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ILLE - Comité spécial

Drogues illicites (spécial)

 

Table des matières


Introduction

Sommaire

C’est parce qu’elles sont dangereuses que les drogues sont illégales

Tendances de la consommation de drogue chez les Canadiens

La drogue et le crime organisé au Canada

Nous ne sommes pas en train de perdre la guerre à la drogue

Enseignements tirés de l’expérience des autres pays

Réduction des préjudices : des messages contradictoires

Prévention : la réduction de la demande

Le coût de la dépénalisation sera astronomique

Mythes et réalités

Conclusion : nous devons faire valoir nos succès


Mai 28, 2001

Introduction

Renforcer le besoin d’une approche équilibrée de la consommation
de drogue au Canada

Les tenants de la légalisation et de la dépénalisation prétendent que les drogues illégales devraient être traitées comme un problème de santé plutôt que comme une question de respect des lois. Pareille attitude suggère à tort qu’il s’agit d’approches équivalentes. En réalité, la Stratégie antidrogue du Canada repose sur l’équilibre entre la réduction de l’approvisionnement et la demande. La prévention est considérée comme l’approche la plus économique. On y trouve aussi un accent marqué sur le traitement et la réhabilitation.1

L’honorable David Kilgour,
Député et secrétaire d’État (Amérique latine et Afrique)

 

L’Association canadienne des policiers et policières (ACP) se réjouit d’avoir l’occasion de comparaître devant le Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites. Incorporée en 1948, l’ACP est le porte-parole national des quelque 30 000 membres des corps policiers du Canada. Nos membres, qui se répartissent en 12 organismes affiliés, comprennent le personnel des services de police des plus petits villages et villes du Canada tout comme ceux qui œuvrent auprès des services de police des plus grandes villes. Notre conseil d’administration se compose d’un président et d’un vice-président exécutif élus, de vice-présidents de toutes les provinces et de vice-présidents représentant respectivement la police des chemins de fer du CNCP, l’Association des membres de la GRC et l’Association des policiers des Premières nations.

L’ACP est reconnue comme le porte-parole national du personnel policier dans le cadre de la réforme de l’appareil canadien de justice pénale. Elle a tenu un rôle de premier plan dans la défense des progrès de la sécurité publique dans des domaines comme :

    • les délinquants à risque élevé,
    • les mandats de perquisition d’ADN et la banque nationale de données génétiques,
    • la réforme des libérations conditionnelles et de la détermination de la peine,
    • la réforme de la Loi sur les jeunes contrevenants,
    • l’expulsion des criminels étrangers,
    • la simplification du Code criminel,
    • la fuite (les poursuites à haute vitesse),
    • le crime organisé.

À n’en pas douter, les gens peu favorables aux lois et stratégies canadiennes de dissuasion du recours aux drogues illégales tenteront de marginaliser la participation de l’ACP aux présents débats en laissant entendre que son apport est, en quelque sorte, lié à un désir d’appuyer l’attribution de ressources policières aux programmes antidrogue, mais nous nous proposons de démontrer dans le présent mémoire que ce n’est pas le cas.

En leur qualité de professionnels respectés responsables de l’observation de la loi et de la prévention du crime dans leurs collectivités, les policiers canadiens, qui sont aux premières lignes, confèrent une perspective exclusive et importante à la question de l’usage des drogues illégales au Canada et de ses effets sur la sécurité collective. Les policiers ne sont pas que des agents officiels du respect de l’ordre : ils prennent un intérêt actif au bien-être de leur collectivité avant et après les heures de travail en tant que parents, bénévoles, entraîneurs, grandes sœurs et grands frères et chefs de file dans leur milieu.

Les policiers sont motivés par un désir marqué :

    1. d’améliorer la sécurité et la qualité de la vie des habitants des collectivités canadiennes;
    2. de faire partager leur expérience précieuse du travail aux premières lignes;
    3. de promouvoir des politiques d’intérêt public reflétant les besoins et attentes des Canadiens respectueux de l’ordre public;
    4. de faire en sorte que les enfants et les jeunes du Canada soient protégés du danger et de la destruction qui s’associent à la consommation des drogues illégales.

Lors de plusieurs assemblées générales annuelles de l’ACP, les délégués nationaux ont adopté à l’unanimité des résolutions appuyant une approche équilibrée du contrôle des drogues illégales au Canada. Nous démontrerons, dans les pages qui suivent, que le Canada doit résister aux tentations que lui tend le lobby habile des drogues. En dépit de leur imperfection, les stratégies actuelles se sont révélées efficaces dans le contrôle de la propagation des drogues au pays. Nous montrerons que la stratégie à long terme la plus efficace consiste à renforcer l’approche équilibrée de réduction de l’offre et de la demande tout en conservant des possibilités de réadaptation et de traitement.

 

Résolution relative à la réforme de l’appareil judiciaire
Application des lois sur les drogues illégales2

Attendu

  • Que la prolifération de drogues illégales demeure un grave problème dans la société nord-américaine;
  • Que les jeunes Canadiens sont ciblés comme clientèle primaire par des criminels organisés qui vendent des drogues illégales au Canada;
  • Que la consommation de drogues illégales constitue l’un des facteurs contribuant à une vaste gamme de crimes, dont les infractions contre les biens, les crimes avec violence, le vol, la prostitution et les gangs criminels organisés;
  • Qu’il est critique de renforcer auprès des jeunes Canadiens le sens du danger et de la destruction que cause l’usage de drogues illégales;
  • Qu’il faut imposer de lourdes conséquences afin de dissuader nos communautés de consommer des drogues illégales; et
  • Que les pratiques en matière d’imposition des peines par la magistrature canadienne n’inculquent pas le sens de lourdes conséquences aux personnes reconnues coupables de crimes moins graves, notamment la possession de drogues illégales.
     

Il est résolu

  • Que l’Association canadienne des policiers et policières (ACP) invite le gouvernement du Canada, en collaboration avec l’ACP et ses partenaires responsables de l’application des lois, à mener une étude approfondie sur l’efficacité de notre système judiciaire actuel, relativement à la lutte contre des crimes moins graves, notamment la possession de drogues illégales. Cette étude devrait inclure un examen des pratiques en matière d’imposition des peines d’emprisonnement et d’autres pénalités, ainsi que de leur efficacité, dans le but de s’assurer que les mesures actuelles correspondent aux attentes des communautés canadiennes.
  • Que l’ACP s’oppose activement aux initiatives visant à décriminaliser la possession de drogues illégales, sauf dans les instances autorisées où les drogues sont légalement prescrites à des fins médicales de bonne foi.

Sommaire

C’est parce qu’elles sont dangereuses que les drogues sont illégales

Les drogues ne sont pas dangereuses du fait de leur illégalité : elles sont illégales en raison des dangers qu’elles posent. Le concept des drogues douces et des drogues dures est dénué de fondement et il n’existe pas de critères de différenciation de ces définitions. Les gens qui utilisent ces expressions ne saisissent pas la vraie nature de la drogue ou cherchent à adoucir les attitudes envers la consommation de certains stupéfiants. D’une façon générale, la marijuana (cannabis) et ses dérivés sont ainsi décrits pour les distancier des préjudices connus associés aux autres drogues illicites. Cette approche, en dépit de ses dangers, fonctionne et contribue à l’incompréhension, à la désinformation et à l’accroissement de la tolérance envers la consommation de marijuana.

La marijuana est une drogue puissante aux effets variés. Ses consommateurs sont sujets à toute une gamme de conséquences néfastes pour leur santé :

  • lésions respiratoires,
  • réduction de la coordination,
  • préjudices à la grossesse et au développement postnatal,
  • réduction de la mémoire et des fonctions cognitives,
  • effets psychiatriques.

La consommation de marijuana est associée à la médiocrité au travail et en classe de même qu’aux problèmes d’apprentissage chez les jeunes. Elle est internationalement reconnue comme drogue d’introduction. Ses facteurs de risque d’assuétude sont comparables à ceux des autres formes de toxicomanie et largement supérieurs à ceux de l’alcool.

La conduite automobile dans l’état de stupeur que provoque la drogue réduit le jugement et la coordination motrice. Dans une étude portant sur des pilotes d’avion, dix pilotes brevetés, vingt-quatre heures après avoir fumé un joint contenant 19 mg de THC, soit une dose relativement légère, se sont soumis à des tests en simulateur : tous les dix ont fait des erreurs à l’atterrissage et l’un d’entre eux est passé complètement à côté de la piste.

La communauté internationale en est venue à un consensus visant à placer la marijuana, tout comme les autres intoxicants, sous contrôle. Cette décision repose sur des preuves de sa nocivité pour la santé humaine et de son potentiel de création d’une dépendance.

 

Tendances de la consommation de drogue des Canadiens

Le déclin de la perception du risque propre à la consommation de drogue ainsi que de la désapprobation de la société envers cette consommation, de concert avec l’augmentation de la disponibilité perçue des drogues, se sont soldés par des taux accrus de consommation chez les étudiants du secondaire. Un accroissement de la dépendance et des problèmes de toxicomanie est aussi signalé chez les jeunes gens.

La marijuana demeure la drogue la plus consommée au Canada. La consommation d’alcool, bien qu’elle soit plus courante, présente beaucoup moins de cas de consommation problématique et de consommation fréquente que les drogues. Les étudiants qui recourent à la drogue courent un plus grand risque d’en consommer de façon itérative et fréquente et d’en faire en peu de temps un aspect important de leur vie. Il est beaucoup plus probable que ces jeunes se présenteront en classe intoxiqués, participeront à des sports dans cet état et consommeront de la drogue dès le matin.

 

La drogue et le crime organisé

Le lien entre le crime organisé et le commerce clandestin de la drogue au Canada et ailleurs est indéniable. Le Canada a une réputation internationale de consommateur et d’important fournisseur de marijuana et de méthamphétamine aux États-Unis. Un cannabis canadien dont la puissance va croissant et dont la teneur en THC est élevée vient de faire son apparition sur le marché noir.

Le trafic de la drogue poursuit sa montée au Canada. En plus du cannabis et de la cocaïne introduits en contrebande depuis des pays comme le Mexique, il s’est également produit une hausse de la quantité d’héroïne ainsi introduite au Canada.

Le crime organisé, qui n’est pas souvent contrarié, prospère et ses membres se font de plus en plus crâneurs. Au Québec, 150 personnes, dont un enfant et deux gardiens de prison, ont été assassinées par des gangsters. Le journaliste Michel Auger a subi six blessures par balle lors d’une tentative de meurtre, des fermiers ayant refusé de cultiver du cannabis et des politiciens ayant mis au jour des activités criminelles ont reçu des menaces. Les manœuvres de violence et d’intimidation se sont répandues dans tout le Canada, notamment les actes de violence et les menaces envers les enquêteurs et les autres membres de l’appareil judiciaire.

 

Nous ne sommes pas en train de perdre la guerre à la drogue

Nous n’y participons pas et n’y avons jamais participé.

D’après les statistiques, moins d’une accusation en rapport avec la drogue est portée par policier canadien chaque année. Alors que les efforts d’application de la loi s’axent sur la production, le trafic et l’importation de drogue, les accusations de possession simple sont ordinairement portées par suite d’enquêtes sur d’autres délits. Les policiers et les membres de l’appareil judiciaire s’en remettent souvent, dans le cadre législatif existant, à des moyens substitutifs dans le cas des jeunes contrevenants, de délinquants primaires et des infractions comme la possession simple.

Les effets des efforts des organismes canadiens d’observation de la loi sont réduits par l’appareil judiciaire. Les coupables de crimes graves, comme les trafiquants, les importateurs et les producteurs de drogue, ne reçoivent que des sanctions légères, ou pas de sanctions du tout, et il est difficile de les décourager de reprendre leurs activités illicites.

Les corps policiers font face depuis dix ans à des contraintes financières et leurs efforts sont limités en conséquence. La tolérance perçue des chefs de file de la collectivité, à l’inclusion de députés, de sénateurs, d’éditorialistes et même de certains chefs de police, envers la consommation de drogue contribue à l’élévation des seuils propres aux enquêtes, arrestations, poursuites, condamnations et sentences. En bout de ligne, l’efficacité des programmes d’application de la loi et des stratégies de prévention des toxicomanies sera proportionnelle aux ressources et à la détermination que nous y mettrons.

 

Enseignements tirés de l’expérience des autres pays

Les preuves que les expériences de libéralisation de divers pays ont eu des conséquences néfastes sont accablantes. Dans bien des pays d’Europe de l’Ouest, la dépénalisation de la possession de petites quantités de cannabis pour usage personnel a eu lieu ou a été mise en œuvre par voie d’usage.

L’étude de ces expériences indique nettement que des politiques laxistes avivent le désir et la consommation de drogues illicites. Il n’y a pas à s’étonner de constater que la tolérance envers la consommation de drogues a eu un effet directement proportionnel de hausse de l’offre et de la demande. La disponibilité des drogues a augmenté en Europe. Dans plusieurs pays, la prévalence et la hausse de la disponibilité de stimulants de type amphétamine ne cèdent le pas qu’à l’intoxication au cannabis. Dans les pays qui ont adopté des politiques larges envers la consommation, les crimes violents et les activités criminelles organisées ont augmenté en proportion du commerce de la drogue.

Les pays où il y a eu dépénalisation montrent le taux le plus élevé de consommation de drogue et de mort par surdose d’Europe. La Suède, à l’inverse, qui a opté pour une politique de refus social et d’interdiction des drogues, a l’incidence de toxicomanie la plus faible de l’Union européenne.

Ses expériences de politiques laxistes des années 1960 et 1970 ayant échoué, la Suède a conclu que l’abus de drogues était relié à l’offre et à la demande. Selon les autorités suédoises, si les drogues sont faciles d’accès et que la société ferme les yeux, le nombre de personnes qui en font l’essai augmente. Quand les drogues sont difficiles à trouver et qu’il existe un danger d’arrestation, ce nombre diminue.

L’Alaska constitue un autre exemple de l’échec de la libéralisation. De 1980 à 1990, la consommation et la possession de haschisch ne constituaient pas là-bas une infraction criminelle. Au cours de cette période, l’intoxication au haschisch, particulièrement parmi les adolescents, a monté en flèche. En 1988, la proportion des fumeurs adolescents de haschisch alaskiens représentait le double de celle des autres États américains. En 1990, la mesure de dépénalisation a été abrogée par référendum.

La réduction des préjudices, qui est devenue le point central des stratégies d’Europe de l’Ouest en matière de drogues, a débordé dans d’autre pays. À l’insu de la majorité de ses citoyens, le Canada est aussi passé de mesures visant l’élimination de la drogue à l’approche de réduction des préjudices. Ce mouvement s’est fait sans bruit et avec le temps, les Canadiens, pour la plupart, n’étant que peu intervenus, ou pas du tout. L’ACP se préoccupe vivement de messages contradictoires et propices à la confusion que reçoivent les jeunes, eux qui sont les cibles premières des trafiquants.

 

La prévention par la réduction de la demande

Les gouvernements jouent un rôle critique et légitime dans l’établissement de lois et de politiques définissant les normes comportementales et les valeurs de la société. Des mesures législatives et d’application de la loi sont nécessaires aux stratégies proactives de dissuasion des comportements qui placent les gens dans des situations dangereuses.

Le succès des mesures législatives sur le port de la ceinture de sécurité indique que les stratégies législatives sont efficaces dans l’appui au changement de comportement. Avant que de telles lois n’entrent en vigueur au Canada, seulement un total estimé de 15 % à 30 % des Canadiens bouclaient leur ceinture. De nos jours, plus de 90 % d’entre eux le font. Ces résultats illustrent l’influence que peuvent exercer des mesures législatives externes au secteur de la santé sur la santé des Canadiens.

La crainte d’être arrêté et de subir de lourdes conséquences constitue également un élément intégral des stratégies fructueuses de réduction de la conduite avec facultés affaiblies au Canada. Bien que la lutte en vue de l’élimination de la conduite sous l’influence de l’alcool puisse ne pas être promise à une victoire totale, il ne subsiste aucun doute quant au fait que ces stratégies soient parvenues à modifier les comportements et à réduire les risques.

Des exemples d’initiatives comparables d’amélioration de la sécurité publique comprennent les lois régissant le port du casque de sécurité à bicyclette et en motocyclette, les arrêts complets en présence d’autobus scolaires et la sécurité nautique. Le succès est déterminé par le niveau d’engagement soutenu envers les programmes combinant la conscientisation de la population, l’éducation du public, les dispositions législatives et les mesures d’application de la loi.

 

Les coûts de la dépénalisation seront astronomiques

Les statistiques canadiennes montrent clairement que ce que le Canada dépense en contrôle de l’alcool et du tabac représente plus de treize fois son investissement dans le contrôle des drogues. L’application des lois sur les crimes relatifs à l’alcool s’élève à trois fois la facture des lois sur les drogues. Les coûts directs en soins de santé relatifs à l’alcool et à la cigarette sont cinquante fois plus élevés que ceux des drogues illicites. Les coûts de l’application des lois sur les drogues, à l’inclusion des tribunaux, du système correctionnel et de la protection des frontières, ne représentent que 2 % des coûts totaux relatifs à l’alcool, au tabac et aux drogues illicites au Canada.

La principale raison de cet état de fait se constitue simplement d’un usage moins répandu. Comme la dépénalisation et le laxisme feront sensiblement augmenter la consommation et l’abus, les coûts en soins de santé, en prévention, en perte de production et en mesures d’application augmenteront proportionnellement.

Une stratégie équilibrée de contrôle des drogues n’éliminera pas entièrement la consommation, mais elle sera économique et profitable à la société car elle recourra à la dissuasion de la consommation et affectera les ressources disponibles à la prévention, au traitement et à la réadaptation du petit pourcentage de la population qui en a le plus besoin.

L’ACP s’oppose à la dépénalisation.

Il existe un corpus imposant d’indications prouvant que les tenants de la dépénalisation cherchent à « normaliser » la consommation de stupéfiants par la promotion de programmes comme la réduction des préjudices de préférence aux stratégies de réduction de l’offre et de la demande. Pourtant, l’approche équilibrée du Canada envers la consommation de drogues continue d’avoir des effets positifs d’importance. Il ne faut pas perdre de vue le fait que, dans leur très grande majorité, les Canadiens n’ont jamais consommé de drogues illégales dans toute leur existence.

Hélas, ce sont les membres les plus jeunes et les plus vulnérables de la société qui courent le plus de risques. Les membres d’organisations criminelles continuent de viser les jeunes comme principal marché pour la vente des drogues illégales au Canada.

Le Bureau du contrôle des drogues et de la prévention du crime des Nations Unies a fait lors du Sommet international sur le contrôle de la drogue, en février 2000, un exposé sur les stimulants de la famille de l’amphétamine, offrant une approche de prévention à quatre volets :

  1. Hausse de la conscientisation
  2. Réduction de la demande
  3. Fourniture d’information exacte
  4. Restriction de l’approvisionnement
  5. Renforcement des contrôles

La réduction de la demande est au cœur de la prévention. Si l’on laisse entendre aux jeunes gens que la consommation de cannabis est inoffensive ou peut être sécuritaire, alors même qu’une abondante documentation scientifique prouve le contraire, on manque de cohérence. Le traitement et la réadaptation devraient être accessibles à ceux qui souffrent d’assuétude.

L’ACP s’opposera vigoureusement aux efforts de dépénalisation de la possession de drogue. Les seules instances où la possession sera admise seront les cas d’ordonnances légitimes à des fins médicales.

Il est temps pour les meneurs de la société de s’engager dans le débat, pour les figures de proue de la collectivité d’offrir des modèles positifs aux jeunes, d’augmenter la conscientisation de la population quant aux préjudices que cause la consommation de stupéfiantes et de mettre un terme à l’érosion de l’opinion publique consécutive à la désinformation et à l’intérêt personnel. Nous nous devons de renforcer notre approche équilibrée de compréhension des conséquences lourdes et proportionnelles des crimes graves, combinée à des mesures de renforcement des comportements souhaitables chez les jeunes gens.


C’est parce qu’elles sont dangereuses que les drogues sont illégales

Selon les scientifiques, le terme drogue désigne toute substance, autre que les aliments, qui est absorbée pour modifier la façon dont le corps ou l’esprit fonctionne.3

Santé Canada

Les drogues ne sont pas dangereuses du fait de leur illégalité : c’est parce qu’elles sont dangereuses qu’elles sont illégales. Le concept des « drogues douces » et des « drogues dures » n’a pas de fondement et il n’existe pas de critères véritables permettant de différencier ces désignations. La marijuana est une drogue puissante dont les effets sont variés. Les gens qui parlent de drogues dures ou douces ne saisissent généralement pas la vraie nature des drogues ou alors, ils cherchent à tiédir les attitudes envers l’usage de certaines drogues illégales. De façon générale, la marijuana (cannabis) et ses dérivés sont décrits dans un tel contexte afin de les distancier du tort reconnu associé aux autres drogues illégales. Cette approche, avec les risques qu’elle comporte, trouve un auditoire et contribue à la désinformation, à l’incompréhension et à la tolérance croissante accordée à la consommation de marijuana.

D’après un rapport de Santé Canada :4

La concentration et la mémoire à court terme sont nettement affaiblies et la perception sensorielle semble s’intensifier : les couleurs sont plus vives, les sons plus distincts et le sens du temps et de l’espace se trouble. L’appétit augmente, particulièrement l’envie de sucre. Certaines personnes se retirent ou ont un sentiment de peur, d’anxiété, de dépression; quelques-unes vont jusqu’à la panique, à la terreur ou à la paranoïa, particulièrement quand elles ont absorbé une forte dose. Chez certaines personnes, l’absorption de fortes doses mène à des hallucinations et les symptômes s’aggravent chez celles qui souffrent de désordres psychiatriques, particulièrement de schizophrénie.

La fumée (de marijuana) endommage le système respiratoire : un seul joint de marijuana produit beaucoup plus de goudron qu’une cigarette forte. Le goudron contenu dans la fumée de cannabis contient des quantités plus grandes de substances cancérogènes que le goudron de la fumée du tabac. Des études laissent entendre que des retards de développement peuvent se produire chez les enfants dont la mère a fait une importante consommation de drogues pendant la grossesse.

Le rapport indique également que :

Le THC, le principe actif (du cannabis) a été détecté dans les corps de nombreux conducteurs et piétons mortellement blessés au Canada et aux États-Unis.

Selon la Drug Identification Bible5, les effets physiques les plus courants de la consommation de marijuana sont les suivants :

    • accélération du rythme cardiaque pendant 10 à 30 minutes après l’ingestion; le rythme augmente ordinairement de 30 % à 50 % de la normale;
    • hausse modérée de la tension artérielle;
    • rougeur des yeux, un effet que peut réduire ou éliminer le recours aux gouttes ophtalmologiques;
    • légère baisse de la température corporelle;
    • sécheresse de la bouche et de la gorge; des cloques et un film épais, blanchâtre ou verdâtre, peuvent apparaître sur la langue et le fond de la gorge si la marijuana a été absorbée par inhalation.

Les effets subjectifs et psychologiques de la marijuana peuvent varier beaucoup d’une personne à l’autre ou même d’une utilisation à l’autre par la même personne. Le degré et l’intensité du « high » psychologique relève de la dose : plus on ingère de THC, plus le « high » est prononcé et varié. Dans le cas de l’inhalation, le « high » psychologique atteint son summum en 15 à 45 minutes et dure de deux à six heures, selon la personne et la dose. Quand le THC sert d’ingrédient dans un aliment, le « high » est atteint de une à quatre heures plus tard et peut durer jusqu’à six heures.

La réaction à l’ingestion de marijuana dépend de la personne et de la dose, mais les effets les plus courants demeurent :

    • un agréable sentiment de bien-être et d’euphorie;
    • une impression de relaxation qui se traduit souvent par une réduction de l’activité physique;
    • de rapides changements d’humeur, passant d’une sociabilité très bavarde à des rires et à un silence contemplatif;
    • un accroissement de la perception sensorielle de la vue, de l’olfaction, du goût et de l’ouïe et une distorsion du sens du temps;
    • dans certains cas, une panique ou une anxiété soudaine;
    • une réduction de la capacité de concentration,
    • une faiblesse de la mémoire récente.

Certains consommateurs vivent de légères expériences hallucinatoires ou psychédéliques.

L’intoxication à la marijuana réduit manifestement le jugement et la coordination motrice. Les personnes sous son influence ont de la difficulté à suivre un stimulus mouvant et à y donner la réponse motrice appropriée. Cet état dure de quatre à huit heures, longtemps après la disparition de la sensation d’intoxication et peut donner à l’utilisateur un faux sentiment de sécurité sur sa capacité de conduire un véhicule motorisé ou de faire fonctionner un autre type de machine.

La National Highway Traffic Safety Administration américaine a financé une étude menée par l’Université de Maastricht (Hollande) sur les effets qu’ont sur la conduite automobile le THC seul, l’alcool seul et la combinaison de l’alcool et du THC. Le rapport d’étude offre les conclusions suivantes :

    • une inhalation de marijuana produisant une dose basse à modérée de THC de 100 à 200 ug/kg réduit la capacité d’observer la route et de suivre les autres voitures;
    • les effets dépendent des doses et persistent, ou parfois augmentent, pendant une période de deux heures et demie après l’ingestion;
    • bien que la réduction de la capacité de conduite attribuable au THC ne soit pas nécessairement grande, elle peut avoir des conséquences graves dans des situations routières inhabituelles; toute combinaison de THC et d’alcool a le potentiel d’affecter gravement la performance au volant.

[…] L’intoxication à la marijuana peut causer un certain nombre de problèmes d’apprentissage, particulièrement chez les personnes jeunes. Le pouvoir de concentration diminue et il se produit souvent une perte de mémoire à court terme. La période d’attention du consommateur s’abrège et il a de la difficulté à résoudre des problèmes et à former des concepts.

La Drug Identification Bible résume ainsi les résultats d’une étude portant sur les pilotes d’avions :6

Dans le cadre d’une étude où des avions étaient utilisés, on a donné à dix pilotes brevetés un joint de marijuana contenant 19 mg de THC, soit une quantité relativement modeste. Vingt-quatre heures après avoir fumé le joint, les pilotes ont subi des tests dans un simulateur de vol. Tous les dix ont commis des erreurs à l’atterrissage et l’un d’entre eux a complètement raté la piste. Des résultats comparables ont été signalés dans un autre test auquel participaient neuf pilotes. Dans ce cas, chacun a reçu un joint contenant 20 mg de THC et a été mis à l’épreuve dans un simulateur vingt-quatre heures après la consommation. Sept des neuf pilotes ont exhibé un certain degré de déficience. Un seul d’entre eux se rendait compte du fait qu’un joint fumé vingt-quatre heures plus tôt influait encore sur son rendement. Ces tests et d’autres essais similaires indiquent que la marijuana peut nuire à la capacité d’une personne de faire fonctionner un véhicule moteur longtemps après que les effets de la drogue se sont évanouis.

Selon le Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies :7

Il n’y a guère lieu de douter des effets néfastes de la consommation de cannabis sur la santé publique et la sécurité des Canadiens. La santé des consommateurs de cannabis est affectée négativement de diverses façons, que nous résumons plus loin, et la consommation de cannabis est liée à la médiocrité du travail et du rendement scolaire. Bien que les preuves faisant du cannabis un facteur causal dans les crimes violents ou les crimes d’acquisition soient minces, il figure parmi les causes d’un nombre petit mais réel d’accidents routiers. Qui plus est, des études nationales et provinciales récentes indiquent que l’usage du cannabis est en hausse chez les jeunes.

Le rapport aborde les conséquences de la consommation de cannabis :8

Il circule en ce moment une quantité appréciable de fausse information sur les conséquences physiologiques de la consommation de cannabis. Même si l’usage occasionnel n’a souvent que peu, voire pas, d’effets négatifs subjectifs sur l’utilisateur, il est faux de croire qu’il s’agit d’une drogue inoffensive. Aucun doute ne subsiste sur les conséquences négatives qu’a sa consommation massive sur la santé. Les plus importants de ces effets figurent ci-dessous.

Détérioration du système respiratoire

La fumée de la marijuana, si on la compare à la fumée du tabac, contient des concentrations plus élevées des éléments constitutifs du goudron, sa température est supérieure quand elle vient en contact avec les poumons et, d'ordinaire, elle est inhalée plus profondément et gardée dans les poumons plus longtemps. La recherche a démontré l’existence d’un lien entre l’usage intensif chronique de la marijuana et une dégradation du système respiratoire comparable à celle que cause le tabac. Les effets respiratoires néfastes du cannabis sont, bien sûr, reliés à l’inhalation comme mode d’ingestion et ne se produisent pas quand le cannabis est avalé ou autrement absorbé.

L’habitude à long terme de fumer de la marijuana est associée à une lésion épithéliale de la trachée et des bronches souches ainsi qu’à des altérations des cellules de transmission de la réponse immunologique des poumons, soit des modifications qui prédisposent les poumons aux lésions et à l’infection. La consommation intense et habituelle a été reliée à la bronchite. Bien qu’aucun lien n’ait été fermement établi entre l’inhalation de la marijuana et le cancer, on a signalé des cas de cancer de la voie aérodigestive chez les jeunes adultes ayant un historique de consommation. Ces cas sont d’autant plus importants que de telles tumeurs se manifestent rarement chez les gens de moins de 60 ans.

Coordination physique

Le cannabis porte atteinte à la coordination, ce qui entraîne un risque de blessure et de décès dans diverses circonstances ou par suite de conduite avec facultés affaiblies. Les études nord-américaines d’échantillons sanguins de conducteurs impliqués dans des accidents de voiture indiquent de façon uniforme qu’un résultat positif à la détection du THC, le principal composé psychotrope du cannabis, ne cède le pas qu’à l’alcool. Les niveaux sanguins de THC, néanmoins, ne démontrent pas nécessairement que le conducteur était en état d’intoxication au moment de l’accident. D’autre part, plusieurs conducteurs dont les tests sanguins ont révélé la présence de cannabis étaient aussi sous l’influence de l’alcool.

Grossesse et développement postnatal

La consommation de cannabis par une femme enceinte peut avoir des effets sur le fœtus. Cette consommation a été liée à un abrègement de la gestation et à un poids moindre du nouveau-né. Les conséquences postnatales à plus long terme de la consommation maternelle de cannabis semblent subtiles. Des recherches récentes ont permis de croire que l’exposition au cannabis in utero peut nuire au développement mental de l’enfant quelques années plus tard. Pendant les trois premières années de vie, par exemple, il semble n’y avoir pas de conséquences à la consommation. Vers quatre ans, les enfants de consommatrices habituelles de cannabis donnent des signes d’une mémoire et d’une capacité verbale moindres et, à l’âge scolaire, ces déficiences se compliquent d’un niveau d’attention inférieur et d’une impulsivité supérieure chez les enfants des utilisatrices les plus sérieuses.

Mémoire et cognition

Les effets du cannabis sur la mémoire semblent varier et peuvent dépendre du test utilisé. Globalement, ils semblent modestes. Cela dit, il n’est pas encore possible de savoir si la consommation chronique produit de graves déficits mémoriels, particulièrement quand cette consommation a lieu pendant le développement. Des études menées il y a quelques décennies sur des consommateurs adultes de cannabis laissent entendre qu’il n’a que peu d’effet sur la fonction cognitive. Des recherches plus récentes démontrent que la consommation à long terme produit des lacunes dans la capacité d’organiser et d’intégrer l’information complexe et que cela peut provenir de dégradations de la mémoire ou de l’attention.

Effets psychiatriques

La consommation de cannabis a été liée à un certain nombre d’effets psychiatriques, le plus important de ceux-ci étant le syndrome d’assuétude au cannabis. Les personnes accoutumées au cannabis persistent à en consommer en dépit de ses conséquences néfastes sur leur santé physique, sociale et psychologique. La perte du contrôle comportemental propre à la dépendance, tout comme les déficits cognitifs et motivationnels connexes, peuvent nuire à la productivité au travail ou en classe. Le risque de dépendance croît avec l’usage : on a signalé qu’entre un tiers et la moitié des personnes qui consomment chaque jour du cannabis pendant de longues périodes s’y accoutument.

D’autres désordres psychiatriques ont été liés au cannabis. Il existe un lien clair entre la consommation de cannabis et la schizophrénie, mais on ne sait pas encore en quoi la consommation précipite la maladie, ni si l’association relevée indique une augmentation de l’utilisation de drogues, dont le cannabis, en conséquence de la schizophrénie. Des observations cliniques ont d’autre part identifié une gamme de soi-disant « psychoses du cannabis » à la suite d’une consommation intensive. Ces symptômes s’estompent après quelques jours d’abstinence. Plus la teneur en THC est élevée, plus il y a risque de complications d’ordre psychiatrique. Ces désordres demeurent mal définis et on ne sait trop s’ils diffèrent des effets de doses massives de la drogue. Certains de ces cas peuvent se produire si des problèmes psychotiques préexistants sont mis à jour par la consommation. On a aussi fait référence à l’existence d’un syndrome amotivationnel résultant d’un long usage du cannabis. Bien qu’il existe des indications raisonnables selon lesquelles la consommation de cannabis touche la motivation, la production d’un syndrome à symptômes identifiables dépassant la période d’usage et de retrait reste à démontrer. La question peut avoir été obscurcie par des études sur les effets de la consommation de cannabis sur le rendement scolaire d’adolescents au cours desquelles des sujets très susceptibles de recourir à la drogue ont peut-être montré une motivation moindre à réussir leurs études.

Autres effets négatifs sur la santé

La recherche a démontré que le cannabis peut aussi toucher la production hormonale et modifier le système immunitaire et la fonction cardiovasculaire. Les implications de ces constatations pour la santé humaine ne sont pas claires à l’heure actuelle.

Dans un rapport de 1999 évaluant l’assise scientifique du recours à la marijuana à des fins médicales, les préjudices associés à son usage excessif font l’objet d’un passage qui vient appuyer la constatation voulant que les drogues définies, au sens de la chimie, comme des cannabinoïdes, soient préférées pour l’usage médical, par opposition à la marijuana inhalée :9

    • La marijuana n’est pas une substance entièrement inoffensive. C’est une drogue puissante dont les effets sont variés.
    • Du point de vue d’une éventuelle utilisation médicale, les effets nocifs de la marijuana sur les gens ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux de l’usage abusif de la drogue.
    • Pour la plupart des gens, les conséquences négatives de la consommation intensive de marijuana se constituent d’une réduction du fonctionnement psychomoteur. Il est donc déconseillé d’utiliser un véhicule ou une machine potentiellement dangereuse quand on se trouve sous l’influence de la marijuana, du THC ou de toute drogue cannabinoïde à effets comparables.
    • Les effets chroniques de la marijuana ont plus d’importance au sens de l’usage médical et s’insèrent dans deux catégories : les effets de l’habitude de fumer et les effets du THC. L’inhalation de marijuana est associée à des anomalies des cellules qui tapissent les voies respiratoires humaines. La fumée de marijuana, tout comme celle du tabac, est associée à une augmentation du risque de cancer, à des lésions pulmonaires et à la faiblesse des nouveau-nés. Bien que des études cellulaires, génétiques et humaines laissent toutes deviner que la fumée de marijuana constitue un facteur de risque important dans le développement des cancers respiratoires, il faut attendre les résultats d’études bien structurées pour avoir la preuve que l’inhalation habituelle de la fumée de marijuana constitue une cause de cancer.
    • La dépendance envers les effets psychoactifs du THC est une deuxième préoccupation associée à la consommation chronique de marijuana. Peu d’utilisateurs de marijuana développent une dépendance, mais leur nombre n’est pas de zéro. Les facteurs de risque de l’assuétude à la marijuana sont semblables à ceux des autres formes d’abus d’intoxicants. Entre autres choses, les désordres qu’expriment un comportement et une personnalité antisociaux sont associés de près à l’abus d’intoxicants.

Selon une étude américaine, le nombre de cas appelant des soins en salle d’urgence dans 488 hôpitaux soumettant des statistiques a augmenté de 455 % de 1990 à 1999 :10

Certaines autorités maintiennent que la toxicomanie est l’une des principales raisons pour lesquelles les visites aux salles d’urgence sont passées de 15 706 en 1990 à 87 150 en 1999.

Les gens qui défendent la légalisation de la marijuana persistent à nier le lien manifeste qui existe entre la marijuana et les autres drogues illégales. La marijuana est connue partout au monde comme la « drogue d’introduction » des jeunes gens à l’usage et à l’abus de drogues.

Les modèles de progression de la consommation de drogue de l’adolescence à l’âge adulte sont remarquablement stables. On ne s’étonnera pas que la marijuana, la drogue illicite la plus largement consommée, soit la première drogue illégale rencontrée. La plupart des utilisateurs de drogues illégales ont d’abord essayé la marijuana. De fait, la plupart des consommateurs de drogue font précéder la marijuana de l’alcool et de la nicotine – ordinairement avant l’âge de la majorité.11

Les autorités internationales ont reconnu le danger du recours à la marijuana lors de leurs travaux de formulation des politiques, conventions et traités sur le contrôle des drogues. Selon le rapport de 19999 de l’Organe international de contrôle des stupéfiants :12

La communauté internationale, par consensus, a mis sous contrôle international le cannabis, tout comme d’autres substances. Cette décision reposait sur des preuves de sa nocivité pour la santé humaine et de sa capacité de créer une dépendance. L’abus de cannabis ne devrait d’aucune façon être considéré comme inoffensif ni inévitable. Les gouvernements doivent continuer d’insister sur les dangers de la consommation abusive de cannabis dans le contexte de leurs activités de réduction de la demande de drogues illégales et ils ne doivent pas permettre que s’installent des attitudes permissives envers cet abus, particulièrement maintenant qu’un cannabis de puissance croissante, dont la teneur en THC est élevée, fait son apparition sur le marché noir.


Tendances de la consommation de drogue chez les Canadiens

Le déclin de la perception du risque de préjudice propre à la consommation de drogue ainsi que de la désapprobation morale de la consommation de drogue, couplé à l’augmentation de la disponibilité perçue des drogues, ont mené à une hausse des taux de consommation parmi les étudiants de niveau secondaire13. Un étudiant du secondaire sur trois, en Ontario, indique avoir utilisé une substance illégale au cours des 12 mois précédents.14

La consommation d’alcool continue de dépasser celle des drogues illégales, mais la marijuana demeure la drogue illégale la plus utilisée au Canada15. Même si l’alcool est de consommation plus courante, sa consommation problématique et fréquente se rencontre moins souvent que dans le cas des drogues illégales. Les étudiants qui utilisent des drogues sont enclins à y recourir à répétition, plus fréquemment et à en faire rapidement un aspect important de leur vie. Ils risquent davantage de se présenter en classe intoxiqués, de s’adonner dans cet état à des sports et de se droguer le matin.16

Parmi les problèmes auxquels font face les adolescents canadiens, l’usage excessif de drogue et d’alcool forment le problème numéro un (71 % des jeunes interrogés), relativement aux questions d’ordre sexuel (60 %), d’estime de soi (51 %), aux difficultés scolaires (49 %) et aux problèmes de violence et d’intimidation (49 %).17

L’Institut de recherche sociale de l’Université York administre l’Ontario Student Drug Use Survey18 pour le compte du Centre de toxicomanie et de santé mentale de la Fondation de la recherche sur la toxicomanie de l’Ontario. Il s’agit de l’étude continue sur la consommation de drogue des adolescents la plus ancienne au Canada. Le sondage de 1999 a permis de relever un certain nombre de sujets de graves préoccupations :

    • Le nombre de drogues consommées a augmenté : en 1999, 17,4 % des étudiants utilisaient quatre drogues ou plus, relativement à 13,4% en 1997. De même, un nombre moindre d’étudiants (26,8 %) ne consommaient aucune drogue relativement à 1997 (34,3 %).
    • Après le long déclin des années 1980, les années 1990 ont connu un retour de la consommation de drogue chez les adolescents. Depuis 1993, les substances suivantes ont montré des hausses soutenues :

 

Alcool

– de 56,5 % à 65,7 %

Consommation épisodique abusive d’alcool

– de 17,7 % à 28,2 %

Cigarettes

– de 23,8 % à 28,3 %

Cannabis

– de 12,7 % à 29,2 %

MDA (Ecstasy)

– de 0,6 % à 4,8 %

PCP

– de 0,6 % à 3,2 %

Hallucinogènes

– de 3,1 % à 13,6 %

Cocaïne

– de 1,5 % à 4,1 %

Étudiants consommant quatre drogues ou plus

– de 8,0 % à 17,4 %

Inversement, le pourcentage d’étudiants ne consommant aucune drogue a baissé

– de 36,3 % à 26,8 %

    • Plus d’étudiants ont indiqué en 1999 qu’en 1997 être incapables de cesser de consommer des drogues (6,5 % c. 2,9 %).
    • En dépit des hausses récentes, ce ne sont pas tous les étudiants qui consomment de la drogue. Un quart d’entre eux (25%) n’en a utilisé aucune (pas même l’alcool ni le tabac) au cours de la dernière année et un autre quart (24 %) a limité sa consommation à l’alcool ou au tabac. Un peu plus d’un étudiant sur trois (38 %) signale avoir consommé une substance illégale au cours des 12 derniers mois.
    • Parmi les consommateurs d’alcool et de cannabis, il ne s’est pas produit de changement notable dans le pourcentage de nouveaux consommateurs entre 1997 et 1999. Cela dit, parmi les fumeurs de cigarettes, on a noté entre 1997 et 1999 une chute importante du pourcentage des jeunes ayant signalé leur première consommation dans les 12 mois précédents (de 27,1 % à 20,3 %).
    • 57,2 % de tous les consommateurs de cannabis montrent au moins trois indices de dépendance.
    • Environ deux fois plus de consommateurs de cannabis présentent en 1999, par comparaison à 1997, une consommation incontrôlée et d’autres indices de dépendance (10,6 % c. 5,5 %).
    • Plus d’étudiants ont signalé en 1999 qu’en 1997 leur incapacité à cesser de consommer des drogues (6,5 % c. 2,9 %)

 

Consommation de drogue des étudiants ontariens au cours de l’année
précédente selon le sexe et l’année scolaire – 1999
19
(en pourcentage)

Drogue

Total

M

F

7

8

9

10

11

12

13

Alcool

67,5

70,7

64,2

39,7

53,7

63,1

74,9

82,0

84,6

83,0

Cannabis

29,3

33,5

25,1

3,6

14,9

25,5

36,4

48,1

39,4

43,3

Cigarettes

29,2

29,8

28,6

7,4

17,8

27,8

37,4

41,7

38,6

38,0

Hallucinogènes

13,8

16,2

11,4

0,9

6,7

10,2

19,3

22,7

18,1

24,7

Barbituriques M

12,3

12,6

12,0

11,1

13,9

11,1

13,7

13,6

12,5

9,4

Stimulants NM

7,8

6,1

9,5

1,8

6,3

6,9

8,4

10,7

10,0

12,8

Solvants

7,1

6,1

8,1

12,1

11,2

8,4

4,6

4,9

3,9

1,4

LSD

6,8

8,0

5,5

1,2

3,9

6,8

10,4

10,7

7,8

6,9

Stimulants M

6,8

7,4

6,2

4,7

6,3

6,9

7,8

8,8

7,5

4,3

Méthamphétamine

5,3

6,6

4,0

1,5

3,1

3,5

6,1

8,2

8,4

8,4

Ecstasy (MDA)

4,4

4,5

4,2

0,6

1,9

2,3

4,4

9,8

4,8

7,8

Barbituriques NM

4,4

4,1

4,7

2,5

4,4

3,2

5,2

7,0

3,9

4,9

Cocaïne

3,7

4,2

3,2

2,5

2,0

3,2

3,8

5,4

3,6

6,4

Colle

3,6

3,7

3,5

6,8

6,3

4,3

1,1

2,1

2,0

1,2

Tranquillisants M

3,3

3,5

3,1

1,9

3,5

3,8

3,1

3,1

4,0

4,2

PCP

3,0

3,2

2,8

0,7

2,7

3,1

3,5

5,4

2,3

3,0

Tranquillisants NM

2,4

2,3

2,5

*

1,9

1,7

1,3

3,1

4,1

5,8

Crack

2,4

2,9

1,8

0,6

1,6

3,0

3,8

3,6

2,4

1,1

Héroïne

1,9

2,4

1,3

0,5

2,8

2,5

1,5

1,8

2,2

1,6

Ice (méthamphétamine en cristaux)

1,4

2,0

0,8

*

1,2

1,1

0,9

3,2

1,6

0,9

Remarque : NM = usage non médical; M = usage médical; *estimé à moins de 0,5 %

 

Le Réseau communautaire canadien de l’épidémiologie des toxicomanies (RCCET) signale que :

L’abus de cannabis peut mener à une hospitalisation pour assuétude au cannabis et pour consommation de cannabis sans dépendance. […] En ce qui a trait au traitement de la dépendance, bien qu’une proportion importante des sujets traités pour une toxicomanie admette avoir utilisé du cannabis, celui-ci n’est identifié comme drogue à la source de problèmes importants que par une petite partie des clients adultes. Par comparaison, un large pourcentage d’adolescents traités pour intoxication a identifié le cannabis comme étant son problème de drogue. À Calgary, le cannabis a le plus souvent été désigné comme « drogue consommée le plus souvent » par des adolescents en traitement en 1996. 20

Plus encore que de l’usage croissant que font les jeunes des drogues illégales, il faut s’inquiéter des modèles de consommation et de la consommation problématique des adolescents d’âge scolaire. Dans une étude qui a fait l’objet d’un article du Press Journal of the America Academy of Child and Adolescent Psychiatry,21 des chercheurs ont examiné la consommation problématique de drogues illégales au sein d’un échantillon d’adolescents de 14 à 17 ans couvrant toute une province (le Québec). La consommation problématique de drogues illégales a également été comparée à celle de l’alcool. Les tableaux qui suivent illustrent les résultats statistiques de l’étude.

Consommation d’alcool et de drogues illégales chez les adolescents québécois 22
(en pourcentage)

Garçons

Filles

ALCOOL

A déjà bu de l’alcool

79,7

82,3

A déjà été ivre

55,8

55,9

A bu de l’alcool plus de cinq fois au cours de son existence

62,2

62,2

DROGUES

N’importe quelle drogue

44,4

50,1

A consommé des drogues plus de 5 fois au cours de son existence

32,4

32

Drogue spécifique consommée (dans sa vie)

Marijuana

44,2

49,9

Hallucinogènes

19,1

20,5

Amphétamines

3,2

6,1

Substances inhalées

4,8

5,4

Cocaïne

2,9

3,9

Tranquillisants/sédatifs

1,8

3,7

Opiacés

1,4

1,6

Héroïne

0,3

0,3

Stéroïdes

0

0,4

 

 Problèmes d’alcool et fréquence de la consommation chez les adolescents ayant consommé de l’alcool plus de cinq fois au cours de leur existence 23 (en pourcentage)

PROBLÈMES D’ALCOOL

Garçons

Filles

S’est adonné(e) à des sports comme le vélo, le patin à roues alignées ou la natation sous l’influence de l’alcool

44,7

26,9

A consommé de l’alcool le matin

33,6

25,5

S’est déjà présenté(e) ivre en classe

16,1

13

S’est déjà battu(e) sous l’influence de l’alcool

14,6

6

A déjà conduit un véhicule motorisé sous l’influence de l’alcool

13,8

4,9

A eu des disputes avec ses parents à cause de l’alcool

12

9,7

A eu des démêlés avec les policiers à cause de l’alcool

6,4

4,3

A eu des disputes avec ses amis à cause de l’alcool

4,7

7,9

A cherché de l’aide pour réduire sa consommation d’alcool

1,1

1,4

Nombre de problèmes d’alcool (décompte des problèmes susmentionnés) :

19,1

20,5

0

29,2

47,7

1

29,9

25,7

2

21,7

15,8

3

10,1

4,9

4

5,2

3,7

5 ou plus

3,9

2,1

Fréquence de la consommation à son sommet

0

0,4

Une fois par semaine, à l’occasion

21,5

34,2

Une fois par semaine

50,8

45

Deux fois par semaine

17,2

11,4

Trois fois par semaine

5,9

3,5

Quatre fois par semaine ou plus

4,8

6,0

 

Problèmes de drogue et fréquence de consommation des adolescents ayant utilisé des drogues plus de cinq fois au cours de leur existence 24
(en pourcentage)

PROBLÈMES DE DROGUE

Garçons

Filles

Drogué(e) ou « high » en classe

79,1

69,4

S’est adonné(e) à des sports comme le vélo, le patin à roues alignées ou la natation sous l’influence de la drogue

75,2

53,3

A consommé de la drogue le matin

68

55,7

A eu des disputes avec ses parents à cause de la drogue

28,1

26,5

A déjà conduit un véhicule motorisé sous l’influence de la drogue

26,6

9,3

A eu des démêlés avec les policiers à cause de la drogue

18,3

10,3

S’est déjà battu(e) sous l’influence de la drogue

18

12

A eu des disputes avec ses amis à cause de la drogue

13,7

23,7

A cherché de l’aide pour réduire sa consommation de drogue

10,4

12,4

Nombre de problèmes de drogue (décompte des problèmes susmentionnés) :

0

6,1

15,1

1

10,1

17,5

2

15,8

15,8

3

19,4

16,2

4

23

16,2

5 ou plus

25,6

19,3

Fréquence de la consommation à son sommet
Une fois par semaine, à l’occasion

6,7

5,7

Une fois par semaine

24,9

29,9

Deux fois par semaine

17,5

17,8

Trois fois par semaine

11,5

11,7

Quatre fois par semaine ou plus

20,4

15,6

Sept fois par semaine ou plus

19

19,3

Les chercheurs à l’origine de cette étude ont comparé la répartition des comportements personnels à problèmes selon que les écarts de comportement survenaient tant lors de la consommation d’alcool que de drogue, lors de la consommation de drogue seulement ou lors de la seule consommation de drogue chez les sujets ayant consommé de l’alcool et de la drogue plus de cinq fois au cours de leur existence.

Type de consommation d’intoxicants chez les adolescents à problèmes ayant consommé de l’alcool ET de la drogue25

   

Alcool et drogue

Drogue seulement

Alcool seulement

Garçons

Intoxication en classe

25,1

71,5

3,4

Consommation matinale

44,9

45,5

9,6

Participation à des sports en état d’intoxication

60,2

32,3

7,5

Conduite automobile en état d’intoxication

43

45,6

11,4

Bagarres en état d’intoxication

40,3

23,6

36,1

Démêlés policiers attribuables à l’intoxication

13,1

65,6

21,3

Filles

Intoxication en classe

26,7

75,9

3,6

Consommation matinale

41,5

48,8

9,7

Participation à des sports en état d’intoxication

47,5

43,1

9,4

Conduite automobile en état d’intoxication

34,3

42,8

22,9

Bagarres en état d’intoxication

36,4

36,4

27,3

Démêlés policiers attribuables à l’intoxication

14,6

53,7

31,7

L’étude en vient à conclure que la consommation « normative » de drogue constitue une consommation problématique :

Cet énoncé repose sur les observations qui suivent. D’abord, presque tous les adolescents ayant admis avoir consommé des drogues plus de cinq fois dans leur vie ont parlé d’une consommation problématique. Autrement dit, une très faible proportion des sujets ayant indiqué avoir utilisé des drogues plus de quelques fois ne se sont pas présentés à l’école en état d’intoxication, n’ont pas pratiqué de sports dans cet état et n’ont pas consommé de drogues le matin. Deuxièmement, un pourcentage relativement élevé d’adolescents (environ un tiers) a usé de drogues illégales plus de cinq fois : il ne s’agit pas d’une petite minorité très marginale. Troisièmement, dans la majorité, ces sujets avaient 15 ou 16 ans et ne s’étaient tournés que très récemment vers la consommation de drogue, ayant rapidement progressé jusqu’à en faire un aspect important de leur vie, comme l’indique le modèle de consommation problématique et la fréquence d’usage.

Il est intéressant de mettre en contraste le modèle de consommation problématique des drogues illégales et celui de l’alcool. Même si la consommation d’alcool est plus répandue, la consommation problématique et la consommation fréquente le sont beaucoup moins que dans le cas des drogues illicites. Qui plus est, parmi ceux qui ont usé tant d’alcool que de drogues illégales, on discerne une spécificité appréciable de la consommation problématique seulement ou de la consommation d’alcool et de drogue (les bagarres étant apparemment l’unique exception). Ces constatations suggèrent que des caractéristiques propres aux drogues illégales, et non seulement à l’adolescent lui-même, expliquent la consommation problématique.

Quelles sont les drogues illégales responsables de la consommation problématique? Certaines inférences peuvent être tirées [des tableaux précédents]. Premièrement, plus du tiers des sujets n’ont consommé que de la marijuana, mais la plupart de ces adolescents ont signalé au moins un problème attribuable à l’usage de marijuana et une proportion substantielle d’entre eux a eu de multiples problèmes. Par surcroît, presque tous les sujets ayant indiqué, sur leur existence entière, la consommation de drogues autres que la marijuana, ont classé celle-ci parmi les drogues utilisées au cours de la période de consommation maximale. La marijuana constitue une source importante de problèmes dans ce segment de la population. Deuxièmement, un quart des sujets a dit ne consommer que de la marijuana et des hallucinogènes. Le pourcentage d’utilisateurs à problèmes est encore plus élevé parmi ce groupe, une majorité d’entre eux signalant trois problèmes ou plus. La marijuana et les hallucinogènes sont associés à un usage problématique considérable. Les sujets, finalement, qui ont dit consommer d’autres drogues en plus de la marijuana et les hallucinogènes exhibent les niveaux les plus élevés de consommation problématique. La conclusion la plus prudente que nous puissions tirer de ces observations est que toutes les drogues ingérées (à l’inclusion de la marijuana) sont associées à la consommation problématique mais que plus il y a de drogues utilisées, plus la consommation problématique gagne en fréquence.

Ces constatations soulèvent des questions difficiles quant au diagnostic des désordres relatifs à la consommation de drogues chez les adolescents. La consommation normative de cet échantillon était la suivante : plusieurs ingestions par semaine, présence en classe en état d’intoxication, participation à des sports en état d’intoxication et consommation matinale.

[…] Assister à ses cours en état d’intoxication, pratiquer des sports dans cet état, consommer des drogues plusieurs fois par semaine et se droguer le matin à 15 ou 16 ans constituent automatiquement des problèmes du point de vue du développement. Le temps passé « high » sur les bancs d’école ne constitue pas du temps d’acquisition du savoir, l’état d’intoxication dans la pratique des sports (ou au volant) expose le sujet à des blessures, le temps consacré à la recherche de drogue ou les périodes d’intoxication partagées avec ses pairs ne mène pas à l’établissement de bonnes relations entre égaux. Qui plus est, nos constatations, au chapitre des problèmes de drogue, quant au lien entre la fréquence de consommation et les modèles de problèmes laissent entrevoir un syndrome cohérent plutôt qu’un simple assemblage de problèmes sociaux relatifs au recours à la drogue.

Dans un rapport publié en 1999, le Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies26 examine la fréquence et les modèles de consommation de l’alcool et des drogues :

    • 76,8% des Canadiens de 15 ans ou plus ont consommé de l’alcool au cours des douze derniers mois;
    • presque un adulte canadien sur 10 (9,2 %) dit avoir des problèmes de consommation d’alcool;
    • on estime que 6503 Canadiens (4681 hommes et 1823 femmes) ont perdu la vie par suite de la consommation d’alcool en 1995, tandis que 80 946 personnes ont été hospitalisées (51 765 hommes et 29 181 femmes) pour la même raison en 1995-1996;
    • les accidents de la route, la cirrhose hépatique alcoolique et le suicide ont constitué le plus grand nombre de décès attribuables à l’alcool, tandis que les chutes accidentelles, le syndrome d’alcoolodépendance et les accidents de la route ont représenté le plus grand nombre d’hospitalisations reliées à l’alcool;
    • la conduite avec facultés affaiblies est une importante cause de décès; il y avait de l’alcool dans le sang de 42 % des conducteurs ayant subi des blessures mortelles en 1996 et 35 % d’entre eux avaient un taux d’alcool sanguin dépassant la limite légale de 0,8 %.

L’étude montre au contraire des taux beaucoup plus modestes pour les drogues illicites :

    • environ un Canadien sur quatre (23,9 %) dit avoir utilisé une drogue illicite au moins une fois dans toute son existence;27
    • une proportion de 7,7 % indique avoir consommé une drogue illicite au cours de l’année précédente et, parmi ces drogues, le cannabis est la plus courante (7,4 %); la consommation d’autres drogues illégales au cours de l’année précédente n’a été signalée que par 1 % des répondants ou moins;
    • le pourcentage de Canadiens ayant consommé du cannabis au cours de la dernière année est passé de 4,2 % en 1993 à 7,4 % en 1994;
    • en 1994, les drogues identifiées le plus souvent au sujet de la consommation de la vie entière et de la consommation au cours de l’année précédente étaient le cannabis (respectivement 23,1 % et 7,4 %), le LSD, la méthamphétamine ou l’héroïne (5,9 % et 1,1 %) et la cocaïne (3,8 % et 0,7 %).
    • en 1995, 804 décès (695 hommes et 108 femmes) attribuables aux drogues illégales sont survenus au Canada. Les suicides (329 cas) et l’empoisonnement par opiacés (160 décès) ont représenté presque les deux tiers de toutes les morts associées aux drogues. En 1995-1996, il y a eu 6947 hospitalisations attribuables aux drogues illicites.

Source : Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies; Canadian Profile; Alcohol Tobacco and Other Drugs, 1999.


La drogue et le crime organisé au Canada

L’Organisation des Nations Unies a estimé les revenus annuels du crime organisé à un billion de dollars. Le niveau d’activité et de criminalité des organisations criminelles a augmenté au cours des dernières années au Canada, ce qui constitue un grave risque pour la sécurité publique. D’après le Service canadien des renseignements criminels (SCRC), pratiquement toutes les organisations criminelles d’envergure au monde sont actives au Canada.

Son proche voisinage des États-Unis rend le Canada extrêmement vulnérable et lui donne beaucoup d’attrait pour le crime organisé, dont les activités montrent des tendances inquiétantes :

    • une augmentation de la violence, à l’inclusion des attentats à la bombe, des meurtres et du recours à la menace, à l’intimidation et à la violence à l’endroit des victimes, des témoins, des personnalités publiques et des médias;
    • la collaboration : tout criminel raffiné sait que la collaboration est le chemin de la réussite;
    • la mondialisation des opérations;
    • l’exploitation de la technologie;
    • La contrebande internationale, tant à l’exportation qu’à l’importation :

Ressortissants étrangers sans visa Alcool et tabac

Véhicules volés Blanchiment d’argent

Drogues illicites

La mondialisation et la technologie de masse ont ouvert bien des possibilités et présenté bien des défis aux Canadiens. Les criminels, particulièrement ceux qui font partie d’organisations internationales, n’ont pas de respect pour les limites traditionnelles, qu’il s’agisse de frontières internationales, de délinéation des compétences ou de limites des collectivités, et n’en ressentent aucune contrainte. Le crime organisé transcende les bornes géographiques et exige des organismes d’observation de la loi qu’ils travaillent en coopération à atteindre leur objectif partagé de lutte au crime organisé.

Dans son mémoire au Sous-comité de la Chambre des communes sur le crime organisé28, l’ACP défendait l’élaboration et la mise en œuvre d’une réponse stratégique nationale au crime organisé accordant un degré plus élevé de priorité, de financement et de coordination aux compétences policières locales, provinciales et fédérales dans la lutte au crime organisé dans le cadre d’un effort concerté avec Citoyenneté et Immigration Canada, Douanes et Accise, les services nationaux de police et le SCRC, avec le concours des ministères provinciaux et fédéral de la Justice et des procureurs du ministère public.

Il existe un lien indiscutable entre le crime organisé et le trafic des drogues illégales au Canada et ailleurs. Le Canada s’est acquis une réputation internationale tant de consommateur que de grand fournisseur de marijuana et de méthamphétamine aux États-Unis :

La culture prohibée du cannabis demeure l’une des questions les plus épineuses du domaine du contrôle des drogues dans les trois pays d’Amérique du Nord. En plus de faire l’objet d’une vaste contrebande vers le Canada, le cannabis est cultivé au pays même. La production annuelle canadienne de cannabis clandestin semble se situer dans les 800 tonnes, soit plus de 60 % de la quantité qui pénètre dans le marché noir américain. Dans les provinces canadiennes de la Colombie-Britannique, du Manitoba et du Québec, le cannabis à teneur élevée en THC est cultivé à l’intérieur. En Colombie-Britannique, la culture intérieure clandestine du cannabis est devenue une entreprise répandue et lucrative. Les impacts des efforts d’élimination du cannabis déployés par les organismes d’observation de la loi du Canada ont été réduits par les tribunaux canadiens, qui ont fait montre de clémence à l’endroit des producteurs et des livreurs de cannabis.

Le trafic de drogue continue d’augmenter au Canada. En plus du cannabis et de la cocaïne passés en contrebande au Canada depuis des pays comme le Mexique, il s’est produit une augmentation de la quantité d’héroïne introduite en fraude. En 2000, les organismes d’observation de la loi du Canada ont intercepté un chargement d’héroïne pesant 156 kilos, la plus importante saisie d’héroïne au pays.

[…] On trouve au Canada des indices de la hausse de la fabrication illicite de méthamphétamine. Les organismes d’observation de la loi ont découvert un nombre record de laboratoires clandestins au cours de la dernière année. Des laboratoires de MDA (Ecstasy) ont été découverts dans des banlieues de classe moyenne, particulièrement dans les provinces centrales. Ces laboratoires étaient gérés par des gens sans antécédents ni liens criminels. Dans certaines provinces, l’augmentation marquée du nombre de décès attribuables au MDA reflète la hausse de l’abus de cet intoxicant.29

Les policiers des provinces centrales indiquent que le MDA est devenu un produit d’exportation lucratif pour les trafiquants canadiens, ne cédant le pas qu’au cannabis. Les profits à tirer de la production de drogue sont impressionnants :

La Colombie-Britannique est devenue un important fournisseur de marijuana, exportant apparemment les trois quarts de sa récolte aux États-Unis. En raison du volume de drogues, le corridor I-5 entre la Colombie-Britannique et la Californie est considéré comme une zone de trafic de drogues à densité élevée.

Les propriétaires d’installations hydroponiques de la Colombie-Britannique ont élaboré une variété de marijuana appelée « BC Bud ». D’après divers rapports, la teneur en THC de ce végétal se situe habituellement dans les 15 % à 20 %, l’échantillon testé le plus fort ayant affiché un taux de 27 %. Les pouvoirs locaux estiment qu’il peut y avoir 10 000 entreprises de culture hydroponique en Colombie-Britannique, chacune ayant une moyenne de 500 plants et produisant trois récoltes chaque année. Aux États-Unis, le BC Bud se vend de 4000 $ à 6000 $ la livre tandis qu’au Canada, on en obtient de 1000 $ à 2400 $ la livre.

[…] Les exploitations d’envergure sont là pour l’argent : un jardin professionnel ne comptant que 100 grands plants peut générer des bénéfices de l’ordre de 300 000 $ à 500 000 $ par récolte.30

Le crime organisé étant florissant et rarement contrecarré, ses membres se font plus crâneurs et recherchent la confrontation. Au Québec, quelque 150 personnes, dont un enfant innocent et deux gardiens de prison, ont été tuées par des gangsters; le journaliste Michel Auger a reçu six coups de feu dans le cadre d’une tentative d’assassinat; des fermiers qui ont refusé de cultiver de la marijuana et des politiciens qui ont mis au jour des activités illicites ont fait l’objet de menaces.

La violence et les tactiques d’intimidation se sont répandues dans tout le Canada, à l’inclusion des menaces et actes de violence contre les enquêteurs de la police et les autres membres de l’appareil judiciaire.

L’an denier, l’ACP a effectué un sondage auprès des enquêteurs de première ligne qui se chargent des enquêtes criminelles de leur territoire. Elle a reçu des réponses détaillées de plus de 50 enquêteurs, dont l’expérience combinée, d’un océan à l’autre, s’élève à plusieurs centaines d’années.

Les enquêteurs de tout le pays sont essentiellement d’accord sur ces faits :

  • à l’heure actuelle, les corps policiers canadiens sont inefficaces dans le contrôle du crime organisé au Canada; selon un enquêteur chevronné : « même si nous avons eu de belles réussites, c’est tout juste si nous nous débrouillons »;
  • les tribunaux canadiens n’ont pas recouru aux mesures législatives existantes ni aux moyens disponibles pour faire efficacement face aux criminels reconnus coupables d’activités criminelles organisées;
  • le projet de loi C-95 n’a pas produit un soutien législatif suffisant à combattre le crime organisé;
  • les dispositions législatives existantes sur l’immigration et sur l’application de la loi ne suffisent pas à répondre à la menace que posent les criminels d’origine étrangère;
  • les services de police ne disposent pas d’un financement adéquat pour les enquêtes sur les organisations criminelles. Selon un enquêteur d’expérience, « les budgets sont une source majeure d’inquiétude; des contraintes financières nous attendent à chaque tournant et elles ont des conséquences négatives sur nos efforts »;
  • il faut donner une priorité plus grande à la formation et à l’accès à une technologie à jour aux enquêteurs qui s’intéressent au crime organisé;
  • même si la coopération entre les enquêteurs de première ligne est perçue comme une bonne chose et qu’elle s’améliore, des problèmes de territoire, de ressources et de partage de l’information continuent de surgir entre les organismes d’observation de la loi et leurs chefs.

 

Alors que la plupart (plus de 75 %) des répondants croit que les dispositions législatives actuelles ne sont pas adéquates quant à la lutte au crime organisé, certains d’entre eux sont d’avis que c’est l’application de ces lois par les tribunaux qui constitue le vrai problème.

Le gouvernement canadien a réagi par un nouveau projet de loi (C-24), de nouvelles stratégies de poursuite et des ressources supplémentaires. Nous sommes heureux des progrès accomplis jusqu’ici, mais tous les niveaux d’application de la loi et l’appareil judiciaire doivent faire preuve de vigilance dans la lutte au crime organisé.

Dans sa réponse au sondage, un officier exprime l’immense colère qu’il éprouve quand, après avoir investi des mois, sinon des années, d’efforts dans la poursuite d’une affaire criminelle, il constate que les résultats sont loin d’être significatifs au moment de la sentence. Un autre enquêteur note : « s’il se livre vraiment une guerre à la drogue et au crime organisé, c’est sans munitions que nous nous battons ».


Nous ne sommes pas en train de perdre la guerre à la drogue

Le fait est que le Canada ne livre pas, et n’a jamais livré, de guerre à la drogue.

Les statistiques montrent que, pour chaque policier canadien, moins d’une accusation relative à la drogue est portée par année. Alors que les efforts d’application de la loi s’axent sur la production, le trafic et l’importation des drogues, les accusations de possession simple sont habituellement portées en conséquence d’enquêtes sur d’autres crimes ou plaintes. Les policiers et les membres de l’appareil judiciaire s’en remettent fréquemment, dans notre cadre législatif, à des mesures substitutives dans le traitement des jeunes contrevenants, des délinquants primaires et des infractions mineures comme la possession simple.

Selon l’Organe international de contrôle des stupéfiants :

Les fruits des efforts des organismes canadiens d’observation de la loi envers l’élimination du cannabis, néanmoins, demeurent restreints; dans certaines parties du pays, les producteurs clandestins de cannabis ne reçoivent pour la plupart que des peines légères et il est difficile de les dissuader de reprendre leurs activités illégales.31

Les ressources policières ont subi au cours de la dernière décennie des contraintes financières et les efforts d’observation de la loi se sont limités en conséquence. La tolérance perçue des chefs de file de la collectivité, dont des députés, des sénateurs, des éditorialistes et même certains chefs de police, envers la consommation de drogue a contribué à la hausse des seuils propres aux enquêtes, arrestations, poursuites, déclarations de culpabilité et sentences. En bout de ligne, l’efficacité des programmes d’application de la loi et des stratégies de prévention du trafic et de la consommation de drogue est proportionnelle au niveau des ressources et de l’engagement dont ils font l’objet.


Enseignements tirés de l’expérience des autres pays

De nos jours, la Suède a selon les standards internationaux une politique sévère à l’égard des drogues, mais il n’en a pas toujours été ainsi. Nous avons fait l’essai d’une forme répressive et d’une forme libérale de politique sur la drogue. La stratégie actuelle, dont l’élément central est une interaction serrée entre les mesures de réduction de l’accessibilité des drogues illicites et les mesures de diminution de la demande de ces drogues, est une conséquence de notre expérience passée.32

Jakob Lindberg
Directeur général adjoint
Institut national suédois de santé publique

 

Il n’est pas rare que les tenants de la libéralisation des drogues citent divers pays d’Europe de l’Ouest comme modèles de la création de politiques progressives en la matière. Dans bon nombre de ces pays, dont la Grande-Bretagne, la dépénalisation de la possession de petites quantités de cannabis pour usage personnel s’est faite ou a été mise en œuvre par la force des choses33. On comprend vite, cependant, à l’étude de ces expériences, que des politiques libérales sur les drogues attisent le goût et la consommation de drogues et on ne s’étonne pas de constater que la tolérance a eu des effets proportionnels sur l’offre et la demande, selon le rapport de 1999 de l’Organe international de contrôle des stupéfiants :34

La disponibilité du cannabis en Europe s’est sensiblement accrue, en partie à cause de la culture intensive qui se pratique dans des pays d’Europe du sud, surtout l’Albanie, et aussi par suite de la facilitation de la culture intérieure, qui est en plein essor, grâce à la vente sans contrainte de graines de cannabis et de matériel de culture par les soi-disant « boutiques de chanvre » et sur Internet. La disponibilité croissante et, dans bien des cas, incontrôlée du cannabis, combinée à l’attitude de tolérance qui règne envers cette substance, a mené à une hausse de son abus. La plupart des pays européens ont signalé que les cas d’abus du cannabis se multiplient. Une étude, par exemple, entreprise en Suisse en 1998, a révélé que la prévalence de l’abus de cannabis parmi les élèves de 15 ans des écoles secondaires a quadruplé au cours des 12 dernières années. À moins que les gouvernements ne prennent des mesures contre la culture intérieure du cannabis, il continuera de se produire des augmentations tant de l’abus que de la vente du cannabis sur le marché noir.

Les saisies de cocaïne ont augmenté dans toute l’Europe. Des saisies importantes, s’élevant à plus d’une tonne chacune, ont été faites dans plusieurs pays d’Europe occidentale, ce qui indique que la demande de cette substance demeure élevée. Bien que seulement quelques études exhaustives aient été menées sur sa prévalence, les sondages effectués dans les écoles secondaires d’Europe de l’Ouest ont montré une tendance à la hausse dans la consommation de cocaïne que l’on doit, en partie, à la baisse des prix.

La consommation de drogues synthétiques, particulièrement l’amphétamine et les stimulants de la même famille, a augmenté. Bien que l’abus de MDA (« ecstasy ») n’augmente plus dans ceux des pays d’Europe de l’Ouest où ellel est apparue en premier, on note une tendance à la hausse dans l’abus d’amphétamine dans presque tous les pays de la région. Les mesures de prévention de l’abus de ces substances ont été difficiles à mettre en œuvre car la plupart des drogues synthétiques sont perçues par les jeunes, qui constituent le principal groupe de consommateurs de telles substances, comme inoffensives et à la mode. L’abus des drogues synthétiques est vu comme un phénomène répandu par beaucoup de jeunes gens qui fréquentent les lieux de danse. Les mortalités résultant de cet abus, bien qu’elles soient encore peu nombreuses, ont connu une hausse notoire.

L’Organe croit que les gouvernements européens doivent faire plus d’efforts pour inverser les tendances négatives susmentionnées afin d’atteindre l’objectif établi par l’Assemblée générale lors de sa vingtième séance spéciale, qui était consacrée à la lutte au problème de la drogue dans le monde, en 1998.

Un an plus tard, l’Organe faisait les observations suivantes sur le commerce de la drogue en Europe :35

La disponibilité des drogues a augmenté en Europe. Bien que l’abus de cannabis semble être demeuré stable dans la plupart des pays, la disponibilité et l’abus des drogues synthétiques et de la cocaïne ont continué d’augmenter dans la plupart des pays de la région. Dans plusieurs pays, la prévalence et l’augmentation des stimulants de type amphétamine ne le cèdent qu’à l’abus de cannabis. En dépit des préoccupations publiques au sujet des drogues synthétiques et bien qu’il ait été scientifiquement démontré qu’elles sont nocives pour les consommateurs occasionnels, peu de mesures ont été prises pour en prévenir l’abus. Il semble que certaines autorités d’Europe de l’Ouest soient fermement convaincues qu’on ne peut empêcher l’abus de telles drogues. Les mesures de réduction de la demande illicite de ces drogues tendent conséquemment à se composer de conseils aux consommateurs sur l’« utilisation sécuritaire » de ces substances et de la fourniture d’installations de test lors d’événements où les drogues synthétiques sont consommées. De telles mesures, bien qu’elles procèdent des meilleures intentions, lancent des messages ambigus et confus. Ainsi, bon nombre de consommateurs de drogues ne savent pas qu’il n’existe pas de consommation sécuritaire de ces drogues. 36

[…] La dépénalisation des drogues n’est pas considérée comme une option politique en Europe, mais il y a dans plusieurs pays membres de l’Union européenne un mouvement en faveur de la dépénalisation de la consommation de drogue, particulièrement quand elle est perçue comme ayant un lien avec la dépendance. La dépénalisation n’a pas l’appui du grand public, pas même des jeunes gens.

En Hollande, des études menées au début des années 1990 illustrent l’impact négatif de la tolérance envers les drogues illicites37 :

    • le nombre de boutiques (des « cafés ») qui tirent leurs revenus de la vente de haschisch depuis la dépénalisation de 1990 est passé de 20 à 400 à Amsterdam en 1991 à plus de 2000 dans toute la Hollande;
    • de 1984 à 1988, le nombre de fumeurs de haschisch de plus de 15 ans a doublé en Hollande; de 1988 à 1992, le nombre de fumeurs de 14 à 17 ans a encore doublé, et celui des consommateurs de 12 et 13 asn a triplé;
    • le taux de crimes violents commis en Hollande est le plus élevé d’Europe et il continue de monter.

Selon des études dont a fait état l’International Drug Strategy Institute, les fusillades ont augmenté de 40 %, les vols à main armée de 60 % et le taux hollandais de meurtres équivaut à trois fois celui des États-Unis38. Des policiers qui sont allés à Amsterdam signalent que la libéralisation des politiques sur la marijuana a débouché sur la tolérance de la consommation d’héroïne et de cocaïne, à l’inclusion de transactions ouvertes et de consommation dans les lieux publics. Le crime organisé a beaucoup prospéré en Hollande avec l’ouverture du marché au commerce illicite de la drogue.

Ainsi que l’indique l’International Alliance for the United Nations Single Convention:39

En Italie, en Espagne et en Suisse, la consommation et la possession d’héroïne ou de cocaïne sont légales. Ces pays ont le taux le plus élevé de consommation de drogues illicites et de décès par surdose per capita en Europe. Inversement, la Suède, qui a adopté une politique de rejet social et d’interdiction de drogues, montre la plus basse incidence d’abus de drogues de l’Union européenne.

Dans le cadre d’un référendum tenu en Suisse en 1998, 73,2 % des votants ont rejeté la dépénalisation des drogues chez eux. Illustrant la disparité entre les décideurs et l’ensemble de la population, ils ont clairement dénoncé les stratégies de « réduction des préjudices » par la dépénalisation de leur pays.40

La Suède, ayant fait l’essai, sans succès, de divers types de politiques laxistes sur les drogues dans les années 1960 et 1970, conclut que:41

La toxicomanie dépend de l’offre et de la demande. Si les drogues sont faciles d’accès, la société adopte une attitude permissive et le nombre de personnes qui en font l’essai augmente. Autrement dit, même les personnes jouissant d’une situation sociale et psychologique favorable en viennent à consommer de la drogue. Si, par contre, il est très difficile de s’en procurer et qu’il existe un danger d’arrestation, le nombre de personnes susceptibles d’essayer la drogue se réduit à celles qui, pour des motifs psychologiques et sociaux, se trouvent dans une zone dont les risques sont plus élevés. Si, par surcroît, la société peut offrir à ce groupe vulnérable des mesures d’appui et de traitement, il est très vraisemblable que la toxicomanie peut être contrôlée.

Ainsi, le principe fondamental de la politique sur les drogues se retrouve dans le devoir d’intervention de la société contre le trafic de drogue dans les lieux publics, dans l’appui aux jeunes personnes qui font l’essai des drogues et dans l’offre de traitement à celles que leur toxicomanie détruit.

La politique suédoise sur la drogue repose sur l’hypothèse que les personnes qui essaient et consomment du cannabis pendant leurs années d’école constituent la base de recrutement de ceux qui, plus tard, deviendront des consommateurs sérieux.

La Suède n’est pas une société entièrement exempte de drogue, mais elle a atteint sa cible en ceci que la consommation de drogue en Suède est faible selon les standards internationaux. La consommation expérimentale de cannabis et d’autres drogues est maintenant très modeste et le recrutement en vue d’une consommation intensive parmi les jeunes gens est depuis plusieurs années très limité (sic). Le développement de la toxicomanie, en Suède, dépend de plus en plus des événements du monde extérieur. La croissance du trafic international des drogues et l’avènement prochain d’une Europe sans frontières, tout comme les tendances à l’ouverture des politiques des autres pays, soumettent la politique suédoise sur les drogues à des pressions croissantes.

La Suède conserve une politique strictement restrictive qui vise à favoriser les attitudes publiques appuyant la réalisation d’une société sans drogues.

La politique suédoise sur les drogues se préoccupe surtout de prévenir la propagation de la consommation. La fourniture de drogues, par conséquent, est considérée comme l’une des infractions les plus graves.

La Loi sur les stupéfiants de la Suède repose sur les conventions internationales qu’elle a ratifiées.

Selon les dispositions actuelles de ce texte législatif, la fourniture, la production, l’acquisition (dans le but d’en faire le commerce), l’obtention, le traitement, le transport, l’emmagasinage, la possession et la consommation de stupéfiants sont des actes punissables.

Les contraventions à la Loi sur les stupéfiants se répartissent en trois degrés : les infractions mineures, les infractions simples et les infractions qualifiées. L’échelle des peines relatives aux infractions mineures en matière de drogue se constitue d’amendes ou d’un emprisonnement maximal de six mois; pour les infractions simples, les peines vont de un à trois ans d’emprisonnement et, pour les infractions graves, elles sont d’au moins deux ans et peuvent atteindre dix ans d’emprisonnement.

Malgré la tendance apparente à la dépénalisation en Europe, les autorités internationales demeurent inquiètes de ces pratiques, comme le montrent les extraits suivants du rapport de 1999 de l’Organe international de contrôle des stupéfiants:42

En avril 1999, un projet de loi stipulant que les consommateurs de drogue recevraient des amendes plutôt que des peines d’emprisonnement a été approuvé au Portugal. En vertu de cette nouvelle loi, la consommation et la possession de drogues pour usage personnel ne constituent plus un crime, mais simplement une infraction administrative. Comme l’Organe l’a déclaré à maintes reprises, cela ne cadre pas avec les traités internationaux de contrôle des stupéfiantes, qui exigent que la consommation de drogues se limite aux fins médicales et scientifiques et que les États signataires fassent de la possession de stupéfiants une infraction criminelle. Il faut noter que l’exercice de la compétence criminelle est facultatif et que les gouvernements peuvent offrir aux contrevenants de solutions substitutives à la condamnation et à la peine.

[…] L’Organe constate avec regret que des projets de loi déposés en Allemagne et au Luxembourg visent à permettre l’établissement de salles d’injection de drogues, communément appelées « piqueries ».

[…] L’Organe continue de s’inquiéter du programme de la Suisse au chapitre de l’héroïne et de sa politique de prescription d’héroïne. L’Organe n’encourage pas les autres gouvernements à permettre la prescription d’héroïne aux victimes de toxicomanie opiacée.

Il n’y a pas qu’en Europe qu’on trouve des exemples de dépénalisation ratée:43

L’Alaska peut aussi servir d’exemple de l’échec de la dépénalisation de la consommatin de drogues. De 1980 à 1990, la consommation et la possession de haschisch n’y constituaient pas une infraction criminelle. Pendant cette période, l’intoxication au haschisch, particulièrement chez les adolescents, a dramatiquement augmenté. En 1988, la proportion de fumeurs adolescents de haschisch en Alaska a été deux fois celle de tous les autres États américains. En conséquence, un référendum tenu en 1990 a amené l’abrogation de la mesure de dépénalisation.

En Asie, au XIXe siècle, la Chine a surmonté la toxicomanie opiacée de masse (25 % de la population) en recourant au refus social et à l’appui de la communauté internationale. Dans le Japon de l'après-guerre, les épidémies de toxicomanie par amphétamine et héroïne injectées ont été vaincues par la réduction de l’approvisionnement. La République de Singapour a combattu une épidémie d’inhalation d’héroïne par des lois fiscales strictes et une réadaptation obligatoire et gratuite44. Selon l’International Alliance for the United Nations Single Convention, « ces succès ont été atteints de haute lutte et à un prix élevé, au coût de la répression sévère des principaux contrevenants et de mesures extrêmement coûteuses de réadaptation ».

Pour résumer l’expérience mondiale, nous désirons souligner la conclusion à laquelle en sont venus les tenants suisses de la prohibition des drogues illicites à la suite de leur étude des pratiques internationales45:

Les preuves montrant que les expériences de dépénalisation de divers pays ont eu des conséquences négatives sont accablantes. Une approche de politique prudente devrait permettre de tirer un enseignement des erreurs des autres.


Réduction des préjudices : des messages contradictoires

La soi-disant réduction des préjudices est devenue le point de concentration des stratégies antidrogue d’Europe occidentale, qui se répandent dans les autres pays. À l’insu de la majorité de ses citoyens, le Canada s’est aussi écarté de son approche d’élimination des drogues pour adopter la tendance à la réduction des préjudices. Ce glissement s’est opéré doucement, avec le temps, et la plupart des Canadiens n’ont eu qu’une mince chance d’intervenir. La CPA s’inquiète sérieusement des messages contradictoires et prêtant à confusion que reçoivent les jeunes gens, eux qui constituent la cible principale du commerce illégal de la drogue.

Il existe d’abondantes preuves de la volonté des tenants de la dépénalisation de « normaliser » la consommation de drogues illégales grâce à la promotion de programmes comme la réduction des préjudices de préférence aux stratégies de réduction de l’offre et de la demande :

Les principes de l’éducation à l’usage des drogues visant la réduction des préjudices reposent sur la prémisse que la consommation de drogue est normale et qu’elle s’assortit de risques autant que de bénéfices, qu’elle ne peut être entièrement éliminée mais que les préjudices qui en découlent peuvent être amoindris, que bon nombre de jeunes gens cessent de consommer de la drogue avec le temps, que l’éducation devrait se faire sans que des jugements soient posés, qu’elle requiert un dialogue ouvert avec les jeunes et le respect des personnes de prendre elles-mêmes leurs décisions. Cette éducation insiste d’autre part sur le soutien des pairs, au contraire du fractionnement.

[…] [Ces principes] reconnaissent que l’éducation à la réduction des préjudices est plutôt pro-drogue qu’antidrogue. L’enseignement commence dès les premières années avec des substances familières qui ne sont pas des drogues et elle insiste sur le fait que la plupart des choses que l’on consomme ont le pouvoir de faire du bien ou du mal, selon la façon dont on y recourt.46

La World Conference on Drug Related Issues, que parraine le Hassela Nordic Network, s’est réunie à Visby (Suède) du 3 au 6 mai 2001. Elle rassemblait des experts reconnus des politiques antidrogue de 25 pays venus évaluer les défis qui se posent en ce moment à ces politiques. Selon l’Institute on Global Drug Policy, les délégués à la conférence en sont venus à la conclusion suivante :

L’affaiblissement de la politique antidrogue baptisé « réduction des préjudices » a été désigné comme un échec de premier ordre des politiques antidrogue internationales. Les exemples de politiques sans effet qui ont fait l’objet de discussions incluent la dépénalisation de certaines drogues, la distribution ou l’échange de seringues, les thérapies d’entretien à l’héroïne, les traitements sans abstinence et les messages de prévention qui acceptent ou encouragent la consommation adolescente de drogues en la qualifiant d’inévitable (implicitement ou explicitement). La politique de réduction des préjudices a produit une hausse de la consommation de stupéfiants et des activités criminelles à l’échelle des pays qui l’ont mise en œuvre. Plus précisément, le Canada, la Hollande, la Suisse, l’Australie et certaines villes américaines ont assisté à une aggravation de leurs problèmes de drogue en vertu de ces politiques édulcorées. Il est clair que les retombées de telles politiques représentent une menace spécifique au bien-être des adolescents. Au contraire, les politiques restrictives de certains pays, comme la Suède, ont obtenu des succès substantiels au chapitre de la réduction de la consommation.

Alors que la politique des États-Unis demeure largement restrictive et porte fruit, certaines politiques de réduction des préjudices sont recommandées par des groupes et des personnes à la recherche d’un assouplissement de la politique antidrogue. Les décideurs américains devraient tenir compte des mises en garde relatives aux problèmes qui ont accompagné les politiques de réduction des préjudices dans d’autres pays. Le Dr Eric Voth, président de l’Institute on Global Drug Policy, qui a présenté un exposé lors de la conférence, remarquait qu’« il est de plus en plus clair que les politiques de réduction des préjudices devraient plutôt être considérées comme des politiques de production des préjudices. Une politique antidrogue bien inspirée tient de la prévention et de l’élimination des préjudices ».

Dans son rapport de 2000, l’Organe international de contrôle des stupéfiants publiait les observations suivantes sur les politiques de réduction des préjudices observées en Europe de l’Ouest :47

Les discussions sur les politiques antidrogue, en Europe de l’Ouest, ont porté sur la mise en œuvre d’activités de réduction des préjudices comme l’établissement de piqueries ou l’efficacité des traitements d’entretien à l’héroïne. À la suite de l’attention accordée en Europe de l’Ouest à la réduction des préjudices, il semble que certains pays d’Europe centrale et de l’Est aient aussi commencé à donner plus d’importance à la réduction des préjudices.

L’Organe a reconnu il y a plusieurs années, dans son rapport de 1993, que la réduction des préjudices a un rôle à jouer en tant que stratégie tertiaire de prévention aux fins de la réduction de la demande. Il attirait aussi l’attention sur le fait que les programmes de réduction des préjudices ne pouvaient pas être considérés comme des substituts aux programmes de réduction de la demande. L’Organe désire réitérer son affirmation : les programmes de réduction des préjudices peuvent jouer un rôle dans le cadre d’une stratégie globale de réduction de la demande, mais ils ne sauraient être menés à bien aux dépens d’autres activités importantes de réduction de la demande de drogues illicites, comme les activités de prévention de l’abus des stupéfiants.

Comme certaines mesures de réduction des préjudices sont controversées, la discussion de leurs avantages et inconvénients a dominé le débat public sur la politique antidrogue. Le fait que ces programmes ne devraient constituer qu’une composante de stratégies plus vastes et plus complètes de réduction de la demande de drogues illégales a sombré dans l’oubli. L’Organe se désole que la discussion des piqueries et de certaines autres mesures de réduction des préjudices ait éloigné l’attention (et, dans certains cas, le financement) des gouvernements des importantes activités de prévention de la demande, comme la prévention primaire ou les traitements par abstinence.

Les parents qui cherchent à décourager la consommation de drogues des enfants se sont montrés moins subtils dans leur description de l’« illusion de la réduction des préjudices »48:

La preuve de l’échec de cette politique est écrasante et sa fabrication par la soi-disant culture de la drogue la discrédite totalement. Le mouvement vers la libéralisation en fait une promotion internationale dans le cadre des conférences sur la réduction des préjudices où elle est assimilée à la dépénalisation.

Il est absurde de laisser entendre que les gens (particulièrement les jeunes gens) seront dissuadés d’utiliser les drogues illicites si on leur dit qu’ils peuvent y recourir de façon responsable ou en toute sécurité. Cela ne peut se justifier par l’argument selon lequel la consommation de drogue est un comportement normal qu’il est futile d’essayer d’empêcher. Il est tout aussi absurde de suggérer que, dans tout traitement antidrogue, le but premier ne doit pas être de faire cesser la consommation mais bien de réduire les préjudices qui en découlent. Cela signifie, par équation, que le but premier ne consiste pas à faire cesser la consommation. Au mieux, cela pourrait constituer un but secondaire. Le but premier doit être l’interruption de la consommation, qui est la meilleure réduction des préjudices que l’on puisse viser. La réduction des préjudices, par conséquent, n’a pas sa place comme politique dominante, que l’on parle de prévention ou de traitement. Elle est laxiste parce qu’elle tolère la consommation de drogues. C’est une politique d’abandon.

Les personnes dépendantes, pour la plupart, qu’elles soient accoutumées à la drogue, à l’alcool ou au tabac, vous diront qu’il est plus difficile de ramener sa consommation à un niveau modéré que de s’abstenir complètement de consommer. Pourquoi, alors, concentrerions-nous nos politiques sur l’« utilisation sécuritaire » de drogues non sécuritaires plutôt que sur la promotion de l’abstinence?


Prévention : la réduction de la demande

Les gouvernements tiennent un rôle légitime et critique d’établissement des lois et politiques qui définissent les normes comportementales et les valeurs de la société. Les mesures législatives et les activités d’observation de la loi sont des stratégies proactives nécessaires à la dissuasion de conduites qui mettent les gens en danger.

Dans Toward a Healthy Future: Second Report on the Health of Canadians49, les auteurs démontrent que des approches larges de la politique et de la loi peuvent avoir un impact dramatique sur le comportement des personnes.

L’augmentation, par exemple, du tabagisme parmi les jeunes après la réduction des taxes confirme le fait bien connu que le tabagisme chez les jeunes dépend très étroitement du prix. Le succès des dispositions législatives sur le port de la ceinture de sécurité (et, dans une certaine mesure, sur celui du casque de vélo) permet de croire que les stratégies législatives peuvent être aussi efficaces, peut-être même plus efficaces, que l’éducation publique au sujet de la santé dans l’appui au changement de comportement. Une combinaison de stratégies serait probablement le moyen le plus productif.

Le rapport décrit les effets de la loi sur le port de la ceinture de sécurité :

Parmi les conducteurs de voiture, le taux d’utilisation de la ceinture était de 92 %, une hausse relativement aux 82 % de la décennie précédente. Avant l’avènement des mesures législatives sur le port de la ceinture de sécurité au Canada, on estimait que seulement 15 % à 30 % des Canadiens en faisaient usage. Ces résultats, de concert avec l’impressionnante réduction des décès résultant d’accidents de la route au Canada, reflètent l’influence profonde que des mesures législatives externes au secteur de la santé peuvent avoir sur la santé des Canadiens.

Les risques d’être arrêté et de subir de lourdes conséquences ont été des éléments intégraux des stratégies fructueuses de réduction de la conduite en état d’ivresse au Canada. Le succès de ces programmes reposait sur :

    • une conscientisation vaste et l’éducation du public sur les risques de l’ivresse au volant. Selon MADD Canada50, l’augmentation de la prise de conscience de la population sur les dangers de l’alcool au volant en tant que stratégie critique de prévention des décès et des blessures;
    • la menace d’arrestation exprimée par des programmes enrichis et très visibles d’application, comme les contrôles routiers;
    • en conjonction avec des poursuites actives et des conséquences significatives, dont des amendes minimales, la révocation du permis de conduire et l’incarcération dans le cas de infractions graves ou répétées.

Ces principes figurent à la déclaration de principe de MADD: 51

    • Un programme vigoureux de défense des mesures législatives et des politiques d’intérêt public est essentiel à la réalisation de la mission de MADD Canada.
    • Un programme équilibré de conscientisation, d’éducation, de législation et d’application rigoureuse par les forces policières, les procureurs du ministère public et les tribunaux est essentiel à l’élimination de la conduite en état d’ivresse.
    • Bien que la décision personnelle de consommer de l’alcool relève du domaine privé, la conduite automobile subséquente à cette consommation est du domaine public.
    • Les conducteurs ivres et les autres personnes qui contribuent directement au crime de la conduite en état d’ébriété doivent être tenus responsables de leur comportement.
    • La réadaptation proactive des conducteurs ivres est essentielle.
    • La conduite automobile est un privilège, non un droit.
    • Les accidents résultant de la conduite en état d’ivresse ne sont pas vraiment des accidents.

Bien que la lutte à la conduite en état d’ébriété puisse ne jamais déboucher sur une victoire, aucun doute ne subsiste sur le fait que les stratégies utilisées se sont révélées utiles dans la modification des comportements et dans la réduction du risque. Les exemples d’initiatives comparables d’amélioration de la sécurité publique incluent les lois sur le port du casque de bicyclette et de motocyclette, d’arrêt complet en présence d’autobus scolaires et de sécurité nautique. Le niveau d’engagement soutenu envers tous les éléments requis détermine le degré de succès de la stratégie :

    • notoriété publique,
    • éducation,
    • législation,
    • application.

Comme le laissait entendre un observateur :

Demandons-nous si la médecine gagne la guerre à la mort. Bien sûr que non : l’unique règle fondamentale de l’existence humaine demeure, hélas, que nous mourons tous, même si 14 % du produit intérieur brut des États-Unis est consacré à la lutte contre la mort. Y a-t-il jamais eu une guerre perdue à un prix plus élevé? Devrions-nous, alors, abolir les écoles de médecine, les hôpitaux et les ministères de la Santé? Si toute personne est appelée à mourir, le moment fatidique importe peu.

La guerre à la drogue est peut-être perdue, mais il en va de même de la guerre au vol, à la vitesse au volant, à l’inceste, à la fraude, au viol, au meurtre, à l’incendie criminel et au stationnement interdit. Bien peu, s’il en est, de ces guerres peuvent être gagnées, aussi devrions-nous faire ce qui nous semble juste .52


Le coût de la dépénalisation sera astronomique

Les statistiques canadiennes montrent clairement que le coût relatifs à la consommation canadienne d’alcool et de tabac sont plus de treize fois plus élevés que les coûts relatifs à la consommation de drogues illicites :53

  • les coûts des activités d’observation de la loi relatives aux crimes pertinents à l’alcool représentent le triple du coût des activités équivalentes dans le domaine des drogues illégales;
  • les coûts directs de soins de santé relatifs à l’alcool et à la cigarette sont cinquante fois plus élevés que ceux qui relèvent des drogues illicites;
  • la perte de productivité est plus de dix fois plus élevée;
  • les pertes en milieu de travail sont trois fois plus élevées;
  • seulement un dollar est investi dans les programmes de prévention et de recherche sur la drogue pour chaque tranche de quatre dollars dépensée en alcool et en tabac.

La principale raison pour laquelle les coûts relatifs aux drogues sont si modestes se constitue simplement d’une consommation moins répandue. Les dépenses en activités d’application de la loi dans le cas des drogues illégales, à l’inclusion des frais de tribunal et de la protection des frontières, ne représentent que deux pour cent des coûts totaux qu’encourent les Canadiens dans les domaines de l’alcool, du tabac et des drogues illégales.

Comme la dépénalisation et le laxisme se solderont par une hausse marquée de l’usage et de l’abus des drogues, les coûts pertinents en soins de santé, en services sociaux, en prévention, en perte de productivité et en activités d’application de la loi augmenteront en proportion directe et seront une source importante d’épuisement des moyens de la société.

Source : Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies, 1992.

 

 

Coûts de la consommation d’alcool, de tabac et de drogues illégales
au Canada en 1992
(en millions de dollars)

 

Alcool

Tabac

Drogue

Total

1. Total des soins directs de santé

1 300,6 $

2 675,5 $

88,0 $

4 064,1 $

1.1 Morbidité, hôpitaux généraux

666,0

1 752,9

34,0

2 452,9

Morbidité, hôpitaux psychiatriques

29,0

4,3

33,3

1.2 Comorbidité

72,0

4,7

76,7

1.3 Services ambulanciers

21,8

57,2

1,1

80,1

1.4 Traitement en établissement

180,9

20,9

201,8

1.5 Traitement en clinique externe

82,1

7,9

90,0

1.6 Soins ambulatoires; honoraires médicaux

127,4

339,6

8,0

475,0

1.7 Médicaments sur ordonnance

95,5

457,3

5,8

558,5

1.8 Autres coûts des soins de santé

26,0

68,4

1,3

95,8

2. Pertes directes associées au milieu de travail

14,2

0,4

5,5

20,1

2.1 PAE et programmes de promotion de la santé

14,2

0,4

3,5

18,1

2.2 Dépistage de drogue en milieu de travail

S/O

2,0

2,0

3. Coûts administratifs directs des paiements de transfert

52,3

1,5

53,8

3.1 Bien-être social et autres programmes

3,6

S/O

3,6

3.2 Sécurité et santé au travail

48,7

1,5

50,2

3.3 Autres frais d’administration

S/O

S/O

S/O

S/O

4. Coûts directs de prévention et de recherche

141,4

48,0

41,9

231,1

4.1 Recherche

21,6

34,6

5,0

61,1

4.2 Programmes de prévention

118,9

13,4

36,7

168,9

4.3 Formation des médecins et infirmières

0,9

S/O

0,2

1,1

4.4 Coûts d’évitement du comportement

S/O

S/O

S/O

S/O

5. Coûts directs d’application de la loi

1 359,1

400,3

1 759,4

5.1 Police

665,4

S/O

208,3

873,7

5.2 Tribunaux

304,4

S/O

59,2

363,6

5.3 Services correctionnels (incluant la probation)

389,3

S/O

123,8

513,1

5.4 Douanes et Accise

S/O

S/O

9,0

9,0

6. Autres coûts directs

518,0

17,1

10,7

545,8

6.1 Dommages par incendie

35,2

17,1

S/O

52,3

6.2 Préjudices subséquents à des accidents de la route

482,8

10,7

493,5

7. Coûts indirects de la perte de productivité

4 136,5

6 818,8

823,1

11 778,4

7.1 Pertes de productivité par morbidité

1 397,7

84,5

275,7

1 757,9

7.2 Pertes de productivité par décès

2 738,8

6 734,3

547,4

10 020,5

7.3 Pertes de productivité consécutives à des activités criminelles

S/O

S/O

Total

7 522,1

9 559,8

1 371,0

18 452,9

Total en tant que % du PIB

1,09

1,39

0,20

2,67

Total par personne

265 $

336 $

48 $

649 $

Total en tant que % de tous les coûts relatifs à l’abus d’intoxicants

40,8

51,8

7,4

100,0

Source : Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies

 

Les taxes générées par l’alcool et le tabac sont loin de couvrir la simple valeur monétaire, et moins encore le coût humain véritable, de la consommation excessive de tabac et d’alcool. C’est faire preuve de naïveté que de croire que la situation serait différente dans le cas des drogues illégales.

Une stratégie antidrogue équilibrée n’éliminera pas complètement la consommation, mais elle sera économique et avantageuse pour la société par la dissuasion de l’utilisation des drogues et par la concentration des ressources disponibles dans la prévention, le traitement et la réadaptation du petit pourcentage de la population qui en a le plus besoin. Ce sera beaucoup plus efficace que de faire reposer nos politiques d’intérêt public, qui touchent tous les Canadiens, sur les besoins perçus d’une petite proportion de la population qui souffre d’assuétude aux drogues illégales et résiste à la réadaptation et au traitement.


Mythes et réalités

Les tenants de la libéralisation sont très habiles à soulever des doutes quant à l’efficacité des stratégies légitimes de contrôle des stupéfiants. Ils recourent pour ce faire à la diffusion d’information provocante minant l’assise des stratégies de contrôle acceptées dans le monde entier.

L’ACP a relevé dix de ces grands mythes sur les drogues illégales et les activités d’application de la loi.

 

Mythe 1 : La marijuana pose moins de risques que l’alcool ou le tabac

Réalité : Le tabac, bien qu’il cause une dépendance, ne nuit pas à l’état de conscience et n’entrave pas les fonctions cérébrales. On peut en dire autant de l’alcool s’il est consommé avec modération. Il n’existe pas de consommation sécuritaire des drogues illicites, pas même de la marijuana. Celle-ci perturbe les fonctions cérébrales, réduisant le jugement, la concentration et la mémoire à court terme ainsi que la capacité d’accomplir des tâches routinières. La fumée de la marijuana attaque les poumons plus que celle du tabac. Les gens qui consomment des drogues illégales, dont la marijuana, ont une propension plus marquée à adopter des comportements toxicomanogènes ou à risque.

Mythe 2 : Les dispositions législatives de contrôle des drogues causent plus de tort que les drogues elles-mêmes

Réalité : Un programme équilibré de conscientisation de la population, d’éducation du public, de mesures législatives et d’activités d’observation de la loi des corps policiers, des procureurs du ministère public et des tribunaux est essentiel à la réduction des véritables préjudices associés à la consommation de drogues illégales.

Les activités d’application de la loi confirment le fait que l’usage de la drogue est préjudiciable et n’est pas accepté par la société. Elles permettent les interventions nécessaires, dissuadent les citoyens respectueux de l’ordre de se laisser tenter par les comportements à risque et réduisent les souffrances attribuables aux drogues illicites et aux activités criminelles dont elles s’accompagnent.

 

Mythe 3 : Il y a de lourdes conséquences à la possession de cannabis

Réalité : Les mesures imposées aux jeunes gens trouvés en possession de petites quantités de cannabis, quand il s’agit d’une première infraction, se constituent souvent d’avertissements, de mesures substitutives ou de la participation à des programmes de déjudiciarisation. La nouvelle Loi sur les jeunes contrevenants embrasse cette approche. Les personnes poursuivies pour des crimes légers, dont les accusations de possession de drogue, font souvent l’objet d’une absolution inconditionnelle ou conditionnelle, purgent leur peine sous forme de service communautaire ou se voient imposer des sentences conditionnelles et/ou des amendes. Ces contrevenants sont rarement, sinon jamais, incarcérés. Les transgresseurs reconnus coupables peuvent demander une absolution s’ils n’encourent pas d’autres déclarations de culpabilité criminelle. La prison demeure le fief des récidivistes qui commettent des crimes graves.

L’approche du Canada face à de tels crimes est loin d’être sévère et beaucoup de jeunes gens considèrent que ces pratiques sont insignifiantes, ce qui confirme le besoin d’assortir de lourdes conséquences la consommation de drogue.

Mythe 4 : D’autres pays ont prouvé que les lois sur le contrôle des drogues ne sont pas nécessaires

Réalité : Voilà qui est faux! Certains pays, et même quelques États américains, ont fait l’essai des politiques de libéralisation de la consommation de drogue et c’est leur expérience qui démontre qu’en pareille situation, la consommation augmente, tout comme la demande de drogues chimiques et l’activité criminelle. À la longue, le concept de la prohibition gagne la faveur du public.

Mythe 5 : Jamais nous ne pourrons éliminer la consommation de drogues; pourquoi ne pas la réglementer, alors?

Réalité : Parce qu’il n’existe pas de consommation sécuritaire des drogues illicites. Même s’il est vrai que cette consommation existera toujours, il nous est possible d’en réduire les effets négatifs par des programmes de réduction de la demande. L’expérience du Canada dans la lutte à l’ivresse au volant démontre que, en maintenant le niveau d’éveil de la population au sujet du problème, en procédant à des activités d’éducation publique, en adoptant des mesures législatives et en appliquant des programmes d’observation de la loi, nous pouvons modifier les opinions, influer sur les comportements des jeunes gens et des adultes et, en bout de ligne, réduire le risque de préjudice.

 

Mythe 6 : La dépénalisation réduit l’assuétude

Réalité : Le fait de faciliter l’accès à des drogues nocives ne peut qu’accroître la consommation et la dépendance. L’alcool en est un exemple de premier choix, tout comme les médicaments prescrits. Il y a bien plus d’alcooliques que de narcomanes au Canada mais, proportionnellement, beaucoup plus de consommateurs de drogues illégales que de buveurs d’alcool développent une accoutumance.

 

Mythe 7 : La légalisation réduit le taux de criminalité

Réalité : L’expérience des pays qui s’y sont essayés démontre que le crime, la violence et la consommation d’alcool forment un ensemble. La dépénalisation ne change pas les effets toxiques des drogues sur les gens et sur leur conduite et l’augmentation de la demande et/ou de l’offre de drogues ne réduit en rien le potentiel de comportement criminel.

Mythe 8 : Le crime organisé accuserait un recul s’il y avait dépénalisation

Réalité : Les organisations criminelles, qui ont de tout temps visé membres les plus jeunes et les plus vulnérables de la société, ne se décourageront pas en présence d’efforts de dépénalisation du commerce extrêmement lucratif de la drogue. Comme on l’a vu dans les pays où il y a eu une libéralisation, le crime organisé a prospéré par suite de l’augmentation de la demande de drogues, exerçant des pressions à l’approvisionnement de drogues nouvelles, moins chères et plus fortes. Les membres des organisations criminelles ne se bornent pas à exploiter des marchés illégaux, comme le démontre la contrebande de cigarettes et d’alcool au Canada. La réduction de la demande et des mesures fructueuses d’application de la loi sont des stratégies efficaces de réduction du crime organisé. De fait, nos dispositions législatives sur les drogues se sont avérées les outils les plus efficaces de la lutte au crime organisé.

Mythe 9 : Les policiers appuient le statu quo car ils craignent de perdre leur emploi

Réalité : En réalité, nous ne sommes pas en faveur du statu quo et nous craignons de voir nos emplois prendre de l’ampleur avec l’augmentation de la consommation de drogue. Nous croyons que le Canada doit reconfirmer sa dénonciation de la consommation de drogues illicites, aviver la conscience de la population et renouveler ses efforts d’éducation publique sur les effets négatifs des drogues, revoir les pratiques de détermination de la peine de l’appareil judiciaire afin de faire prendre conscience de la lourdeur des conséquences, se montrer plus actif au chapitre de la dissuasion et axer les efforts des organismes d’observation de la loi sur la réduction de l’offre et de la demande de drogues illégales.

 

Mythe 10 : Le Canada est en train de perdre la guerre contre les drogues

Réalité : Le Canada n’a jamais livré de bataille à la drogue. Nos politiques nationales se concentrent sur la conscientisation, l’éducation et l’application. Au Canada, 93 % des particuliers ne consomment pas de marijuana, et 75% ne l’ont jamais essayée, tandis que 98,9 % des gens ne touchent ni à la cocaïne, ni à l’héroïne, ni à l’amphétamine, ni au LSD. Il est loin de s’agir d’un échec, mais nous pouvons, et nous devrions, faire mieux. Il est illusoire de croire que l’on peut vaincre les drogues, la conduite en état d’ivresse, le vol d’auto, le vol qualifié, les voies de fait ou même le meurtre. Cela ne signifie pas que nous devions pour autant remettre aux criminels les clés de nos villes et villages.

La lutte à la drogue qui est en train de se perdre se livre dans les salles de conférences de la nation, là où le succès des mesures d’interdiction des drogues illégales subissent des assauts. Alors même que nous observons des tendances navrantes dans la consommation de drogue des enfants d’âge scolaire et des adolescents, la tolérance perçue des chefs de file de la collectivité transmet aux jeunes des messages contradictoires prêtant à confusion.

Le moment est venu, pour les meneurs, pour les figures de proue de la collectivité, de prendre part au débat, de présenter aux jeunes des modèles positifs, d’accroître la conscience du public au chapitre des préjudices associés à la consommation de drogues illégales et de mettre fin à l’érosion de l’information publique par le biais de la désinformation et de l’intérêt personnel.

On peut et on doit soulever des doutes sérieux quant à la motivation du lobby domestique et extérieur de libéralisation de la consommation de drogue. Qui trouvera un avantage à la dépénalisation de la consommation, à l’augmentation de la demande, à l’augmentation de l’offre? Et aux dépens de qui? Ce sont les générations montantes qui en paieront le prix.


Conclusion : nous devons faire valoir nos succès

L’approche équilibrée qu’a adoptée le Canada envers la consommation de drogue continue d’avoir un effet positif important. Il ne faut pas perdre de vue que :

  • neuf Canadiens sur dix n’ont pas consommé de drogue au cours de la dernière année;
  • les trois quarts des Canadiens n’ont jamais consommé de marijuana;
  • la moitié des étudiants du secondaire n’ont jamais consommé de drogue;
  • les deux tiers des étudiants du secondaire n’ont pas consommé de drogue au cours des douze derniers mois.

Une dure réalité demeure : le crime organisé considère les jeunes Canadiens comme son marché principal de vente des drogues illégales. La consommation de drogue constitue un facteur significatif dans une vaste gamme de crimes, dont les infractions contre les biens, les crimes avec violence, les vols qualifiés, la prostitution et les organisations criminelles.

Certaines personnes ont laissé entendre qu’une stratégie de dépénalisation de la possession de cannabis et d’autres drogues pourrait, en quelque sorte, retirer le marché des mains du crime organisé. Nous croyons qu’il s’agit d’une approche à courte vue qui ne tient compte ni des risques associés aux drogues illégales ni de la souplesse dont peut faire preuve le crime organisé dans le choix de ses modes de production afin de générer une nouvelle demande et de nouvelles sources de revenu.

L’expérience d’autres pays illustre le fait que des politiques laxistes ne constituent pas une solution et ne répondent pas aux attentes de la population.

Le Bureau des Nations Unies pour le contrôle des stupéfiants et la prévention du crime, dans un exposé sur les stimulants de la famille de l’amphétamine présenté en février 2000 au Sommet international sur le contrôle des stupéfiants, proposait une approche à cinq volets de la prévention de la consommation de drogue :

  1. Hausse de la conscientisation du public
  2. Réduction de la demande
  3. Fourniture d’information exacte
  4. Restriction de l’approvisionnement
  5. Renforcement des contrôles

La prévention se trouve au cœur de la réduction de la demande. Si l’on transmet aux jeunes un message indiquant que la consommation de cannabis n’est pas préjudiciable ou qu’elle peut être sécuritaire, alors même qu’il existe une abondance de preuves scientifiques du contraire, on manque de cohérence. Le traitement et la réadaptation devraient être accessibles aux personnes souffrant de dépendance.

L’ACP recommande, par conséquent, que le gouvernement du Canada, de concert avec elle et avec ses partenaires de l’application de la loi, effectue une étude significative de l’efficacité de l’appareil judiciaire actuel dans la lutte à tous les crimes de moindre gravité, dont la possession de drogues illicites. Cette étude devrait comprendre un examen des pratiques de détermination de la peine, des substitutifs et de l’efficacité des peines, afin de garantir que les mesures contemporaines correspondent aux attentes de la collectivité.

L’ACP s’opposera vigoureusement aux efforts de dépénalisation de la possession de drogues sauf dans les cas approuvés d’ordonnance licite à des fins médicales. Une analyse plus poussée semble nécessaire sur l’utilité véritable et l’application de l’utilisation médicale de la marijuana.

Dans une lettre expédiée le 7 mai 2001 à M. Allan Rock, ministre de la Santé du Canada, le président de l’Association médicale canadienne (MC), Peter H. Barrett, déclarait :54

L’AMC reconnaît les besoins particuliers d’une personne souffrant d’une maladie en phase terminale ou d’une maladie chronique sur laquelle les thérapies traditionnelles sont sans effet. L’AMC reconnaît également les besoins des personnes qui peuvent avoir tiré, ou espèrent tirer, des avantages de la consommation de marijuana dans le soulagement de leurs symptômes, et elle en a de la sympathie. L’AMC appuie le recours à toute thérapie dont l’innocuité a été prouvée, qui est efficace et fabriquée selon les méthodes appropriées et elle défend depuis longtemps l’accès équitable à tous les traitements. Ses membres, néanmoins, ont à l’heure actuelle des réserves fondamentales quant à l’utilisation de marijuana à des fins médicales.

La marijuana est une herbe et, à ce titre, elle peut être considérée comme un produit naturel. Au contraire de bien d’autres produits naturels, cependant, la marijuana peut causer une dépendance, elle a des effets psychoactifs connus et, quand elle est absorbée sous forme de fumée, elle nuit à la santé. Les membres de l’AMC s’inquiètent également des implications sociales larges de la marijuana comme médicament et de ses répercussions possibles sur la capacité des consommateurs de fonctionner, à la maison ou au travail. L’AMC croit que les produits naturels devraient être soumis à la même réglementation fondée sur les preuves que tous les produits pharmaceutiques à mission thérapeutique.

L’AMC appuie Santé Canada dans ses efforts d’établissement de recherches sur l’innocuité et l’efficacité de la marijuana et de ses principes actifs et d’instauration d’une source sûre et licite de marijuana à partir de laquelle mener ses recherches. Nous espérons que, grâce à une recherche solide, les ingrédients actifs de la marijuana seront jugés inoffensifs et bénéfiques pour les patients qui continuent de souffrir d’affections pour lesquelles les traitements actuels se sont montrés inefficaces. D’ici là, toutefois, les membres de l’AMC s’inquiètent de voir la consommation de marijuana à des fins médicales sans assise scientifique adéquate ni contrôles réglementaires créer tant pour les patients que pour les médecins des risques qui, peut-être, ne justifient pas ses avantages à court terme.

Ce n’est pas parce qu’elles sont illégales que les drogues sont dangereuses : ce sont les dangers qu’elles posent qui les rendent illégales. Nous prétendons qu’il existe un risque intrinsèque à « réduire les préjudices » des accusations de possession de marijuana, dont un message incontournable voulant que la possession et la consommation de drogue n’aient pas à être prises au sérieux. Le pratiques de détermination de la peine des tribunaux canadiens ont déjà eu un effet négatif important sur la transmission de tels messages aux jeunes, tout comme aux producteurs, importateurs et trafiquants de drogue.

Il est crucial de bien faire comprendre aux jeunes Canadiens le danger et la destruction que représente la consommation de drogues illicites. Nous devons en venir à une approche équilibrée qui associera des conséquences significatives et proportionnelles aux crimes graves, en conjonction avec des mesures de renforcement des comportements voulus de nos jeunes gens.

Le message transmis aux jeunes Canadiens par l’accroissement du laxisme serait également contre-productif. Nous l’admettons, la crainte de l’arrestation ne constitue pas un élément de dissuasion important pour certaines personnes, mais elle représente un rappel du fait que les Canadiens, dans leur ensemble, ne tolèrent pas l’abus de drogues illégales. Les attitudes sociales et les inquiétudes relatives à la santé ont plus d’importance dans la dissuasion de la consommation de drogue. Il importe que la consommation ne soit pas vue par les jeunes gens comme une pratique à laquelle souscrit la société et qu’elle ne soit pas non plus considérée comme « sans danger ». La dépénalisation ne ferait rien d’autre que de prévenir la consommation de drogues illicites avant l’âge de la majorité. À l’heure actuelle, bien que la réglementation sur le tabac en interdise l’achat et la consommation aux jeunes, un demi-million de Canadiens de moins de 18 ans fument. La diffusion du message voulant que les drogues ne soient « pas cool » appelle une approche multivolet incluant le recours aux modèles sociaux, à l’éducation sur la santé – et à l’interdiction .55

 

L’honorable David Kilgour,
Député et secrétaire d’état (Amérique latine et Afrique)


NOTES

  1. Kilgour, David. A Balanced Approach to Drugs: ‘Simple Phrases’ Won’t Work, The Ottawa Citizen, 22 septembre 2000. Traduction libre.

  2. Résolutions adoptées en 2000 par l’Association canadienne des policiers et policières.

  3. Santé Canada. Les drogues : faits et méfaits.

  4. Santé Canada, op.cit., traduction libre.

  5. Drug Identification Bible; édition 2001, Amera-Chem Inc., www.drugidbible.com. Traduction libre.

  6. Amera-Chem Inc., op.cit., traduction libre.

  7. Single, Eric et Benedikt Fischer, Robin Room, Christine Poulin, Ed Sawka, Herb Thompson, John Topp, Cannabis Control in Canada: Options Regarding Possession, Groupe de travail national sur la politique concernant l’abus d’intoxicants du Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies, mai 1998. Traduction libre.

  8. Single, Eric et autres, op.cit., traduction libre.

  9. Joy, Janet E. et Stanley J. Watson Jr, John A. Benson Jr. Marijuana and Medicine: Assessing the Science Base (sommaire), Institute of Medicine, Division of Neuroscience and Behavioral Health, National Academy Press, 1999. Traduction libre.

  10. Drug Identification Bible, op.cit., traduction libre.

  11. Marijuana and Medicine: Assessing the Science Base, op.cit., traduction libre.

  12. Rapport de l’Organe international de contrôle des stupéfiants de 1999 (publication de l’ONU). Traduction libre.

  13. Adlaf, Edward M. et Angela Paglia, Frank J. Ivis. Drug Use Among Ontario Students; Findings From the Ontario Student Drug Use Survey, 1977-1999, Fondation de la recherche sur la toxicomanie, Centre de toxicomanie et de santé mentale. Traduction libre.

  14. Adlaf, Edward M. et autres, op.cit., traduction libre.

  15. Poulin, Christine et Eric Single, Pamela Fralick. Deuxième rapport national du Réseau communautaire canadien de l’épidémiologie des toxicomanies (RCCET) 1999. Traductin libre.

  16. Zoccolillo, Mark, MD et Frank Vitario, Ph.D., Richard Tremblay, Ph.D. Problem Drug and Alcool Use in a Community Sample of Adolescents, Press Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, 1999. Traduction libre.

  17. Starch Research Services Ltd. Teen Tribute Survey, printemps 1998. Traduction libre.

  18. Adlaf, Edward M. et autres, op.cit., traduction libre.

  19. Adlaf, Edward M. et autres, op.cit., traduction libre.

  20. CCENDU, op.cit., traduction libre.

  21. Zoccolillo et autres, op.cit., traduction libre.

  22. Zoccolillo et autres, op.cit., traduction libre.

  23. Zoccolillo et autres, op.cit., traduction libre.

  24. Zoccolillo et autres, op.cit., traduction libre.

  25. Zoccolillo et autres, op.cit., traduction libre.

  26. ; Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies du Centre de toxicomanie et de santé mentale. Canadian Profile; Alcohol Tobacco and Other Drugs, 1999. Traduction libre.

  27. C’est nous qui soulignons.

  28. Association canadienne des policiers et policières. Brief to the House of Commons Sub-Committee on Organized Crime; octobre 2000 (publié à l’adresse www.cpa-acp.ca).

  29. Rapport de 2000 de l’Organe international de contrôle de stupéfiants. Traduction libre.

  30. Amera-Chem Inc., op.cit., traduction libre.

  31. Organe international de contrôle de stupéfiants, op.cit., traduction libre.

  32. Lindberg, Jakob. A restrictive Drug Policy: The Swedish Experience (dans l’avant-propos), Institut national suédois de santé publique, 1993. Traduction libre.

  33. Karlson, Kenth. Europe’s Fifth Freedom, League Against Intoxicants. Traduction libre.

  34. OICS (1999), op.cit., traduction libre.

  35. OICS (2000), op.cit., traduction libre.

  36. C’est nous qui soulignons.

  37. Aeschbach, Ernst, MD et Annemarie Bucholz-Kaiser, Franziska Haller, Ralph Kaiser MD, Viviane Kaiser MD, Hans Koeppel MD, Titine Oertli, Diethelm Raff, Florian Ricklin, MD, Jean-Paul Vuilleumier. Argumentum Against Drug Legalization: A Contribution in Support of the Swiss People’s Referendum for a Youth Without Drugs, Groupe de travail sur la prévention des toxicomanies de l’Association for the Advancement of Psychological Understanding of Human Nature VPM, 1994. Traduction libre.

  38. Voth, Eric A., MD. The International Drug Strategy Institute. Traduction libre.

  39. Nahas, Gabriel G., MD. The War on Drugs: a position paper, International Alliance for the United Nations Single Convention.

  40. Voth, Eric. A. et Sandra Bennet. Drug Watch International, International Drug Strategy Institute, communiqué de presse, 1998. Traduction libre.

  41. Institut national suédois de santé publique. A Restrictive Drug Policy: The Swedish Experience,1993. Traduction libre.

  42. OICS (1999), op.cit., traduction libre.

  43. Aeschbach, Ernst et autres, op.cit., traduction libre.

  44. Nahas, Gabriel G., op.cit., traduction libre.

  45. Aeschbach, Ernst et autres, op.cit., traduction libre.

  46. Riley, Diane. The Harm reduction Model: Pragmatic Approaches to Drug Use from the Area Between Intolerance and Neglect, Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies.

  47. OICS (2000), op.cit., traduction libre.

  48. Australian Parents For Drug Free Youth. The Fallacy of Harm Minimisation.

  49. Conseil consultatif fédéral-provincial-territorial sur la santé de la population. Toward a Healthy Future; Second report on the Health of Canadians, présenté au Comité conjoint des ministres de la Santé à Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard) en septembre 1999. Traduction libre.

  50. Mothers Against Drunk Driving (MADD) Canada; MADD Programs; www.madd.ca. Traduction libre.

  51. MADD, op.cit, traduction libre.

  52. Dalrymple, Theodore. Don’t Legalize Drugs – Some Thoughts on Prohibition, Manhattan Institute, City Journal, vol. 7, no 2, printemps 1997.

  53. Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies.

  54. Barrett, Dr Peter H. MD, FRCSC, président de l’AMC, lettre au ministre de la Santé du Canada, 7 mai 2001.

  55. Kilgour, David; A Balanced Approach to Drugs: ‘Simple Phrases’ Won’t Work, The Ottawa Citizen, 22 septembre 2000.


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