DE L’OMBRE À LA LUMIÈRE
La transformation des services concernant la santé mentale, la maladie
mentale et la toxicomanie au Canada
CHAPITRE 8:
MILIEU DE TRAVAIL ET
EMPLOI
C’est dans le travail que les dimensions humaine et économique de la santé mentale et de la maladie mentale se manifestent le plus nettement. D’une part, le travail peut contribuer de façon tout à fait constructive au bien-être mental, car c’est du travail que nous tirons une bonne partie de notre sentiment d’intégration sociale. Comme Merv Gilbert, psychologue à l’Unité d’évaluation en santé mentale et de consultation communautaire au département de psychiatrie de l’Université de la Colombie-Britannique, l’a expliqué au Comité :
Le travail procure un sentiment de structure, une valeur sociale, des soutiens sociaux, un endroit où aller à l'extérieur de la maison[...] et il procure également un revenu, et nous savons que cela favorise la santé mentale[298].
On a également constaté que le travail aide les personnes souffrant de maladie mentale à se rétablir. Celles qui ont un emploi sont hospitalisées moins souvent et pour moins longtemps et leur qualité de vie s’en trouve améliorée. Les enquêtes montrent que la plupart des personnes qui souffrent de maladie mentale grave désirent travailler et que c’est là une de leurs priorités.
Mais c’est rarement le cas. En fait, on estime que jusqu’à 90 p. cent des personnes ayant une maladie mentale grave ne peuvent se trouver un emploi[299]. Par ailleurs, comme elles sont exclues de la population active, elles dépendent souvent des programmes de sécurité du revenu pour joindre les deux bouts. Le chômage mène à l’appauvrissement et à un engagement social moindre, ce qui aggrave les troubles physiques et mentaux. Il contribue également à un sentiment d’inutilité et à la dépression, ce qui peut conduire à la toxicomanie.
Cependant, si la participation à la population active peut contribuer à un bon état mental, elle peut également susciter des problèmes mentaux, notamment le stress, la dépression et les troubles anxieux. M. Gilbert a précisé :
Nous nous retrouvons donc devant l'un des paradoxes fondamentaux : le travail est bon pour la santé mentale, et le travail peut vous rendre fou[300].
Les
questions entourant la santé mentale et le travail sont complexes et présentent
bien des facettes. Comme
De plus en plus, les recherches démontrent que, non seulement il faut contrer l'absence de travail ou le chômage pour préserver la santé mentale, mais qu'il faut également préserver la qualité du travail pour que le travail joue pleinement son rôle dans la construction de l'identité et l'actualisation de ses pleines capacités[301].
8.1 COMPRENDRE LES CONSÉQUENCES DES MALADIES MENTALES SUR LE PLAN HUMAIN EN MILIEU DE TRAVAIL
8.1.1 Les nombreux facteurs qui contribuent au déclenchement d’une maladie mentale
À propos des liens complexes entre le travail et la santé mentale, le professeur Marc Corbière, de l’Institut de recherche en promotion de la santé de l’Université de Colombie-Britannique, a déclaré au Comité :
[I]l n'est pas toujours possible d'établir un lien de causalité entre les problèmes de santé mentale et le milieu de travail. Parfois, les problèmes de santé mentale peuvent découler de facteurs liés à la fois à la vie professionnelle et à la vie personnelle[302].
Dans un article récent intitulé « Nature and Prevalence of Mental Illness in the Workplace », Carolyn Dewa et ses collègues expliquent :
Le visage de la santé mentale au travail devient de plus en plus flou. Il y a un lien manifeste entre la maladie mentale chez les travailleurs et le stress lié au travail. Ces deux phénomènes sont de plus susceptibles d’être reliés au type de travail, au milieu de travail et au sexe du travailleur.
Il semble également que la maladie mentale et les troubles physiques soient associés. Pourtant, rares sont les études qui ont traité de la manière dont ces divers facteurs expliquent la prévalence des troubles mentaux chez les travailleurs. Plus rares encore sont celles qui ont traité de leurs apports relatifs à l’incapacité en milieu de travail[303].
Les auteurs notent que de nombreux facteurs contribuent au développement de maladies mentales comme la dépression, mais que personne ne sait vraiment en quoi elles sont reliées :
Pourtant, les modèles étiologiques les plus avancés de la dépression chez l’adulte comprennent des facteurs liés à la vulnérabilité génétique, ainsi que des facteurs de développement, des facteurs neurobiologiques, des expériences pendant l’enfance, des événements marquants, des situations chroniques (milieu de travail stressant, etc.) et la présence d’autres désordres[...] On comprend mal encore le poids de chacun de ces facteurs et leur interaction[304].
Il y a
bien des façons de classer les facteurs de risque contribuant à l’apparition
d’une maladie mentale. Dans son témoignage devant le Comité,
Lucie France Dagenais, chercheure à
Tout d'abord ceux qui sont reliés aux relations sociales au travail. Cela inclut la violence, le harcèlement, l'absence d'appui social et les mauvaises relations au travail. La deuxième catégorie comprend ceux que l'on retrouve dans l'organisation du travail et qui sont beaucoup moins connus sur une base d'analyse. Nous avons repéré l'intensification du travail, l'absence de marge de manœuvre, les horaires atypiques, l'absence de reconnaissance, l'absence de groupes d'expression, l'avancement au mérite et la flexibilité[305].
Toutefois, comme Michel Vézina et ses collègues le signalent dans un article récent, il n’y a malheureusement aucun consensus scientifique sur la façon de définir et de mesurer un milieu de travail psychosocial à risque élevé. Pour eux, les facteurs psychosociaux désignent tous les facteurs organisationnels et les relations interpersonnelles en milieu de travail qui peuvent avoir une influence sur l’état de santé. Parmi les facteurs qui permettent d’établir la nature stressante d’une situation de travail, ils citent :
[…] le contrôle (latitude, participation, utilisation et perfectionnement des compétences), la charge de travail (quantité, complexité et délai), les rôles (conflit et ambiguïté), les relations interpersonnelles (appui social, harcèlement et reconnaissance), les perspectives professionnelles (promotion, précarité et rétrogradation), la culture ou le climat organisationnel (communication, structure hiérarchique et équité) et l’interaction entre travail et vie privée[306].
Les attitudes négatives envers la maladie mentale demeurent répandues dans la société et peuvent exacerber les difficultés créées par les conditions de travail. Les personnes ayant des troubles mentaux peuvent susciter des craintes chez leurs employeurs et leurs collègues, ces derniers pouvant estimer qu’elles sont non spécialisées, improductives, non fiables et parfois même violentes[307]. Ces perceptions non justifiées peuvent contribuer à des hésitations au moment d’embaucher quelqu’un ayant eu des troubles mentaux, ou de limiter l’avancement professionnel de cette personne si un épisode de maladie mentale est révélé. Ceux qui ont le courage de « reconnaître publiquement » leurs problèmes au travail risquent également de perdre leur emploi.
Il importe
de reconnaître que ce manque de compréhension des liens entre le travail et la
maladie mentale n’est pas propre au milieu de travail; il est également présent
chez les professionnels de
Avec tout le respect que je leur dois, la plupart des fournisseurs de soins en santé mentale n'ont aucune idée de ce qui se passe en milieu de travail. En général, les médecins qui ont devant eux un patient en pleurs, atteint d'un trouble connu, qui demande s'il doit rester au travail, retourner au travail, qui veut savoir comment composer avec ses problèmes en milieu de travail, sont bien souvent mal informés. Ils ont peut-être devant eux une description de poste mal rédigée, s'ils sont chanceux, pour déterminer si une personne devrait travailler, quelles mesures d'adaptation devraient être prises, et quels enjeux devraient être abordés. Par conséquent, j'insiste sur le fait que nous devons également instruire les intervenants du système de soins de santé[308].
8.1.2 La nature épisodique de la maladie mentale
La nature épisodique et cyclique de la plupart des maladies mentales est un autre facteur qui complique l’évaluation de la santé mentale en milieu de travail. Et il devient d’autant plus difficile d’apporter les aménagements nécessaires au travail pour les personnes ayant une maladie mentale. Contrairement aux autres groupes de personnes handicapées, les personnes ayant une maladie mentale sont rarement souffrantes de manière continue; elles alternent entre des périodes de maladie et des périodes de bien-être. Lorsqu’elles n’ont pas de symptômes, elles sont généralement en mesure de travailler et d’effectuer les tâches courantes de la vie quotidienne. Lors des épisodes de troubles psychiatriques, elles deviennent alors parfois incapables de fonctionner suffisamment bien pour conserver un travail régulier à temps plein.
Compte tenu de la nature cyclique, épisodique et imprévisible des maladies mentales graves, il peut être impossible d’acquérir une expérience professionnelle suffisamment longue et stable. Il est particulièrement difficile de retrouver un emploi lorsque son curriculum indique des périodes de chômage inexpliquées.
8.1.3 La diversité des liens entre maladie mentale et travail
Les différentes catégories de personnes atteintes de maladies mentales connaissent chacune des difficultés particulières pour ce qui est de l’emploi.
Dans bien des cas, les troubles mentaux ont tendance à se déclencher à la fin de l’adolescence ou au début de la vie adulte, à un moment où les études et la formation ne sont pas encore terminées. Le processus de préparation à l’emploi est interrompu et, bien souvent, il ne redémarre jamais. Les jeunes touchés sont très désavantagés; l’absence de compétences et de qualifications constitue un important obstacle à leur emploi futur[309].
Il arrive aussi que la carrière soit interrompue par des maladies mentales graves ou une toxicomanie. Beaucoup ne retrouvent pas de place sur le marché du travail. Pour les personnes qui ont un travail, les périodes de retrait de la population active pour cause de maladie mentale les empêchent souvent de retrouver leur emploi.
Trois grands obstacles s’appliquent dans ce cas. Premièrement, les personnes visées peuvent faire l’objet de discrimination de la part de leur employeur ou de leurs collègues, ou des deux. Deuxièmement, elles peuvent avoir besoin d’un assouplissement de leurs conditions de travail que les employeurs hésitent à accorder ou ne savent pas comment accorder. Troisièmement, celles qui se sont retrouvées hors du marché du travail pendant de longues périodes ne possèdent probablement pas le type de compétences, de qualifications et d’expérience professionnelle qui intéressent les employeurs.
Enfin, il existe un large groupe de personnes actuellement employées mais dont la productivité est amoindrie à des degrés divers par des difficultés sur le plan de la santé mentale, état souvent désigné de « présentéisme ».
Cette diversité signifie que la question de la santé mentale, de la toxicomanie et du travail doit être étudiée selon différents angles : permettre à ceux qui n’ont jamais eu de travail d’obtenir un emploi; permettre à ceux qui ont perdu leur travail en raison d’une maladie mentale ou d’une toxicomanie de réintégrer le marché du travail et étudier la façon dont la maladie mentale ou la toxicomanie nuit à ceux ayant actuellement un emploi.
8.1.4 Bien des points de recherche restent sans réponse
À la lumière des recherches actuelles, on se rend vite compte que l’on sait peu de choses des maladies mentales au travail et des troubles liés au stress, que ce soit pour définir l’ampleur du problème ou d’établir les meilleures façons de le gérer[310]. Dans un article récent, Elliot Goldner et ses collègues notaient que :
Beaucoup de travaux de recherche sur la santé en milieu de travail ont porté sur la gestion de l’incapacité, le retour au travail et le traitement. Pour la plupart, toutefois, ces travaux ne traitaient pas directement des problèmes de santé mentale mais étaient axés sur divers problèmes de santé physique que l’on trouve en milieu de travail (problèmes de dos et autres problèmes musculo-squelettiques, blessures au cerveau, maladies cardiaques et maladies rhumatismales chroniques)[311].
Ces travaux montrent également que la pauvreté des recherches dans le domaine de la santé mentale au travail n’est pas un phénomène nouveau.
Dans un article publié en 1993, Rachel Jenkins se demandait pourquoi la santé mentale au travail faisait l’objet de si peu de recherches. Plus de dix ans plus tard, la même question se pose. Il existe beaucoup de lacunes dans nos connaissances. On sait peu de choses des pratiques à suivre pour gérer les incapacités liées aux troubles mentaux les plus fréquents (dépression, troubles anxieux et désordres liés à la toxicomanie). Même si l’on dispose de certains renseignements pouvant aider les personnes souffrant de désordres mentaux graves à obtenir un emploi, on ignore souvent comment les aider à garder leur emploi. De plus, on ne sait rien des facteurs systémiques qui influent sur la gestion des incapacités et sur le retour au travail (programmes d’aide aux employés et règlements sur l’assurance-invalidité) des personnes ayant des troubles mentaux[312].
Autre fait important, les spécialistes des divers domaines ne parlent pas toujours le même langage, ce qui nuit encore plus à l’intégration des recherches en santé mentale au travail. C’est ce qu’Aldred H. Neufeldt a bien fait valoir :
Une grande difficulté vient de ce que les connaissances existantes présentent ce que l’on pourrait appeler le « syndrome des ilots ». Les différents types de recherches sont publiés dans différents types de journaux, et les références croisées sont peu fréquentes. Les revues d’épidémiologie examinent la relation entre le fonctionnement et le handicap psychiatrique. Les ouvrages de santé et de psychologie du travail portent sur des sujets comme les éléments de stress au travail, la santé, le rendement et l’absentéisme. Les documents sur la réadaptation et la psychiatrie analysent les traitements particuliers de maladies psychiatriques, ainsi que l’efficacité d’interventions comme les hospitalisations de courte et de longue durée, l’emploi assisté, la gestion de cas, etc.[313].
Il est donc encore plus difficile pour les employeurs et pour les employés de concevoir des pratiques exemplaires à partir d’examens complets de la littérature scientifique.
8.2 L’IMPACT ÉCONOMIQUE DE
Nous le répétons, la recherche dans le domaine de la santé mentale en milieu de travail présente beaucoup de lacunes de taille. Dans son rapport intérimaire, le Comité notait l’absence de statistiques probantes sur la prévalence des maladies mentales et des toxicomanies en milieu de travail[314].
Néanmoins, le Comité a été informé que les prestations d’invalidité attribuables à des maladies mentales dépassent maintenant les prestations relatives aux maladies cardiovasculaires, au titre de la catégorie de coûts d’invalidité qui augmente le plus rapidement Canada. À l’heure actuelle, les maladies mentales et la toxicomanie représentent de 60 à 65 p. 100 de toutes les demandes de prestations d’invalidité chez quelques employeurs canadiens et américains[315].
Mme Dewa et ses collègues ont signalé que :
Depuis quelques années, le nombre des prestations d’invalidité
attribuables à des maladies mentales augmente sans cesse. Entre 1989 et 1994,
selon
Comparativement à toutes les autres maladies (comme le cancer et les maladies du coeur), les maladies mentales et la toxicomanie arrivent au premier et au deuxième rang des causes d’invalidité au Canada, aux États-Unis et en Europe de l’Ouest. Parmi les dix principales causes d’invalidité dans le monde, cinq sont des troubles mentaux : dépression unipolaire, alcoolisme, trouble bipolaire, schizophrénie et trouble obsessif-compulsif[317].
Qui plus est, comme cela a été signalé lors de
Les troubles mentaux, non contrôlés et handicapants, nuisent à la capacité d’un segment important de notre population de contribuer activement à l’économie. L’innovation et la productivité sont des facteurs de plus en plus cruciaux pour la croissance et la prospérité économiques. Les troubles mentaux devraient être reconnus comme une source importante d’incapacité parmi ceux sur lesquels nous comptons pour nous assurer ces niveaux critiques de croissance et de compétitivité.
La productivité est touchée à la fois par le « présentéisme » — journées pendant lesquelles une personne est présente au travail mais ne peut donner tout son potentiel — et l’absentéisme — journées pendant lesquelles l’employé ne se présente pas au travail. La maladie mentale et la toxicomanie comptent parmi les plus importantes causes d’absentéisme et de présentéisme dans le monde entier : dans son rapport publié en 1998, l’Organisation mondiale de la santé affirmait que le nombre de journées de travail perdues à cause de troubles mentaux dépasse celui des journées perdues à cause de maladies physiques.
Au Canada, 20 p. cent des heures normales de travail des employés souffrant d’une maladie mentale ou d’une toxicomanie non dépistée ne sont pas productives parce qu’elles ne sont pas travaillées. Ce pourcentage est quatre fois plus élevé que chez leurs collègues de travail[319].
Mme Dewa et ses collègues ont signalé que :
On a observé qu’une proportion significative du problème que constituent les troubles mentaux provient des journées de présentéisme... On distingue ainsi les troubles mentaux des maladies physiques de type chronique. Ces dernières sont associées à des journées d’incapacité totale, tandis que les troubles psychiatriques se traduisent le plus souvent par une incapacité partielle; en fait, ces derniers ont causé 23 fois plus de journées d’incapacité partielle que de journées d’incapacité totale[320].
En 1998, on a chiffré à 8,1 milliards de dollars environ la productivité perdue au Canada, uniquement à cause des maladies mentales. Plus récemment, on a évalué, en tenant compte de la toxicomanie, que l’économie canadienne perd quelque 33 milliards de dollars par an. Ceci correspond à 19 p. cent des profits combinés de toutes les entreprises canadiennes et à 4 p. cent de la dette nationale[321].
Ce sont
essentiellement sur les employeurs et les employés que retombent les conséquences
financières des troubles mentaux au Canada, par le truchement des dépenses de
fonctionnement, des charges salariales, des diverses cotisations et des faux
frais. Quelques grandes entreprises canadiennes ont expliqué l’impact financier
des troubles mentaux de leurs employés dans des déclarations présentées à
l’occasion de
§
À
§ La Great-West, Compagnie d’assurance-vie estime que 30 p. cent des demandes d’assurance-invalidité concernent des maladies mentales et que, pour les 70 p. cent restants, un quart ou plus concernent des maladies mentales comme diagnostic secondaire ou sous-jacent.
8.2.1 L’impact des tendances économiques mondiales sur la santé mentale au travail
Il est
crucial de tenir compte de deux tendances, soulignées par
La première tendance — l’importance croissante du savoir et des compétences intellectuelles en général pour l’économie — constitue une excellente raison de s’attaquer aux problèmes de santé mentale en milieu de travail.
La seconde tendance — les exigences imposées par une économie devant être concurrentielle sur le plan international et tirée par les investissements — renforce la première tendance de bien des façons, mais elle peut également être à la source de graves risques pour la santé mentale des travailleurs, notamment parce qu’elle accroît le niveau de stress.
La plupart des nouveaux emplois exigent aujourd’hui des capacités plus cérébrales que manuelles, autrefois si importantes. S’il est vrai (ce qui est quasi certain) que nous voyons l’émergence d’une économie du savoir intellectuel, les questions de santé mentale doivent occuper la première place dans les affaires économiques du Canada.
Les plus hauts échelons des sociétés canadiennes sont de plus en plus conscients de cette nouvelle réalité. Selon Gordon Nixon, président et chef de la direction, RBC Groupe financier, nous aurions une économie de performance mentale dans laquelle la capacité d’innovation — de pensée créatrice — des employés est un atout de taille. Pour Robert MacLellan, vice-président exécutif et directeur principal des investissements au Groupe financier Banque TD, la santé mentale revêt dans ce contexte une grande importance, car, selon lui, une forte prévalence de maladies mentales (désordres cérébraux) prive notre économie d’employés productifs et novateurs[324].
L’honorable
Michael Wilson, ancien conseiller spécial auprès
du ministre de
Nous avons fait d’énormes progrès dans la prévention des blessures et
des maladies physiques au travail. Les entreprises auxquelles je suis associé
tirent une grande fierté de leurs résultats sur le plan de
Il serait dommage de défaire ces 30 années de progrès réalisés sur le plan de la santé et de la sécurité physiques en laissant se perdre une énorme capacité productrice parce que l’on n’aura pas traité les maladies mentales, surtout la dépression[325].
La nouvelle économie a donné naissance à une convergence coûteuse — l’avènement d’une économie cérébrale à une époque où les désordres cérébraux deviennent la principale cause d’incapacité dans la main-d’oeuvre active.
Les incidences de cette nouvelle réalité ne se manifestent cependant pas toujours immédiatement, surtout compte tenu de la seconde tendance mentionnée. Sous les intenses pressions, surtout venant des investisseurs, qu’elles subissent pour adopter une approche valeur, les entreprises doivent parfois licencier du personnel et s’efforcer de « faire plus avec moins ». Outre les énormes coûts sur le plan humain que les licenciements massifs ont représentés pour les intéressés, il est également important de reconnaître les conséquences éventuelles à plus long terme de cette stratégie pour les entreprises elles-mêmes.
Dans une
économie qui mise essentiellement sur la productivité et l’innovation, le
déploiement prudent de capital humain est d’une importance critique pour
Les arguments prônant des milieux de travail propices à une bonne santé mentale sont donc irréfutables, étant donné que de tels milieux se traduiront par une hausse de la productivité, laquelle compensera les coûts des investissements nécessaires pour réduire de façon significative les facteurs pouvant nuire à la santé mentale des travailleurs.
8.3 INITIATIVES À PARTIR DU LIEU DE TRAVAIL
Il y a deux grandes catégories d’interventions sur le plan de la santé mentale au travail. Tout d’abord, les mesures de prévention primaire, qui visent à éliminer, ou du moins à atténuer, les facteurs nuisant à la santé mentale des travailleurs. Ensuite, il existe une panoplie de stratégies d’intervention secondaire conçues essentiellement pour réduire les effets du stress professionnel en améliorant la capacité des individus à s’adapter au stress et à le gérer.
Il semblerait que les approches organisationnelles bien structurées donnent des effets plus notables et plus durables que les stratégies d’intervention secondaire s’adressant aux individus[326]. D’après les recherches sur l’intervention de prévention, il faut s’attaquer à certaines causes liées au travail pour réduire ou éliminer le stress. Deux modèles de risques cernent les relations psychosociales et interpersonnelles qui contribuent à rendre les gens malades : 1) le modèle « exigences du travail-contrôle-soutien » de Karasek et 2) le modèle « déséquilibre effort/récompense » de Siegrist.
Le modèle « exigences du travail-contrôle-soutien » s’appuie sur le fait qu’une situation professionnelle caractérisée par de fortes exigences psychologiques combinées à un manque de liberté décisionnelle accroît le risque de susciter une situation propice aux maladies mentales ou physiques[327]. Le modèle « déséquilibre effort/récompense » s’appuie sur le fait qu’une situation professionnelle caractérisée par des efforts importants combinés à de maigres récompenses peut s’accompagner de réactions émotionnelles et physiologiques qui peuvent nuire à la santé mentale[328].
Si c’est le « contrôle » qui est au coeur du modèle de Karasek, c’est la « réciprocité sociale » (c.-à-d. la possibilité d’avoir accès à des avantages légitimes, dûment gagnés dans l’exercice du travail) qui est le concept clé du modèle de Siegrist. Ce dernier est particulièrement bien conçu pour mesurer l’incidence, sur la santé mentale, d’un nouveau phénomène survenu au cours des dix dernières années, à savoir la précarité de l’emploi[329].
Diverses études ont dégagé les caractéristiques d’un milieu de travail propice à la fois à la rentabilité et à une meilleure santé mentale, à savoir la sécurité de l’emploi, les équipes autogérées et la prise de décisions décentralisée, une formation approfondie, des distinctions hiérarchiques moindres et une atténuation des barrières à la communication, dans tout l’organisme, de l’information financière et de l’information sur le rendement. Vézina et ses collègues ont mentionné des études qui dégagent cinq facteurs nécessaires au succès d’un projet d’intervention primaire. Il s’agit :
du soutien de la haute direction et de la participation de tous les niveaux hiérarchiques; de la participation des employés aux discussions des problèmes et aux éventuelles solutions; de l’identification préliminaire des effectifs à risque compte tenu de modèles théoriques validés ou de leur manifestations connexes; de l’application rigoureuse des changements nécessaires dans les effectifs ciblés et de la gestion sur place des procédures et des changements[330].
Des études
ont montré que, si ces facteurs sont en place, les interventions axées sur
l’organisation du travail peuvent présenter d’énormes avantages, sur le plan
surtout de l’absentéisme et de la dépression et même du bien-être et de
- Imposer des exigences déraisonnables aux subordonnés et retenir de l’information qui les concerne au premier chef pour l’exercice de leurs fonctions.
- Refuser de donner aux employés une latitude raisonnable sur leurs moyens de travail quotidiens.
- Ne pas reconnaître la contribution et les réalisations des employés.
- Donner une charge de travail constamment trop lourde accompagnée de délais trop courts.
- Créer un doute perpétuel, si bien que les employés ne savent jamais ce qui va se produire autour d’eux.
- Permettre à la méfiance de s’enraciner. Les manigances au bureau nuisent au comportement constructif.
- Tolérer, et même encourager, l’ambigüité dans les orientations, les politiques, les fonctions et les attentes.
- Pratiques de gestion du rendement laissant à désirer — surtout pour ce qui est des évaluations de rendement des employés — même quand elles sont favorables— si bien que les employés ignorent leur rôle dans l’entreprise à court ou à moyen terme.
- Manque de communication dans les deux sens dans l’organisme
- Des gestionnaires qui balaient du revers de la main les préoccupations des employés à propos de leur charge de travail[331].
Le Comité convient avec la Table ronde qu’une stratégie d’intervention primaire réussie doit tenter de modifier ces pratiques néfastes et recommande donc :
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31 |
Que la Commission canadienne de la santé mentale (voir le Chapitre 16) travaille avec les employeurs à l’élaboration et à la diffusion de pratiques de gestion exemplaires propices à la santé mentale au travail. |
Il faut noter trois types d’intervention secondaire : 1) la gestion des limitations fonctionnelles; 2) l’aménagement du lieu de travail et 3) les programmes d’aide aux employés (PAE).
8.3.2.1 La gestion des limitations fonctionnelles
La gestion des limitations fonctionnelles est largement répandue comme moyen de réintégration professionnelle des personnes ayant un handicap physique. Parmi les facteurs propices à cette réintégration se trouvent la participation de l’employeur, un climat d’entraide et la coopération entre syndicats et patronat. Bien que courants dans les cas d’incapacités physiques, les programmes de gestion des limitations fonctionnelles sont relativement nouveaux dans le domaine de la santé mentale, et les études sur le sujet sont trop peu nombreuses pour que l’on puisse en établir l’efficacité[332].
La gestion des limitations fonctionnelles en milieu de travail peut être complexe, étant donné qu’il s’agit d’une responsabilité que se partagent le travailleur, les superviseurs et les gestionnaires, les programmes d’aide aux employés, les gestionnaires de ressources humaines et le système de santé public[333]. Faute de sensibilisation aux maladies mentales des employés, des gestionnaires et des superviseurs, les problèmes de santé mentale et de toxicomanie au travail ne peuvent être rapidement détectés et réglés.
Une autre difficulté vient du fait que le système de soins de santé et les milieux de travail sont très différents, sur le plan des cultures, des langues, des pratiques et des priorités. Les cadres conceptuels divergents utilisés par les professionnels de la santé au travail et les spécialistes de la santé mentale peuvent nuire à la compréhension, si bien que les services peuvent être mal coordonnés et que la réintégration professionnelle est retardée[334]. Il est donc essentiel de créer des objectifs communs et d’avoir une compréhension et un langage communs pour que l’information et la connaissance puissent être diffusées dans les différents systèmes. Ce qu’il faut, ce sont des leaders qui connaissent à la fois le domaine de la santé mentale et les questions propres aux employeurs et qui peuvent faciliter l’intégration de systèmes disparates de manière plus efficace avec le temps.
Le Comité recommande donc :
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32 |
Que le Centre d’échange des connaissances créé dans le cadre de la Commission canadienne de la santé mentale (voir le Chapitre 16) aide employeurs, professionnels de la santé au travail et fournisseurs de soins de santé mentale à élaborer un langage commun, dans le but d’encourager la gestion des limitations fonctionnelles d’ordre mental, et à communiquer les pratiques exemplaires dans le domaine. |
8.3.2.2Aménagement du lieu de travail
Les aménagements désignent « une ou plusieurs modifications du milieu de travail ou des procédures du milieu de travail qui permettent à une personne ayant des besoins spéciaux d’effectuer une tâche »[335]. Alors que les personnes ayant une incapacité physique ont peut-être besoin d’une aide matérielle ou de changements structurels du lieu de travail, celles souffrant de troubles mentaux ont le plus souvent besoin d’aménagements sociaux et organisationnels.
Ces aménagements consistent généralement en modifications de la façon dont les choses sont traditionnellement effectuées dans un lieu de travail particulier. Autoriser, par exemple, quelqu’un ayant une maladie mentale à travailler selon un horaire flexible lui permet d’accéder à un emploi, de la même façon qu’une rampe d’accès permet à une personne handicapée de se déplacer en fauteuil roulant. Ces mesures signifient simplement un traitement équitable des personnes ayant un handicap, quels qu’en soient le type et la source.
D’après l’Association des psychiatres du Canada[336], les aménagements devraient être axés sur des mécanismes positifs qui favorisent l’égalité d’emploi et consisteraient à :
§ créer un environnement où les aménagements sont établis en fonction des besoins individuels de chaque employé;
§ respecter le désir de confidentialité de l’employé et déterminer précisément la nature et l’ampleur de la discrétion requise;
§ être disposé à se concerter pour résoudre les problèmes;
§ donner à l’employé le choix d’accepter les aménagements et être prêt à examiner les plans périodiquement pour s’adapter à l’évolution des besoins de ce dernier;
§ appliquer les politiques en vigueur avec souplesse;
§ définir concrètement et précisément les aménagements à prendre, de préférence par écrit.
Une autre étude a révélé que, sur une période de dix ans, 240 personnes ayant une maladie mentale grave ont pu garder un emploi rémunérateur en grande partie grâce à des programmes de réintégration professionnelle. Ces personnes ont touché 5 millions de dollars de revenus, versé 1,3 million de dollars d’impôts et fait économiser environ 700 000 $ au gouvernement en aide sociale. Le résultat net a été une hausse de 2 millions de dollars de la richesse collective[337].
Selon Mental Health Works, ACSM Ontario[338], il
n’existe ni liste complète des aménagements dont les personnes ayant des
problèmes mentaux ont besoin, ni recherche définissant les meilleures approches
en
Le devoir de procéder à des aménagements n’incombe pas uniquement à l’employeur, mais est partagé avec les syndicats. Le Comité est d’avis qu’il est dans l’intérêt de l’employé que patronat et syndicats collaborent pour permettre la réintégration professionnelle grâce à des modifications du poste et autres aménagements. Dans ce contexte, il importe que toutes les parties se rappellent que la réintégration professionnelle fait partie intégrante du rétablissement des employés ayant un trouble mental.
8.3.2.2.1 Autres aménagements en matière de santé mentale
Autres possibilités d’aménagement à l’intention des personnes atteintes de maladie mentale :
Horaires de travail souples
§ Temps partiel (pour permettre éventuellement à un travailleur de revenir travailler à temps plein)
§ Fréquence accrue des pauses
Modification du mode de supervision
§ Modifier la façon dont les instructions et la rétroaction sont fournies. Il peut être utile d’écrire les instructions pour aider l’employé à se concentrer sur ses tâches.
§ Tenir des rencontres hebdomadaires entre le superviseur et l’employé pour régler les problèmes avant qu’ils ne s’aggravent.
Modification sur le plan de la formation
§ Prévoir davantage de temps pour que l’employé apprenne ses tâches.
§ Permettre à l’employé d’assister à des cours de formation individualisés.
Modification des fonctions
§ Échanger les tâches moins importantes avec d’autres employés.
Modification des locaux ou du lieu de travail
§ Permettre à un employé de travailler dans un secteur plus tranquille où il sera moins distrait.
§ Permettre à l’employé de travailler chez lui
8.3.2.3Programmes d’aide aux employés (PAE)[339]
Les PAE sont des programmes d’employeur visant à atténuer et à contribuer à éliminer divers problèmes en milieu de travail. La source de ces problèmes peut être personnelle (problèmes juridiques, financiers, conjugaux ou familiaux, maladies et problèmes de santé mentale, y compris la toxicomanie) ou professionnelle (conflit au travail, harcèlement, violence, stress, etc.).
Habituellement, les PAE offrent des services de counselling, de diagnostic, d’aiguillage et de traitement. Le personnel responsable possède habituellement un diplôme dans une discipline reliée à la santé mentale ou aux services sociaux (travail social, psychologie, psychiatrie, counselling et/ou thérapie de couple ou familiale). Certains services peuvent aussi être sous-traités à d’autres personnes qualifiées.
Les services des PAE sont offerts dans des organismes privés et publics et habituellement administrés en totale indépendance des autres programmes de l’organisation. La confidentialité est la pierre angulaire d’un PAE efficace. L’anonymat des clients, la confidentialité des entrevues, la tenue, le transfert et la destruction des dossiers sont assujettis aux lois fédérales et provinciales applicables, qui régissent la conduite des conseillers. En règle générale, l’information peut être divulguée par un conseiller de PAE uniquement lorsque le client a rempli un formulaire de consentement signé en toute connaissance de cause et a stipulé quelle information sera communiquée et à qui.
Le Comité a appris que de 60 à 80 p. cent des Canadiens qui travaillent dans une moyenne ou une grande entreprise (comptant plus de 500 employés) ont accès à une forme quelconque de PAE. D’après Rod Phillips, président et directeur général des Consultants Warren Shepell, les PAE sont très efficaces; ils sont devenus le principal mécanisme par lequel les travailleurs canadiens accèdent à des soins en santé mentale et des services de traitement de la toxicomanie :
Dans de nombreux cas, d’après notre expérience, environ 85 p. cent des gens que nous voyons au cours d’une année reçoivent un traitement suffisant dans le cadre des programmes d’aide aux employés et ne nécessitent aucun autre traitement. Environ 15 p. cent des gens sont ensuite aiguillés vers des programmes communautaires ou vers le régime de soins de santé public[340].
Les PAE
misent aussi fortement sur
Les PAE sont très largement répandus en Amérique du Nord et les employeurs et les employés les voient d’un bon œil[341],bien qu’ils présentent certaines limites. Bender et al.[342], par exemple, s’inquiètent du nombre de séances de traitement thérapeutique offertes aux clients des PAE, qui, d’après des données non scientifiques, aurait diminué considérablement et serait passé de sept à moins de trois par personne au cours des dix dernières années. Les auteurs concluaient qu’il est peu probable que l’on puisse résoudre efficacement des problèmes graves de toxicomanie ou de maladie mentale avec un aussi faible nombre de traitements thérapeutiques. Il faut s’attaquer à cette préoccupation particulière.
Mary-Ann Baynton, directrice de l’Association canadienne pour la santé mentale en Ontario, a indiqué au Comité qu’il bon que les PAE prévoient le recours à des intervenants qui pourraient aider les personnes ayant une maladie mentale de bien des manières :
Voilà qui m'amène à la dernière recommandation, c'est-à-dire le fait que nous devrions avoir des intervenants. Bien souvent, les employeurs disent qu'ils ont envoyé les formulaires, et que l'employé ne les a jamais remplis, ou n'a jamais rappelé, qu'il n'a pas fait ce qu'il avait à faire. Les employeurs ne comprennent pas que c'est souvent la maladie mentale qui fait en sorte qu'il est impossible pour cette personne de sortir du lit, encore moins de remplir un ensemble de formulaires compliqués. Nous examinons la possibilité de charger des intervenants de faire cela au nom des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. Toutefois, c'est quelque chose que les PAE ou les employeurs pourraient offrir[343].
En ce qui concerne les PAE, le Comité recommande :
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33 |
Que les employeurs accroissent le nombre de séances de counselling offertes dans le cadre des Programmes d’aide aux employés (PAE), surtout là où l’accès à d’autres services de santé mentale est limité. Que
des recherches soient entreprises pour évaluer les PAE et que les résultats
soient communiqués par le Centre d’échange des connaissances que le Comité
recommande de créer dans le cadre de |
Les Canadiens souffrant de maladie mentale grave comptent beaucoup sur des programmes de réadaptation professionnelle pour lesquels il est difficile d’obtenir un financement suffisant. Le peu de recherches dont on dispose laisse entendre que toutes les approches en matière de réadaptation professionnelle n’affichent pas le même taux de succès pour ce qui est de permettre aux intéressés de trouver un emploi[344],[345],[346].
8.4.1 Les programmes de réadaptation professionnelle
Les programmes de réadaptation professionnelle sont conçus pour aider les intéressés à devenir ou à demeurer économiquement indépendants grâce au travail. Entre autres programmes spécialisés, il convient de citer les programmes d’orientation professionnelle, d’évaluation du travail, d’adaptation au lieu de travail et de conditionnement, les emplois temporaires et les stages de transition.
La recherche portant sur la réadaptation professionnelle est de portée limitée et tend à être plus descriptive et anecdotique qu’autre chose. Le principe qui sous-tend la plupart de ces programmes est qu’une planification soigneuse combinée à une réintégration professionnelle lente et accompagnée augmentera les chances de succès. Or, l’expérience a montré qu’une réintégration rapide est plus efficace. Plus l’attente est longue, plus grands sont les risques de réduire l’employabilité, faute d’expérience de travail suffisante[347].
Le fait que les personnes souffrant de maladie mentale soient reléguées à des postes subalternes et mal rémunérés où elles ont peu de chance de voir leur salaire progresser même lorsqu’elles conservent leur emploi aussi longtemps que leurs collègues sans handicap constitue une autre barrière à l’emploi. Le faible taux de réussite des programmes de réadaptation professionnelle tient aux attentes extrêmement basses du personnel, au protectionnisme paternaliste qui protège les intéressés de l’échec et de l’absence de responsabilisation[348].
Au milieu des années 1980 est apparue une nouvelle approche, appelée « emploi assisté ». Son objectif était d’éviter des modèles qui tendaient à encourager la dépendance et à réduire la nécessité pour les personnes ayant un handicap mental d’affronter la concurrence du marché de l’emploi. L’emploi assisté consiste à placer les clients aussi rapidement que possible dans des postes pour lesquels ils n’ont pas de préparation approfondie tout en leur fournissant un appui intensif et permanent sur place et une formation dispensée par des formateurs en milieu de travail.
D’après un examen comparatif des recherches sur le sujet, les modèles d’emploi assisté ont donné de meilleurs résultats que les services de réadaptation professionnelle traditionnels, les services de réadaptation professionnelle par courtage, les programmes de traitement de jour, les programmes de formation pré-professionnelle ou les ateliers protégés[349]. Après avoir analysé 18 essais contrôlés randomisés, les chercheurs ont établi que les participants à des programmes d’emploi assisté étaient beaucoup plus susceptibles d’être employés que les personnes qui reçoivent une formation pré-professionnelle (après 12 mois, 34 p. cent des personnes inscrites à un programme d’emploi assisté avaient trouvé un poste, contre seulement 12 p. cent pour celles qui avaient une formation pré-professionnelle)[350]. Il importe de noter toutefois que ce taux de réussite (34 p. cent) demeure relativement faible.
8.4.3 Initiatives de développement économique des consommateurs
Les initiatives de développement des consommateurs ont été crées dans les années 1990 par des personnes ayant une maladie mentale, déçues de l’échec des programmes de réadaptation professionnelle traditionnels visant à les aider à se trouver un emploi. Ces personnes ont commencé à mettre sur pied des entreprises dont elles étaient propriétaires. Le principe sous-jacent était que, si elles disposaient des outils nécessaires, elles pouvaient contribuer valablement à subvenir à leurs propres besoins et à faire valoir les avantages de services et de mesures d’aide en matière de santé mentale plus efficaces et plus responsables[351].
Ces initiatives ont fait intervenir des organismes d’entraide dont des pairs-conseillers ont facilité les mesures de sensibilisation et d’aide mutuelle, ainsi que diverses entreprises, gérées par des personnes atteintes de maladie mentale, qui offraient des possibilités d’emploi et de perfectionnement en commerce. Les recherches menées sur ce type d’initiative montrent qu’il s’agit là d’un secteur prometteur pour ce qui est d’intégrer à la population active les personnes ayant une maladie mentale grave[352].
8.4.4 Le modèle du « club »
Dans bien des provinces et territoires, ce sont souvent des organismes apparentés à des clubs qui fournissent des services communautaires. Conçus dans les années 1940 par d’anciens malades psychiatriques, l’objet de ces clubs est de faciliter la transition entre l’hôpital et la collectivité[353]. Les clubs proposent des ateliers de perfectionnement professionnel, des groupes de résolution de problèmes, de la gestion de cas, des activités récréatives et des ateliers de préparation aux études[354]. Ils fonctionnent en vertu de règles égalitaires et sont gérés par le personnel et les patients qui cherchent à y instaurer un climat d’acceptation sensible aux différences culturelles, où chacun peut socialiser, s’entraider et acquérir de l’expérience à la faveur d’emplois leur permettant de retourner progressivement à un emploi[355].
Les programmes de formation pré-professionnelle sont conçus pour aider les personnes atteintes de maladie mentale à faire la transition vers un emploi grâce à un processus en deux étapes. La première consiste en l’établissement de journées pendant lesquelles les patients travaillent en équipe, avec le personnel, au bon fonctionnement et à la gestion du club. La seconde consiste à participer à des programmes d’emploi transitoire dans le cadre desquels les membres sont placés dans divers emplois temporaires rémunérés et contrôlés par le club. Malgré la longévité et la popularité de ces clubs, rares sont les signes qui prouvent qu’ils parviennent à atteindre leurs objectifs en matière de formation professionnelle.
Très populaires jusqu’à il y a dix ans environ, les ateliers protégés servent aujourd’hui essentiellement aux adultes accusant un retard de développement, bien que dans certaines provinces ils continuent de faire partie des programmes de réadaptation communautaire destinés aux personnes ayant une maladie mentale. D’après le peu de recherches menées sur le sujet, ce type d’atelier affiche un taux de succès faible (de l’ordre de 5 à 10 p. cent) pour ce qui est d’aider les personnes atteintes d’une maladie mentale à obtenir un emploi non protégé. En fait, la participation aux ateliers protégés pourrait bien ancrer chez les intéressés et dans la population en général des attentes très faibles quant à la capacité de travailler des personnes ayant une maladie mentale.
En 1997, pour répondre au rapport du Groupe de travail sur les personnes handicapées (rapport Scott) produit en 1996, le gouvernement du Canada a créé le Fonds d’intégration pour les personnes handicapées à titre de projet pilote. Ce fonds, administré par Développement social Canada, a obtenu un financement permanent en décembre 2000.
Le Fonds d’intégration est un programme de préparation à l’emploi des personnes ayant un handicap dont la participation à la vie active est faible ou nulle. Son objectif est d’aider ces personnes à se préparer à obtenir et à conserver un emploi ou à devenir travailleurs autonomes. Pour ce faire, le gouvernement collabore avec des organismes non gouvernementaux qui représentent les personnes handicapées, avec le secteur privé et avec les gouvernements provinciaux.
Le Fonds d’intégration appuie les mesures qui :
§ encouragent les employeurs à embaucher des travailleurs handicapés;
§ aident les personnes handicapées à se perfectionner, à réintégrer le marché du travail ou à devenir travailleurs autonomes;
§ offrent des possibilités de travail pouvant mener à un emploi stable; et
§ améliorent l’accès à l’emploi ou aux services d’emploi en fournissant une aide personnelle.
Le Fonds d’intégration vise aujourd’hui quelque 4 500 personnes handicapées par an, mais l’on ignore le pourcentage de celles de ces personnes qui ont une maladie mentale.
Selon une évaluation menée en 2001, l’un des atouts du Fonds d’intégration tient à son approche individualisée et souple en matière de prestation de services. À en juger par les évaluations des participants au Fonds et par les résultats, le programme les aide effectivement à trouver du travail et à améliorer leur employabilité et leur qualité de vie.
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34 |
Que le ministère des Ressources humaines et du Développement social, par l’entremise du Fonds d’intégration pour les personnes handicapées, facilite la mise en œuvre dans tout le pays d’un programme d’assistance en milieu de travail pour aider les personnes ayant une maladie mentale à se trouver un emploi et à le conserver. Que ce programme encourage la création d’entreprises dont les personnes souffrant de maladie mentale seront à la fois lesexploitants et les propriétaires et appuie de telles entreprises. Que ministère des Ressources humaines et du Développement social signale le nombre de personnes ayant une maladie mentale auxquelles le Fonds d’intégration pour les personnes handicapées vient en aide. |
8.5 ASSURANCE
ET SOUTIEN DU REVENU
8.5.1 Commissions des accidents de travail[356]
Dans toutes les provinces et tous les territoires, les commissions des accidents de travail reçoivent de plus en plus de demandes de prestations pour des problèmes de santé mentale (« stress professionnel ») et, dans un nombre grandissant de cas, elles ont accordé les prestations.
L’Association des Commissions des accidents du travail du Canada a examiné les demandes de prestations pour stress professionnel présentées aux commissions, afin de découvrir combien de types de demandes étaient déposées tous les ans, s’il s’agissait de troubles épisodiques ou chroniques et quel était le montant des prestations versées dans chaque cas. Cet examen s’est avéré très difficile. Dans bien des cas, les commissions ne réunissent pas ce type de données ou, si elles le font, les données ne sont pas comparables parce que les définitions diffèrent (voir le tableau 8.1). Par conséquent, l’examen n’a pu fournir un tableau national du nombre de demandes de prestations pour stress professionnel ni des coûts des prestations connexes.
Terry Bogyo, directeur de la Planification à la Workers’ Compensation Board of B.C., a expliqué au Comité que les différences sur le plan du traitement des troubles liés au stress étaient la conséquence de cadres législatifs différents selon la province et le territoire.
Il ne
s'agit pas d'hésitation de la part des commissions, car les commissions ne font
que ce que la loi leur dit de faire. Nous sommes la manifestation concrète de
Un important problème que soulèvent les prestations des commissions des accidents de travail est le fait qu’il est plus difficile de prouver la genèse d’un trouble mental que d’une maladie physique. Il n’est donc pas établi si et comment les troubles mentaux devraient être couverts dans un régime d’indemnisation des accidents du travail. Dans un modèle de maladie professionnelle, l’indemnisation en cas d’invalidité dépend du fait que l’invalidité découle d’une exposition continue à des conditions dangereuses en cours d’emploi. Or, comme nous l’avons vu, la plupart des modèles étiologiques avancés des troubles mentaux incluent divers facteurs, tels que la vulnérabilité génétique, les circonstances du développement et des facteurs neurobiologiques, en plus de situations comme un cadre de travail stressant. La pondération relative de chacun de ces aspects n’est pas encore bien comprise, pas plus que les liens qui existent entre eux.
TABLEAU 8.1
COMMISSIONS DES ACCIDENTS DE TRAVAIL AU
CANADA : COMPARAISON INTERPROVINCIALE DES PRESTATIONS POUR STRESS
PROFESSIONNEL
Les prestations pour stress professionnel sont accordées lorsque : § il y a un diagnostic confirmé conformément au Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders de l’American Psychiatric Association; § les événements ou agents stressants reliés au travail constituent la cause principale de la maladie; § les événements reliés au travail sont excessifs ou inhabituels par rapport aux pressions normales que subit un travailleur moyen dans un poste semblable; § il y a une confirmation objective des événements. |
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Colombie-Britannique
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Les formes de stress indemnisables comprennent : § le stress causé par un événement traumatique soudain et inattendu; § le stress qui découle d’un accident indemnisable, comme une grave anxiété après l’amputation d’une jambe. § Le stress provoqué par les pressions subies dans la vie personnelle et professionnelle quotidienne n’est pas indemnisable. |
Manitoba |
La définition des accidents et des maladies professionnelles exclut le stress sauf lorsqu’il s’agit d’une réaction aiguë à une situation traumatique. |
Nouveau-Brunswick |
La définition des accidents et des maladies professionnelles exclut le stress sauf lorsqu’il s’agit d’une réaction aiguë à une situation traumatique. |
Terre-Neuve et Labrador |
La définition d’un accident au sens de la loi ne couvre le stress que lorsque ce dernier découle d’une réaction aiguë à un événement traumatique soudain et inattendu et exclut le stress découlant des problèmes de relations de travail. |
T.N.-O. et Nunavut |
Les demandes de prestations pour stress professionnel sont examinées au cas par cas. |
Nouvelle-Écosse |
La définition des accidents et des maladies professionnelles exclut le stress sauf lorsqu’il s’agit d’une réaction aiguë à une situation traumatique. |
Ontario
|
Le stress mental est indemnisable lorsqu’il y a une réaction aiguë à un événement traumatique soudain et inattendu découlant de l’emploi et en cours d’emploi. Le stress mental découlant des décisions d’emploi de l’employeur ne donne pas droit aux prestations. |
Île-du-Prince-Édouard |
La définition des accidents et des maladies professionnelles exclut le stress sauf lorsqu’il s’agit d’une réaction aiguë à une situation traumatique. |
Québec |
Le stress est indemnisable si le travailleur peut démontrer un lien entre la maladie et le travail ou un risque au travail. |
Saskatchewan |
Les prestations pour stress professionnel sont prévues expressément lorsqu’il est démontré clairement et de manière convaincante que le stress était excessif et inhabituel; les mesures courantes de relations de travail prises par l’employeur sont considérés normales et non inhabituelles. |
Yukon |
Le stress post-traumatique est admissible en vertu de la loi; la pratique actuelle consiste à évaluer au cas par cas tous les autres types de demandes de prestations reliées au stress. |
Source :
Paul Kishchuk, Expansion of the Meaning of Disability, étude commandée par
Le Comité estime qu’il est important pour toutes les parties intéressées de s’attaquer à ces questions et il recommande :
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35 |
Que |
8.5.2 Les régimes d’assurance-invalidité des employeurs
Il existe deux types de régimes d’assurance-revenu en cas d’invalidité offerts par les employeurs, soit les régimes d’assurance-invalidité de courte durée (ICD) et les régimes d’assurance-invalidité de longue durée (ILD). Les régimes ICD remplacent un pourcentage (70 p. cent, p. ex.) du revenu d’emploi pré-invalidité pour des périodes inférieures à un an (p. ex., six mois). Ils s’harmonisent généralement aux congés de maladie, à d’autres avantages sociaux et aux prestations d’assurance-emploi (AE), ce qui permet une continuité du revenu en cas de maladie ou de blessure invalidante.
Les régimes ILD concernent des périodes d’invalidité prolongées. Les prestations sont habituellement versées après une longue absence, p. ex. six mois, et remplacent un pourcentage du revenu d’emploi pré-invalidité (p. ex. 70 p. cent). Elles sont habituellement versées pendant une période maximale de deux ans lorsque la personne est incapable d’exécuter les tâches de sa propre profession, ou plus longtemps, soit jusqu’à un âge maximal de 65 ans ou jusqu’au versement des prestations de retraite, si la personne est incapable d’occuper un emploi raisonnablement comparable. Les prestations ILD versées par le régime de l’employeur peuvent être réduites d’un montant équivalant à celui que le prestataire reçoit du RPC-I (voir ci-après).
Les régimes ICD et ILD ont un important objectif en commun : ils encouragent les prestataires à reprendre le travail, de préférence leurs propres activités professionnelles ou, lorsque cela n’est pas possible, à occuper un autre type d’emploi. Ainsi, pour motiver les prestataires à retourner travailler, ils sont conçus de façon à ce que le revenu de remplacement n’excède pas le revenu pré-invalidité. Ce type d’assurance ne devrait pas décourager les intéressés de chercher un travail. Dans ce contexte, l’Association des psychiatres du Canada a expliqué que :
Pour de nombreuses maladies, l’assurance-invalidité exige une définition
précise de
Les
employeurs, les gestionnaires et les assureurs doivent mieux connaître la
maladie mentale et la toxicomanie afin de mieux gérer les prestations
d’invalidité. Dans une allocution récente, Bill Wilkerson, cofondateur et
directeur général de
Le secteur de l’assurance doit définir son point de vue à partir d’une connaissance des problèmes de santé mentale. Comme les entreprises en général, le secteur de l’assurance a besoin d’être sensibilisé à la santé mentale.
C’est tout particulièrement vrai, par exemple, pour les aspects de la comorbidité de maladies mentales et de maladies physiques chroniques touchant à l’origine et à la durée de l’invalidité; à la complexité, à la durée et aux risques du traitement et du rétablissement; et au rythme et à la date du retour au travail.
Au niveau de la gestion des prestations, le secteur de l’assurance doit mieux connaître la santé mentale sur le plan médical[…] Il doit acquérir des connaissances sur l’univers grandissant des neurosciences et l’éclairage qu’elles peuvent apporter sur les origines du comportement. [traduction]
8.5.3 Programmes d’aide sociale provinciaux et territoriaux
Les programmes de soutien du revenu et d’assurance fournissent une certaine protection aux personnes atteintes de maladie mentale et incapables de travailler. Toutefois, les programmes gérés par les Commissions des accidents du travail et par le gouvernement du Canada (RPC(I) et AE) ont une caractéristique commune — pour se qualifier, les intéressés doivent avoir un emploi, et souvent depuis longtemps. Ceci dit, et compte tenu de la myriade d’autres critères d’admissibilité et des conditions temporelles dont s’assortissent les prestations, les personnes ayant une maladie mentale doivent souvent recourir aux programmes d’aide au revenu de dernier recours, en l’occurrence l’aide sociale (prestations de bien-être social) qu’offrent les provinces et les territoires.
Le plus souvent, les programmes d’aide sociale font une distinction entre les personnes capables de travailler mais incapables de trouver un emploi et celles incapables de travailler en raison d’une maladie, d’un handicap ou pour une autre raison. Par exemple, le gouvernement de l’Ontario offre le programme Ontario au travail aux personnes capables de travailler mais incapables de se trouver un emploi. Les candidats sont censés épuiser leurs propres ressources financières avant de pouvoir demander une aide. Le niveau des prestations est bas et les bénéficiaires sont tenus de participer à un programme de recyclage ou à d’« autres activités liées à l’emploi ». En bref, « les règles qui régissent l’admissibilité sont conçues de sorte que les personnes se tournent vers l’aide sociale seulement lorsqu’elles ont épuisé toutes autres ressources financières »[359].
Par comparaison, ceux qui sont incapables de travailler peuvent se prévaloir du Programme ontarien du soutien aux personnes handicapées. Le niveau de ces prestations est environ le double de celui du programme Ontario au travail, et les bénéficiaires sont encouragés dans la mesure du possible à travailler; toutefois, la participation aux programmes connexes, comme le recyclage, est volontaire. De même, les candidats peuvent conserver une petite portion de leur actif personnel, soit 5 000 $ en espèces et en REER[360].
Malheureusement, comme c’est le cas avec les autres programmes d’aide au revenu, il est difficile d’être admissible au Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Les candidats doivent avoir un handicap physique ou mental substantiel qui est continu ou récurrent et devant durer au moins une année. Étant donné la nature cyclique et imprévisible des maladies mentales, les personnes qui en souffrent et qui sont incapables de travailler peuvent ne pas avoir droit au programme. Elles n’ont donc d’autre choix que de participer au programme Ontario au travail, bien qu’elles ne soient pas ciblées par ce dernier.
La rigueur des critères d’admissibilité, notamment l’obligation d’épuiser tout d’abord ses propres ressources financières, ne constitue pas le seul problème lié aux programmes d’aide sociale pour les personnes handicapées. Ces prestations, même si elles sont généralement plus généreuses que celles fournies en vertu des programmes d’aide sociale généraux, sont trop modestes pour éviter les difficultés financières. Sont indiqués dans le tableau ci-après les montants d’aide et les exemptions (c.-à-d. les gains autorisés avant réduction des prestations) dans trois provinces :
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Colombie-Britannique |
Ontario |
Québec |
Montant mensuel pour une personne seule handicapée |
856,42 $[361] |
959,00 $[362] |
835,67 $[363] |
Gains exonérés |
400,00 $[364] |
160,00 $[365] |
100,00 $[366] |
Ceux qui désirent réintégrer le marché du travail peuvent être découragés par des politiques dont l’effet est de réduire leurs prestations de portions variables de leur revenu gagné, ou de leur supprimer certaines prestations (remboursement des médicaments ou de soins médicaux) ou l’ensemble de leurs prestations.
Joan
Edwards-Karmazyn, gestionnaire de
Les membres de CHANNAL ont dit qu'il fallait davantage de logements abordables, réduire les obstacles qui limitent l'accès aux services d'éducation et de formation technique et augmenter les subventions salariales pendant la durée de versement de prestations de soutien du revenu.
Les membres ont dit qu'ils sont prisonniers du système s'ils veulent recevoir une indemnité pour les médicaments. Ainsi, ils hésitent à renoncer aux indemnités de revenu puisqu'il faudrait du même coup renoncer aux indemnités pour les médicaments. Les gens craignent de renoncer à leurs prestations parce que le revenu qu'ils pourraient gagner sur le marché du travail ne leur permettrait pas de se payer les 1 500 $ par mois que coûtent leurs médicaments[367].
Par conséquent, le Comité recommande :
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36 |
Que le niveau des prestations versées dans le cadre des programmes d’aide sociale destinés aux personnes ayant une maladie mentale et les revenus que celles-ci sont autorisées à gagner sans pénalité soient relevés de manière à alléger le fardeau financier de ces personnes et les encourager à travailler.
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Que les bénéficiaires d’aide supplémentaire, comme le remboursement partiel de médicaments, conservent cette aide pendant une période prolongée lorsque leur revenu augmente à un point tel qu’ils n’auraient plus droit à une aide au logement ou pour faire face à d’autres frais de subsistance. |
8.5.4 Les programmes fédéraux de sécurité du revenu[368]
Le gouvernement fédéral offre deux programmes de soutien du revenu qui peuvent aider les personnes ayant une maladie mentale : le programme de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada et les prestations de maladie fournies dans le cadre de l’assurance-emploi. Un allègement fiscal est également offert sous forme de crédit d’impôt pour personnes handicapées.
8.5.4.1 Les prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC‑I)
Le volet invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC-I) est le plus important programme de prestations d’invalidité au Canada. Ce programme est en général le « premier payeur » de prestations d’invalidité, devant d’autres entités comme les commissions des accidents de travail et les assureurs privés.
Les prestations de RPC-I sont versées aux participants de moins de 65 ans qui souffrent d’invalidité physique ou mentale « grave et prolongée » (durant au moins un an et empêchant d’occuper un emploi régulier) et qui répondent à certaines exigences particulières au sujet du niveau des revenus et des années de cotisation (des cotisations doivent avoir été versées pendant quatre des six années antérieures). De 1980 à 2000, la proportion de bénéficiaires recevant des prestations du RPC-I attribuables à des troubles mentaux est passée de 11 p. cent à 23 p. cent. Les maladies mentales arrivaient au deuxième rang, derrière les maladies du système musculo-squelettique, et touchaient plus fortement les femmes que les hommes. En 2000, les troubles mentaux représentaient également la plus importante cause de prestations d’invalidité RPC-I chez les jeunes bénéficiaires.
Depuis de nombreuses années, les personnes souffrant de maladie mentale et de toxicomanie et leurs représentants reprochent au RPC-I de ne pas correctement tenir compte du problème de la maladie mentale et de l’incapacité. En effet :
§ De nombreuses personnes atteintes de maladie mentale ont une expérience limitée sur le marché du travail. Parce que la maladie mentale frappe souvent au début de l’âge adulte, à un moment où les études ne sont pas achevées, les compétences professionnelles encore limitées et les carrières encore jeunes, un grand nombre de ces personnes ne sont pas admissibles au RPC-I parce qu’elles n’ont pas travaillé un nombre suffisant d’années. Par nécessité, beaucoup d’entre elles recourent aux programmes provinciaux d’aide sociale.
§ Pour avoir droit aux prestations d’invalidité du RPC, le bénéficiaire doit accepter d’être désigné « inapte au travail à titre permanent », se déclarant ainsi tout à fait incapable d’occuper un emploi régulier. En raison de la nature cyclique et imprévisible des troubles mentaux, les personnes souffrant de maladie mentale peuvent travailler, mais souvent seulement à temps partiel; elles ne sont pas nécessairement capables d’assurer leur totale indépendance financière.À ce sujet, Jason Turcotte, du Bureau de l'Association canadienne de la santé mentale à Portage-la-Prairie, et membre de Partnership for Consumer Empowerment a déclaré au Comité : « On doit cesser de faire « tout ou rien ». Si on verse des prestations à une personne uniquement lorsqu'elle est totalement invalide, on fait preuve de discrimination, on la paralyse, on ne l'encourage pas à guérir[369] ». Les personnes souffrant de maladie mentale et de toxicomanie ont recommandé que le RPC-I prévoie des prestations partielles ou réduites au lieu de prestations intégrales, afin de leur permettre de travailler à temps partiel et de continuer de toucher une partie des prestations.
§ Étant donné que l’invalidité est actuellement synonyme d’inaptitude permanente au travail, les bénéficiaires du RPC-I hésitent à chercher ou à accepter un emploi, par crainte de perdre leurs prestations. Les personnes touchées sont pénalisées lorsqu’elles cherchent à améliorer leur situation, même si elles ne sont pas capables d’occuper un emploi régulier à plein temps.
§ Un peu plus de la moitié des premières demandes au RPC-I sont rejetées pour cause d’inadmissibilité et près des deux tiers des personnes dont la première demande est rejetée ne demandent pas un réexamen du dossier. Il se pourrait que la proportion de demandes rejetées soit beaucoup plus élevée dans le cas des personnes souffrant d’une maladie mentale. Certains experts soutiennent que le système est conçu de manière à décourager les gens de demander des prestations auxquelles ils ont droit. C’est particulièrement le cas des personnes atteintes de troubles mentaux qui, en raison de leur maladie, ne sont peut-être pas en mesure de se battre contre le système.
Une fois admissibles au RPC(I), les intéressés hésitent souvent à chercher le moindrement à retourner sur le marché du travail ou à mener d’autres activités pouvant remettre en question leur état de santé officiel. Beaucoup craignent que, ce faisant, ils ne déclenchent une réévaluation de leur admissibilité au programme et perdent leur aide financière. Selon une personne atteinte de maladie mentale :
Le programme d’invalidité du RCP place les personnes dans une situation où elles doivent se dépeindre de la façon la plus négative qui soit dans le simple but de convaincre le travailleur social qu’elles ont besoin d’aide. Tout ce système est basé sur la pathologie et non pas sur le rétablissement[370].
D’autre part, le RPC(I) pourrait avoir pour effet involontaire que les personnes atteintes de maladie mentale soient perçues comme inaptes à titre permanent. Les sociétés d’assurance privées exigent souvent de leurs clients qu’ils demandent d’abord des prestations de RPC(I) en raison du statut de premier payeur de ce régime, et ce afin de réduire leurs obligations financières. Toutefois, la personne qui se prévaut plutôt du RPC(I) que de l’assurance privée fournie par son employeur peut se distancer encore plus de ce dernier, ce qui pourrait rendre sa réintégration professionnelle encore plus difficile.
On a progressé ces dernières années sur un certain nombre de ces plans. Par exemple, les bénéficiaires du RPC(I) peuvent désormais gagner jusqu’à 4 100 $ par an sans être privés des prestations. Les communications avec les demandeurs ont aussi été personnalisées, puisque l’on appelle ces derniers par téléphone pendant le processus de prise de décisions de manière à connaître leurs besoins particuliers et à les renseigner sur les programmes et les services.
En 2005, le RPC a également subi une modification d’ordre législatif, avec le rétablissement automatique des prestations de RPC(I). Ainsi, les bénéficiaires qui sont en mesure de recommencer à travailler peuvent le faire sans craindre de perdre leurs prestations. Si l’incapacité revient dans les deux ans qui suivent, ces personnes peuvent retrouver rapidement leurs prestations. Cecilia Muir, directrice générale, Bureau de la condition des personnes handicapées de Développement social Canada, a expliqué au Comité l’importance de ces modifications apportées au RPC(I) :
Je reconnais que ce n'est pas la solution miracle, mais c'est déjà un grand progrès. Une période de cinq ans est maintenant prévue pendant laquelle on n'est pas tenu de présenter une nouvelle demande et de reprendre tout le processus. […] D'après nos projections, au moins 300 personnes pourraient profiter de cette mesure chaque année[371].
Enfin, une stratégie de communication a été mise en place pour sensibiliser les personnes handicapées au fait que le RPC(I) les aide à retrouver un travail sans qu’elles ne risquent de perdre leurs prestations. Les outils de communication comprennent un bulletin annuel intitulé « Maintenir le lien », un site Web et des lettres envoyées chaque année aux clients décrivant les dispositions de retour au travail prévues par le RPC(I). En outre, les clients les plus susceptibles de bénéficier du rétablissement automatique des prestations, surtout ceux ayant des incapacités épisodiques, reçoivent des lettres leur expliquant les nouvelles dispositions.
Dans son
rapport de 2003, le Comité permanent du développement des ressources humaines
et de la condition des personnes handicapées de
Dans sa
réponse au rapport du Comité de
Le gouvernement ne croit donc pas qu'il est nécessaire de modifier les règlements et les directives pour tenir compte des besoins des personnes atteintes de maladies épisodiques ou récurrentes. Puisque la détermination de l'invalidité aux fins du RPC se fonde sur les limitations fonctionnelles qui empêchent une personne de travailler et non seulement sur un diagnostic ou un pronostic médical, le processus d'évaluation peut prendre en compte les répercussions à court et à long termes des maladies récurrentes ou épisodiques sur l'habileté du client à fonctionner en milieu de travail[372].
Le Comité rejette avec véhémence ce point de vue et recommande :
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37 |
Que les critères d’admissibilité au Régime de pensions du Canada-Invalidité (RPC-I) soient modifiés de manière à ce que les personnes souffrant de maladie mentale ne soient plus tenues de démontrer que leur maladie est grave et prolongée, mais seulement que leur maladie a été diagnostiquée, qu’elles sont inaptes au travail et qu’elles ont besoin d’un appui financier.
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Que le gouvernement du Canada examine la façon dont il pourrait mieux coordonner les prestations de maladie versées dans le cadre de l’assurance-emploi (A-E) et les prestations versées dans le cadre du RPC-I et éliminer les obstacles structurels (notamment financiers) qui limitent les possibilités de réintégration professionnelle. Que le gouvernement du Canada autorise le RPC à commanditer des recherches sur de nouvelles approches ciblant les personnes atteintes de maladies épisodiques, notamment d’ordre mental, et à faire des tests à ce sujet. Que le gouvernement du Canada recherche des moyens d’encourager les employeurs à embaucher des personnes atteintes de maladie mentale, notamment en les exemptant des cotisations au RPC.[373]. |
Les personnes atteintes de maladie mentale peuvent aussi avoir droit à des prestations d’AE comme source de revenu temporaire. Des préoccupations ont cependant été soulevées au sujet de l’AE :
§ Les employés qui sont renvoyés pour « mauvaise conduite » ou qui démissionnent de leur emploi « sans motif valable » ne sont pas admissibles aux prestations d’AE. Par crainte de la stigmatisation, les personnes atteintes de maladie mentale cachent souvent leur maladie au travail. Quand elles éprouvent des difficultés au travail, elles peuvent être renvoyées ou démissionner sous l’influence de leur maladie, mais elles ne pourraient pas demander de prestations d’AE parce qu’elles n’ont pas déclaré leur maladie au préalable.
§ Quand une personne demande des prestations de maladie dans le cadre de l’AE, elle doit obtenir un certificat médical indiquant la durée attendue de sa maladie. En raison de la nature imprévisible des maladies mentales, il est difficile de fournir ce genre de renseignements médicaux.
§ Les personnes atteintes de maladie mentale ou de toxicomanie sont d’avis que l’AE ne devrait pas obliger les personnes atteintes de maladies ou d’invalidités récurrentes à travailler le nombre supplémentaire d’heures assurables exigé de ceux qui sont considérés comme des nouveaux venus sur le marché du travail. À leur avis, sans cette exonération, les personnes atteintes d’une maladie mentale sont désavantagées injustement. Peu sont en mesure de répondre aux critères d’admissibilité relatifs au nombre total d’heures assurables exigées des nouveaux travailleurs.
Dans son mémoire au Comité, le Dr Sunil V. Patel, à l’époque président de l’Association médicale canadienne, a recommandé que le gouvernement fédéral examine le RPC-I et les autres politiques fédérales de soutien du revenu afin de s’assurer que la maladie mentale se trouve sur le même pied que d’autres maladies et incapacités chroniques, pour ce qui est des prestations.
Le Comité est d’avis que les critères d’octroi des prestations de maladie au titre de l’assurance-emploi devraient être modifiés pour que quiconque est atteint d’une maladie mentale puisse s’en prévaloir plus facilement. Étant donné l’énormité du surplus du compte de l’assurance emploi[374], ce changement ne représenterait pas un fardeau indu pour la population.
Le Comité recommande donc :
8.5.4.3Crédit d’impôt pour personnes handicapées
Le crédit d’impôt pour personnes handicapées[375] est un crédit d’impôt non remboursable qui permet aux personnes handicapées de réduire les impôts qu’elles doivent payer. Ces personnes peuvent transférer ce crédit à leur conjoint ou à une autre personne qui les appuie. Le crédit vise à aider les personnes handicapées à assumer financièrement les coûts supplémentaires de la vie et du travail créés par leur incapacité. Le crédit de base s’élève à 1 037,76 $ par an.
Il n’est pas facile d’obtenir le crédit d’impôt pour personnes handicapées. En effet, il faut avoir une déficience mentale ou physique grave et prolongée (d’un minimum d’un an) qui limite de façon marquée sa capacité d’effectuer une « activité courante de la vie quotidienne ». La définition d’une telle activité est très restrictive et ne comprend pas le travail, la tenue d’une maison, ni les activités récréatives ou sociales[376]. Par ailleurs, le montant de l’allègement fiscal est modeste. Le Comité recommande donc :
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39 |
Que l’on modifie le critère d’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées, pour faciliter l’admissibilité des personnes ayant une maladie mentale, et que l’on relève le montant de ce crédit. |
CHAPITRE 9:
LA TOXICOMANIE
L’un des plus grands problèmes, si je peux me permettre d’être très franc, c’est que les ministres doivent choisir entre les IMR et les toxicomanes. [Or, ceux-ci n’ont] pas de poids politique […] —Michel Perron[377]
Au Canada, le traitement de la toxicomanie, tout comme celui de la maladie mentale, n’est pas érigé en système. Il a évolué de façon fragmentée et il a toujours été sous‑financé, se déroulant dans la honte et se heurtant à l’indifférence du gouvernement. Pourtant, très peu de familles canadiennes n’ont pas été affectées par la toxicomanie[378]. Au cours de ses audiences, le Comité a entendu de nombreux témoignages sur les ravages causés par la toxicomanie : éclatement de la famille, pertes financières, prostitution enfantine, criminalité, itinérance, violence familiale et mauvais traitements infligés aux enfants, problèmes de santé concomitants, accidents de la route et du travail, perte d’emplois, anomalies congénitales, lésions cérébrales et suicides. La honte et le refus d’admettre la réalité empêchent souvent de reconnaître le lien entre la toxicomanie et ces conséquences. Lorsque des toxicomanes ont besoin d’aide et sont prêts à l’accepter, ils ont de la difficulté à trouver des services tout comme les membres de leur famille; quand ils ont accès à des services, ils sont souvent inscrits sur une longue liste d’attente. Pendant ces délais considérables, des personnes qui pourraient autrement recevoir de l’aide s’enfoncent davantage dans la toxicomanie ce qui entraîne des conséquences plus lourdes sur le plan humain et social.
Les services de santé mentale et les services d’aide aux toxicomanes fonctionnent dans des secteurs distincts. L’idée selon laquelle certaines personnes aux prises avec un problème de consommation pourraient aussi avoir des problèmes de santé mentale et vice versa a pris du temps à s’imposer. Les recherches ont toutefois révélé que 30 p. cent des personnes chez qui une maladie mentale a été diagnostiquée éprouveront aussi des problèmes de consommation d’alcool ou de drogues au cours de leur vie et que 37 p. cent des personnes alcooliques (53 p. cent des toxicomanes) souffrent également de maladie mentale[379].
Les
clients et leur famille sont frustrés dans leurs efforts pour obtenir des
services de santé mentale ou des services liés à
J'ai obtenu de l'aide pour chaque chose, mais on se sent oublié du système quand on a besoin d'une aide combinée, pour tout à la fois [...] et, quand un de vos troubles est pire qu'un autre, le médecin pense que vous voyez quelqu'un d'autre, mais finalement personne ne vous traite. Il n'y a pas de suivi et on est tout simplement oublié. —Anonyme[380]
Le Comité
reconnaît qu’il n’a pu consacrer aux problèmes de consommation autant
d’attention qu’il le prévoyait lorsqu’il a entrepris son étude sur la santé
mentale, la maladie mentale et
Bien sûr, de nombreux aspects de la maladie mentale et de la consommation se chevauchent, surtout quand il s’agit de personnes aux prises avec l’un et l’autre problème. Compte tenu de l’importance des problèmes de consommation en général et de ce chevauchement en particulier, le présent chapitre du rapport est consacré à ces questions. En outre, le chapitre 16 (Initiatives nationales pour la santé mentale) contient une importante recommandation visant l’injection par le gouvernement fédéral de 50 millions de dollars supplémentaires par année dans des programmes relatifs aux troubles concomitants.
Un solide mouvement d’entraide et de sensibilisation créé par les clients et les familles vient appuyer les services de santé mentale. En ce qui a trait à la toxicomanie, l’entraide est très répandue depuis longtemps, mais elle fait partie d’une culture d’anonymat et d’autonomie recevant peu d’aide du gouvernement, ce qui pourrait expliquer pourquoi très peu de toxicomanes ou de membres de leur famille ont témoigné devant le Comité ou présenté des mémoires.
Clean and
Sober Thinking (CAST) est un groupe d’entraide de toxicomanes non financé qui
est établi dans la région de Peel (Ontario). Les rencontres des membres de CAST
visent à aider les toxicomanes au moment crucial où ils sont prêts à changer.
Lorsqu’une personne qui est dans l’enfer de la drogue ou de l’alcool décide de
demander de l’aide, elle est enveloppée par
Les témoignages présentés au Comité n’ont donné qu’un petit aperçu de la douleur causée par les dépendances.
Je m’adresse à vous, à titre personnel, parce que ma propre fille, qui est atteinte de schizophrénie, prend du crack. […] Comment attendre d’une personne atteinte d’une maladie mentale grave dont les facultés cognitives sont affectées, qui ne possède pour ainsi dire aucune motivation ou vision, et qui vit au jour le jour, de seulement envisager la désintoxication? Les interventions, de même que les ressources et les établissements de traitement sont désespérément insuffisants. L’attitude générale consiste à attendre jusqu’à ce que les personnes soient prêtes à cesser de consommer. Eh bien, elles ne veulent pas cesser de consommer. — Joan Nazif[382]
Plus de gens que nous ne le croyons ont un problème de jeu compulsif — ils font des chèques sans provision, ils mentent, ils volent, ils s’absentent du travail dans le seul but d’éprouver immédiatement une sensation d’euphorie. Contrairement aux autres dépendances, le jeu compulsif peut être tenu secret. Il n’est pas accompagné d’une démarche vacillante, d’une difficulté d’élocution ou de traces d’injection. Pendant trois ans, aucun de mes amis n’a su que je jouais. Je le faisais en solitaire, habituellement tard le soir. Les machines à sous, à tout prix, étaient ma grande obsession [traduction]. — Anonyme
La dépendance aux médicaments antidouleur m'a dépouillé de ma dignité et m'a coûté très cher. À part voler l'argent des membres de la famille, j'ai trahi leur confiance et la foi qu'ils avaient en moi. À l'époque, rien n'était plus important que ce qui me permettait de « planer ». Je devais consommer de plus en plus de médicaments pour retrouver une sensation fugace. Les pilules exacerbaient les luttes quotidiennes que je devais mener. Je me suis finalement rendu compte de ce qui était devenu très clair pour beaucoup d'autres - ma vie était un gâchis. J'étais ruiné financièrement et mon moral était à son plus bas. — Barry Strader[383]
Le milieu
de la toxicomanie manque de porte-parole; il n’y a donc que les décideurs et
les fournisseurs de soins de santé pour défendre les intérêts d’une clientèle
anonyme. Quels que soient les efforts qu’ils déploient à cet égard, rien ne
peut remplacer le témoignage de personnes touchées par
Le Comité recommande donc :
9.3 DES COUPABLES BIEN CONNUS ET LE TORT QU’ILS CAUSENT
Bien que la production et le trafic de drogues illicites fassent les manchettes, ce sont des produits qu’on peut se procurer légalement, soit l’alcool[384] et les médicaments sur ordonnance, qui sont les plus lourds de conséquences pour la vie et la santé des Canadiens, notamment en raison de leur prépondérance et de leur usage répandu[385].
Lorsqu’on pense à une personne qui a une dépendance, on ne pense généralement pas à la dépendance à l’alcool. Et lorsqu’on pense aux alcooliques, on se représente un pauvre hère assis dans une ruelle avec, à côté de lui, un flacon dans un sac de papier. On ne pense pas à la personne qui boit à domicile, ni aux personnes qui surconsomment des médicaments prescrits ou d’autres produits. Le jaunisme des médias ne nous aide pas, parce que les journaux ne font état que des histoires à sensation et ne parlent pas de la vie quotidienne des gens. — Sénateur Cordy[386]
L’ampleur du problème de la consommation abusive de substances licites
au Canada est souvent passée sous silence en raison du caractère honteux qui
s’y rattache et du refus d’admettre
§ 13,6 p. cent de tous les Canadiens sont considérés comme des buveurs à risque élevé[387].
§ On estime qu’au cours d’une année donnée, 8 p. cent des hospitalisations et 10 p. cent du nombre total de jours passés à l’hôpital sont attribuables à la consommation abusive d’alcool et de drogues[388].
§ L’exposition prénatale à l’alcool est aujourd’hui considérée comme la principale cause des anomalies congénitales en Amérique du Nord[389].
§ En 2000, 981 personnes ont péri dans des accidents de voiture liés à l’alcool au Canada (y compris des piétons et des personnes utilisant des véhicules hors route)[390].
§ Les Canadiens sont parmi les plus grands consommateurs au monde de médicaments utilisés en psychiatrie. Ils se classent au deuxième rang des consommateurs de sédatifs et au quatrième rang des consommateurs de médicaments sur ordonnance[391].
§ On estime que 20 p. cent des Canadiens de plus de 60 ans sont des consommateurs de longue date d’analgésiques.
§ Les femmes sont 50 p. cent plus susceptibles que les hommes de consommer des médicaments de façon abusive. Les Autochtones courent un risque plus élevé de consommer à des fins non médicales des médicaments sur ordonnance[392].
§ Au Canada, la consommation abusive de substances licites (y compris le tabac) entraîne annuellement des pertes de productivités de 11,8 milliards de dollars, soit 1,7 p. cent du produit national brut (PNB), ce qui représente 414 $ par habitant (hommes, femmes et enfants confondus)[393].
En gros, je dirais que 90 p. cent des décès causés par les drogues sont attribuables à l’alcool et au tabac. Et si on tenait compte de l’invalidité et de la perte de qualité de vie, ces deux substances seraient probablement responsables de 95 p. cent des cas. Cela ressort très clairement de l’analyse effectuée par l’Organisation mondiale de la santé, y compris dans les pays économiquement développés. — Tim Stockwell[394]
En fait, la grande majorité des Canadiens toxicomanes consomment des substances licites. Beaucoup d’entre eux ont une dépendance croisée, ce qui signifie qu’ils consomment diverses combinaisons d’alcool et de médicaments. La toxicomanie est un problème de santé dont l’incidence peut être réduite grâce à un suivi des interventions (relatives à la consommation de médicaments sur ordonnance, par exemple) et à la sensibilisation du public aux dangers à cet égard.
Le Comité recommande donc :
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41 |
Que les ressources en matière de traitement de la toxicomanie visent également la dépendance aux substances licites telles que l’alcool, le tabac et les médicaments sur ordonnance, et les comportements comme le jeu compulsif. |
9.4 UNE NOUVELLE MENACE — LE JEU COMPULSIF
Le nombre de joueurs compulsifs a connu une hausse importante au cours des 25 dernières années. En Ontario, on estime que 3,8 p. cent des citoyens (340 000 personnes) éprouvent des problèmes allant de modérés à graves liés au jeu; 0,9 p. cent de la population a une forte dépendance au jeu[395]. En 1999-2000, les profits nets générés par le jeu (après l’attribution des prix et les autres dépenses) pour tous les ordres de gouvernement étaient de 5,7 milliards de dollars[396]. En 2004, ces profits étaient passés à 6,2 milliards de dollars, montant supérieur aux revenus nets que le gouvernement tire à la fois du tabac et de l’alcool (5,9 milliards de dollars)[397].
La Colombie-Britannique, le Manitoba, le Québec, l’Alberta, l’Ontario et l’Île‑du‑Prince‑Édouard mettent en œuvre des programmes de « jeu raisonnable » pour lutter contre le jeu compulsif. L’engagement de l’Ontario à cet égard est de 2 p. cent des revenus bruts provenant des machines à sous dans les casinos de charité et les hippodromes; il s’agit de l’affectation la plus importante de fonds à une stratégie de lutte contre le jeu compulsif dans le monde. Toutefois, un récent examen a révélé que les fonds n’avaient pas été entièrement attribués (seulement 21,7 des 36 millions de dollars affectés ont été attribués en 2003-2004). Un nombre de joueurs compulsifs moins important (5 900) que prévu (8 600) ont demandé à suivre un traitement[398].
Les spécialistes craignent que la plupart des problèmes liés au jeu demeurent cachés en raison de la honte et de la réprobation sociale qui s’y rattachent, mais qu’ils apparaîtront plus tard et en nombre effarant. Le fait que les jeunes de niveau secondaire jouent de deux à quatre fois plus souvent que la population en général en est un signe précurseur. Ils sont les joueurs compulsifs de demain[399].
Au Canada, tous les ordres de gouvernement dépendent des revenus tirés du jeu; il y aura vraisemblablement une hausse de l’investissement dans les installations de jeu. Les incidences sociales, économiques et de santé sur les Canadiens commencent tout juste à poindre et ne doivent pas être négligées ni minimisées.
Le Comité recommande donc :
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Que les gouvernements provinciaux et territoriaux affectent une partie fixe des revenus tirés du jeu à des programmes de prévention, de sensibilisation et de traitement fondés sur des données probantes et à la recherche sur le jeu compulsif. Que Statistique Canada s’assure qu’à l’instar de la consommation d’alcool et de drogues, le jeu compulsif au sein de la population est mesuré et fait l’objet de rapports à la suite de sondages réguliers. |
9.5 LES PERSONNES LES PLUS VULNÉRABLES
Comme c’est le cas pour d’autres problèmes de santé, les gens qui sont pauvres, marginalisés ou autrement défavorisés sont touchés en nombre disproportionné par la toxicomanie ou le jeu compulsif. Les enfants et les jeunes, les femmes et les personnes âgées sont particulièrement vulnérables, ce qui n’est pas toujours reconnu et n’est donc pas examiné.
9.5.1 Premières nations, Inuits et Métis
Comme il est expliqué au chapitre 14, les Autochtones attribuent leurs problèmes de santé mentale et de toxicomanie à la colonisation qui a brimé leur culture et créé un climat d’intense désespoir[400]. Le déplacement constant des collectivités et le retrait des enfants de leur milieu pour les placer dans des pensionnats ont ébranlé les liens traditionnels avec la famille et la collectivité; des générations entières ont été déplacées et traumatisées. Il en est résulté une faible identité culturelle, la pauvreté, la dépendance à l’aide sociale et un profond sentiment de détresse[401].
Les membres des Premières nations, les Inuits et les Métis souffrent d’une multitude de problèmes de santé, dont la toxicomanie n’est pas le moindre.
Dans le
seul Labrador, comme l’a dit le témoin de la réserve, il y a eu énormément de
suicides chez les jeunes. Ce n’est pas un phénomène qui frappe seulement le
Labrador : cela se produit aussi à St. John’s et dans toute la province, à
cause de
La situation des femmes diffère de celle des hommes à bien des égards, notamment sur le plan des réactions à la consommation d’alcool ou de drogues. Par exemple, les femmes courent plus de risques que les hommes de développer une cirrhose du foie en consommant moins d’alcool et en moins de temps que ceux-ci[403]. Elles sont aussi plus susceptibles d’être victimes de violence familiale, de mauvais traitement pendant l’enfance et de violence sexuelle; les femmes qui ont vécu de telles expériences courent un risque plus grand d’avoir des problèmes de consommation[404]. La question des femmes en âge de procréer qui consomment de l’alcool ou des drogues est particulièrement préoccupante compte tenu des risques de mettre au monde un enfant ayant des anomalies congénitales.
Le système profiterait d’un plus grand nombre de services aux femmes marginalisées (séances d’information données à des endroits où se rassemblent naturellement les femmes à risques élevés). Ces services permettraient d’identifier les femmes enceintes et celles qui ont des enfants et de les encourager à entreprendre un traitement. D’autres groupes tels que les femmes âgées, les jeunes femmes, les toxicomanes qui sont souvent sans-abri et les délinquantes. Très souvent, ces femmes n’ont pas accès aux services; nous devons aller vers elles en faisant preuve de compréhension et de sensibilité. — Nancy Bradley[405]
Jusqu’à 18 p. cent des personnes âgées hospitalisées le sont pour des raisons liées à une consommation abusive d’alcool. Les aînés prennent davantage de médicaments sur ordonnance et, de ce fait, ils sont particulièrement vulnérables aux effets indésirables et aux interactions des médicaments et à la dépendance aux médicaments.
De plus, le jeu compulsif pourrait être à la hausse chez les personnes âgées. Une étude réalisée en Ontario a révélé que 6,4 p. cent des aînés qui s’adonnent au jeu courent le risque de devenir des joueurs compulsifs, et que 0,1 p. cent de cette population joue déjà à des niveaux problématiques. Une étude effectuée au Manitoba a permis de découvrir que 1,6 p. cent des joueurs âgés risquent de développer une dépendance au jeu et que 1,2 p. cent des aînés sont déjà des joueurs compulsifs[406]. Il n’existe au Canada que 12 programmes spécialisés dans le traitement des dépendances qui desservent approximativement 1 250 personnes âgées par année[407].
9.5.4 Les enfants et les jeunes
Les jeunes sont les plus touchés par les problèmes de santé mentale et de toxicomanie[408]. Les recherches ont démontré que la consommation chez les enfants et les jeunes est un critère de prévision d’un comportement criminel ultérieur[409]. Certains joueurs compulsifs ont signalé qu’ils avaient commencé à jouer dès l’âge de 10 ans[410]. Les enfants et les jeunes sont aussi vulnérables à la violence psychologique, physique et sexuelle exercée par des personnes qui s’occupent d’eux et qui consomment de l’alcool ou des drogues[411].
Pour ce qui est de diagnostics précoces, […] il est beaucoup plus facile de s’occuper des enfants lorsqu’ils sont encore tout jeunes. Le diagnostic précoce […], dans [le domaine] de la toxicomanie, peut définitivement sauver une vie et un chagrin de toute une vie, non seulement pour le jeune concerné mais pour beaucoup d’autres. — Dave Rodney[412]
L’absence de mesures pour s’attaquer aux conséquences de la toxicomanie et du jeu compulsif chez les groupes vulnérables, et plus particulièrement les jeunes, entraîne d’énormes coûts pour le Canada sur le plan humain et sur le plan financier. Dans un scénario selon lequel il faut « payer maintenant ou payer plus tard », l’indifférence à l’égard de ces groupes entraîne à la longue des coûts sociaux et des coûts de santé sans cesse croissants.
Le Comité recommande donc (en plus des recommandations du chapitre 14 concernant spécialement les Autochtones) :
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43 |
Que le gouvernement du Canada évalue les résultats des programmes actuels axés sur les problèmes de dépendance des membres des Premières nations, des Inuits et des Métis. Que les résultats de cette évaluation soient diffusés par le Centre d’échange des connaissances qui fera partie de la Commission canadienne de la santé mentale (voir le Chapitre 16) dans le but d’établir des modèles de traitement efficaces et d’élargir ces programmes de manière à accroître l’accès et à réduire les périodes d’attente. Que les provinces et les territoires élaborent et mettent en œuvre des services fondés sur des données probantes et destinés aux personnes marginalisées ainsi que des programmes de prévention primaire et secondaire pour les populations à risque, c’est-à-dire les femmes, les enfants et les jeunes, les aînés et les personnes ayant des troubles causés par l’alcoolisation fœtale. |
9.6 RESPONSABILITÉ DU GOUVERNEMENT
Il faut également étudier la toxicomanie dans le contexte de la réglementation et de la taxation liée à l’alcool et au jeu (y compris les loteries provinciales), deux importantes sources de revenu[413]. De puissants intérêts privés interviennent également dans la vente d’alcool et dans le jeu. Après des années de négligence de la part du gouvernement, les défenseurs des personnes aux prises avec une dépendance sont découragés du peu d’investissement dans la prévention, la promotion de la santé et le traitement des victimes en regard des sommes énormes recueillies sous forme de taxes et de revenus tirés du jeu[414].
[…] Il faut bien reconnaître que nous ne nous attaquons pas au vrai problème. Abstraction faite du fait qu’il faudrait peut-être taxer davantage l’alcool, il n’en demeure pas moins que le gouvernement impose déjà beaucoup ce produit et que les recettes ainsi recueillies ne sont pas utilisées aux bonnes fins. Même si une part de ces recettes sert à des fins utiles, il faudrait ouvertement reconnaître que le gouvernement continue d’encourager des activités qui sont nocives comme le jeu. — Michel Perron[415]
9.7 DE NOUVELLES IDÉES QUI FONCTIONNENT
Des
progrès remarquables ont été faits pour aider les personnes aux prises avec une
dépendance et une maladie mentale dans divers endroits au Canada. Les résultats
obtenus sont prometteurs ou positifs et confirmés par
9.7.1 Le traitement intégré de troubles concomitants
La consommation abusive d’alcool ou de drogues peut masquer les symptômes d’une maladie mentale, mais chez les personnes dont on sait qu’elles souffrent de troubles mentaux, cette consommation peut aggraver les symptômes psychiatriques. En conséquence, les personnes souffrant de troubles concomitants[416] ont généralement des problèmes plus complexes et il est plus difficile de les aider parce qu’elles ont souvent des comportements plus dérangeants, acceptent moins bien le traitement et sont plus sujettes aux rechutes[417] que les personnes dont la maladie mentale n’est pas aggravée par la toxicomanie ou vice-versa.
Le système de santé mentale et le système de traitement de la toxicomanie ont mis du temps avant de reconnaître l’existence même de troubles concomitants[418]. Habituellement, les personnes atteintes de ces troubles font la navette d’un service à l’autre pendant que les cliniciens et les spécialistes essaient de déterminer quel problème il faut traiter avant tout.
Après que les troubles concomitants ont été reconnus, un traitement appartenant à l’une des trois catégories suivantes a généralement été offert : le traitement partiel — axé sur l’un des problèmes, l’hypothèse étant que l’autre cesserait avec le temps; le traitement séquentiel — visant à résoudre un problème avant de traiter l’autre; le traitement parallèle — consistant en services distincts pour traiter les deux problèmes en même temps[419]. Les résultats ont été moins que satisfaisants, notamment en raison des différences entre les deux systèmes de traitement et leurs principes sous-jacents. Les gens ne s’y retrouvaient plus.
La documentation sur les pratiques exemplaires recommande que les programmes de santé mentale et de traitement de la toxicomanie procèdent à un dépistage des troubles concomitants et, si ces troubles sont avérés, que les clients soient évalués en profondeur afin de recevoir le traitement qui convient. Elle recommande également un traitement intégré, c’est-à-dire le traitement simultané des deux problèmes[420] par une même équipe qui utilise des techniques et des principes compatibles[421].
9.7.2 La formation en soutien social et familial
Cette approche offre une solution de remplacement à certaines interventions visant une confrontation, employées par des membres frustrés de la famille pour persuader un être cher de suivre un traitement. Il s’agit d’un modèle didactique, habituellement accompagné d’un cahier d’exercices, qui fait appel à divers aspects de la thérapie cognitivo‑comportementale pour aider les familles et les amis d’une personne dépendante à trouver des moyens de rester en sécurité, à analyser les situations dans lesquelles la consommation abusive est plus susceptible de se produire, à utiliser le renforcement positif pour eux-mêmes et pour la personne dépendante et à adopter un mode de vie plus sain. La recherche a démontré que ce genre d’intervention minimale est très efficace pour inciter la personne ayant une dépendance, y compris le joueur compulsif, à entreprendre un traitement; cette approche a obtenu un taux de réussite de 64 p. cent auprès des personnes aux prises avec des problèmes de consommation d’alcool et de drogues, et sept joueurs compulsifs sur dix ont accepté de suivre un traitement[422] .
Plus la famille participe — c’est-à-dire les gens que le jeune considère comme sa famille, meilleures sont ses chances de s’en sortir. — Nancy Bradley[423]
9.7.3 La réduction des méfaits
La réduction des méfaits vise à amoindrir les incidences sur la santé et les conséquences sociales de la consommation d’alcool et de drogues sans exiger que les personnes deviennent abstinentes. On peut rechercher l’abstinence à long terme, mais l’objectif à court terme est la consommation sécuritaire. Les caractéristiques de la réduction des méfaits sont : le pragmatisme — accepter qu’il est inévitable que des gens consomment de l’alcool et des drogues et que certaines personnes le feront de façon excessive; les valeurs humaines — la dignité et les droits du consommateur d’alcool ou de drogues sont respectés; l’accent mis sur les méfaits — la quantité consommée est d’une importance secondaire par rapport aux méfaits pouvant en résulter; la hiérarchie des objectifs — il faut d’abord répondre aux besoins les plus pressants[424].
9.7.3.1 Les programmes d’échange de seringues (PES)
Au Canada, le premier programme non officiel d’échange de seringues a vu le jour à Toronto en 1987. D’autres PES officiels ont été mis en place à Toronto et à Vancouver en 1989. Aujourd’hui, il existe 30 PES au Canada. Toutes les prisons administrées par Service correctionnel du Canada fournissent aux détenus de l’eau de Javel pour désinfecter les seringues mais, en dépit de recommandations répétées visant l’instauration de PES, aucun établissement correctionnel ne leur dispense de matériel d’injection stérile[425].
Les PES font l’objet d’une exemption dans le Code criminel du Canada et dans la Loi sur les aliments et drogues conformément à laquelle la distribution d’accessoires facilitant la consommation de drogues est légale à condition qu’elle ait pour but de prévenir l’infection à VIH. Au départ, le gouvernement fédéral partageait les coûts avec les gouvernements provinciaux. De nos jours, les programmes sont mis en œuvre selon divers modèles de financement, notamment des partenariats fédéraux et provinciaux/municipaux. Le coût d’une trousse d’échange de seringue s’élève à un peu plus d’un dollar.
De nombreuses craintes ont été soulevées au sujet de ces programmes, mais d’après les témoignages, elles ne se sont pas confirmées :
§
Les programmes d’échange de seringues ne donnent pas lieu à une
prolifération d’aiguilles dangereuses jetées dans
§ Les programmes d’échange de seringues n’ont pas attiré plus de trafiquants de drogues dans les quartiers où ils sont mis en œuvre.
§ La police ne s’oppose pas à ces programmes — l’Association canadienne des chefs de police a adopté une résolution en faveur de la Stratégie canadienne sur le VIH/sida, y compris les programmes d’échange de seringues[426].
9.7.3.2 Les centres d’injection supervisés (CIS)
Les centres d’injection supervisés assurent l’échange de seringues, mais ils offrent en plus un endroit sécuritaire où consommer des drogues et recevoir des soins médicaux d’urgence, des services de santé de base, du counselling, des services d’aiguillage vers d’autres organismes, de l’information et l’intégration à des réseaux de soutien social de toxicomanes. Les CIS ont généralement des règles internes relatives à la sécurité; ils peuvent par exemple interdire la consommation d’alcool, la violence et le trafic de drogues et n’accueillir que des toxicomanes du quartier qui ont 18 ans et plus.
Le seul CIS du Canada se trouve à Vancouver. Il fonctionne dans le cadre d’un projet de recherche scientifique de trois ans. Il a été établi en vertu de l’article 56 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, qui permet au ministre fédéral de la Santé d’accorder une exemption relative à l’application de la Loi pour des raisons médicales ou scientifiques particulières. Quatre-vingt-dix pour cent des personnes qui fréquentent le CIS de Vancouver ont le virus de l’hépatite C, et 28 à 30 p. cent ont le VIH. Le CIS supervise 500 injections sécuritaires par jour[427].
9.7.3.3 Vin et bière dans les refuges
Certains itinérants refusent de fréquenter les refuges parce qu’ils ne peuvent y apporter leurs bouteilles d’alcool; d’autres boivent tout leur alcool avant d’entrer au refuge, ce qui cause par la suite des bagarres et des blessures pour le personnel et d’autres clients. Devant le problème de la violence dans les refuges et des personnes qui meurent de froid dans la rue, le personnel de quelques refuges de Toronto a commencé à adopter une approche de réduction des méfaits qui consiste à donner aux alcooliques un verre de bière ou de vin à une fréquence d’une heure ou deux pendant le séjour au refuge.
L’Annex Harm Reduction Program, un programme satellite de l’hôpital St. Michael de Toronto, qui s’adresse aux hommes vivant au refuge Seaton[428], offre désormais des traitements médicaux et des services d’aiguillage vers des services de traitement de la toxicomanie et d’hébergement. Les résultats préliminaires d’une évaluation démontrent que les accidents et les blessures liés à l’alcool sont en baisse, que les hommes boivent de l’alcool sous forme moins nocive (que le Lysol, le rince-bouche ou l’alcool à friction) et qu’ils reçoivent de meilleurs soins médicaux. Certains ont réduit leur consommation d’alcool, d’autres ont entrepris un traitement, tandis que d’autres encore se sont trouvé un logement stable et occupent un emploi[429].
À Ottawa, le refuge des Bergers de l’espoir a instauré un programme de réduction de méfaits grâce à une subvention de l’Initiative de partenariats en action communautaire (IPAC). Ce programme accueille dix personnes à la fois, 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, et il a une liste d’attente d’une trentaine de noms. Les participants reçoivent toutes les heures un verre de vin fait maison qui est dilué progressivement. L’évaluation du programme indique une baisse des visites à l’urgence, des hospitalisations et des appels à des ambulanciers. Les personnes qui ont terminé le programme ont obtenu un logement stable, évité la prison et suivi un traitement[430].
9.7.4 Le tribunal de traitement de la toxicomanie (TTT)
Le ministère fédéral de la Justice a financé un premier tribunal de traitement de la toxicomanie à Toronto en 1998 et un deuxième à Vancouver en 2001. Ces tribunaux identifient les délinquants à faible risque dont le principal problème est la consommation abusive de drogues et à qui il serait préférable d’imposer un traitement plutôt que l’incarcération. Ces délinquants, notamment des jeunes, se voient offrir de l’éducation antidrogue, une préparation à l’emploi et un traitement en santé mentale s’ils assument la responsabilité des infractions qu’ils ont commises. Les peines se limitent souvent à du travail communautaire; les chefs d’accusation peuvent également être retirés si le délinquant suit le traitement au complet et obtient de bons résultats. En mai 2003, le gouvernement fédéral a engagé 23 millions de dollars sur cinq ans pour l’établissement d’autres TTT[431].
9.7.5 Programmes de jour et programmes de désintoxication à domicile
La stratégie la plus rentable d’intervention précoce pour l’alcoolisme est une séance de conseils dispensés par un médecin de premier recours et un suivi assuré par une infirmière[432]. Les progrès accomplis grâce à la recherche sur les services de désintoxication ont aussi démontré que les personnes ayant une dépendance physiologique à l’alcool ou aux drogues peuvent suivre avec succès un programme de désintoxication qui leur offre un soutien infirmier à domicile ou dans le cadre d’un programme de jour[433]. L’idée de créer des équipes locales de consultation et de traitement de l’alcoolisme a germé au Royaume-Uni et ailleurs par suite des longues listes d’attentes pour l’hospitalisation. Des études sur les coûts relatifs ont indiqué que le coût des soins dispensés à l’hôpital est approximativement dix fois plus élevé que celui des soins communautaires et que les résultats sont similaires[434]. Il faut toutefois noter que des services de désintoxication en résidence sont quand même nécessaires pour les sans‑abri.
Ainsi, dans le service auquel j’ai collaboré au Royaume-Uni, une infirmière communautaire réalisait en un an autant de programmes de désintoxication à domicile pour alcooliques que l’hôpital général, qui constituait l’autre grand fournisseur de services de la région. — Tim Stockwell[435]
À l’exception du traitement des troubles concomitants et du programme de formation en soutien social et familial, les tendances présentées dans cette partie restent controversées, surtout celles qui concernent la réduction des méfaits. La société juge sévèrement ceux qui, selon elle, font de mauvais choix. Le principe de la réduction des méfaits remet en question les perceptions parce qu’il prône un modèle horizontal, d’adulte à adulte, qui vise à assurer la plus grande sécurité possible pour tous, y compris la société dans son ensemble, tout en préservant la dignité et l’espoir pour les personnes touchées.
Compte tenu de ces progrès, le Comité recommande :
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44 |
Qu’une partie des fonds consacrés au traitement de la toxicomanie qui proviendront du Fonds de transition en santé mentale soit affectée à l’élaboration de traitements intégrés de troubles concomitants, de même qu’à la recherche et à l’échange du savoir à cet égard. Que les médecins de famille reçoivent, dans le cadre des programmes de médecine et de perfectionnement professionnel, de la formation visant à diagnostiquer l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale (ETCAF). Que les médecins de famille reçoivent la formation appropriée sur les techniques d’intervention brève et d’entrevue pour reconnaître la consommation problématique conduisant à la toxicomanie. |
9.8 ÉTAPES MENANT À L’INTÉGRATION
9.8.1 Miser sur les points communs
Les services de santé mentale et les services de traitement de la toxicomanie ont toujours évolué séparément, ayant chacun son propre objectif. La toxicomanie et la maladie mentale sont deux problèmes très complexes. Les services relatifs à l’une et à l’autre doivent agir sur de multiples facteurs et tenir compte d’une foule de conséquences personnelles et sociales. Les résultats ne sont pas garantis même quand le meilleur soutien et les traitements les plus efficaces sont offerts. Les deux genres de services sont fondés sur des théories différentes quant aux causes, aux effets et à l’aide à apporter. Ils ont toutefois des aspects convergents, notamment la publication de documents sur les pratiques exemplaires et le traitement des troubles concomitants ainsi que l’établissement de certains services mixtes.
En 13 ans d’expérience, j’ai constaté que les chasses gardées ont plus ou moins tendance à s’estomper. Dans mon milieu, certaines personnes disent qu’il peut y avoir des conflits au niveau provincial mais qu’au niveau communautaire, tout le monde s’entend assez bien. — Jeff Wilbee[436]
Le rétablissement offre une lueur d’espoir depuis 1935, année où le mouvement d’entraide le mieux connu, Alcooliques Anonymes, a été fondé. Dans le milieu de la toxicomanie, le rétablissement est défini comme un processus permanent pour bien vivre malgré les combats à livrer. Au cours des 20 dernières années, le système de santé mentale, guidé par les personnes aux prises avec la maladie mentale, a commencé à faire du rétablissement[437] son concept déterminant. Toutefois, les théories de traitement professionnel ne reposent pas encore pleinement sur ce concept.
9.8.1.2 L’entraide et le soutien par les pairs
Le traitement de la toxicomanie a été fondé sur l’entraide, mais au fil du temps, il a pris la forme de services professionnels. Des établissements d’enseignement supérieur offrent aujourd’hui des spécialisations en toxicomanie qui reçoivent la reconnaissance professionnelle et l’accréditation. De nos jours, la plupart des services de traitement de la toxicomanie ont une solide direction professionnelle. Le système de santé mentale actuel a commencé par une spécialité médicale, la psychiatrie, qui s’est ramifiée au cours du siècle dernier en diverses professions telles que les infirmières psychiatriques et les travailleurs sociaux. Le mouvement d’entraide en santé mentale est relativement nouveau et ses promoteurs ont dû réclamer fermement sa place dans le système dirigé majoritairement par des professionnels. Heureusement, les fournisseurs de services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie en sont venus à comprendre et à apprécier l’entraide et le soutien par les pairs tout en continuant de reconnaître l’importance d’une présence professionnelle.
Nous avons tout de même des pairs professionnels et je pense que personne ne peut mieux donner de l’espoir à nos consommateurs que ces personnes, qui sont elles-mêmes passées par là. Il n’y a pas de meilleurs porte-parole. Il y aura toujours des pairs professionnels, mais leur proportion [de soutien par les pairs par rapport aux soins professionnels] change en raison du genre de service que nous fournissons. — Greg Purvis[438]
9.8.1.3 Les services communautaires non médicaux
Issus des activités d’entraide, les services de traitement de la toxicomanie ont toujours été axés sur une approche communautaire et non médicale. Même si certaines personnes doivent de temps à autre faire l’objet d’une intervention médicale ou d’une évaluation psychiatrique et recevoir un diagnostic et des médicaments, on peut dire que, dans l’ensemble, les services offerts aux toxicomanes sont de nature communautaire et non médicale.
Les services communautaires de santé mentale se sont développés par suite de la désinstitutionnalisation entreprise à la fin des années 1960. Partout au Canada, les gouvernements ont continué à fermer des lits psychiatriques. Même si l’investissement dans les services communautaires a pris trop de temps à se concrétiser, les décideurs et les gens sur le terrain sont déterminés à instaurer un système fondé essentiellement sur des services communautaires non médicaux.
9.8.1.4 Les principaux déterminants de la santé
Les gestionnaires et les fournisseurs de services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie sont très conscients de l’importance des principaux déterminants de la santé dans la prévention des problèmes ou dans l’atténuation de leurs effets. Un logement sécuritaire et abordable, l’emploi, l’éducation, un soutien du revenu suffisant et la protection contre la violence sont importants pour la santé et le bien-être de tous les Canadiens; ils sont essentiels à la survie des personnes aux prises avec la maladie mentale et la toxicomanie.
9.8.1.5 L’intervention précoce
Les services de l’un et de l’autre secteur reconnaissent qu’il est important de cerner rapidement les problèmes pour intervenir ensuite de la façon la moins déstabilisante et la moins lourde de conséquences possible. Assurer des grossesses en santé, appuyer les parents à risque dans l’acquisition de compétences, mettre l’accent sur le développement de la petite enfance et aider les enfants et les adolescents qui commencent à avoir des problèmes liés à la consommation abusive d’alcool ou de drogues, toutes ces mesures permettent de sauver des vies et de prévenir une vie de dépendance envers de coûteux programmes sociaux et de santé.
L’intervention précoce en cas de psychose est peut-être le traitement intégré le plus prometteur dans le domaine de la santé mentale. S’ils sont identifiés rapidement et reçoivent de faibles doses de médicaments pendant de courtes périodes, les jeunes à risque peuvent éviter l’hospitalisation, la perte de l’accès à l’éducation, le chômage et la perte du soutien social et familial.
Sénateur, vous avez parlé d’éléments manquants. Ce qui m’a tout de suite frappé, c’est le nombre de fois que j’ai lu ou entendu des exposés sur les traumatismes infantiles, la violence et la toxicomanie dont sont victimes les enfants. Je ne veux pas simplement vous parler de la façon d’améliorer le système de traitement mais plutôt de réduire la demande pour ce système. Si l’on fait davantage pour les enfants qui ont des problèmes, on réduira autant les pressions sur le système de traitement de la toxicomanie que tout ce que l’on peut faire directement pour ce système. — Jon Kelly[439]
La
concurrence que se livrent le secteur du traitement de la toxicomanie et celui
de la santé mentale pour obtenir de maigres ressources est insensée. Elle ne
fait qu’accentuer les différences et décourager
Dans un document de politique intitulé Every Door is the Right Door, la Colombie‑Britannique propose
l’élaboration d’un modèle d’interventions du système de santé qui est axé sur
la collaborationet qui transcende
les domaines de la santé de la population, de la promotion de la santé, de la
réduction des méfaits et du renforcement des capacités de
Dans son document Building Capacity: A Framework for Serving Albertans Affected by Addiction and Mental Health Issues, l’Alberta précise qu’elle vise à améliorer les services offerts aux personnes ayant des troubles concomitants et à en accroître l’accès grâce à des partenariats de services et au partage des soins, les psychiatres donnant généralement des conseils aux médecins de premier recours. Le cadre met également l’accent sur l’information, la prévention et l’intervention précoce dans le cas des personnes dont la situation n’est pas encore grave[441].
[La] position [du CCLAT] est on ne peut plus claire. Nous appuyons pleinement l’élaboration d’un nouveau modèle, qui offrira des services coordonnés aux Canadiens en matière de santé mentale et de toxicomanie, et nous estimons que, dans certaines circonstances, un tel modèle nécessite une intégration stratégique des diverses méthodes de traitement des problèmes de santé mentale et de toxicomanie. — Michel Perron[442]
Le modèle
du quadrant est bien connu des fournisseurs de services de traitement de
Élevé |
Quadrant 3 Niveau élevé de problèmes liés à la toxicomanie et faible niveau de maladie mentale
SOINS SPÉCIALISÉS EN MATIÈRE DE DÉPENDANCE |
Quadrant 4 Niveau élevé de problèmes liés à la toxicomanie et niveau élevé de maladie mentale
SOINS SPÉCIALISÉS ET INTÉGRÉS EN MATIÈRE DE TROUBLES CONCOMITANTS |
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Faible
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Quadrant 1 Faible niveau de problèmes liés à la toxicomanie et faible niveau de maladie mentale
SOINS PRIMAIRES |
Quadrant 2 Faible niveau de problèmes liés à la toxicomanie et niveau élevé de maladie mentale
SOINS SPÉCIALISÉS EN MATIÈRE DE SANTÉ MENTALE |
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|
Faible |
Élevé |
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Les personnes ayant un faible niveau de maladie mentale et de toxicomanie (quadrant 1) forment de loin le segment le plus important de la société qui demandera le plus fréquemment l’aide d’un médecin de premier recours. Le modèle du quadrant propose que les services de traitement de la toxicomanie et les services de santé mentale deviennent compétents en matière de troubles concomitants, c’est-à-dire qu’ils soient en mesure de reconnaître les problèmes de santé mentale et de toxicomanie et d’intervenir dans les deux cas. Seules les personnes peu nombreuses visées par le quadrant 4 doivent recevoir des services spécialisés en matière de troubles concomitants.
Le modèle du quadrant ne privilégie pas un système plutôt qu’un autre. Il ne présuppose pas non plus la fusion de l’administration et des services des deux domaines ni la suppression de programmes spécialisés. Des mécanismes intégrés pourraient être mis en place à l’échelon local et comprendre : des ententes conclues entre les organismes de santé mentale et ceux de traitement de la toxicomanie au sujet de la prestation de services; la nomination d’organismes locaux de direction pour s’occuper de l’admission, de l’évaluation et de l’aiguillage; des outils de communication facilitant la transmission sécuritaire des renseignements personnels sur la santé; l’utilisation de la technologie à distance pour offrir des services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie ainsi que des services spécialisés aux régions éloignées ou mal desservies.
9.8.2.2Une perspective nationale commune
Le domaine du traitement de la toxicomanie a pu profiter d’une Stratégie canadienne antidrogue (mai 2003), d’une enquête nationale sur la consommation d’alcool et de drogues (Enquête sur les toxicomanies au Canada, novembre 2004) et du leadership permanent du Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies (CCLAT). Un Cadre d’action national sur la consommation et l’abus d’alcool et de drogues est en cours d’élaboration par suite d’un vaste processus de consultation au terme duquel s’est tenu une conférence nationale sur la toxicomanie en juin 2005[444].
Le 7 juin
2005, la
9.8.2.3Perspective à long terme
L’expérience de ceux qui ont entrepris l’intégration démontre que le processus est difficile en dépit de l’engagement des intervenants sur le terrain. Il faudra du temps, du leadership et des fonds pour créer des relations étroites entre les services de traitement de la toxicomanie et ceux de santé mentale, mais les premiers pas à cet égard doivent être faits sans plus attendre.
Si les gens ont la liberté de parler, de discuter, d’être en désaccord et d’harmoniser ensuite leurs vues, on encourage beaucoup plus l’adhésion. […] Lorsque les gens commenceront à être sensibilisés et à comprendre le processus, il leur faudra des ressources et des possibilités, sinon on aura fait beaucoup de bruit pour rien. Il faut que les ressources soient assurées avant de lancer un programme de sensibilisation. À défaut de cela, on va au devant des désaccords et de l’échec. En outre, il faut prévoir les résultats souhaités, les mesurer et en informer les intéressés. Il n’y a rien de tel que des résultats positifs pour mobiliser les intervenants du domaine de la santé mentale et des toxicomanies en faveur d’un nouveau processus. Les gens souhaitent réussir et offrir les meilleurs services possibles à leurs clients. — Greg Purvis[446]
Les services de traitement de la toxicomanie au Canada sont fragmentés
et souffrent d’un sous-financement chronique, ce qui ne leur permet pas de
répondre efficacement aux besoins des toxicomanes et de leur famille. La
culture de cloisonnement entre les services de santé mentale et les services de
traitement de la toxicomanie a ajouté à
Le Comité recommande donc :
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45 |
Que la Commission canadienne de la santé mentale (voir le Chapitre 16) établisse des partenariats avec les organismes nationaux de traitement de la toxicomanie et déploie des efforts pour atteindre l’objectif ultime d’intégration des secteurs de la maladie mentale et du traitement de la toxicomanie. |
Les progrès réalisés au niveau du savoir scientifique ont donné lieu à des interventions qui produisent des résultats positifs chez les toxicomanes. Les témoins qui se sont présentés devant le Comité ont insisté sur la nécessité d’intégrer les traitements dispensés aux personnes ayant à la fois des problèmes de santé mentale et des problèmes d’alcool ou de drogues, c’est-à-dire des troubles concomitants. Nous appuyons cette recommandation.
Très peu de toxicomanes et de membres de leur famille ont témoigné. Le Comité souligne le courage de ceux qui l’ont fait. Nous entendons favoriser une solide présence de clients du secteur du traitement de la toxicomanie et de membres de leur famille.
Les personnes qui ont témoigné devant le Comité ont fait comprendre on ne peut plus clairement les problèmes liés à la dépendance à des substances légales et aux longues listes d’attente avant d’obtenir de l’aide. Nous demandons un investissement soutenu dans le but de réduire les effets de la consommation abusive de substances légales sur la santé et le bien-être des Canadiens.
Le jeu est une importante source de revenus pour les gouvernements, mais beaucoup de gens jouent de façon compulsive et moins de personnes que prévu demandent de l’aide. Ce problème caché commence seulement à apparaître; il ne faut pas qu’il soit passé sous silence et qu’il s’ensuive un manque de vigilance à cet égard. Les gouvernements doivent aider les victimes du jeu.
Les arguments en faveur de la réduction des méfaits ont convaincu le Comité. Les diverses approches, qui ont prouvé qu’elles pouvaient atténuer la souffrance, ont souvent été élaborées par des fournisseurs de services de première ligne qui déploient de l’ingéniosité pour résoudre les problèmes auxquels leurs clients et eux-mêmes sont confrontés quotidiennement.
Les populations vulnérables, soit les Autochtones, les jeunes, les aînés et les femmes, sont touchées de façon disproportionnée par les conséquences de la toxicomanie et du jeu compulsif. Nous avons été particulièrement ébranlés par la tragédie du syndrome d’alcoolisation fœtale, une anomalie congénitale évitable. Le Comité demande l’établissement de stratégies efficaces d’action sociale et de prévention visant tout spécialement les personnes les plus à risque.
Le Comité
a été impressionné par le nombre élevé de témoins qui appuient l’intégration
des services de santé mentale et des services de traitement de
CHAPITRE 10:
ENTRAIDE ET SOUTIEN
PAR LES PAIRS
L’initiative
personnelle apporte un soutien psychologique et de l’aide pratique. C’est le
genre d’aide que l’on ne peut pas retrouver chez un médecin. Pour une personne
qui souffre de maladie mentale ou qui en est sortie, rien ne vaut mieux que de
se faire dire : « Je comprends ce que vous ressentez, je vous
accompagne sur le chemin de la guérison. »
—Linda Bayers[447]
Au cours de ses nombreuses audiences publiques, le Comité a très souvent entendu le témoignage de personnes ayant une maladie mentale ou une toxicomanie et de membres de leur famille qui étaient déçus par le manque d’accès aux services et démoralisés par le manque d’espoir qu’évoque le traitement des maladies mentales et des toxicomanies au Canada. Tout en reconnaissant la valeur de l’aide professionnelle, les gens touchés et leur famille se tournent de plus en plus vers l’entraide et le soutien par les pairs pour remplacer les services hospitaliers, communautaires et professionnels ou y suppléer.
Le programme d’entraide le plus connu, Alcooliques Anonymes (AA), avait commencé en 1935. Quelques années plus tard, en 1937, un médecin, Abraham Low, a fondé l’organisation Recovery Inc. à Chicago, pour essayer de répondre en particulier aux besoins des personnes ayant une maladie mentale. Aujourd’hui, l’organisation maintient ses services strictement bénévoles partout en Amérique du Nord (www.recovery-inc.org). De même, l’organisation GROW, établie à Sydney, en Australie, en 1957, aide des milliers de membres en se fondant sur sa version d’un programme en 12 étapes et sur une philosophie « de bienveillance, d’amitié et d’entraide » (www.grow.net.au).
Au Canada, le premier service parallèle de santé mentale basé sur l’entraide, la Vancouver Mental Patients’ Association (MPA), a vu le jour en 1971. L’Association existe encore, sous le nom de Motivation, Power and Achievement (MPA) (www.vmpa.org).
PROFIL Programme national de soutien par les pairs à l’intention des membres actuels des Forces canadiennes et des anciens militaires (www.osiss.ca). Ce programme unique en son genre, lancé en février 2002, fait partie du projet de soutien social des victimes du stress opérationnel. Il a permis d’aider 1 400 personnes et leur famille grâce à des renvois effectués au rythme d’un par jour. Établi dans 12 sites, le programme emploie 20 travailleurs de soutien des pairs ayant suivi une formation spéciale après avoir été eux-mêmes victimes d’un traumatisme lié au stress opérationnel. Au besoin, une équipe professionnelle est disponible pour des consultations. Les membres de la famille peuvent s’adresser à six sites répartis dans les différentes régions du pays. Le rôle des travailleurs de soutien des pairs est double : aider d’autres à surmonter un traumatisme dû au stress opérationnel et s’occuper de leur propre traumatisme. Ce modèle non médical a été présenté à des auditoires du Canada et de l’Australie ainsi qu’à Berlin. L’objectif du programme est « d’offrir le meilleur soutien possible par les pairs aux hommes et aux femmes des Forces canadiennes, qui continuent à participer à un nombre toujours croissant d’opérations exigeantes partout dans le monde » (général Ray Henault, chef d’état-major de la Défense, 2002). « Le soutien par les pairs sauve des vies tous les jours », a dit le lieutenant-colonel Stéphane Grenier, directeur du projet. |
10.2 ENTRAIDE ET SOUTIEN PAR LES PAIRS: POURQUOI?
Les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille parlent des nombreux messages négatifs de la société et des professionnels de la santé, qui font obstacle à la guérison.
Dans la société d’aujourd’hui, la stigmatisation liée à la maladie mentale demeure une plaie. Nous ressentons cette stigmatisation tous les jours de notre vie... Au travail, on nous oublie quand vient le temps des promotions... Les compagnies d’assurance nous harcèlent en contestant la réalité de notre maladie pour pouvoir cesser de verser nos prestations d’invalidité... À l’hôpital, nous devons attendre pendant des heures dans la salle des urgences ou rentrer chez nous désespérés parce que notre cas n’est pas jugé prioritaire. —Frank Dyck[448]
10.2.1 Trouver un endroit où l’on peut s’identifier à d’autres
Selon les personnes ayant une maladie mentale, l’aspect le plus pénible de leur situation découle non de la maladie elle-même, mais de la façon dont les autres les traitent. Les préjugés et la discrimination prennent de multiples formes : mépris des droits, ostracisme, perte des amis, parfois même rejet par la famille et, dans beaucoup de cas, perte du logement et de l’emploi. Quelque 34 p. 100 des participants aux consultations en ligne du Comité ont signalé qu’eux-mêmes ou d’autres gens qu’ils connaissaient avaient été renvoyés par un employeur ou avaient vu rejeter leur demande d’emploi à cause d’une maladie mentale, tandis que 21 p. 100 ont dit qu’on avait refusé de leur louer un logement[449].
Si nous nous cassons une jambe, nous savons que nous devons aller à la salle des urgences. Mais si nous avons un accès de panique, si nous avons des pensées suicidaires, nous ne savons pas à qui nous adresser. On nous dit d’aller à la salle des urgences, mais si le personnel médical ne voit pas de blessures, il nous renvoie chez nous. —Anonyme
Les familles doivent elles aussi supporter le fardeau de la stigmatisation. Et, ce qui est pire, il arrive aux personnes ayant une maladie mentale et à leur famille d’intérioriser les attitudes négatives de la société et de se tenir elles-mêmes responsables de leur propre marginalisation. Les gens ayant une maladie mentale disent qu’ils doivent aussi affronter « les préjugés et la discrimination dans le système de santé mentale lui-même », ce système vers lequel ils se tournent pour obtenir de l’aide quand ils se sentent très vulnérables[450]. Lors de la consultation en ligne du Comité, 22 p. 100 des répondants ont signalé que le personnel médical avait manqué de respect à leur égard ou ne s’était pas soucié d’un trouble physique qu’ils avaient mentionné à cause de leur maladie mentale ou de leur toxicomanie[451]. La recherche révèle d’ailleurs — ce qui ne surprend pas — que deux tiers des personnes ayant une toxicomanie ou une maladie mentale n’essaient même pas d’obtenir de l’aide[452].
L’entraide et le soutien par les pairs compensent la stigmatisation en donnant aux gens une place où ils sont bien accueillis et se sentent en sécurité. Cela est particulièrement important dans le cas des groupes mal servis par le système traditionnel de santé mentale.
Depuis le début du programme... la majorité des clients ont choisi les cercles de guérison comme méthode de guérison. —Tarry Hewitt[453]
10.2.2 Compenser l’impuissance du rôle patient-usager
Le Comité a appris que le fait de tenir le rôle de patient ou d’usager est démoralisant en soi à cause de l’insistance sur la maladie et l’invalidité[454]. Le fait de dépendre de l’aide de personnes qui revendiquent une expertise exclusive et qui, par définition, sont en position de supériorité mine encore plus l’estime de soi de ceux et celles qu’on définit comme patient ou usager ainsi que leur capacité d’agir efficacement dans leur propre intérêt. Avec le temps, ils peuvent perdre tout espoir et sombrer dans la passivité : l’expérience leur a appris que personne ne s’intéresse à leur point de vue, qu’il y a des gens qui en savent autrement plus qu’eux et qu’il est plus facile (et parfois même plus sûr) de cesser de combattre et de laisser les autres prendre les décisions.
Il est très difficile de faire fi de ce type de commentaire ou de se dire que c’est l’opinion d’une seule personne lorsqu’il s’agit de professionnels de la santé, et il est vraiment difficile de se tenir debout devant l’autorité et de dire : « J’en veux plus », en particulier... lorsqu’on est un malade mental... —Helen Hook[455]
10.2.3 Trouver l’espoir dans un océan de désespoir
Les personnes ayant une maladie mentale se font souvent dire qu'elles ne pourront pas terminer leurs études et ne pourront jamais garder un emploi. Pendant des années, les chercheurs sont parvenus à la conclusion que la maladie mentale implique une chute inexorable aussi bien du point de vue fonctionnel que sur le plan du statut social. Le pronostic était sombre : invalidité permanente, isolement et pauvreté.
Les opinions des personnes ayant une maladie mentale sont souvent réinterprétées comme des manifestations de déni ou comme des « éléments de la maladie », ce qui les prive de tout rôle crédible dans leur propre traitement et dans les décisions touchant leur vie. Des étiquettes péjoratives telles que récalcitrant, manipulateur, difficile à diriger, difficile à servir, recherche l’attention ou intervient de façon intempestive (dans le cas des membres de la famille) ont discrédité ceux qui cherchaient à s’affirmer et ont contribué encore plus à les réduire au silence.
Les personnes ayant une maladie mentale disent que lorsqu’elles expriment de saines émotions comme la tristesse, la peur ou la colère, on leur répond souvent à coups de médicaments ou de traitements[456]. Les éléments humains de croissance et de plaisir sont transformés en interventions thérapeutiques : bibliothérapie, thérapie par l’art, par la musique, par l’horticulture, thérapie axée sur les relations interpersonnelles ou sur les réseaux sociaux, etc. Ces interventions sont sans doute utiles, mais elles constituent des relations établies par l’intermédiaire de professionnels qui assimilent des activités normales à des traitements.
Ceux qui sont actuellement jugés incapables de travailler ont droit à des prestations mensuelles, à des médicaments subventionnés, s’ils ont de la chance, à un logement subventionné et à l’appui d’un réseau de professionnels de la santé et de programmes gratuits. Bien des gens se sentent pris au piège et n’ont pas la motivation de dresser et d’exécuter un plan leur permettant de mettre fin à ce cercle vicieux de l’impuissance. —Raymond Cheng[457]
10.2.4 Une forme d’usurpation de l’identité
On demande aux gens ayant une maladie mentale d’accepter leur diagnostic et d’analyser leur maladie et leur invalidité, au point où ils ont l’impression que leur identité — comme parent, frère ou sœur, employé, étudiant, athlète, artiste ou simplement individu — a été oblitérée ou sérieusement diminuée. Ils sont qualifiés de toxicomanes, de schizophrènes ou de dépressifs. Ils sont en fait assimilés à leur maladie[458].
Certains ont l’impression que leur personnalité a été envahie, conquise et colonisée, un peu de la même façon que les pays sont soumis et occupés par une puissance étrangère.
10.2.5 Recouvrer sa propre histoire
Les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille doivent souvent répéter sans fin leur histoire à une succession de professionnels qui ne semblent pas se parler les uns aux autres[459]. Il leur arrive même de perdre le contrôle de ce qu’ils ont vécu. Beaucoup ont l’impression que la réinterprétation de leur expérience dans le langage peu familier de la médecine ou de la réadaptation décrit mal la réalité personnelle de cette expérience. Ces « traductions » peuvent faire abstraction du contexte de leur vie en se concentrant sur leur état plutôt qu’en reconnaissant ce qui va mal dans leur situation[460]. Les expériences de sévices, de racisme, d’oppression, de marginalisation, d’homophobie, de sexisme, de traumatismes de l’enfance, de relations violentes, de perte et de deuil, de pauvreté, d’intimidation, de chômage et d’autres circonstances stressantes de la vie peuvent être omises dans la « traduction » ou, si elles s’y retrouvent, ne pas donner lieu à des interventions en tenant compte. Les facteurs positifs, comme une famille compréhensive, un talent particulier ou le dévouement à la culture et à la collectivité, peuvent aussi être noyés dans une « traduction » trop étroitement axée sur l’évaluation, le diagnostic et les médicaments.
Dans l’exercice de mes fonctions, j’entends des histoires de sévices et d’abus, tels qu’elles ont été perçues par les patients. Je ressens alors toute la force de leur colère devant la manière dont ils ont été traités. —Ron Carten[461]
PROFIL The Dream Team (
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10.2.6 Répondre aux besoins d’information
Des renseignements exacts et complets sur la santé et les services sont essentiels pour jouer le rôle de partenaire à part entière dans son propre traitement ou celui d’un proche. Des personnes ayant une maladie mentale et des membres de leur famille ont dit au Comité qu’ils n’ont même pas accès aux renseignements les plus élémentaires. Par exemple, 33 p. 100 des participants à la consultation en ligne du Comité ont déclaré qu’il est possible d’améliorer les services simplement en offrant plus d’information[462]. De plus, 66 p. 100 des membres de la famille ont dit que l’information constituait un besoin pressant.
Que signifie un diagnostic de maladie mentale? Quels sont les effets des médicaments? Où puis-je obtenir des services communautaires? Où est-il possible de trouver de l’aide pour un proche toxicomane? Quels sont mes droits?
Des professionnels surchargés de travail peuvent soit donner des réponses très laconiques soit communiquer d’une façon difficile à comprendre. Les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille croient donc que rien ne peut remplacer les conversations avec des pairs et les échanges d’informations entre ceux « qui ont déjà connu ça ».
... si vous avez un problème de santé, adressez-vous à un groupe d’entraide. Vous allez être bien renseigné, car les membres de ces groupes sont des accros de l’information. Ils passent leur temps à naviguer sur le Net en vue de trouver des renseignements sur la façon de se soigner et de guérir. Les groupes d’entraide fournissent un soutien psychologique et des conseils pratiques. Ce sont des motivateurs. Ils disent, « Si je l’ai fait, vous pouvez le faire aussi. » Que peut-on faire d’autre quand on est désespéré? Ce genre d’aide ne se trouve nulle part ailleurs. —Linda Bayers[463]
Le Comité recommande par conséquent :
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Que soient mis en place des programmes permettant de développer des capacités de leadership parmi les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille. Que le Centre d’échange des connaissances (voir le Chapitre 16) contribue à cette entreprise en facilitant l’accès électronique à l’information et à l’assistance technique à l’intention des personnes ayant une maladie mentale et des membres de leur famille. |
10.2.7 Être entendus
10.2.8 Trouver la voie de la guérison
Le concept encourageant et optimiste du rétablissement[464] est né du mouvement des usagers qui réagissaient aux expériences négatives connues dans le système officiel de santé mentale et de traitement de la toxicomanie. Se fondant sur une connaissance expérientielle chèrement acquise au cours de leurs propres combats, les personnes ayant une maladie mentale ont lancé un nouveau dialogue qui a commencé à influer sur la politique gouvernementale et qui se manifeste petit à petit dans la littérature professionnelle. Les groupes d’entraide et de soutien par les pairs sont les incubateurs du rétablissement individuel et représentent la clé d’une vaste acceptation du rétablissement, comme principe directeur de tout ce qui se produit dans le système officiel.
10.2.9 Récapitulation
10.3 L’ENTRAIDE ET LE SOUTIEN PAR LES PAIRS AU CANADA
L’entraide, c’est des gens qui en aident d’autres, c’est « ceux qui ont connu ça » qui échangent l’expérience commune d’événements ayant transformé leur vie. Le premier avantage de l’entraide, c’est le sentiment d’appartenance, « le grand soulagement qu’on ressent quand on sait qu’on n’est pas seul[465] ». Au Canada, l’entraide et le soutien des pairs ont évolué de trois façons différentes.
10.3.1 Organisations bénévoles
Les organisations d’entraide ne reçoivent généralement pas de financement officiel. Les membres définissent eux-mêmes la façon dont ils s’aident et se soutiennent mutuellement. L’entraide se fonde sur un principe de base : tous les membres sont égaux, ils sont tous des experts de leur propre vie, personne n’en sait plus que les autres et personne ne connaît toutes les solutions[466]. Les expériences individuelles de la vie constituent la « base de connaissances ». L’encouragement et l’espoir sont les « méthodologies » qui ouvrent la voie à l’habilitation et à la guérison.
Qu’est-ce que le soutien des pairs? Ce sont des groupes de personnes qui ont été en contact avec le réseau de la santé mentale et qui se réunissent régulièrement dans un environnement sûr et confortable pour évoquer leur expérience, pour faire preuve d’empathie et pour prendre le temps de se comprendre. —Raymond Cheng[467]
Le soutien par les pairs est également une forme d’entraide qui comprend des relations individuelles entre des gens qui ont connu des expériences semblables. Comme l’entraide, c’est un système « qui consiste à donner et à recevoir de l’aide, sur la base des principes fondamentaux du respect, de la responsabilité partagée et d’une entente mutuelle sur ce qui est utile[468] ».
Les pairs se voient mutuellement comme des personnes ayant une histoire à raconter plutôt que comme des « patients » ou des « cas » à gérer[469]. Ils peuvent être allés plus loin sur la voie de la guérison que ceux qu’ils aident, mais le caractère mutuel de l’expérience est toujours primordial. Ils consacrent du temps aux personnes qui viennent d’apprendre qu’elles ont une maladie mentale, qui viennent de sortir de l’hôpital ou qui sont en pleine crise. Ils offrent des renseignements, des ressources et le réconfort qui vient du récit de leur propre expérience.
Pour se préparer à leur rôle, les pairs ont probablement assisté à des séances d’orientation ou à des programmes de formation pour se doter de renseignements de base sur la façon de se rendre le plus utiles, mais ce sont surtout des bénévoles qui consacrent une part de leur temps à d’autres en espérant faciliter ainsi leur périple.
Nous insistons pour dire que nous ne sommes pas des professionnels; nous sommes des personnes qui ont perdu un être cher qui s’est suicidé. Par notre propre histoire, nous aidons d’autres personnes à partager leur douleur et à trouver le chemin de la guérison. —George Tomie[470]
10.3.2 Soutien rémunéré des pairs
Certains travailleurs de soutien des pairs sont des paraprofessionnels employés par des fournisseurs de services du système traditionnel de santé mentale et de traitement de la toxicomanie (hôpitaux ou établissements communautaires), dans le cadre d’équipes de traitement communautaire dynamique (TCD) ou de programmes de consultation externes. D’autres travaillent dans des environnements communautaires non médicaux, à titre d’employés engagés sur la base d’une expérience vécue les ayant préparés à faire ce travail plutôt qu’en fonction de connaissances et de titres professionnels.
Les travailleurs de soutien des pairs portent de nombreux titres : défenseur, conseiller ou tuteur des pairs, gestionnaire de cas d’aide, navigateur de système, conseiller des consommateurs ou encore travailleur d’approche des pairs (www.mentalhealthconsumer.net), la variété n’étant limitée que par l’imagination. Contrairement aux bénévoles, ces travailleurs ont reçu une formation pour jouer leur rôle. Beaucoup de programmes de soutien des pairs comprennent des travailleurs comme membres d’équipes volantes de crise et comme membres du personnel de foyers d’hébergement. Ces programmes ont été établis pour réagir à des crises psychiatriques hors du milieu hospitalier[471].
PROFIL Le Gerstein Centre est un centre de crise non médial ouvert 24 heures sur 24 dans le centre-ville de Toronto. Il engage des gens sur la base d’expériences vécues pour former des équipes volantes de crise et donner des soins de courte durée dans des foyers d’hébergement et des consultations téléphoniques d’urgence. Sa philosophie: environnement et soutien individualisés, adaptés aux besoins et aux vœux des utilisateurs, respectueux de leur autonomie, de leur dignité et de leurs capacités. Le plus ancien des programmes canadiens de ce type, le Gerstein Centre célèbre cette année son 15e anniversaire. |
10.3.3 Emploi de travailleurs rémunérés de soutien des pairs dans des organisations autonomes d’aide aux usagers et aux familles
En 1991, le gouvernement de l’Ontario a lancé l’Initiative d’élaboration de programmes pour les consommateurs et les survivants et l’a dotée d’un budget initial de 3,1 millions de dollars (aujourd’hui 4,5 millions). Ce programme est depuis devenu l’Initiative ontarienne de développement favorisant l’aide entre pairs, dont le principe de base est le soutien des pairs.
Les organisations financées ne devaient pas dispenser de services tels que les conseils ou la gestion de cas, comme les organisations professionnelles, mais s’appuyer plutôt sur la culture de mutualité et les connaissances expérientielles qui constituent la base de l’entraide. Les initiatives usagers-survivants qui en ont résulté emploient des pairs dans des rôles qui comprennent le développement économique ou communautaire, le soutien individuel entre pairs, les activités sociales, l’éducation des pairs, la défense des intérêts et les communications sur Internet.
PROFIL L’Initiative ontarienne de développement favorisant l’aide entre pairs (www.opdi.org)ou OPDI a succédé à l’Initiative de développement des consommateurs-survivants en réponse au besoin d’assistance technique exprimé par les initiatives consommateurs-survivants. L’organisation offre de l’aide pour la constitution de conseils d’administration, le développement organisationnel, le règlement des différends ainsi que pour l’accroissement du nombre de membres et le développement des ressources. |
10.3.4 Récapitulation
Au Canada, comme ailleurs, les programmes d’entraide et de soutien des pairs se sont développés d’une façon ponctuelle, selon les besoins. Bien que certains aient été financés par les gouvernements, la plupart sont autonomes, fonctionnant avec des budgets très limités et se débattant pour survivre. Mais ces programmes survivent malgré tout, grâce à la passion, à l’engagement et au dévouement de leurs membres. Le soutien rémunéré des pairs a fait son apparition dans des secteurs isolés, avec l’appui financier des provinces et des territoires. À titre de complément nouveau et fragile du système de santé mentale et de traitement de la toxicomanie, les programmes d’entraide et de soutien des pairs ont un avenir assez incertain.
Nous pensons que le groupe de fournisseurs de services le plus important, ce sont les familles, et que les groupes d’entraide constituent un soutien important pour les personnes qui souffrent d’une maladie mentale. Au Manitoba, l’efficacité des groupes d’entraide est éprouvée. Ce sont des alliés des professionnels en santé mentale pour les malades et leur famille.
Les groupes d’entraide doivent continuer de faire partie du système et de consacrer du temps à aider leurs membres, plutôt que d’investir temps et ressources pour la collecte de fonds. On devrait leur confier la responsabilité de dispenser les services. On doit protéger leurs approches individuelles. —Annette Osted[472]
Le Comité reconnaît la valeur des organisations d’entraide et de soutien des pairs. Il est conscient des difficultés financières auxquelles beaucoup d’entre elles sont confrontées, partout dans le pays. Le Comité recommande par conséquent :
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Qu’un financement soit établi par le truchement du Fonds de transition en santé mentale (voir le Chapitre 16) avec pour objectif précis : · d’accroître le nombre de travailleurs rémunérés de soutien des pairs dans les organisations communautaires de santé mentale; · de fournir un financement stable pour renforcer les initiatives existantes de développement favorisant l’entraide, en lancer des nouvelles (y compris les groupes familiaux) et bâtir un réseau d’initiatives d’entraide et de soutien des pairs couvrant tout le pays. Que le gouvernement fédéral donne l’exemple, en développant les programmes innovateurs tels que le Programme national de soutien par les pairs à l’intention des membres actuels des Forces canadiennes et des anciens militaires, et appuie grâce à des niveaux de financement suffisants des programmes d’entraide et de soutien des pairs destinés à la clientèle relevant de la compétence fédérale. |
10.4 RECHERCHE SUR L’ENTRAIDE ET LE SOUTIEN DES PAIRS
D’après les témoignages des personnes ayant une maladie mentale et des membres de leur famille, l’entraide et le soutien des pairs sont efficaces et peuvent, dans de nombreux cas, sauver des vies.
Je n’éprouve aucune honte. Je dois ma vie au SSVSO (Projet de soutien social aux victimes de stress opérationnel). —Caporal Clemett[473]
Des études évaluant l’efficacité de l’entraide et du soutien des pairs commencent à paraître. La documentation qui existe en ce moment tend à être descriptive ou présente les résultats de sondages sur la satisfaction des membres[474]. Toutefois, aux États-Unis, de nouvelles recherches documentent les résultats des programmes de soutien par les pairs[475] tandis qu’au Canada, quelques études récentes se distinguent par leur rigueur scientifique.
Nelson et ses collaborateurs ont examiné quatre initiatives ontariennes de soutien des usagers qui ont permis d’organiser des rencontres de formation, des occasions de défense d’intérêts et des réseaux sociaux, parallèlement au soutien par les pairs[476]. Lorsque des membres s’inscrivaient à ces groupes de soutien, près de 40 p. 100 d’entre eux n’avaient pas un logement stable, un tiers avaient dû être hospitalisés dans les neuf mois précédents et 25 p. 100 ressentaient la détresse des symptômes psychiatriques. Après 18 mois, le nombre d’hospitalisations et de visites dans les salles d’urgence avait baissé par rapport à un groupe témoin de non-membres. Les membres étaient plus nombreux à avoir un logement stable, manifestaient moins de symptômes et ont signalé qu’ils avaient noué davantage de liens d’amitié, ce qui avait entraîné une amélioration générale de leur qualité de vie. Les données qualitatives montraient que les membres appréciaient le soutien des pairs et se réjouissaient d’avoir un endroit sûr pour se rétablir et s’épanouir à l’abri des jugements négatifs de la société et de l’indifférence de leur collectivité.
Forchuk a étudié les économies attribuables au soutien par les pairs[477]. En utilisant un plan d’enquête aléatoire, elle a examiné les expériences de 390 patients de 26 hôpitaux du sud-ouest de l’Ontario. Elle a constaté que le soutien par les pairs, allié au suivi en établissement jusqu’à ce que le malade sortant soit mis en contact avec des services communautaires, avait permis d’économiser dans une année 12 millions de dollars en frais d’hospitalisation. « Le traitement d’une seule personne suffirait pour payer un coordonnateur bénévole à temps partiel grâce à la réduction des coûts d’hospitalisation et de salle des urgences. »
Une étude des initiatives usagers-survivants, également en Ontario, a révélé qu’avec le soutien des pairs, les membres recouraient moins souvent aux services de santé mentale (les jours d’hospitalisation ayant baissé de 38,36 à 4,29 et les contacts en cas de crise, de 3,54 à 0,81). Les membres avaient également réussi à renforcer leurs appuis sociaux et communautaires[478].
Compte tenu de ces conclusions, le Comité recommande :
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Que des recherches soient entreprises pour : · quantifier les avantages de l’entraide et du soutien par les pairs pour les participants; · déterminer les économies que le système des soins de santé peut réaliser grâce à des initiatives de soutien par les pairs. Qu’une partie de ces économies soit affectée au financement d’initiatives d’entraide et de soutien par les pairs. |
À part la recherche sur les résultats, d’importants efforts ont été déployés au Canada pour déterminer de quelle façon les connaissances des usagers et de leur famille peuvent influer sur les décisions relatives au traitement clinique, au service communautaire et aux politiques gouvernementales. Dans un important remaniement du document du cadre de soutien de l’Association canadienne pour la santé mentale[479], les auteurs évoquent une idée, qu’ils appellent la base de ressources du savoir, qu’ils estiment essentielle à l’avancement de la compréhension de la santé mentale, des maladies mentales et des toxicomanies. À part les sources traditionnelles de connaissances, comprenant les preuves tirées des sciences sociales (comme les études de résultats mentionnés ci-dessus) et les connaissances médicales et cliniques (études sur les fonctions cérébrales, par exemple), la base de ressources du savoir comprendrait en outre des connaissances expérientielles (la compréhension vécue au jour le jour de la maladie qu’offrent les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille) ainsi que la sagesse découlant des coutumes, de la tradition et de l’histoire (valorisation de la diversité et autres moyens de guérison).
Les familles ont également besoin de soutien par les pairs pour être en mesure de s’entraider, de contribuer à l’orientation du système et de défendre les intérêts de leurs proches.
Nous pourrions mieux nous aider les uns les autres
si nous disposions de ressources financières parce que beaucoup de gens vivent
aussi dans la pauvreté ou ont un revenu très limité. Les transports, les
communications par téléphone ou par Internet sont souvent hors de leur portée.
—Anonyme
10.4.1 Récapitulation
La recherche axée sur l’entraide et le soutien par les pairs est relativement récente, mais les conclusions sont prometteuses. Les théories sur lesquelles se fondent les quelques études déjà réalisées et les méthodologies employées sont en train d’étendre l’horizon de la recherche d’une manière aussi nouvelle qu’innovatrice.
Fait important, les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille participent à la formulation des questions, de même qu’à la collecte et à l’analyse des données et à la diffusion des résultats. De telles pratiques de transfert des connaissances permettent à la santé mentale et au traitement de la toxicomanie de prendre une orientation nouvelle et prometteuse.
Le travail conceptuel, dont témoigne par exemple la nouvelle édition du cadre de soutien, ouvre la voie à de grandes perspectives comprenant la participation des usagers et de leur famille et valorisant leur rôle dans l’obtention de nouvelles connaissances.
Le Comité recommande par conséquent :
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Que les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) appuient la recherche sur l’entraide et le soutien par les pairs et, pour retenir les projets de recherche à financer, adoptent un processus d’examen qui favorise et encourage les méthodologies fondées sur la participation que les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille préfèrent et trouvent efficaces. |
10.5 NOUVELLES VOIX
L’entraide et le soutien par les pairs, même s’ils constituent un complément opportun à l’ensemble des traitements et des services communautaires existants, représentent de bien des façons un défi pour la pensée traditionnelle. Les personnes ayant une maladie mentale ont leur propre point de vue sur les causes et le traitement de la maladie mentale et des toxicomanies. Les familles parlent du manque d’accès aux services, de leur exclusion du traitement de leur proche et du refus par les gouvernements de faire adopter des lois permettant d’imposer des traitements[480].
10.5.1 Prestation des services
Parmi les participants à la consultation en ligne du Comité, 41 p. 100 ont dit avoir eu des expériences négatives avec les fournisseurs de services[481] : 33 p. 100 ont fait état du manque de respect comme étant leur pire expérience, tandis que d’autres ont parlé de mauvais diagnostics et de mauvais traitements (22 p. 100), de retards dans le traitement (20 p. 100), de violence physique (16 p. 100), de privation de traitement (14 p. 100) et d’hospitalisation forcée (10 p. 100). Au cours de la deuxième phase de la consultation, les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leurs familles ont également fait la distinction entre la disponibilité des services (difficiles à trouver) et leur accessibilité (les services existent, mais il y a trop d’obstacles à surmonter pour y avoir accès)[482].
Si elles admettent l’importance de l’apport des professionnels, les personnes atteintes d’une maladie mentale ont néanmoins souvent l’impression que ceux-ci ne sont pas vraiment à l’écoute et ne les traitent pas de manière globale; leur vie devient alors une série de problèmes ponctuels pris en charge de manière étroite en fonction seulement des impératifs des diverses spécialités professionnelles. Elles ont aussi souvent le sentiment d’être des « objets » que l’on « gère » et non des êtres humains ayant une véritable relation avec les professionnels de la santé auxquels elles s’adressent.
La sécurité assurée par les groupes d’entraide a permis aux gens de s’exprimer librement et de publier leur point de vue. Leurs expériences personnelles donnent plus de force à leurs récits. De ce fait, les professionnels, les décideurs, les administrateurs et le public sont mis au défi de modifier leur opinion traditionnelle sur les personnes ayant une maladie mentale ou une toxicomanie et sur la façon dont les services conçus pour répondre à leurs besoins sont structurés et dispensés.
Nous avons fait la sourde oreille, nous nous sommes entêtés, nous n’avons pas écouté les sceptiques et 18 ans plus tard, me voici, c’est un concept qui a été accepté. Donc, à cet égard, la situation s’est améliorée car on a enfin reconnu que les clients de services de santé mentale peuvent faire les choses eux-mêmes, pour eux-mêmes et prendre leurs propres initiatives. —Eugene LeBlanc[483]
10.5.2 Rétablissement
Au lieu d’évoquer les diagnostics, les symptômes, les schémas de financement, le recours aux services et le fardeau économique, les personnes ayant une maladie mentale préfèrent parler d’espoir, de rétablissement, de contacts, de récits, de voyage vers la guérison, d’attention affectionnée, de dignité, d’amis, de spiritualité, d’habilitation et de pouvoir transformateur des crises[484]. Ce sont là des idées complexes qui se prêtent difficilement à la mesure et à la gestion, qui s’inscrivent mal dans un système axé sur les procédures normalisées, les mesures comptables uniformes et les pratiques exemplaires homogènes fondées sur des faits.
Les familles, tout en s’accommodant mieux de la psychiatrie et des médicaments que ceux qui subissent les traitements, préconisent aussi la prestation de services extérieurs au cercle médical de soins, comme un logement abordable, le soutien du revenu et le travail.
L’accent est mis sur le bien-être et non pas sur la maladie, sur les aptitudes et non les incapacités, sur l’acceptation de ses limites plutôt que de vivre diminué à l’intérieur du carcan de ses limites, de se concentrer sur le début du processus de rétablissement au lieu de rester stagnant, prisonnier de sa détresse. —Joan Edwards-Karmazyn[485]
Malgré l’importance croissante de leur rôle, les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille n’ont pas en général l’impression d’être entendus. Il y a d’ailleurs des raisons de croire qu’ils ne le sont pas[486]. Même s’il est vrai que le rétablissement, comme concept déterminant, a commencé à apparaître dans la littérature de la santé mentale (il est beaucoup plus courant dans le domaine des toxicomanies), son potentiel révolutionnaire est mal compris et n’a pas généralement été pris en compte.
10.5.3 Récapitulation
Les nouvelles opinions ne sont souvent pas prises au sérieux parce que ceux qui les avancent peuvent exprimer des points de vue quelque peu divergents. Ils peuvent ne pas s’entendre entre eux, et le langage qu’ils utilisent peut ne pas refléter les courants dominants. Toutefois, en ce qui concerne les personnes ayant une maladie mentale ou une toxicomanie et les membres de leur famille, ces voix disparates offrent la perspective d’un dialogue plus riche et plus nuancé entre l’ensemble des intervenants, de même qu’elles évoquent la possibilité de mesures améliorées de responsabilisation.
Les « usagers » du système canadien de santé mentale et de traitement de la toxicomanie disent qu’ils ne peuvent pas trouver de services quand ils en ont besoin et que lorsqu’ils ont la chance d’obtenir de l’aide, ils sont souvent insatisfaits des services qui leur sont dispensés. Ces critiques ne sont ni vagues ni infondées. Elles montrent d’une façon précise ce qui ne va pas. Cette précieuse information doit servir à améliorer le ciblage des investissements futurs du gouvernement et de la surveillance des résultats. Le Comité recommande par conséquent :
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Que les mesures de responsabilisation relatives aux services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie portent non seulement sur des questions de processus, comme le nombre de visites, les heures de consultation ou les sommes dépensées, mais aussi sur les résultats, comme le respect, la préservation de la dignité et l’insistance sur l’espoir et le rétablissement, car ce sont des aspects qui figurent parmi les principales préoccupations des personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille. |
10.6 CONTRADICTIONS ET DÉFIS
10.6.1 Travail rémunéré et bénévolat
Les groupes d’entraide et de soutien par les pairs se fondent sur l’indépendance, comme valeur fondamentale. Cela signifie que l’une des grandes raisons pour lesquelles leurs membres connaissent le succès et la satisfaction est qu’ils sont libres de fournir l’aide par leurs propres moyens, sans directives extérieures provenant de bailleurs de fond ou d’autres intervenants. Toutefois, le fait d’avoir un travail à faire est important et valorisant. Par conséquent, la possibilité d’une carrière rémunérée comme travailleur de soutien des pairs ou comme membre du personnel d’un programme financé d’entraide ou de soutien par les pairs peut constituer un objectif valable, vraiment digne d’être poursuivi.
Je veux cependant être claire : il ne faut pas que ces postes [de soutien par les pairs] restent symboliques. Ces postes méritent d’être rémunérés, et le salaire doit permettre de vivre; pas de survivre, de vivre [soulignement ajouté]. —Becky McFarlane[487]
La reconnaissance de l’entraide et du soutien par les pairs comme profession rémunérée ouvrira la porte à toutes sortes de possibilités susceptibles d’être très avantageuses : établissement de titres de compétences accessibles grâce à des études officielles, création de spécialités secondaires, formation d’associations et réglementation au moyen de codes d’éthique et de conseils de discipline. On courrait alors le risque de voir ces « structures » traditionnelles transformer l’entraide et le soutien par les pairs en quelque chose de différent, qui les priverait du motif fondamental de leur efficacité : la participation de leurs membres exclusivement en fonction de leurs expériences vécues.
10.6.2 Services financés (liés) et non financés (libres mais sans ressources)
Les exigences de responsabilisation qui accompagnent le financement par le gouvernement et par de nombreux autres organismes sont onéreuses. Le simple fait de remplir les demandes nécessite beaucoup de temps et de connaissances spécialisées. Les organismes traditionnels ont souvent des employés exclusivement chargés d’établir les rapports qu’exigent leurs bailleurs de fonds. Le fardeau de la collecte de données s’alourdit constamment, les responsables des programmes conventionnels ayant l’obligation de tenir des dossiers détaillés aussi bien sur support électronique que sur papier pour décrire les services offerts en fonction des dépenses, tout en se conformant aux mesures de sécurité et aux lois sur la protection des renseignements personnels. Compte tenu de leur nature, les groupes d’entraide et de soutien par les pairs ne demandent pas de renseignements médicaux privés, certains d’entre eux ne tenant même pas à connaître le nom et l’adresse des participants. Leur tradition est essentiellement orale et leur activité la plus appréciée, qui consiste à raconter des histoires, défie toute conversion en éléments de données.
Beaucoup de groupes bien connus d’entraide et de soutien par les pairs offrent des services efficaces sans financement externe (AA étant l’exemple le plus connu). Il y a cependant de nombreux exemples d’organisations d’entraide qui sollicitent des fonds, reçoivent des subventions gouvernementales et cherchent à obtenir des dons de sources privées.
Toutefois, la plupart s’accommodent en permanence d’un budget très minime et n’ont pas les moyens de lancer les initiatives dont leurs membres ont besoin ou d’être présentes lors des importantes rencontres de décision. Beaucoup de ces organisations ont de la difficulté à obtenir des fonds parce qu’elles contestent le système même par lequel passe l’argent. Certaines décident de ne pas solliciter d’argent du gouvernement, craignant d’être soumises à des contraintes pouvant changer leur façon de procéder. Quelles que soient les raisons, le manque de financement contribue souvent à la marginalisation des groupes d’entraide et de soutien par les pairs, dont la voix, qu’ils soient financés ou non, est alors noyée sous la marée des intérêts professionnels.
Toutes ces initiatives ont une chose en commun : elles sont sous-estimées, mal financées et, parce qu’elles ne s’inscrivent pas dans le cadre culturel prévalant des services cliniques et syndiqués, elles ne sont pas prioritaires pour les gouvernements qui les considèrent souvent comme un rajout de dernière minute. À bien des égards, le système de santé mentale est constitué de mesures purement symboliques. —Eugene LeBlanc[488]
10.6.3 Les limites de la recherche sur les pratiques exemplaires
Les concepts tels que les pratiques exemplaires n’ont pas bien servi les groupes d’entraide et de soutien par les pairs. L’approche des modèles — de programmes, de pratiques, de logique ou d’évaluation — qui est courante parmi les professionnels se prête mal au caractère informel de la culture d’entraide. À cause de ce facteur, peu d’études ont été réalisées sur les avantages de l’entraide et du soutien par les pairs. Par ailleurs, comme la recherche traditionnelle a eu tendance à faire abstraction du point de vue des gens ayant une expérience directe de la maladie mentale, elle s’est coupée d’une source d’information nécessaire à l’évaluation des résultats des interventions en santé mentale.
Comme beaucoup de groupes marginalisés, les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille ont de bonnes raisons de se méfier de la plupart des méthodes traditionnelles de recherche et de préférer les méthodes non traditionnelles, comme la recherche participative, ou sous-utilisées, comme les méthodes qualitatives. Toutefois, avec l’augmentation du financement gouvernemental, certains groupes tentent de définir des pratiques exemplaires, dans l’espoir qu’en adoptant les méthodes de la culture professionnelle, ils gagneront le respect des autres et auront de meilleures chances d’obtenir du financement.
L’efficacité de l’effort autonome et des groupes de soutien dans le rétablissement a été très bien documentée... Le soutien financier pour la promotion et le financement de ces initiatives importantes est urgent. Le mouvement d’entraide prend de l’ampleur, mais il pourrait le faire beaucoup plus rapidement. —Susan Kilbridge-Roper[489]
10.6.4 Récapitulation
Il n’y a pas de doute que des tensions existent entre le caractère informel de l’entraide et du soutien par les pairs et le caractère formel des méthodes de recherche et de la littérature des professionnels de la santé. Compte tenu de questions telles que les suivantes :
§ Les programmes de soutien dirigés par les pairs peuvent-ils et devraient-ils être classés, évalués et compris en fonction des mêmes critères que les services dispensés par le système traditionnel de santé mentale?
§ La normalisation des services doit-elle prendre le pas sur le lien curatif caractérisant les relations entre pairs, les transformant en unités de temps facturables[490]?
Il est très probable que les programmes de soutien par les pairs ne pourront pas atteindre leur plein potentiel s’ils ne sont pas couverts par des mécanismes d’agrément et de responsabilisation. Par conséquent, le Comité recommande :
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Que les exigences en matière de responsabilisation établies pour les groupes d’entraide et de soutien par les pairs ne soient pas exagérément contraignantes et que l’on fasse en sorte que ces groupes puissent y répondre. Que des procédures d’agrément et d’accréditation des initiatives d’entraide et de soutien par les pairs, dirigées par les usagers et les familles, soient élaborées et financées pour assurer la qualité et appuyer la contribution unique de ces initiatives. |
10.7 MAINTENIR ET PROTÉGER
Tandis que les organisations traditionnelles affirment qu’un manque de fonds les empêche d’être efficaces, les groupes marginalisés entendent souvent dire le contraire : un financement extérieur risque de les détourner de leur mission. Les personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille ont durement combattu sur la scène de la maladie mentale et de la toxicomanie, avançant difficilement d’un pas à la fois et contribuant ainsi très sensiblement à la façon dont nous envisageons la maladie mentale et la toxicomanie. L’idéal du rétablissement est attribuable à leur action, de même que la réorientation du traitement, du soutien et des services vers le but du rétablissement.
Comment pouvons-nous conjuguer jour et nuit avec une maladie mentale? N’est-il pas normal de parler à des personnes qui vivent la même situation? Je trouve que ça l’est. —Linda Bayers[491]
Il y a certes des contradictions et des désaccords entre les personnes et les familles touchées par la maladie mentale et la toxicomanie, mais cela n’a rien d’extraordinaire. Il est également vrai que les capacités et les attributs nécessaires pour surmonter une maladie mentale ou une toxicomanie — ou, dans le cas d’un membre de la famille, pour s’aider soi-même, soutenir un proche et naviguer dans le système — ne sont pas les mêmes que celles qu’il faut pour diriger une organisation complexe sans but lucratif. Quoi qu’il en soit, l’éducation des professionnels de la santé ne comprend pas grand-chose en matière d’administration ou de gestion. Ordinairement, du moins dans les professions de la santé, ces compétences s’acquièrent sur le tas.
Pendant des décennies, les organisations professionnelles ont obtenu un financement assez considérable. Elles ont bâti une infrastructure (ordinateurs, logiciels et employés spécialisés en finances et en informatique) pour satisfaire aux exigences de responsabilisation. Les organisations d’entraide et de soutien par les pairs créées par les usagers et les membres de leur famille doivent commencer pratiquement à zéro, n’ayant reçu par le passé que peu ou pas de fonds extérieurs.
Les groupes d’entraide et de soutien par les pairs (de même que la recherche les visant particulièrement) affirment que les solutions qu’ils offrent aux personnes ayant une maladie mentale ou une toxicomanie et aux membres de leur famille sont plus efficaces et économiques que les services professionnels. Cette assertion est difficile à contester, étant donné que ces groupes offrent une aide gratuite ou d’un coût très minime. Il est à craindre, si ces groupes sont dispensés de l’obligation de se conformer à des procédures normalisées de responsabilisation à cause de leur manque d’infrastructure, qu’ils ne s’embourbent encore plus profondément dans un rôle de parents pauvres qui les maintiendrait à l’écart des cercles du pouvoir réel où se prennent les décisions importantes.
Pour ceux qui pensent que ces appréhensions sont futiles, nous ferons remarquer que la stratégie australienne de santé mentale, louée dans les milieux internationaux pour son insistance sur la participation des usagers et de leur famille et sur ses valeurs d’espoir et de rétablissement, a été confrontée à de graves difficultés lors de sa mise en œuvre. Par exemple, malgré l’excellence de son travail de renforcement des capacités, le National Resource Centre for Consumer Participation s’est vu retirer son financement en septembre 2004 et n’existe plus.
Le Comité croit que l’avantage qu’il y a à investir dans l’entraide et le soutien par les pairs pèse plus lourd que le risque d’une altération de cette culture par suite d’effets négatifs imprévisibles. L’essentiel est d’assurer l’équilibre entre l’appui financier, l’indépendance et la capacité de se conformer aux exigences nécessaires de responsabilisation.
L’essor du mouvement d’entraide dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie annonce un important changement dans les rapports de force traditionnels de notre système de soins. Avec un financement suffisant et régulier, allié à un engagement gouvernemental permanent, il sera possible d’en concrétiser tous les avantages.
Je crois que les initiatives d’entraide comme les projets usagers-survivants et beaucoup d’autres ressources d’entraide pour la santé mentale et la toxicomanie doivent être officiellement reconnues, à titre de solutions très efficaces et moins menaçantes que d’autres menant vers le rétablissement. Ces initiatives ont donc besoin d’un financement suffisant — et non honteusement insuffisant — pour l’excellent travail qu’elles permettent d’accomplir. —Anonyme.
Le Comité recommande par conséquent :
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Que les organisations existantes et nouvelles pour les usagers et leur famille soient financées à un niveau annuel durable. Que de vastes coalitions d’organisations d’entraide et de soutien par les pairs soient constituées et financées pour que les organisations cessent d’être isolées et puissent former des réseaux les unes avec les autres. |
Les différentes perspectives des personnes ayant une maladie mentale et les membres de leur famille sont très précieuces. Il importe d’appuyer leurs organisations grâce à un financement annuel stable et suffisant et de les inclure dans l’éducation publique et les activités de recherche et de transfert de connaissances, de façon à soutenir la croissance et le développement des structures et des capacités qui permettront à toutes les organisations qui dispensent des services aux personnes et aux familles touchées par la maladie mentale et la toxicomanie de fonctionner efficacement.
[298] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[299] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.1, p. 117.
[300] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[301] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[302] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[303] C. S. Dewa, A. Lesage, P. Goering et M. Caveen, (2004), document de discussion : « Nature and Prevalence of Mental Illness in the Workplace ». HealthcarePapers,vol. 5, no 2, p. 18 [traduction].
[304] Ibid., p. 20.
[305] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[306] M. Vézina, R. Bourbonnais, C. Brisson et L. Trudel (2004), document de discussion : « Workplace Prevention and Promotion Strategies »,HealthcarePapers,vol. 5, no 2, p. 34.
[307] Association des psychiatres du Canada (2005), La maladie mentale et le travail, http://www.cpa-apc.org/MIAW/pamphlets/Work_fr.asp.
[308] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[309] Voir chapitre 6, « Les enfants et les adolescents ».
[310] E.
Archambault, G. Cote et Y. Gingras (2003), « Bibliometric
Analysis of Research on Mental Health in the Workplace in
[311] E. Goldner, D. Bilsker, M. Gilbert, L. Myette, M. Corbiere et C. S. Dewa (2004), document de discussion : « Disability Management, Return to Work and Treatment », HealthcarePapers, vol. 5, no 2, p. 77 [traduction].
[312] Ibid., p. 86.
[313] A. H. Neufeldt (2004), document de discussion :« What Does It Take to Transform Mental Health Knowledge into Workplace Practice? Towards a Theory of Action », HealthcarePapers, vol. 5, no 2, p. 123, [traduction].
[314] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.1, p. 116. Voir aussi Dewa et al. (2004), p. 13.
[315] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.4, p.124.
[316] Dewa et al. (2004), p. 22, [traduction].
[317] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.3, p. 121.
[318] Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health (2006), « Employers Getting Started — The Road to Mental Health and Productivity, Module Trois: The Demographics and Distribution of Mental Illness: Mostly an Economic, Business and Labour Cost — Health Care Costs Less Than Productivity Loss ».
[319] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.3, p. 121.
[320] Dewa et al. (2004), p. 19, [traduction].
[321] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.3, p. 121
[322] Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health (2006), Module trois.
[323] Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health (2006), « Employers Getting Started — The Road to Mental Health and Productivity, Module deux: The Building Blocks of Productive Capacity in a Brain-Based Economy — Setting the Stage for Mental Health in the Workplace ».
[324] Ibid.
[325] Ibid. [traduction]
[326] Vézina et al. (2004), p. 39.
[327] Ibid., p. 34.
[328] Ibid., p. 36
[329] Ibid.
[330] Vézina et al. (2004), p. 39-40. [traduction]
[331] Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health (2004), Roundtable « Roadmap to Mental Disability Management ». [traduction]
[332] Neufeldt (2004).
[333] W. Gnam (2004), « Researcher Response: Research Priorities Are Critical ».HealthcarePapers, vol. 5, no 2, p. 91-94.
[334] A. Bender et S. Kennedy (2004), document de discussion : « Mental Health and Mental Illness in the Workplace: Diagnostic and Treatment Issues ». HealthcarePapers, vol. 5, no 2, p. 54-67.
[335] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.5.2, p. 135.
[336] Ibid., p. 135.
[337] G. Harnois et P. Gabriel (2000), Mental Health and Work: Impact, Issues and Good Practices, publication conjointe de l’Organisation mondiale de la santé et de l’Organisation internationale du travail, Genève, p. 19
[338] Mental Health Works, ACSM Ontario. http://www.mentalhealthworks.ca/index.asp.
[339] Cette section est largement inspirée de : Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, p. 134.
[340] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.5.1, p. 122.
[341] Neufeldt (2005).
[342] Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, section 6.5.1, p. 135.
[343] 5 juillet 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/25ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[344] J. Shankar etF. Collyer (2002), « Support needs of people with mental illness in vocational rehabilitation programs — the role of the social network ». International Journal of Psychosocial Rehabilitation,vol. 7, p. 15‑28.
[345] A. F. Lehman(1995),« Vocational Rehabilitation in Schizophrenia ». Schizophrenia Bulletin, vol. 21, no 4, p. 645-656.
[346] J. Marrone etM. Gold (1995),« Employment Supports for People with Mental Illness ». Psychiatric Services, vol. 46, no 7, p. 707-711.
[347] J. Marrone et E. Golowka (1999),« If Work Makes People Sick, What do Unemployment, Poverty and Social Isolation Cause? » Psychiatric Rehabilitation Journal, vol. 23, no 2.
[348] Ibid.
[349] G. R. Bond, R. E. Drake, K. T. Mueser et D. R. Becker (1997),« Supported employment for people with severe mental illness: A review ». Psychiatric Services, vol. 48, no 3, p. 335-346.
[350] R. Crowther,M. Marshall,G. Bond et P. Huxley « Vocational rehabilitation for people with severe mental illness ». The Cochrane Database of Systematic Reviews 2001, numéro 2,no d’article : CD003080. DOI: 10.1002/14651858.CD003080.
[351] Initiative ontarienne de développement favorisant l’aide entre les pairs (octobre 2003), The History of OPDI.http://www.opdi.org/about_us.html#history.
[352] K. Danley (1996), procès-verbal de la Conference on Psychological Disabilities in the Workplace.
[353] The National Mental Health Consumers Self-Help Clearing House.
[354] C. McReynolds (2002),« Psychiatric Rehabilitation: The Need for a Specialized Approach ». International Journal of Psychosocial Rehabilitation, vol. 7, p. 61-69. http://www.psychosocial.com/IJPR_7/approach.html.
[355] Clubhouse History. http://www.telusplanet.net/public/club1/history.html.
[356] Cette section est largement inspirée de : Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6, p. 127-129.
[357] 20 avril 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/13eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[358] Association
des psychiatres du
[359] Gouvernement de l’Ontario, ministère des Services sociaux et communautaires, « Qui est admissible au programme Ontario au travail? » http://www.cfcs.gov.on.ca/CFCS/fr/programs/IES/OntarioWorks/FAQs/OW-q-eligibility.htm.
[360] Gouvernement de l’Ontario, ministère des Services sociaux et communautaires, Manuel du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. http://www.cfcs.gov.on.ca/CFCS/fr/programs/IES/OntarioDisabilitySupportProgram/Publications/ODSP_handbook.htm.
[361] Gouvernement de Colombie-Britannique, Ministry of Employment and Income Assistance, BC Employment and Assistance Rate Tables — Disability Assistance — À compter du 1er janvier 2005. http://www.eia.gov.bc.ca/mhr/da.htm.
[362] Gouvernement de l’Ontario, Ministère des Services sociaux et communautaires, Manuel du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. http://www.cfcs.gov.on.ca/CFCS/fr/programs/IES/OntarioDisabilitySupportProgram/Publications/ODSP_handbook.htm.
[363] Gouvernement du Québec, Emploi et Solidarité sociale, Prestations de base. http://www.mess.gouv.qc.ca/securite-du-revenu/programmes-mesures/assistance-emploi/prestation-de-base.asp.
[364] Gouvernement de la Colombie-Britannique, Ministry of Employment and Income Assistance, Fact Sheet — Earnings Exemption for Persons With Disabilities. http://www.eia.gov.bc.ca/factsheets/2004/PWD_EarningsExemption.htm.
[365] Gouvernement de l’Ontario, ministère des Services sociaux et communautaires, Manuel du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées http://www.cfcs.gov.on.ca/CFCS/fr/programs/IES/OntarioDisabilitySupportProgram/Publications/ODSP_handbook.htm.
[366] Gouvernement du Québec, Emploi et Solidarité sociale, Prestations de base. http://www.mess.gouv.qc.ca/securite-du-revenu/programmes-mesures/assistance-emploi/prestation-de-base.asp..
[367] 14 juin 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/22eva-e.htm?Language=E&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[368] Cette section est largement inspirée de : Comitésénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (novembre 2004), Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 6.
[369] 31 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/16eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[370] Association canadienne pour la santé mentale (27 novembre 2001), exposé de principe sur les programmes fédéraux de sécurité du revenu présenté au Sous-comité de la condition des personnes handicapées. http://www.disabilitytax.ca/subs/cmha-f.pdf.
[371] /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/13evb-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[372] Développement des Ressources humaines Canada. Réponse du gouvernement du Canada au rapport intitulé « À l'écoute des Canadiens : une première vision de l'avenir du Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada », p.24.
[373] Les employeurs qui embauchent des personnes ayant une maladie mentale n’auraient pas à cotiser au RPC pour ces personnes pendant une période donnée.
[374] Dans son rapport de novembre 2004, chapitre 8, la vérificatrice générale faisait savoir que le surplus accumulé dans le compte de l’assurance-emploi s’élevait à 46 milliards de dollars. Voir : http://www.oag-bvg.gc.ca/domino/rapports.nsf/html/20041108cf.html
[375] Pour en savoir plus sur le crédit d’impôt pour personnes handicapées, voir : Agence du revenu du Canada, « Montant pour personnes handicapées ». http://www.cra-arc.gc.ca/agency/resourcekit/individuals/benefits-dtc-e.html.
[376] Par « activités courantes de la vie quotidiennes » on entend le fait de percevoir, de penser et de se souvenir, de se nourrir, de s’habiller, de parler de façon à se faire comprendre par une personne de sa connaissance dans un endroit calme, d’écouter de façon à comprendre une personne de sa connaissance dans un endroit calme, d’éliminer (fonctions vésicales ou intestinales) et de marcher.
[377] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[378] Dans
le chapitre, le terme « toxicomanie » est utilisé pour simplifier
[379] W. Skinner, C. O’Grady, C. Bartha et C. Parker, Les troubles concomitants de toxicomanie et de santé mentale : Guide d’information, Centre de toxicomanie et de santé mentale, Toronto, 2004.
[380] B. Rush, Concurrent Mental and Substance Use Disorders: Why Is Such “Double Trouble” So Important?, mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, p. 7 [traduction].
[381] T. Reghr (septembre 2005), mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, p. 2 [traduction].
[382] 6 juin 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/18eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[383] B. Strader, mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[384] Le tabac a lui aussi d’importantes conséquences négatives sur la santé.
[385] Tim Stockwell, Michel Perron, Greg Purvis et Jeff Wilbee, 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[386] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[387] Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies (mars 2005), Enquête sur les toxicomanies au Canada (ETC) — Une enquête nationale sur la consommation d’alcool et d’autres drogues par les Canadiens — La prévalence de l’usage et les méfaits. Voir : www.ccsa.ca.
[388] E. Single, L. Robson, X. Xiaodi et J. Rehm (1996), Les coûts de l’abus de substances au Canada. Voir : www.ccsa.ca.
[389] Santé
Canada. Santé des Premières nations et des Inuits (2004), Stratégies relatives à l’évaluation des programmes de lutte contre
l’abus des substances chez les Autochtones : Examen de
[390] Conseil canadien de la sécurité (2005), Les statistiques sur les accidents liés à l’alcool. Voir :
http://www.safety-council.org/CCS/sujet/route/alcool/stats.html.
[391] J. Rehm, et J. Weeks (2005), « Dépendance aux médicaments d’ordonnance », Toxicomanie au Canada : Enjeux et options actuels, Ottawa, Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies. Voir : http://www.ccsa.ca/CCSA/FR/Research/Policy_Activities/SubstanceAbuseinCanada.htm.
[392] Ibid.
[393] Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies et Centre de toxicomanie et de santé mentale (1999), Profil canadien : L’alcool, le tabac et les autres drogues. Voir : www.ccsa.ca.
[394] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[395] R. Simpson, mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[396]
[397] W. Skinner (septembre 2005), mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[399] Youth Gambling International (2004), Youth Problem Gambling. Voir : www.education.mcgill.ca.
[400] C. Brant (1993), « Le suicide chez les peuples autochtones canadiens : causes et prévention », Sur le chemin de la guérison, Rapport de la Table ronde nationale sur la santé et les questions sociales, Ottawa, Commission royale sur les peuples autochtones.
[401] B. Mussell, K. Cardiff et J. White (2004), The Mental Health and Well Being of Aboriginal Children and Youth: Guidance for New Approaches and Services. Voir : www.mheccu.ubc.ca.
[402] 14 juin 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/22eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[403] American Liver Foundation, Cirrhosis: Many Causes. Voir : http://www.liverfoundation.org/db/articles/1059.
[404] N. Bradley (septembre 2005), mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie [traduction].
[405] Ibid.
[406] C. Spencer (juin 2005), Alcohol and Seniors: Gambling Issues for Seniors — Links, Programs, Research and Resources. Voir : www.agingincanada.ca.
[407] C. Spencer (juin 2005), mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[408] Statistique Canada (2002), Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes ; santé mentale et bien-être. Voir : www.statcan.ca.
[409] C. Dowden (2003), L’efficacité du traitement de la toxicomanie chez les jeunes délinquants. Voir : www.canada.justice.gc.ca.
[410] Youth Gambling International (2004), Youth Problem Gambling. Voir : www.education.mcgill.ca.
[411] N. Trocme et al. (2005), Étude canadienne sur l’incidence des signalements de cas de violence et de négligence envers les enfants — 2003. Voir : www.phac-aspc.gc.ca/.
[412] 9 juin 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/21eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[413] En
2002-2003, les ventes d’alcool au Canada ont totalisé 15,4 milliards de
dollars, dont 12,6 milliards de dollars pour la vente de bière. Les taxes
sur l’alcool et le tabac représentent 2,5 p. cent de l’ensemble des
recettes fiscales. Source : G. Thomas (2004), Méfaits liés à l’alcool et politique régissant la consommation au
Canada. Voir : www.ccsa.ca. En 1999-2001, les recettes recueillies par le
gouvernement grâce au jeu dans l’ensemble du Canada étaient de 5,7 milliards de
dollars. Source :
[414]
[415] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[416] L’expression « diagnostic mixte » (dual diagnosis) est utilisée au Royaume-Uni et aux États-Unis.
[417] H. Stuart, au nom du Concurrent Disorders Champion Group (2002), Concurrent disorders: An Integrated Service Delivery Plan for Southeastern Ontario, présenté au Southeastern Ontario Mental Health Implementation Task Force et au Southeastern Ontario District Health Council.
[418] B. Rush, Concurrent Mental and Substance Use Disorders: Why Is Such “Double Trouble” So Important?, mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[419] J. Negrete (2003), Le traitement de la toxicomanie chez les personnes atteintes d’autres maladies psychiatriques, mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[420] Seule exception : les lignes directrices sur les pratiques exemplaires (Rush, 2002) recommandent de traiter d’abord la toxicomanie chez les personnes souffrant de troubles anxieux et de l’humeur — un traitement intégré est toutefois conseillé dans le cas du syndrome de stress post-traumatique.
[421] Centre de toxicomanie et de santé mentale (2002), Meilleures pratiques — Troubles concomitants de santé mentale et de toxicomanie. Voir : http://www.hc-sc.gc.ca/ahc-asc/pubs/drugs-drogues/bp_disorder-mp_concomitants/index_f.html.
[422]
[423] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28cv-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[424] G. Thomas (2005), Politiques et programmes de réduction des méfaits à l’intention des personnes ayant des démêlés avec le système de justice pénale, Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies. Voir : www.ccsa.ca.
[425] Ibid.
[426] Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies (février 2004), Foire aux questions sur les programmes d’échange de seringues (PES). Voir : www.ccsa.ca.
[427] Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies (juillet 2004), Foire aux questions sur les centres d’injection supervisés (CIS). Voir : www.ccsa.ca.
[428] La maison Seaton est un refuge pour hommes.
[429] P. Wysong (novembre 2002), « Homecare for the Homeless », Medical Post, vol. 38, no 40. Voir : www.medicalpost.com.
[430] Alderson-Gill & Associates Consulting Inc. (2002), Évaluation — Initiative nationale pour les sans‑abri. Étude de cas d’un projet pour les sans-abri : Bergers de l’espoir, Programme de réduction des méfaits, Ottawa (Ontario). Voir : www.homelessness.gc.ca/projects/casestudies/docs/ottawa/shepherds_f.pdf.
[431] La santé mentale, ça nous concerne! Feuillet d’information Justice et santé mentale, 2003. Voir : http://www.cmha.ca/data/1/rec_docs/521_justiceFR.pdf.
[432] T. Stockwell, assisté de J. Sturge (septembre 2005), mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[433] N. Brunemeyer (mars 2004), « Addictions Services Redesign at Vancouver Coastal Health », Four Pillars News, vol. II, no 1. Voir : www.city.vancouver.bc.ca/fourpillars/newsletter.
[434] M. Hayashida, A. Altman, A. McLellan, C. O’Brien, J. Purtil, J. Volpicelli, A. Pahelson et C. Hall (1989), « Comparative Effectiveness of Inpatient and Outpatient Detoxification of Patients with Mild-to-moderate Alcohol Withdrawal Symptoms », New England Journal of Medicine, vol. 320, no 6, p. 358-365.
[435] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[436] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[437] Voir le chapitre 3 pour obtenir des précisions sur la façon dont le système de santé mentale définit le rétablissement.
[438] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[439] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28cv-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[440] Ministère des Services de santé de la Colombie-Britannique (mai 2004), Every Door Is the Right Door: A British Columbia Planning Framework to Address Problematic Substance Use and Addiction. Voir : http://www.healthservices.gov.bc.ca/mhd/pdf/framework_for_substance_use_and_addiction.pdf.
[441] Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission (juillet 2005), Building Capacity: A Framework for Serving Albertans Affected by Addiction and Mental Health Issues. Voir : www.aadac.com.
[442] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[443] W. Skinner (septembre 2005), mémoire présenté au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
[444] Le Cadre national a défini : des questions (sensibilisation accrue aux problèmes liés à la consommation abusive d’alcool et de drogues, réduction de la consommation problématique d’alcool, prévention de la consommation problématique de médicaments, examen de stratégies d’application de la loi et examen de l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale); une infrastructure de soutien (soutien du perfectionnement de l’effectif, accès accru aux services, mise en œuvre d’un programme national de recherche et transfert du savoir et actualisation des cadres législatif, réglementaire et stratégique); les populations clés (enfants et adolescents, populations du Nord, Premières nations, Inuits et Métis, et délinquants).
[445] La motion se lit comme suit : « Que, puisqu’il faut élaborer dès maintenant une stratégie nationale pour réduire les coûts humains et économiques de plus en plus lourds du cancer, des cardiopathies et des maladies mentales, la Chambre demande au gouvernement de financer intégralement et de mettre en œuvre, en symbiose avec les provinces et tous les intervenants, la Stratégie canadienne de lutte contre le cancer ainsi que d’élaborer et d’appliquer sans délai une stratégie nationale d’ensemble sur les maladies mentales et les cardiopathies, le Canada étant un des rares pays développés à ne pas avoir de plan d’action national pour réduire l’incidence des maladies mentales et des maladies du cœur. » [C’est nous qui soulignons.]
[446] 21 septembre 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/28ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[447] 10 mai 2005,/fr/Content/SEN/Committee/381/soci/15evc-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[448] Dyck, F. (2 juin 2005), notes pour un exposé préparé en vue des audiences du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences de la technologie.
[449] H. Chodos, N. Pogue et T. Riordan, 2005, Consultation électronique en matière de services de santé mentale, de maladie mentale et de toxicomanie, phase 1, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement.
[450] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences de la technologie, novembre 2004, Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 3, section 3.4.1, p. 65 (citation tirée du témoignage de Jennifer Chambers).
[451] H. Chodos, N. Pogue et T. Riordan, 2005, Consultation électronique en matière de services de santé mentale, de maladie mentale et de toxicomanie, phase 1, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement.
[452] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences de la technologie, novembre 2004, Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 3, section 3.2.1, p. 47 (citation tirée du témoignage de Rena Scheffer).
[453] 16 juin 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/22evc-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[454] S. Mead, D. Hilton et L. Curtis (document non daté), “Peer support: A theoretical perspective”, www.mentalhealthpeers.com.
[455] 15 février 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/05eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[456] B. Everett, B., 2000, Consumers
and psychiatric survivors confront the power of the mental health system,
[457] 17 février 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/07ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[458] S. Estroff, 1989, “Self, identity and subjective experiences of schizophrenia: In search of a subject”, Schizophrenia Bulletin, vol. 15, no 2, p. 189-196.
[459] Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences de la technologie, novembre 2004, Rapport 1 — Santé mentale, maladie mentale et toxicomanie : Aperçu des politiques et des programmes au Canada, chapitre 1, section 1.1.1, p. 8 (citation tirée du témoignage de Loïse Forest).
[460] S. Mead et C. MacNeil, 2004, “Peer Support: What makes it unique?”, www.mentahealthpeers.com.
[461] R. Carten, juin 2006, mémoire au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences de la technologie.
[462] H. Chodos, N. Pogue et T. Riordan, 2005, Consultation électronique en matière de services de santé mentale, de maladie mentale et de toxicomanie, phase 1, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement.
[463] 10 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/15evc-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[464] Voir chapitre 3, section 2.
[465] B. Everett, éd., 1994, “You are not alone: A handbook for facilitators of self help and mutual aid support groups”. Disponible par l'entremise de la Mood Disorders Association of Ontario.
[466] S. Clay, éd, 2005, On our own together: peer programs for
people with mental illness,
[467] 17 février 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/07ev-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[468] S. Mead, D. Hilton et L. Curtis (document non daté), “Peer support: A theoretical perspective”, www.mentalhealthpeers.com.
[469] Association canadienne pour la santé mentale, Ontario, Centre de toxicomanie et de santé mentale, Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l'Ontario et Initiative ontarienne de développement favorisant l'aide entre pairs, mars 2005, “Consumer/survivor initiatives: Impact, outcomes and effectiveness”, www.ofcmhap.on.ca.
[470] 9 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/15evb-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[471] S. Mead et D. Hilton, 2003, “Crisis and connection”, Psychiatric Rehabilitation Journal, vol. 27, no 1, p. 87-94.
[472] 31 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/16eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[473] La Feuille d’érable, février 2005, bulletin des Forces canadiennes.
[474] Par exemple, D. Corring, 2002, “Quality of life: Perspectives of people with mental illness and family members”, Psychiatric Rehabilitation Journal, vol. 25.
[475] J. Campbell et J. Leaver, 2003,
“Report from NTAC’s National Experts meeting on emerging new practices in
organized peer support”. Disponible par l’entremise du
[476] G. Nelson, 2004, “What was learned about members of CSIs”, dans Making a Difference. Disponible par l’entremise du Centre de toxicomanie et de santé mentale.
[477] C. Forchuk, 2002, “Therapeutic relationships: From hospital to community”. Disponible par l’entreprise de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, www.chrsf.ca.
[478] J. Trainor et coll., 1997, “Beyond the service paradigm: The impact of consumer/survivor initiatives”, Psychiatric Rehabilitation Journal, vol. 21, p. 132-140.
[479] J. Trainor, E. Pomeroy et B. Pape, 2004, A framework for support. Third edition, Toronto, Association canadienne pour la santé mentale, bureau national.
[480] Voir également le chapitre 4, section 4.3.3, pour un examen connexe du pouvoir des commissions de révision d’ordonner des traitements.
[481] H. Chodos, N. Pogue et T. Riordan, 2005, Consultation électronique en matière de services de santé mentale, de maladie mentale et de toxicomanie, phase 1, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement.
[482] Ascentum, juin 2005, Rapport final sur la consultation électronique du Comité sénatorial permanent des Affaire sociales, des sciences et de la technologie.
[483] 11 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/15eve-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[484] S. Mead, 2003, “Defining peer support”, www.mentahealthpeers.com.
[485] 14 juin 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/22eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[486] Association canadienne pour la santé mentale, Ontario, Centre de toxicomanie et de santé mentale, Fédération des programmes communautaires de santé mentale et de traitement des toxicomanies de l'Ontario et Initiative ontarienne de développement favorisant l'aide entre pairs, mars 2005, “Consumer/survivor initiatives: Impact, outcomes and effectiveness”, www.ofcmhap.on.ca.
[487] 15 février 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/05evb-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[488] 11 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/15eve-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[489] 9 mai 2005, /fr/Content/SEN/Committee/381/soci/15eva-f.htm?Language=F&Parl=38&Ses=1&comm_id=47.
[490] J. Campbell et J. Leaver,
2003, “Report from NTAC’s National Experts meeting on emerging new practices in
organized peer support”. Disponible par l’entremise du