Le lion, la licorne et le dragon : Les symboles royaux du Parlement, deuxième partie
Dans le deuxième d’une série de trois articles, nous explorons trois des symboles royaux les plus fréquemment vus dans la Cité parlementaire.
En février 2019, le Sénat a déménagé à l’édifice du Sénat du Canada, une ancienne gare ferroviaire construite en 1912. Le Sénat occupera cet emplacement temporaire pendant la réhabilitation de l’édifice du Centre du Parlement, demeure permanente du Sénat.
Bien que l’édifice du Centre soit fermé pendant les travaux de réhabilitation, les Canadiens peuvent toujours découvrir son art et son architecture, et ceux de l’édifice du Sénat du Canada, grâce à la visite virtuelle immersive du Sénat.
Bon nombre de symboles qui apparaissent à maintes reprises dans les édifices du Parlement du Canada, dans la maçonnerie, les sculptures sur bois et les vitraux, montrent que les bases profondes du système parlementaire canadien reposent sur les dynasties royales de France et d’Angleterre.
Ces symboles décrivent l’histoire d’un accord complexe et changeant que ces monarques ont forgé avec les peuples qu’ils gouvernaient, d’abord en tant que souverains absolus, puis, au fil du temps, comme collaborateurs des représentants de la population au Parlement.
Johanna Mizgala, la conservatrice de la Chambre des communes, a dit que « nos histoires d’origines sont racontées par le biais de ces symboles décoratifs. Ils font le lien entre notre Parlement et les traditions dont nous avons hérité ».
Voici quelques-uns des symboles que vous apercevrez fréquemment :
Le lion
Le lion, symbole universel de courage et de force, est omniprésent sur la Colline du Parlement : se cabrant, s’accroupissant ou tenant les écus.
Dès 1066, Guillaume, le duc de Normandie, a porté la bannière de sa famille, deux lions sur un fond rouge, de l’autre côté de la Manche depuis la France lorsqu’il a conquis l’Angleterre et s’est emparé du trône. Son arrière-petit-fils, Henri II, a ajouté un troisième lion lorsqu’il s’est marié avec la plus puissante héritière de l’Europe, Aliénor d’Aquitaine; il a incorporé le lion des armoiries de la famille de sa femme à ceux de la sienne.
Le fils impulsif d’Henri II et d’Aliénor d’Aquitaine, Richard Cœur de Lion, a porté la bannière du lion lors des croisades, associant ainsi l’animal à la fierté et à la puissance anglaises. Par la suite, le lion a figuré sur les armoiries royales de tous les monarques britanniques qui ont suivi.
En ce qui concerne la Colline du Parlement, le lion est passé des notions médiévales de pouvoir et de conquête aux idéaux contemporains du gouvernement parlementaire et de l’autorité qu’il tient de la Couronne. Le lion est ici un symbole de loyauté et du soutien indéfectible aux institutions gouvernementales. Pour ce faire, il reçoit l’aide du prochain personnage, la licorne.
La licorne
La licorne est un emblème centenaire de l’Écosse. Elle symbolise le courage, l’innocence et la pureté conjugués à une force sauvage et indomptable. Sur la Colline du Parlement, elle apparait presque toujours en face du lion britannique, comme sur les armoiries du Canada.
« L’histoire du lion et de la licorne en tant que compagnons, ou ennemis jurés, remonte à l’ancienne Babylone », a souligné Mme Mizgala. « La licorne est le messager du printemps et le lion celui de l’été. Le lion chasse la licorne et le lion triomphe toujours. »
Leur lien avec la Grande-Bretagne remonte au roi Jacques VI d’Écosse, qui a ajouté Jacques Ier d’Angleterre à son titre en 1603 lorsque sa cousine, la reine Elizabeth Ire, est morte sans descendance.
« Jacques VI d’Écosse unifie l’Angleterre et l’Écosse sous un même régime. Il ne se considère pas comme la licorne soumise au lion. Pour lui, ces symboles sont liés », a indiqué Mme Mizgala. « Le roi Jacques VI les réunit, comme supports dans les armoiries, dans un seul et même symbole. En un sens, le lion a maintenant un compagnon d’armes. »
La licorne est toujours représentée munie d’un collier relié à une chaîne en or. La licorne est féroce et imprévisible, et donc seuls les liens au pouvoir royal, représenté par la chaîne, peuvent la maîtriser.
Le dragon rouge
Le dragon rouge est un ancien symbole héraldique du pays de Galles. Il apparait dans l’édifice du Centre, entre autres, sur le plafond à caissons de la Chambre du Sénat et au plafond en vitrail du foyer du Sénat.
Le symbole trouve son origine dans la légende du roi Arthur. L’Historia Brittonum du 9e siècle raconte que Vortigern, roi des Celtes bretons, a consulté Merlin l’enchanteur pour savoir pourquoi la construction de sa forteresse à Dinas Emrys prenait autant de temps. Merlin a conseillé au roi de creuser sous la forteresse. Sous les fondations, Vortigern découvrit un dragon rouge, représentant les Celtes, combattant un dragon blanc, représentant les envahisseurs anglo-saxons. Merlin prédit la venue d’un grand chef qui ralliera les Celtes, chassera les Anglo-Saxons et reconquerra l’île.
Les histoires médiévales mentionnent que Cadwaladr, souverain du royaume gallois de Gwynedd au 7e siècle, utilisait le dragon rouge comme emblème. Pendant des siècles, le dragon rouge est resté un symbole de la fierté culturelle galloise et de la résistance à la domination anglaise. Il figure sur le drapeau officiel du pays de Galles, adopté en 1959.
« Il est logique de trouver beaucoup de symboles associés aux îles britanniques, particulièrement à l’Écosse, à l’Irlande et au pays de Galles, car au début du 20e siècle, c’est de là que provenaient la plupart des immigrants », a souligné Mme Mizgala.
« Évidemment, si c’était à refaire aujourd’hui, les symboles seraient très différents. »