Yukon. Il s’agit d’une région et d’une initiative qui célèbrent l’environnement. Ce parc se situe sur le territoire traditionnel du Conseil des Ta’an Kwäch’än, et je crois que la famille de Windsor apprécierait vraiment s’y promener. Des panneaux d’interprétation transmettent les connaissances et la culture de la terre tout au long des nombreux sentiers. Alors que je pensais à Sa Majesté et à son service envers le monde, une note interprétative m’a interpellée : « gardien du feu ».

Comment allume-t-on un feu sans allumette? Au lieu d’utiliser des allumettes, les Premières Nations du Yukon se servaient d’un perçoir à archet. La note interprétative nous explique qu’après s’être donné la peine d’allumer le feu, ils le surveillaient attentivement. Nomades, ils transportaient lors de leurs déplacements des braises chaudes enveloppées dans des sacs de bois d’allumage. Être le gardien du feu était une responsabilité importante. Quelle énorme responsabilité de service public — un poste de confiance — que d’être le gardien des braises.

Il existe autant d’interprétations et de valeurs associées au feu qu’il y a de cultures au Canada. Voici ce qu’avait déclaré le chef John Kelly à la Commission royale sur l’environnement du Nord en 1977 :

[...] le cercle des Ojibwés s’agrandit au fil des ans. Des Canadiens de toutes couleurs et de toutes religions pénètrent dans ce cercle. Vous pensez avoir des racines ailleurs, mais en réalité, vous êtes ici, avec nous.

La reine a partagé la même vision optimiste d’un Canada accueillant lorsqu’elle a signé notre Constitution en 1982. Voici ce qu’elle avait alors déclaré :

En ma qualité de reine du Canada, je ne puis imaginer de meilleur moment pour proclamer encore une fois ma confiance illimitée dans l’avenir de ce merveilleux pays.

Sa Majesté était une gardienne. Les braises qu’elle transportait avec elle étaient nos cœurs.

Alors que nous pleurons sa perte — qui est bien réelle et profonde pour sa famille et nous tous — et que nous la remercions pour une vie passée au service de la population, peut-être que la meilleure façon de lui rendre hommage consiste à la remercier de nous avoir démontré par le meilleur exemple qui soit ce que c’est que de servir avec dignité, grâce et humilité et faire de notre mieux, jour après jour, pour incarner cet exemple dans tout ce que nous faisons.

Thank you. Mahsi’cho. Gùnáłchîsh. Merci, Votre Majesté. Puissiez-vous reposer en paix.

L’honorable Lucie Moncion [ - ]

Honorables sénateurs, Sa Majesté la reine Elizabeth II, souveraine et cheffe d’État du Canada, s’est engagée dès l’âge de 21 ans à consacrer sa vie entière, qu’elle soit longue ou courte, au service de ses sujets. Cet engagement, elle l’a tenu jusqu’à son décès à l’âge de 96 ans, devenant ainsi le monarque britannique dont le règne a été le plus long. En choisissant de consacrer sa vie au service du Commonwealth et de ses habitants, cette femme de tête aura été un modèle de dignité, de respect, de dévouement, de candeur, de fierté et de grâce pour toutes les personnes qui assument des responsabilités en matière de service public.

Au cours de son règne, elle a été confrontée à d’innombrables situations difficiles. Malgré tout, elle n’a jamais reculé devant l’adversité et s’est acquittée de ses fonctions avec habileté, diplomatie et détermination en qualité de gardienne principale de la Constitution.

Sa Majesté affichait un profond respect et une grande admiration pour le Canada. Elle aimait visiter notre beau et grand pays. Elle a d’ailleurs pris part à plus d’une vingtaine de tournées royales au Canada. À chacune de ses visites, elle s’est adressée aux Canadiennes et aux Canadiens dans les deux langues officielles. Reine francophile, Sa Majesté maîtrisait remarquablement bien la langue française.

J’aimerais également mentionner qu’hier, nous avons pu assister, pour ceux qui étaient présents, au service qui a été organisé pour Sa Majesté et qui a eu lieu ici, à Ottawa. C’était un service extrêmement beau, qui avait beaucoup de classe. Il y avait aussi de la simplicité et beaucoup de respect, ce qui était à l’image de notre souveraine. Elle aimait beaucoup notre pays. La simplicité de la cérémonie d’hier a été notre façon à nous, Canadiens, de lui montrer à quel point nous l’appréciions pour tout ce qu’elle a fait pour notre pays. La cérémonie d’hier a été menée avec grâce et avec un grand respect. J’aimerais d’ailleurs féliciter les organisateurs, car la cérémonie était exceptionnelle.

Femme de tête, mais aussi de cœur, la reine Elizabeth II offrait un accueil chaleureux aux personnes qu’elle invitait à partager son domicile, et elle avait aussi un sourire contagieux. Passionnée de chevaux d’élevage et de dressage, elle était une excellente cavalière. Elle avait l’œil aiguisé pour les chevaux et les bonnes montures, comptait des champions dans ses écuries et adorait les courses de chevaux.

Elle portait aussi une affection toute particulière à une race de chiens, les corgis. Elle a possédé plus de 30 chiens de cette race tout au long de sa vie.

Sa Majesté la reine Elizabeth II était aussi une épouse. Elle aimait profondément le prince Philip, avec qui elle a partagé sa vie pendant plus de 73 ans. On se souviendra de l’image qu’elle projetait lors des funérailles de ce dernier, quand elle était assise seule dans la chapelle Saint-Georges du palais de Windsor, le 17 avril 2021. On voyait cette grande dame fragilisée et triste pour la première fois.

Sa Majesté la reine était aussi une maman, une grand-maman et une arrière-grand-maman, rôles qu’elle a assumés discrètement. La conjonction des rôles de maman et de souveraine l’aura parfois placée dans des situations délicates et forcée à prendre des décisions difficiles quant à l’avenir de ses enfants et de ses petits-enfants au sein de la monarchie. Elle a pris ces décisions par devoir et par respect pour ses sujets, ainsi que pour assurer la pérennité et la stabilité de cette monarchie qu’elle estimait tant.

Femme qui incarnait la compassion, la grâce et l’expérience, elle était aimée et respectée des Canadiennes et des Canadiens. Son décès laissera un grand vide sur l’échiquier mondial, car elle a été un modèle influent de leadership politique et diplomatique féminin. Elle a été une source d’inspiration pour les femmes et les filles du monde entier.

Au roi Charles III et à tous les membres de la famille royale, j’offre mes plus sincères condoléances.

L’honorable Tony Dean [ - ]

Honorables sénateurs, je me joins à vous pour commenter le décès de la reine Elizabeth II, une perte qui fait écho dans ce pays, dans le Commonwealth et dans le monde entier.

Un thème récurrent cet après-midi a été celui de la reine comme étant une présence constante et inébranlable dans un monde en rapide évolution, un monde d’incertitude et d’instabilité croissante. La reine en savait quelque chose de l’instabilité, n’est-ce pas, puisque les ravages de la Seconde Guerre mondiale sévissaient encore au début de son règne. L’accession au trône a eu lieu après la guerre, alors que ses parents sortaient d’une guerre brutale et dévastatrice de plusieurs années. Il n’est donc pas étonnant que nos parents aient été captivés par le couronnement de 1953. C’était un moment d’espoir, une lueur vive, alors que la poussière d’une sale guerre commençait à diminuer et à se déposer.

Beaucoup d’entre nous ont observé les événements des deux dernières semaines à travers les yeux de nos parents. C’est en effet un moment très poignant pour nous tous, un moment pour réfléchir à nos parents et à leur vie, ce qui nous touche à bien des égards.

Étant elle-même une jeune femme ayant grandi en temps de guerre, la reine a transmis des messages d’espoir à des milliers de jeunes Britanniques qui ont été déplacés par cette guerre. En tant que reine, elle a toujours communiqué d’une manière concrète, sincère et éloquente qui touchait des millions de gens.

De surcroît, elle savait reconnaître le travail accompli par les gens ordinaires. C’était une reine qui parlait aux gens ordinaires du pays et de nombreux autres pays du Commonwealth : aux infirmières, aux ouvriers, aux soldats, aux agriculteurs, aux pêcheurs et à bien d’autres encore. Ce faisant, elle était une merveilleuse communicatrice.

Certains d’entre vous auront vu Catherine Clark, la fille de l’ancien premier ministre Joe Clark, parler en entrevue à CBC d’une expérience qu’elle a vécue à l’âge de 10 ans. Elle assistait à l’un d’une série d’événements qui lui paraissaient de plus en plus ennuyeux. Après avoir écouté la reine parler, elle était prête à partir, mais son père lui a dit que personne ne pouvait quitter la salle avant que la reine soit sortie.

Elle a eu une conversation avec la reine, un petit échange amical, et est allée s’asseoir sur le siège le plus proche de la porte, en espérant, je suppose, pouvoir s’échapper d’une manière ou d’une autre. La reine est revenue et lui a dit : « Je vois que vous êtes toujours là. » La jeune Catherine Clark, en bonne enfant de 10 ans, a répondu : « Eh bien, oui. On m’a dit que personne ne peut partir avant vous. » La reine — sans perdre un instant, selon Mme Clark — a dit : « Eh bien, venez avec moi. Partons ensemble. » Quelle belle image. Quel charmant moment.

Quelques années plus tard — c’est peut-être là une sorte de reprise —, j’ai rencontré le duc d’Édimbourg. Bien entendu, j’en ai profité pour lui indiquer que j’étais récipiendaire de sa médaille d’or. Je sais que le programme de récompense du duc d’Édimbourg connaît un grand succès au Canada. Le duc, comme il l’avait déjà fait lors de nos rencontres précédentes, s’est montré rapide comme l’éclair. Il a regardé le revers de mon veston et il a dit : « Alors, où est cette médaille? » J’ai répondu : « Eh bien, elle est à la maison. » Encore une fois, en une nanoseconde, il a dit : « Eh bien, je constate que vous ne la sortez que pour les occasions spéciales. » Malheureusement, cette histoire est vraie.

Pour ceux d’entre nous qui, au Royaume-Uni, ont des racines ouvrières, notre expérience de la reine et de la monarchie a été, au mieux, ambiguë, et je pense que certains d’entre vous partagent probablement ce sentiment. Dans ma jeunesse, il était difficile de distinguer la reine des structures monarchiques, non seulement au Royaume-Uni, mais dans le monde entier. Pourtant, au fil des décennies passées à observer la reine et à l’écouter, cette ambiguïté s’est progressivement dissipée avec l’âge; le mien, pas le sien.

Les dernières semaines ont été difficiles. Nous avons tous eu une pensée pour les générations précédentes, en particulier celle de nos parents, comme je l’ai dit plus tôt. Honorables collègues, nous avons perdu un véritable pilier en cette période extrêmement incertaine pour le Canada et pour le monde entier. En conclusion, je crois que certains d’entre nous se sont demandé comment nous allions pouvoir combler ce vide et nous passer de ce pilier qui nous soutenait depuis toujours. Pendant que nous y réfléchissons, n’oublions pas le rôle et la responsabilité que nous avons lorsqu’il s’agit de promouvoir le dialogue, le compromis et l’inclusion de façon responsable et avec dignité, bienveillance et humilité, comme ma collègue la sénatrice Duncan l’a souligné il y a un instant. C’est ainsi que nous pourrons honorer la mémoire de la reine et remplir nos obligations envers les Canadiens. Merci, honorables collègues.

L’honorable Brent Cotter [ - ]

Honorables sénateurs, je suis profondément attristé par le décès de la reine, et mes pensées accompagnent sa famille. Cela dit, en toute honnêteté, mes réflexions sont empreintes — et j’espère que c’est aussi votre cas — de gratitude pour le rôle qu’elle a joué dans notre vie. D’abord, je vous présenterai deux réflexions personnelles, puis je parlerai de la reine et de la Saskatchewan et je conclurai avec le sujet de l’immortalité.

Comme la sénatrice Batters, je suis conseiller de la reine, même s’il est vrai que nous sommes des milliers. Je n’y avais pas beaucoup réfléchi avant-hier, mais pendant cette magnifique célébration, j’ai pensé à la reine que j’admirais beaucoup et au fait que j’étais conseiller de la reine. Je me suis senti fier, honoré et touché, même si je dois admettre qu’au cours des 29 années où j’ai porté ce titre, la reine ne m’a pas demandé conseil une seule fois.

Je suis maintenant conseiller du roi. Je connais un peu le roi actuel, mais je ne m’attends pas à ce qu’il me téléphone non plus.

Ma deuxième réflexion personnelle porte sur la famille royale. Dans les jours les plus sombres de la Deuxième Guerre mondiale, le roi George VI a prononcé un discours très spécial à la radio. Un passage de celui-ci est devenu une source d’inspiration pour les différentes générations de ma famille. Bien que nous prenions parfois quelques libertés par rapport aux propos exacts du roi, voici ce qu’il a dit à l’époque :

J’ai dit à l’homme qui se tenait à la porte de l’année : « Donne‑moi une lumière que je puisse avancer en toute sécurité dans l’inconnu. »

Et il a répondu :

« Va dans l’obscurité et mets ta main dans celle de Dieu. Ce sera pour toi mieux qu’une lumière et plus sûr qu’un chemin connu. »

À l’époque, ces propos ont été une source d’inspiration pour des millions de gens, dont ma famille, pour qui ils revêtent un caractère presque sacré.

J’ai rencontré une fois la reine et j’ai eu une brève, mais agréable conversation avec elle. J’aurais aimé lui parler de l’effet de son père sur le mien ainsi que sur notre famille.

La reine et la Saskatchewan : Comme vous l’avez entendu, la reine s’est rendue dans toutes les provinces et tous les territoires et a fait savoir qu’elle aimait tout autant toutes les régions du Canada. Toutefois, en Saskatchewan, nous savons que c’est notre province qu’elle préférait. Il y a deux arguments à l’appui de cette affirmation, l’un que vous avez déjà entendu de la part du sénateur Gold et de la sénatrice Batters. Son cheval préféré, qui lui a été offert par la GRC en 1969, venait de la Saskatchewan.

Encore plus irréfutable, mais assez subtile, est son insigne, dont une partie orne le fauteuil derrière celui de la présidence. L’insigne comprend trois parties. Premièrement, « E » pour « Elizabeth », suivi du chiffre romain « II » pour « Elizabeth II ». Et ensuite? Y a‑t‑il un « W », comme « E II Winnipeg? » Non. S’agit-il d’un « F », comme « E II Fredericton? » Non plus. L’insigne est « Elizabeth II Regina. » C’est subtil, j’en conviens, mais nous, en Saskatchewan, l’avons bien compris.

De plus, la reine était aimée par les Saskatchewanais. Sa visite de 2005 était un événement exceptionnel. Les gens responsables alors du protocole en Saskatchewan étaient Michael Jackson — qu’on appelait en Saskatchewan le Michael Jackson sans le gant — et Deborah Johnson. Personne ne faisait mieux les choses qu’eux. Ils se sont occupés, entre autres, de commander la statue de bronze de la reine montée sur Burmese et de la dévoiler à l’occasion de sa visite. La statue se dresse devant l’édifice de l’assemblée législative à — vous l’avez deviné — Regina.

J’ai participé à la planification de la visite de la reine en 2005, année de notre centenaire, et j’ai eu l’idée de construire une nouvelle aile à l’Hôtel du gouverneur, la résidence du lieutenant-gouverneur, et de la nommer en l’honneur de la reine Elizabeth II. Le problème, c’est que ce projet allait coûter 6 millions de dollars, ce que le budget ne permettait pas. Ainsi, de façon quelque peu audacieuse, j’ai mis sur pied une fondation pour la résidence du lieutenant-gouverneur regroupant d’éminents citoyens de la Saskatchewan, dont notre collègue et amie Pamela Wallin. Cette fondation a recueilli auprès de la population de la Saskatchewan la quasi-totalité des 6 millions de dollars nécessaires à la construction de cette aile en hommage à la reine, qui l’a inaugurée lors de sa visite.

La reine Elizabeth a été une source d’inspiration pour les personnes d’ascendance autochtone de tout le Canada et elle a su préserver la flamme d’espoir en un avenir meilleur dont parlait le sénateur Arnot, une flamme qui, je l’espère, nous inspirera tous. En ces jours de tragédie bouleversante, la Saskatchewan, et plus particulièrement la nation crie de James Smith, ont grandement besoin de cet espoir et de cette inspiration.

Enfin, parlons d’immortalité. Quelle que soit la signification de celle-ci pour chacun d’entre nous, c’est certainement au moins ceci : qu’une personne continue à vivre dans l’esprit des gens grâce à l’effet, bon ou mauvais, qu’elle aura eu sur eux. La reine Elizabeth II, notre reine, au cours de ses 70 ans de règne, peut-être plus que toute autre personne sur cette terre, a marqué la vie de dizaines de millions de personnes par sa bienveillance, sa dignité, son intégrité et son sens du devoir. Quel héritage!

Je ne sais pas si le protocole du Sénat le permet, mais j’aimerais vous inviter à vous joindre à moi pour applaudir la reine Elizabeth II et célébrer une merveilleuse vie bien remplie. Merci.

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