« Comprendre qu’on est là pour représenter tous les Canadiens », dit le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie, bientôt à la retraite
Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie, scientifique et inventeur de renommée internationale, prendra sa retraite le 6 novembre 2017. Sa nomination au Sénat a été recommandée par le premier ministre de l’époque, Stephen Harper, en août 2009.
Le sénateur Ogilvie a été président et vice-chancelier de l’Université Acadia à Wolfville, en Nouvelle-Écosse, de 1993 à 2003 et se spécialise en biotechnologie, en chimie bio-organique et en génie génétique.
Il quitte le Sénat en tant que président du Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, a été coprésident du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir en 2016 et président du Caucus de recherche en santé de 2009 à 2015.
Dans cette entrevue de SenCAplus, le sénateur Ogilvie revient sur les années qu’il a passées au Sénat.
Quelles étaient vos attentes à l’égard du Sénat?
Je n’avais pas d’attentes exagérées. Je suis un Canadien attentif et informé, qui s’est toujours intéressé à l’évolution et au fonctionnement de notre gouvernement. Le Sénat joue ce que j’appelle un rôle de comité exécutif. J’étais président d’une université, donc je sais comment les organisations fonctionnent et le rôle que jouent les comités exécutifs. J’ai toujours pensé que le rôle du Sénat était de scruter les lois que la Chambre des communes adoptait avec enthousiasme, souvent de façon partisane.
Huit ans plus tard et sur le point de prendre votre retraite du Sénat, de quelles réalisations êtes-vous le plus fier?
Je peux dire sans hésiter que c’est la présidence du comité sur l’aide médicale à mourir et la rédaction du rapport dans lequel nous faisions des recommandations au gouvernement sur l’élaboration de lois et de règlements qui protégeraient les intérêts de tous les Canadiens. Je lis encore ce rapport de temps en temps et je pense qu’il s’agit d’un document magnifique. Le Canada devra éventuellement adopter toutes les mesures et protections mentionnées par notre comité. C’était émouvant et il s’agissait d’un défi, mais c’était également un grand privilège pour moi de faire partie de ce comité.
Mis à part les lois et les règlements, quel aspect de votre travail ici vous a apporté le plus de satisfaction?
Il y a plusieurs choses. La plus évidente est l’occasion de participer à des études sur des enjeux importants auxquels font face le Canada et le monde. Cela a été extrêmement enrichissant. La vie sur la Colline du Parlement peut être folle et parfois décevante, mais il y a beaucoup de satisfaction à pouvoir en faire partie.
Vous êtes-vous fait beaucoup d’amis depuis votre arrivée ici?
J’ai forgé quelques amitiés exceptionnelles au-delà des frontières politiques. J’ai fait de mon mieux pour agir dans l’intérêt du pays dans un esprit entièrement dépourvu de partisanerie, pour ce qui est d’interagir avec des gens de tous les partis.
En quoi votre formation scientifique a-t-elle éclairé votre carrière de sénateur ou vous a aidé dans cette dernière?
Elle s’est avérée extrêmement importante et je me plais à penser qu’elle m’a beaucoup aidé dans mon travail ici. Quand je suis arrivé, j’ai été étonné de voir que j’amenais une expérience presque unique à la Colline — en ce sens que peu de sénateurs provenaient d’un milieu fondamentalement scientifique. Ma formation m’a permis d’acquérir de vastes connaissances et une grande expérience que j’ai pu mettre au service des comités dont j’étais membre. Je pouvais voir des choses que personne d’autre n’aurait vues parce que je les avais vécues. Je savais quand quelqu’un nous jetait de la poudre aux yeux ou essayait d’influencer les lois en citant des études mal fondées — ou, dans certains cas, qui n’avaient aucun fondement. Dans la plupart des cas, les représentants des grandes sociétés et organisations sont des lobbyistes sans formation scientifique, qui représentent des entreprises qui ont des produits supposément fondés sur la science. Donc j’ai pu réfuter plusieurs de leurs affirmations et j’ai aussi pu corroborer, avec des arguments fondés sur des connaissances, les éléments qui étaient importants pour le pays. J’ai également été en mesure d’organiser des foires où d’éminents chercheurs de la communauté scientifique canadienne sont venus sur la Colline pour rencontrer des parlementaires et faire valoir les merveilleux avantages qu’offrent leurs travaux de recherche.
Que pensez-vous des efforts déployés pour moderniser le Sénat?
Je vois cela essentiellement comme une façade. Je ne vois pas beaucoup de différence dans la manière dont les sénateurs indépendants votent. Ils sont nommés surtout pour une expérience politique commune, mais je m’inquiète surtout des efforts qu’on déploie pour changer le Sénat au point d’annuler l’opposition officielle. Quand on regarde les pays qui se heurtent à des difficultés, c’est invariablement parce qu’il n’y a aucune opposition officielle organisée et légitime. Quand un gouvernement a des difficultés, il n’y a aucun organe d’expérience capable de centrer l’attention de la population. Le Vénézuéla était une société de classe moyenne assez bien nantie, mais qui est en train de sombrer dans le chaos parce que le gouvernement a diminué les pouvoirs de l’opposition. Selon moi, les efforts de l’actuel gouvernement visent à affaiblir l’opposition et c’est très clair pour le Sénat. C’est une grave erreur.
Si c’est le cas, quelles en sont les conséquences?
Les membres de la Chambre des communes se voient comme les maîtres suprêmes et considèrent le Sénat comme un désagrément – surtout quand il y a une forte opposition qui peut faire changer les lois du gouvernement. Si on affaiblit l’opposition dans le Sénat et qu’on fait en sorte qu’il soit plus difficile de former une opposition concertée, les lois adoptées à la Chambre des communes seront promulguées sans aucune modification. Donc, à mon sens, ces efforts visent à empêcher la création d’un solide front d’opposition.
Selon vous, quels seront les principaux défis qu’auront à relever les sénateurs dans les 25 prochaines années?
La question immédiate est de savoir s’ils pourront travailler ensemble dans un système en constante évolution. Ils devront comprendre qu’ils ont un rôle collectif à jouer dans le renforcement de la démocratie canadienne. C’est essentiel.
Quel conseil donneriez-vous aux nouveaux sénateurs?
Comprendre clairement qu’ils sont là pour représenter tous les Canadiens.
Quelle est la prochaine étape pour vous?
Je n’ai rien de particulier de prévu. J’espère continuer à mener une vie saine dans mon coin de pays, aux abords de la baie de Fundy.
Lisez les déclarations effectuées à la Chambre du Sénat sur le départ à la retraite du sénateur Ogilvie.
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Le sénateur Ogilvie a été président et vice-chancelier de l’Université Acadia à Wolfville, en Nouvelle-Écosse, de 1993 à 2003 et se spécialise en biotechnologie, en chimie bio-organique et en génie génétique.
Il quitte le Sénat en tant que président du Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, a été coprésident du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir en 2016 et président du Caucus de recherche en santé de 2009 à 2015.
Dans cette entrevue de SenCAplus, le sénateur Ogilvie revient sur les années qu’il a passées au Sénat.
Quelles étaient vos attentes à l’égard du Sénat?
Je n’avais pas d’attentes exagérées. Je suis un Canadien attentif et informé, qui s’est toujours intéressé à l’évolution et au fonctionnement de notre gouvernement. Le Sénat joue ce que j’appelle un rôle de comité exécutif. J’étais président d’une université, donc je sais comment les organisations fonctionnent et le rôle que jouent les comités exécutifs. J’ai toujours pensé que le rôle du Sénat était de scruter les lois que la Chambre des communes adoptait avec enthousiasme, souvent de façon partisane.
Huit ans plus tard et sur le point de prendre votre retraite du Sénat, de quelles réalisations êtes-vous le plus fier?
Je peux dire sans hésiter que c’est la présidence du comité sur l’aide médicale à mourir et la rédaction du rapport dans lequel nous faisions des recommandations au gouvernement sur l’élaboration de lois et de règlements qui protégeraient les intérêts de tous les Canadiens. Je lis encore ce rapport de temps en temps et je pense qu’il s’agit d’un document magnifique. Le Canada devra éventuellement adopter toutes les mesures et protections mentionnées par notre comité. C’était émouvant et il s’agissait d’un défi, mais c’était également un grand privilège pour moi de faire partie de ce comité.
Mis à part les lois et les règlements, quel aspect de votre travail ici vous a apporté le plus de satisfaction?
Il y a plusieurs choses. La plus évidente est l’occasion de participer à des études sur des enjeux importants auxquels font face le Canada et le monde. Cela a été extrêmement enrichissant. La vie sur la Colline du Parlement peut être folle et parfois décevante, mais il y a beaucoup de satisfaction à pouvoir en faire partie.
Vous êtes-vous fait beaucoup d’amis depuis votre arrivée ici?
J’ai forgé quelques amitiés exceptionnelles au-delà des frontières politiques. J’ai fait de mon mieux pour agir dans l’intérêt du pays dans un esprit entièrement dépourvu de partisanerie, pour ce qui est d’interagir avec des gens de tous les partis.
En quoi votre formation scientifique a-t-elle éclairé votre carrière de sénateur ou vous a aidé dans cette dernière?
Elle s’est avérée extrêmement importante et je me plais à penser qu’elle m’a beaucoup aidé dans mon travail ici. Quand je suis arrivé, j’ai été étonné de voir que j’amenais une expérience presque unique à la Colline — en ce sens que peu de sénateurs provenaient d’un milieu fondamentalement scientifique. Ma formation m’a permis d’acquérir de vastes connaissances et une grande expérience que j’ai pu mettre au service des comités dont j’étais membre. Je pouvais voir des choses que personne d’autre n’aurait vues parce que je les avais vécues. Je savais quand quelqu’un nous jetait de la poudre aux yeux ou essayait d’influencer les lois en citant des études mal fondées — ou, dans certains cas, qui n’avaient aucun fondement. Dans la plupart des cas, les représentants des grandes sociétés et organisations sont des lobbyistes sans formation scientifique, qui représentent des entreprises qui ont des produits supposément fondés sur la science. Donc j’ai pu réfuter plusieurs de leurs affirmations et j’ai aussi pu corroborer, avec des arguments fondés sur des connaissances, les éléments qui étaient importants pour le pays. J’ai également été en mesure d’organiser des foires où d’éminents chercheurs de la communauté scientifique canadienne sont venus sur la Colline pour rencontrer des parlementaires et faire valoir les merveilleux avantages qu’offrent leurs travaux de recherche.
Que pensez-vous des efforts déployés pour moderniser le Sénat?
Je vois cela essentiellement comme une façade. Je ne vois pas beaucoup de différence dans la manière dont les sénateurs indépendants votent. Ils sont nommés surtout pour une expérience politique commune, mais je m’inquiète surtout des efforts qu’on déploie pour changer le Sénat au point d’annuler l’opposition officielle. Quand on regarde les pays qui se heurtent à des difficultés, c’est invariablement parce qu’il n’y a aucune opposition officielle organisée et légitime. Quand un gouvernement a des difficultés, il n’y a aucun organe d’expérience capable de centrer l’attention de la population. Le Vénézuéla était une société de classe moyenne assez bien nantie, mais qui est en train de sombrer dans le chaos parce que le gouvernement a diminué les pouvoirs de l’opposition. Selon moi, les efforts de l’actuel gouvernement visent à affaiblir l’opposition et c’est très clair pour le Sénat. C’est une grave erreur.
Si c’est le cas, quelles en sont les conséquences?
Les membres de la Chambre des communes se voient comme les maîtres suprêmes et considèrent le Sénat comme un désagrément – surtout quand il y a une forte opposition qui peut faire changer les lois du gouvernement. Si on affaiblit l’opposition dans le Sénat et qu’on fait en sorte qu’il soit plus difficile de former une opposition concertée, les lois adoptées à la Chambre des communes seront promulguées sans aucune modification. Donc, à mon sens, ces efforts visent à empêcher la création d’un solide front d’opposition.
Selon vous, quels seront les principaux défis qu’auront à relever les sénateurs dans les 25 prochaines années?
La question immédiate est de savoir s’ils pourront travailler ensemble dans un système en constante évolution. Ils devront comprendre qu’ils ont un rôle collectif à jouer dans le renforcement de la démocratie canadienne. C’est essentiel.
Quel conseil donneriez-vous aux nouveaux sénateurs?
Comprendre clairement qu’ils sont là pour représenter tous les Canadiens.
Quelle est la prochaine étape pour vous?
Je n’ai rien de particulier de prévu. J’espère continuer à mener une vie saine dans mon coin de pays, aux abords de la baie de Fundy.
Lisez les déclarations effectuées à la Chambre du Sénat sur le départ à la retraite du sénateur Ogilvie.