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ILLE - Comité spécial

Drogues illicites (spécial)

 

UTILISATION DU CANNABIS À DES FINS MÉDICALES :

HISTORIQUE ET SITUATION ACTUELLE

Harold Kalant, M.D., Ph.D.
Professeur émérite 

Service de pharmacologie, University of Toronto
et
Centre de toxicomanie et de santé mentale, Ontario


Titre courant : Utilisation du cannabis et des cannabinoïdes à des fins médicales

Adresse pour le courrier :

Dr H. Kalant
Department of Pharmacology
Medical Sciences Building
University of Toronto
Toronto (Ontario) M5S 1A8
Téléphone : (416) 978-2730
Télécopieur : (416) 978-6395
Courriel : harold.kalant@utoronto.ca


 SOMMAIRE

OBJECTIF : Donner un aperçu de l’histoire et de la pharmacologie du cannabis en rapport avec les connaissances scientifiques actuelles concernant l’utilisation actuelle et potentielle des préparations à base de cannabis et des cannabinoïdes purs à des fins thérapeutiques.

MÉTHODE : La documentation portant sur l’utilisation du cannabis et des cannabinoïdes à des fins thérapeutiques a été évaluée en ce qui a trait à la conception des études, à la qualité et à la variabilité des données, aux répliques indépendantes faites par le même chercheur ou d’autres, à l’ampleur des effets, à la comparaison avec d’autres traitements disponibles et aux effets indésirables. Les résultats de cet examen ont en outre été comparés avec ceux des grandes études internationales ayant porté sur ce sujet au cours des cinq dernières années.

CONCLUSIONS : Le THC pur et plusieurs analogues ont produit des avantages thérapeutiques importants en rapport avec le soulagement des nausées et des vomissements et la stimulation de l’appétit chez les patients atteints de cachexie. Des preuves récentes démontrent clairement des effets analgésiques et antispasmodiques qui s’avéreront probablement cliniquement utiles. La réduction de la pression intra-oculaire dans le glaucome et de la bronchodilatation dans l’asthme n’est pas suffisamment importante, durable et fiable pour justifier l’utilisation à des fins thérapeutiques. L’effet anticonvulsivant du cannabidiol est suffisamment prometteur pour justifier des essais cliniques bien conçus. On manque encore de données pharmacocinétiques à long terme ainsi que de renseignements sur l’interaction médicamenteuse.

Pour toutes les utilisations actuelles et futures, les cannabinoïdes purs, administrés par la bouche, le rectum ou par la voie parentérale, se sont avérés efficaces et ne présentent pas de risque d’une maladie inflammatoire chronique des voies respiratoires ni d’un cancer des voies respiratoires supérieures, ces maladies associées à l’inhalation de la fumée du cannabis brut. L’inhalation de la fumée peut être justifiée pour des motifs de compassion chez les malades en phase terminale déjà habitués à consommer le cannabis de cette façon. Les recherches futures produiront probablement de nouveaux analogues synthétiques comportant une meilleure séparation des effets thérapeutiques de la psychoactivité indésirée et des autres effets secondaires, ainsi que des propriétés, en matière de solubilité, qui pourraient permettre une administration topique dans l’œil ou une inhalation par aérosol pour un effet systémique rapide sans les risques associés à l’inhalation de la fumée.

 

Mots clés : Cannabis, cannabinoïdes, historique, utilisation thérapeutique, mode d’administration, effets indésirables.

En dépit de la récente vague d’intérêt à l’égard de l’utilisation du cannabis à des fins médicales, il vaut la peine de se souvenir que le cannabis n’est pas un médicament nouveau. Il est utilisé depuis très longtemps à des fins médicales et autres dans de nombreuses régions du monde. Avant d’analyser les essais cliniques possibles du cannabis ou des cannabinoïdes, il y a quelque chose d’utile à apprendre en rappelant un peu de cette histoire.

 

Historique

Le cannabis, ou chanvre, est connu depuis l’antiquité et pousse presque partout dans le monde, mais il a surtout été connu comme source de fibres pour la fabrication de tissus et de cordages1. Dans la plupart des régions productrices de fibres, la plante n’a pas été utilisée comme un médicament. Des facteurs géographiques et climatiques modifient la teneur des substances pharmacologiquement actives dans la plante, et ce n’est que dans quelques régions que cette teneur était suffisamment élevée pour mener à la découverte du fait que la plante, et en particulier sa résine, avait des effets médicamenteux importants. Il semble que ces effets aient été connus d’abord dans la région de l’Himalaya, en Asie centrale, puis que cette connaissance se soit propagée graduellement en Inde, en Asie mineure, en Afrique du Nord, en Afrique subsaharienne et dans le reste du continent africain2-4.

En Inde, la plante a été utilisée à des fins médicales et à d’autres fins5. Ses utilisations sociales et religieuses étaient liées principalement au festival de Durga Puja. À quelques autres occasions au cours de l’année, on utilisait également la plante au cours des célébrations familiales, comme à l’occasion des mariages et des naissances, pour favoriser la relaxation et les rapports sociaux et stimuler l’appétit. On n’utilisait que des préparations faibles : le bhang (semblable à la marijuana) était consommé par la bouche, et la préparation légèrement plus forte, le ganja, était fumée, mais la préparation la plus forte, le charas (connue ailleurs sous le nom de « haschisch ») n’était pas utilisée à ces fins. En fait, l’utilisation du charas n’était socialement approuvée pour aucune fin, et ses consommateurs étaient perçus comme des gens de mauvaise moralité ou des parias.

Le cannabis faisait partie du matériel thérapeutique de la médecine indienne traditionnelle, et un grand nombre des usages qu’on en faisait étaient semblables à ceux pour lesquels on plaide sa cause dans notre propre société aujourd’hui. On lui attribuait des vertus sédatives, relaxantes, anxiolytiques et anticonvulsivantes qui le rendaient utile pour le traitement du sevrage de l’alcool et des opiacés; on lui reconnaissait des propriétés analgésiques, antipyrétiques et antibactériennes; on l’utilisait en outre pour stimuler l’appétit et soulager la diarrhée 6.

L’introduction des effets du cannabis en Europe au 19e siècle a suivi des voies différentes pour les utilisations médicales et non médicales. En France, on s’est surtout intéressé à l’application non médicale des effets psychoactifs, tandis qu’en Angleterre, l’intérêt était surtout d’ordre médical. Durant l’invasion de l’Égypte par Napoléon en 1798, De Sacy et Rouyer, deux Français érudits qui accompagnaient l’armée, ont décrit la plante et les effets de l’inhalation de la fumée du haschisch, et ils ont rapporté en France des échantillons de la substance pour les étudier de façon plus approfondie4. Le célèbre psychiatre français, Moreau de Tours, a fait d’autres observations de ses effets sur l’humeur au cours des voyages en Afrique du Nord qu’il fit dans la décennie 1830. Il a plus tard décrit en détail les effets mentaux des fortes doses de haschisch et il a avancé l’hypothèse que les rêves, la folie et l’ivresse induite par les drogues mettaient en cause des mécanismes semblables. Il a proposé l’utilisation du haschisch pour produire une « psychose expérimentale » en vue d’une étude scientifique7,8, un siècle avant que ce concept ne soit proposé en Amérique du Nord en relation avec le LSD et la mescaline, des hallucinogènes. À Paris, le « Club des Haschichins » était florissant dans les années 1850, avec des membres comme les poètes et auteurs Baudelaire, Gauthier et Dumas. Ils ont servi de sujets pour les expériences de Moreau et leurs écrits ont mis en vogue le haschisch qui, selon eux, permettait aux artistes d’exploiter leurs talents à fond; cet argument sera repris par Ginsberg et d’autres aux État-Unis plus d’un siècle plus tard.

Par ailleurs, au Royaume-Uni, l’intérêt à l’endroit du cannabis a été suscité par les écrits médicaux et scientifiques de O'Shaughnessy9, un médecin britannique qui enseignait la chimie et la médecine à Calcutta, en Inde. Il a constaté que la médecine traditionnelle indienne utilisait le cannabis pour le traitement des troubles spasmodiques et convulsifs, comme dans le cas de l’« hydrophobie » (la rage), le tétanos, le choléra et le delirium tremens. Il a envoyé une certaine quantité de substance à une société pharmaceutique de Londres en vue d’une analyse et d’essais cliniques. Les extraits de cannabis ont été adoptés dans la pharmacopée britannique et plus tard dans la pharmacopée américaine, et on les utilisait largement dans le monde anglophone à titre d’agents sédatifs, hypnotiques et anticonvulsivants à la fin du 19e siècle et au début du 20e 10,11.

Et pourtant, au moment où le cannabis a été éliminé de la pharmacopée britannique en 1932 et de la pharmacopée américaine en 194112, son utilisation clinique était pratiquement disparue et son interdiction officielle n’a soulevé que peu de protestations, sinon aucune. Ce discrédit était dû au fait que le matériel végétal était trop variable dans sa composition, que sa durée de conservation était trop brève et imprévisible13 et qu’il avait été de plus en plus remplacé par des opiacés purs et de nouveaux médicaments synthétiques plus fiables inventés au début du 20e siècle2,11. Le cannabis devrait donc être grandement amélioré à titre de médicament pour regagner un intérêt sur le plan clinique.

 

 

Études chimiques du début et de l’époque moderne

La très grande liposolubilité des substances responsables des effets médicamenteux du cannabis était connue en Afrique du Nord, où une pratique fréquente consistait à chauffer les feuilles et les sommités fleuries de la plante dans un mélange de beurre et d’eau10. Les substances médicamenteuses actives se concentraient dans le beurre et, à mesure que le mélange se refroidissait, le beurre pouvait être séparé de l’eau et utilisé dans des préparations consommées oralement pour produire les effets désirés. En 1857, les frères Smith d’Edinburgh ont préparé une fraction non alkaloïdique comportant une forte activité médicamenteuse, et les extraits alcooliques ou les résidus secs obtenus à partir de ces extraits ont plus tard été normalisés pour leur activité biologique, ce qui a constitué le fondement des préparations officinales. En 1899, Wood, Spivey et Easterfield ont tenté d’isoler les agents actifs de ces préparations, mais leur « cannabinol » avait très peu d’activité pharmacologique et s’est révélé être un mélange plutôt qu’un composé unique (cité par Todd14).

Ce n’est que dans les années 1930 et 1940 que Todd et ses collaborateurs, au Royaume-Uni, ainsi qu’Adams et les siens, aux États-Unis, ont isolé du cannabidiol pur et divers tétrahydrocannabinols et ont montré que ces derniers étaient responsables des effets psychoactifs. La figure 1 illustre la relation entre les préparations à base de cannabis brut (marijuana et haschisch) et les cannabinoïdes purs. Parmi les nombreux composés chimiques isolés du cannabis, seuls trois d’entre eux ont les effets psychoactifs pour lesquels le cannabis est utilisé à des fins non médicales : le Ä9-tétrahydrocannabinol (Ä9-THC), le Ä8-tétrahydrocannabinol (Ä8-THC) et (très faiblement) le cannabinol17,18. Un quatrième cannabinoïde naturel, le cannabidiol, a d’autres types d’effets pharmacologiques, mais n’est pas psychoactif.

Enfin, Mechoulam et ses collaborateurs19, en Israël, et Claussen et Korte20, en Allemagne, ont réussi la synthèse complète des composés purs, établi leur structure moléculaire et commencé à étudier les relations entre leur structure et leurs effets. Ces travaux ont mené à la synthèse de nouveaux dérivés et analogues des cannabinoïdes qui n’existent pas dans la nature. Armés de ces produits chimiques purs et puissants, Devane et ses collaborateurs21 ont identifié des sites de fixation particuliers (récepteurs cannabinoïdes) dans le cerveau et ont montré que les différents composés avaient tendance à se fixer aux récepteurs proportionnellement à la puissance de leur activité biologique. Comme les cannabinoïdes eux-mêmes n’existent pas dans le cerveau, l’existence des récepteurs supposait qu’une autre substance endogène présente dans le cerveau se fixait normalement à eux. Devane et ses collaborateurs22 ont plus tard fait part de l’isolement de l’anandamide (arachidonyl-éthanolamine), une substance lipidique liée aux prostaglandines qui est formée localement dans le cerveau et se fixe aux récepteurs, produisant ainsi des effets semblables à ceux des cannabinoïdes, mais moins puissants. On a par la suite identifié l’arachidonyl-glycérol et plusieurs autres substances semblables.

On a découvert qu’il y avait au moins deux types différents de récepteurs cannabinoïdes3,23, soit les récepteurs CB1 présents surtout dans diverses parties du cerveau (le cortex cérébral, le cervelet, les noyaux gris centraux, le système limbique, l’hypotalamus et l’hippocampe), et les récepteurs CB2, présents exclusivement dans les tissus périphériques comme le système immunitaire, la moelle osseuse, les poumons, le pancréas et les muscles lisses. Les deux types de récepteurs sont liés à la protéine inhibitrice G par le truchement de laquelle ils inhibent l’activité de l’adénylcyclase, empêchant ainsi l’activation de divers canaux calciques dans la membrane des cellules tout en augmentant l’afflux de K+ 3,23. Les résultats fonctionnels varient selon les différents types de neurones. Les neurones inhibiteurs sont activés et une plus grande quantité de GABA est libérée24, alors que dans les motoneurones, l’excitabilité des cellules et la libération de neurotransmetteurs diminuent. L’isolement des différents types de récepteurs a rendu possible la mise au point de composés entièrement synthétiques dotés d’une grande affinité sélective pour un type ou l’autre, certains agissant comme agonistes et d’autres comme antagonistes18. La disponibilité de ces ligands liés à des récepteurs particuliers a permis de réaliser des progrès rapides dans l’analyse des mécanismes cellulaires sous-jacents à divers effets pharmacologiques des cannabinoïdes. La figure 2 montre les structures de certains des principaux cannabinoïdes naturels et synthétiques et le tableau 1, leur affinité relative pour les récepteurs CB1 et CB2.

 

 

Pharmacocinétique

Les cannabinoïdes peuvent être administrés de diverses façons. En raison de leur grande liposolubilité, une administration topique est possible dans des endroits comme les yeux et la muqueuse nasale. Toutefois, comme les préparations à base de THC disponibles dans le passé avaient tendance à irriter25 les yeux, cette pratique n’a pas été très répandue. Mais de nouveaux moyens qui permettent d’appliquer des substances liposolubles sur les yeux dans une solution aqueuse pourraient raviver l’intérêt à l’égard de cette pratique26. En théorie, une absorption percutanée, à l’instar des timbres transdermiques imprégnés d’un médicament, devrait être possible, mais l’absorption serait très lente et non utile sur le plan clinique.

Une administration par la voie orale entraîne une absorption lente et variable, avec une biodisponibilité de 10 à 20 % généralement inférieure à 15 %3,27-29. Il y a également une importante captation hépatocytaire à partir du sang de la veine porte, et un métabolisme de premier passage actif dans le foie. Néanmoins, cela n’entraîne pas une diminution de l’activité pharmacologique, parce que le principal métabolite de premier passage, le 11-hydroxy-THC, est un agent psychoactif au moins aussi puissant que le THC lui-même3. Le THC peut en outre être converti en un hémisuccinate et administré sous la forme d’un suppositoire rectal30. L’absorption est très bonne par cette voie et la biodisponibilité est beaucoup plus grande qu’après une administration par la voie orale. En outre, l’absorption par la voie rectale libère la drogue directement dans la circulation systémique, évitant ainsi le métabolisme de premier passage.

 

L’injection intraveineuse et l’infusion sont possibles, mais en raison de la très faible hydrosolubilité des cannabinoïdes, il faut recourir à une formulation spéciale, comme un complexe composé du cannabinoïde et d’une protéine plasmatique, ou une solution dans un solvant organique miscible avec l’eau. Avec de telles formulations, presque aucune substance active ne peut être libérée, et la toxicité intraveineuse est due essentiellement à l’injection de particules insolubles31. L’administration intraveineuse de préparations convenables produit des effets très rapides au début, mais comme les doses sont restreintes pour éviter une intensité excessive de l’effet maximal, la durée de l’effet est brève.

L’inhalation de la fumée est sans doute le mode d’administration le plus connu et c’est la façon dont l’on consomme habituellement la marijuana brute, contrairement aux cannabinoïdes purs. Une grande partie du THC contenu dans le cannabis brut n’est pas du THC libre, mais de l’acide tétrahyrocannabinolique32. La chaleur qui se propage juste en avant de la zone de combustion dans une cigarette ou une pipée de cannabis convertit l’acide THC en THC libre33 et volatilise le THC de sorte qu’il peut être inhalé avec la fumée et pénétrer profondément dans les poumons. La grande liposolubilité du THC lui permet de traverser les membranes alvéolaires rapidement et de pénétrer dans le sang par les capillaires pulmonaires. De là, il est transporté rapidement au cœur et pompé directement dans le cerveau, de sorte que l’effet se manifeste au moins aussi rapidement que dans le cas d’une injection intraveineuse. La biodisponibilité du THC, par cette voie, varie de 18 à 50 % selon différentes études. Cet écart s’explique en grande partie par les différences dans la façon d’inhaler la fumée, ces différences ayant trait à la quantité de fumée inhalée, à la profondeur de l’inhalation dans les poumons et à la durée de la rétention de la fumée dans les alvéoles34,35. La quantité maximale de THC dans le plasma et l’intensité des effets subjectifs sont toutes deux directement proportionnelles à la quantité de fumée inhalée et à la fréquence des inhalations34. Le temps d’absorption du cannabis fumé est très semblable à celui du THC intraveineux, avec un début rapide, une intensité maximale élevée et une durée brève.

Comme d’autres drogues très liposolubles, le THC dans le plasma est en grande partie transporté sous la forme d’un complexe lâchement associé avec une protéine plasmatique. Ce complexe se dissocie rapidement, de sorte que le THC libre traverse rapidement les membranes des cellules et pénètre dans les tissus proportionnellement à leur taux de débit sanguin. Il n’est donc pas surprenant que le temps d’absorption des concentrations de THC dans les différents tissus soit très semblable à celui du thiopental36,37. Après l’inhalation de la fumée du cannabis, la courbe de concentration du THC dans le plasma comprend donc trois phases : une phase d’absorption rapide avec une demi-vie de 50 secondes, une phase plus lente de distribution dans les tissus avec une demi-vie de 40 à 80 minutes, et une phase beaucoup plus lente d’élimination par le métabolisme, avec une demi-vie qui varie considérablement dans différentes études3,28, mais qui est généralement de deux ou trois jours. Divers métabolites apparaissent dans l’urine et les selles, mais le plus important dans l’urine est le 11-nor-9-carboxytétrahydrocannabinol. Sur une période de 72 heures, l’excrétion cumulative de la quantité totale de métabolites, exprimée sous la forme d’un pourcentage de la dose administrée, atteint de 13 à 17 % dans l’urine et de 25 à 30 % dans les selles après une injection intraveineuse ou une inhalation, mais l’excrétion fécale augmente à de 48 à 53 % après une ingestion par la voie orale27.

La consommation chronique semble produire peu d’augmentation ou ne produire aucune augmentation de la vitesse du métabolisme (c'est-à-dire pas de réduction appréciable de la demi-vie de la troisième phase38), de sorte qu’il y a un risque d’une augmentation cumulative dans les concentrations tissulaires avec le temps chez les consommateurs quotidiens.

 

 

Effets pharmacologiques

a) Effets aigus

Le cannabis brut et le THC pur produisent une vaste gamme d’effets pharmacologiques dont uniquement certains pourraient présenter un intérêt thérapeutique.

 

Système nerveux central – Le cannabis agit essentiellement comme un dépresseur du système nerveux central3,39,40, de sorte que ses principaux effets aigus ressemblent de bien de manières à ceux de l’alcool. Il produit un endormissement et réduit la vivacité d’esprit, étant synergique avec l’alcool, les barbituriques et les autres dépresseurs du système nerveux central à cet égard2,41,42. De même, bien que le THC ne produise par lui-même qu’un effet minimal de dépression respiratoire, il peut être synergique avec d’autres dépresseurs. Les effets cognitifs comprennent une déficience de la mémoire à court terme, un ralentissement des réactions ainsi qu’une diminution de la dextérité manuelle et de la sélectivité de l’attention (plus grande interférence des stimulis étrangers à la situation). Il se produit également une diminution de la coordination musculaire et du tonus musculaire, ce qui entraîne une ataxie43,44. En raison de tous ces effets, il cause une diminution du rendement dans les tâches simulées ayant trait à la conduite de véhicules45 ou le pilotage d’avions46. Cependant, le risque pour la conduite de véhicules dans la réalité peut être inférieur à celui qu’entraîneraient des niveaux équivalents d’intoxication alcoolique, car les consommateurs de cannabis semblent être plus prudents et moins audacieux45.

Les faibles doses de cannabis produisent généralement une douce euphorie, une relaxation, une augmentation de la sociabilité et une diminution de l’anxiété. Les fortes doses induisent souvent une dysphorie, une augmentation de l’anxiété et des réactions paniques, en particulier chez les consommateurs inexpérimentés. De même, les faibles doses ont tendance à intensifier l’acuité sensorielle, souvent de façon très agréable, tandis que les fortes doses peuvent causer une distorsion sensorielle, des hallucinations et même une psychose toxique aiguë dont la durée est généralement brève après la cessation de la consommation47.

La perception de la douleur est diminuée et la tolérance à la douleur est accrue par une action centrale du THC qui est distincte de celle des analgésiques opioïdes48-51. Cette action est exercée aux récepteurs CB1 situés dans la matière grise centrale, et une injection locale de THC ou de ses analogues synthétiques en ce site atténue la douleur52. Toutefois, il semble que des points de la moelle épinière53 et des sites périphériques54 contribuent à produire l’action analgésique. Le SR 141716A, un antagoniste qui bloque les récepteurs CB1, inhibe l’effet analgésique du THC, mais non celui de la morphine55, tandis que la naloxone bloque l’effet analgésique de la morphine, mais non celui du THC et de ses analogues23.

Les effets antinauséeux et antiémétique du THC, du nabilone et d’autres cannabinoïdes ont été bien démontrés56. Ces effets semblent être dus surtout à l’action dans le système nerveux central, bien qu’ils puissent également être en partie d’origine périphérique. Il y a en outre une augmentation bien démontrée de l’appétit qui entraîne une plus grande consommation de nourriture57-59 et en particulier d’aliments sucrés, c'est-à-dire à base de glucides plutôt que de protéines, et il semble qu’une grande partie du gain de poids observé soit dû à la rétention de fluides.

Tous les effets susmentionnés sont produits par des actions des cannabinoïdes sur les récepteurs  CB1. À l’opposé, l’effet anticonvulsivant du THC60-61 ne semble pas être produit par le truchement des récepteurs CB1, car le cannabidiol (qui ne se fixe pas aux récepteurs   CB1) est au moins aussi efficace que le THC pour la prévention ou la suppression des crises62-64. Les deux drogues ont des effets électrophysiologiques semblables à ceux de la diphénylhydantoïne dans les modèles animaux expérimentaux de l’épilepsie.

Système neuromusculaire – À part l’effet induit par le système nerveux central sur le tonus des muscles squelettiques, il semble y avoir une action antispasmodique plus localisée. On ignore si cette action est exercée dans la moelle épinière ou dans des sites périphériques comme à la jonction des nerfs et des muscles65.

 

Effets cardiovasculaires – Un des signes les plus constants et fiables d’une action aiguë du cannabis est la tachycardie, qui comporte une augmentation du débit cardiaque et donc des besoins du myocarde en oxygène. Ces effets sont généralement faibles et sans importance sur le plan pathologique, mais l’augmentation de l’activité du myocarde pourrait, en théorie, devenir dangereuse chez les personnes souffrant d’un certaine insuffisance coronarienne66. La tachycardie pourrait être une réaction visant à compenser la vasodilatation induite par le cannabis, qui prend souvent la forme d’une hypotension orthostatique.

 

Système respiratoire – Une des manifestations de la relaxation des muscles lisses due au cannabis ou au THC est la bronchodilatation, qui entraîne une diminution de la résistance des voies respiratoires. Il s’agit là d’un effet aigu, mais chez les consommateurs chroniques, il a tendance à être compensé par une irritation des bronches causée par les particules présentes dans la fumée du cannabis67. Comme cette fumée est semblable à bien des égards (à part la teneur en cannabinoïdes) à celle du tabac, les conséquences d’une inhalation chronique de la fumée du cannabis sont semblables à celles de la fumée du tabac67.

Yeux – On a démontré à maintes reprises que le cannabis et le THC réduisaient la pression intra-oculaire, mais on ne comprend pas encore le mécanisme à l’origine de cet effet26. Ce dernier peut être produit par une administration systémique à des doses qui produisent également les effets caractéristiques relatifs au système nerveux central, et, de façon plutôt inconstante, par une application locale sur les yeux.

Système immunitaire – Un contact in vitro avec de très grandes concentrations de THC entraîne une diminution de l’activité des macrophages, des lymphocytes et des cellules NK68. In vivo, cependant, les observations sont très variables dans les différentes études, et l’on ignore si l’inhalation de la fumée du cannabis a un effet important sur les fonctions immunitaires. Des études expérimentales effectuées avec des souris ont laissé entendre que le THC pouvait diminuer la résistance à la Legionnella68. Le risque d’une aspergillose pulmonaire est accru chez les patients atteints du sida68-71, mais il est difficile de savoir si le cannabis agit comme un immunosuppresseur ou simplement comme la source du contaminant fongique72. De toute façon, les effets in vitro sur les cellules immunitaires ne sont probablement pas produits par le truchement des récepteurs CB1, car ils sont également induits par des cannabinoïdes dépourvus de la psychoactivité du THC.

b) Effets chroniques

À l’opposé de l’intérêt thérapeutique que pourraient présenter les effets aigus susmentionnés, les changements dans ces effets qui pourraient se produire dans le cadre d’une consommation chronique sont liés principalement à la production d’effets néfastes qui pourraient restreindre l’utilité thérapeutique des cannabinoïdes.

Système nerveux central – La consommation quotidienne du cannabis durant une longue période a été associée à divers changements cognitifs, dont une mauvaise mémoire, l’imprécision de la pensée, une diminution de la fluidité verbale et des difficultés d’apprentissage, ces effets n’étant pas toujours réversibles lorsque la consommation de la drogue cesse47. La consommation quotidienne de fortes doses peut entraîner le syndrome de l’intoxication chronique, caractérisé par l’apathie, la confusion, la dépression et la paranoïa. La dépendance à l’endroit du cannabis, au sens des critères du DSM-III-R, a maintenant été bien démontrée chez les personnes qui consomment fréquemment de fortes doses73-75. Parmi les composantes de cette dépendance, il y a une tolérance accrue à la plupart des effets du cannabis et une dépendance physique qui prend la forme d’un syndrome de privation spontané relativement faible ou d’un plus grave précipité par l’antagoniste SR 141716A des récepteurs CB13,75-79. La privation précipitée est analogue à la réaction provoquée par la naloxone chez un consommateur dépendant des opiacés. Des chercheurs ont indiqué que la consommation du cannabis précipitait une rechute clinique chez les schizophrènes compensés, ce qui diffère des rechutes spontanées où la consommation du cannabis pourrait n’être qu’un symptôme43,80-82. Enfin, des chercheurs ont également indiqué que les enfants des femmes qui avaient fumé du cannabis durant leur grossesse manifestaient des troubles cognitifs et caractériels subtils mais, semble-t-il, permanents (impulsivité, mauvaise mémoire, diminution de la fluidité verbale et de l’apprentissage verbal) lorsqu’ils atteignaient l’âge scolaire83,84.

Système respiratoire – Deux études réalisées à une échelle relativement grande et portant sur les fonctions pulmonaires chez les fumeurs chroniques de cannabis et de tabac ont abouti à des conclusions contradictoires en ce qui concerne la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Une étude, réalisée à l’aide d’un « échantillon de commodité » (c'est-à-dire recruté au moyen d’annonces) constitué de jeunes fumeurs chroniques de tabac, de marijuana et des deux, ainsi que de non-fumeurs, a établi un lien manifeste entre la BPCO et l’inhalation de la fumée du tabac, mais non avec celle de la fumée de la marijuana75. À l’opposé, une plus vaste étude réalisée à l’aide d’un échantillon systématique de la population soumis à une exploration fonctionnelle respiratoire très semblable a établi un lien important entre la BPCO et l’inhalation de la fumée de la marijuana ainsi qu’un effet additif du tabac et de la marijuana86. La raison pour la différence entre les conclusions des deux études n’est pas encore entièrement claire, mais les deux études conviennent que les changements inflammatoires chroniques étaient certainement accrus chez les fumeurs de cannabis.

 

Certaines études ont fait état de la présence de maladies pulmonaires inflammatoires chroniques chez plus de 60 % des fumeurs quotidiens de cannabis à long terme67,73,74,87. Des changements précancéreux des cellules épithéliales bronchiques ont été décrits chez de tels utilisateurs, et plusieurs observations cliniques relèvent une malignité des voies aériennes supérieures ou des changements précancéreux chez de jeunes fumeurs de cannabis (moins de 30 ans, soit beaucoup plus jeunes que l'âge typique pour un carcinome bronchique induit par le tabac)67,87-90. Une étude prospective d'une importante population clinique n'a découvert aucune augmentation apparente du risque de cancer du poumon chez les consommateurs de cannabis par rapport aux non-consommateurs91, mais cette étude comporte le défaut d'avoir inclus, dans le groupe des consommateurs, des personnes qui avaient consommé du cannabis aussi peu que six fois dans leur vie. Une récente étude cas-témoin beaucoup mieux conçue, portant sur des patients avec un cancer confirmé des voies aériennes supérieures, indiquait une augmentation importante du risque parmi les fumeurs de cannabis, même après correction pour une utilisation concomitante du tabac, augmentation du risque qui était proportionnelle à la fréquence et à la durée de la consommation de cannabis92. Les auteurs de cette étude ont examiné systématiquement les sources possibles d'erreur, comme le biais de sélection, une mauvaise classification de l'exposition au cannabis, faible puissance et précision, etc., mais ils ont pu éliminer ces facteurs par des comparaisons statistiques pertinentes du groupe-témoin avec la population générale. Ils reconnaissaient le besoin de comparaisons à plus grande échelle, à mesure qu'augmentera le nombre de fumeurs de cannabis à long terme disponibles pour étude, mais leurs conclusions signalent un risque considérable. Ces conclusions rejoignent la démonstration expérimentale de la mutagénicité de la fumée du cannabis dans le test d'Ames, qui n'est probablement pas un effet du THC, mais plutôt de l'élément particules dans la fumée87.

 

Autres systèmes – Les gros fumeurs de cannabis ont manifesté divers changements endocriniens, notamment une baisse des niveaux de testostérone et de numération des spermatozoïdes chez les hommes, et une baisse des niveaux de LH et de prolactine en phase lutéale chez les femmes, se traduisant par des règles plus courtes et plus de cycles anovulatoires. Toutefois, ces changements présentent une importance clinique incertaine, car une tolérance peut se développer à ces effets du cannabis. Une réduction des niveaux de thyroxine et de corticostéroïdes a été constatée chez des animaux de laboratoire recevant des doses élevées de cannabinoïdes, mais de tels changements n'ont pas été démontrés clairement chez l'humain93. On a de même découvert que des doses élevées de THC nuisaient à la synthèse des protéines et de l'acide nucléique chez le rat, mais l'importance de ces conclusions pour l'humain reste à préciser. Il se développe également une tolérance aux effets cardiovasculaires aigus du cannabis, et il n'a pas été prouvé qu'une consommation chronique cause des dommages notables au système cardiovasculaire.

 

 

Usages médicaux de la marijuana et des cannabinoïdes

L'évolution de la pharmacothérapie a été marquée en grande partie par un passage progressif de produits naturels à composition et à puissance inconnues ou variables, vers l'usage de composés actifs purs dont on connaît précisément la composition, la stabilité, la posologie et la pharmacologie. Compte tenu des motifs pour lesquels l'utilisation médicinale du cannabis a perdu de la faveur il y a près d'un siècle, et des grands progrès dans la chimie et la pharmacologie des cannabinoïdes ces dernières années, le regain d'intérêt actuel envers les essais cliniques de la marijuana fumée à des fins thérapeutiques peut sembler un recul. Est-ce que cette pratique a un fondement scientifique valable? La section suivante examine le pour et le contre.

Parmi les effets aigus du cannabis et des cannabinoïdes décrits précédemment, les suivants semblent présenter un potentiel d'application thérapeutique :

  • effets euphorisants et anxiolytiques à faible dose, à titre de traitement possible de la dépression et de l'angoisse;
  • effet anticonvulsif, à titre de thérapie adjuvante pour l'épilepsie;
  • analgésique;
  • effet antinauséeux et antiémétique, pour les patients recevant un traitement de radiothérapie ou de chimiothérapie pour le SIDA ou le cancer;
  • stimulation de l'appétit chez des patients atteints de syndromes d'anorexie ou de cachexie;
  • réduction de la pression intraoculaire dans le traitement du glaucome;
  • bronchodilatation dans le traitement de l'asthme;
  • effet immunosuppresseur dans le traitement des maladies auto-immunes ou pour éviter le rejet d'organes ou tissus greffés.

Parmi ces possibilités, les effets antinauséeux, antiémétiques et de stimulation de l'appétit ont déjà fait l'objet d'examens détaillés ailleurs12 et été approuvés à titre d'indication pour l'utilisation thérapeutique de THC chez des patients atteints du SIDA ou du cancer. Les effets antidépresseurs et anxiolytiques possibles n'ont pas encore été étayés par des preuves expérimentales suffisantes, que ce soit chez les animaux de laboratoire ou chez l'humain, pour justifier les efforts et les dépenses liés à des essais cliniques complets. Comme on l'a mentionné précédemment, l'effet bronchodilatatoire ne semble pas durer suffisamment longtemps pour être d'intérêt dans le traitement de l'asthme, et il manque d'éléments probants pour justifier des essais cliniques de l'effet immunosuppresseur à l'égard des maladies auto-immunes ou du rejet des greffes. Actuellement donc, les possibilités les plus intéressantes d'exploration clinique sont probablement l'analgésie, le soulagement des spasmes musculaires, la réduction de la pression intraoculaire et l'action anticonvulsive.

Pour la plupart des applications thérapeutiques, les effets psychoactifs, soit le « high », constituent un effet secondaire indésirable, nuisant à l'aptitude du patient de s'acquitter d'une variété de fonctions psychomotrices normales. Il devient donc important d'établir si les effets thérapeutiques désirés peuvent être dissociés des effets psychoactifs indésirables à certaines doses, et de choisir les voies d'administration permettant le mieux d'atteindre cet objectif. La section qui suit traite de l'avancement actuel des recherches pertinentes à l'égard des quatre principales utilisations éventuelles désignées plus haut.

 

Analgésie

Bien que des études antérieures n'aient pas permis de confirmer un degré uniformément utile d'analgésie à partir de THC administré par voie intraveineuse, de cannabinoïdes par voie orale ou de cannabis fumé49, des essais à court terme chez l'humain ont démontré la capacité du THC par voie orale ou parentérale, du levonantrodol et d'extraits de cannabis à soulager la douleur postopératoire94, dentaire95, du cancer96 et viscérale97. Ce dernier cas était une étude de toxicité à court terme par permutation, contrôlée par placebo et à double insu, chez un patient unique souffrant de douleurs gastrointestinales provoquées par une brucellose familiale. L'administration d'une dose orale quotidienne de 50 mg de THC extrait du cannabis a entraîné une réduction marquée de la douleur97. Il faudra toutefois réaliser des études contrôlées de l'efficacité à l'égard de douleurs chroniques comme les douleurs musculo-squelettiques, arthritiques et induites par le cancer. Une récente étude animale a indiqué l'efficacité d'un cannabinoïde dans un modèle expérimental de douleur neurogène98, mais l'aptitude à soulager la migraine n'a fait l'objet que de rares témoignages anecdotiques99. Néanmoins, les études neuropharmacologiques modernes citées précédemment ne laissent subsister aucun doute sur l'existence d'une action analgésique à des doses pertinentes. Comme les mécanismes de l'analgésie induite par opioïdes et induite par cannabinoïdes diffèrent, on s'intéresse à la possibilité qu'une combinaison des deux drogues, à des doses plus faibles que celles que l'on emploierait pour une seule des deux, pourrait améliorer l'analgésie avec un moindre risque d'effets secondaires de chaque drogue50.

Dans des essais ouverts non contrôlés, le cannabis fumé comme les cannabinoïdes oraux ont été déclarés des analgésiques efficaces100. Le cannabis fumé exerce son effet plus rapidement, mais ce facteur est important dans un nombre limité de situations. Dans le cas de douleurs chroniques par exemple, l'objectif thérapeutique est de maintenir une analgésie constante et uniforme, en prévoyant la succession des doses pour que les effets se chevauchent, et la différence de rapidité de l'effet ne serait pertinente que pour la première dose. En fait, il semblerait que l'effet moins intense et plus prolongé du THC par voie orale présente des avantages par rapport à l'effet plus intense mais de moindre durée du cannabis fumé. De plus, pour une utilisation à long terme dans des troubles de douleurs chroniques, comme les problèmes musculo-squelettiques, les complications pulmonaires de la fumée constitueraient un inconvénient notable.

Certains des nouveaux dérivés synthétiques ou analogues du THC pourraient offrir de meilleures perspectives d'usage thérapeutique. Les esters solubles dans l'eau des acides du THC semblent posséder des propriétés à la fois analgésiques et anti-inflammatoires, sans les effets psychoactifs indésirables du seul THC. Comme ces produits ne provoquent pas d'irritation gastrique, ils pourraient s'avérer des substituts utiles aux agents anti-inflammatoires non stéroïdiens actuels101,102.

 

Soulagement de la spasticité musculaire

On a souvent mentionné l'aptitude du cannabis à soulager les spasmes musculaires, en particulier dans la sclérose en plaques, mais la plupart de ces affirmations reposent sur des rapports subjectifs non vérifiés, plutôt que sur des études contrôlées. Un rapport de cas sur un patient décrivait la suppression du nystagmus pendulaire après avoir fumé du cannabis103. Une étude d'autodéclaration, à partir d'entrevues avec 112 patients atteints de sclérose en plaques au Royaume-Uni et aux États-Unis qui fumaient de la marijuana, concluait que les principaux avantages cités par les utilisateurs étaient une réduction de la spasticité et de la douleur, alors que d'autres indiquaient que les avantages comprenaient une réduction des spasmes de la vessie et une amélioration de l'équilibre et de la marche104.Toutefois, la pharmacologie établie du cannabis permet difficilement d'imaginer comment cette drogue pourrait améliorer l'équilibre. En fait, une étude expérimentale sur dix personnes atteintes de sclérose en plaques et dix autres personnes en santé dans un groupe de contrôle, qui fumaient chacune une cigarette de marijuana, a permis de conclure que la marijuana avait un effet négatif sur la posture et l'équilibre dans les deux groupes, mais de façon encore plus marquée chez les patients que dans le groupe de contrôle105. Néanmoins, plusieurs études contrôlées comportant une mesure objective de la spasticité, ainsi que des autodéclarations subjectives, ont indiqué des améliorations après administration par voie orale ou rectale de THC ou de nabilone106-109. Jusqu'à maintenant, il n'y a pas eu d'études contrôlées comparant les effets antispastiques de la marijuana fumée et du THC par voie orale chez les mêmes patients, et aucune comparaison contrôlée avec d'autres médicaments actuellement employés pour le soulagement des spasmes.

 

Glaucome

Chez environ 65 % des sujets normaux et des patients atteints de glaucome, le THC a pu réduire la pression intraoculaire (PIO), le THC par voie orale et le cannabis fumé étant tous deux efficaces26. Après avoir fumé la marijuana, la baisse de PIO atteint son maximum en deux heures environ, et disparaît au bout de trois à quatre heures. L'objectif thérapeutique de prévenir les dommages à la rétine et au nerf optique dans le glaucome exige une baisse constante de la PIO. Pour obtenir un tel effet soutenu avec la marijuana, il faudrait en fumer de huit à dix fois par jour26. Le THC par voie orale exerce un effet plus prolongé, et il exigerait moins de doses par jour, mais il n'est toujours pas possible d'éviter les effets psychoactifs du THC à des doses qui produiraient une réduction utile de la PIO.

Les progrès futurs dans ce domaine reposeront sur des analogues synthétiques présentant une dissociation supérieure des effets. Ainsi, le dexanabinol (CH211) baisse la PIO, mais il semble dénué d'effets psychoactifs à des doses d'utilité ophtalmologique26. D'autres analogues synthétiques plus solubles dans l'eau que le THC sont en développement. De tels composés pourraient permettre un usage topique en goutte pour les yeux, sans devoir faire appel aux solvants irritants servant de véhicule au THC.

 

Usage anticonvulsif

Comme on le mentionnait précédemment, plusieurs expériences sur des animaux ont prouvé que tant le THC que le cannabidiol ont un effet apparenté à celui de la phénytoïne dans des modèles de crise épileptique tonico-clonique, mais il se développe une tolérance rapide à cet effet du THC61. Une étude contrôlée à double insu, bien conçue mais malheureusement d'échelle plutôt réduite110 a été réalisée auprès d'épileptiques qui n'obtenaient pas d'avantages thérapeutiques adéquats avec des agents classiques malgré une bonne conformité apparente. Lorsque des capsules orales de cannabidiol ont été ajoutées en supplément de leurs traitements réguliers, la fréquence des crises était considérablement moindre qu'avec des capsules supplémentaires de placebo. Deux autres études cliniques à double insu contrôlées contre placebo sur l'effet du cannabidiol chez les épileptiques n'ont indiqué aucun effet thérapeutique111,112, mais le détail de ces études n'a malheureusement pas été publié. Aucune comparaison de l'efficacité de la marijuana fumée par rapport aux cannabinoïdes par voie orale n'a été rapportée. Comme la cannabidiol n'est pas psychoactif, et que son administration orale ne comporte pas les risques pulmonaires du cannabis fumé, il semblerait valable de rendre le cannabidiol disponible pour des essais cliniques plus poussés.

 

Problèmes touchant la conception des essais cliniques du cannabis

Presque toutes les données sur la pharmacocinétique des cannabinoïdes proviennent d'études portant sur une dose unique aiguë, et l'on en sait très peu sur les changements pharmacocinétiques provoqués par un usage chronique à long terme. La longue période d'élimination t1/2 du THC indique un risque potentiel d'accumulation de la drogue dans l'organisme pendant la thérapie chronique, qui rend nécessaire la surveillance régulière des niveaux résiduels au cours des études chroniques. Ce problème est compliqué par la très grande liposolubilité du THC, ce qui signifie que la drogue passe très rapidement du plasma aux tissus où elle s'accumule. Ainsi, le niveau de plasma ne peut pas servir de mesure des niveaux des tissus passé les quelques premières minutes suivant l'administration de THC113,114 et le degré de disparité variera en fonction des diverses voies d'administration. Plus l'absorption est lente, plus le niveau de THC dans le plasma sera faible par rapport au niveau dans les tissus. Pour cette raison, les méthodes habituelles d'estimation de la biodisponibilité peuvent ne pas être valides, en particulier pour la comparaison de la biodisponibilité par différentes voies.

Un autre problème potentiel est que le cannabidiol (CBD) est un inhibiteur efficace des activités de cytochrome P450 lorsqu'il est administré de façon aiguë115, et un inducteur lorsqu'il est administré de façon chronique 116. C'est aussi vrai des hydrocarbures polycycliques dans la fumée de cannabis, tout comme dans la fumée du tabac. Il existe donc un risque important d'interaction de drogues, administrées tant de façon aiguë que chronique, notamment une interaction métabolique entre le CBD et le THC lui-même117. Ce facteur s'applique à la marijuana fumée, mais aussi à un degré moindre au THC pur115. La variabilité de cet effet, selon différentes préparations et selon une administration aiguë par rapport à une administration chronique, peut expliquer les constatations très différentes concernant l'interaction entre THC et le CBD. D'après certaines études, le CBD augmente les effets du THC alors que d'après d'autres 117-119, il réduit ou supprime ces effets120-125 et encore selon d'autres, il ne produit aucun changement126.127. Cette variabilité marquée de l'interaction illustre l'un des avantages d'utiliser seulement des cannabinoïdes purs.

Bon nombre des usages thérapeutiques éventuels du cannabis seraient chroniques ou permanents. Il est donc nécessaire que les essais cliniques durent assez longtemps pour permettre l'évaluation de l'incidence quantitative de la tolérance sur l'effet thérapeutique souhaité. Il faut aussi prendre en compte les risques de dommages pulmonaires causés par la fumée de cannabis et le risque de dépendance à l'égard du THC, quelle que soit la voie d'administration.

 

Comme pour n'importe quel médicament, les essais cliniques du cannabis ou des cannabinoïdes doivent déterminer si la puissance et la sélectivité des effets pharmacologiques de ceux-ci offrent un ratio acceptable risques-avantages pour un usage clinique. Malheureusement, très peu d'essais publiés comportaient l'utilisation de plus de deux ou au plus trois niveaux de dosage, et les effets mesurés portaient principalement sur le « high » subjectif, la fréquence cardiaque et une ou deux autres fonctions physiologiques ou psychomotrices pratiques. Il existe donc un grand besoin d'études approfondies dose-réaction concernant les deux usages thérapeutiques proposés et une vaste gamme d'effets négatifs potentiels, afin de définir le facteur de sécurité ou la « marge de sécurité ». Dans la mesure du possible, les facteurs mesurés devraient être objectifs et quantifiables plutôt que subjectifs ou du type oui/non. Certaines des applications potentielles, comme le soulagement de la douleur ou de spasmes, sont clairement sensibles aux effets de la suggestion et des attentes, de sorte qu'il faut accorder une extrême importance à la conception de l'essai afin d'écarter l'effet placebo ou l'influence d'un préjugé favorable ou défavorable envers la consommation de cannabis.

Pour certaines des applications possibles, le nombre de sujets disponibles peut être trop petit pour permettre des essais utiles à un seul endroit, de sorte que des études multicentres peuvent s'avérer nécessaires. Enfin, pour quelques applications thérapeutiques potentielles, le cannabis ou les cannabinoïdes sont moins puissants et moins efficaces que certaines des thérapies actuelle, et la consommation de ces substances serait un complément de ces thérapies plutôt qu'une solution de remplacement. C'est alors que survient le problème d'évaluer la contribution de chaque médicament au résultat final et cela exige clairement l'intégration de données statistiques à la conception de l'étude, plutôt que simplement à l'évaluation des résultats.

Questions pratiques concernant la consommation de cannabis brut par rapports aux cannabinoïdes purs

 

Quelques différences dans la manière de consommer de la marijuana et du THC pur et d'autres cannabinoïdes aura aussi une incidence sur la conception d'essais cliniques comparatifs. La première est la voie d'administration : la marijuana peut être consommée seulement par inhalation de la fumée ou par voie orale (p. ex., dans des brownies), tandis que les cannabinoïdes purs peuvent être consommées par presque toutes les voies. Dans le cas des essais thérapeutiques, il serait souhaitable d'utiliser la voie la plus efficace pour chaque médicament, et celles-ci sont différentes. Par conséquent, dans des essais comparatifs à double insu, il peut être nécessaire d'inclure un contrôle contre placebo pour chaque voie utilisée, p. ex. marijuana inhalée plus une capsule placebo, contre un placebo inhalé plus une capsule de THC. Un autre facteur est le choix des doses pour chaque agent comparé. Il ne suffit pas d'utiliser la même dose de THC sous chaque forme, puisque la voie d'administration, comme on l'a déjà mentionné, a une incidence sur la pharmacocinétique, ce qui se traduit par différentes vitesses d'absorption, différentes concentrations de pointe dans le plasma, et différents temps d'absorption avant d'agir. Il est donc nécessaire d'utiliser des posologies qui produisent des effets de pointe équivalents plutôt que des quantités identiques.

Un problème de posologie connexe est que l'absorption est assez variable, tant pour l'inhalation de fumée que pour l'ingestion orale. Les techniques d'inhalation peuvent être normalisées par une formation adéquate de sujets expérimentaux, en ce qui a trait à la fréquence, au volume de tirage, à la profondeur d'inhalation et à la durée de conservation de la fumée dans les poumons, mais il est douteux que l'on puisse normaliser ces facteurs de manière satisfaisante chez des personnes malades. Aucune formation du genre n'est possible pour ce qui est de l'absorption après ingestion par voie orale.

Point de vue international sur l'usage médical de la marijuana

 

Quelques examens importants sur les usages thérapeutiques possibles du cannabis et des cannabinoïdes ont été réalisés dans plusieurs pays au cours des sept dernières années. Un rapport de la Royal Pharmaceutical Society of Great Britain128 traitait des protocoles concrets en vue d'essais cliniques multicentres proposés de marijuana inhalée par rapport à l'ingestion orale de THC pour le traitement des douleurs postopératoires et des spasmes musculaires causés par la sclérose en plaques. Les autres rapports, toutefois, contenaient un traitement plus général de la nature du cannabis et des cannabinoïdes, de leurs usages thérapeutiques possibles, et de leurs limites. Il est donc instructif d'examiner leurs conclusions brièvement pour savoir dans quelle mesure celles-ci se rejoignent ou se contredisent.

Selon le rapport de la National Drug Strategy of Australia43, il existe de bonnes preuves de l'efficacité du THC comme antiémétique, des preuves raisonnables de l'usage thérapeutique potentiel dans les cas de glaucome, et des preuves suggestives concernant l'usage possible comme analgésique, agent antiasthmatique, agent anticonvulsif et agent antispastique dans les cas de sclérose en plaques. On préconisait des essais cliniques adéquatement contrôlés pour examiner ces indications potentielles, ainsi que le syndrome de cachexie et la dépression chez les personnes séropositives ou atteintes du SIDA. Toutefois, toutes ces recommandations étaient liées à l'administration de cannabinoïdes synthétiques purs, et non à des essais cliniques de marijuana inhalée.

Il est recommandé dans le British Medical Association Report129 de poursuivre la recherche clinique afin d'établir des méthodes et voies d'administration convenables et une posologie optimale pour usage thérapeutique dans les cas de nausées et de vomissements (y compris des comparaisons bien contrôlées avec l'ondansétron et autres antagonistes 5-HT3); de troubles spastiques réfractaires chroniques; de douleur postopératoire, chronique et en phase terminale; d'épilepsie mal contrôlée; d'accident cérébrovasculaire et de troubles dégénératifs du système nerveux central; et de glaucome. D'autres études sont aussi recommandées concernant les effets des cannabinoïdes sur le système immunitaire, et non leur usage possible comme immunosuppressant puisqu'il s'agit plutôt d'établir si l'usage des cannabinoïdes est sans risque chez les patients dont le système immunitaire est déjà affaibli. Dans ce rapport, on rejette particulièrement l'idée de l'usage thérapeutique de la marijuana inhalée ou des préparations herbales non normalisées de cannabis, et on soulève les problèmes potentiels de tolérance et de dépendance à l'égard du cannabis chez les patients qui ont besoin d'une thérapie à long terme.

Dans le rapport d'un Select Committee of the British House of Lords130, on recommande de procéder à des essais cliniques portant sur l'usage du cannabis comme traitement de la sclérose en plaques et de la douleur chronique « de façon urgente » mais on insiste sur la nécessité de poursuivre la recherche concernant d'autres méthodes d'administration, telle que sublinguale, rectale, ou inhalation par aérosol pour une absorption rapide sans les effets néfastes de l'inhalation de fumée. On souligne aussi les risques d'intoxication aiguë, de dépendance et de problèmes de santé chroniques causés par le cannabis lui-même et on suggère d'envisager les essais cliniques de marijuana fumée seulement dans des circonstances spéciales (d'une nature non précisée). On propose entre autres objectifs des essais cliniques afin de comparer le cannabis brut au THC pur, en utilisant des doses qui contiennent la même quantité de THC administrée par la même voie, pour déterminer si d'autres constituants du cannabis ajoutent quoi que ce soit à l'effet thérapeutique.

Selon le rapport du US Institute of Medicine112, il existe de bonnes preuves que le cannabis exerce une action analgésique utile, complémentaire à celle des opioïdes, ainsi qu'un effet modéré antinauséeux et antiémétique, encore une fois utile comme supplément au traitement classique. L'effet de stimulation de l'appétit est jugé « prometteur », principalement comme supplément à l'acétate de mégestrol. On recommande dans ce rapport des essais cliniques touchant le soulagement possible des spasmes musculaires, mais on estime que l'ingestion orale de THC présente des avantages par rapport à l'inhalation, en raison de la durée d'action plus longue. Les troubles du mouvement, l'épilepsie ou le glaucome ne sont pas considérés des domaines prometteurs pour les études cliniques portant sur le cannabis. Enfin, on recommande la poursuite des recherches sur le développement d'autres méthodes d'administration fiables et sans risque qui offriraient une action rapide; les essais de marijuana inhalée devraient être limités à l'usage à court terme, et seulement dans les cas pour lesquels il est probable que cet usage aurait des effets bénéfiques.

Les conclusions énoncées dans ces rapports présentent quelques similarités et différences importantes. Dans tous les rapports, on estime que l'inhalation de fumée n'est pas une méthode souhaitable d'administration du cannabis à des fins thérapeutiques, et on recommande des recherches sur d'autres méthodes d'administration pour une action rapide sans les risques associés à l'inhalation de fumée. On s'entend aussi sur la valeur de procéder à d'autres essais cliniques sur les effets antinauséeux, antiémétiques, analgésiques, antispastiques et de stimulation de l'appétit. On recommande à l'unanimité une comparaison entre le cannabis et le THC pur ou d'autres cannabinoïdes. Les rapports contiennent des opinions divergentes quant à la justification des essais cliniques des cannabinoïdes pour le traitement de l'asthme, de l'épilepsie et du glaucome. Dans la plupart des rapports, on accepte la validité d'essais cliniques de marijuana fumée dans des circonstances spéciales, en particulier pour les malades en phase terminale ou seulement pendant une durée limitée pour d'autres cas. Toutefois, dans le rapport australien, il n'est question que de cannabinoïdes purs, et dans un rapport du Netherlands Health Council131, on rejette complètement l'idée de tout usage clinique de cannabis brut, une opinion partagée dans un récent examen non gouvernemental au R.-U.12.


CONCLUSIONS

Bien que le cannabis ait longtemps été utilisé à des fins thérapeutiques, tant dans la médecine traditionnelle qu'occidentale, son usage a été abandonné il y a presque un siècle alors qu'il a été remplacé par de nouveaux médicaments synthétiques plus stables, fiables et efficaces. L'isolation et la synthèse de cannabinoïdes purs, y compris des dérivés synthétiques plus puissants, et la découverte de récepteurs de cannabinoïdes et de leurs ligands endogènes, ont ravivé l'intérêt porté aux usages médicaux potentiels. Cet intérêt a aussi été stimulé par les nombreux consommateurs de cannabis prétendant fumer de la marijuana à des fins thérapeutiques plutôt qu'hédonistes.

Le tétrahydrocannabinol pur est déjà approuvé pour le soulagement des nausées et des vomissements, ainsi que pour la stimulation de l'appétit. Les principaux autres usages pour lesquels on prétend que le THC serait utile comprennent le soulagement de la douleur, les spasmes musculaires, l'épilepsie et le glaucome. Tant les études expérimentales sur animal que l'observation clinique soutiennent plus ou moins ces prétentions, mais la plupart des observations cliniques contrôlées ont porté sur les cannabinoïdes purs administrés par voie orale plutôt que sur le cannabis fumé. Des essais à double insu, contrôlés et bien conçus, sont nécessaires pour établir l'efficacité de la plupart de ces applications prétendues, afin de comparer les puissances et les avantages relatifs du cannabis brut par rapport aux cannabinoïdes purs, aux fins de comparaison de ces deux substances avec les thérapies actuelles, en vue de déterminer tous les effets négatifs potentiels et d'évaluer d'autres méthodes d'administration comme les inhalateurs ou les volatiliseurs non comburants à faible chaleur qui permettraient d'administrer des doses mesurées de cannabinoïdes pour action rapide sans les risques pulmonaires de la fumée de cannabis. Jusqu'à ce que cette information soit disponible, il est prématuré de recommander l'utilisation générale du cannabis ou des cannabinoïdes concernant ces indications.

 

 

Tableau 1. Affinités relatives des divers cannabinoïdes pour les récepteurs de cannabinoïdes CB1 et CB2

 

CB1

CB2

Agonistes

   
< 9-THC, < x-THC +++

+++

nabilone ++++

++++

levonantrodol ++++

++++

WIN 55,212 ++ ++++
cannabinol + ++
anandamide ++ +
Antagonistes    
SR 141716A ++++ -
SR 144528 - ++++

Légendes des figures

 

Figure 1. Relations entre les produits de cannabis bruts et cannabinoïdes purs.

 

Figure 2. Structures des principaux cannabinoïdes, y compris les composés existant à l'état naturel, les analogues ou les dérivés synthétiques et les composés endogènes de type cannabinoïdes dans l'organisme mammifère. Les flèches indiquent les ressemblances les plus marquées, et non des lignes réelles de synthèse.


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