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La Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre

Projet de loi modificatif--Troisième lecture--Suite du débat

5 décembre 2023


L’honorable Julie Miville-Dechêne

Chers collègues, à cette heure tardive, je prends la parole à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-234.

Au fil des semaines, le projet de loi C-234 a pris une importance considérable dans nos débats. Il a donné lieu à des votes inhabituels, comme le rejet d’un rapport de comité. Il a suscité des réactions très émotives et même de l’intimidation, ici et ailleurs. Il a divisé certains groupes de sénateurs. Il a fait l’objet de campagnes d’influence de divers groupes favorables ou opposés à son adoption.

Ce projet de loi est aussi devenu un symbole politique. Le projet de loi C-234 a fini par cristalliser des postures politiques et partisanes sur la question de la taxe sur le carbone, de la lutte contre les changements climatiques, sur des tensions interrégionales, des stratégies électorales et même l’inflation. C’est aussi un symbole, car le projet de loi C-234 concerne nos agriculteurs qui, comme on le sait, travaillent très fort, pendant de très longues heures, tout faisant face à beaucoup d’incertitudes.

Comme bien d’autres dans cette Chambre, dans ma jeunesse, j’ai fait les foins et la traite des vaches plusieurs fois en été en Beauce. Je ne sous-estime donc pas ce labeur.

De prime abord, j’ai hésité à prendre la parole dans ce débat parce que le projet de loi C-234 ne s’appliquerait pas aux 30 000 exploitations agricoles du Québec, étant donné que la province a son propre système de tarification du carbone. Cependant, en faisant des recherches sur le sujet, j’ai compris que le projet de loi C-234 creuserait davantage les inégalités qui existent déjà entre les producteurs de grain au Québec et ailleurs au Canada.

Je m’explique. Sous le régime québécois, aucune exemption de la taxe sur le carbone ne s’applique à l’essence et au diésel utilisés dans les exploitations agricoles. Cependant, dans les huit provinces assujetties à la taxe fédérale sur le carbone, ces carburants agricoles sont exemptés de l’impôt des entreprises. Par conséquent, les agriculteurs québécois paient la taxe sur le carbone s’appliquant à ces carburants alors que leurs homologues de huit provinces ne le font pas.

Dans le cas du gaz naturel et du propane, qui sont utilisés pour sécher le grain, les producteurs au Québec assujettis au système provincial et les producteurs sous le régime fédéral paient tous la taxe sur le carbone. Dans le système en vigueur au Québec, un système très complexe et très imparfait, la taxe sur le carbone est incluse dans le prix d’achat du propane et peut varier d’un fournisseur à l’autre selon les unités d’émissions que chacun achète. Dans le reste du Canada, à l’exception de la Colombie-Britannique, la taxe sur le carbone est uniforme pour tout le monde.

Au cours de la dernière vente aux enchères tenue au Québec, le prix du CO2 était d’environ 53 $ la tonne, alors qu’il s’établit actuellement à 65 $ la tonne au Canada. La différence — une différence considérable —, c’est que les producteurs canadiens ont droit au crédit d’impôt remboursable dont il a beaucoup été question pendant nos débats alors qu’au Québec, ce crédit d’impôt n’existe pas. Les agriculteurs du Québec ne reçoivent aucune compensation pour la taxe sur le carbone qu’ils paient pour le propane et le gaz naturel.

Par conséquent, dans le contexte actuel, les agriculteurs du Québec sont doublement désavantagés par rapport au reste du Canada. Premièrement, ils paient une tarification du carbone pour l’essence et le diésel qu’ils utilisent à la ferme, alors que les producteurs du reste du pays bénéficient d’une exemption. Deuxièmement, ils ne sont pas admissibles à un crédit d’impôt pour la taxe sur le carbone associée au gaz naturel et au propane qui sert à chauffer les bâtiments et à sécher le grain, alors que les producteurs d’ailleurs au pays bénéficient de ce crédit d’impôt.

Si on les compare à leurs homologues d’ailleurs au pays, les producteurs du Québec sont soumis à une tarification du carbone plus importante. Si le projet de loi C-234 est adopté, cet écart se creusera encore plus.

Charles Séguin, professeur d’économie et spécialiste de la tarification du carbone, soutient que cela soulève une question d’équité et qu’il n’est pas souhaitable qu’une région du pays soit désavantagée sur le plan économique, non pas parce qu’elle est moins productive, mais parce qu’une autre région bénéficie d’une exemption de la taxe sur le carbone. M. Séguin estime que les programmes ciblés d’efficacité énergétique destinés aux agriculteurs permettent de lutter beaucoup plus efficacement contre les changements climatiques qu’une exemption de la taxe sur le carbone, qui est, de fait, contre-productive.

Un autre économiste québécois bien connu partage cet avis. Le professeur Pierre-Olivier Pineau affirme qu’il est vrai que les agriculteurs québécois se trouvent dans une situation injuste. Cependant, il affirme que la solution consiste à les aider à moderniser leurs exploitations, et non à abolir la taxe sur le carbone.

D’un point de vue plus général, le professeur Pineau nous fait remarquer que la productivité énergétique des Canadiens, toutes industries confondues, est l’une des pires au monde, car notre système n’encourage pas suffisamment l’efficacité et l’innovation. Or, le projet de loi C-234 n’améliorerait certainement pas les choses.

Les producteurs de grain du Québec sont conscients de cette iniquité, mais ils ont également mentionné qu’il y a un problème avec les États-Unis, où aucune tarification du carbone n’est en vigueur.

Cette absence de taxe a deux conséquences.

La première, c’est qu’elle permet théoriquement aux agriculteurs américains de vendre leurs produits moins chers, ou alors de faire davantage de profits.

La deuxième conséquence est moins évidente, mais elle est pertinente pour le projet de loi C-234. Il faut savoir que l’équipement de séchage des grains au propane ou au gaz naturel que les agriculteurs québécois utilisent est fabriqué et vendu par des entreprises du Midwest américain.

Or, puisque ni ces entreprises ni la plupart de leurs clients américains ne sont assujettis à des taxes sur le carbone, elles n’ont pas d’incitation économique à modifier leur équipement pour éliminer les énergies fossiles. De plus, puisque le marché québécois est trop petit pour que nous développions notre propre équipement de séchage, les agriculteurs du Québec paient une tarification du carbone, alors même qu’ils n’ont pas la capacité autonome de changer leurs procédés.

En pratique, donc, les producteurs québécois paient une tarification du carbone liée au séchage de leurs grains, qui est censée les inciter à décarboner leurs processus, mais dans les faits, le changement doit venir des Américains, et ceux-ci ne sont pas affectés par la tarification du carbone.

Je note que c’est pour cette raison que j’ai appuyé l’amendement proposé par le sénateur Dalphond. Si le projet de loi C-234 doit être adopté, assurons-nous au moins qu’il vise uniquement les procédés que nos agriculteurs sont impuissants à modifier à court ou à moyen terme, c’est-à-dire ceux qui sont liés au séchage des grains.

Pour répondre à ces enjeux, la solution proposée par le projet de loi C-234 est simple : abolir la taxe sur le carbone sur tous les carburants agricoles.

C’est le piège du nivellement par le bas, ce que nos amis anglophones appellent la « race to the bottom ».

Or, si nous prenons au sérieux nos responsabilités envers les générations futures et l’intérêt public à long terme, le nivellement par le bas ne peut être une solution.

Face à la concurrence des producteurs américains qui ne paient pas de taxe sur le carbone, le Canada pourrait imposer des ajustements à la frontière pour le carbone. Ces tarifs auraient pour effet de rétablir un équilibre entre les producteurs canadiens et les producteurs américains, qui ne paient pas pour leurs émissions de carbone.

À propos de ces ajustements, le ministère des Finances a écrit lui‑même, et je cite, qu’il cherchait « à dialoguer avec les Canadiens et partenaires internationaux afin de faire progresser des discussions mondiales sur cette question importante. »

Voilà assurément une occasion de faire progresser la discussion.

Pour ce qui est des émissions de GES au Canada, il est possible d’atténuer les coûts encourus par nos producteurs en raison de la tarification du carbone, tout en préservant l’incitation économique qui est au cœur de notre système. On peut notamment procéder au moyen d’un crédit d’impôt compensatoire établi sur une moyenne, ce qui a pour effet de récompenser ceux qui, toutes proportions gardées, émettent moins de GES que la moyenne, et de pénaliser ceux qui, toutes proportions gardées, en émettent davantage.

C’est exactement le système que le gouvernement fédéral a mis en place dans les huit provinces où sa taxe s’applique : une tarification du carbone compensée par un crédit d’impôt.

Le projet de loi C-234, pour sa part, éliminerait la taxe sur le carbone et le crédit d’impôt associé pour nous ramener à la case départ, c’est-à-dire sans aucune incitation à réduire nos émissions de GES. Je ne peux accepter cette régression.

Le projet de loi C-234 aurait une autre conséquence. En exemptant un secteur du régime de la taxe sur le carbone, le projet de loi C-234 percerait un autre trou dans ce qui devrait être un principe fondamental de la lutte contre les changements climatiques : nous sommes tous dans le même bateau.

Les particuliers, les entreprises, les gouvernements, les travailleurs, les consommateurs, les jeunes et les vieux, nous avons tous la responsabilité de réduire nos émissions et de faire des efforts pour opérer la transition énergétique, qui est nécessaire. Personne ne devrait obtenir de passe-droit, peu importe à quel point on estime cette personne ou son vote. C’est pourquoi j’ai été si déçue par la décision du gouvernement fédéral d’accorder une exonération de trois ans de la taxe sur le carbone pour le mazout domestique, qui semble favoriser les provinces de l’Atlantique. Voilà qui envoie un terrible, terrible message.

Bien sûr, aucun système n’est parfait. Mais dès que l’on crée des exceptions et des exemptions, on envoie le message que l’on n’est pas vraiment tous dans le même bateau. D’autres industries, régions ou secteurs économiques demanderont des exemptions au nom de l’équité ou de la compétitivité. Et ils les obtiendront sûrement. Ce n’est pas tant une question de la déferlante anticipée que de réalisme politique, malheureusement fondé sur l’expérience.

Enfin, le projet de loi C-234 viendrait aggraver le problème du régime à deux vitesses qui existe actuellement au Canada. Il y a de meilleures façons d’indemniser nos agriculteurs pour le manque de solutions de rechange, ainsi que de les aider à innover et à affronter la concurrence internationale. Lutter sérieusement contre les changements climatiques pour le bien des générations futures, c’est faire comprendre clairement que tous les secteurs de la société doivent contribuer. Si on permet des exceptions à cet effort collectif, nous affaiblirons un régime que nous devrions, au contraire, chercher à défendre, à élargir et à renforcer pour protéger l’avenir de nos enfants.

Merci.

L’honorable Percy E. Downe [ + ]

La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question? Je pense vous avoir entendu dire que vous vous opposez à l’exemption annoncée par le gouvernement. Personnellement, je crois que c’était la bonne décision, compte tenu des choix limités dans le Canada atlantique. À l’Île-du-Prince-Édouard, par exemple, nous n’importons que du mazout et du propane. Par conséquent, il y a de nombreux citoyens qui sont d’ardents défenseurs de la lutte contre les changements climatiques, mais qui ont besoin d’un coup de pouce pour y participer pleinement. Il faudra plus de temps que prévu, et bien des gens étaient mis devant le choix de chauffer leur demeure en payant le prix exorbitant du mazout ou du propane qu’elles ont connu l’année dernière ou d’acheter d’autres produits de première nécessité, comme de la nourriture.

Pourquoi dites-vous que l’exemption... Vous avez entendu d’autres sénateurs en parler, notamment la personne qui occupe le fauteuil présentement. C’est une exemption qui ne s’applique pas uniquement au Canada atlantique d’ailleurs et, même si c’était le cas, pourquoi ne voudriez-vous pas qu’on atténue les préjudices subis par nos concitoyens?

Il s’agit d’une excellente question à laquelle j’ai beaucoup réfléchi, car en effet, la situation est difficile. Cependant, vous savez aussi bien que moi que le signal qu’a envoyé cette décision a été catastrophique pour le reste du Canada.

Aurait-on pu à la fois ne pas toucher à la tarification du carbone et financer davantage les méthodes alternatives? Je songe notamment au fameux pont dont il a été question. On aurait peut‑être pu faire d’autres choix.

J’ai parlé à des économistes qui me disaient que, plutôt que de donner deux carottes, on aurait pu ne pas toucher à la taxe sur le carbone et dire : « Vous avez les moyens de chauffer autrement. » Je sais que ce n’est pas la réponse parfaite pour une personne qui a de la difficulté à payer ses frais de chauffage, mais il y a un sentiment d’urgence qui fait que si l’on commence à créer des brèches dans la tarification du carbone, il n’y aura plus de fin.

Au Canada, c’est le système que nous avons choisi pour lutter contre le réchauffement climatique, qui, à vrai dire, est un drame qui se déroule sous nos yeux. Qu’est-ce qu’on fera quand on n’aura plus de planète? Tout cela est lié; on peut bien dire que non, que c’est une petite exception, mais à mon avis, il faut trouver d’autres solutions.

Le crédit d’impôt compensatoire en était une, et il y en avait peut-être une autre dans les Maritimes.

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Sénatrice Miville-Dechêne, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?

Y a-t-il d’autres questions?

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Le sénateur Downe a une autre question, ainsi que la sénatrice Lankin.

Sénateur Downe, il faudra demander plus de temps. Le sénateur a-t-il le consentement?

Son Honneur la Présidente intérimaire [ + ]

Le sénateur n’a pas le consentement. Nous poursuivons le débat.

L’honorable Diane Bellemare [ + ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour faire état de mon questionnement par rapport au projet de loi C-234.

Par le passé, j’ai beaucoup réfléchi sur le rôle du Sénat par rapport aux projets de loi qui nous viennent de l’extérieur, pour déterminer quelle doit être notre lentille. J’ai toujours pensé qu’il était important de respecter d’abord ce que l’autre endroit avait adopté et de respecter la situation problématique des provinces par rapport à celle du gouvernement fédéral.

Dans le cadre d’un projet de loi particulier, on avait le choix de promouvoir et de respecter les préoccupations des provinces ou de défendre les intérêts du gouvernement fédéral. Dans les faits, le Sénat a été créé pour défendre les intérêts des provinces par rapport à une volonté fédérale qui aurait pu — ou qui pourrait — être centralisatrice.

Dans le cadre du projet de loi C-234, compte tenu de toutes les préoccupations politiques qui ont été soulevées, je me disais que le Sénat devrait adopter ce projet de loi.

Pour ce qui est d’adopter un projet de loi qui vient de l’autre endroit, est-ce qu’on doit l’adopter uniquement parce qu’il vient des Communes et qu’il répond à des préoccupations provinciales, sans vraiment mettre en doute le bien-fondé de tous ses articles?

À cette question, je réponds non, parce qu’en fait, lorsqu’on reçoit un projet de loi du gouvernement, en général, il a été étudié avec une certaine rigueur par le ministère de la Justice ou par les ministères concernés, ce qui n’est pas toujours le cas d’un projet de loi d’intérêt public.

Dans le cas du projet de loi C-234, les amendements proposés sont justifiés et permettront peut-être de tenir un débat à l’autre endroit à la suite du renvoi d’un projet de loi qui aura été modifié. C’est la raison pour laquelle je pense qu’il est important d’adopter le projet de loi une fois qu’il aura été modifié.

Toutefois, mon appréciation de ce projet de loi a changé lorsque j’ai lu le communiqué de presse que l’Association des producteurs de grain du Québec a publié le 28 novembre dernier. Dans ce communiqué, l’Association des producteurs de grain du Québec a fait part de ses préoccupations au gouvernement du Québec, en disant que ses considérations économiques dans le secteur agricole québécois allaient changer dans le cas d’une exemption supplémentaire sur le propane et le gaz naturel, et que les agriculteurs québécois sont actuellement pénalisés par le fait que l’essence et le diésel sont exemptés dans le reste du Canada.

Plus on exempte ailleurs dans le secteur agricole, plus on crée des pressions au Québec pour fragiliser le système de tarification des émissions de gaz à effet de serre. Cela m’a fait réfléchir, et je me suis dit que, dans un contexte canadien où nous avons une responsabilité constitutionnelle partagée entre les provinces et le gouvernement fédéral, un dialogue est fondamental pour établir le cadre d’une stratégie efficace — et surtout équitable — de lutte contre le changement climatique et de réduction des gaz à effet de serre. Cela m’a amenée à proposer une motion que vous recevrez dans votre courrier et dont nous pourrons discuter.

Lorsque j’ai examiné la situation actuelle du Canada par rapport aux autres pays de l’OCDE, j’ai été surprise de constater que le Canada est le cinquième pays sur 71 dont un pourcentage des émissions de gaz à effet de serre est couvert par une tarification sur le carbone. Le Canada couvre environ 84 % de ses émissions de GES par le biais d’une tarification sur le carbone. Il arrive en cinquième position derrière l’Islande, la Corée, le Luxembourg et l’Allemagne.

À titre de comparaison, la moyenne des pays de l’OCDE qui adoptent aussi des stratégies de tarification couvre à peu près 40 % de leurs émissions de GES par la tarification. Donc, le Canada, avec 84 % par opposition à 40 % pour les autres pays de l’OCDE, a une stratégie qui est quand même très vaste.

Cependant, il y a différentes questions que l’on peut se poser par rapport à cela. Au Canada, la tarification des gaz à effet de serre de grand pourcentage provient en grande partie de la taxe sur le carbone. Le Québec a un système différent, soit un système d’échange de quotas d’émissions. En Europe, c’est le système de quotas d’émission qui est largement utilisé pour imposer un tarif sur le carbone. C’est très différent comme système, et il est vrai que la taxe sur le carbone est plus simple et permet au gouvernement de retirer les produits de la taxe pour les redistribuer ensuite sous forme de bénéfices.

Au Québec, nous avons un système de vente de permis d’émissions. Ce système existe depuis 2013. Chaque année, le gouvernement du Québec émet gratuitement des permis, mais il en vend également.

Il y a des portions gratuites et il y a des portions vendues à l’encan. Ces encans ont lieu quatre fois par année; le gouvernement doit vendre les droits d’émission et chaque année, le nombre ou le pourcentage de droits d’émission diminue. Cela fera en sorte qu’il y en aura de moins en moins et que les prix augmenteront.

Le gouvernement du Québec, grâce à la vente des droits, a pu récolter jusqu’à maintenant environ 8 milliards de dollars. Cet argent est déposé dans un fonds d’électrification et il servira à subventionner des solutions qui favoriseront la carboneutralité.

Donc, nous avons deux systèmes complètement différents.

Nous avons un marché, par exemple le secteur agricole, où les prix sont fixés à l’international. Donc, l’impact du système sur la concurrence est important et est un élément majeur à considérer pour l’avenir, d’autant plus que le prix du carbone augmentera et que l’impact économique dans notre secteur agricole augmentera. Il y aura deux types d’impact complètement différents pour le Québec et pour le reste du Canada, d’où l’importance d’avoir un dialogue entre les provinces et le gouvernement fédéral pour adopter une stratégie de tarification du carbone efficace et équitable.

Je voudrais ajouter aussi — à la suite de mes lectures sur l’OCDE — que la tarification du carbone est largement utilisée, mais que ce n’est pas la seule mesure. Même si la tarification du carbone représente une stratégie nécessaire, elle n’est pas suffisante pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ce n’est pas suffisant, parce que ce sont des incitatifs de prix, mais les modèles nous disent que la tarification est efficace. Cependant, elle est efficace lorsque tout est égal. Cependant, dans la vie, les choses ne sont pas toutes égales, de sorte que les incitatifs de prix peuvent avoir parfois des effets contraires à ce que l’on souhaite.

J’ajouterais à cela que la situation économique des dernières années — l’inflation, entre autres — a amené plusieurs pays de l’OCDE à réduire les taxes sur le carbone, parce que les prix augmentaient, que l’épicerie coûtait plus cher et que les gens se plaignaient.

Donc, la tarification est une bonne mesure. Est-ce que ce sera un système intéressant pour l’avenir? Sûrement, mais cette stratégie devra être accompagnée d’autres mécanismes, comme des normes et, surtout, des subventions à l’investissement. On ne peut pas penser que le mécanisme de prix permettra d’assurer par magie la transition de toute l’économie aussi rapidement qu’on le souhaite.

En conclusion, le projet de loi C-234 témoigne de l’insatisfaction à l’égard de ce système, puisqu’il est différent d’une province à l’autre — différent de celui du Québec, à tout le moins. Comme le secteur agricole est aussi différent d’une province à l’autre, cela crée des situations problématiques auxquelles nous devrons nous attaquer d’une manière ou d’une autre.

Je suis d’accord pour que l’on vote en faveur de ce projet de loi modifié, en espérant qu’il suscite une conversation à l’autre endroit pour trouver certains aménagements. Je vous remercie.

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