Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule no 13 - Témoignages du 29 mai 2017
OTTAWA, le lundi 29 mai 2017
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 h 2, en séance publique et à huis clos, pour examiner, afin d'en faire rapport, la perspective des Canadiens au sujet d'une modernisation de la Loi sur les langues officielles, et pour étudier un projet d'ordre du jour.
La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Bonsoir. Je m'appelle Claudette Tardif, je suis une sénatrice de l'Alberta et j'ai le plaisir de présider le comité ce soir. Avant de passer à la déclaration préliminaire de notre témoin, j'aimerais que les membres du comité se présentent, en commençant à ma droite.
Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, du Québec. Bonsoir.
La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, de Montréal, au Québec.
Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Moncion : Lucie Moncion, de l'Ontario.
La sénatrice Gagné : Raymonde Gagné, du Manitoba.
La sénatrice Fraser : Joan Fraser, de Montréal, au Québec.
La présidente : Le comité poursuit son étude spéciale sur la perspective des Canadiens et des Canadiennes au sujet d'une modernisation de la Loi sur les langues officielles.
Dans un premier temps, le comité sénatorial examine la perspective des jeunes Canadiens en ce qui concerne notamment la promotion des deux langues officielles, la relation identitaire qui en découle, selon leur langue et leur culture respective, les motivations à apprendre l'autre langue officielle, les perspectives d'emploi et d'avenir pour les jeunes bilingues et les mesures à prendre pour renforcer l'appui du gouvernement fédéral en faveur de la dualité linguistique.
Ce soir, nous avons le plaisir d'accueillir M. Warren Thomson, directeur de l'organisme Quebec High School.
[Traduction]
Quebec High School existe depuis 75 ans.
Warren Thomson, directeur, Quebec High School : En fait, cela fera 75 ans cette année que nous occupons le même immeuble, mais l'histoire de notre école remonte à l'époque des commissaires et de l'école secondaire de Québec, soit la fin des années 1800.
La présidente : Vous êtes également le président de Voice of English-speaking Québec.
M. Thomson : Oui.
La présidente : Monsieur Thomson, je vous souhaite la bienvenue au nom des membres du comité sénatorial. Avant de vous poser des questions, nous vous invitons à faire une déclaration préliminaire.
M. Thomson : Je tiens tout d'abord à vous remercier de me donner l'occasion de témoigner devant vous. Je suis ici à titre personnel. Je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
Ma compréhension de la Loi sur les langues officielles est restreinte, mais je crois qu'elle vise trois objectifs. Elle vise notamment à promouvoir ou à favoriser l'utilisation des deux langues officielles dans la société canadienne. Le bilinguisme fait partie de l'identité canadienne. Je crois bien humblement que mon expérience personnelle témoigne de cette intention.
Je suis né à l'étranger. Mes parents — des anglophones unilingues — ont immigré à Montréal. Nous avons rapidement déménagé en Colombie-Britannique, dans le Lower Mainland, à Vancouver. Mon père m'a encouragé à suivre un programme d'immersion en français. J'ai fait partie de l'une des premières cohortes d'immersion en français de ma petite ville de Port Coquitlam, et j'ai commencé à apprendre le français. Je me débrouillais relativement bien, jusqu'à ce que je rencontre une personne très importante, mon professeur de français : Jacques-André Larrivée.
[Français]
Un Québécois pure laine, comme on dit, fier de ses racines, un passionné de la langue et de la culture.
[Traduction]
Il a eu une grande incidence sur les élèves.
[Français]
Dans son cours, on rêvait de se promener sur la rue Saint-Denis ou sur la rue Sainte-Catherine.
[Traduction]
Je suis allé à l'école secondaire en français et je me suis retrouvé à l'Université Simon Fraser sans aucune intention de poursuivre mes études en français. Sur le campus, j'ai entendu parler du programme de moniteur de langues. J'ai assisté à une réunion et j'ai ensuite eu l'occasion d'aller au Québec. On a payé mon billet d'avion et on a tout organisé pour moi. Je suis allé à l'université là-bas, puis j'ai obtenu un poste dans une école secondaire locale, à titre de moniteur d'anglais. Ce fut un excellent point de départ.
Je suis tombé en amour avec la ville de Québec. Je m'y suis intégré assez rapidement parce que j'avais une bonne base en français grâce à mes cours d'immersion. À Québec, j'ai décidé de changer mon domaine d'études. J'ai obtenu un diplôme en études françaises, puis un diplôme en enseignement de l'anglais. J'ai enseigné dans le Nord, auprès des Cris, ce qui a forgé mon identité personnelle et culturelle. J'ai ensuite enseigné l'anglais langue seconde dans le système scolaire francophone et j'ai été directeur adjoint d'une grande école secondaire francophone. Pendant tout ce temps, je savais d'où je venais et où étaient mes racines, et j'ai toujours partagé ma passion pour la langue et ma culture avec mes élèves.
Alors que j'étais à Québec depuis 15 ans, j'ai eu l'occasion de devenir le directeur de Quebec High School. Jusqu'à ce moment-là, deux choses avaient eu une incidence sur mon parcours. D'abord, les possibilités, bien sûr. Les possibilités que j'ai eues grâce à l'immersion en français, à la SEVEC et au programme de moniteur de langues. Il y a eu ces possibilités et aussi la rencontre d'un professeur. Ces deux éléments ont influé sur mon parcours.
C'est lorsque je suis devenu directeur de Quebec High School que la deuxième intention de la Loi sur les langues officielles a pris son sens pour moi : assurer la croissance et la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire du pays. Cela revêt une signification particulière pour moi.
Nous savons tous que le Québec est unique au Canada. Je ne peux pas vous parler du Nouveau-Brunswick, puisque je n'y ai jamais travaillé ni habité.
[Français]
Au Québec, on enseigne aux Québécois francophones, dès leur jeune âge, qu'il leur faut protéger leur langue et leur culture.
[Traduction]
On dit aux anglophones qu'ils doivent protéger leurs droits.
[Français]
Dès le départ, nous nous retrouvons donc en situation de conflit.
[Traduction]
Et je ne crois pas que c'était l'intention de la Loi sur les langues officielles.
Dans ma petite région du monde, je commence à voir un changement. Je crois sincèrement être témoin d'un changement. J'ai créé un groupe de discussion avec mes élèves, que j'ai consulté avant de venir ici, et 17 p. 100 d'entre eux se disent anglophones. Je travaille dans une école secondaire anglophone. Ensuite, 33 p. 100 se disent francophones et les 50 p. 100 restants se disent bilingues.
Qu'est-ce que cela signifie vraiment? Ils sont bilingues. Ils parlent tous français et anglais. En fait, je leur demandais comment ils se percevaient. Quelle est leur identité culturelle étant donné ces étiquettes culturelles en opposition? Donc, 50 p. 100 de mes élèves se sont dits bilingues, mais on devrait peut-être utiliser le terme « biculturel ». Ils ont un sentiment d'appartenance à l'égard des deux langues ou — de façon plus importante — ils ne considèrent pas que leur identité culturelle se limite à la langue. Ils sont Québécois.
Comment en arrive-t-on là? Tout commence par l'apprentissage des langues à la maison, à l'école et dans la collectivité.
[Français]
Un jeune construit d'abord son sens de l'identité et, ensuite, il bâtit sa vision du monde. Il est toutefois très important qu'il crée un sentiment d'appartenance à sa communauté.
[Traduction]
Je leur ai demandé pourquoi ils avaient choisi de fréquenter une école anglophone; quelle était la différence entre une école anglaise et une école française? Ils m'ont tous parlé d'un esprit de communauté, de leurs amis, de leur famille, de leurs professeurs, de leurs projets communautaires, et cetera.
Il est essentiel de donner les moyens à nos écoles d'entretenir des liens avec les intervenants communautaires. Nous devons bâtir des collectivités inclusives et solidaires. C'est important non seulement pour les francophones et les anglophones, mais aussi pour les populations autochtones et immigrantes. Les jeunes qui n'ont pas d'appartenance à la collectivité deviennent marginalisés et on voit trop bien ce qui arrive avec les jeunes marginalisés dans le monde.
Lorsque j'ai parlé à mes élèves de ma présence ici aujourd'hui, je leur ai demandé de me faire des suggestions, de me dire ce qui était important pour eux. Ils m'ont d'abord parlé de leurs professeurs. Le défi a trait à la formation des professeurs, non seulement pour qu'ils deviennent des experts de la langue seconde, mais aussi pour qu'ils transmettent l'identité culturelle associée à une langue. Ainsi, on établit un contexte, on explique la situation et on comble les écarts. Il faut que les provinces et les universités puissent travailler ensemble et permettre aux professeurs de se déplacer pour qu'ils apprennent la langue seconde dans un contexte où il s'agit de la langue de la majorité ou qu'ils aillent dans une collectivité où ils font partie de la minorité. Par exemple, des personnes dont la langue seconde est l'anglais ou des professeurs francophones pourraient aller en Colombie-Britannique, des anglophones pourraient aller dans les régions du Québec, et cetera. Nous devons trouver une façon de faire ou au moins leur donner l'occasion d'aller à l'université : l'Université Laval ou UBC, par exemple. Lorsqu'une personne est complètement bilingue, elle ne représente pas une menace pour l'autre communauté.
Ensuite, il faut bâtir des communautés fortes. De nombreuses initiatives sont financées par l'entremise de l'Entente Canada-Québec et de Patrimoine canadien. Les centres d'apprentissage communautaires établis dans de nombreuses écoles anglophones du Québec en sont un très bon exemple. Quebec High School est l'une de ces écoles. Cette initiative aide les écoles à accroître la vitalité de leurs communautés. L'idée est de tisser des liens. Le financement de base des groupes linguistiques comme VEQ — dont je fais partie —, les Townshippers ou les Coasters sont d'autres bons exemples.
Je crois sincèrement que des communautés de langue officielle en situation minoritaire fortes et vibrantes sont un atout important pour les communautés linguistiques majoritaires. Leurs membres sont des professeurs de langue, des voisins, des collègues, des amis. Ces communautés donnent à tout le monde l'occasion de parler leur langue maternelle dans un certain contexte. De plus, je crois qu'elles peuvent améliorer l'accueil des nouveaux arrivants en les aidant à faire la transition vers un nouvel environnement ou une nouvelle ville, et à leur faire comprendre leur identité canadienne.
Par exemple, je vis à Québec et nous offrons un programme en anglais aux nouveaux arrivants. Certains arrivants ne parlent pas le français, mais leur langue seconde est peut-être l'anglais. La communauté anglophone peut les aider à s'intégrer dans la ville et leur expliquer qu'ils doivent vivre en français. C'est la priorité si l'on veut habiter à Québec, qui est à mon avis la plus belle ville du pays.
Je crois sincèrement qu'il faut encourager les initiatives qui favorisent la dualité linguistique; il faut réunir les deux communautés.
Je vous propose — si ce n'est déjà fait — de lire le mémoire préparé par la Commission de l'éducation en langue anglaise l'année dernière. Il a été présenté au ministre de l'Éducation. Il dresse un portrait juste de l'enseignement des langues au Québec et présente d'excellentes recommandations.
Pour conclure, je ferais les trois suggestions suivantes : premièrement, il faut investir dans la formation et la mobilité des professeurs. Deuxièmement, il faut continuer d'investir dans des initiatives comme la SEVEC et Katimavik, auxquelles je croyais fermement, parce qu'elles donnaient un emploi aux jeunes. Rares sont les initiatives qui permettent cela. Elles visent souvent l'éducation. Troisièmement, il faut des groupes linguistiques minoritaires ou des initiatives pour nous aider à renforcer les collectivités.
Merci beaucoup.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur Thomson, pour votre exposé fort intéressant. Je tiens également à vous féliciter d'avoir pris le temps de former un groupe de discussion avec vos élèves. Je crois qu'ils nous ont transmis des renseignements précieux et je les en remercie.
M. Thomson : Bien sûr, merci.
[Français]
Le sénateur Cormier : Bienvenue, et merci de votre présentation et d'avoir tenu ce groupe de discussion avec vos étudiants. Vous dites que 17 p. 100 des étudiants se sont identifiés comme anglophones, 33 p. 100 comme francophones et 55 p. 100 comme bilingues. J'aimerais vous entendre davantage sur cette notion d'identité bilingue.
Être bilingue, pour moi, est une compétence linguistique. À partir du moment où les jeunes s'identifient comme étant bilingues par rapport à leur identité culturelle, comment vivent-ils cette identité bilingue au quotidien? Vous parliez d'un certain nombre d'étudiants qui voulaient fréquenter une école anglophone, parce qu'ils voulaient avoir le sens de la communauté. Ils ne seront donc pas dans une école bilingue, mais dans une école anglophone. J'aimerais vous entendre davantage sur cette distinction relativement à l'identité bilingue.
M. Thomson : Les jeunes qui se sont identifiés uniquement comme anglophones venaient d'autres provinces que le Québec. Dans la proportion de 50 p. 100 des jeunes qui se sont identifiés comme étant bilingues, ceux-ci envisagent leur culture comme n'étant ni francophone ni anglophone, mais celle du Québec, à savoir, par exemple, quelles sont leurs valeurs et la musique qu'ils écoutent, indépendamment du fait que ce soit en français ou en anglais. C'est le sujet qui les intéresse. On parle de jeunes de 15 ou 16 ans. Ce qui est important pour eux, ce sont leurs valeurs essentielles, le sens du partage et de la communauté, la possibilité de travailler, de faire du bénévolat et des choses du genre.
Pour eux, si le contexte fait en sorte que c'est la langue française qu'il faut utiliser, ils vont parler en français. S'il faut utiliser l'anglais, ils utiliseront l'anglais. Ils ne font pas de distinction en se disant que, dans la ville de Québec, s'il s'agit d'une activité culturelle anglophone qui se déroule dans une salle avec des amis, on devra alterner entre les deux langues. Dans les couloirs, chez nous, on parle autant l'anglais que le français dans une même conversation entre amis. C'est vraiment une question de contexte.
J'ai deux garçons, et leur mère est francophone et je suis anglophone. Ils ne s'identifient pas comme étant francophones ou anglophones, mais d'abord comme Québécois, puis comme Canadiens.
Le sénateur Cormier : J'essaie d'approfondir cette notion pour mieux la comprendre. Quand ils disent que leur identité culturelle est bilingue, c'est parce qu'ils ont accès tant à la culture francophone qu'anglophone. Est-ce une question d'accessibilité?
M. Thomson : Ils ont accès à la culture. Être biculturel, c'est se sentir à l'aise dans n'importe quel contexte selon la langue qui est parlée. Peux eux, la culture n'est pas la langue, mais plutôt leur culture d'ado, leurs films et leurs médias. Ce n'est pas une culture linguistique. Être biculturel et bilingue signifie qu'ils iront voir le dernier film à l'affiche en français et un autre film en anglais. Tenter de mettre les deux cultures en boîte, pour eux, ne s'applique pas. Ils ne voient pas deux cultures. Ils ne voient que leur culture d'amis. Ils n'ont pas réfléchi à toute cette question. C'est nous qui leur donnons ces boîtes, à savoir s'ils sont d'une culture ou d'une autre. Ce n'est pas eux qui s'identifient ainsi, du moins, pour la plupart. Ils sont biculturels en ce sens qu'ils sont à l'aise, peu importe la situation.
La sénatrice Gagné : Votre témoignage a été très intéressant. Je vous remercie de nous avoir parlé de la réalité des jeunes que vous côtoyez chaque jour. Je pense que cela nous aide à mieux comprendre où ils se situent par rapport à leur identité et à l'identité de leurs collègues, de leurs amis.
Pour revenir à la discussion que vous avez eue avec les élèves et à la façon dont ils se sont identifiés, vous avez mentionné que si vous aviez eu cette même conversation il y a plusieurs années, la réponse aurait probablement été différente. Vous dites que vous sentez qu'il y a eu un changement. Selon vous, qu'est-ce qui a fait en sorte qu'il y a eu ce changement de la perception des jeunes face à leur identité?
M. Thomson : Ce ne sont pas les jeunes qui ont créé le changement, car ils ont grandi dans ce contexte. C'est moi qui ai remarqué ce changement.
Il y a 30 ans que j'habite la ville de Québec, et ma perception de l'anglais dans la ville de Québec a changé. Avant, à Québec, on n'entendait pas beaucoup d'anglophones dans les rues. Peu importe la situation politique ou la situation économique, parler anglais à Québec n'était pas nécessairement valorisé. Maintenant, il y a une nouvelle économie à Québec, on voit qu'il y a beaucoup de tourisme, les francophones constatent que parler anglais est essentiel, pas nécessairement pour avoir accès à la culture — même si c'est important pour les jeunes, puisque l'accès à la culture, à la musique, pour eux, se fait en anglais —, mais pour les possibilités que cela peut offrir. À Québec, un francophone qui parle anglais a plus de possibilités d'emploi dans l'industrie des services auprès des jeunes. Alors, on voit beaucoup plus de jeunes qui apprennent l'anglais. J'ai été professeur d'anglais langue seconde, et je constate qu'il y a beaucoup plus de programmes d'immersion, pas de programmes d'immersion en français, mais dans les langues avancées, par exemple.
Du côté anglophone, il est vrai que la population anglophone à Québec est devenue plus bilingue; les anglophones apprennent beaucoup plus le français.
[Traduction]
J'ai hâte qu'on publie des renseignements à ce sujet. La population est en croissance, mais le nombre d'anglophones bilingues a quant à lui doublé, ce qui signifie que les écoles anglophones enseignent maintenant beaucoup mieux le français à leurs élèves. C'est important pour nous : pour que nos jeunes, nos enfants et le capital humain restent dans la province, il faut qu'ils apprennent le français; c'est essentiel pour certains emplois au Québec.
[Français]
Dans la fonction publique, il ne suffit pas d'être bilingue; il faut être parfaitement bilingue pour y décrocher un emploi. Même pour les autres bons emplois, il faut avoir un français impeccable, mais c'est possible.
Je crois que j'ai été un exemple. Il n'y a pas beaucoup d'anglophones qui obtiennent un poste de directeur adjoint dans un milieu francophone, dans une école de 1 800 élèves. Il y a des occasions, pour quelqu'un qui maîtrise bien les deux langues, d'accéder à de bons postes. Je pense qu'il y a une ouverture, au moins à Québec; je ne peux pas parler pour le reste de la province, mais je vois cette possibilité.
Le sénateur Maltais : Bienvenue, monsieur Thomson. Vous me faites sourire. Je viens également de la ville de Québec. Vos jeunes ont entièrement raison. En ce qui concerne la culture, ils ont la culture de la ville de Québec.
M. Thomson : C'est ce que je pense.
Le sénateur Maltais : Or, la culture de la ville de Québec n'est pas la même qu'à Montréal, pas du tout. J'ai des amis anglophones, j'ai même un gendre anglophone, et ils ont la culture de la ville de Québec.
Vous avez dit quelque chose d'important sur le fait d'être bilingue, que la langue maternelle soit l'anglais ou le français. Je vais vous donner un exemple qui touche le secteur de l'assurance, un domaine que je connais assez bien. Québec est la capitale des sièges sociaux de l'assurance au Québec, et presque du Canada en entier à l'heure actuelle. Vos jeunes, parce qu'ils sont parfaitement bilingues, ont beaucoup plus de débouchés que des Montréalais ou des Torontois unilingues anglophones, qui parlent seulement l'anglais. Ils peuvent travailler chez Desjardins, chez Industrielle Alliance, et cetera. De nombreux centres d'appel de compagnies d'assurance — et cela s'est fait en douce, on ne l'a pas lu dans les journaux — sont transférés à Québec de Toronto et de Montréal. Je vous vois sourire, vous êtes donc au courant de cette situation.
M. Thomson : Je suis très au courant.
Le sénateur Maltais : Pourquoi? Parce que c'est une occasion qu'ils ont et lorsqu'ils vivent dans la ville de Québec, ils n'ont pas l'impression d'être anglophones ou francophones. Ils sont Québécois de la ville de Québec. Les jeunes se mêlent. Mes enfants ont fréquenté l'Université Laval. À la Saint-Jean-Baptiste, il y avait des anglophones dans ma cour, qui ne comprenaient rien à l'événement, tout comme ils ne comprenaient rien au 1er juillet. Il a fallu, un jour, leur faire une certaine éducation au sujet des fêtes nationales.Pour eux, une fête nationale est une occasion de party, point à la ligne. Ils se fichent complètement de l'histoire, ils ne l'ont pas vécue — nous non plus, d'ailleurs —, ils ne sont pas attachés à cela, mais ils sont attachés à la culture québécoise.
Ma question concerne la démographie anglophone de Québec. J'ai eu de la peine, il y a quelques années, lorsque le dernier petit journal anglophone, The Chronicle, a disparu. On a moins de nouvelles de la communauté anglophone depuis que cette publication a été vendue. Est-ce que la démographie anglophone est omniprésente dans votre école?
M. Thomson : Je vais tout d'abord faire une petite correction. Le Chronicle existe toujours, il est encore publié chaque semaine. Il a été vendu, il a cessé de paraître pendant un petit moment, mais il existe encore. De plus, il y a une autre publication en anglais, Life in Québec. Les médias anglophones commencent tranquillement à revivre.
[Traduction]
Le recensement de 2011 nous a permis de constater que pour la première fois depuis les années 1970, il y avait une augmentation de la population anglophone dans la ville de Québec. J'attends les résultats du recensement de 2016, qui seront intéressants selon moi. Je crois que pour la première fois, les répondants ont pu choisir les deux langues officielles à titre de langue maternelle.
Toutefois, les anglophones ne représentent encore qu'environ 1,4 p. 100 de la population de la ville de Québec.
[Français]
Ce n'est pas beaucoup.
[Traduction]
Ces 15 000 personnes forment toutefois une communauté forte, qui s'intègre bien dans la ville de Québec.
[Français]
Le ghetto anglophone à Sillery n'existe plus.
[Traduction]
Les anglophones de Québec s'intègrent assez bien et nous les mobilisons. Nous offrons le programme pour les nouveaux arrivants à Québec, dont j'ai parlé tout à l'heure.
[Français]
Ils financent un milieu anglophone pour bien accueillir des immigrants ou des allophones qui viennent de l'extérieur.
[Traduction]
Ils perçoivent la communauté anglophone comme étant une ressource précieuse pour la ville. Donc, même si elle est petite, notre communauté peut contribuer à la société. Non seulement pouvons-nous contribuer à la société, mais plus nous serons nombreux, mieux la ville de Québec se portera. Le nombre d'anglophones augmente à Québec, mais nous sommes loin des autres régions du Québec qui comptent des anglophones.
De plus, à Québec — il faudrait que je sorte l'étude; je ne l'ai pas sous les yeux — je crois que 20 ou 25 p. 100 de la communauté anglophone se renouvelle tous les cinq ans. L'employabilité est un élément important parce que notre industrie du jeu vidéo est forte. Ubisoft a pignon sur rue à Québec et nombre des gens qui y travaillent viennent d'une autre province.
Il y a aussi les sociétés d'assurance. Elles savent que la population de Québec est bien éduquée. Il y a de nombreux cégeps et une université. Ces sociétés savent que la population est éduquée et qu'il s'agit de l'une des villes les plus sécuritaires — si ce n'est la plus sécuritaire — du pays. Québec a beaucoup à offrir. Les sociétés tirent profit de cela.
La présidente : D'après ce que je comprends, le tourisme est aussi important.
M. Thomson : Tout à fait.
Le sénateur McIntyre : Merci, monsieur Thomas, de votre exposé. Je l'ai trouvé très intéressant.
Jusqu'à présent, le comité sénatorial a entendu le point de vue des jeunes anglophones et francophones qui vivent en situation minoritaire et qui représentent la collectivité et les secteurs économiques. On a soulevé d'excellents points dans le cadre de ces réunions.
Entre autres, on a fait valoir que les jeunes qui vivaient dans des communautés de langue officielle en situation minoritaire souhaitaient qu'on fasse la promotion des deux langues officielles. En d'autres termes, à les écouter, on comprend qu'ils ont un sentiment d'appartenance et qu'ils veulent préserver cette valeur. Dans votre exposé, vous avez confirmé ce que nous avons entendu jusqu'à présent.
Cela étant dit, nous vivons dans une collectivité multiculturelle. De toute évidence, il y a des défis associés à l'enseignement, mais aussi à la vie dans les deux langues officielles. Selon vous, est-ce qu'il est plus difficile de vivre et d'apprendre dans les deux langues officielles dans une société multiculturelle où la population et les facteurs sociaux ou linguistiques sont de plus en plus diversifiés?
M. Thomson : Non, je ne crois pas que ce soit plus difficile. Je crois que nous sommes de plus en plus ouverts à la diversité culturelle, ce qui signifie que nous sommes plus ouverts à l'autre langue officielle aussi. Nous n'accueillons pas autant de nouveaux arrivants que le système francophone.
[Français]
— parce qu'ils ont des cours de francisation —
[Traduction]
... ce que nous n'avons pas nécessairement dans le secteur anglophone. Il est aussi essentiel de financer les commissions scolaires anglophones. Je prêche pour ma paroisse, mais nous voulons pouvoir montrer à ces nouveaux arrivants ou aux enfants des autres provinces que nous avons le droit de fréquenter une école anglophone, mais nous voulons aussi leur donner les outils dont ils ont besoin pour apprendre le français, comme peuvent le faire les écoles francophones. C'est essentiel. Il faut absolument maintenir ce budget.
Je vous donne l'exemple de deux enfants musulmans qui, à leur arrivée dans notre école, en troisième secondaire, ne parlaient ni l'anglais ni le français. Cela fait trois ans, et ils sont maintenant trilingues. Leur histoire et ce qu'ils ont vécu à Québec, c'est exceptionnel.
Je ne crois pas que ce soit plus difficile. Je pense que nous nous améliorons sur le plan de l'enseignement des langues, honnêtement, et que nous avons un meilleur accès à la culture. Nous connaissons mieux la culture.
Mon école compte des enseignants de la Colombie-Britannique, de Terre-Neuve, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario. Il n'y a plus d'enseignants de l'Alberta, de la Saskatchewan ou du Manitoba, mais ces dernières années, nous en avons eu. C'est très enrichissant pour nos élèves.
Cela devient de plus en plus facile en raison de la mobilité accrue et d'une plus grande ouverture sur le monde.
Le sénateur McIntyre : À cet égard, et compte tenu du rôle du gouvernement fédéral, avez-vous des recommandations à faire?
M. Thomson : Je travaille dans le milieu de l'éducation, et donc, chaque solution concerne l'éducation. Je crois que nous devons mieux guider nos enseignants en ce qui a trait aux langues secondes, à la culture et à l'enseignement des langues.
Pour ce qui est des recommandations, à mon avis, nous devons nous pencher également sur l'employabilité des jeunes. Il existe des programmes comme YES, à l'extérieur de Montréal, et la SEVEC. Nous devons donner aux élèves anglophones des occasions de travailler dans le secteur francophone et appuyer ce genre d'initiatives, et faire de même pour les jeunes francophones.
Par exemple, il peut s'agir d'un élève anglophone âgé de 15 ou 16 ans qui veut travailler dans un camp d'été pour la ville. Son français n'est peut-être pas parfait, mais si nous ne lui donnons pas de possibilité, il n'améliorera pas ses compétences en français.
Je crois qu'il nous faut appuyer l'employabilité des jeunes pour leur donner confiance. Parfois, ils pensent qu'ils ne peuvent pas travailler, nécessairement, mais ils ont les compétences.
La sénatrice Fraser : Je vous souhaite la bienvenue au Sénat, monsieur Thomson. Ce que vous dites est fascinant. Vous parlez d'un changement majeur à Québec qui, depuis un certain temps, n'est pas anglophone.
M. Thomson : Oui.
La sénatrice Fraser : Ce que vous avez dit sur la façon dont ces jeunes se définissent est absolument fascinant. Concernant les 33 p. 100 qui se disent francophones, qui sont-ils? Comment se fait-il qu'ils ont le droit d'aller à votre école?
M. Thomson : Leurs parents sont francophones. Puisque leurs deux parents sont francophones, ils parlent en français à la maison. Ils peuvent venir à notre école soit en raison de la clause de droits acquis...
La sénatrice Fraser : Dans la loi 101.
M. Thomson : Soit ils ont eu recours à cette clause, soit ce sont des enfants de militaires. Nous savons que la clientèle militaire est extrêmement mobile. Une petite partie d'entre eux sont donc des enfants de militaires, et ils estiment qu'ils sont francophones. Leurs parents n'ont peut-être pas encore eu l'occasion d'être envoyés dans des provinces comme l'Alberta ou le Nouveau-Brunswick.
Puis, il est possible que parmi les 50 p. 100 qui se définissent comme étant bilingues, les deux parents parlent français à la maison.
La sénatrice Fraser : Il faut qu'au moins l'un des parents ou des grands-parents aient été à l'école anglaise. Il faut que l'un des membres de la famille soit allé à l'école anglaise, et je présume que la dualité est donc liée à un lien familial.
M. Thomson : Absolument. Je peux vous donner un autre exemple personnel.
La mère de mon beau-frère, du côté de ma femme, est allée à mon école secondaire. Elle était Anglo-Québécoise. Aucun de ses enfants, quatre garçons et trois filles, ne parlait un mot d'anglais. Les enfants ne sont jamais allés à l'école anglaise.
Lorsque je suis devenu directeur de la Quebec High School, j'ai parlé à mon beau-frère. Il n'est jamais allé à l'école anglaise, mais il a inscrit son enfant à mon école et elle est maintenant bilingue.
La sénatrice Fraser : Dans quelle mesure est-il difficile de retrouver ce sens d'identité au fil du temps? Comment la population de langue maternelle a-t-elle évolué avec le temps, selon vous? Cela fait un certain temps que vous êtes là- bas.
M. Thomson : J'y vis depuis 25 ou 30 ans. Vous voulez savoir quelle est la situation de la population anglophone?
La sénatrice Fraser : Dans votre école.
M. Thomson : Cela fait 10 ans que je travaille dans cette école.
La sénatrice Fraser : Au fil du temps, la population anglophone est-elle restée stable, ou a-t-elle augmenté ou diminué?
M. Thomson : Je dirais que la population anglophone est assez stable.
La sénatrice Fraser : C'est encourageant.
M. Thomson : Il y a de nouveaux arrivants. Il y a des gens qui viennent de l'extérieur de la province et qui sont très anglophones. Il y en a donc toujours qui arrivent. On espère que certains d'entre eux restent. C'est le cas de la majorité, mais certains quittent la province parce que les parents ont terminé leur contrat, ils sont professeurs à l'Université Laval ou ils avaient un contrat avec une société de jeux, par exemple.
Les enfants aiment la ville. Je n'ai jamais eu d'élèves qui voulaient partir, mais parfois, les familles décident de retourner dans un milieu différent. L'intégration, ce n'est pas toujours facile.
La sénatrice Fraser : En particulier pour les parents.
M. Thomson : Oui.
Je n'ai peut-être pas répondu à votre question.
La sénatrice Fraser : Savez-vous s'il y a des indicateurs concernant cette auto-identification en tant que francophone bilingue ou anglophone dans les écoles françaises?
M. Thomson : Non, mais je sais que le nombre de familles anglophones qui choisissent d'envoyer leurs enfants à l'école française augmente parce qu'ils se souviennent ce qu'était le français quand ils allaient à l'école. Ils veulent que leurs enfants aient accès à un excellent enseignement en français parce qu'ils souhaitent qu'ils deviennent bilingues. L'enseignement du français dans les écoles anglaises a changé. La situation s'améliore.
C'est difficile parce qu'on veut toujours respecter les choix individuels des gens, et on veut toujours respecter la volonté du parent qui décide d'envoyer son enfant à l'école qui répond le mieux à ses besoins à son avis. Les parents veulent inscrire leurs enfants à l'école française pour qu'ils deviennent bilingues. C'est formidable pour la famille. Je suis ravi que ces gens aient le choix, mais cela pose un problème pour une collectivité anglophone si les enfants qui ont accès aux écoles anglaises n'y vont pas nécessairement. Cela pose un certain problème — ce n'est pas vraiment un problème, en fait. C'est une situation qui existe.
La sénatrice Bovey : C'est très intéressant. Je veux revenir à la question de l'emploi. Vous avez parlé de Katimavik. En répondant à la question du sénateur McIntyre, vous avez parlé de mesures concernant l'employabilité.
Des représentants des Youth Employment Services ont comparu devant nous il y a un certain temps et ils ont fait des recommandations en faveur de l'adoption d'une approche inclusive à l'égard de l'emploi et de l'entrepreneuriat pour aider les jeunes à demeurer dans leur collectivité. Pouvez-vous parler des emplois offerts aux jeunes et nous dire dans quelle mesure cela peut faire en sorte que les jeunes anglophones restent dans leur collectivité? Vous avez beaucoup parlé des liens avec la collectivité.
M. Thomson : Tout d'abord, il faut qu'il y ait une collectivité. Il faut qu'il y ait une collectivité de langue seconde dynamique dans la région; il est à espérer qu'elle existe. C'est ce qui fait qu'il y a différentes organisations.
Oui, j'ai travaillé un peu avec cet organisme et vu ce qu'il fait. Il est venu à Québec et a offert des ateliers d'encadrement destinés aux entrepreneurs sur les jeunes et l'entrepreneuriat.
L'employabilité n'est pas mon domaine, mais lorsque j'ai parlé à mes élèves, ils avaient l'impression qu'il était essentiel d'être bilingues s'ils voulaient demeurer à Québec. Or, ils ne se sentent pas limités à Québec. Certains disent qu'ils veulent devenir des acteurs à New York. Ils ont 15 ou 16 ans. Ils veulent voyager et découvrir des choses. C'est un énorme avantage pour nos jeunes.
Je vais prendre l'exemple d'un jeune homme qui a obtenu son diplôme d'études secondaires à la Quebec High School. Il a ensuite étudié dans un cégep de langue anglaise, a fait des études en génie à l'Université Laval et a obtenu un emploi dans une société d'ingénierie internationale où il a travaillé pendant deux ans. Par la suite, il a décidé de changer de secteur. Il est allé à McGill, a terminé ses études de droit en avril et fait présentement son stage dans une grande firme au centre-ville de New York. Si vous lui parliez, vous verriez qu'il a une conception fantastique de la dualité linguistique et de ce que cela représente — les questions d'identité, et ce genre de choses.
Je lui ai parlé il y a deux semaines, lorsqu'il était en ville. C'est mon ami, et les membres de sa famille sont de très bons amis. Il m'a dit « c'est certain que je vais là-bas, mais je veux toujours revenir à Québec; je viens de Québec et je veux faire partie de cette ville, et plus j'apprendrai des choses, plus je pourrai contribuer à mon retour ».
Les possibilités d'emplois existent. Il a eu la confiance de le faire et de travailler dans les deux langues. Nous devons créer ce type d'initiatives.
Je travaille auprès de plus jeunes personnes, donc dans mon cas, on parle des initiatives offertes l'été. Katimavik était selon moi un très bon programme. J'ai vu les résultats. Des membres de mon personnel ne travailleraient pas dans mon école si ce n'était de leur expérience de Katimavik.
Je trouve que c'était un programme formidable, mais il y en a d'autres, comme les programmes d'échange. On ne peut pas apprendre une langue en deux semaines dans le cadre d'un programme d'échange, mais un échange permet aux jeunes de s'ouvrir à une autre collectivité ou à une autre région. Certains de mes élèves sont allés au Nunavut il y a deux semaines. Ils veulent tous travailler dans le Nord maintenant. Ils sont jeunes, et plus on leur donne des possibilités, plus ils rêvent de changer le monde.
La sénatrice Bovey : J'aime ce cadre en mouvement. C'est très excitant et encourageant.
[Français]
La sénatrice Moncion : Je vous remercie de l'information que vous nous avez donnée. Je trouve fort intéressants vos commentaires sur les jeunes Québécois anglophones qui apprennent une deuxième langue et qui se recréent un environnement. On voit la même chose dans les autres provinces, où les jeunes francophones des milieux majoritairement anglophones s'identifient à un contexte selon leurs besoins. Le bilinguisme leur est important aussi. J'ai fait des études il y a plusieurs années, et c'était comme cela en Alberta : une bonne majorité de jeunes — dans votre école, vous dites que c'est 50 p. 100 — ne s'identifiait plus comme étant tout simplement anglophone ou francophone, mais plutôt bilingue. C'est comme cela un peu partout chez les jeunes.
M. Thomson : Je l'espère.
La sénatrice Moncion : Comment faire la promotion d'histoires à succès comme la vôtre afin de rendre le bilinguisme plus attrayant un peu partout et d'inviter les communautés où il y a de la résistance de la part des gouvernements à investir dans le bilinguisme de leurs écoles?
M. Thomson : Il est sûr que l'investissement de la part des commissions scolaires et des provinces est un défi. C'est évident. Je pense honnêtement qu'il faut travailler avec les universités, parce que si le milieu fait en sorte qu'on n'a pas accès à la langue minoritaire ou majoritaire de la communauté...
[Traduction]
Si cela ne fonctionne pas, il faut passer par les professeurs de langues. Parfois, à la maison, on n'a pas la possibilité de devenir bilingue, et la collectivité, pour toutes sortes de raisons, n'offre pas cette possibilité. L'accès passe par les professeurs. Ce sont eux qui ouvrent l'esprit de leurs élèves.
Si nous parlons de recrutement — s'agissait-il du Manitoba?
La sénatrice Moncion : Non, de l'Ontario.
M. Thomson : Il nous est difficile de recruter en Ontario. Au Québec, nous savons que l'Ontario peut recruter des francophones pour l'enseignement du français en Ontario. Il est plus difficile pour nous de recruter des anglophones qui viendront enseigner l'anglais au Québec simplement parce que l'échelle salariale n'est pas la même, entre autres. Nous devons créer un système, en collaboration avec nos universités et nos ministères de l'Éducation, qui favorise la mobilité interprovinciale des professeurs de langues. J'y crois profondément.
Je crois également en nos professeurs de langue seconde. J'en suis un. Le premier diplôme que j'ai obtenu, c'est un diplôme en français à l'Université Laval. Lorsque j'ai décidé de rester au Québec, évidemment, je ne pouvais pas y enseigner le français. J'ai envisagé la possibilité d'étudier en enseignement de l'anglais langue seconde, et j'ai donc obtenu mes deux baccalauréats, mais je n'ai jamais suivi de cours sur la culture. On nous a enseigné comment enseigner la langue, mais c'est par l'enseignement de la culture qu'on suscite l'intérêt des jeunes de devenir bilingue et de voyager. Il faut que cela fasse partie de notre formation. D'excellents programmes existent. Je sais qu'en Saskatchewan, lorsque les enseignants obtiennent leur diplôme, ils peuvent étudier pendant un an à l'Université Laval et retourner dans leur province.
Nous devons favoriser cette mobilité des professeurs. Nous devons créer des incitatifs ou chercher des initiatives pour que des francophones aillent enseigner dans d'autres provinces, et vice versa.
Je crois que sur ce plan, ce serait un grand atout. Ce serait l'une de mes premières recommandations. Mes recommandations concernaient la mobilité des professeurs.
[Français]
La formation de base en langue seconde a besoin d'être revue, à mon avis.
La présidente : Il y a déjà plusieurs sénateurs qui veulent poser d'autres questions, alors je vous demanderais de garder vos questions brèves, ainsi que vos réponses, monsieur Thomson.
La sénatrice Gagné : C'est une question que j'ai posée aux jeunes du Québec qui sont venus faire une présentation : pour un anglophone québécois, le défi est-il d'avoir accès à l'apprentissage du français ou est-il plutôt la préservation de sa langue maternelle?
M. Thomson : Est-ce que cela a besoin d'être l'un ou l'autre? Je ne le pense pas. Je crois qu'au Québec, du moins, dans la ville de Québec, ils ont accès à de bons enseignants. Nous sommes dans une ville culturelle exceptionnelle.
[Traduction]
Ils peuvent avoir accès à un excellent enseignement dans la langue seconde. Parallèlement, je ne crois pas qu'une personne complètement bilingue craint nécessairement qu'une culture prédomine. Plus une personne est bilingue, plus elle se sent à l'aise dans les deux cultures. Par conséquent, selon elle, l'un n'empêche pas l'autre.
[Français]
La sénatrice Gagné : J'ai une question complémentaire. Croyez-vous que le bilinguisme puisse être un facteur assimilateur à la majorité anglophone?
[Traduction]
M. Thomson : Le bilinguisme est essentiel. C'est la base. Lorsque j'ai demandé comment cela peut se produire, eh bien, cela peut se produire grâce à un enseignement intensif des langues. Je ne crois pas que cela passe seulement par les écoles. La famille joue un rôle essentiel pour toute personne qui devient bilingue, mais ce n'est pas la seule chose. Les écoles jouent un rôle énorme pour les gens qui n'ont pas accès à la langue seconde au sein de leur famille. Enfin, ce sont les organismes communautaires qui tissent des liens avec les écoles pour offrir les possibilités.
L'apprentissage des langues ne doit pas être confiné à la salle de classe. Nous devons fournir des possibilités aux jeunes d'appliquer dans un contexte réel ce qu'ils apprennent. Cela requiert des investissements de la part des gouvernements fédéral et provinciaux. Ce sont là des questions qui ne relèvent pas de ma compétence, mais concrètement, il est essentiel de fournir ces possibilités.
Je reviens à l'essentiel : il est fondamental, peu importe où nous vivons, que nous créions des collectivités fortes, car les jeunes doivent le faire.
Ce qui me rend le plus fier, ce sont tous les projets que mes élèves mènent auprès de personnes âgées. Je suis fier que notre école ait des résultats exceptionnels dans les examens du ministère et que notre commission scolaire se classe parmi les meilleures de la province. Bien sûr, je crois que c'est formidable. Or, lorsque je vois, dans mon école, des aînés qui suivent des cours de TI donnés par mes élèves, je trouve que c'est merveilleux.
Quand les élèves interrogent des aînés et écrivent une histoire au sujet du Québec, produisent un livre et le présentent, c'est merveilleux. Cela fait tomber tellement de choses. Ils créent un sentiment d'appartenance à leur collectivité. Même si un enfant a des parents francophones, disons, il fait maintenant partie de la collectivité anglophone. Il a discuté avec des aînés de la collectivité, a écouté leurs histoires et a écrit un livre. Il fait maintenant partie de la collectivité. C'est de cette façon qu'on réalise toutes ces choses, cela passe par des initiatives.
Or, le budget de notre école ne nous permet pas de faire tout cela. Ainsi, nous collaborons avec des intervenants. Le réseau des Community Learning Centres est un réseau d'écoles du Québec. Je pense qu'il y a maintenant 72 écoles. À nos débuts, il y a 10 ans, il y en avait 15. Si vous ne l'avez pas déjà fait, vous devriez discuter avec des représentants de ce réseau — ce serait très intéressant —, comme Paule Langevin ou Debbie Horrocks, ou encore David McFall, qui se trouve de l'autre côté de la rivière, à l'école primaire Pierre Elliott Trudeau.
Le sénateur McIntyre : Monsieur Thomson, j'aimerais connaître votre point de vue sur l'avenir de la Loi sur les langues officielles, autrement dit, sur son application. Si je pose la question, c'est que le comité a souvent entendu dire que certaines institutions fédérales ne respectent pas leurs obligations en matière de langues officielles.
Cela dit, selon vous, quels mécanismes sont nécessaires pour veiller à ce que la loi soit appliquée dans sa totalité? Par exemple, devrait-on renforcer les pouvoirs du commissaire aux langues officielles et devrait-on imposer des sanctions aux institutions fédérales qui ne remplissent pas leurs obligations linguistiques?
M. Thomson : Je ne peux pas répondre à cette question, car vous parlez d'application de la loi, et je suis seulement un éducateur; je n'applique pas la loi. Je ne crois pas qu'on puisse réussir à imposer l'application de la loi. En effet, cela peut causer davantage de conflits. Il suffit de fournir une meilleure raison qui explique la nécessité d'obéir ou les avantages dont profiteront les organismes qui appliquent cette loi.
Le sénateur McIntyre : Ma question est simple. Si la loi n'est pas respectée, que devrait-on faire à cet égard? Devrait- on moderniser la Loi sur les langues officielles pour mieux réagir en cas d'échec?
M. Thomson : Si vous me demandez si la loi devrait être appliquée, la réponse est oui. C'est une mesure législative qui a prouvé qu'elle servait efficacement notre pays. Je crois qu'elle a produit des initiatives formidables. Si certains organismes ne respectent pas cette loi, je crois que certaines agences ont les pouvoirs nécessaires pour intervenir.
Toutefois, si vous me demandez de déterminer les mesures qui devraient être prises, je crois que vous devriez poser cette question à quelqu'un d'autre, car je n'ai pas eu à intervenir dans ce volet. En effet, j'étais convaincu dès le départ. En ce qui concerne les gens qui ne sont pas convaincus, je présume qu'une personne qui a une meilleure... Pour être honnête, je n'ai jamais réfléchi à cela.
Le sénateur McIntyre : Êtes-vous pour la modernisation de la Loi sur les langues officielles?
M. Thomson : Je crois que c'est nécessaire si nous observons qu'il y a des problèmes et si cette loi n'est pas respectée. Je comprends le mot « appliquer ». Toutefois, j'utiliserais le mot « éduquer ». Nous devons éduquer ces organismes et leur expliquer pourquoi il est essentiel qu'ils respectent la Loi sur les langues officielles.
La sénatrice Fraser : Pour obéir à la présidente, je vais poser une série de questions conçues pour obtenir une meilleure idée de vos étudiants et de leur communauté d'origine. Combien d'étudiants avez-vous? Combien d'entre eux obtiennent leur diplôme et fréquentent ensuite le CÉGEP? Combien fréquentent l'université? Dans l'ensemble, leurs familles sont- elles au même niveau financier que les autres habitants de la ville de Québec, ou existe-t-il des différences, à votre connaissance?
M. Thomson : Essentiellement, vous souhaitez obtenir un portrait de ma clientèle.
Il y a 378 étudiants. Nous ne sommes pas ce qu'on appelle une école NAN, nous ne sommes pas une école favorisée sur le plan financier. Toutefois, certains de nos étudiants habitent dans des collectivités agricoles et urbaines à 50 ou 60 kilomètres à l'est, à l'ouest, au nord et au sud. Certains de mes étudiants doivent passer une heure dans un autobus, parfois plus. Certains de mes élèves viennent de familles pauvres, d'autres d'une population d'immigrants et d'autres sont des étudiants autochtones — il y a de tout. La majorité d'entre eux sont des Québécois qui viennent de la ville de Québec.
Notre commission scolaire a un taux d'obtention de diplôme exceptionnel. Les trois meilleures commissions scolaires publiques de la province de Québec avec les meilleurs résultats sont la Commission scolaire Lester B. Pearson, la Commission scolaire English-Montréal, et la Commission scolaire Central Québec, la CSCQ, dont nous faisons partie, et nous avons toujours eu de bons résultats. Oui, nous avons des taux d'obtention de diplôme fantastiques. Ce serait encore mieux si nous étions en mesure de suivre nos étudiants qui quittent la province, car on les compte parmi les décrocheurs. Même s'ils obtiennent leur diplôme dans une autre école secondaire, nous ne les suivons pas. Le ministère de l'Éducation n'en voit pas la nécessité, et c'est la décision de ce ministère, mais nos taux seraient encore plus élevés si nous le faisions.
Comment y arrivons-nous? Grâce à l'engagement. Dans notre équipe, nous nous engageons à l'égard de l'idée selon laquelle chaque étudiant peut exceller à un haut niveau d'apprentissage. Une fois que nous acceptons ce principe fondateur, nous réussissons très bien dans nos écoles. Est-ce une question de préservation? Peut-être, mais ce n'est pas ce dont nous parlons.
La sénatrice Fraser : Fréquentent-ils le cégep ou l'université par la suite?
M. Thomson : Oui. Je dirais que la majorité de nos étudiants fréquentent le cégep par la suite. Nous avons observé, même durant mes 10 années, que le cégep Champlain-St. Lawrence n'est pas la seule option. Un nombre croissant de nos étudiants fréquenteront le cégep Sainte-Foy, le cégep Garneau, et cetera. De plus en plus d'étudiants choisissent la formation professionnelle. S'ils choisissent la formation professionnelle dans la ville de Québec, ils devront étudier en français. Il y a un centre de formation professionnelle anglophone, mais il n'offre pas un grand nombre de programmes et il est surtout axé sur le tourisme.
Une grande partie de mes élèves ont des besoins spéciaux. Je pourrais en parler pendant des heures, si vous le souhaitiez.
Lorsque nos élèves quittent notre école, ils ont tous un plan. Nous ne permettons pas à un seul élève qui obtient son diplôme — et ils l'obtiendront dans deux semaines — de quitter l'école sans un plan pour l'avenir. Cela prend du temps et de l'engagement.
Nous faisons bien notre travail. Mais oui, en résumé, la plupart de nos élèves iront au cégep, et la plupart dans un établissement anglophone, mais certains d'entre eux choisiront d'étudier en français. Un nombre croissant d'entre eux choisissent d'étudier en français.
La sénatrice Fraser : Et à l'université?
M. Thomson : Oui, ils vont à l'université, mais après le cégep, nous ne les suivons plus. C'est le niveau suivant.
L'une des grandes réussites du Québec, c'est d'avoir fait en sorte que l'éducation postsecondaire soit abordable pour nos étudiants. En effet, un étudiant québécois qui souhaite fréquenter l'université peut y arriver.
[Français]
Le sénateur Maltais : Brièvement, monsieur Thomson. Vous êtes relativement jeune. Je pense que la ville de Québec, à partir des années 1960, a subi une transformation de la part des grandes familles anglophones qui demeuraient dans la ville de Québec.
M. Thomson : Oui.
Le sénateur Maltais : Par exemple, les Polak, les Simon.
[Traduction]
M. Thomson : Les Simon sont toujours là. Les Polak et les Webster ont déménagé.
[Français]
Le sénateur Maltais : Exactement, Couche-Tard et compagnie. Ils ont décidé, au lieu de partir, de tisser des liens avec les francophones de Québec. C'est ce qui a fait toute la différence. Au lieu de faire la guerre, ils se sont joints ensemble, et aujourd'hui, il y a une faible population anglophone, près de 2 p. 100, mais ils vivent dans une harmonie totale et complète.
M. Thomson : D'après moi, oui.
Le sénateur Maltais : J'en suis convaincu, car j'en fréquente; je suis membre de deux ou trois clubs à Québec, et le peu d'anglophones qui restent en sont membres. On doit s'informer de temps en temps pour savoir s'ils parlent encore anglais. Pourtant, ce sont des anglophones de Québec. Je ne parle pas d'intégration, j'ai horreur du mot « intégrer », mais la connexion qui s'est faite entre les anglophones et les francophones est, je pense, un exemple pour certaines villes canadiennes.
M. Thomson : Si je peux me permettre un commentaire sur ce sujet, il y a des partenaires très forts dans le milieu, et il y a des chefs autour de la table à Québec qui sont très forts. Jeffery Hale Community Partners, c'est un modèle à suivre sur le plan des services sociaux et de santé. L'hôpital de Jeffery Hale également. Ils vivent des changements importants à Québec, comme on le sait, alors ils vont peut-être perdre un peu de leur autonomie.
[Traduction]
Il est essentiel, pour une école, d'avoir de solides partenaires comme ceux-là, et nous réussissons à desservir notre population. Nous servons tout simplement les gens sans leur demander d'identifier leur langue. Si vous avez besoin d'aide ou d'autre chose, nous sommes en mesure de vous aider, ce qui est fantastique.
[Français]
Le sénateur Maltais : Pour ce qui est de la clientèle du collège anglophone, le collège St. Lawrence, je dirais qu'elle est constituée à plus de 60 p. 100 de francophones qui fréquentent ce collège. Pour le reste, il y a des anglophones et surtout des immigrants. Ce sont des francophones qui le fréquentent pour perfectionner leur bilinguisme.
[Traduction]
M. Thomson : Ce cégep doit refuser des étudiants chaque année, car la demande est trop élevée.
[Français]
Le sénateur Cormier : Vous êtes un éducateur passionné, donc je vais vous demander de vous projeter dans l'avenir. La Loi sur les langues officielles parle de bilinguisme, mais parle beaucoup de dualité linguistique aussi. On s'est battu, les uns et les autres, pendant des générations pour avoir des écoles francophones et anglophones, afin que, évidemment, les cultures de ces populations puissent s'exprimer à travers le système scolaire, à travers les institutions culturelles. Avec cette nouvelle notion d'identité bilingue, si vous aviez à décrire l'école de deux générations à venir ou les institutions culturelles de deux générations à venir, comment cette identité, comment ces écoles et ces institutions seraient-elles transformées par cette nouvelle identité bilingue?
[Traduction]
M. Thomson : Je pourrais perdre mon emploi si je parle de cela.
Manifestement, le Québec a adopté des lois appropriées en ce qui concerne l'accessibilité aux écoles. Même à titre d'anglophone dans une école anglophone, je comprends le raisonnement lié à l'accessibilité aux écoles anglophones. Je le comprends. Je n'ai pas vécu l'exode des années 1970 et 1980. J'aimerais énormément accepter, dans mon école, des représentants de toutes les communautés linguistiques. Si vous me disiez que les gens peuvent simplement choisir l'école qui répond à leurs besoins, que les parents peuvent choisir une école, qu'elle soit anglophone ou francophone, j'aimerais beaucoup qu'il y ait des écoles qui ne limitent pas l'accessibilité ou ne la remettent pas en question, si c'est ce que vous laissez entendre dans votre question.
Mais en ce moment, je crois que nous devons toujours avoir des lois pour veiller à préserver ces institutions. Les dispositions de la Loi sur les langues officielles qui garantissent aux minorités linguistiques le droit à l'accès à une éducation dans leur langue partout au Canada sont essentielles.
Si vous me demandiez ce que j'aimerais voir se produire, je vous répondrais que j'aimerais beaucoup qu'il existe des écoles qui acceptent tous les étudiants et dans lesquelles tout le monde est bilingue. Je crois que c'est possible, mais c'est un rêve pour les générations futures.
En ce moment, on a toujours besoin de la Loi sur les langues officielles pour protéger l'existence de ces institutions. Je comprends pourquoi la province de Québec a aussi adopté des lois provinciales qui reconnaissent la nécessité d'envoyer les nouveaux arrivants dans des écoles francophones, et cetera.
La présidente : Dans le cadre de notre étude sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles et de nos consultations auprès des Canadiens — et nous nous concentrons maintenant sur les jeunes —, avez-vous des suggestions sur le type de questions ou d'approches que nous pourrions utiliser pour obtenir des réponses des jeunes? Souvent, ils ne connaissent pas bien la Loi sur les langues officielles, et il leur est donc difficile de nous dire ce qu'ils aimeraient changer dans cette loi. Ils ne le savent pas vraiment. À mesure que nous progressons dans ce segment, nous voulons veiller à ce que les recommandations que nous pourrions formuler relativement à la modernisation tiennent compte des situations vécues par les jeunes.
Donc, à votre avis, que pourrait faire la Loi sur les langues officielles pour viser davantage les enjeux qui préoccupent les jeunes Canadiens, et quels types de questions pourrions-nous leur poser afin de veiller à obtenir les réponses appropriées?
M. Thompson : Je crois que l'un des éléments que je n'ai pas vraiment abordés concerne les facteurs de motivation liés à l'apprentissage de deux langues, et cela revient en grande partie à l'employabilité et aux possibilités. Je crois que les jeunes auxquels vous devez parler sont probablement ceux qui réussissent dans une communauté linguistique autre que leur communauté d'origine, qu'il s'agisse d'un anglophone dans une communauté francophone ou d'un francophone dans une communauté anglophone. Est-on en mesure de les suivre et de comprendre comment ils gèrent tous les éléments? Comment ont-ils obtenu ces emplois de haut niveau?
La présidente : À votre avis, le gouvernement fédéral fait-il suffisamment la promotion des deux langues officielles du Canada?
M. Thompson : J'espère qu'il continuera d'en faire suffisamment la promotion. Je crois que les fondements sont en place. J'aimerais évidemment qu'on investisse davantage dans les opportunités et les programmes. Il faut que chaque région ait accès à ce financement et il faut que ces régions puissent déterminer leurs priorités.
Je crois qu'il nous faut un accès au système d'éducation, c'est-à-dire au système d'éducation anglophone, qui respecte nos réalités. L'une des façons d'y arriver consiste à garantir du financement pour nous permettre d'enseigner le français. Nous devons avoir accès à ces budgets supplémentaires pour élaborer des programmes bilingues et pour recruter des gens. Nous devons continuer d'offrir à nos jeunes des occasions de vivre dans la culture d'une autre communauté, que ce soit par l'entremise d'échanges ou d'emplois pour les jeunes. On pourrait réinstaurer le programme Katimavik, mais c'est mon point de référence.
Pourrions-nous en faire davantage? Oui. Devons-nous en faire davantage? Oui. Avons-nous fait du bon travail? Je crois qu'il y a d'excellentes histoires de réussite dans notre milieu.
[Français]
La présidente : Merci. Nous n'avons pas d'autres questions. Monsieur Thomson, je tiens à vous remercier très sincèrement, au nom du Comité sénatorial permanent des langues officielles. Vous avez certainement démontré les qualités d'un excellent éducateur. Votre présentation était des plus intéressantes.
[Traduction]
J'aimerais également remercier vos étudiants. Nous étudierons certainement très attentivement les renseignements que vous nous avez fournis, et si vous avez d'autres idées ou si vos étudiants ont d'autres commentaires, n'hésitez pas à communiquer avec notre greffier.
[Français]
Notre réunion se poursuivra à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)