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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 221

Le jeudi 14 juin 2018
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 14 juin 2018

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le groupe 100 Women Who Care

L’honorable Gwen Boniface : Honorables sénateurs, une vague de bonne volonté déferle présentement sur le sud de la baie Georgienne. L’été dernier, j’ai rencontré la dirigeante d’un groupe de femmes engagées de ma région qui étaient sur le point de se doter de leur propre antenne du regroupement 100 Who Care Alliance, qui vient en aide aux organismes caritatifs locaux.

C’est Karen Dunigan qui a eu l’idée du premier groupe 100+ Women Who Care, qui a vu le jour en 2009 au Michigan. Karen s’était fait demander de trouver des berceaux, des matelas et de la literie pour des mères célibataires dans le besoin. Elle a donc décidé de réunir 100 femmes et de demander 100 $ à chacune. Un mouvement venait de naître.

Le regroupement compte aujourd’hui plus de 550 antennes de par le monde, dont 73 au Canada. Même si ce sont des femmes qui l’ont créé, certains groupes sont destinés aux hommes, aux enfants ou aux adolescents. Il y a même des groupes virtuels. Le concept derrière les 100+ Who Care est aussi puissant que porteur, parce qu’il requiert très peu de temps et d’argent, mais réussit à produire des résultats phénoménaux, ce qui cadre parfaitement dans la vie effrénée d’aujourd’hui. Il permet de jeter des ponts entre un groupe de personnes dans le besoin et un autre qui a envie de les aider et qui en a les moyens. Il est la preuve que, quand ils travaillent tous ensemble, les gens peuvent changer la vie de leur prochain. Il n’y a pas que les organismes caritatifs qui bénéficient des efforts de ce mouvement, car ses membres ont aussi le sentiment de faire partie de quelque chose de spécial, et ils savent qu’ils ont un effet réel sur la collectivité et sur la vie de ceux qui ont eu moins de chance qu’eux.

Le groupe 100+ Women du sud de la baie Georgienne, qui ne comptait au départ que cinq membres, a commencé à en recruter d’autres l’été dernier. Depuis, de nombreuses femmes se sont jointes au mouvement, notamment grâce au bouche-à-oreille. Lors de sa plus récente réunion, en avril, le groupe comptait 180 membres déterminées à aider leur prochain qui s’étaient engagées à verser au-delà de 72 000 $ dans le courant de la prochaine année pour venir en aide à diverses causes.

Le premier bénéficiaire de leurs dons est la Barbara Weider House de Home Horizon, une œuvre de bienfaisance sans but lucratif qui offre un logement de transition à des femmes, à des enfants et à des jeunes sans abri à Collingwood. Plus récemment, c’est le groupe Victim Services Bruce Grey Perth qui a profité d’un coup de pouce financier.

Chers collègues, ce genre d’initiative locale dans les petites collectivités montre bien, d’une part, la force d’une idée simple et, d’autre part, l’énorme incidence que peut avoir la mise en commun des idées et des ressources sur la vie d’autres personnes. J’aimerais saluer le groupe 100 Women — qui ne cesse de grandir — de l’antenne du sud de la baie Georgienne, car il en encourage d’autres à s’engager de la sorte afin d’appuyer des causes louables dans les collectivités de la région.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de M. Yves Tiberghien, accompagné de son épouse, Yvonne Xiao, et de Haochen Li. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Woo.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

Le Nouveau-Brunswick

L’honorable Rose-May Poirier : Honorables sénateurs, à l’approche des vacances d’été, je souhaite vous inviter à venir passer un peu de temps dans la belle province du Nouveau-Brunswick en vous décrivant 10 beautés naturelles que vous pourrez y explorer cet été.

Le Nouveau-Brunswick compte plus de 50 plages, toutes accessibles au public, dont les 5 plus populaires sont les suivantes : les plages et les dunes du parc national de Kouchibouguac, qui sont à ma porte, à Saint-Louis-de-Kent; les dunes de Bouctouche, situées à Bouctouche, bien entendu; la plage Parlee, à Shediac; la plage de Grand-Anse, dans la péninsule acadienne; et, finalement, la plage Miscou, sur l’île de Miscou, également dans la péninsule acadienne. Le beau soleil de juillet, l’eau pure et bleue ainsi que les plages de sable blanc sont là pour vous accueillir.

[Traduction]

À nos magnifiques plages s’ajoutent d’autres merveilleuses attractions uniques en leur genre. La côte magnétique de Moncton est un excellent exemple d’illusion d’optique.

Rendez-vous au bout de la route, mettez la voiture au point mort et celle-ci remontera la pente. C’est une histoire vraie.

[Français]

Tant qu’à être à Moncton, vous devez aller voir le mascaret — le tidal bore — de la rivière Petitcodiac, l’un des phénomènes de la sorte parmi les plus impressionnants de la planète, qui se compare à celui de la rivière Hooghly, en Inde, et à celui de l’Amazone, au Brésil. Les vagues de la rivière Petitcodiac peuvent atteindre 2 mètres et déferlent à une vitesse de 13 kilomètres à l’heure.

Si vous poursuivez votre chemin vers le sud, vous arriverez à Hopewell Rocks, sur la baie de Fundy, où vous pourrez explorer le fond marin et vous promener au pied d’immenses rochers en forme de pots de fleurs. Soyez vigilants afin d’éviter la marée haute qui monte à très grande vitesse.

[Traduction]

Le neuvième attrait, ce sont les rapides réversibles de Saint John. Il s’agit d’un phénomène impressionnant, dans lequel les récifs font couler l’eau dans les deux directions en même temps. La gorge étroite se déverse dans la baie de Fundy et, lorsque la marée atteint son niveau maximum, le cours de la rivière est inversé.

Le dernier attrait, mais non le moindre, ce sont les habitants du Nouveau-Brunswick.

[Français]

Notre accueil chaleureux saura vous plaire. Que vous soyez de passage ou pour un séjour plus long, comme le dirait la Sagouine : « V’nez nous ’ouaire. » Chez nous, vous êtes les bienvenus.

Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

L’Eid ul-Fitr

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler de l’Eid ul-Fitr et pour vous souhaiter Aïd Moubarak. L’Eid ul-Fitr marque la fin du saint mois musulman du ramadan. C’est l’une des fêtes religieuses les plus importantes et les plus célébrées dans le monde musulman.

Pour souligner cet événement important, les musulmans participent à des prières spéciales le matin, ils échangent des vœux et des cadeaux et ils partagent un repas spécial. À la fin de ce mois de réflexion, nous pensons aux musulmans et aux pauvres personnes qui ont été déplacés ou qui sont touchés par des conflits et qui sont séparés de leur famille pendant le ramadan.

Aujourd’hui, nous nous souvenons des centaines de milliers de Yéménites qui ont été attaqués. Honorables sénateurs, le quatrième anniversaire du début de la guerre au Yémen approche à grands pas, et il ne semble pas qu’elle se terminera de sitôt. Jusqu’à 250 000 personnes pourraient perdre la vie. Selon l’organisme Save the Children, environ 130 enfants meurent de faim ou des suites d’une maladie tous les jours dans ce pays ravagé par la guerre.

Mesdames et messieurs les sénateurs, j’aimerais vous raconter l’histoire de Tinal. Tinal est l’une de ces enfants qui sont morts. À l’âge de 8 ans seulement, elle a vu ses parents être exécutés sous ses yeux au Yémen. Tinal mis de côté sa peur et son chagrin pour s’occuper de ses trois jeunes frères et sœurs, tandis que son frère aîné quittait le domicile familial pour trouver de l’eau et de la nourriture. Tinal devait les nourrir avec de l’herbe et des feuilles séchées. Dans l’espoir que leur frère revienne et parce qu’ils étaient complètement désespérés, les enfants ont mangé de la terre et des vêtements.

(1340)

Malheureusement, lorsque leur frère est revenu à la maison, il a trouvé les corps de ses quatre jeunes frères et sœurs.

Honorables sénateurs, voici quelle est la réalité au Yémen. Aujourd’hui je demande à mes confrères de l’Arabie saoudite, de l’Iran, du Yémen et de la Syrie : cessez le carnage et résolvez tous les litiges en entamant des pourparlers de paix. En ce mois sacré du ramadan, si nous croyons réellement au message du prophète Mahomet, je demande à ces pays de mettre fin au carnage et de participer aux pourparlers de paix. Le temps est venu d’établir la paix. Voilà ce que signifie le ramadan.

Merci à tous de votre attention. Aïd Moubarak à vous tous, honorables sénateurs, ainsi qu’à tous les Canadiens. Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune du directeur de l’école intermédiaire Islington, Rocco Coluccio. Il est accompagné d’élèves et de membre du personnel enseignant. Ils sont les invités de l’honorable sénateur Marwah.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Français]

L’industrie de la pêche au Nouveau-Brunswick

L’honorable René Cormier : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour rendre hommage aux travailleuses et aux travailleurs du secteur de la pêche de la péninsule acadienne, au Nouveau-Brunswick.

Comme nous le savons, à la suite de la confirmation de la présence de baleines noires dans les eaux de l’Atlantique Nord, le gouvernement fédéral a dû prendre la difficile décision de fermer temporairement certaines zones de pêche. Le lundi 11 juin, le ministère des Pêches et des Océans a transmis un avis de fermeture temporaire de 10 zones de pêche en raison de la présence de trois baleines noires au large, à l’est de l’île de Miscou, dans la péninsule acadienne.

[Traduction]

Selon une étude publiée en mars 2010 par l’économiste Pierre-Marcel Desjardins, on estime que, à elle seule, l’industrie du homard aurait une incidence de 53 millions de dollars sur le produit intérieur brut du comté de Gloucester, de 264,9 millions de dollars sur celui du Nouveau-Brunswick, et de 691,6 millions de dollars sur celui du Canada.

De plus, selon l’Union des pêcheurs des Maritimes, la fermeture de ces zones de pêche va faire perdre environ 3 millions de dollars par jour à l’ensemble de l’industrie.

[Français]

Honorables collègues, vous comprenez donc que cette situation crée beaucoup d’incertitude financière dans une région déjà fragile sur le plan économique. Les commerçants, les entrepreneurs et les citoyens sont inquiets, et cela est compréhensible.

Aujourd’hui, je pense surtout aux travailleurs et travailleuses d’usine. Je pense à ces femmes et à ces hommes qui travaillent souvent dans des conditions difficiles, qui se retrouvent en situation de précarité en raison du fameux « trou noir », et qui dépendent de cette industrie pour assurer le bien-être de leurs familles.

[Traduction]

Normalement, les employés d’usine peuvent travailler des semaines de 50, 60, et même 70 heures pendant la saison de la pêche. Ce sont les revenus que génèrent ces longues heures de travail et les prestations d’assurance-emploi qu’ils reçoivent pendant l’hiver qui leur permettent de faire vivre leur famille.

Toutefois, cette année, les employés d’usine ont eu de la difficulté à travailler même 30 heures par semaine. Ainsi, même s’ils ont droit à une exemption et qu’ils sont admissibles à l’assurance-emploi, ils seront grandement touchés par la perte du revenu lié à la baisse du nombre d’heures travaillées.

[Français]

Cette situation est d’autant plus difficile pour cette catégorie de travailleurs qui œuvrent souvent dans des conditions dommageables pour leur santé.

Comme le relatait le journaliste Jean-Marc Doiron, dans l’édition du 8 mars 2016 du quotidien l’Acadie Nouvelle, et je cite :

Avec les mains et les pieds mouillés, les travailleurs œuvrent sur un plancher de ciment pendant au moins 10 heures par jour durant la saison de pointe, y compris les samedis et les dimanches.

Arthrite, rhumatismes, problèmes de dos et de jambes... Voilà à quoi peuvent s’attendre les employés d’usines de transformation de fruits de mer à la fin d’une longue carrière dans le domaine.

La majorité des employés canadiens des usines de transformation seraient âgés de plus de 50 ans, et ce sont souvent des femmes qui occupent ces postes.

En plus de ces conditions de travail difficiles, les travailleuses et travailleurs d’usine de la péninsule acadienne doivent aujourd’hui faire face à beaucoup d’incertitude en ce qui concerne leur emploi et leur capacité de cumuler suffisamment de semaines pour obtenir de l’assurance-emploi.

Son Honneur le Président : Je m’excuse, sénateur Cormier, mais votre temps de parole est écoulé.

Le sénateur Cormier : Merci d’appuyer les travailleurs et travailleuses de la péninsule acadienne.

[Traduction]

[Français]

Visiteurs à la tribune

[Traduction]

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de membres de la communauté des personnes sourdes et aveugles : Jennifer Robbins, Philip Corke, Sherry Grabowski, Cathy Proll, Penny LeClair et Daryl Armstrong. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Martin.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Le Mois de sensibilisation à la surdi-cécité

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, je suis honorée de prendre la parole aujourd’hui à l’occasion du Mois de sensibilisation à la surdi-cécité, qui a lieu en juin, pour souligner la force, le dévouement et la détermination des 65 000 Canadiens ou plus qui sont sourds et aveugles.

En 2015, le Sénat a adopté une motion à l’unanimité pour désigner le mois de juin comme Mois de sensibilisation à la surdi-cécité. Je félicite l’honorable Vim Kochlar de son leadership. Il est l’un des plus grands défenseurs de la communauté sourde et aveugle et des personnes handicapées, tout comme le sénateur Jim Munson et l’honorable Asha Seth, dont l’engagement et l’appui ont été précieux.

Juin est le mois de naissance d’Helen Keller, une femme digne et héroïque, dont la détermination et le leadership ont changé le monde et ont été source d’inspiration pour plusieurs. Des organismes et des leaders de la communauté des Canadiens sourds et aveugles, dont certains sont présents dans cette enceinte, ont uni leurs efforts pour faire du Mois de sensibilisation à la surdi-cécité une tradition annuelle sur la Colline.

Selon Statistique Canada, environ 69 700 Canadiens âgés de plus de 12 ans sont à la fois sourds et aveugles, ou souffrent simultanément d’une perte de la vision et d’une perte auditive qui limitent leurs activités quotidiennes. Grâce à un vote unanime du Sénat, le mois de juin a été désigné pour encourager les Canadiens à reconnaître la force et la résilience extraordinaires des personnes sourdes et aveugles et à célébrer la mémoire de la pionnière qu’a été Helen Keller.

Ce mois est extrêmement important pour rendre hommage non seulement à ces personnes, mais aussi à leur famille, aux intervenants et aux organismes qui collaborent étroitement avec la communauté des personnes sourdes et aveugles pour les aider à vivre le plus pleinement possible. Je songe aux organismes comme le Centre canadien Helen Keller, l’Association canadienne de la surdi-cécité, l’Institut national canadien pour les aveugles, ou INCA, les DeafBlind Ontario Services, la Fondation Bob Rumball pour les sourds, la maison Lions McInnes, les Services communautaires aux sourds et aveugles de l’INCA et la Canadian Foundation for Physically Disabled Persons.

Helen Keller a dit ce qui suit :

La vie est une aventure audacieuse ou elle n’est rien.

Seul, on ne peut rien; ensemble, on peut tout!

Honorables sénateurs, les paroles d’Helen Keller nous inspirent encore à ce jour. Ensemble, honorons sa mémoire et son travail en veillant à ce que les Canadiens sourds et aveugles aient accès aux avantages et aux possibilités qui sont offerts à tous au pays. Merci.

Des voix : Bravo!

Visiteurs à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Heather Patterson, de David Evans, de leur fils, Bill Evans, et de leur petite-fille, Amelia Evans. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice Hartling.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Visiteur de marque à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de notre ancien collègue, l’honorable Vim Kochhar.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je suis heureux de vous revoir au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Le commissaire à l’intégrité du secteur public

Dépôt du rapport annuel de 2017-2018

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Commissariat à l’intégrité du secteur public du Canada pour l’exercice qui s’est terminé le 31 mars 2018, conformément à la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005,ch. 46, par. 38(4).

[Traduction]

Le directeur parlementaire du budget

Dépôt du compte rendu des activités de 2017-2018

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le compte rendu des activités du Bureau du directeur parlementaire du budget pour 2017-2018, conformément à la Loi sur le Parlement du Canada, L.R.C. 1985, ch. P-1, art. 79.22.

Projet de loi no 1 d’exécution du budget de 2018

Présentation du trentième rapport du Comité des finances nationales

L’honorable Percy Mockler, président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant :

Le jeudi 14 juin 2018

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l’honneur de présenter son

TRENTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures, a, conformément à l’ordre de renvoi du 12 juin 2018, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement mais avec observations.

Respectueusement soumis,

Le président,

PERCY MOCKLER

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 3673.)

(1350)

Troisième lecture

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

L’honorable Percy Mockler : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5b) du Règlement, je propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois maintenant.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)

La Loi électorale du Canada

Projet de loi modificatif—Présentation du vingt-sixième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L’honorable Serge Joyal, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le jeudi 14 juin 2018

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l’honneur de présenter son

VINGT-SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-50, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (financement politique), a, conformément à l’ordre de renvoi du 3 mai 2018, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec la modification suivante :

1. Article 2, page 9 :

a) Remplacer la ligne 22 par ce qui suit :

« 384.3(6.1) ou (8.1), sauf s’il est convaincu que l’omission »;

b) remplacer la ligne 27 par ce qui suit :

« ragraphes 384.3(6.1) ou (8.1) ou dans les deux semaines ».

Respectueusement soumis,

Le président,

SERGE JOYAL

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

Le sénateur Serge Joyal : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5f) du Règlement, je propose que l’étude du rapport soit inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion du sénateur Joyal, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la présente séance.)

Bibliothèque du Parlement

Présentation du deuxième rapport du comité mixte

L’honorable Lucie Moncion, coprésidente du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, présente le rapport suivant :

Le jeudi 14 juin 2018

Le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement a l’honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Conformément à l’ordre de renvoi du Sénat en date du lundi 11 juin 2018, à l’article 111.1(1) du Règlement de la Chambre des communes et à l’ordre de renvoi de la Chambre des communes en date du vendredi 8 juin 2018, le Comité a examiné la nomination proposée de Heather P. Lank au poste de bibliothécaire parlementaire.

Le Comité approuve la nomination de Heather P. Lank au poste de bibliothécaire parlementaire.

Un exemplaire du Procès-verbal pertinent (réunion no 4) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis,

La coprésidente,

LUCIE MONCION

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion de la sénatrice Moncion, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5g) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au lundi 18 juin 2018, à 18 heures;

Que les comités sénatoriaux devant se réunir ce jour-là soient autorisés à siéger même si le Sénat siège, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard;

Que l’application de l’article 3-3(1) du Règlement soit suspendue ce jour-là.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

Modernisation du Sénat

Préavis de motion tendant à autoriser le comité spécial à reporter la date de son rapport final

L’honorable Stephen Greene : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le mardi 28 novembre 2017, la date du rapport final du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat relativement à son étude sur les façons de rendre le Sénat plus efficace dans le cadre constitutionnel actuel soit reportée du 29 juin 2018 au 31 décembre 2018.

Secteur de la bienfaisance

Préavis de motion tendant à autoriser le comité spécial à siéger en même temps que le Sénat et pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable Terry M. Mercer (leader adjoint des libéraux au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, pour les besoins des réunions du lundi 17 septembre et du mardi 18 septembre 2018, le Comité sénatorial spécial sur le secteur de la bienfaisance :

a)soit autorisé à siéger même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard;

b)soit autorisé, nonobstant l’article 12-18(2) du Règlement, à se réunir du lundi au vendredi pendant une période d’ajournement du Sénat qui dure plus d’une semaine.

Transports et communications

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à étudier la façon de moderniser les lois fédérales sur les télécommunications

L’honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à étudier, pour en faire rapport, la façon de moderniser les trois lois fédérales sur les télécommunications (la Loi sur les télécommunications, la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur la radiocommunication) pour tenir compte de l’évolution des secteurs de la radiodiffusion et des télécommunications durant les dernières décennies. Certaines des principales questions que l’étude examinera comprendront :

a)la manière dont ces trois lois favorisent la création, la production et la distribution de contenu canadien concurrentiel de qualité, tant en français qu’en anglais;

b)les réalités et défis vécus par les consommateurs, les entreprises, les diffuseurs et les artistes et artisans canadiens;

c)l’atténuation de la distinction entre la radiodiffusion et les télécommunications;

d)la fragmentation des services;

e)la consolidation et la concentration des sociétés;

f)le contenu canadien;

g)CBC/Radio-Canada;

h)les contraintes liées à la propriété étrangère;

i)la faible participation et l’indice de développement des technologies de l’information et de la communication;

j)l’absence de stratégie nationale sur le réseau à large bande;

k)la neutralité du Net;

l)le pouvoir conféré par la loi et le rôle du CRTC;

Que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 28 juin 2019 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions pendant 180 jours après le dépôt de son rapport final.


(1400)

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

Le régime fiscal pour petites entreprises

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Je vous remercie, Votre Honneur. Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur les modifications que le gouvernement a apportées au régime fiscal des petites entreprises.

La date limite à laquelle les entrepreneurs indépendants d’ici doivent présenter leur déclaration de revenus a été fixée au 15 juin, soit demain. L’été dernier, alors qu’il tentait d’imposer des modifications radicales au régime fiscal ― au terme d’un minimum de consultations ―, le ministre des Finances a laissé entendre que les petites entreprises, d’un bout à l’autre du Canada, abusent du système. Le ministre a, par la suite, fait marche arrière à l’égard de certaines des modifications envisagées.

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante continue d’exhorter le ministre Morneau à ne pas mettre en œuvre les changements visant les revenus de placements passifs et à reporter à janvier 2019, au plus tôt, les modifications visant le fractionnement du revenu. Comme nous le savons tous, le ministre n’a pas tenu compte de ces demandes.

Pourquoi le ministre des Finances cherche-t-il à engloutir les petites entreprises sous une avalanche de tracasseries administratives et de modifications fiscales complexes qui demeurent un fouillis inextricable, aux dires même de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie encore une fois le sénateur de sa question. Il s’agit d’une question qu’il a posée sous diverses formes au cours des derniers mois. Il sait sans doute que le gouvernement du Canada considère le secteur de la petite entreprise comme un élément clé de l’économie canadienne. C’est d’ailleurs pourquoi le budget que nous venons d’approuver prévoit une baisse du taux d’imposition des petites entreprises.

D’autre part, le sénateur sait probablement que le ministre a apporté des modifications qui réduisent considérablement la portée des dispositions concernant le fractionnement du revenu, pour que le petit pourcentage de propriétaires de sociétés privées sous contrôle canadien ne puissent plus se prévaloir d’une mesure fiscale qui, de l’avis du gouvernement, les avantageait injustement par rapport aux autres contribuables. L’objectif du gouvernement consiste à faire en sorte que le secteur de la petite entreprise prospère, qu’il soit traité de manière équitable et qu’il soit soutenu par le régime fiscal du Canada.

Le sénateur Smith : Merci, monsieur le leader. Le leader du gouvernement se souvient peut-être aussi du rapport du directeur parlementaire du budget qui a été déposé plus tôt cette année, dans lequel le directeur n’a pas pu clairement déterminer qui serait assujetti aux nouvelles règles de fractionnement du revenu pour les petites entreprises. Les modifications apportées par le gouvernement sont tellement alambiquées que le directeur parlementaire du budget a dû présenter trois scénarios possibles sur la façon dont l’Agence du revenu du Canada pourrait les interpréter.

En ce qui concerne le fractionnement du revenu, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante demande aussi une exemption complète pour les époux.

Pouvez-vous nous aider, monsieur le leader, en obtenant la réponse du ministre Morneau relativement à la demande d’exemption pour les époux en ce qui concerne le fractionnement du revenu? Le gouvernement est-il prêt à envisager une exemption pour les époux?

Le sénateur Harder : Je remercie encore une fois l’honorable sénateur de sa question. Je la soumettrai volontiers au ministre des Finances, mais je peux lui assurer que, comme le ministre l’a clairement indiqué lorsqu’il a présenté le budget et la mesure législative qui s’en est suivie, il existe des déductions appropriées pour les époux qui contribuent de manière utile dans l’entreprise.

Les observations sur le projet de loi C-74

L’honorable Percy Mockler : Merci. Comme tous les honorables sénateurs le savent, le projet de loi C-74, la Loi d’exécution du budget du gouvernement, a fait l’objet d’une étude préalable complète et rigoureuse menée non seulement par le Comité des finances nationales, mais aussi par sept autres comités : le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts et le Comité spécial sur l’Arctique.

Je souhaite remercier tous les honorables sénateurs d’avoir travaillé si fort et d’avoir exercé toute la diligence requise par rapport au projet de loi C-74.

Sénateur Harder, pourriez-vous, s’il vous plaît, donner au Sénat l’assurance que le gouvernement considérera chaque observation consignée dans ces rapports des comités sénatoriaux, notamment le rapport du Comité des finances nationales, et qu’il fera un suivi?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je souhaite remercier l’honorable sénateur de sa question.

Avant de fournir une réponse détaillée, je tiens à me joindre à lui pour remercier tous les comités d’avoir mené une étude préalable et, en particulier, le comité qu’il préside pour son étude préalable et son examen du projet de loi. Le président est un serviteur de cette institution et il nous fait honneur.

Pour répondre à sa question, je lui assure que le gouvernement prend au sérieux toutes les observations émises dans l’ensemble des rapports des comités, et que les recommandations seront non seulement portées à l’attention du gouvernement, mais qu’elles recevront une réponse adéquate.

Les affaires étrangères et le commerce international

Les relations diplomatiques avec l’Iran

L’honorable David Tkachuk : Sénateur Harder, hier, au Sénat, vous avez expliqué le virage à 180 degrés du gouvernement par rapport à sa politique à l’égard de l’Iran en disant, et je cite :

[…] le gouvernement iranien s’est montré peu coopératif récemment, comme en témoignent les gestes qu’il a posés, particulièrement en ce qui concerne les cas consulaires dont il a été question au Sénat. Dans ce contexte, le gouvernement du Canada a décidé de laisser de côté le rétablissement des relations avec l’Iran, du moins jusqu’à ce que le gouvernement iranien ait réglé les problèmes en question, qui préoccupent grandement le gouvernement du Canada et tous les Canadiens.

Manifestement, tant que ces problèmes ne seront pas réglés, le résultat souhaité, soit le rétablissement des relations, ne peut pas être atteint.

Comparons cela avec le passage suivant, qui est tiré d’une lettre que le gouvernement a écrite pour exprimer son opposition au projet de loi S-219 :

Le gouvernement estime que c’est par le dialogue — et non par le retrait et l’isolement — qu’il peut le mieux promouvoir les intérêts du Canada, y compris les services consulaires offerts aux Canadiens […]

Sénateur Harder, qu’est-ce qui correspond le mieux à la politique actuelle du gouvernement à propos de l’Iran? Celle qui est décrite dans la lettre que je viens de citer ou celle que prévoit le projet de loi S-219?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Elle me permet de rappeler encore une fois que le gouvernement s’est adressé aux autorités concernées, y compris aux plus hauts niveaux, pour demander la libération des Canadiens et des résidents permanents qui sont touchés par les difficultés qu’éprouvent actuellement les services consulaires.

La position adoptée par le gouvernement découle sans doute du peu de progrès accomplis. C’est celle qu’il conservera tant que rien ne bougera.

Cela ne change rien à l’objectif qu’il s’est fixé d’en arriver à un dialogue au moment opportun, lorsque les conditions seront favorables. Ce dialogue doit toutefois être précédé d’une plus grande ouverture aux intérêts énoncés. Il va sans dire que le peu de progrès accomplis dans les affaires consulaires nous cause tous un peu de frustration, qui se traduit de cette façon.

(1410)

Le sénateur Tkachuk : La lettre du gouvernement que j’ai citée dit aussi que le projet de loi S-219 nuirait au rétablissement de relations diplomatiques normales avec l’Iran parce que l’Iran réagirait probablement mal à sa présentation. Pourquoi le gouvernement s’attendrait-il à ce que l’Iran réagisse mal au projet de loi S-219, mais bien à la motion de mardi?

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de poser cette question. Permettez-moi de dire que les circonstances entourant les affaires consulaires ont changé et mené à des frustrations telles que le gouvernement s’est senti à l’aise d’appuyer la motion présentée à l’autre endroit il y a quelques jours, ce qui montre la nature changeante de la situation et la frustration éprouvée devant l’absence de progrès réalisés dans les affaires consulaires. Il n’y a pas de contradiction, mais un jugement porté après une série d’interventions qui ont engendré des déceptions.

L’emploi, le développement de la main-d’œuvre et le travail

Le programme Emplois d’été Canada

L’honorable Leo Housakos : Honorables collègues, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Lors d’un rassemblement au centre-ville de Toronto, samedi, le cheik Shafiq Hudda, de l’organisme Islamic Humanitarian Service, a lancé un appel à l’éradication des Israéliens. La police a reçu une plainte dénonçant ses propos haineux. Le groupe qu’il représente, Islamic Humanitarian Service, reçoit des fonds du programme Emplois d’été Canada.

Sénateur Harder, lorsque je vous ai interrogé au sujet de l’attestation pour Emplois d’été Canada, en janvier, vous avez déclaré ceci :

Le gouvernement du Canada s’attend à ce que les organismes soutenus par le programme Emplois d’été Canada respectent les droits des Canadiens, et il met en place des processus pour le garantir.

Sénateur Harder, sachant que ce groupe reçoit des fonds, comment le gouvernement peut-il encore défendre ses critères basés sur des valeurs? Comment avez-vous pu approuver que de l’argent soit versé à un tel groupe dans le cadre du programme Emplois d’été Canada?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur d’avoir porté cette affaire à mon attention. Je vais me renseigner auprès de la ministre responsable, et je vous en ferai rapport.

Le sénateur Housakos : Monsieur le leader du gouvernement, hier, à l’autre endroit, le premier ministre a dénoncé à juste titre les propos tenus par M. Hudda et a dit qu’ils étaient inacceptables. Je suis tout à fait d’accord avec le premier ministre, et je pense que vous devriez faire la même déclaration ici. Pourquoi, alors, le premier ministre n’irait-il pas un peu plus loin en disant qu’il est fondamentalement inacceptable de verser à ce groupe des fonds du programme Emplois d’été Canada, qui sortent des poches des contribuables? Pourquoi des organisations et des Églises, qui ne font pas et ne feraient pas la promotion de discours haineux illégaux, se voient-elles refuser des fonds visant à embaucher des étudiants pour diriger des camps de jour pendant l’été ou travailler dans des refuges pour sans-abri, alors qu’un groupe comme celui-ci obtient des fonds publics?

Le sénateur Harder : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Sa question concerne le programme Emplois d’été Canada et l’affaire qu’il a portée à mon attention. J’ai besoin de déterminer les faits avant de pouvoir y répondre. Quant aux propos scandaleux que le sénateur a cités dans son préambule, je ne peux que me joindre au premier ministre — comme pourraient le faire tous les sénateurs, j’en suis sûr — pour les dénoncer. Je suis heureux de le faire.

L’attestation exigée pour les emplois d’été

L’honorable Michael L. MacDonald : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au sénateur Harder. La semaine dernière, on a appris que le Bangor Sawmill Museum, situé à Meteghan River, en Nouvelle-Écosse, n’ouvrira pas ses portes comme il était prévu, parce que sa demande de financement aux termes du programme Emplois d’été Canada a été rejetée. Nous savons que le responsable de ce dossier en Nouvelle-Écosse est notre ancien collègue, le sénateur Comeau, qui fait don de son temps pour tenter de garder ce musée ouvert.

Ce n’est pas une organisation qui prend position sur des enjeux de conscience. C’est un musée où on trouve l’un des derniers moulins à scie actionnés par l’eau. Le musée a envoyé une lettre au gouvernement pour affirmer son soutien à l’égard de la Charte des droits et libertés. Or, simplement parce qu’il n’a pas accepté l’attestation que lui impose le gouvernement, il n’a pas obtenu de financement pour embaucher un étudiant comme guide et restera donc fermé cet été

Le gouvernement pourrait-il revenir sur sa décision de refuser du financement au musée du moulin à scie de Bangor et, ainsi, permettre au musée d’ouvrir ses portes cet été?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de la question. Je vais la porter à l’attention de la ministre responsable et en faire rapport.

Le sénateur MacDonald : Il est intéressant que nous parlions de la primauté de la Charte des droits, mais que, pour le gouvernement, cela semble avoir peu d’importance dans certaines circonstances.

Comme les honorables sénateurs le savent, l’initiative Emplois d’été Canada sert aussi à financer un poste à Dogwood, en Colombie-Britannique, dont la description publiée dans l’offre d’emploi disait que le titulaire devait aider à « mettre fin au projet d’oléoduc et de pétroliers de Kinder Morgan ». Je suppose que le leader répliquera que ce groupe a également reçu du financement sous le gouvernement précédent, ce qui est exact. Cependant, la situation actuelle est différente dans la mesure où le gouvernement finance ce groupe dans un contexte où il a approuvé le projet d’expansion de l’oléoduc Trans Mountain et où il a affirmé à maintes reprises que le projet est dans l’intérêt national et doit donc aller de l’avant.

Sénateur Harder, pourquoi est-il acceptable de verser des fonds publics à des militants anti-pipelines qui cherchent à mettre fin au projet d’oléoduc Trans Mountain tout en refusant du financement à un petit musée communautaire de la Nouvelle-Écosse?

Le sénateur Harder : Encore une fois, je remercie l’honorable sénateur de sa question et de répondre à ma place. J’ajouterai simplement à cela que je vais porter les deux questions à l’attention des ministres concernés.


[Français]

ORDRE DU JOUR

La Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Projet de loi modificatif—Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu’il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-344, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (retombées locales), accompagné d’un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Omidvar, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.)

[Traduction]

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Boniface, appuyée par l’honorable sénateur Sinclair, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport) et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, tel que modifié.

L’honorable André Pratte : Honorables sénateurs, à ce stade-ci du débat, je crois que nous pouvons nous abstenir de citer des statistiques, des rapports et des études. Nous sommes parfaitement au courant du carnage causé sur nos autoroutes et nos routes par l’alcool et la drogue. Nous devons faire davantage pour empêcher les personnes irresponsables de conduire un véhicule lorsque leurs facultés sont affaiblies.

Le projet de loi C-46 offre aux policiers et aux procureurs de la Couronne des outils supplémentaires et plus efficaces pour ce faire.

[Français]

Le projet de loi C-46 a été déposé en même temps que le projet de loi C-45, le projet de loi sur le cannabis. Cependant, le projet de loi serait nécessaire même si le gouvernement ne proposait pas de légaliser le cannabis. Des Canadiens conduisent sous l’effet de drogues aujourd’hui. Ils conduisent ivres aujourd’hui. Ils mélangent drogues et alcool et prennent le volant aujourd’hui. C’est pour cette raison que le gouvernement a décidé d’agir avant même la présentation du projet de loi C-45.

Le précédent gouvernement avait déposé, en 2015, le projet de loi C-73, qui proposait des mesures qu’on retrouve aujourd’hui dans le projet de loi C-46. Nous savons aussi que, il y a deux ans, notre collègue, le sénateur Carignan, a été un pionnier en présentant le projet de loi S-230, qui proposait le recours aux appareils de détection de drogues, une mesure que l’on retrouve dans le projet de loi C-46. À l’époque, l’honorable sénateur avait déclaré ce qui suit, et je cite :

L’objectif du projet de loi est de nous permettre d’agir dès maintenant, qu’il y ait légalisation ou non. L’enjeu est extrêmement important à l’heure actuelle.

[Traduction]

La principale difficulté, c’est qu’il est plus difficile d’enquêter et d’intenter des poursuites dans les affaires de conduite avec facultés affaiblies par la drogue. Elles donnent moins souvent lieu à des accusations que les affaires de conduite avec facultés affaiblies par l’alcool, et il faut deux fois plus de temps pour qu’elles soient traitées par les tribunaux. La principale raison de cet écart, c’est l’absence d’appareils de détection lors de contrôles routiers et de limites légales pour les drogues. Avec de tels appareils et des paramètres établis, il est beaucoup plus facile d’établir des motifs raisonnables pour un test sanguin, puis d’établir ensuite qu’une infraction a été commise. C’est pourquoi le projet de loi C-46 autorisera la police à utiliser des appareils de dépistage par prélèvement de salive lors de contrôles routiers. C’est aussi la raison pour laquelle le projet de loi et le règlement afférent établiront des limites maximales de THC équivalentes à la limite de 80 milligrammes d’alcool que nous connaissons bien.

D’aucuns diront que, étant donné les caractéristiques du cannabis et les incertitudes scientifiques qui demeurent, ces limites — soit 2 et 5 nanogrammes par millilitre de sang — sont arbitraires. Néanmoins, elles ont été fixées en fonction des meilleures connaissances scientifiques disponibles rassemblées par le Comité drogues au volant de la Société canadienne des sciences judiciaires.

(1420)

Des études citées par le comité, et ce sont les seules études que je citerai aujourd’hui, ont montré que les conducteurs ayant même un taux faible de THC dans leur organisme étaient plus susceptibles d’être à l’origine d’un accident que les conducteurs n’ayant consommé ni drogue ni alcool. Il est essentiel de comprendre que ces niveaux ne seront pas mesurés sur le bord de la route. Ils feront plutôt l’objet d’une évaluation au poste de police dans les deux heures suivant l’arrêt du conducteur. Pendant le contrôle routier, le conducteur sera soumis à un test au moyen de l’appareil de détection, dont le seuil sera établi à 25 nanogrammes de THC.

Au Comité des affaires juridiques, un témoin expert, le Dr Graham Wood, d’Altasciences Clinical Research, a affirmé ce qui suit :

Dans toutes les recherches que j’ai vues, je ne crois pas qu’il y ait eu un cas où une personne avec un taux de 25 n’avait pas les facultés affaiblies.

Par conséquent, avant qu’on lui demande de subir un test sanguin qui sera admissible en cour, on saurait déjà que le conducteur a, selon toute probabilité, consommé du cannabis récemment et qu’il a les facultés affaiblies. Si ce n’était pas le cas, il n’aurait pas échoué au test de dépistage routier. Donc, les limites prescrites simplifieront grandement le dépôt d’accusations contre les conducteurs aux facultés affaiblies par la drogue en plus d’avoir un effet dissuasif tout aussi efficace que celui de la limite de 0,08 sur la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool.

Un grand nombre des modifications proposées par le projet de loi C-46 n’ont rien à voir avec le cannabis, mais visent plutôt l’alcool, qui demeure la principale menace sur nos routes. Par exemple, le projet de loi éliminerait ce qui est appelé la défense « du dernier verre » en modifiant l’intervalle de temps durant lequel l’infraction peut être commise. Ce ne serait plus au moment de la conduite, mais dans les deux heures suivant la conduite. Cette modification limiterait également la défense « du verre d’après ». Ces deux types de défense ont été utilisés à outrance au fil des ans.

Les peines pour conduites avec facultés affaiblies seront plus sévères. La peine maximale pour toutes les infractions liées aux transports passera de 18 mois à 2 ans moins 1 jour, après déclaration de culpabilité par procédure sommaire, et à 10 ans si l’auteur de l’infraction est poursuivi par mise en accusation.

Plusieurs modifications visent à faciliter l’établissement de la preuve quant à la concentration d’alcool dans le sang, un élément qui a mené à bien des litiges au fil des ans. Encore une fois, l’objectif est de simplifier les enquêtes et les poursuites en matière de conduite avec facultés affaiblies.

Honorables sénateurs, lundi soir, notre estimé collègue, le sénateur Joyal, nous a invités à mettre nos émotions de côté dans l’étude de mesures législatives comme celle dont nous parlons aujourd’hui.

[Français]

Chers collègues, je vous assure que, même si j’ai perdu un ami proche dans un accident de la route causé par un conducteur ivre et que j’ai vu de très près les dégâts épouvantables qu’une telle tragédie peut causer à une famille, ma décision d’appuyer le projet de loi C-46 est purement rationnelle.

[Traduction]

Je suis certain que nombreux sont ceux parmi vous qui ont déjà vécu une telle expérience et qui, malgré tout, sont en mesure de laisser leurs sentiments de côté et d’effectuer un second examen objectif.

Des centaines de Canadiens meurent chaque année d’une cause évitable et je crois que, si on réfléchit bien au problème de la conduite avec facultés affaiblies, on en vient inévitablement à la conclusion que des mesures supplémentaires sont immédiatement requises. C’est la conclusion à laquelle en était venu le gouvernement précédent et c’est à cette même conclusion qu’en est venu le gouvernement actuel. C’est la raison pour laquelle, à mon humble avis, il faut appuyer le projet de loi C-46. C’est la chose la plus raisonnable et rationnelle à faire. Merci.

L’honorable Gwen Boniface : Je suis heureuse de prendre part au débat à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport) et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

Le projet de loi C-46 propose des changements au droit pénal qui sont nécessaires en matière de conduite avec facultés affaiblies. Il s’agit de l’une des plus importantes réformes des 50 dernières années en la matière. C’est une évolution, et non une révolution, et elle est tout à fait justifiée. Malgré des dizaines d’années d’éducation du public et d’attention médiatique, la conduite avec facultés affaiblies est demeurée la principale cause de décès attribuable à un acte criminel dans notre pays et l’un des motifs d’inculpation les plus fréquents devant les tribunaux canadiens. Si vous me passez l’expression, je vous dirais que trop de Canadiens sont durs de comprenure.

La ministre de la Justice a déclaré à plusieurs reprises que l’objectif premier de ce projet de loi est de sauver des vies. On pense que, conjugué à d’autres efforts de prévention et d’éducation entrepris par le gouvernement, le projet de loi C-46 nous permettra de faire des progrès en vue de mettre fin au carnage ou, du moins, de réduire considérablement les pertes de vie et les blessures qui nous brisent le cœur et qui sont inutilement causées sur les routes du pays, tous les jours, par la conduite avec facultés affaiblies.

Le projet de loi C-46 est le résultat de nombreuses années de consultation et de discussion ainsi que d’une forte mobilisation des parlementaires. Il contient des éléments de projets de loi que le Parlement a étudiés par le passé, y compris l’ancien projet de loi C-73, qui a été présenté par le gouvernement précédent, au cours de la dernière législature. De plus, le projet de loi C-46, dans sa version amendée, nous propose de permettre l’utilisation des appareils de dépistage par prélèvement de salive pour détecter la présence de drogue affaiblissant les facultés du conducteur. C’est une mesure qui était prévue dans le projet de loi sénatorial d’intérêt public S-230, parrainé par notre collègue, le sénateur Carignan. Le projet de loi C-46 a été conçu à partir des projets de loi antérieurs afin d’en faire une proposition plus solide et mieux ficelée.

Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a examiné tout ce que propose le projet de loi C-46. Nous avons entendu plus de 50 témoins au fil de plus d’une douzaine de réunions tenues depuis que le projet de loi a été renvoyé au comité, soit depuis le 31 janvier. Le comité a adopté quelques amendements modifiant le projet de loi, et j’en parlerai plus tard.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-46 vise à modifier les dispositions relatives aux moyens de transport contenues dans le Code criminel afin de simplifier la définition des infractions et de renforcer la loi en ce qui a trait à la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue ou par l’alcool. L’un des enjeux ayant particulièrement intéressé le comité est celui de l’approche qui sous-tend le projet de loi concernant la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue. Je voudrais parler de cette question en premier, puis je traiterai plus généralement des modifications des dispositions relatives aux moyens de transport.

Comme tout le monde le sait ici, la conduite avec facultés affaiblies, que ce soit par l’alcool ou par des drogues, reste un problème grave. Comme la plupart des sénateurs le savent, la police dispose d’outils pour constater les faits. Ainsi, un agent de police qui a un motif raisonnable de croire que quelqu’un conduit sous l’effet d’une drogue ou de l’alcool peut lui faire subir sur place un test de sobriété normalisé.

En outre, il peut exiger du conducteur, s’il a des motifs raisonnables de croire que sa capacité de conduire est altérée par une drogue, qu’il se soumette à une évaluation de reconnaissance de drogues, qui est effectuée au poste de police. La procédure consiste à recueillir et à analyser des substances corporelles afin de confirmer la présence de drogues. Les agents de police pourront continuer d’utiliser ces techniques d’enquête, autorisées depuis 2008 en vertu du Code criminel, pour détecter les conducteurs drogués.

Pour situer les choses dans leur contexte, lorsque le gouvernement précédent a instauré le régime d’évaluation de reconnaissance des drogues, il a dégagé 2 millions de dollars pour financer la formation des agents d’application de la loi. Le projet de loi C-46 vient renforcer ces mesures en autorisant la police à utiliser des outils qui lui permettra d’établir si quelqu’un a consommé une drogue affaiblissant les facultés avant de prendre le volant. Un important budget est prévu pour financer l’achat de ces outils et la formation en matière de détection des drogues des services de police dans l’ensemble du pays.

En vertu du nouveau régime, l’agent qui a un motif raisonnable de soupçonner qu’un conducteur est drogué serait autorisé à exiger un échantillon de liquide buccal aux fins d’analyse par un appareil de dépistage en plus, ou à la place, du test de sobriété normalisé. Un résultat positif de l’appareil signalant la présence de certaines drogues dans le corps du conducteur fournirait à l’agent l’information dont il a besoin pour poursuivre l’enquête.

Dans la mesure où le taux de THC diminue rapidement dans l’organisme, nous avons grandement besoin d’un tel instrument qui permet de le détecter rapidement. Il sera très utile pour améliorer l’application des dispositions sur la conduite avec facultés affaiblies par la drogue.

Fort des résultats obtenus l’an dernier par le programme d’essai des appareils de détection de drogues, qui était mené par Santé publique Canada et la GRC, et dans d’autres pays, où ces appareils se sont aussi avérés efficaces, le Comité drogues au volant de la Société canadienne des sciences judiciaires — le conseiller scientifique du gouvernement dans le domaine de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue — évalue actuellement les appareils qui pourraient être utilisés au Canada. Lorsque ce comité conclura qu’un appareil de détection donné répond aux critères d’évaluation rigoureux, il en fera la recommandation à la procureure générale. Le gouvernement tient à ce que ce processus se fasse le plus rapidement possible.

Comme il s’agit de sociétés cotées en bourse, je ne peux pas parler précisément des appareils évalués et du degré d’avancement de leur évaluation, mais je peux dire aux sénateurs que le processus va bon train. Comme c’est le projet de loi C-46 qui régit l’autorisation de ces appareils, plus le projet de loi recevra rapidement la sanction royale, plus la procureure générale pourra vite les autoriser afin que les services de police puissent s’en procurer et donner les formations nécessaires. Nous rendrons de grands services aux corps policiers en adoptant ce projet de loi. D’ici là, les policiers continueront d’utiliser les moyens actuels de détecter les personnes qui conduisent alors que leurs facultés sont affaiblies par la drogue, et ils profiteront de l’augmentation des ressources qui sont consacrées à la formation.

Le comité sénatorial a d’ailleurs entendu dire qu’on déploie actuellement de grands efforts pour que les policiers de toutes les régions du pays puissent recevoir la formation nécessaire pour administrer les tests normalisés de sobriété et devenir des experts en reconnaissance des drogues. En fait, la formation d’experts en reconnaissance de drogue qui était donnée aux États-Unis se donne maintenant au Canada. Lorsqu’elle a comparu devant le Comité de la défense nationale le 30 mai, la commissaire Lucki a répondu à une question de la sénatrice Griffin en disant ce qui suit :

Il y a deux semaines, nous avons pu remettre des attestations à certaines personnes dans le cadre d’un cours qui s’est donné à Vancouver.

(1430)

Dans son témoignage devant le comité, le ministre de la Sécurité publique a dit que le gouvernement investissait 274 millions de dollars dans la formation des forces de l’ordre, dont 161 millions de dollars expressément en lien avec la conduite avec facultés affaiblies pour, entre autres choses, apprendre aux agents de police de première ligne à reconnaître les signes et les symptômes de la conduite avec les facultés affaiblies.

Le projet de loi C-46 établit trois nouvelles infractions pénales relativement à certaines concentrations de drogue dans le sang interdites dans les deux heures suivant la conduite. L’infraction dont serait accusé le conducteur serait fondée sur la concentration de la drogue présente dans son sang.

La première, une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, s’applique aux cas où le taux se situe entre 2 et 5 nanogrammes de THC par millilitre de sang.

Pourquoi une infraction à cette concentration? Elle est fondée sur une orientation judicieuse des politiques publiques voulant que les Canadiens ne doivent pas prendre le volant quand ils ont pris de la drogue. Elle tient compte du fait que, comme l’indique le Comité des drogues au volant dans son rapport, même avec un taux inférieur à 2 ou à 5 nanogrammes par millilitre, les facultés peuvent être affaiblies. Sans formuler de recommandation, il conclut ceci :

[…] l’établissement d’une limite légale de concentration de THC dans le sang de 2ng/mL serait la mesure la plus prudente à prendre, dans un intérêt de sécurité publique.

Donc, bien que la concentration de drogue dans le sang pour cette première infraction ne signifie pas clairement que les facultés sont affaiblies dans tous les cas, il s’agit d’une mesure de précaution qui sauve des vies.

Le nombre de cas de conduite avec facultés affaiblies par la drogue ne cesse d’augmenter depuis 2009. Il faut mettre un frein à cette tendance. Autrement dit, les Canadiens doivent savoir qu’il faut éviter de prendre le volant avoir pris de la drogue parce que toute concentration de drogue affaiblissant les facultés dans le sang pose un risque pour la sécurité publique. D’Arcy Smith, toxicologue au Comité des drogues au volant, a déclaré en réponse à une question du Comité des affaires juridiques que, en tant que toxicologue, il pense qu’il est logique d’établir une politique publique selon laquelle une personne ne devrait pas conduire un véhicule après avoir consommé de la drogue.

Cette approche de précaution figure maintenant dans le préambule du projet de loi grâce à un amendement apporté par le comité. Elle souligne manifestement le fait que la sécurité publique et la précaution font partie des objectifs sous-jacents de cette infraction. Il s’agit d’un ajout important au préambule. Les données probantes révèlent que l’usage du cannabis est associé à une augmentation des risques d’accident de la route. Dans l’ensemble, les études ont établi que le THC affaiblit la capacité de conduire un véhicule. En conséquence, ces infractions en matière de drogue sont nécessaires pour réduire le risque d’accident que présentent les conducteurs drogués, même lorsque, selon certaines personnes, les niveaux de THC sont « faibles ». C’est le lien qui existe avec la sécurité publique.

Il y aurait aussi deux infractions mixtes en matière de drogue : une pour les cas où on détecte uniquement des drogues affaiblissant les facultés, et une autre pour les cas où on détecte à la fois ces drogues et de l’alcool. Les infractions mixtes sont punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité ou par mise en accusation, selon le degré de gravité.

L’infraction mixte touchant la présence de drogues seulement s’appliquerait aux cas où un conducteur a 5 nanogrammes ou plus de THC dans le sang ou toute concentration détectable de l’une ou l’autre des sept drogues suivantes : la cocaïne, le LSD, la méthamphétamine, l’héroïne, la kétamine, le PCP et la drogue appelée couramment « champignons magiques ».

Une huitième drogue, le GHB, aurait une concentration limite de 5 milligrammes par litre pour tenir compte du fait que le corps humain peut produire lui-même cette drogue à de faibles niveaux.

L’autre infraction mixte touche une combinaison de drogue et d’alcool. Elle s’appliquerait aux cas où un conducteur a au moins 2,5 nanogrammes de THC par millilitre de sang, ainsi que 50 milligrammes ou plus d’alcool par 100 millilitres de sang. Avec cette infraction, on reconnaît que la consommation simultanée de drogue et d’alcool intensifie l’affaiblissement des facultés.

Pour ces infractions mixtes, les concentrations à partir desquelles les drogues sont interdites sont fondées sur deux principes : les concentrations pour lesquelles il serait normal de s’attendre à ce qu’elles causent l’affaiblissement des facultés de conduire et le fait que ce sont des drogues illicites dont l’usage par les conducteurs est répandu et qu’elles affaiblissent les facultés.

Honorables sénateurs, on a beaucoup discuté du fait que le taux à partir duquel les drogues sont interdites n’est pas énoncé dans la mesure législative, mais qu’il est plutôt établi dans les règlements. Il n’existe aucun fondement juridique disant que cela ne peut pas se faire. En fait, selon des sources, cela peut se faire. La population sera sensibilisée à l’égard de tout changement aux règlements, comme cela se fait pour les modifications législatives.

De plus, l’établissement de ces concentrations dans les règlements est conforme à l’approche adoptée dans d’autres pays étrangers, au Royaume-Uni et en Norvège précisément. En effet, ces pays ont créé des infractions en soi pour 16 et 20 drogues respectivement, par voie de règlements.

Cette approche permet au gouvernement actuel — et aux gouvernements suivants — de réagir rapidement à l’évolution de la recherche sur les drogues affaiblissant les facultés et à l’apparition de nouvelles drogues. Essentiellement, il est beaucoup plus facile de modifier les règlements que de présenter une nouvelle mesure législative chaque fois qu’une drogue doit être ajoutée ou que de nouvelles données scientifiques sont publiées, ce qui arrivera nécessairement. Un régime réglementaire évite de créer une infraction criminelle pour chaque drogue, ce qui serait le cas autrement.

Il est déjà possible d’observer cette situation dans la législation sur les armes à feu et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances au Canada.

La recherche sur les effets affaiblissant des drogues sur les facultés est beaucoup plus complexe que celle sur les effets affaiblissant de l’alcool. En fait, l’alcool est le point discordant dans ce domaine en raison de sa simplicité. C’est vrai tant pour dépister les drogues chez les conducteurs que pour établir que les facultés d’un conducteur sont affaiblies. Cependant, il ne faut pas déclarer forfait et laisser tomber notre responsabilité de sauver des vies. Ce sera un parcours législatif, et le point de départ est ici.

Amy Peaire, présidente du Comité des drogues au volant, a fait la mise en garde suivante au comité :

Il est important de comprendre qu’il existe une grande diversité de drogues, y compris les médicaments en vente libre, les médicaments d’ordonnance et les drogues illicites, qui peuvent nuire à la conduite de différentes manières et qui sont toutes couramment détectées chez les personnes soupçonnées de conduite avec facultés affaiblies au Canada. Ces drogues peuvent influer sur la capacité de conduire d’une personne de différentes manières, selon différentes concentrations, et l’affaiblissement des facultés qui en découle peut dépendre d’une diversité de facteurs pharmacologiques [...] Ainsi, nous devons faire attention de ne pas simplifier à outrance la conduite avec facultés affaiblies par la drogue en nous attendant à ce qu’elle soit tout à fait semblable à la conduite avec facultés affaiblies par l’alcool ou en considérant que toutes les drogues font partie d’une seule catégorie.

Par ailleurs, lors de son témoignage devant le comité sénatorial, la ministre de la Justice a reconnu cet enjeu et a indiqué que le gouvernement se fie aux preuves scientifiques qui sous-tendent la mesure législative.

La recherche sur les drogues affaiblissant les facultés est complexe, mais il faut reconnaître que la proposition du gouvernement de créer des infractions est axée sur les données scientifiques actuelles et sur une politique publique judicieuse. La complexité de la question de l’affaiblissement des facultés par la drogue n’a pas empêché de nombreux pays de créer des infractions liées à la drogue. Mentionnons notamment la Suède, la France, la Belgique, le Portugal et certains États américains et australiens.

Comme le savent les honorables sénateurs, le projet de loi C-46 contient bien davantage que des dispositions concernant la conduite avec facultés affaiblies par la drogue. En effet, cette mesure législative abroge toutes les infractions routières actuellement prévues pour n’en conserver que certaines, et elle simplifie le régime pénal s’appliquant à la conduite pour le remplacer par un cadre juridique plus cohérent. On prévoit que cette mesure aura un effet dissuasif accru et qu’elle simplifiera les enquêtes et l’établissement de preuves liées aux infractions de conduite avec facultés affaiblies. Qui plus est, on estime également que nombre de changements amélioreront l’efficience des enquêtes et, par ricochet, réduiront les délais judiciaires.

Le projet de loi propose notamment de faciliter l’établissement de l’alcoolémie d’un conducteur. Si la Couronne peut prouver hors de tout doute raisonnable que certaines mesures ont été prises — par exemple, que l’instrument utilisé au poste de police était approuvé et correctement calibré avant chaque alcootest —, le taux d’alcool dans le sang est alors établi de manière concluante.

En outre, le projet de loi propose d’éliminer un moyen de défense très troublant fondé sur les principes de la common law, appelé défense du dernier verre et dont a parlé mon collègue, le sénateur Pratte. Dans cette défense, le conducteur affirme avoir consommé beaucoup d’alcool juste avant, ou au moment, de prendre le volant, ce qui fausse les résultats du test d’haleine puisque l’alcool n’a pas encore été intégralement absorbé. C’est bien imprudent de décider de conduire en pensant pouvoir rentrer à la maison avant que l’affaiblissement des facultés ne se produise.

Le projet de loi vise à limiter également la défense du verre d’après, qui permet à un conducteur de contester le résultat du test d’haleine au motif qu’il a consommé de l’alcool après avoir été arrêté par la police, mais avant de se soumettre au test. Cela arrive habituellement après une collision. Le conducteur prétend avoir été secoué et avoir bu pour se calmer. Cette défense s’apparente elle aussi à de l’obstruction, car elle rend beaucoup plus difficile pour la Couronne d’établir la concentration d’alcool et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle est utilisée. Comme la juge de la Cour suprême L’Heureux-Dubé l’a souligné dans l’affaire R. c. St. Pierre :

Dans la plupart des cas, au surplus, il y a tout lieu de soupçonner que le fait de boire après avoir conduit (ou simplement d’affirmer qu’on l’a fait) est un acte malveillant destiné à déjouer les policiers enquêteurs. Tous ces cas, à tout le moins, dénotent un haut degré d’irresponsabilité et une insouciance cavalière à l’égard de la sécurité d’autrui et de l’intégrité du système judiciaire. Notre Cour ne doit pas encourager une telle conduite ou, à tout le moins, lui conférer quelque légitimité que ce soit.

Le projet de loi prévoit une exception pour « le verre d’après consommé innocemment », c’est-à-dire consommé après la conduite, alors que la personne n’avait aucune raison de penser qu’elle serait soumise à un test d’haleine ou à un test sanguin. Dans ce cas, il n’y aurait pas d’infraction. Comme l’indique la ministre dans son énoncé concernant la Charte, les dispositions :

[…] avec une exception pour la consommation innocente après avoir conduit […]

Éliminer la défense du dernier verre et limiter celle du verre d’après témoignent du souci d’assurer la sécurité publique qui sous-tend le projet de loi.

Le projet de loi C-46 codifie la jurisprudence — R. c. Stellato — concernant l’accusation de conduite avec facultés affaiblies afin de préciser que « tout degré » d’affaiblissement de la capacité de conduire constitue une infraction. L’infraction liée à une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes par 100 millilitres de sang devient une infraction liée à une alcoolémie de 80 milligrammes ou plus par 100 millilitres de sang.

(1440)

Le projet de loi tient également compte des besoins des conducteurs avec facultés affaiblies en matière de réadaptation. Avec le consentement de la Couronne, le tribunal peut reporter la détermination de la peine lorsque le délinquant n’a causé aucune mort ou lésion corporelle afin qu’il puisse participer à un programme de traitement agréé par la province. Après avoir réussi le programme, le délinquant peut recevoir une peine inférieure à la peine minimale et éviter l’ordonnance d’interdiction. Le temps d’attente pour l’inscription à un programme d’utilisation d’antidémarreurs éthylométriques est réduit afin que les délinquants primaires n’aient pas à attendre du tout. Il est prouvé que les antidémarreurs éthylométriques réduisent la récidive.

Je signale que, après son étude, le comité sénatorial a apporté d’autres amendements, qui se sont ajoutés à l’amendement au préambule mentionné plus tôt.

Premièrement, un problème se posait avec l’analyse du rétrocalcul visant à déterminer ce qu’aurait été l’alcoolémie d’une personne lorsque le premier échantillon d’haleine ou de sang est prélevé plus de deux heures suivant la conduite. Malheureusement, le libellé technique de l’article contrecarrait l’intention du Parlement visant à permettre aux tribunaux d’effectuer le rétrocalcul sans avoir besoin de faire appel à un toxicologue dans certains scénarios. L’amendement a réglé le problème.

Deuxièmement, le projet de loi a été modifié de manière à ce que les déclarations que les conducteurs sont tenus de donner au titre des codes de la route provinciaux soient admissibles sur l’éthylomètre approuvé ou un appareil de détection approuvé utilisé pendant des contrôles routiers.

Troisièmement, le projet de loi C-46 a été modifié afin qu’il faille seulement déclarer les messages indiquant une exception ou une erreur qui sont produits par l’éthylomètre approuvé au lieu de renseignements non pertinents, comme les messages d’attente et de traitement.

Quatrièmement, l’article 38 a été amendé de façon à inclure un sous-groupe d’analystes qui ne se trouve pas dans la version initiale du projet de loi C-46. Cela garantit simplement que certains analystes qui sont actuellement désignés dans le Code criminel continueront de l’être après la mise en œuvre du projet de loi.

Ces amendements effectués par le Sénat sont de nature passablement technique, mais n’en sont pas moins importants. Selon moi, ils ont amélioré le projet de loi. Ils précisent les intentions du législateur et rationaliseront les procédures judiciaires. J’y suis tout à fait favorable.

Si ce projet de loi est adopté, les dispositions relatives à la conduite avec facultés affaiblies par la drogue entreront en vigueur dès la sanction royale pour que les mesures de contrôle plus strictes puissent être mises en œuvre.

Mesdames et messieurs les sénateurs, ce projet de loi n’est pas nouveau. Nous en avons vu diverses moutures par le passé. Les meilleures dispositions des projets de loi C-73 et S-230 ont été incluses dans le projet de loi C-46, de manière à ce qu’il soit plus complet et plus efficace pour améliorer la sécurité routière. Je tiens à répéter que la conduite avec facultés affaiblies est l’accusation la plus fréquemment portée devant les tribunaux canadiens, ce qui les surcharge de travail, et que c’est aussi la cause principale de décès attribuable à une infraction criminelle au pays.

Les mesures contenues dans le projet de loi C-46 rendront les routes plus sûres. Appuyer ce projet de loi est une façon de souscrire à une évolution de la loi qui a pour but de donner aux policiers les moyens dont ils ont besoin pour repérer les conducteurs aux facultés affaiblies et qui a aussi pour but de fournir aux tribunaux une méthode plus cohérente pour traiter le très grand nombre d’affaires relatives à cette partie du Code criminel.

Je vous remercie beaucoup de m’avoir écoutée et je vous demanderais d’adopter ce projet de loi.

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je serai très brève, comme le disait le sénateur Baker.

Premièrement, je voudrais préciser que je me suis consacrée au projet de loi C-45 plutôt qu’au projet de loi C-46. Lorsque j’ai examiné rapidement le projet de loi C-46, j’ai cru sincèrement que les dispositions sur le dépistage obligatoire d’alcool concernaient également toutes les drogues. Par conséquent, je ne me faisais pas de souci jusqu’à ce que, grâce aux bons offices du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, je me mette à m’intéresser au dépistage obligatoire d’alcool.

C’est l’une des raisons pour lesquelles je voulais prendre la parole. Certains nous disent que d’autres moutures de ce projet de loi ont existé auparavant. C’est vrai, mais le projet de loi sur le cannabis n’existait pas à l’époque. Les dispositions prévues actuellement sèment la confusion dans l’esprit du public sur les conditions à respecter pour pratiquer le dépistage obligatoire. Il faut bien le souligner. On peut prétendre que ces dispositions aideront le public, mais je suis plutôt d’avis qu’elles auront pour effet de semer la confusion dans l’esprit des gens, y compris parmi les policiers. En l’absence de définitions de ce qui est raisonnable, dans cette partie du projet de loi, la confusion pourrait s’installer dans les esprits. Par conséquent, je crains fort que nous ne soyons en train d’adopter des lois trop compliquées à comprendre pour la personne moyenne, ce qui inclut les policiers, dont les responsabilités ne cessent de s’alourdir de jour en jour.

Hier, au Comité des finances, on nous a dit qu’on allait débloquer des fonds pour la police dans le cadre de la légalisation du cannabis. À mon avis, le problème, c’est qu’il n’y a pas assez d’argent pour offrir la formation appropriée partout au Canada dans les petits corps policiers et à la GRC. Le fait que nous ayons choisi ce moment-ci pour discuter du dépistage obligatoire d’alcool m’inquiète un peu. Si ce débat n’avait pas eu lieu en même temps que la légalisation du cannabis, il aurait pu être différent.

Je tiens à joindre ma voix à celles du sénateur Joyal, de la sénatrice Batters et du sénateur Carignan, qui ont remis en question la constitutionnalité de cet article. Selon moi, les arguments présentés par ces honorables sénateurs ont beaucoup de poids. En fait, je crois que les tribunaux tiendront compte du débat qui a lieu dans cette enceinte. Je tiens à être associée à ce débat lorsqu’il sera utilisé par les tribunaux.

J’estime qu’il est de notre devoir de remettre en question la mesure législative et de ne pas l’accepter telle quelle pour que ce soient les tribunaux qui déterminent sa constitutionnalité. Jour après jour, semaine après semaine, année après année, nous affirmons qu’il est de notre devoir de déterminer si une mesure législative est constitutionnelle ou non. Nous ne pouvons pas dire : « Laissons les tribunaux décider. » C’est seulement dans des cas exceptionnels que nous devons laisser les tribunaux déterminer, d’entrée de jeu, la constitutionnalité d’une mesure. Il nous incombe d’adopter des lois qui peuvent résister aux contestations constitutionnelles de manière raisonnable.

S’il y a des experts dans les deux camps, je crois que nous sommes ici pour utiliser notre jugement afin de déterminer si la mesure législative est constitutionnelle. Je comprends tout à fait que le sénateur Gold et le sénateur Wetston aient une opinion différente. Néanmoins, cela n’empêche pas certains sénateurs de croire que la mesure législative est inconstitutionnelle. Je n’en dirai pas plus à ce sujet.

Je suis très préoccupée par la question des contrôles aléatoires par la police. Les gens ne seront pas tous traités de la même façon. Un policier peut demander à un conducteur de se ranger sur le côté, et il n’y a aucun critère relatif au caractère raisonnable. C’est un pouvoir discrétionnaire presque absolu.

C’est quelque chose qui m’inquiète dans notre société. Les policiers doivent disposer d’un certain pouvoir discrétionnaire, mais des limites doivent aussi être fixées quant à leur droit d’effectuer des contrôles. Le problème est le suivant. Disons qu’on demande à un conducteur de se ranger sur le côté et qu’on lui fait subir un alcootest, ce que la sénatrice Boniface a souligné et expliqué en détail. Le conducteur peut avoir consommé de grandes quantités de drogue ou d’alcool. S’il réussit le test, toutefois, que se passe-t-il alors? Le policier est-il autorisé à aller plus loin? Pourquoi a-t-il demandé au conducteur de se ranger sur le côté pour commencer? C’est un problème.

Je crois qu’il y aura un moins grand nombre de condamnations. Ne vous y trompez pas, je veux que les conducteurs dont les facultés sont affaiblies par la drogue ou l’alcool soient retirés de la route, mais je crois aussi que cette disposition ne fera que nuire aux interventions de la police et soulèvera davantage la controverse. Je ne suis pas certaine qu’elle nous permettra d’atteindre l’objectif prévu par le gouvernement.

Ma principale préoccupation est la suivante. Pourquoi avons-nous ajouté cette disposition sur le dépistage obligatoire, alors que la société est préoccupée par la question du profilage racial, que des personnes faisant partie de groupes minoritaires sont soumises à des interrogatoires, que ces personnes ont l’impression qu’on leur impose des choses et que nous sommes en train de parler de réconciliation? Nous ne devrions pas, en ce moment, accorder à quiconque un pouvoir pouvant donner lieu à une présomption de profilage racial.

Je sympathise beaucoup avec les policiers. J’ai formé des policiers, tant à l’école de police de la Saskatchewan qu’à la GRC. Assurer la sécurité et interpréter ces dispositions législatives sont parmi les fonctions les plus difficiles d’un policier.

On peut le faire dans une salle de classe et parler de ce que cela signifie lorsque les policiers doivent traiter avec le public. Tous les jours, ils doivent prendre des décisions qui exigent qu’ils exercent leur jugement en quelques fractions de seconde. Ce projet de loi leur compliquera encore plus la tâche. Or, s’ils ne font pas bien leur travail, il y aura plus de profilage racial. En quoi cela nous aidera-t-il?

(1450)

Donc, c’est la manière dont cette mesure sera mise en œuvre à long terme qui m’inquiète.

De l’argent a été prévu, à ce qu’on me dit, mais je peux vous assurer que ce ne sera pas suffisant. Cela m’inquiète que nous disions que nous voulons aider la société. Je crois que nous devrions tenir compte des risques de profilage racial et du fait que certaines personnes pourraient être empêchées de prendre le volant. Selon moi, cet article est loin d’être utile. Je crois que les autres dispositions sur la conduite avec facultés affaiblies que nous inscrivons dans la loi, et j’espère qu’il y en aura davantage sur le dépistage de drogues, permettront de mieux atteindre les résultats escomptés. Je crois qu’il faut miser sur la sensibilisation.

Il y a encore des gens qui ne voient rien de mal à prendre la route après avoir bu. Les jeunes, à qui le gouvernement envoie le message que le cannabis est acceptable, n’auront aucune raison de ne pas le croire s’il y met en plus son sceau d’approbation. Nous parlons très peu du cannabis au volant. À quand une campagne d’information là-dessus?

Je terminerai en disant que je refuse d’opposer deux principes fondamentaux de l’intérêt public sous prétexte de réconciliation. Je dis non au profilage racial.

L’honorable Vernon White : L’honorable sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Andreychuk : Absolument.

Le sénateur White : En fait, j’ai deux courtes questions à vous poser. En premier lieu, j’aimerais confirmer que le dépistage obligatoire d’alcool a été retiré du projet de loi C-46. Vous comprenez sûrement pourquoi je vous demande cela.

Deuxièmement, je rappelle qu’il n’est pas question d’interpellations aléatoires dans le projet de loi. La Cour suprême a eu à se prononcer sur ce concept — c’était en 1990, je crois —, et elle l’a jugé légal. Les policiers peuvent intercepter n’importe quel conducteur et procéder à une série de vérifications, y compris s’assurer qu’il est sobre.

La sénatrice Andreychuk : Je pense qu’il y a eu un renversement des rôles, ici. J’ai commencé par dire que je ne parlerai pas de l’aspect juridique, mais de l’aspect pratique.

Vous avez tout à fait raison, nous l’avons retiré. Je ne plaide pas tant auprès du Sénat qu’auprès du gouvernement du Canada, pour qu’il accepte ce que nous disons ici. Si j’ai pris un raccourci, c’est parce que je ne voulais pas abuser de votre temps…

Le sénateur White : Ne vous inquiétez pas.

La sénatrice Andreychuk : Je tenais à le clarifier.

Votre deuxième point est que, oui, le dépistage sera aléatoire, mais le terme aléatoire, tel qu’il est défini actuellement, ne veut pas dire « cibler des personnes en particulier ».

L’honorable Marc Gold : J’aimerais poser une courte question. Sénatrice Andreychuk, merci beaucoup de vos commentaires. Je respecte votre opinion et celle de tout le monde sur les aspects juridiques, et nous n’allons pas en parler. Par contre, ai-je bien compris que, à part cette question, vous approuvez le reste du projet de loi, surtout en ce qui a trait à la conduite avec facultés affaiblies par la drogue?

La sénatrice Andreychuk : Je l’approuve, mais il ne va pas assez loin. Nous sommes en train de légaliser le cannabis, mais nous n’avons pas accordé suffisamment d’attention aux conséquences. Je pense que le sénateur Carignan a parlé de ces questions, et je dois revenir et insister sur la sensibilisation. Nous n’avons même pas commencé à régler les conséquences liées à l’alcool. Nous commençons maintenant une expérience, mais je ne veux tout simplement pas expérimenter avec le public canadien. Cependant, en ce qui concerne les travaux du gouvernement relatif au projet de loi, oui, je les approuve.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Des voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)

La Loi électorale du Canada

Projet de loi modificatif—Adoption du vingt-sixième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

Le Sénat passe à l’étude du vingt-sixième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (Projet de loi C-50, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (financement politique), avec un amendement), présenté au Sénat le 14 juin 2018.

L’honorable Serge Joyal propose que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5b) du Règlement, je propose que le projet de loi modifié soit lu pour la troisième fois maintenant.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté.)

La Loi fédérale sur le développement durable

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Diane F. Griffin propose que le projet de loi C-57, Loi modifiant la Loi fédérale sur le développement durable, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c’est un honneur pour moi de prendre la parole aujourd’hui en qualité de marraine du projet de loi C-57, Loi modifiant la Loi fédérale sur le développement durable, à l’étape de la deuxième lecture.

Comme j’ai siégé à la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie, on peut dire que je m’intéresse depuis longtemps au développement durable. La table ronde avait pour mandat de conseiller le premier ministre.

La première version de la Loi fédérale sur le développement durable découlait d’un projet de loi d’initiative parlementaire présenté par l’honorable sénateur John Godfrey en 2007 et adopté en 2008, avec l’appui du premier ministre Stephen Harper. Cette loi a jeté les bases de la stratégie fédérale en matière de développement durable.

Le Comité de l’environnement et du développement de la Chambre des communes a reçu le mandat de revoir la Loi fédérale sur le développement durable. Dans le rapport unanime qu’il a déposé en juin 2016, il a donné des conseils et des recommandations qui ont beaucoup servi lors de l’élaboration du projet de loi C-57.

Ce projet de loi a été adopté à l’unanimité à l’autre endroit à l’étape de la troisième lecture. Il fournit le cadre nécessaire pour élaborer et mettre en œuvre la stratégie fédérale du Canada sur le développement durable. Il met le concept de développement durable à l’avant-plan de la réflexion des décideurs.

Le projet de loi C-57 mise sur ce que la stratégie a permis d’accomplir en faisant progresser le développement durable et en allant au-delà des simples rapports sur l’environnement. Il renforce aussi la reddition de comptes en obligeant, une fois par année, les organismes fédéraux à faire état aux comités parlementaires des progrès qu’ils ont accomplis.

Honorables sénateurs, nous savons tous à quel point le travail que font les comités est important. Je suis ravie que le gouvernement l’admette en présentant des mesures législatives qui donnent suite aux rapports des comités et en obligeant les organismes fédéraux à leur présenter des rapports. C’est une façon d’informer les parlementaires et, par le fait même, les Canadiens, des gestes que pose le gouvernement pour concrétiser le développement durable.

(1500)

Parmi les nouvelles dispositions du projet de loi C-57, plusieurs favoriseraient une transparence et une reddition de compte accrues. Ce qu’on mesure finit par se réaliser. C’est pourquoi l’un des principes présentés dans le projet de loi C-57 repose sur une approche axée sur les résultats et l’exécution, qui met l’accent sur l’élaboration d’objectifs et de stratégies pour les atteindre.

Les organismes fédéraux seront tenus de communiquer aux parlementaires des cibles précises et mesurables, un échéancier prévisionnel ainsi qu’un plan pour l’atteinte de chaque cible.

Grâce au principe axé sur les résultats et l’exécution et à l’emploi d’indicateurs pour les rapports d’étape, le projet de loi renforcerait la reddition de comptes dans le contexte de la stratégie fédérale de développement durable.

L’empreinte carbone du gouvernement fédéral est considérable, ce qui offre la possibilité de faire preuve d’un meilleur leadership. La Stratégie pour un gouvernement vert confirme que le gouvernement est résolu à réduire l’empreinte carbone de ses opérations et à les rendre plus résilientes au changement climatique. Le projet de loi donne explicitement au Conseil du Trésor le rôle d’élaborer des orientations ou des directives relativement à l’impact des opérations gouvernementales sur le développement durable.

La question du développement durable ne peut pas être confinée à un seul ministère ou organisme. Le nom de 26 ministères participants figure dans la loi, et 41 ministères et organismes ont contribué à la stratégie la plus récente, 15 d’entre eux y participant volontairement.

L’autre endroit a adopté un amendement visant à étendre la stratégie à plus de 90 ministères et organismes, notamment des organismes dont l’empreinte carbone est considérable, comme la Gendarmerie royale du Canada et le Service correctionnel du Canada.

Signalons que le projet de loi permet de modifier la liste des organismes, c’est-à-dire d’en ajouter et d’en retrancher, ce qui permettra de maintenir une approche pangouvernementale même si la situation évolue.

Honorables sénateurs, je tiens à aborder l’objet de la loi, plus précisément la disposition sur les obligations du Canada à l’échelle nationale et internationale dans le domaine du développement durable. Certaines personnes s’inquiètent qu’il ne soit pas question, dans la loi, des Objectifs de développement durable 2030 et des engagements du Canada dans le cadre de l’Accord de Paris. Aux termes des modifications qu’apporte le projet de loi C-57 à l’objet de la loi, on s’engage à tenir compte des obligations internationales actuelles et futures en matière de développement durable dans les stratégies gouvernementales élaborées au titre de la loi. Ainsi, les futures stratégies fédérales en matière de développement durable refléteront les obligations internationales lorsque cela s’imposera.

Il est justifié de les mentionner dans cette disposition plutôt qu’ailleurs dans la loi. Comme l’honorable John Godfrey l’a souligné, si les objectifs et les cibles avaient eux-mêmes été intégrés au texte de loi initial, il n’y aurait pas été question…

Son Honneur la Présidente intérimaire : Excusez-moi, sénatrice. Il y a beaucoup de conversations qui se déroulent en même temps. Si vous avez des choses importantes à discuter, je vous saurais gré de le faire dans l’antichambre. Sinon, veuillez avoir l’obligeance d’écouter le discours de la sénatrice Griffin.

La sénatrice Griffin : Merci. Je reprends le paragraphe.

Il est justifié de les mentionner dans cette disposition plutôt qu’ailleurs dans la loi. Comme l’honorable John Godfrey l’a souligné, si les objectifs et les cibles avaient eux-mêmes été intégrés au texte de loi initial, il n’y aurait pas été question des changements climatiques. La loi doit demeurer pertinente, même si on conclut d’autres ententes, fixe de nouvelles cibles et relève d’autres problèmes.

Le projet de loi répond également à une motion présentée par le sénateur Dawson, qui propose que le Sénat prenne note des objectifs de développement durable et encourage le gouvernement du Canada à en tenir compte dans l’élaboration des lois et l’établissement de politiques en matière de développement durable.

Le projet de loi C-57 prend appui sur les travaux entrepris dans le cadre de la Stratégie fédérale de développement durable pour atteindre les objectifs de développement durable axés sur l’environnement, notamment l’égalité entre les sexes, l’énergie propre et abordable, la consommation et la production responsables, la lutte contre les changements climatiques, la vie aquatique, la vie terrestre et les partenariats pour la réalisation des objectifs.

Le projet de loi reconnaît que le développement durable est fondé sur l’utilisation rationnelle des ressources naturelles, sociales et économiques. Il précise que le développement durable est un concept appelé à évoluer et présente des façons de le favoriser.

Le projet de loi C-57 augmente le nombre de représentants autochtones au conseil consultatif, qui passe de trois à six, afin de mieux refléter la variété des points de vue de l’ensemble du Canada. Le projet de loi exige aussi que le ministre tienne compte de certains facteurs démographiques lors des nominations au conseil.

Un amendement proposé par les conservateurs à l’autre endroit permet aux membres du conseil de recevoir un remboursement pour des dépenses raisonnables. Cela permettra aux membres du conseil de se rencontrer en personne au besoin.

Honorables sénateurs, la Loi fédérale sur le développement durable a eu un effet positif sur le développement durable à l’échelle fédérale, puisqu’elle a permis de promouvoir une approche transparente, responsable et pangouvernementale pour amener le gouvernement à remplir ses obligations internationales. À l’autre endroit, le Comité de l’environnement et du développement durable a cerné des aspects que le gouvernement peut améliorer; le projet de loi C-57 donne suite à ses recommandations.

En proposant de renouveler l’approche en matière de développement durable, ce projet de loi permet de s’appuyer sur le succès des programmes en place et de poursuivre les efforts à l’échelle du gouvernement pour promouvoir les pratiques exemplaires déjà en place.

Le projet de loi peut nous aider à réaliser notre vision commune axée sur un environnement sain, une économie durable et une meilleure qualité de vie pour tous les Canadiens.

À l’autre endroit, le projet de loi C-57 a été adopté à l’unanimité à toutes les étapes, ce qui montre à quel point il est largement appuyé par l’ensemble des députés de toutes les allégeances politiques.

J’ai tendance à voir ce projet de loi comme une mise à jour administrative visant à moderniser la loi actuelle. J’espère qu’on pourra le renvoyer rapidement à un comité. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Discours du Trône

Motion d’adoption de l’Adresse en réponse—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Jaffer, appuyée par l’honorable sénatrice Cordy,

Que l’Adresse, dont le texte suit, soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général du Canada :

À Son Excellence le très honorable David Johnston, Chancelier et Compagnon principal de l’Ordre du Canada, Chancelier et Commandeur de l’Ordre du mérite militaire, Chancelier et Commandeur de l’Ordre du mérite des corps policiers, Gouverneur général et Commandant en chef du Canada.

QU’IL PLAISE À VOTRE EXCELLENCE :

Nous, sujets très dévoués et fidèles de Sa Majesté, le Sénat du Canada, assemblé en Parlement, prions respectueusement Votre Excellence d’agréer nos humbles remerciements pour le gracieux discours qu’elle a adressé aux deux Chambres du Parlement.

L’honorable Robert Black : Honorables collègues, j’avais prévu prendre la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture du projet de loi d’exécution du budget au sujet du douzième rapport du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, et plus précisément sur l’agriculture et la partie 5 du projet de loi C-74. Cependant, étant donné qu’il a été adopté rapidement à l’étape de la troisième lecture plus tôt aujourd’hui, j’ai choisi de prononcer mon premier discours.

Comme vous le savez tous, je viens d’une région rurale de l’Ontario. Comme je suis nouveau au Sénat, je suis très enthousiaste à l’idée de me trouver ici. Je tiens à vous dire que j’y serai pour longtemps. Je voudrais vous présenter les observations suivantes.

Depuis plus de 30 ans, je m’implique dans le secteur agricole de l’Ontario, partout dans la province, et de tout le pays.

J’aimerais exprimer certaines inquiétudes que j’ai toujours par rapport aux points soulevés dans l’étude préalable du projet de loi C-74. Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, qui a étudié ces questions en profondeur, a rédigé un rapport qui a été déposé ici, plus tôt aujourd’hui.

(1510)

J’ai clairement entendu les préoccupations qui ont été soulevées par des intervenants, qui ont demandé que le gouvernement exempte les coûts des combustibles pour le chauffage et le refroidissement dans le domaine de l’agriculture de la redevance sur le carbone proposée dans la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Ils ont aussi réclamé d’inclure le propane et le gaz naturel dans la définition de « combustible agricole admissible » que donne la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, afin que ces combustibles soient exemptés de la redevance sur le carbone.

En outre, certains intervenants ont affirmé que les définitions actuelles prévues dans le projet de loi ne tiennent pas compte de la gamme complète des activités agricoles et de la machinerie utilisée dans la production agricole canadienne moderne.

Donnez-moi un instant pour vous faire part de certaines de mes observations et préoccupations. Ma première préoccupation vient du fait que, puisque le titre de la loi inclut les mots « gaz à effet de serre », les Canadiens pourraient présumer à tort que les serres sont, en quelque sorte, responsables de ce type de pollution. Il est fort regrettable que l’on appelle ces émissions des émissions de gaz à effet de serre parce qu’elles rendent l’atmosphère de la Terre semblable à celle d’une serre, alors qu’elles n’ont aucun lien particulier avec l’agriculture en serre. En fait, bon nombre de serres captent le dioxyde de carbone provenant des gaz naturels à combustion propre et le fournissent aux plantes qui s’y trouvent, ce qui permet de stimuler davantage la productivité de ces plantes.

Ma deuxième préoccupation se rapporte au fait que la définition actuelle de « machinerie agricole admissible » n’englobe pas les biens qui servent au chauffage ou au refroidissement d’un bâtiment ou d’une structure semblable, à des fins agricoles.

Comme l’avait signalé le Conseil canadien de l’horticulture, nous avons entendu dire au comité que l’agriculture primaire a besoin de chauffage pour les serres, les étables et les séchoirs à grains. Comme vous pouvez vous en douter, il est aussi nécessaire de refroidir les produits après la récolte. Or, ces bâtiments, ces structures et l’équipement qu’on y utilise sont inadmissibles, même s’ils sont essentiels à la production au Canada d’aliments, de fourrage et de fibres de haute qualité.

Si on ne change pas ces définitions, certains des secteurs agricoles les plus dynamiques, dont celui de la production de légumes de serre, n’auraient pas droit à l’exemption pour les fermes. Les agriculteurs de certaines provinces pourraient être davantage touchés que d’autres en raison des nombreuses sources d’électricité et, donc, des divers prix de l’électricité.

Pour mettre cela en perspective, il y a quatre provinces qui n’ont pas de taxe sur le carbone ni de système de plafonnement et d’échange, soit Terre-Neuve, l’Île-du-Prince-Édouard, la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick. Comme l’a dit le sénateur Mitchell plus tôt au Sénat :

Pour les agriculteurs, le gouvernement a précisé deux exemptions à la tarification de la pollution causée par le carbone partout où le filet de sécurité fédérale est mis en œuvre : premièrement, les émissions sans combustion, provenant par exemple du bétail, du travail du sol et de l’application de fertilisants et, deuxièmement, l’essence et le diesel utilisés à la ferme.

Toutefois, ce projet de loi exclut les biens qui servent au chauffage ou au refroidissement d’un bâtiment ou d’une structure semblable pour la production agricole.

Le Comité de l’agriculture et des forêts, dont je suis membre, a invité des représentants de l’industrie à comparaître lors de l’étude préalable du projet de loi C-74. Ils sont venus de bonne foi pour demander que les agriculteurs, quelle que soit leur province, aient droit aux mêmes exemptions, et que le projet de loi reflète la gamme complète d’activités agricoles et de machines utilisées dans la production agricole primaire canadienne moderne.

Ces demandes ont été reprises dans le douzième rapport du comité déposé au Sénat. Il est malheureux qu’aucun de ces amendements n’ait été repris dans le rapport du Comité des finances nationales.

La troisième question dont je voudrais parler est celle de la nécessité d’ajouter le propane et le gaz naturel à la définition de « combustible agricole admissible » afin qu’ils puissent également être exemptés. L’exemption prévue dans le projet de loi devrait s’appliquer à tous les combustibles, y compris le propane et le gaz naturel. Les agriculteurs en dépendent grandement.

Voici ce qu’a déclaré le président de la Fédération canadienne de l’agriculture, le 3 mai, lors de sa comparution devant le comité :

Le gaz naturel et le propane jouent un rôle très important dans la production, notamment pour le séchage des grains, afin d’en préserver la qualité et d’éviter qu’ils ne périssent avant leur commercialisation. Il y a aussi les serres qui utilisent beaucoup le gaz naturel pour le chauffage et comme source pure de CO2 pour favoriser la croissance des plantes dans un environnement contrôlé.

À l’instar du Conseil canadien de l’horticulture et de l’Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, la Fédération canadienne de l’agriculture est d’avis que toute utilisation de combustible à la ferme devrait être exemptée de la tarification du carbone.

Qui plus est, Markus Haerle, président de Grain Farmers of Ontario, a déclaré, cette semaine, dans le magazine Ontario Farmer, que les producteurs de grains de l’Ontario n’appuient pas la taxe sur le carbone. Il a ajouté que, d’après des estimations conservatrices, cette taxe entraînerait, pour les producteurs de grains uniquement, une augmentation des coûts en carburant agricole de 26 millions de dollars par année, et que ce chiffre devrait augmenter au fil du temps.

À l’Île-du-Prince-Édouard, de nombreux agriculteurs utilisent abondamment le propane principalement pour faire rôtir et extruder les haricots et faire sécher le grain.

Au Nouveau-Brunswick, cette taxe aura des répercussions considérables sur le refroidissement et le conditionnement des pommes, si l’exemption n’est pas supprimée, étant donné que, dans certaines exploitations, on utilise une combinaison d’électricité et de propane alors que, dans d’autres, on utilise aussi le gaz naturel.

Honorables collègues, je m’adresse à vous aujourd’hui en tant que sénateur représentant le Canada et, plus particulièrement, le secteur agricole. Je reconnais que les modifications prévues dans le projet de loi qui vient d’être adopté n’auront pas nécessairement de répercussions dans ma province, l’Ontario, à moins que le nouveau gouvernement provincial ne modifie l’actuel système de plafonnement et d’échange.

Cela dit, l’Ontario possède la plus grande industrie de la culture en serre au Canada. En effet, selon les évaluations, l’Ontario compte approximativement 200 producteurs qui cultivent 2 880 acres de terres sous serre et dont les activités représentent une valeur à la ferme de 826 millions de dollars et une valeur à l’exportation de 807 millions de dollars. On estime que la taxe sur le carbone a entraîné, en 2017, un coût additionnel de 10 millions de dollars pour les serriculteurs de l’Ontario.

Si le nouveau gouvernement de l’Ontario modifiait le système actuel de plafonnement et d’échange, la valeur à la ferme et la valeur à l’exportation des producteurs agricoles de l’Ontario qui utilisent le propane et le gaz naturel chuteraient car, si on leur retire cette exemption, ces producteurs du secteur primaire devront, eux aussi, assumer ces coûts supplémentaires.

Honorables sénateurs, le ministre des Finances a bel et bien confirmé, lors de la séance du 5 juin du Comité des finances nationales, que la définition de ce qui constitue une activité agricole sera la même dans le projet de loi que celle qu’emploie l’Agence du revenu du Canada. Voici ce qu’il a dit :

[…] la définition d’agriculteurs de l’Agence du revenu du Canada correspond à ce dont nous parlons. Nous avons vérifié. Il n’y a aucune différence entre ces définitions.

De plus, le sénateur Harder l’a confirmé dans la lettre qu’il a transmise au Sénat la semaine dernière.

Le ministre a confirmé que tous les agriculteurs seront assujettis à la même définition. Voici donc ma dernière question: pourquoi refusons-nous à quelques producteurs du secteur primaire certaines exemptions qui s’appliquent à eux dans d’autres dispositions du projet de loi?

Je vous remercie.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

L’étude sur les questions relatives à la création d’un système professionnel, cohérent et défini pour les anciens combattants lorsqu’ils quittent les Forces armées canadiennes 

Dix-neuvième rapport du Comité de la sécurité nationale et de la défense—Remplacement de la page couverture

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Honorables sénateurs, je prends la parole pour demander au Sénat la permission de remplacer le dix-neuvième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense sur la transition souvent difficile des soldats qui quittent les Forces armées canadiennes. Ce rapport a été déposé hier au Sénat, mais nous avons remplacé aujourd’hui la page couverture.

En raison d’un oubli regrettable, la page couverture originale présentait deux individus portant l’uniforme militaire américain. Un certain nombre de Canadiens ont déjà communiqué avec nous pour exprimer leur mécontentement concernant cette erreur, et à juste titre. Une telle erreur risque de détourner l’attention des questions très importantes que nous voulons mettre en lumière, comme la transition de la vie militaire à la vie civile, qui est toujours inutilement difficile et qui doit être réformée.

Nous sommes désolés de cette erreur, en particulier pour les hommes et les femmes militaires qui sont au service du Canada et pour ceux qui ont été, par le passé, honorés par leur pays. Ce rapport a été produit pour eux.

(Ordonné : Que la page couverture du dix-neuvième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, déposé auprès du greffier du Sénat le 13 juin 2018, soit remplacée.)

(1520)

[Traduction]

Projet de loi sur le cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique

Troisième lecture

L’honorable Leo Housakos propose que le projet de loi C-211, Loi concernant un cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, l’automne dernier, j’ai eu l’occasion d’entendre le discours du parrain du projet de loi C-211. Pour ceux qui n’ont jamais rencontré le député Todd Doherty, il s’agit d’un homme relativement costaud, mais doux, surtout quand il parle de l’état de stress post-traumatique et des témoignages qui l’ont poussé à rédiger le présent projet de loi. Il parle doucement, mais passionnément du nombre trop élevé de cas qui font les manchettes à propos des plus récentes victimes de cette horrible maladie, des gens qu’il rencontre et qui souffrent de terribles accès de douleur, de proches des victimes qu’il a rencontrés et de ceux qui ont perdu leur combat. J’ai également eu l’occasion, grâce au député Doherty, de rencontrer des parents, des époux et des enfants de ces victimes.

Nous avons perdu de nombreux premiers répondants. Nous en avons perdu trois rien qu’au cours des quatre ou cinq derniers jours. Nous avons perdu l’un de nos propres agents de sécurité à la Cité parlementaire en janvier dernier en raison de cette terrible maladie et de cette horrible situation. Il s’est enlevé la vie, lui qui, essentiellement, avait été victime de l’attaque de 2014 en cet endroit.

J’ai rencontré énormément de personnes qui souffrent de ce mal. La douleur est si apparente sur leur visage, dans leur voix et dans leur âme. Je songe aujourd’hui à Mary et Steven Rix. Ils ont assisté à la réunion du comité sénatorial lundi dernier pour entendre M. Doherty témoigner. Ils ont été présents à toutes les étapes depuis la rédaction du projet de loi, à la Chambre des communes comme au Sénat, faisant la navette depuis la région du Grand Toronto.

Lundi dernier, c’était différent. J’étais à peu près certain de ne pas les voir à la séance du comité. Je me suis dit que c’était seulement des témoignages au comité et qu’ils seraient là un autre jour, un jour plus important. J’avais tort, parce qu’ils étaient là, parmi la foule, pendant le témoignage du député Doherty. Ils n’auraient pas raté cela, ont-ils dit. Pourquoi cette journée était-elle différente? Elle était effectivement très différente. Il y avait un an exactement que leur fils s’était enlevé la vie. Leur fils était ambulancier paramédical. Il était également un père, un fils et un ami pour bien des gens.

Pour moi, Mary et Steven Rix sont devenus le symbole de cette mesure législative, comme bien d’autres Canadiens qui ont souffert. La famille du caporal Lionel Desmond est devenue le visage de cette situation. Nous connaissons tous l’histoire du caporal Desmond, qui a servi avec distinction dans les Forces armées canadiennes et qui, après avoir souffert énormément, s’est enlevé la vie. On ne peut que s’imaginer la profondeur de la détresse de cet homme, qui s’est enlevé la vie, mais qui a emporté également avec lui sa mère, son épouse et son enfant de 10 ans.

Malheureusement, des milliers et des milliers de familles et d’amis partout au Canada pleurent des êtres chers qui ont perdu la vie en raison d’un trouble de stress post-traumatique. Certaines personnes s’enlèvent la vie, d’autres ont recours à l’automédication et d’autres encore luttent quotidiennement pour obtenir l’aide dont elles ont si désespérément besoin. C’est là que la mesure législative intervient, chers collègues. Les policiers, les pompiers, les ambulanciers paramédicaux et les intervenants médicaux dans les forces armées sont là pour aider nos êtres chers et ils sont là pour nous aider dans des situations d’urgence. C’est maintenant à notre tour de veiller à ce qu’ils obtiennent l’aide dont ils ont besoin.

C’est ce que prévoit le projet de loi C-211. C’est le premier pas en vue de mettre en place une approche cohérente à l’échelle du pays, afin d’aider les personnes souffrant d’un trouble de stress post-traumatique. Ne vous méprenez pas. Ce projet de loi ne permettra pas de régler tous les problèmes du jour au lendemain. Il ne constitue pas le cadre de travail dont nous avons si désespérément besoin, mais c’est un bon point de départ en vue de l’élaboration de ce cadre. Le vrai travail commencera après l’adoption de la mesure législative. Voilà pourquoi il est si important que nous l’adoptions.

Je tiens à prendre un instant pour remercier mes collègues, et plus particulièrement la porte-parole pour ce projet de loi, la sénatrice Bernard, ainsi que les membres du Comité de la sécurité nationale et de la défense, qui ont étudié le projet de loi sans tarder et de manière respectueuse et posée. Je remercie notamment la présidente du comité, la sénatrice Boniface, et ses deux vice-présidents, les sénateurs Dagenais et Jaffer, d’avoir compris l’urgence de la situation et d’avoir fait un aussi bon travail. Je remercie en outre les têtes dirigeantes des groupes parlementaires du Sénat d’avoir uni leurs voix pour appuyer ce projet de loi. Merci aussi à tous les sénateurs qui se sont exprimés en faveur du projet de loi de manière aussi éloquente.

Je remercie tous ceux et celles dont les observations ont permis d’élargir la portée du projet de loi et de le rendre plus inclusif afin qu’aucune personne en état de stress post-traumatique ne soit oubliée. Je suis convaincu que le gouvernement en tiendra compte lorsqu’il organisera sa conférence nationale et qu’il fera le nécessaire pour que toutes les parties intéressées puissent se faire entendre.

J’aimerais aussi remercier nos collègues de l’autre endroit, et plus particulièrement le gouvernement, d’avoir adhéré à ce projet de loi et d’avoir travaillé avec nous afin que nous puissions faire ce bond de géant. Il arrive parfois que les divergences politiques et idéologiques s’effacent pour laisser place à quelque chose de plus grand, et c’est ce qui est arrivé dans ce cas-ci.

Je tiens à remercier tout spécialement le parrain du projet de loi, M. Todd Doherty, qui est juste là, derrière la barre. Je sais tout ce que cette mesure législative représente pour vous, Todd. M. Doherty s’est donné corps et âme pour que ce texte soit adopté. L’état de stress post-traumatique est une crise nationale, et ce projet de loi nous donne l’occasion de faire quelque chose.

Chers collègues, je suis au Sénat depuis maintenant plus de neuf ans. Comme nous le savons tous, les sénateurs doivent traiter toutes sortes de questions pressantes, étudier des budgets, jongler avec des chiffres, comprendre le jargon juridique, mais il arrive aussi, à l’occasion, que nous soyons saisis d’une mesure législative qui touche directement nos concitoyens. Je suis donc particulièrement fier d’avoir pu faire ma part, aussi minime soit-elle, parce que je sais que ce projet de loi apportera un tant soit peu de réconfort et de satisfaction à de nombreux Canadiens qui souffrent. Je vous remercie, chers collègues.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Souhaitez-vous en débattre, sénatrice Lankin?

L’honorable Frances Lankin : Honorables collègues, j’interviens aujourd’hui au nom de la sénatrice Bernard, qui est porte-parole pour cette mesure législative. Je vous fais part de ses observations dans ses propres termes :

[Au nom de l’honorable Wanda Elaine Thomas Bernard]

Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui à titre de porte-parole pour le projet de loi C-211, Loi concernant un cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique. Merci, sénateur Housakos, de l’action que vous avez menée à titre de parrain du projet de loi.

Après avoir étudié le projet de loi, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense a fait plusieurs observations. Je les appuie toutes. Celle qui vise à rendre le projet de loi C-211 plus inclusif est essentielle pour garantir que tous ceux qui souffrent de stress post-traumatique lié au travail puissent bénéficier de ce projet de loi. J’appuie l’observation sur le mot « particulièrement », qui permet d’expliciter les métiers couverts par le cadre. Cela permet d’inclure d’autres métiers à haut stress : infirmiers, psychologues, travailleurs sociaux et autres fournisseurs de soins de santé.

Le comité a fait remarquer que l’on consultera la Société canadienne de psychologie pour élaborer et diffuser les lignes directrices. Le comité propose d’utiliser l’expression « traumatisme liée au stress opérationnel », puisque les gens qui souffrent de dépression, de troubles anxieux, de troubles d’adaptation et de troubles liés à la consommation de substances en raison de leur milieu de travail à niveau de stress élevé seront concernés par le cadre.

Enfin, j’appuie l’observation selon laquelle les problèmes de santé mentale peuvent découler d’autres facteurs qui ne sont pas liés à l’exercice de la profession proprement dit, mais aux expériences vécues telles que le harcèlement et la violence. Ces observations sont importantes pour créer un cadre qui concernera tous ceux qui doivent faire face à des difficultés de santé mentale en milieu de travail.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à appuyer cette demande de cadre fédéral en matière de stress post-traumatique.

Si vous me le permettez, j’aimerais moi aussi remercier le parrain, la porte-parole et l’auteur du projet de loi. Je tiendrai certainement compte de votre souhait qu’on appuie le projet de loi. Merci.

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler du projet de loi C-211, Loi concernant un cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique.

(1530)

Je voudrais féliciter M. Doherty, l’auteur du projet de loi, pour l’excellent travail qu’il a accompli, ainsi que le sénateur Housakos, qui parraine le projet de loi, et la sénatrice Bernard, qui agit à titre de porte-parole.

Je voudrais commencer par dire que j’appuie l’esprit de ce projet de loi. L’état de stress post-traumatique est un problème répandu qui touche 7 ou 8 Canadiens sur 100 à un moment ou un autre de leur vie.

Le risque de souffrir de ce trouble est multiplié parmi les Canadiens dont l’environnement de travail est très stressant, comme c’est le cas pour les membres des Forces armées canadiennes ou de la Gendarmerie royale du Canada ainsi que pour les premiers intervenants, entre autres. Chaque jour, ces gens revêtent leur uniforme pour protéger, servir et soigner les Canadiens. Ils savent qu’ils seront témoins de tragédies tous les jours. Les Canadiens applaudissent ces gens pour leur travail héroïque, mais ceux-ci ne sont pas plus immunisés que nous contre le stress post-traumatique. Pour aider tout le monde à comprendre jusqu’à quel point les problèmes de santé mentale peuvent affecter durement ces héros, j’aimerais vous raconter une histoire.

Natalie Harris travaillait comme ambulancière paramédicale depuis 13 ans. Elle avait la réputation d’être parmi les personnes les plus empathiques et les plus dévouées dans son domaine. Elle était connue pour sa facilité à établir des relations avec ses patients. Elle leur tenait la main et les réconfortait alors qu’ils étaient en route vers l’hôpital. Lorsque Natalie a été envoyée sur les lieux d’un double meurtre, en 2012, l’expérience qu’elle a vécue sur place, ce jour-là, lui a laissé des séquelles permanentes que l’on appelle l’état de stress post-traumatique.

Toutefois, Natalie n’était pas consciente qu’elle était atteinte de ce trouble. Elle croyait, en fait, qu’elle allait bien et ne voulait pas admettre que son état n’était pas normal. Elle adorait son travail et savait qu’elle serait obligée de le quitter si jamais elle éprouvait un problème de santé mentale. Alors, elle a continué de faire ce travail épuisant sans aucune forme d’aide. Un jour, Natalie a fini par se rendre compte que le fardeau était trop lourd à porter, et elle a souffert d’une grave surdose de drogue, conséquence de l’état de stress post-traumatique dont elle s’efforçait de combattre les symptômes. Heureusement, Natalie a survécu à la surdose, mais beaucoup d’autres n’ont pas eu cette chance. Selon le Tema Conter Memorial Trust, un total de 68 premiers intervenants se sont suicidés en 2016 à cause de l’état de stress post-traumatique.

C’est ce genre d’histoires et de statistiques qui ont mené au projet de loi C-211. L’objectif est de mettre en place un cadre national afin d’empêcher que des histoires comme celle de Natalie se répètent. En faisant intervenir les ministres, les représentants et les intervenants des provinces et des territoires de partout au pays, le projet de loi C-211 lance une importante discussion sur ce que devrait être une approche nationale de prévention de l’état de stress post-traumatique.

Le projet de loi permet l’établissement d’une terminologie, de diagnostics et de soins uniformes afin que tous les Canadiens aient accès à des évaluations fondées sur des données et à des traitements bien plus efficaces. Il s’agit, à l’évidence, d’un objectif louable. Un nombre incalculable de Canadiens sont atteints de troubles du stress post-traumatique et ils ont droit à un cadre robuste pour les aider à améliorer leur santé mentale. Cependant, il faut nous assurer que le projet de loi qui sera adopté soit le plus inclusif possible dans sa façon d’aborder l’état de stress post-traumatique.

C’est ce que souhaite l’auteur du projet de loi. Lorsque Todd Doherty est venu témoigner au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, il a dit qu’il voulait créer un cadre relatif à l’état de stress post-traumatique qui couvrirait le plus grand nombre possible de Canadiens. Son objectif est que le projet de loi C-211 soit le plus inclusif possible.

Malheureusement, certaines interprétations du projet de loi C-211 pourraient empêcher que ce soit le cas. Lorsque le projet de loi était à l’étude au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, plusieurs sénateurs ont soulevé différents problèmes qui pourraient facilement mener à l’exclusion de différents groupes du cadre national relatif à l’état de stress post-traumatique. Tous ces problèmes ont été mentionnés dans le rapport du comité et je voudrais en aborder quelques-uns aujourd’hui.

Soyons clairs, je ne crois pas que ces problèmes doivent être réglés au moyen d’amendements. Le projet de loi C-211 offre suffisamment de souplesse, car il n’instaure pas directement le cadre. Il invite simplement le ministre, les fonctionnaires et les intervenants à entamer des discussions sur ce que le cadre devrait être. Cependant, je crois que nous devrions exiger que la conférence sur l’état de stress post-traumatique tienne compte de ces questions, car ce sont ses participants qui seront responsables de créer le cadre final.

D’abord, il convient de souligner que le préambule du projet de loi C-211 laisse entendre que le cadre devrait porter uniquement sur les cas d’état de stress post-traumatique découlant d’activités professionnelles. Autrement dit, une personne qui se retrouverait dans un état de stress post-traumatique pour d’autres raisons pourrait être exclue du cadre fédéral. Cela n’a tout simplement pas de sens. Dans d’innombrables cas, le stress post-traumatique est causé par des choses qui n’ont rien à voir avec les responsabilités professionnelles de la personne. L’inconduite et le harcèlement sexuels sont de bons exemples.

Pour mettre les choses en contexte, 90 p. 100 des victimes d’agression sexuelle vont manifester des symptômes qui pourraient aboutir à des problèmes de santé mentale, plus particulièrement un état de stress post-traumatique. Le problème est particulièrement grave dans des organisations comme les Forces armées canadiennes et la GRC. Nous savons déjà que ces deux organisations sont aux prises avec un problème d’inconduite sexuelle qui fait d’innombrables victimes partout au Canada. Ne pas tenir compte de ces cas serait négliger une des principales causes de stress post-traumatique chez les personnes qui servent et protègent le Canada au quotidien.

Ensuite, nous devons veiller à ce que le cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique tienne compte du personnel infirmier. Le personnel infirmier s’acquitte de certaines des tâches les plus difficiles et les plus épuisantes dans le secteur des soins de santé. Il travaille par exemple dans les salles d’urgence, les unités de traumatologie, les unités de soins palliatifs, les salles d’opération et les unités de psychiatrie. Les infirmières et infirmiers sont aux premières lignes de la lutte contre l’épidémie d’opioïdes au Canada et sont souvent les premiers à prendre le relais des ambulanciers paramédicaux qui arrivent avec des patients en état critique.

Malheureusement, la possibilité que ces personnes soient exclues du cadre fédéral relatif à l’état de stress post-traumatique est bien réelle. À l’heure actuelle, le préambule du projet de loi ne met l’accent que sur un nombre limité de domaines. Pour l’instant, seuls figurent dans le projet de loi C-211 les premiers répondants, les pompiers, les militaires, les agents correctionnels et les membres de la GRC. Honorables sénateurs, ce cadre doit également englober d’autres groupes.

Le travail que le personnel infirmier effectue est tout aussi difficile et héroïque que celui qui est réalisé par les militaires, les policiers, les agents correctionnels et les premiers répondants. Par conséquent, le personnel infirmier est tout aussi souvent atteint de l’état de stress post-traumatique que ces gens. Selon le Syndicat des infirmiers et des infirmières du Manitoba, un membre du personnel infirmier sur quatre éprouve des symptômes liés à l’état de stress post-traumatique. Les membres du personnel infirmier sont aussi extrêmement vulnérables au stress post-traumatique causé par le harcèlement et l’inconduite sexuelle au travail, puisque, en 2017, 61 p. 100 d’entre eux ont signalé avoir été victimes de harcèlement, de mauvais traitements ou d’agression au travail.

Le fait d’exclure du champ d’application du projet de loi C-211 des gens qui travaillent dans des domaines très stressants serait une grave erreur. Pour la corriger, il n’est pas nécessaire d’adopter un amendement. Comme je l’ai déjà dit, le préambule du projet de loi dresse la liste de diverses professions en précisant que ces groupes sont « particulièrement » vulnérables à l’état de stress post-traumatique.

Autrement dit, compte tenu du préambule, on pourrait supposer que le projet de loi vise tous les groupes qui sont à risque, y compris le personnel infirmier. Si on se fie à cette interprétation, le projet de loi pourrait être aussi inclusif que le souhaitait son auteur, M. Todd Doherty.

Enfin, j’aimerais parler du fait que le projet de loi est axé tout particulièrement sur l’état de stress post-traumatique.

Il n’est pas étonnant que l’état de stress post-traumatique ait été choisi comme thème central du projet de loi C-211. Cet état figure de loin en tête de liste des problèmes de santé mentale éprouvés le plus souvent par les gens qui occupent un emploi très stressant. Cependant, il est important de souligner que c’est loin d’être le seul. Les personnes qui ont un emploi très stressant éprouvent des problèmes liés à leur travail, comme la dépression, les troubles anxieux, le trouble de l’adaptation et tout un éventail de troubles liés à la consommation de substances. En mettant l’accent exclusivement sur l’état de stress post-traumatique, on tourne le dos à un nombre considérable de Canadiens qui ont sérieusement besoin d’aide.

Cela dit, il est possible de tenir compte de ces personnes dans le cadre du projet de loi C-211 sans proposer d’amendement. Une partie du mandat confié à la conférence sur l’état de stress post-traumatique est de créer une liste de termes cohérents, qui pourront être utilisés aux fins du cadre fédéral.

J’exhorte les participants de la conférence à envisager l’utilisation du terme « blessure de stress opérationnel ». Ce terme offre une foule d’avantages indéniables et il aide les psychologues et les militaires qui l’utilisent depuis les 17 dernières années. Ce terme souligne qu’un vaste éventail de diagnostics cliniques peuvent être liés aux traumatismes vécus au travail.

(1540)

De plus, en se servant du mot « blessure » pour décrire l’état, on lui confère la même légitimité qu’aux blessures physiques et cela joue un rôle concret dans la réduction des préjugés associés à la santé mentale.

Enfin, l’expression a été largement adoptée par les forces armées et les associations de psychologie dans l’ensemble du Canada, ce qui signifie que nous pouvons puiser dans une grande gamme d’expériences concernant l’expression.

Bref, l’utilisation de cette expression ne peut que renforcer le cadre national relatif à l’état de stress post-traumatique et notre compréhension de l’éventail complet des conditions associées aux milieux de travail stressants.

Honorables sénateurs, je tiens à souligner de nouveau que je ne demande pas à ce que le projet de loi C-211 soit modifié. Même si je crois qu’il est important que le projet de loi soit aussi inclusif que possible, je ne pense pas qu’un amendement est nécessaire pour en régler les problèmes. Il est important de ne pas oublier que le projet de loi ne crée pas un cadre fédéral par lui-même.

Il y aura plus de travail à faire pour inclure des groupes comme les infirmières et les infirmiers.

Au lieu de cela, une bonne part de la responsabilité reviendra à la conférence sur l’état de stress post-traumatique que le projet de loi établira. En choisissant de soulever ces questions avant la conférence au lieu de modifier le projet de loi C-211, nous pouvons faire en sorte que les Canadiens profitent d’un cadre fédéral réellement inclusif relatif à l’état de stress post-traumatique sans plus de retard.

Honorables sénateurs, je souhaite d’abord remercier M. Todd Doherty et le sénateur Housakos d’avoir présenté le projet de loi au Sénat. Je m’en voudrais toutefois de ne pas remercier aussi aujourd’hui notre collègue, le sénateur Roméo Dallaire. Le sénateur Dallaire nous a appris beaucoup de choses. Je travaille toujours avec le sénateur Dallaire sur la question de l’Ouganda et, lorsque je parle de l’état de stress post-traumatique, je pense souvent à la souffrance qu’il vit régulièrement. Il a été un sénateur apprécié et, comme je l’ai constaté pendant les nombreuses soirées où j’ai travaillé avec lui, il souffre énormément de l’état de stress post-traumatique. Il y a beaucoup de Canadiens qui vivent cette situation, et nous devons nous porter à leur défense. Merci beaucoup.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Projet de loi sur la Semaine de l’égalité des sexes

Troisième lecture

L’honorable Joseph A. Day (leader des libéraux au Sénat) propose, au nom du sénateur Dawson, que le projet de loi C-309, Loi instituant la Semaine de l’égalité des sexes, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, le sénateur Dawson devait s’occuper d’une affaire personnelle et n’a pas pu être ici, mais il m’a demandé de proposer en son nom la troisième lecture du projet de loi C-309, Loi instituant la Semaine de l’égalité des sexes.

Je me suis déjà prononcé sur ce projet de loi, honorables sénateurs. C’est une autre mesure de reconnaissance, où nous désignons des jours, des semaines et des mois pour souligner différentes choses. Cette mesure a trait à l’égalité des sexes et, si le projet de loi est adopté, nous célébrerons la Semaine de l’égalité des sexes au début de septembre.

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Le Code criminel
La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

Projet de loi modificatif—Adoption du douzième rapport du Comité des droits de la personne

Le Sénat passe à l’étude du douzième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (Projet de loi S-240, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains), avec un amendement), présenté au Sénat le 7 juin 2018.

L’honorable Jane Cordy propose que le rapport soit adopté.

— La sénatrice Bernard, la présidente du comité, m’a demandé d’expliquer les amendements contenus dans ce rapport. Donc, honorables sénateurs, je demande le consentement pour ce faire.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Cordy : [Au nom de l’honorable Wanda Elaine Thomas Bernard]

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a adopté le projet de loi S-240, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains) avec des amendements le 6 juin 2018. Le projet de loi ajoute de nouvelles infractions liées au trafic d’organes humains au Code criminel. Je voudrais remercier la sénatrice Ataullahjan d’avoir présenté ce projet de loi au Sénat et aussi d’avoir présenté des amendements à notre comité après avoir entendu les témoignages. Merci beaucoup, madame la sénatrice Ataullahjan.

Premier amendement : Le Comité a amendé le projet de loi pour que les infractions ne concernent que les greffes d’organes humains. L’amendement fait disparaître le mot « tissu » du projet de loi parce que ce terme pourrait être assez général pour inclure, par exemple, les ovaires, le sperme et les embryons humains. L’amendement est particulièrement nécessaire étant donné que le projet de loi criminalise les greffes lorsque l’organe est obtenu pour contrepartie (nouveau paragraphe 2401.1(2) du Code criminel).

Deuxième amendement : Comme le projet de loi criminalise toute greffe d’organe où le donneur n’a pas exprimé un consentement éclairé pour qu’on lui retire l’organe, le Comité a amendé le projet de loi pour y ajouter la définition suivante du consentement éclairé : « consentement donné par une personne qui est capable de prendre des décisions relatives à des questions de santé et qui connaît et comprend tous les faits importants, y compris la nature de la procédure de prélèvement d’organes, les risques en cause et les effets secondaires potentiels. »

Cet amendement a été apporté pour inclure cette définition dans le projet de loi.

Troisième amendement : Le Comité a aussi amendé la disposition sur la peine infligée pour trafic d’organes, de manière à ce que la peine maximale soit conforme à celle qui est prévue pour voies de fait graves. Ainsi, au lieu d’être l’emprisonnement à perpétuité, la peine maximale sera de 14 années d’emprisonnement. Le projet de loi ne prévoit aucune peine minimale obligatoire.

Quatrième amendement : Les amendements du comité obligeront aussi les médecins traitants à signaler le nom des patients et le fait qu’ils aient eu des transplantations d’organes à une autorité qui sera désignée dans les règlements. Cette disposition s’applique à toutes les transplantations d’organes, et aucune sanction n’est prévue en cas de non-conformité (nouvel article 240.2 du Code). L’obligation de déclaration a pour objet d’aider les autorités à mieux comprendre la portée de la participation des Canadiens au trafic d’organes et de contribuer à l’identification de possibles cas de trafic d’organes. Fournir une obligation juridique de déclaration garantira aussi que les médecins qui le font ne violent pas leurs obligations professionnelles relativement au secret professionnel du médecin.

Je vous remercie, honorables sénateurs.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Ataullahjan, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

La Loi constitutionnelle de 1867

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Patterson, appuyée par l’honorable sénateur Enverga, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-221, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 (qualifications des sénateurs en matière de propriété).

L’honorable Donald Neil Plett : Honorables sénateurs, je constate que cet article en est au 15e jour. Je voudrais que le débat soit ajourné à mon nom.

(Sur la motion du sénateur Plett, le débat est ajourné.)

(1550)

Projet de loi sur les dons de sang volontaires

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Wallin, appuyée par l’honorable sénatrice Boniface, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-252, Loi sur les dons de sang volontaires (Loi modifiant le Règlement sur le sang).

L’honorable Donald Neil Plett : Je parlerai très brièvement de ce sujet.

Honorables collègues, j’interviens pour appuyer fermement le projet de loi S-252, Loi sur les dons de sang volontaires.

Il y a à peine 30 ans, chers collègues, nous avons vécu l’une des crises médicales internes les plus dévastatrices que le pays ait jamais connues. À cause du manque de réglementation gouvernementale visant la collecte de sang et les systèmes de distribution au pays, la prévalence du VIH et de l’hépatite C est devenue manifeste dans la société.

La crise du sang contaminé, précipitée par un manque de sélection des donneurs de sang, a entraîné l’infection, par les deux virus transmis par le sang susmentionnés, de certaines personnes qui avaient reçu des dons de sang. On croit que cette crise est arrivée parce que, pendant cette période, les donneurs de sang étaient rémunérés pour leurs dons. Cet événement cataclysmique sur le plan médical a bouleversé le pays en infectant environ 30 000 Canadiens avec du sang contaminé.

Afin d’éviter qu’une telle crise ne se reproduise au Canada, le juge Horace Krever a lancé une enquête approfondie du système canadien d’approvisionnement en sang, principalement les méthodes employées pour la collecte et la sélection. Une recommandation clé qui est ressortie des conclusions de la Commission Krever est que les donneurs ne devraient pas être rémunérés.

Le juge Krever a appuyé cette conclusion en soulignant une vérité inévitable : les personnes qui souhaitent être payées pour leur don de sang donnent du sang non pas pour l’acte lui-même, mais pour être payées.

Au Canada, à l’heure actuelle, je crois que nous nous apprêtons à suivre de nouveau la même voie que pendant les années 1980. Canadian Plasma Resources est une organisation financée par des sources privées qui prélève du plasma et qui a commencé à offrir une rémunération aux donneurs de plasma en Saskatchewan en février 2016. L’organisation était petite au départ et a ouvert sa première clinique à Saskatoon. Depuis ce temps, malgré les avis de la Société canadienne du sang, Santé Canada a autorisé Canadian Plasma Resources à ouvrir d’autres cliniques ailleurs au pays.

Devenir un donneur rémunéré auprès de Canadian Plasma Resources est relativement facile. Lorsqu’on arrive, on remplit un formulaire sur les antécédents médicaux, puis un médecin sur place effectue un examen médical. On peut ensuite s’asseoir, lire un magazine, regarder un film ou faire autre chose pour passer le temps pendant les 90 minutes que dure le processus de prélèvement de plasma. Une fois que c’est terminé, on passe à la caisse et on reçoit 25 $ pour le soi-disant temps qu’on a accordé à Canadian Plasma Resources.

On encourage les donneurs à donner souvent en échange de points de récompense pour les superhéros. Plus on fait de dons, plus on reçoit de points. Les donneurs de niveau Argent et Or sont même admissibles à des tirages mensuels, dont les prix sont évalués à plus de 2 000 $.

Même si cela semble intéressant en théorie, on encourage en fait les gens à ne pas du tout tenir compte de la raison pour laquelle on fait un don de sang et de plasma pour commencer. Les gens devraient vouloir faire un don de sang ou de plasma pour aider leurs concitoyens. Ils ne seront pas du tout motivés à le faire par l’intermédiaire de cliniques de don de sang volontaire si la clinique de Canadian Plasma Resources qui se trouve à côté offre de si fabuleux prix aux donneurs.

Qui plus est, le plasma obtenu par ces cliniques ne fait l’objet d’aucun dépistage.

La clinique de Saskatoon n’est pas la première clinique de Canadian Plasma Resources à ouvrir ses portes au Canada. En 2013, Canadian Plasma Resources a tenté d’ouvrir trois cliniques en Ontario, des cliniques situées stratégiquement à proximité d’endroits comme des cliniques de traitement à la méthadone et des centre d’accueil pour hommes. Dans ces cas, Canadian Plasma Resources a tenté de cibler des membres moins privilégiés de la collectivité, qui seraient plus disposés à faire don de plasma en échange d’argent comptant.

Cela a suscité l’indignation en Ontario et a fini par mener à l’adoption d’une mesure législative semblable au projet de loi S-252 en décembre 2014. Grâce à cette mesure législative adoptée par Queen’s Park, la province a interdit les collectes rémunérées de sang et de plasma, rappelant que les Canadiens ne devraient pas tolérer qu’un événement comme la crise du sang contaminé des années 1980 se reproduise.

Honorables sénateurs, si nous adoptons le projet de loi à l’étude, nous pourrions laisser une marque indélébile sur le système de soins de santé canadien. Nous avons la possibilité d’empêcher les réserves nationales de sang et de plasma d’être contaminées par des donneurs dénués de sincérité qui ne sont pas soumis à un processus de dépistage exhaustif. Nous avons l’occasion d’empêcher l’histoire de se répéter en mettant en place au Canada de nouveaux mécanismes de collecte de sang durables et sûrs, qui encourageront les Canadiens à aider leur prochain de bonne foi, et non à des fins lucratives.

Comme la sénatrice Wallin l’a affirmé dans son discours à l’étape de la deuxième lecture, la tragédie de Humboldt et l’attaque au camion-bélier de Toronto prouvent que les Canadiens sont prêts à répondre à l’appel pour aider leurs prochains, et même qu’ils sont désireux de le faire, non pas par intérêt financier, mais par pure bonté.

Chers collègues, en adoptant le présent projet de loi et en empêchant des compagnies comme Canadian Plasma Resources de payer les dons de plasma au Canada, nous pourrions nous assurer que la Société canadienne du sang, un organisme voué au dépistage sécuritaire des donneurs de sang et de plasma, est le principal organisme de collecte pour nos réserves de sang. Nous garantirions que les Canadiens qui donnent du sang ne le font pas pour obtenir quelque chose en retour, mais par compassion. Enfin, nous chercherions à rendre le Canada entièrement autonome en ce qui concerne son approvisionnement en sang, comme le recommande l’Organisation mondiale de la Santé.

Chers collègues, je crois que ce projet de loi fera du Canada un pays meilleur, plus sûr et plus autosuffisant. Je vais voter en faveur de ce projet de loi et je vous demande d’en faire autant. Merci.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Omidvar, le débat est ajourné.)

Modernisation du Sénat

Neuvième rapport du comité spécial—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Frum, appuyée par l’honorable sénatrice Beyak, tendant à l’adoption du neuvième rapport (intérimaire) du Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, intitulé La modernisation du Sénat : Aller de l’avant (période des questions), présenté au Sénat le 25 octobre 2016.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Honorables sénateurs, cet article en est au 14e jour. J’aimerais proposer l’ajournement au nom du sénateur Smith pour le temps de parole qu’il lui reste.

Son Honneur la Présidente intérimaire : L’honorable sénatrice Martin, avec l’appui de l’honorable sénateur Mockler, propose que le débat soit ajourné au nom du sénateur Smith jusqu’à la prochaine séance.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, au nom du sénateur Smith, le débat est ajourné.)

(1600)

L’étude sur les questions concernant les affaires sociales, la science et la technologie en général

Vingt-quatrième rapport du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie et demande de réponse du gouvernement—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du vingt-quatrième rapport (intérimaire) du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, intitulé Le rôle du gouvernement fédéral dans un fonds de financement social, déposé au Sénat le 10 mai 2018.

L'honorable Art Eggleton propose :

Que le vingt-quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, intitulé Le rôle du gouvernement fédéral dans un fonds de financement social, qui a été déposé au Sénat le 10 mai 2018, soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport.

— Honorables sénateurs, je sais que cela ne me rajeunit pas, mais ma carrière dans le domaine public a commencé il y a près d’un demi-siècle. J’ai été conseiller municipal à Toronto dans les années 1970 et maire de Toronto dans les années 1980. Pendant cette période et par la suite, je me suis intéressé à ce qu’on appelle l’entreprise sociale. Il s’agit, en fait, d’entreprises qui suivent les modèles d’affaires habituels et qui génèrent des revenus, mais qui ont une vocation sociale. On parle parfois d’entreprises « à but lucratif et à bénéfice social ».

Je me souviens qu’au début ces entreprises visaient surtout à offrir des emplois à des gens qui avaient du mal à se tailler une place sur le marché du travail, par exemple des personnes marginalisées ou handicapées. Il est clair qu’à l’époque il existait peu de soutien à l’intention des personnes handicapées. Les anciens détenus faisaient aussi partie des gens qui avaient du mal à trouver un emploi, comme c’est encore le cas aujourd’hui.

Il peut s’agir de tâches toutes simples, comme livrer des enveloppes et des paquets ou soulever des objets. Je me souviens d’une entreprise qui, pour permettre à d’anciens détenus de gagner de quoi vivre, prenait du café, le réemballait et le vendait à des organismes à but non lucratif. J’ai aussi vu des cas où on recyclait différents matériaux et métaux pour en faire de nouveaux objets qui étaient ensuite mis en vente.

Toutes ces entreprises aidaient beaucoup de monde, et quand elles faisaient un peu de profit, elles s’en servaient pour créer encore plus d’emplois, pour prendre de l’expansion ou pour financer un organisme caritatif qui aidait lui aussi les gens à trouver un emploi.

Au fil du temps, l’idée même de l’entreprise sociale a fini par gagner en popularité. Le concept s’est raffiné et il s’est créé toutes sortes de programmes plus complexes nécessitant beaucoup plus d’argent. Au départ, la plupart des programmes fonctionnaient avec un budget minimum, mais il leur fallait désormais beaucoup d’argent pour fonctionner.

Les petites entreprises qui voulaient prendre de l’expansion avaient, par exemple, besoin de capitaux. C’était la même chose pour celles qui voulaient s’intéresser aux dossiers environnementaux.

C’est ainsi, au fur et à mesure que grandissaient les besoins financiers des entreprises sociales, qu’est né le financement social, le sujet du rapport que je vous présente aujourd’hui.

Le financement social a donné lieu à de nombreux concepts et idées, à commencer par les obligations à impact social. Vous savez, si on additionne les actifs des fonds privés, comme les régimes de retraite, des caisses de crédit et des nombreux Canadiens à l’aise financièrement qui veulent s’impliquer socialement, on arrive à des milliards de dollars. Des milliards qui pourraient servir à faire ce qu’on appelle des investissements d’impact, soit des investissements qui visent moins le rendement que la portée sociale du geste. Autrement dit, avancement social plus retour sur investissement égale investissement d’impact.

Je me souviens d’un cas très intéressant, qui date d’il y a 10 ans et qui a mis en pratique le concept d’ententes subordonnées à la réussite. Il s’agit d’une prison à Peterborough, en Angleterre, où on voulait réduire le taux de récidive. À l’origine, 60 p. 100 des détenus libérés revenaient derrière les barreaux en moins d’un an, après avoir commis une autre infraction. Ces ex-détenus n’arrivaient pas à reprendre leur vie en main, car il leur manquait le soutien social, les services de counseling et l’aide dont ils avaient besoin. Résultat : ils récidivaient, se faisaient condamner et retournaient en prison. Le gouvernement a donc émis des obligations à impact social.

On a trouvé quelque 17 investisseurs. L’objectif était de faire baisser le taux de récidive de 7,5 p. 100. Le gouvernement du Royaume-Uni s’est montré très enthousiaste à l’idée de réduire le nombre de récidivistes tout en réalisant des économies considérables. Nous avons tous entendu, sans doute, qu’il en coûte plus de 100 000 $ par année pour incarcérer une personne. Des sommes importantes étaient donc en jeu. Le gouvernement, conscient des gains potentiels de l’approche, avait promis de verser une prime aux investisseurs si l’objectif était atteint.

Eh bien, figurez-vous que l’objectif a été dépassé. Le taux a baissé non pas de 7,5 p. 100, mais de 9 p. 100. Les investisseurs ont donc reçu leur prime et, comme moins d’ex-détenus se trouvaient réincarcérés, le gouvernement a fait des économies. Un gain a aussi été réalisé sur le plan du bien social: les résultats ont profité à la société et, surtout, aux ex-détenus concernés, qui sont retombés sur leurs pieds et ont eu l’aide nécessaire pour prendre le droit chemin. Il ne s’agit que d’un exemple parmi d’autres.

Mes collègues conservateurs seront intéressés de savoir que, autour de la même période, en 2012, Diane Finley, alors ministre des Ressources humaines, a commencé à parler des obligations d’impact social en disant que ce genre de programmes méritaient d’être pris en considération. C’est donc dire que des gens de toutes les allégeances politiques considèrent qu’il s’agit d’une approche à considérer.

Malgré tout cela, le nombre de fonds qui ont été établis aux fins de l’entreprise sociale demeure modeste. Il y a encore beaucoup d’argent qui pourrait être mis à profit. Comme je l’ai dit plus tôt, il y a des fonds de retraite ainsi que des gens très fortunés et prêts à investir une partie de leur argent dans la finance sociale. Il reste donc beaucoup à faire.

Aux alentours de 2009, un groupe de travail, le Groupe d’étude canadien sur la finance sociale, a été sur pied. Paul Martin en faisait partie, et on a aussi inclus Stanley Hartt pour une représentation politique plus équilibrée. Le groupe était présidé par Ilse Treurnicht, alors présidente-directrice générale de l’organisme MaRS, établi à Toronto. Le groupe a publié un rapport dont le titre, à mon sens, résume bien l’objectif : La mobilisation de capitaux privés pour le bien collectif.

Le groupe a fait sept recommandations. Il recommande notamment que les fondations canadiennes publiques et privées réservent au moins 10 p. 100 de leurs capitaux à des investissements axés sur la mission, comme les investissements dans l’entreprise sociale. Autrement dit, au lieu de désigner les fonds comme des dons de bienfaisance, on peut utiliser ce genre d’investissements pour créer des emplois et générer plus de profits aux fins d’une mission. Le groupe a aussi recommandé d’explorer la possibilité de mobiliser les actifs de caisse de retraite en appui à l’investissement d’impact. Nombre de fonds de retraite sont administrés par des syndicats pour des syndiqués ou des associations de fonctionnaires. Pourquoi ne pas utiliser une partie de cet argent pour ce genre de mission?

Je le fais pour mon collègue. Le groupe voulait également faire en sorte que les organismes de bienfaisance ou les organismes à but non lucratif puissent mener des activités rentables en appui à leurs différentes missions. Pour ce faire, les organismes de réglementation et les décideurs politiques doivent moderniser leurs cadres de référence. Il ne faut pas se contenter de donner de l’argent: il faut contribuer à l’investir pour faire fructifier les fonds qui serviront à plus de causes sociales. Il faut encourager les investisseurs privés à offrir les capitaux à coût plus bas et les capitaux patients dont les entreprises sociales ont besoin pour maximiser leurs résultats sociaux et environnementaux.

Il y avait une autre recommandation qui disait ceci :

Pour mobiliser de nouveaux capitaux dans le but d’influer sur l’investissement au Canada, le gouvernement du Canada devrait faire équipe avec des investisseurs privés, institutionnels et philanthropiques pour créer le Fonds d’investissement d’impact du Canada […] Ce fonds appuierait les fonds régionaux — il serait un genre de fonds d’investissement de gros — pour joindre le plus grand nombre de personnes et catalyser la création de nouveaux fonds. Les gouvernements provinciaux devraient créer des fonds de ce genre où il n’en existe pas.

(1610)

Cette recommandation est au centre du rapport. Le rapport a été rédigé. Nous avons eu deux réunions en février auxquelles ont participé un certain nombre d’experts qui sont venus nous parler de financement social. C’est le rapport que j’ai ici. Normalement, vous devriez l’avoir vu. J’espère que tout le monde l’a reçu. Je vais parler des six recommandations qui se trouvent dans le rapport. Le rapport était unanime sur toute la ligne en ce qui concerne les partis, les préoccupations et les groupes.

Recommandation 1 :

Le comité recommande que le gouvernement fédéral crée un fonds de financement social pancanadien et qu’il y contribue. Le fonds serait indépendant du gouvernement, qui n’imposerait donc pas de contraintes à la manière dont l’argent est recueilli ou dépensé, mis à part pour définir les objectifs du fonds et mettre en place des mécanismes de responsabilisation relatifs à ses contributions.

Nous avons également parlé du genre d’entité que ce fonds pourrait constituer. Elle pourrait être comme la Banque de développement du Canada, si on voulait qu’elle soit une société d’État, ou elle pourrait être complètement hors de toute compétence fédérale, car il y a un souci d’indépendance.

J’ai une autre chose à dire au sujet de la première recommandation. Elle aiderait à montrer aux investisseurs que le gouvernement soutient ce genre d’approche et qu’il aide à assurer une certaine stabilité dans un fonds donné. C’est un levier puissant pour ce qui est de favoriser l’investissement de fonds du secteur privé pour le bien public.

Recommandation 2 :

Le comité recommande que le gouvernement cherche les occasions d’obtenir de l’argent auprès d’autres investisseurs lorsqu’il évalue la manière d’investir des deniers publics dans un fonds de financement social.

Le Royaume-Uni a eu une idée intéressante. Il existe un plan au Royaume-Uni qui consiste à prendre l’argent de vieux comptes bancaires non réclamés depuis une longue période pour l’investir dans le fonds de financement social. Si l’on appliquait cette solution au Canada, il faut garder à l’esprit que, chaque année, les institutions financières et les coopératives de crédit remettent à la Banque du Canada les comptes bancaires inactifs depuis 10 ans. Beaucoup de ces comptes sont presque vides. Ce sont quelques dollars ici et là. Toutefois, s’ils demeurent inactifs pendant 10 ans sans être réclamés, ils sont transférés à la Banque du Canada. En 2016, celle-ci a ainsi hérité de 1,8 million de tels petits soldes, d’une valeur totale de 678 millions de dollars. Pas mal.

Qu’advient-il de cet argent? La Banque du Canada finit par le transférer dans le Trésor fédéral, mais, comme elle doit attendre une longue période avant de pouvoir le faire, elle l’investit dans des placements, parfois 30 ans, parfois jusqu’à 100 ans. Quels sont ces placements? Les obligations d’épargne du Canada et les bons du Trésor. Cela peut sembler logique, mais le taux de rendement est extrêmement faible.

Oui, ces placements sont sûrs. Toutefois, ces fonds pourraient servir à attirer des fonds privés sans qu’on ait à piger dans le Trésor. Ce n’est qu’une idée qui, selon nous, mérite d’être envisagée, d’où la recommandation 2.

La recommandation 3 apporte, en fait, un peu plus de précisions. Elle dit ceci :

Le comité recommande que le gouvernement fédéral envisage d’utiliser les comptes bancaires inactifs comme source de capitaux pour le fonds de financement social.

Recommandation 4 :

Le comité recommande qu’une partie de la contribution fédérale à un fonds de financement social serve à créer de nouveaux fonds intermédiaires...

Ce sont les gens qui aident à créer les fonds. D’un côté, il y a ceux qui ont besoin de fonds, de l’autre, ceux qui ont des fonds; il faut les aider à travailler ensemble. C’est l’objectif.

... qui offriront des possibilités économiques et sociales à des régions et à des collectivités traditionnellement marginalisées.

Nous avons découvert que les fonds qui existent pour venir en aide aux entreprises sociales se trouvent surtout dans des villes comme Vancouver et Toronto. Edmonton a également des fonds considérables. Il faut répartir l’argent ailleurs au pays afin que les plus petites collectivités puissent aussi profiter de ces fonds.

Recommandation 5

Le comité recommande que le fonds soutienne le renforcement des capacités des institutions pour veiller à ce que les organismes soient en mesure de contribuer à l’écosystème de la finance sociale.

Cette recommandation vient appuyer la précédente. L’objectif est de renforcer les capacités dans différentes collectivités partout au pays.

Enfin...

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Eggleton, demandez-vous cinq minutes de plus?

Le sénateur Eggleton : Puis-je avoir deux minutes?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Est-ce d’accord, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Eggleton : Merci.

La recommandation 6 est la dernière.

Le comité recommande que le gouvernement fédéral s’engage à financer un fonds de financement social sur plusieurs années, investisse périodiquement des montants fixes pendant cette période et prévoie un horizon de rendement éloigné.

Il faut un investissement soutenu à long terme.

Ce sont les six recommandations concernant le financement social. Nous croyons qu’il s’agit d’un outil extraordinaire pour mobiliser du capital privé pour le bien public. Ce financement contribuera à trouver des solutions à bien des problèmes vécus par les gens marginalisés de la société, par les gens à faible revenu, par les gens qui peinent à trouver de l’emploi et par les gens qui ont besoin des entreprises sociales qui seront soutenues par ce fonds.

Merci beaucoup. J’espère que nous adopterons le rapport.

L’honorable Ratna Omidvar : Honorables sénateurs, je prends également la parole aujourd’hui au sujet du rapport du Comité des affaires sociales intitulé Le rôle du gouvernement fédéral dans un fonds de financement social. Je tiens à remercier tous les membres du comité, plus particulièrement son président, de s’être attaqués avec tant d’intérêt à cette idée et à cette étude.

Comme l’a fait remarquer le sénateur Eggleton, le concept du financement social n’est pas une nouveauté au Canada. Il existe depuis un certain temps et a été mis à l’essai à petite échelle à de nombreuses reprises. Dans ce rapport, on propose d’aller plus loin, de réaliser un projet de plus grande envergure, d’opter pour une solution à plus grande échelle que ce qui a été fait sur le terrain jusqu’ici dans les quelque 10 dernières années. Le rapport formule à l’intention du gouvernement, des conseils très pertinents, utiles, constructifs et pratiques sur la façon de procéder.

Les défis de l’époque évoluent sans cesse. Nous faisons face à des défis de longue date, comme celui du logement abordable, mais aussi à des défis naissants, comme celui de la conception de produits pour une économie à faibles émissions de carbone. Dans tous les cas, il faut trouver des fonds et des ressources pour agir.

Il est donc important de nous attaquer à ces défis et d’envisager de nouvelles sources de revenus. Le financement social offre une solution très intéressante.

Comme l’a dit le sénateur Eggleton, quand on pense financement social, il faut penser rendement avec une vocation sociale. Cela encourage les investisseurs privés, les banques, les fonds de pension, les entreprises d’investissement et les gens fortunés à engager leur argent dans un projet ou une entreprise ayant une vocation sociale. En plus d’obtenir un rendement sur leur investissement, les investisseurs contribuent également au bien public. Je pense qu’on pourrait entamer le dialogue sur les possibilités avec un grand nombre de ces institutions et de ces investisseurs. Un investisseur pourrait, par exemple, investir dans un fonds destiné à la construction de logements dans les réserves ou dans un fonds qui soutient l’emploi de personnes marginalisées dans de petites entreprises.

Il est important de souligner que le fonds de financement social n’est pas à la recherche de donateurs. Il ne veut pas de dons. Il cherche des investisseurs, et ceux-ci exigent un rendement du capital investi.

En 2017, la firme de placement All Street a étudié certains des rendements qui avaient été générés. Elle a découvert que des fonds assortis d’une mission sociale produisaient des taux de rendement allant jusqu’à 33 p. 100. J’admets que ce taux est inhabituel; je parle des meilleurs exemples. Je suis toutefois convaincue que les investisseurs peuvent réaliser des profits tout en entraînant des retombées sociales.

Le rapport soulève un problème et une solution. Les témoins nous ont dit que les bonnes idées ne sont pas rares au Canada. Il y a un grand nombre d’initiatives et de projets extraordinaires. Nous avons entendu parler du projet des Hurons-Wendats qui construisent des logements dans les réserves. De nombreux projets existent, mais ils ne sont pas réalisés dans des conditions qui leur permettraient de prendre de l’expansion. Il ne s’agit pas de 10 ou de 100 maisons, mais bien de 1 000 maisons, ce qui nécessite un investissement considérable.

(1620)

Le comité a donc recommandé que le gouvernement crée un fonds pancanadien de financement social et qu’il y injecte des capitaux. Comme l’a souligné le sénateur Eggleton, ce fonds serait indépendant. Il pourrait s’agir de la Banque de développement du Canada ou de la SCHL, mais l’entité serait chargée d’attirer des capitaux privés partout au pays, qui seraient utilisés pour concrétiser de telles idées. Le fonds réunirait des investisseurs privés et institutionnels, afin de mettre en place des initiatives éprouvées et évaluées. Ces initiatives seraient dirigées tantôt par des organismes de bienfaisance, tantôt par des organismes à but non lucratif, tantôt par des entreprises, de telle sorte que leur portée puisse être élargie.

Le comité a recommandé que le gouvernement examine différentes façons d’injecter des capitaux dans ce fonds. Une idée particulièrement intéressante — et le sénateur Eggleton l’a souligné — consisterait à envisager l’utilisation de comptes bancaires inactifs. Comme le sénateur Eggleton l’a indiqué, des sommes variant entre 628 et 750 millions de dollars provenant de ces comptes sont investies dans des obligations d’épargne et des bons du Trésor à faible rendement. Je pense qu’une partie de ces fonds pourrait servir à injecter des capitaux dans un tel marché, un tel écosystème de financement social. Ils seraient plus rentables pour le Canada que les obligations d’épargne à faible rendement.

Il ne s’agit pas d’une idée fantaisiste; elle vient du Royaume-Uni, où, en 2008, le gouvernement a adopté la Dormant Bank and Building Society Accounts Act. Cette loi a établi un processus en vertu duquel des institutions financières britanniques peuvent transférer des soldes non réclamés dans un fonds appelé Big Society Capital. De nombreuses banques britanniques ont contribué à ce fonds, dont Barclays et HSBC.

À titre d’exemple, Big Society Capital a investi 50 millions de livres dans le fonds Real Lettings Property. Ce fonds permet d’acheter des appartements à Londres, qui sont ensuite loués à une œuvre de bienfaisance, qui, à son tour, les loue à des personnes susceptibles de se retrouver sans abri. Les investisseurs touchent l’argent du loyer payé par les occupants et celui provenant de la vente des appartements au bout de sept ans.

Honorables sénateurs, je crois que le Canada est rempli de bonnes idées, mais qu’il a besoin de capitaux, non pas à hauteur de 10 000 $, ni même d’un million de dollars; non, il a besoin d’immenses bassins de capitaux. Pour cela, il nous faut un marché pour le financement social. J’ai toujours dit que les bonnes idées attirent l’argent et non pas l’inverse. C’est une excellente idée. J’espère que vous accepterez de renvoyer le rapport au gouvernement afin qu’il y réponde, au besoin. Je me demande par ailleurs si, à un autre moment, le Comité des finances nationales ne mènerait pas une étude sur les comptes bancaires inactifs et si, en fait, cette idée ne trouverait pas un écho au Canada.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Arctique

Budget et autorisation d’embaucher du personnel et de se déplacer—Adoption du deuxième rapport du comité spécial

Le Sénat passe à l’étude du deuxième rapport du Comité spécial sur l’Arctique (Budget—examiner les changements importants et rapides dans l’Arctique et leurs effets sur les premiers habitants—autorisation d’embaucher du personnel et de se déplacer), présenté au Sénat le 5 juin 2018.

L’honorable Dennis Glen Patterson propose que le rapport soit adopté.

—J’ai à vous parler brièvement de ce rapport.

Chers collègues, le deuxième rapport du Comité spécial sur l’Arctique est un rapport budgétaire. À l’origine, le comité avait prévu deux voyages dans l’Arctique pendant son mandat, et je rappelle que le comité doit terminer ses travaux d’ici le 10 décembre 2018. Étant donné que nous avions planifié deux voyages distincts, ce premier rapport budgétaire concernait une mission d’information dans l’Ouest de l’Arctique. Nous avions pensé organiser à l’automne une seconde mission d’information dans l’Est de l’Arctique. Après en avoir parlé avec nos collègues du Sous-comité d’examen des budgets des comités, qui se sont dits inquiets des coûts de déplacement dans l’Arctique, le comité a convenu lundi dernier de fusionner les deux voyages dans le même budget, et selon les mêmes délais que nous avions proposés au Sénat la semaine dernière.

Nous modifierons notre itinéraire de manière à visiter l’Ouest et l’Est de l’Arctique pendant le même voyage, ce qui évitera de devoir présenter une deuxième demande de fonds. J’espère que vous approuverez la modification et que vous adopterez le rapport du comité avec la modification proposée.

L’honorable Pierrette Ringuette : Puis-je poser une question?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Patterson, acceptez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Patterson : Oui.

La sénatrice Ringuette : Merci. Pourriez-vous indiquer quel budget vous cherchez à obtenir?

Le sénateur Patterson : Je vous remercie de votre question. Le budget qui a été approuvé par le Sous-comité d’examen des budgets des comités est de l’ordre de 350 000 $. Il tient compte du fait qu’il est impossible de se déplacer dans l’Arctique au moyen de vols réguliers en raison du service limité. Il faut donc recourir à des vols nolisés. Le comité nous a fait la remarque que, compte tenu du budget global, il s’agit de beaucoup d’argent. Nous avons discuté de la possibilité de combiner le voyage prévu dans l’Ouest de l’Arctique à celui prévu dans l’Est de l’Arctique.

J’ai discuté de la question avec les membres du comité et obtenu leur appui. Le budget nous permettra donc maintenant de faire deux voyages pour couvrir cette vaste région, qui représente environ 40 p. 100 du Canada, qui va du Nunatsiavut, dans l’est, au bord de l’Atlantique, jusqu’à Inuvik, dans l’ouest. La région à couvrir est énorme. Nous sommes convaincus que les fonds prévus au budget nous permettront de revoir notre itinéraire et de couvrir la région comme nous l’avions espéré.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Droits de la personne

Budget—L’étude sur les questions concernant les droits de la personne des prisonniers dans le système correctionnel—Treizième rapport du comité—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du treizième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (Budget supplémentaire—étude sur les questions des droits de la personne des prisonniers dans le système correctionnel), présenté au Sénat le 7 juin 2018.

L’honorable Mobina S. B. Jaffer propose, au nom de la sénatrice Bernard, que le rapport soit adopté.

L'honorable Pierrette Ringuette : J’ai une question pour la sénatrice Jaffer, si elle veut bien y répondre.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Accepteriez-vous de répondre à une question, sénatrice Jaffer?

La sénatrice Jaffer : Bien sûr.

La sénatrice Ringuette : C’est la même question. J’imagine que je prends la relève de Joan Fraser aujourd’hui. Pouvez-vous en dire davantage sur la demande de crédits budgétaires, s’il vous plaît?

La sénatrice Jaffer : Honorables sénateurs, puis-je demander que le débat soit ajourné à lundi? Je pourrai vous répondre à ce moment-là. Merci.

(Sur la motion de la sénatrice Jaffer, le débat est ajourné.)

L’étude sur les obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne

Adoption du quatorzième rapport du Comité des droits de la personne et de la demande de réponse du gouvernement

Le Sénat passe à l’étude du quatorzième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, intitulé La promotion des droits de la personne - L’approche du Canada à l’égard du secteur des exportations, déposé au Sénat le 7 juin 2018.

L’honorable Mobina S.B. Jaffer, au nom de la sénatrice Bernard, propose :

Que le quatorzième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, qui a été déposé le jeudi 7 juin 2018, soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, la ministre des Affaires étrangères étant désignée ministre chargée de répondre à ce rapport, en consultation avec le ministre du Commerce international.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

(1630)

Le Sénat

Motion tendant à autoriser une modification à la Loi constitutionnelle de 1867 (qualifications des sénateurs en matière de propriété) par proclamation de Son Excellence le gouverneur général—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Patterson, appuyée par l’honorable sénateur Runciman,

Attendu :

que le Sénat défend les intérêts de groupes souvent sous-représentés au Parlement, tels les Autochtones, les minorités visibles et les femmes;

que le point 3 de l’article 23 de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit qu’une personne doit, pour être nommée au Sénat et y conserver son siège, posséder des terres d’une valeur nette minimale de quatre mille dollars situées dans la province pour laquelle elle est nommée;

qu’il se peut que des circonstances personnelles ou le marché immobilier d’une région donnée empêchent une personne de posséder la propriété requise;

que chacun devrait être admissible à une nomination au Sénat, indépendamment de la valeur nette de ses biens immobiliers;

que la qualification en matière de propriété immobilière n’est pas conforme aux valeurs démocratiques de la société canadienne moderne et qu’elle ne constitue plus une garantie adéquate ou valable de l’aptitude d’une personne à siéger au Sénat;

que chacun des vingt-quatre sénateurs du Québec est nommé pour un collège électoral donné et doit remplir la qualification en matière de propriété immobilière dans ce collège électoral ou y résider;

que les dispositions de la Constitution du Canada applicables à certaines provinces seulement ne peuvent être modifiées que par proclamation du gouverneur général sous le grand sceau du Canada, autorisée par des résolutions du Sénat, de la Chambre des communes et de l’assemblée législative de chaque province concernée;

que la Cour suprême du Canada a déclaré que l’abrogation complète du point 3 de l’article 23 de la Loi constitutionnelle de 1867 concernant la qualification des sénateurs en matière de propriété immobilière requiert une résolution de l’Assemblée nationale du Québec conformément à l’article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982,

Le Sénat a résolu d’autoriser la modification de la Constitution du Canada par proclamation de Son Excellence le gouverneur général sous le grand sceau du Canada, en conformité avec l’annexe ci-jointe.

ANNEXE

MODIFICATION À LA CONSTITUTION DU CANADA

1.(1) Le point 3 de l’article 23 de la Loi constitutionnelle de 1867 est abrogé.

(2) L’article 23 de la même loi est modifié par remplacement du point-virgule à la fin du point 5 par un point et par abrogation du point 6.

2. La Déclaration des qualifications exigées figurant à la cinquième annexe de la même loi est remplacée par ce qui suit :

Je, A.B., déclare et atteste que j’ai les qualifications exigées par la loi pour être nommé membre du Sénat du Canada.

3.Titre de la présente modification : « Modification constitutionnelle de (année de proclamation) (qualification des sénateurs en matière de propriété immobilière) ».

(Sur la motion du sénateur Gold, le débat est ajourné.)

Banques et commerce

Motion tendant à autoriser le comité à étudier les opérations de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, de l’Ombudsman des services bancaires et d’investissement et de l’ADR Chambers—Bureau de l’Ombudsman des services bancaires—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion, tel que modifiée, de l’honorable sénatrice Ringuette, appuyée par l’honorable sénatrice Lankin, C.P.,

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à :

a)Étudier les opérations de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC) ainsi que l’Ombudsman des services bancaires et d’investissement (OSBI), et l’ADR Chambers – Bureau de l’Ombudsman des services bancaires (ADRBO);

b)Étudier le respect et l’interaction de ces organismes envers les juridictions provinciales;

c)Étudier et déterminer les pratiques exemplaires d’organismes similaires ailleurs dans le monde;

d)Fournir des recommandations pour s’assurer que l’ACFC, l’OSBI, et l’ADRBO puissent mieux protéger les consommateurs et respecter les compétences provinciales;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 18 mars 2018 et qu’il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions dans les 180 jours suivant le dépôt du rapport final.

(Sur la motion de la sénatrice Ringuette, au nom du sénateur Marwah, le débat est ajourné.)

La proposition intitulée « Second examen objectif »

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Wallin, attirant l’attention du Sénat sur la proposition du sénateur Harder, intitulée « Second examen objectif »,  qui passe en revue le rendement du Sénat depuis la nomination des sénateurs indépendants et qui recommande la création d’un nouveau comité des travaux du Sénat.

(Sur la motion de la sénatrice Cools, le débat est ajourné.)

[Français]

L’alerte Silver

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Wallin, attirant l’attention du Sénat sur le concept d’alerte Silver, qui reprend les éléments du système d’alerte AMBER — dont l’efficacité a déjà été démontrée — afin d’aider les 700 000 Canadiens atteints de démence, y compris de la maladie d’Alzheimer, ainsi que leurs proches et fournisseurs de soins, permettant ainsi de retrouver les adultes atteints de déficience cognitive portés disparus.

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer l’interpellation concernant le système d’alerte Silver. Je remercie la sénatrice Wallin d’avoir pris l’initiative de porter ce sujet à l’attention du Sénat.

Vous avez sans doute entendu ou lu, dans les différents médias, l’histoire d’une personne âgée déclarée disparue de son domicile ou d’une résidence pour personnes âgées. Parfois, ces personnes sont retrouvées rapidement, déambulant au bord d’une autoroute, ne sachant où aller. D’autres fois, malheureusement, elles sont retrouvées quelques jours après, ensevelies sous la neige. Pendant ce temps d’attente, l’angoisse et la culpabilité des membres de la famille et des soignants demeurent incommensurables.

Le mot désignant cette situation est la « fugue ». Cependant, il importe d’établir une différence entre la fugue volontaire et consciente, parfois temporaire, d’une jeune personne, et celle de la personne âgée atteinte de démence.

En quoi consiste une fugue chez une personne avec atteinte cognitive? Terme non approprié dans ce contexte, mais couramment utilisé, la fugue est une des manifestations fréquentes des troubles de l’agitation chez la personne atteinte. Elle peut être liée à plusieurs facteurs, comme un état de confusion, où la personne ne sait pas si elle est à son domicile et part à la recherche de ce qui serait son domicile, ou du moins ce qu’elle croit l’être; un sentiment de vouloir être utile, où la personne pense aller chercher un enfant à son école, et sort, même si ce dernier, devenu adulte, ne fréquente aucune école depuis très longtemps; une tentative de fuite devant une menace qui peut être réelle ou ressentie comme telle; ou de l’errance, comportement qui est présent chez les personnes souffrant de troubles cognitifs. Elle déambule de façon continue, sans but et, à un certain moment donné, trouve une porte ouverte ou facile à ouvrir et sort. Elle continue de marcher. Malheureusement, la désorientation spatiale l’empêche de revenir à son domicile ou au centre de soins où elle habite.

Comme vous le savez, la démence constitue le type le plus courant de maladies neurodégénératives. Selon des statistiques de la Société Alzheimer du Canada, on estime à 747 000 le nombre de personnes atteintes de démence au Canada. Ce chiffre devrait passer à environ 1,4 million d’ici 2031. Notons que la prévalence de la démence augmente avec l’âge. Cela dit, il est important de souligner que certaines statistiques démontrent que 60 p. 100 des personnes atteintes de démence sont à risque de faire une fugue.

Compte tenu de la croissance du groupe des personnes âgées de 65 ans et plus ainsi que de la prévalence de la démence dans ce groupe d’âge, on peut comprendre l’importance de la mesure d’alerte Silver.

Il y a quelques années, pour aider les familles à gérer leurs proches qui sont à risque de fugue, un bracelet d’identité avec les coordonnées de la personne leur était proposé comme solution. Il permettait à un voisin ou aux agents de police de la retrouver et de la ramener à son point de départ. Avec l’évolution de la technologie, un verrou avec alarme installée sur la poignée des portes qui donnent accès à l’extérieur peut alerter le proche aidant. Les alarmes silencieuses à déclenchement magnétique lors du passage par une porte sont également utilisées. Actuellement, le système de géolocalisation par un bracelet ou un collier relié à un téléphone cellulaire ou, dans certaines résidences pour personnes âgées, à un écran d’ordinateur est devenu pratique courante. Malgré tout, certaines personnes peuvent échapper à la vigilance de leurs proches ou des soignants.

Parallèlement, il existe une initiative de sensibilisation nationale mise sur pied par la Société Alzheimer du Canada et ses homologues provinciaux et locaux, appelée Amis de la santé cognitive. Cette mobilisation du public aide à mieux comprendre les conséquences des maladies cognitives au quotidien, tout en soutenant adéquatement les personnes atteintes au sein de leur collectivité.

Comme son nom l’indique, ce programme vise à former des « amis » dans la communauté qui peuvent reconnaître et soutenir les gens atteints de troubles cognitifs dans la vie de tous les jours. Les personnes sensibilisées seront en mesure de mieux agir avec les personnes atteintes, afin de diminuer le risque de réaction agressive. Ainsi, la prise en charge se fera de façon plus sécuritaire et dans le respect de la condition du malade. L’éducation dispensée ne s’adresse pas seulement aux proches, mais à la population en général. Ainsi, tout le monde peut devenir « ami », en suivant les instructions en ligne qui sont proposées dans les deux langues officielles.

Ce projet s’inscrit dans le cadre d’un mouvement international inspiré du programme Dementia Friends — United Kingdom, créé dans la foulée d’un programme similaire au Japon.

En plus de ce qui a été énoncé, les personnes concernées devraient être encadrées par une équipe de soins interdisciplinaires, à domicile ou en résidence pour personnes âgées. Le système d’alerte Silver apporterait une valeur ajoutée à la sécurité et à la protection des personnes souffrant de démence.

Il est analogue au système d’alerte AMBER, qui a été conçu pour alerter la population de la disparition d’un enfant. Ce système compte sur la collaboration des corps policiers et des médias pour diffuser un avis de recherche. Une trentaine d’États américains, de même que le Manitoba, l’Alberta et la Colombie-Britannique, disposent d’une alerte pour les personnes âgées qui manquent à l’appel.

Les statistiques américaines relatives à l’alerte Silver démontrent qu’entre 92 et 99 p. 100 des aînés disparus sont retrouvés sains et saufs, et qu’entre 13 et 27 p. 100 de ces dénouements heureux sont directement attribuables à l’alerte Silver.

Nous avons adopté, l’an dernier, en cette Chambre, la Loi relative à une stratégie nationale sur la maladie d’Alzheimer et d’autres démences. Pour donner suite à cette loi, nous devrions appuyer la proposition d’adopter un cadre national sur l’alerte Silver. Ce serait un geste concret pour soutenir les familles qui sont aux prises avec ce problème.

Par conséquent, honorables sénateurs, pour la sécurité de nos aînés et des personnes les plus vulnérables de notre société, qui pourraient être nos proches ou nous-mêmes, plus tard, accordons notre appui à cette interpellation de l’alerte Silver.

Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Omidvar, au nom de la sénatrice Bernard, le débat est ajourné.)

(1640)

[Traduction]

Affaires étrangères et commerce international

Retrait de la motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

À l’appel des motions, article no 349, par l’honorable A. Raynell Andreychuk :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à se réunir, le mercredi 13 juin 2018, à 16 h 15, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Je veux retirer l’article no 349, qui demandait que le comité puisse siéger en même temps que le Sénat. La réunion du comité étant annulée, je retire la motion.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(La motion est retirée.)

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur des questions liées aux relations étrangères et au commerce international en général

L’honorable A. Raynell Andreychuk, conformément au préavis donné le 11 juin 2018, propose :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le mercredi 21 juin 2017, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international concernant son étude sur les questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant aux relations étrangères et au commerce international en général soit reportée du 30 juin 2018 au 30 juin 2019.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Agriculture et forêts

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l’impact potentiel des effets du changement climatique sur les secteurs agricole, agroalimentaire et forestier

L’honorable Diane F. Griffin, conformément au préavis donné le 11 juin 2018, propose :

Que, nonobstant l’ordre de renvoi du Sénat adopté le jeudi 9 mars 2017, la date du rapport final du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts concernant son étude sur l’impact potentiel des effets du changement climatique sur les secteurs agricole, agroalimentaire et forestier soit reportée du 30 juin 2018 au 21 décembre 2018.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comité de déposer deux rapports intérimaires sur les questions concernant les affaires sociales, la science et la technologie en général auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable Art Eggleton, conformément au préavis donné le 11 juin 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat deux rapports intérimaires sur les questions concernant les affaires sociales, la science et la technologie en général, entre le 18 juin et le 14 septembre 2018, si le Sénat ne siège pas, et que lesdits rapports soient réputés avoir été déposés au Sénat.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Transports et communications

Autorisation au comité de déposer son rapport sur les nouvelles questions liées à son mandat et les lettres de mandat ministérielles auprès du greffier pendant l’ajournement du Sénat

L’honorable David Tkachuk, conformément au préavis donné le 12 juin 2018, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer auprès du greffier du Sénat son rapport intérimaire sur son étude sur les nouvelles questions liées à son mandat et les lettres de mandats ministériels, durant la période allant du 2 juillet au 28 septembre 2018, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Le Sénat

Motion tendant à encourager le gouvernement à entamer des consultations auprès de différents groupes afin d’élaborer un programme national et universel de nutrition adéquatement financé et à frais partagés—Ajournement du débat

L’honorable Art Eggleton, conformément au préavis donné le 13 juin 2018, propose :

Que le Sénat encourage le gouvernement à entamer des consultations auprès des provinces, des territoires, des peuples autochtones et d’autres groupes intéressés afin d’élaborer un programme national et universel de nutrition adéquatement financé et à frais partagés, qui vise à garder les enfants et les jeunes en santé en leur enseignant des principes de nutrition et en leur fournissant un repas nutritif quotidiennement dans le cadre d’un programme assorti de mécanismes adéquats pour assurer une supervision indépendante de l’approvisionnement alimentaire, le respect des normes nutritionnelles et la gouvernance.

—Je vais m’efforcer d’être bref, chers collègues.

J’interviens au sujet de ma motion, qui réclame un programme national de nutrition pour les jeunes. Il y a un peu plus de deux ans, alors que j’étais vice-président du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, nous avions publié un rapport intitulé L’obésité au Canada : une approche pansociétale pour un Canada en meilleure santé.

L’étude nous a appris que les enfants grandissent dans une société qui encourage de plus en plus les mauvaises habitudes alimentaires et qui fait obstacle à un mode de vie sain. Le comité a recommandé notamment que le ministre de la Santé collabore avec ses homologues provinciaux et territoriaux afin de favoriser des programmes scolaires de petits déjeuners et de déjeuners ainsi que des cours de nutrition.

Cette recommandation est importante, car un programme public de repas destiné aux jeunes s’attaque au problème de la faim et contribue à une saine relation avec la nourriture. Non seulement un tel programme donne accès à des repas nutritifs, mais il facilite également la réussite scolaire et le bien-être de l’élève. En fournissant un repas nutritif à tous les enfants, un programme de nutrition universel appuie l’acquisition de bonnes habitudes alimentaires chez tous les enfants, peu importe leur milieu socioéconomique.

Les effets de l’alimentation sur la santé sont incontestables. Une mauvaise alimentation est régulièrement associée aux maladies du cœur, aux accidents vasculaires cérébraux, à l’hypertension, au diabète et à certaines formes de cancer. L’Association médicale canadienne estime que la mauvaise alimentation a causé la mort de plus de 65 000 personnes au Canada en 2010 seulement.

Honorables sénateurs, aujourd’hui au Canada, environ 13 p. 100 des enfants sont obèses et un autre 20 p. 100 souffrent d’embonpoint— c’est ce que nous avons relevé dans le rapport que nous avons publié. Le pourcentage d’enfants obèses a triplé au cours des 30 dernières années. La recherche sur l’obésité infantile nous apprend que les enfants obèses sont peu susceptibles de régler leurs problèmes de poids en grandissant. Selon la Childhood Obesity Foundation, si la tendance se maintient, d’ici 2040, jusqu’à 70 p. 100 des adultes de 40 ans souffriront d’embonpoint.

Donc, honorables collègues, pour éviter cet avenir, les enfants canadiens doivent connaître dès aujourd’hui un meilleur départ.

Pour y arriver, toutes les sphères de la société devront apporter leur contribution. Les parents, les enseignants, les entraîneurs, les municipalités, les provinces, les territoires et le fédéral auront un rôle à jouer dans cette lutte. Cette collaboration est nécessaire pour obtenir des résultats concrets en ce qui concerne la santé de nos enfants.

Nous savons que les enfants qui mangent des repas nutritifs se sentent mieux et apprennent plus facilement. Selon les conclusions d’une recherche menée par l’Université Harvard, les programmes de petits déjeuners améliorent considérablement les capacités cognitives des élèves, leur permettant d’être plus alertes et de mieux se concentrer. Ils ont de meilleurs résultats en lecture, en mathématiques et à d’autres tests normalisés. Les enfants qui mangent un petit déjeuner à l’école font beaucoup mieux que leurs pairs qui sautent ce repas. Ils sont moins souvent malades en plus d’avoir moins d’étourdissements, de périodes de léthargie et de douleurs à l’estomac ou aux oreilles. Les données sont claires et cohérentes.

Pourquoi donc y a-t-il tant d’enfants qui ont faim et qui souffrent de malnutrition dans un pays riche comme le Canada? Trop souvent, beaucoup de parents canadiens n’ont pas le temps ni l’argent pour cuisiner des repas sains et complets pour leur famille. Par conséquent, la consommation d’aliments préparés a explosé dans les dernières décennies. Selon l’Association médicale canadienne, étant donné que les aliments de valeur nutritionnelle moindre sont plus abordables que les choix sains, les personnes des foyers à revenu modique ont tendance à en consommer davantage.

Les enfants canadiens sont confrontés à des problèmes particulièrement graves en matière d’alimentation. Seulement le tiers d’entre eux consomment suffisamment de fruits et légumes. Le tiers des élèves du primaire et les deux tiers des élèves du secondaire vont à l’école sans avoir pris un petit déjeuner nutritif. Le quart des calories consommées par les enfants proviennent d’aliments qui ne sont pas recommandés par le Guide alimentaire canadien.

Pour s’en convaincre, il suffit d’aller à la cafétéria d’une école ou dans un centre sportif. On y sert souvent des pizzas, des croquettes de poulet, des frites, parfois des salades César; ce sont rarement des choix nutritifs. Puisqu’on sait que les enfants passent une bonne partie de leur journée dans ces endroits, il est important de s’assurer que des aliments sains y sont offerts. Les soins de santé coûtent cher à toute la société; nous devons donc surveiller cette situation malsaine.

Or, comment espérer y parvenir alors que les programmes actuels ne se fondent sur aucune norme nationale en matière de nutrition et ne peuvent pas compter sur une source de financement fiable? Dans bien des cas, on accepte des dons d’aliments malsains et transformés. C’est le cas de nombreux programmes de petits déjeuners au pays.

Comme je l’ai dit à plusieurs reprises dans cette Chambre, le pays a un défi énorme à relever en ce qui concerne la pauvreté. Trop de Canadiens n’ont pas les moyens de consommer des aliments sains. Ils comptent sur les banques alimentaires pour nourrir leur famille. Selon Statistique Canada, plus de 1 million d’enfants, soit environ 17 p. 100 des enfants canadiens, vivent dans la pauvreté. Selon les données de 2016 de Banques alimentaires Canada, près de 900 000 Canadiens, dont le tiers sont des enfants, doivent recourir aux banques alimentaires tous les mois.

Il ne faut pas s’y méprendre. Les mauvaises habitudes alimentaires et la malnutrition ont des répercussions considérables sur la santé et l’éducation des jeunes. Même si c’est difficile à croire, l’obésité chez les enfants est une forme de malnutrition. Nous avons tous vu des images d’enfants d’autres pays qui souffrent de malnutrition. Dans bien des cas, ils sont maigres et ils dépérissent. Soulignons toutefois que, d’après l’Organisation mondiale de la Santé, il y a malnutrition, c’est-à-dire mauvaise nutrition, lorsqu’une personne mange trop peu, ou qu’elle consomme trop d’aliments mauvais pour la santé. Au Canada, les problèmes de malnutrition touchent parfois des gens qui consomment beaucoup d’aliments mauvais pour la santé et de boissons sucrées parce que ces produits coûtent moins cher.

D’après un rapport de l’UNICEF publié à l’été 2017, le Canada occupe le 37e rang sur 41 pays en ce qui concerne l’accès des enfants à des aliments nutritifs. Selon le Conference Board du Canada, le Canada est l’un des seuls membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, qui n’a pas de programme national de nutrition pour les jeunes.

(1650)

Honorables collègues, aucun enfant ne devrait souffrir d’insécurité alimentaire. En tant que pays qui se targue d’être un chef de file mondial en santé et d’être dirigé par un gouvernement mettant l’accent sur les enfants et les familles, il est franchement honteux que nous n’ayons pas un tel programme.

La Finlande possède un programme national efficace de nutrition pour les jeunes dans le cadre duquel on donne chaque jour aux enfants des repas sains et équilibrés. Tandis qu’ils sont assis autour d’une table dans un esprit communautaire, un surveillant leur enseigne la nutrition, la saine alimentation et les bonnes manières à table. Voilà la combinaison gagnante d’un programme national de nutrition pour les jeunes. Au Brésil, les écoles qui disposent d’un programme d’alimentation scolaire sont tenues par la loi d’acheter 30 p. 100 de leurs aliments auprès de petits agriculteurs locaux.

Vous serez peut-être surpris d’apprendre que le gouvernement fédéral finance déjà des programmes qui offrent des repas nutritifs aux enfants. Le Club des petits déjeuners du Canada, qui a contribué au lancement de programmes de petits déjeuners partout au pays, permet de nourrir plus de 200 000 enfants chaque jour. Il a obtenu près d’un demi-million de dollars de financement du gouvernement fédéral lors de l’exercice 2016.

En octobre dernier, la ministre de la Santé a annoncé que l’Agence de la santé publique du Canada investirait plus de 1,2 million de dollars sur trois ans dans un programme appelé De la ferme à l’école : le Canada, une terre fertile! Ce programme encourage une saine alimentation, l’activité physique et le bien-être, tout en s’attaquant aux facteurs de risque communs qui sont à la base d’importantes maladies chroniques. Comme l’a dit la ministre de la Santé :

Je suis heureuse d’annoncer l’appui du gouvernement du Canada à ce projet, qui aidera les enfants et les jeunes canadiens à s’informer sur les aliments sains et à y avoir accès dans les écoles et sur les campus. Encourager les enfants et les jeunes à essayer des aliments sains et à se renseigner davantage sur la provenance des aliments contribuera à jeter les bases d’une saine alimentation qui durera toute une vie.

Honorables sénateurs, il n’est pas nécessaire de réinventer la roue. De nombreux groupes au pays, comme le Club des petits déjeuners, ont déjà des programmes nutritifs dont nous pouvons nous inspirer et que nous pouvons prendre comme point de départ pour le reste du pays.

La ville de Toronto, où j’habite, offre un grand nombre de programmes liés à l’alimentation à l’intention des jeunes. Le projet pilote de repas du matin gratuit mis en œuvre dans certaines écoles de la région par le conseil scolaire du district de Toronto en est un bel exemple. L’objectif était de voir quels seraient les effets d’une telle mesure sur la santé, le comportement, l’assiduité, l’attention et les résultats des élèves. Chez les élèves qui prenaient un petit déjeuner trois fois ou plus par semaine, on a constaté une amélioration du comportement et de la ponctualité, une diminution de la fréquence des problèmes de discipline, une amélioration de la concentration et une probabilité accrue de réussite scolaire comparativement aux autres élèves.

L’Alberta et la Nouvelle-Écosse ont récemment augmenté les sommes qu’elles investissent dans les programmes d’alimentation scolaire et de nombreux gouvernements se penchent sur les meilleurs moyens d’offrir des aliments sains.

Partout au pays, des organismes sans but lucratif trouvent des façons novatrices et de nourrir les enfants et de leur montrer à cuisiner, à jardiner et à resserrer les liens scolaires avec la nourriture.

Le problème est l’absence de normes nationales pour définir les aliments sains, pour encadrer ce qu’on sert dans les écoles et les installations de sport. De façon générale, les normes en matière d’alimentation consistent en un ensemble hétéroclite de lignes directrices incohérentes et peu solides dont les critères nutritifs varient énormément d’une province à l’autre. Certaines permettent encore la vente d’aliments à teneur élevée en gras, en sel et en sucre. L’accès à des aliments nutritifs n’est donc pas le même pour tous les enfants du pays.

Je pense que cette motion tombe à point nommé puisque la ministre de la Santé est à revoir le Guide alimentaire canadien dans le cadre de la stratégie du gouvernement en matière de saine alimentation. Cela s’inscrirait naturellement dans le prolongement de cette stratégie.

Honorables collègues, on ne peut plus fermer les yeux sur la crise de santé qui est en train de se développer rapidement au pays. Pour améliorer la santé de la population, il faut inculquer aux gens dès leur jeune âge de saines habitudes alimentaires. La mise en place d’un programme universel de nutrition, qui permettrait à tous les enfants canadiens d’avoir accès à des aliments sains et d’être sensibilisés aux principes de nutrition, est la bonne chose à faire, et c’est ce qu’il faut faire dès maintenant.

Merci beaucoup.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Motion tendant à exhorter le gouvernement à mettre fin aux relations diplomatiques avec l’Iran—Ajournement du débat

L’honorable Leo Housakos, conformément au préavis donné le 13 juin 2018, propose :

Que, à la lumière du changement considérable que le gouvernement du Canada a récemment adopté à l’égard de sa politique étrangère concernant l’Iran, lequel changement ne reflète pas la récente décision du Sénat de rejeter les principes du projet de loi S-219, Loi visant à dissuader l’Iran de parrainer des actes constituant du terrorisme, de l’incitation à la haine et des violations des droits de la personne, qui prévoyait notamment l’établissement d’un rapport annuel sur les violations des droits de la personne commis par l’Iran, le Sénat :

a)condamne fermement le régime iranien actuel parce qu’il continue de commanditer le terrorisme dans le monde entier et notamment de fomenter des attaques violentes à la frontière de Gaza;

b)condamne les récentes déclarations du chef suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, appelant au génocide contre le peuple juif;

c)demande au gouvernement :

(i)d’abandonner son plan actuel et de cesser immédiatement toute négociation ou discussion avec la République islamique d’Iran en vue du rétablissement des relations diplomatiques;

(ii)d’exiger que le régime iranien libère immédiatement tous les Canadiens et les résidents permanents du Canada qui sont actuellement en détention en Iran, dont Maryam Mombeini, veuve du professeur Kavous Sayed-Emami, et Saeed Malekpour, qui est emprisonné depuis 2008;

(iii)d’inscrire immédiatement la Brigade des Gardiens de la révolution islamique dans la liste des entités terroristes établie en vertu du Code criminel du Canada;

(d)se tient solidaire du peuple iranien et reconnaît que, comme tous les autres peuples, il a un droit fondamental à la liberté de conscience et de religion, à la liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de presse et d’autres formes de communication, à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet d’une motion qui, je crois, est très importante pour rectifier un faux pas du gouvernement libéral et rectifier un faux pas effectué par le Sénat il y a un mois à peine.

Chers collègues, il y a quelques jours, nous avons vu le gouvernement changer complètement son fusil d’épaule à l’égard d’une politique très importante. Il y a à peine un mois, ici même, le leader du gouvernement a fait valoir avec insistance que l’ancien projet de loi S-219, proposé par notre collègue le sénateur Tkachuk, engagerait le Canada sur une voie unilatérale, de sorte qu’il serait déphasé par rapport à la communauté internationale.

Le projet de loi S-219 proposait le maintien des sanctions déjà mises en place par le Canada contre le régime iranien jusqu’à ce que deux rapports annuels consécutifs concluent qu’il n’y a aucune preuve crédible établissant que le régime soutient le terrorisme international ou incite à la haine, et que l’Iran a réalisé des progrès considérables dans le respect des droits de la personne.

Le sénateur Harder a également fait valoir que l’adoption d’un tel projet de loi déphaserait le Canada par rapport à ses alliés. Plus précisément, il a affirmé ce qui suit :

[...] en prenant des mesures qui ne correspondent pas à celles de nos alliés et partenaires, ce projet de loi aurait un effet très limité sur le respect des droits de la personne de l’Iran et son soutien du terrorisme.

L’approche du gouvernement a été précisée dans une lettre envoyée à la sénatrice Andreychuk, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Dans cette lettre, le gouvernement affirme que :

Le gouvernement estime que c’est par le dialogue — et non par le retrait et l’isolement — qu’il peut le mieux promouvoir les intérêts du Canada […].

Il dit également ceci :

[…] le projet de loi S-219 limiterait la capacité du gouvernement du Canada d’entreprendre et de finalement conclure un processus complexe visant le rétablissement des relations diplomatiques avec l’Iran.

Quel revirement en un mois! Plus tôt cette semaine, le gouvernement libéral semblait condamner le régime iranien parce qu’il « continue de commanditer le terrorisme dans le monde entier ». Le gouvernement semblait également prêt à abandonner son plan actuel consistant à entretenir le dialogue avec l’Iran. Le voilà prêt à cesser toute négociation ou discussion en vue du rétablissement des relations diplomatiques et à inscrire immédiatement le Corps des Gardiens de la Révolution islamique dans la liste des entités terroristes établie en vertu du Code criminel du Canada.

La seule question que j’ai est la suivante : pourquoi cela a-t-il pris autant de temps?

Quand le gouvernement a dit, dans sa lettre à la sénatrice Andreychuk, qu’il voulait le rétablissement des relations diplomatiques avec l’Iran, cela faisait déjà des décennies que l’Iran soutenait le terrorisme international. Comme les sénateurs de ce côté-ci de la salle l’ont dit lors du débat sur le projet de loi S-219, l’idéologie islamiste révolutionnaire a mené l’Iran à appuyer le terrorisme international ainsi que des groupes terroristes, dont Al-Qaïda, le Hamas et des dizaines d’autres. Cette idéologie est le fondement même de sa politique internationale.

Le régime iranien est, depuis quatre décennies, le principal appui du Hezbollah, qui est probablement l’entité terroriste la plus puissante du monde. Le Hezbollah est si puissant qu’il constitue un État dans l’État au Liban. Le Hezbollah n’est pas seulement déterminé à détruire la seule démocratie au Moyen-Orient, l’État d’Israël, il participe également activement à la guerre civile en Syrie et est un proche allié du régime de Bachar al-Assad.

Ensemble, l’Iran, le Hezbollah et le régime Assad forment une troïka terroriste dans la région.

Une vaste gamme de documents de sources ouvertes nous apprennent que l’Iran a financé le Hezbollah. Il lui a fourni des armes, notamment des missiles à longue portée qui sont maintenant capables de frapper la plupart des régions d’Israël. L’Iran a fourni à ce groupe terroriste des conseils et du leadership, une violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Ce qui est choquant, en ce qui concerne notre débat d’aujourd’hui, c’est que le gouvernement du Canada est au courant de tout cela depuis bien longtemps. C’est en partie pour cette raison, honorables sénateurs, que l’ancien gouvernement conservateur a rompu, à juste titre, ses relations diplomatiques avec le régime iranien.

Il est important de reconnaître à quel point il est inhabituel, dans la communauté internationale, de rompre des relations diplomatiques. Il y a quelques pays avec lesquels le Canada a rompu toute relation, mais le fait qu’il a pris de telles mesures dans ce cas-ci témoigne de la menace que pose le régime sur la paix et la sécurité internationales.

(1700)

Étant donné la nature du régime iranien, il n’est guère surprenant que le « dialogue » que le gouvernement actuel voulait tenir avec l’Iran se soit avéré un échec.

Essentiellement, un régime qui cherche à renverser l’ordre international ne va pas soudainement changer sa stratégie ou ses tactiques parce qu’un très lointain pays — dans ce cas-ci, le Canada — l’exige. Pourtant, jusqu’à récemment, le gouvernement et de nombreux sénateurs qui se décrivent comme indépendants se sont accrochés, pour une raison ou une autre, à cette idée.

Lorsque nous avons été saisis du projet de loi S-219, c’est-à-dire le projet de loi qui aurait établi une base fondée sur des principes pour la politique du Canada à l’égard de l’Iran, le sénateur Woo a indiqué que, si le projet de loi était adopté, il :

[...] nuirait aussi aux efforts que déploie le Canada pour favoriser des changements constructifs en Iran par le rétablissement de liens diplomatiques avec Téhéran.

Maintenant que le gouvernement semble avoir rajusté son tir, j’espère que les sénateurs prendront au moins de temps de réfléchir à la question et de revoir les positions qu’ils ont défendues au Sénat à titre d’institution.

Je crois que ce qui a probablement donné matière à réflexion au gouvernement est le fait que le régime iranien a rejeté de façon aussi évidente les efforts du Canada dans les cas de Maryam Mombeini, Kavous Sayed-Emami et Saeed Malekpour. Ce qui est déplorable et tragique au sujet de la situation est que, bien que ces cas soient étonnamment flagrants, ils ne touchent que trois des dizaines de milliers de personnes qui ont été emprisonnées, abusées, torturées et assassinées par le régime au fils des décennies.

Nous avons eu vent de ces affaires à cause du lien qu’ont ces personnes avec notre pays, le Canada — leur nation d’adoption. Peut-être que ces affaires ont attiré notre attention sur les milliers, en fait, les millions de personnes qui ont souffert des politiques du régime iranien. Quelle qu’en soit la raison, il est encourageant de constater que le gouvernement a, du moins depuis cette semaine, modifié son approche.

Pour jeter les bases d’une bonne politique, je recommanderais au premier ministre, au gouvernement, à la ministre Freeland, au sénateur Harder et, en fait, au Cabinet tout entier le cadre prévu par le projet de loi S-219, qui constitue le meilleur fondement d’une solide approche de principe.

Le gouvernement a montré cette semaine qu’il était possible de changer de direction en abandonnant ce qui n’a manifestement pas fonctionné pour privilégier ce qui pourrait fonctionner.

Je crois donc qu’il est temps pour le Sénat de faire lui aussi preuve de sagesse et de procéder à un second examen objectif. Le mois dernier, cette institution a commis l’erreur de rejeter le projet de loi S-219. Je pense que, en votant en faveur de cette motion, nous pouvons contribuer à replacer sur la bonne voie la politique du gouvernement du Canada.

À titre de leader du gouvernement, le sénateur Harder a déclaré hier, en répondant à ma question sur le rétablissement de la politique du précédent gouvernement, qui prévoyait notamment l’imposition de sanctions : « J’espère qu’il s’agit d’une question sur laquelle les Canadiens et les parlementaires peuvent faire front commun. »

Je suis on ne peut plus d’accord avec vous, sénateur Harder, et je vous remercie, chers collègues, d’appuyer la motion.

Merci beaucoup.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

Les pouvoirs et les responsabilités du vérificateur général

L’affaire Petrofina de 1987—Interpellation—Fin du débat

L’honorable sénatrice Cools, ayant donné préavis le 7 juin 2018 :

Qu’elle attirera l’attention du Sénat sur les attributions du vérificateur général du Canada, agent autorisé par la Loi sur le vérificateur général de 1977 à être « le vérificateur des comptes du Canada », dont le poste et le bureau ont été constitués en 1878 par la loi intitulée Acte pour pourvoir à la meilleure audition des comptes publics; et sur l’affaire Petrofina (1987) à la Cour d’appel fédérale concernant la demande d’accès du vérificateur général à des documents en particulier concernant l’achat de Petrofina Inc., dans laquelle le juge Pratte, souscrivant à la décision du juge principal Heald, a conclu que « l’intimé est le “vérificateur des comptes du Canada”. Il n’est pas le vérificateur des comptes de sociétés d’État telles que Petro-Canada. »

— Honorables sénateurs je prends la parole au sujet de mon interpellation, l’interpellation no 49. Je parlerai ce soir d’un procès unique qui s’est déroulé à la Cour fédérale du Canada et qui impliquait Kenneth Dye, vérificateur général du Canada de 1981 à 1991, et qui est connue sous le nom d’affaire Petrofina de 1987. Son titre officiel est l’affaire Canada (Vérificateur général) c. Canada (Ministre de l’énergie, des mines et des ressources). Le procès Petrofina a beaucoup attiré l’attention surtout à cause des parties en cause, qui étaient des hauts placés de la hiérarchie de l’État, et à cause de la nature de l’affaire.

L’affaire Petrofina portait essentiellement sur la demande du vérificateur général qui voulait que le ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources, le ministre des Finances et leurs sous-ministres respectifs lui remettent certains documents, plus précisément les documents concernant la valeur des actions de Petrofina Inc. que le gouvernement du Canada avait achetées. Je précise, à l’intention de ceux qui n’ont jamais entendu parler de cette affaire, que c’était peu de temps après que le gouvernement du Canada eut acquis Petrofina Canada Ltd des mains de ses anciens propriétaires belges.

Chers collègues, la question du mandat, de l’autorité et des pouvoirs légaux du vérificateur général est soulevée dans la décision rendue en 1987 par la Cour d’appel fédérale. Le 22 janvier 1987, le juge Darrel Heald écrivait les observations judicieuses suivantes, au paragraphe 15 :

Je ne crois pas qu’une juste interprétation du paragraphe 13(1) de la Loi sur le vérificateur général impose la conclusion que, en vertu de l’autorité de ce paragraphe, le vérificateur général a le droit, selon les faits en cause, de se faire communiquer tous les documents du Cabinet relatifs à l’acquisition de Petrofina. De même, j’estime que le paragraphe 13(1) ne permet pas au vérificateur général de prendre connaissance des registres de Petro-Canada. Le paragraphe 13(1) doit être analysé attentivement. En voici le libellé :

13.(1) Sous réserve des dispositions d’une autre loi du Parlement qui se réfèrent expressément au présent paragraphe, le vérificateur général a le droit, à tout moment convenable, de prendre connaissance librement de tout renseignement se rapportant à l’exercice de ses fonctions; à cette fin, il peut exiger que les fonctionnaires fédéraux lui fournissent tous renseignements, rapports et explications dont il a besoin.

Le juge Heald, de la Cour d’appel fédérale, poursuit ainsi, au paragraphe 16 :

La partie préliminaire du paragraphe 13(1) qui restreint aux renseignements se rapportant à « l’exercice de ses fonctions » le droit du vérificateur général de prendre connaissance de certains renseignements, est séparée du reste du paragraphe par la conjonction « and » dans la version anglaise et par un point-virgule dans la version française. Donc, le large pouvoir discrétionnaire conféré au vérificateur général dans la seconde partie du paragraphe ne vise que les « fonctionnaires fédéraux » et non les ministres de la Couronne, les membres du Conseil privé de la Reine ni les employés de Petro-Canada.

Chers collègues, le juge mentionne clairement que, dans le cadre du large pouvoir conféré au vérificateur général, l’expression « à l’exercice de ses fonctions » au paragraphe 13(1) ne concerne que le vérificateur général et exclusivement dans son rôle constitutionnel de vérificateur des comptes publics et des dépenses publiques du Canada.

Honorables sénateurs, la Couronne, le Sénat et la Chambre des communes ne sont pas assujettis aux droits et aux pouvoirs du vérificateur général. Le juge Louis Pratte, de la Cour d’appel fédérale, a exprimé son accord avec le juge Heald et il a dit ce qui suit, au paragraphe 3 :

L’intimé est le « vérificateur des comptes du Canada ». II n’est pas le vérificateur des comptes des sociétés de l’État telles que Petro-Canada. Quels que soient ses droits en vertu des articles 13 et 14, il ne peut les exercer que dans l’exercice de ses fonctions de vérificateur des comptes du Canada.

Chers collègues, plus tard, en 1989, le vérificateur a porté l’affaire Petrofina en appel devant la Cour suprême du Canada. Dans la décision de la cour, le juge en chef Brian Dickson a déclaré que les pouvoirs et les devoirs du vérificateur se limitent à ceux que le Parlement — le représentant de la Couronne, le gouverneur général, le Sénat et la Chambre des communes — lui a conférés dans la loi le concernant, la Loi sur le vérificateur général de 1977. Le juge en chef de la Cour suprême, le juge Dickson, a défendu le rôle du Parlement et a déclaré ce qui suit dans son jugement, à la page 103 :

La règle fondamentale que les tribunaux doivent appliquer dans ce contexte est celle de la souveraineté du Parlement. Les ministres de la Couronne restent en fonction suivant le bon vouloir de la Chambre des communes et toute position qu’adopte la majorité est censée refléter la volonté souveraine du Parlement. Étant donné que le Parlement a indiqué, dans la Loi sur le vérificateur général, qu’il souhaitait que son propre préposé lui fasse rapport sur les refus d’accès à des renseignements nécessaires à l’exercice de ses fonctions pour le compte du Parlement, il ne serait pas opportun que cette Cour envisage d’accorder réparation, le cas échéant, pour de tels refus.

Honorables sénateurs, ces savants juges des cours supérieures, tant de la Cour fédérale que de la Cour suprême du Canada, ont été clairs quant à la nature, au caractère et aux limites des pouvoirs du vérificateur général, tels qu’ils sont indiqués et édictés dans la Loi sur le vérificateur général de 1977, qui ne lui accorde absolument aucun pouvoir pour procéder à la vérification des deux Chambres du Parlement, et encore moins du Sénat. Malheureusement, le vérificateur général voyait la vie différemment.

Chers collègues, il y a lieu de se poser des questions quand on regarde l’examen du Sénat et des dépenses des sénateurs que M. Ferguson, le vérificateur général, a effectué de 2013 à 2015, et c’est ce que je ferai maintenant.

Honorables sénateurs, le 4 juin 2015, quelques jours seulement avant l’ajournement d’été du Sénat, le vérificateur général du Canada, Michael Ferguson, a présenté au Président du Sénat, l’honorable sénateur Leo Housakos, son rapport dûment signé, mais qui avait déjà trop tardé, portant sur son examen déconcertant de deux ans entourant le Sénat et les dépenses des sénateurs en déclarant ceci :

(1710)

J’ai l’honneur de vous transmettre ci-joint le Rapport du vérificateur général du Canada au Sénat du Canada — Dépenses des sénateurs de juin 2015. Ce rapport complète l’audit exhaustif des dépenses du Sénat, y compris les dépenses des sénateurs, que le Sénat a demandé en juin 2013.

Veuillez agréer mes salutations distinguées.

Le vérificateur général du Canada,

Michael Ferguson, CPA, CA, FCA (Nouveau-Brunswick)

OTTAWA, le 4 juin 2015

Honorables collègues, la déclaration de transmission du vérificateur général décrivait son examen scandaleux du Sénat, tout comme sa réponse à la demande d’examen du Sénat qui lui a été faite le 5 juin 2013. Ce terme curieux, « demande », semble être une tentative juridique pour justifier son examen des sénateurs, qui n’est d’ailleurs ni autorisé ni permis par la Loi sur le vérificateur général. Bref, le vérificateur général n’avait aucun pouvoir législatif pour mener cet examen des sénateurs. Cette absence d’un tel pouvoir législatif est une ombre qui continue de planer au-dessus du Sénat et des sénateurs, et il est difficile de l’oublier ou de l’ignorer. On en est venu au point où des sénateurs ont été dénoncés à la police, si on se souvient bien. Nous y viendrons.

Honorables sénateurs, la déclaration de transmission du vérificateur général n’indique pas clairement les pouvoirs législatifs précis et l’article en cause dans la Loi sur le vérificateur général sur lequel le vérificateur général s’est appuyé pour justifier son examen inhabituel et prolongé du Sénat et des sénateurs.

Une voix : Et les coûts.

La sénatrice Cools : Et les coûts. C’était énorme. Nous en parlerons dans un moment.

Sa déclaration de transmission ne disait rien au sujet de ce fait essentiel dans cet examen des sénateurs et du Sénat hautement médiatisé. Cette omission révèle le bourbier constitutionnel colossal que représentait — et représente encore — l’examen de 2013 à 2015 du Sénat et des sénateurs.

Je signale qu’aucune des lois, actuelles ou passées, sur le vérificateur général ne lui ont jamais conféré ou accordé le pouvoir juridique ou légal de soumettre l’une ou l’autre des Chambres du Parlement à une vérification, qu’il s’agisse du Sénat ou de la Chambre des communes, et encore moins à une vérification aussi politisée et d’une aussi grande envergure. La vérification dont le Sénat et les sénateurs ont fait l’objet n’était rien d’autre qu’un exercice politique de mauvais goût — de très mauvais goût, même — qui profitait d’un flou politique et constitutionnel pour jeter l’opprobre sur le Sénat et les sénateurs, comme nous l’a d’ailleurs prouvé le ton du rapport publié en juin 2015. Je pense, entre autres, aux 30 sénateurs qui y sont nommément désignés. C’est bien ce que j’ai dit : ces 30 sénateurs ont été désignés par leur nom et traînés dans la boue. Je n’avais jamais vu une chose pareille dans aucun rapport produit par un vérificateur général jusqu’ici. Et j’en ai lu, croyez-moi.

Ce rapport de vérification avait aussi ceci d’inédit et d’offensant qu’il confiait à l’honorable Président du Sénat, à l’époque Leo Housakos, la détestable et inhabituelle tâche de remettre les dossiers de 9 des 30 sénateurs en question à la Gendarmerie royale du Canada pour qu’elle fasse enquête. C’est étrange, parce que les pouvoirs de renvoi du Sénat se limitent aux seuls travaux du Sénat et de ses comités. Ils n’autorisent donc aucunement, même de loin, la communication du dossier d’un sénateur donné à la police, simplement parce que le vérificateur général du Canada l’a ordonné. Voici ce qu’on peut lire à la page 29 du rapport de 2015 du vérificateur général:

Le Bureau du vérificateur général a été chargé d’effectuer un audit exhaustif indépendant des dépenses du Sénat, y compris les dépenses des sénateurs, et de fournir une information, une assurance et des avis objectifs au Sénat afin de l’aider à examiner soigneusement la gestion des ressources du Sénat. Cet audit de performance est le premier audit que le Bureau du vérificateur général effectue des dépenses individuelles des sénateurs. À cet égard, il se distingue de la plupart des audits de performance du Bureau, du fait qu’il visait un ensemble de personnes plutôt qu’une institution. Les résultats de l’audit sont donc présentés pour le Sénat dans son ensemble et pour des sénateurs individuellement.

Chers collègues, le vérificateur général était à la fois l’auteur du rapport et l’architecte de la vérification des dépenses du Sénat. Malgré cela, dans sa dernière phrase, il a exprimé ses conclusions non pas à la voix active, mais à la voix passive. Il a écrit ce qui suit :

Les résultats de l’audit sont donc présentés pour le Sénat dans son ensemble et pour des sénateurs individuellement.

Honorables sénateurs, l’utilisation extravagante des fonds publics aux fins de cette vérification était tout à fait injustifiée et complètement inutile, comme l’a souligné la professeure Lee Tunstall, de l’Université de Calgary. Dans un article paru le 16 juin 2015 dans les nouvelles en ligne du Huffington Post, Lee Tunstall a écrit ceci :

Le vérificateur général a dépensé environ 23 millions de dollars pour cette enquête et a relevé moins de 1 million de dollars de dépenses discutables sur 180 millions de dollars de dépenses qui ont fait l’objet de l’enquête. Par conséquent, nous, les contribuables patients et généreux, avons payé 23 millions de dollars pour apprendre que 0,5 p. 100 des dépenses du Sénat étaient discutables. Devrions-nous être indignés? Oui, tant par le coût de l’enquête que par l’atteinte à la réputation de la Chambre haute du Canada.

J’attire aussi votre attention sur un article d’Ian MacDonald publié le 9 juin sur le site web iPOLITICS au sujet de la vérification des dépenses du Sénat et des sénateurs, intitulé « Le vérificateur général et le Sénat : 23 millions de dollars pour récupérer 1 million? C’est sérieux? » Voici ce qu’il a écrit :

La réputation des sénateurs n’est pas la seule à se jouer ici: celle de Ferguson est aussi en jeu. Oublions pour l’instant les neuf sénateurs dont le dossier a été transmis à la GRC; si Binnie rejette ses conclusions à propos d’une grande partie ou de la plupart des 21 sénateurs, la réputation professionnelle de Ferguson — et celle de ses consultants — sera en péril. Si cela se produit, il devra penser à son propre avenir, ne serait-ce que pour préserver l’intégrité et l’image du bureau du VG.

Chers collègues, le rapport de juin 2015 du vérificateur général contient plusieurs conclusions au sujet de la surveillance, la reddition de comptes et la transparence à l’égard des dépenses des sénateurs. Il contient également certaines recommandations générales quant à la façon d’améliorer la procédure pour les demandes de remboursement de frais des sénateurs. Le rapport comprend deux annexes. La première est intitulée « Annexe A - Dossiers recommandés pour renvoi à d’autres autorités ». L’annexe A fait état des cas et dossiers de neuf sénateurs que le Comité de la régie interne est appelé à renvoyer à d’autres autorités, c’est-à-dire la Gendarmerie royale du Canada, aux fins d’une enquête plus poussée.

La seconde annexe, l’annexe B, énumérait le nom de 21 autres sénateurs qui, selon le vérificateur général, devaient faire l’objet d’une évaluation plus poussée par le Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration.

Selon le rapport de juin 2015 du vérificateur général remis au Sénat, au sujet des dépenses des sénateurs, le nom de ces neuf sénateurs figurait à l’annexe A, au lieu de l’annexe B, pour l’une des deux raisons énoncées, ou les deux. Soit les sénateurs visés avaient soumis des demandes de remboursement de frais de subsistance inadmissibles en s’appuyant sur une déclaration non prouvée de leur résidence principale, soit, pour reprendre les termes du vérificateur général au paragraphe 119, à la page 23 du rapport :

L’absence généralisée d’éléments probants ou la présence d’éléments probants contradictoires nous a empêchés d’exprimer une opinion d’audit, à savoir si les dépenses avaient été engagées dans l’exercice d’activités parlementaires.

Honorables sénateurs, je remarque que le vérificateur général n’a pas fourni de raisons juridiques, parlementaires ou liées à l’audit pour expliquer pourquoi ces facteurs étaient suffisants pour entamer des enquêtes et des poursuites criminelles contre les sénateurs dont on a transmis les dossiers à la GRC.

Il est question ici du Sénat du Canada. Ce genre de comportement est tout simplement inacceptable de la part de tout titulaire de charge publique.

En fait, dans son rapport de 2015, le vérificateur général n’a nullement expliqué en quoi les préoccupations au sujet des demandes de remboursement liées à la résidence principale justifiaient le renvoi de cas à la GRC…

Son Honneur le Président : Sénatrice Cools, votre temps est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

La sénatrice Cools : Oui. Merci.

Son Honneur le Président : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Cools : Merci.

… aux fins d’enquête criminelle, tandis que celles qui touchaient d’autres demandes n’ont pas été transmises. De même, le rapport ne précise pas les raisons pour lesquelles l’incapacité du vérificateur général d’exprimer une opinion d’audit serait un indicateur que certains cas méritaient de lourdes enquêtes criminelles pour porter des accusations qui impliquent des poursuites criminelles, avec toute la vigueur et la gravité que cela implique.

(1720)

Je parle du mens rea, soit l’intention criminelle ou coupable. Le mens rea suppose ou affirme que le sénateur nommé et identifié savait qu’il allait commettre un méfait en présentant des demandes de remboursement injustifiées et qu’il en avait l’intention. Le rapport de vérification de 2015 de M. Ferguson au Sénat sur les dépenses des sénateurs n’indique pas comment et pourquoi les craintes qu’il avait concernant une conduite illégale volontaire l’ont amené à reconnaître dans son rapport que les avis divergeaient sur l’effet des modifications apportées à la Politique régissant les déplacements des sénateurs.

Honorables sénateurs, parmi les conclusions du vérificateur général à l’annexe A de son rapport, il y a le fait que les déclarations de résidence principale des sénateurs n’étaient pas faites correctement et que les dépenses des sénateurs n’étaient pas faites dans l’exercice de leurs fonctions. Dans certains cas, ces conclusions concernaient des dépenses inappropriées et, dans d’autres cas, il s’agissait de cas où le vérificateur général n’avait pu déterminer si les dépenses étaient appropriées. Le vérificateur général Ferguson lui-même laisse entendre que, dans certains cas, cette impossibilité était attribuable au fait qu’il semblait, ou était évident, que certains sénateurs n’étaient pas disposés à lui fournir leurs documents et relevés. Il n’est pas clair si la réticence des sénateurs venait de leur doute quant au champ de compétence du vérificateur général, même si des discours avaient déjà été prononcés à ce sujet au Sénat, dont le mien, le 6 juin 2013, lors duquel j’ai affirmé que le vérificateur général n’avait ni le pouvoir, ni l’autorité, ni la compétence nécessaires pour faire des vérifications sur le Sénat et les sénateurs.

Merci de votre attention, chers collègues. J’ai encore trois discours à donnerau cours des prochains jours. Je vous remercie.

Je vais utiliser ma dernière minute. Nous ne pourrons jamais connaître la douleur, l’angoisse et la souffrance qu’ont éprouvées ces sénateurs lorsqu’on les a informés que leur dossier était renvoyé à la police. Je connaissais tous ces sénateurs et je dirais que j’étais très proche de certains d’entre eux. Je peux vous dire que je les ai épaulés et que j’ai veillé à les soutenir tout au long de cette épreuve qu’ils ont subie sans aucune raison.

L’honorable Michael Duffy : La sénatrice Cools accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Cools : Avec joie.

Son Honneur le Président : Il vous reste deux minutes.

Le sénateur Duffy : La sénatrice Cools est-elle au courant de l’article du Huffington Post du 1er décembre 2015 qui dit que, selon certaines sources, Leo Housakos, Président du Sénat, a divulgué le rapport du vérificateur général?

La sénatrice Cools : J’en ai entendu parler et je pense même l’avoir lu, mais je dois vous dire que je ne crois pas du tout que le sénateur Housakos ait mal agi.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Honorables sénateur, si aucun autre sénateur ne souhaite prendre la parole, cela mettra un terme au débat sur cette question.

(Le débat est terminé.)

(À 17 h 23, le Sénat s’ajourne jusqu’au lundi 18 juin 2018, à 18 heures.)

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