La rose et la couronne : Les symboles royaux du Parlement, première partie
Dans le premier d’une série de trois articles, nous explorons quatre des symboles royaux les plus fréquemment vus dans la Cité parlementaire.
En février 2019, le Sénat a déménagé à l’édifice du Sénat du Canada, une ancienne gare ferroviaire construite en 1912. Le Sénat occupera cet emplacement temporaire pendant la réhabilitation de l’édifice du Centre du Parlement, demeure permanente du Sénat.
Bien que l’édifice du Centre soit fermé pendant les travaux de réhabilitation, les Canadiens peuvent toujours découvrir son art et son architecture, et ceux de l’édifice du Sénat du Canada, grâce à la visite virtuelle immersive du Sénat.
La Colline du Parlement regorge d’anciens symboles de la royauté, rappelant les liens que le Canada entretient depuis 800 ans avec la tradition parlementaire anglaise et les monarchies anglaise, française et écossaise qui l’ont précédée.
« Tous ces symboles renforcent la longue relation entre les parlements du Canada et de la Grande-Bretagne », a déclaré Johanna Mizgala, conservatrice de la Chambre des communes. « Mais le Parlement canadien n’est pas celui de Westminster. Les idées qui y prévalent sont distinctement canadiennes ».
Ces symboles, même s’ils sont héréditaires, s’adressent directement aux Canadiens et témoignent de leurs origines régionales.
« Ils ont un rapport avec le Parlement, mais aussi avec les lieux où nous vivons », a déclaré Mme Mizgala. « Ils nous rappellent d’où nous venons ».
Voici quelques-uns des symboles que vous verrez fréquemment :
Couronne de saint Édouard
Les couronnes sont omniprésentes dans l’édifice du Centre et l’édifice du Sénat du Canada. Elles symbolisent la tradition de monarchie constitutionnelle que partagent le Canada et la Grande-Bretagne.
Cette version, avec ses arcs plongeants caractéristiques, est à la fois un symbole et une couronne tangible. Normalement exposée à la Tour de Londres, la couronne de saint Édouard a été choisie pour les cérémonies de couronnement des rois George V, George VI, Elizabeth II et Charles III.
L’original est réalisé pour Édouard le Confesseur en 1042, mais il est détruit pendant la guerre civile anglaise dans les années 1600. La version actuelle est réalisée lorsque le roi Charles II regagne le trône en 1660.
C’est un symbole familier pour les Canadiens. Sous le règne de la reine Elizabeth II, il apparait fréquemment dans les armoiries, les écus et les autres insignes, et représente à la fois le monarque personnellement et le concept de l’État et de son gouvernement en tant que source d’autorité souveraine non partisane.
Couronne des Tudor
La couronne des Tudor est à la fois symbolique et tangible.
Sa forme en dôme caractéristique est associée au premier roi de la dynastie des Tudor, Henri VII, qui règne de 1485 à 1509. Un siècle et demi plus tard, le roi Charles I commande la version définitive, avec quatre arcs ornés de perles s’élevant presque en pointe. Cette couronne est détruite pendant la courte ère du Commonwealth qui suit l’exécution du roi en 1649.
Elle est ensuite ressuscitée par la reine Victoria en 1880. En tant qu’impératrice des Indes, elle choisit de se faire représenter par une couronne impériale bien arquée. Ses successeurs l’adoptent comme insigne royal et elle est largement reproduite au Canada sur des pièces de monnaie, des timbres-poste, des passeports et des documents officiels.
L’édifice du Centre n’a pas fait exception à la règle. Lorsqu’il est reconstruit après l’incendie de 1916, la couronne des Tudor prend une place proéminente dans le programme de sculptures de l’édifice.
Rose des Tudor
« La rose des Tudor fait partie de l’histoire du Parlement lui-même », a expliqué Mme Mizgala. « Elle lie notre système parlementaire à l’Angleterre des Tudor ».
En 1485, Henry Tudor écrase son rival, le roi Richard III, à la bataille de Bosworth Field. La victoire de la Maison de Lancastre sur la maison rivale d’York met fin à la sanglante guerre des Deux-Roses, qui a duré 30 ans, et règle définitivement la question de la succession. L’astucieux roi Henri VII adopta immédiatement la rose des Tudor comme emblème, fusionnant les roses rouges des Lancastre et les roses blanches de la Maison d’York en un symbole de réconciliation nationale.
Les Tudor instituent des réformes, qui ouvrent la voie aux systèmes parlementaires modernes de la Grande-Bretagne et du Canada. La Chambre des communes s’installe dans le palais de Westminster, des comptes rendus plus systématiques des débats sont établis et la notion de privilège parlementaire apparait. C’est ainsi que la rose des Tudor évolue progressivement de son statut de symbole dynastique en symbole du Parlement lui-même.
Les roses des Tudor apparaissent dans tout l’édifice du Centre, notamment sur l’estrade du Président de la Chambre du Sénat.
Herse
La herse, une porte de château fortifiée et rétractable, est l’un des symboles les plus mystérieux de l’édifice du Centre.
« La herse, dans un contexte parlementaire, est un symbole d’autorité et de devoir de protection d’une communauté », a indiqué Mme Mizgala.
Elle passe d’insigne de la dynastie des Tudor au pouvoir en Angleterre à un emblème du Parlement lui‑même. Le roi Henri VII hérite de la herse et de la rose des Tudor comme emblèmes familiaux et les utilise pour représenter la dynastie qu’il a fondée. C’est sous les Tudor que le palais de Westminster devient le lieu où le Parlement se réunit régulièrement.
Lorsque le palais est détruit par un incendie en 1834, l’architecte Charles Barry est chargé de concevoir son remplacement. Il recourt au symbole de la herse partout dans l’édifice pour représenter l’idée que le palais, naguère forteresse des rois, renait de ses cendres pour devenir un bastion du peuple.
« Dans les années 1860, l’inspiration pour le premier édifice du Parlement canadien est venue du palais de Westminster qui venait d’être reconstruit », a souligné Mme Mizgala. « Nombre de ses concepts et symboles, comme la herse, se sont retrouvés dans notre édifice ».