Projet de loi d'exécution de l'énoncé économique de l'automne 2023
Deuxième lecture
4 juin 2024
Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023. Avant de poursuivre, j’aimerais remercier la sénatrice Moncion pour son discours de la semaine dernière.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-59 est un projet de loi omnibus, ce qui signifie qu’il comprend de nombreuses mesures touchant de nombreux sujets. Il comprend de nombreuses modifications à la législation existante, notamment la Loi de l’impôt sur le revenu, la Loi sur la taxe d’accise, la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, la Loi sur les sociétés d’assurance, la Loi canadienne sur les paiements, la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et bien d’autres lois.
Le projet de loi C-59 propose également la promulgation de nouvelles lois, notamment la Loi sur la taxe sur les services numériques, la Loi sur l’Agence canadienne de l’eau et la Loi sur le ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités, qui devraient toutes faire l’objet d’une mesure législative distincte afin de permettre un débat parlementaire rigoureux.
Honorables sénateurs, dans son programme électoral de 2015, présenté comme étant « le bon plan pour renforcer la classe moyenne », le gouvernement a fait la promesse de mettre fin aux projets de loi omnibus en les qualifiant de processus antidémocratiques qui empêchaient le Parlement d’examiner et de débattre en bonne et due forme des mesures législatives du gouvernement. Transportons-nous en 2024, et nous pouvons voir que de nombreux projets de loi omnibus ont été présentés par ce gouvernement au cours des neuf dernières années.
Le projet de loi C-59 édicte certaines dispositions de l’Énoncé économique de l’automne, qui a été déposé le 21 novembre de l’année dernière. Il a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales le 8 février pour étude préalable. De nombreux projets de loi omnibus sont divisés et leurs différentes sections sont renvoyées à différents comités sénatoriaux pour étude, comme c’est le cas du projet de loi C-69. Cependant, ce projet de loi de 546 pages a été renvoyé uniquement au Comité des finances nationales du Sénat pour y être étudié.
En février, le Sénat a approuvé une motion du sénateur Tannas demandant que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, en vue d’en faire rapport, la pratique consistant à inclure des questions non financières dans les projets de loi exécutant les dispositions des budgets et des énoncés économiques. Bien que cette motion ne vise pas explicitement à éliminer les projets de loi omnibus ni à modifier le processus d’attribution des crédits ou à changer le Règlement, je maintiens qu’il faudrait effectivement apporter des changements en ce qui concerne les projets de loi omnibus et les travaux des subsides.
Étant donné que le projet de loi C-59 met en œuvre certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne, on ne peut pas l’étudier indépendamment de cet énoncé. L’énoncé économique fait plus de 150 pages. Il présente un aperçu de la situation économique et budgétaire et fournit des projections détaillées pour une période de cinq ans allant jusqu’à l’exercice 2026-2027. Il présente de nouvelles initiatives en fournissant quelques détails, dont leur coût estimé. L’énoncé économique fait également le point sur d’importantes initiatives gouvernementales déjà lancées, telles que le Fonds pour accélérer la construction de logements, le système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, et le financement supplémentaire destiné au système universel de soins de santé. L’énoncé économique de l’automne présente aussi une mise à jour sur la stratégie de gestion de la dette et un énoncé sur l’égalité des genres, la diversité et l’inclusion.
À titre d’information dans le contexte de l’étude du projet de loi C-59, je rappelle que l’énoncé économique de l’automne fournit une liste des changements législatifs nécessaires pour mettre en œuvre le contenu de l’énoncé, ainsi que des renseignements sur les mesures visant l’impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés ainsi que les taxes et vente et d’accise. Ces mesures sont incluses dans le projet de loi.
L’un des problèmes les plus sérieux de l’énoncé économique de l’automne est l’incohérence des estimations en dollars fournies dans les projections financières. Les projections financières sont l’élément le plus important de l’énoncé économique de l’automne, car elles indiquent les projections financières du gouvernement, y compris les recettes, les dépenses et les déficits estimés pour chacune des sept années à partir de 2022-2023. Comme ces informations sont fournies dans chaque budget et dans chaque énoncé économique de l’automne, les lecteurs peuvent évaluer la fiabilité des projections du gouvernement. Or, les estimations fournies ne sont tout simplement pas fiables si l’on se base sur les estimations présentées dans les documents budgétaires précédents.
J’ai indiqué précédemment que les estimations des frais de la dette publique augmentent dans les documents budgétaires successifs publiés par le gouvernement. Par exemple, l’estimation des frais de la dette publique pour 2023-2024 — l’exercice qui vient de se terminer — est passée de 32 milliards de dollars dans le budget de 2022 à 43 milliards de dollars dans l’Énoncé économique de l’automne 2022, publié à peine six mois plus tard. De même, dans le budget de 2022, on estimait les charges des programmes de l’an dernier à 430 milliards de dollars. Juste six mois plus tard, dans l’Énoncé économique de l’automne 2022, le montant de 430 milliards de dollars est devenu 443 milliards de dollars.
Dans le budget de 2024 déposé en avril, on peut constater que les estimations des charges des programmes et des frais de service de la dette pour cette année, c’est-à-dire 2024-2025, ont augmenté dans chaque budget et chaque énoncé économique de l’automne à partir du budget de 2022. Les charges de programmes pour cette année étaient estimées à 439 milliards de dollars dans le budget de 2022. Cette estimation est passée à 457 milliards de dollars dans l’énoncé économique de l’automne de 2022. L’estimation a ensuite grimpé à 463 milliards de dollars, puis à 466 milliards de dollars, et elle se chiffre maintenant à 480 milliards de dollars dans le budget de 2024.
Le service de la dette publique suit une trajectoire similaire. Le service de la dette pour cet exercice était estimé à 37 milliards de dollars dans le budget de 2022. L’estimation est ensuite passée à 42 milliards, puis à 46 milliards, et enfin à 52 milliards, pour atteindre aujourd’hui 54,1 milliards dans le budget de 2024. Ce problème ne se limite pas à ces quelques exemples. Les estimations changent fréquemment et dans des proportions importantes. Les estimations projetées dans tout document budgétaire ou dans l’énoncé économique de l’automne ne sont tout simplement pas fiables.
Les informations fournies sur le programme d’emprunt du gouvernement posent un problème similaire. La stratégie de gestion de la dette exposée dans le budget de 2023 indiquait que le gouvernement émettrait 414 milliards de dollars en bons du Trésor et en obligations. Or, l’énoncé économique de l’automne — publié à peine sept mois plus tard — a porté ces 414 milliards de dollars à 485 milliards de dollars, soit une augmentation de 71 milliards de dollars, sans aucune explication.
Dans d’autres cas, les chiffres des projections financières apparaissent sans explication adéquate. Les coûts des nouvelles initiatives sont réduits, et on explique que c’est grâce à des « fonds affectés précédemment dans le cadre financier » sans indiquer où se trouvent ces fonds dans le cadre financier. De même, les estimations relatives aux mesures non annoncées ne fournissent aucune information ou explication supplémentaire.
À une récente réunion du Comité des finances nationales, on a soulevé ce problème auprès du directeur parlementaire du budget. Celui-ci a déclaré au comité qu’il ne pouvait fournir aucune information sur ces transactions financières, indiquant que les futurs documents budgétaires n’apporteraient aucune clarté ou explication à ces questions. Lorsque le gouvernement parle de transparence et de responsabilité, il est impossible qu’il fasse référence à ses documents financiers.
Les coûts de nombreuses nouvelles initiatives décrites dans l’énoncé économique de l’automne sont concentrés en fin de période, c’est-à-dire que la majorité des coûts seront engagés vers la fin du programme plutôt qu’au début. Par exemple, la suppression de la TPS sur les nouvelles coopératives d’habitation locatives — une mesure appelée Remboursement de la TPS pour immeubles d’habitation locatifs neufs —, dont le coût est estimé à 4,5 milliards de dollars, devrait coûter 150 millions de dollars en 2023-2024 et 2024-2025. On prévoit de dépenser les 4,3 milliards de dollars restants après les prochaines élections fédérales. En fait, selon l’énoncé économique de l’automne, les programmes nouvellement annoncés en matière de logement coûteront 6,249 milliards de dollars d’ici le 31 mars 2029, mais seulement 140 millions de dollars seront engagés au cours du présent exercice.
Honorables sénateurs, le Canada est en pleine crise du logement. Il y a une pénurie d’habitations. Les propriétaires renouvellent leurs hypothèques à des taux d’intérêt plus élevés. Il y a une pénurie d’appartements, et les loyers se sont accrus de manière considérable. En outre, beaucoup de villes au Canada comptent désormais des campements. Le nombre de sans-abri a également augmenté.
Le thème central de l’énoncé économique de l’automne est la crise du logement. Le programme principal est l’élimination de la TPS sur les logements locatifs neufs, une mesure qui devrait coûter 4,5 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. De plus, le projet de loi C-59 édictera la Loi sur le ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités dans le but d’améliorer l’accès au logement.
L’élimination de la TPS porte sur les nouvelles coopératives d’habitation de logements locatifs. La mesure vise à créer des incitatifs financiers à la construction plus rapide d’un plus grand nombre de logements en éliminant cette taxe des nouveaux projets de logements construits expressément pour la location, comme les immeubles d’appartements, les logements pour étudiants et les résidences pour personnes âgées. Même si on estime que le programme coûtera 4,5 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, le gouvernement n’a fourni aucune prévision du nombre de logements qui seraient construits pendant cette période de cinq ans. La ministre des Finances, en réponse à cette question, a reconnu que le gouvernement n’a pas évalué combien de logements seraient construits avec les 4,5 milliards de dollars. Elle a toutefois précisé que l’un des plus grands experts en matière de logement au Canada a estimé que de 200 000 à 300 000 logements pourraient être construits avec cette somme.
Le programme de remboursement de la TPS pour les immeubles d’habitation locatifs a été mis en place en décembre par le projet de loi C-56. Les représentants du gouvernement ont indiqué à l’époque que les détails du programme, qui étaient visiblement absents du projet de loi, seraient fournis à une date ultérieure dans des règlements. Nous sommes maintenant en juin, et bien qu’il y ait des projets de règlement, il n’y a pas de règlement définitif. Les fonctionnaires nous ont récemment dit que les règlements prennent généralement 18 à 24 mois après l’adoption de la mesure législative. Or, la réglementation comprend les détails, et nous ne pouvons pas comprendre un programme tant que nous n’avons pas vu les détails.
Selon l’énoncé économique de l’automne, le programme de remboursement de la TPS pour les immeubles d’habitation locatifs se poursuivra jusqu’en 2035, soit pendant 12 ans. Cependant, les coûts estimés fournis n’étaient que pour les six premières années, soit jusqu’à l’exercice 2028-2029. Aucune estimation des coûts n’a été donnée pour les six années suivantes.
Après la publication de l’énoncé économique de l’automne, le gouvernement a publié son plan sur le logement, intitulé Résoudre la crise du logement. Je m’attendais à ce que l’information contenue dans la mise à jour économique de l’automne s’aligne sur l’information concernant le programme de remboursement de la TPS pour les immeubles d’habitation locatifs dans le plan sur le logement du Canada.
Le plan sur le logement devrait permettre de construire 3,5 millions de nouveaux logements d’ici 2031, dont 1,2 million grâce aux programmes du gouvernement fédéral. Le plan indique que le programme de remboursement de la TPS pour immeubles d’habitation locatifs donnera le coup d’envoi à la construction d’habitations, jusqu’à 300 000 nouveaux logements. J’ai été étonnée de voir que le plan sur le logement mentionnait 300 000 nouveaux logements, parce que le gouvernement n’utilisait pas sa propre estimation, mais la limite supérieure d’une estimation fournie par une tierce partie.
En outre, le coût du programme de remboursement de la TPS pour immeubles d’habitation locatifs n’est budgété que jusqu’en 2028-2029, alors que l’échéance pour la construction de ces 300 000 logements est fixée à 2036, soit sept ans après la fin du financement. Il n’y a pas d’estimation du coût du programme entre 2029 et 2036. Puisque les 300 000 nouveaux logements n’ont pas à être construits avant 2036, comment cela cadre-t-il avec l’objectif du gouvernement de construire 1,2 million de nouveaux logements d’ici 2031?
Les chiffres ne concordent pas.
Le gouvernement n’avait pas de plan sur le logement avant avril de cette année. Cela a été confirmé par l’ex-présidente et première dirigeante de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, la SCHL, lors d’une réunion du Comité des finances et par le ministre du Logement lors d’une réunion du Comité des banques. Bien que le gouvernement ait publié sa Stratégie nationale sur le logement en 2017 et qu’il ait annoncé de nombreux programmes de logement depuis lors, en l’absence d’un plan, il est difficile de comprendre comment les différents programmes de logement s’articuleront pour résoudre les problèmes de logement que nous connaissons.
Le nombre de logements qui serait éventuellement construit a été annoncé dans le cadre de nombreux programmes, mais il y a très peu d’information, voire aucune, sur le nombre de logements réellement construits grâce à chacun de ces programmes. Par exemple, l’Énoncé économique de l’automne 2023, qui soutient ce projet de loi, consacre deux pages aux logements qui seront construits dans l’avenir dans le cadre du Fonds pour accélérer la construction de logements, mais il y a peu d’informations sur le nombre de logements effectivement construits jusqu’à présent dans le cadre de ce programme, et aucun engagement n’est pris pour indiquer quand les logements financés seront réellement terminés.
En 2022, la Société canadienne d’hypothèques et de logement a publié un rapport indiquant que le Canada avait besoin de 3,5 millions de logements supplémentaires d’ici 2030. En septembre dernier, une mise à jour du rapport de 2022 indiquait qu’il y a toujours un déficit de 3,5 millions de logements d’ici 2030, bien que l’écart entre l’offre et la demande ait changé d’une province à l’autre. Les chiffres ont légèrement changé, mais le total s’élève encore à 3,5 millions.
Le 12 avril dernier, le gouvernement a finalement publié son plan en matière de logement intitulé « Résoudre la crise du logement : Plan du Canada sur le logement ». D’après le communiqué, l’objectif du plan est de « débloquer la construction de 3,87 millions de nouveaux logements d’ici 2031 ». Dans le communiqué en question, le premier ministre mentionne que le plan permettra la construction de 1,2 million de nouveaux logements. Pour les 2,6 millions de logements restants, le premier ministre demande à tous les ordres de gouvernement de bâtir 800 000 logements supplémentaires d’ici 2031, indiquant au passage que « 1,87 million de logements allaient déjà être construits d’ici 2031 ».
Honorables sénateurs, le Plan du Canada sur le logement comporte de sérieuses lacunes. Le plan lui-même n’indique pas les objectifs du gouvernement en matière de logement. Les objectifs ont plutôt été présentés dans le communiqué de presse du premier ministre.
Le plan sur le logement se contente de donner les différents programmes de logement financés par le gouvernement fédéral, leur coût et le nombre de logements à construire dans le cadre de chaque programme de logement d’ici 2031. Rien n’indique combien de ces 1,2 million de logements seront construits chaque année jusqu’en 2031. Devons-nous attendre 2031 pour obtenir un rapport d’étape?
L’engagement pris par le gouvernement de construire 1,2 million de logements est aussi excessivement ambitieux que l’objectif global de construire 3,87 millions de logements d’ici 2031. Cela signifie qu’il faut que 550 000 logements soient construits en moyenne chaque année au cours des sept prochaines années; pourtant, le gouvernement n’est pas tenu de rendre compte du nombre de logements construits par un programme quelconque chaque année.
Même les personnes qui ont participé aux enquêtes menées par le gouvernement sur le logement étaient d’avis que, tant que le gouvernement ne présentera pas de données concrètes et mesurables qui montrent qu’il réalise des progrès dans la lutte contre la crise du logement, elles continueraient à penser que le gouvernement fédéral fait fausse route dans le dossier du logement.
La Société canadienne d’hypothèques et de logement a récemment fait état de la capacité de construction de logements de l’année dernière, qui montre que le plan sur le logement progresse. Elle a indiqué qu’il y avait 650 000 travailleurs dans le secteur de la construction l’année dernière, mais que le nombre de mises en chantier ne s’élevait qu’à 240 000, ce qui est inférieur aux 400 000 logements qui auraient pu être construits si ces travailleurs avaient été utilisés au maximum.
Ces 240 000 logements étaient loin du nombre requis pour atteindre l’objectif du gouvernement de 3,87 millions de nouveaux logements d’ici 2031. La Société canadienne d’hypothèques et de logement a dit que jusqu’à présent cette année, les données d’avril 2024 sur le logement montrent que la tendance semestrielle des mises en chantier a diminué de 2,2 %, passant de 243 900 logements en mars à 238 500 logements en avril. Elle a précisé que la mesure de la tendance semestrielle est une moyenne mobile sur six mois du taux annuel désaisonnalisé du nombre total de mises en chantier pour toutes les régions du Canada.
Le gouvernement fédéral a dépensé et continue de dépenser des milliards de dollars pour la construction de logements, pour des prêts et pour des allègements fiscaux, il a créé de nouveaux programmes et il a augmenté les montants consacrés aux programmes existants pour encourager la construction de logements, mais ces initiatives n’ont pas eu d’incidence majeure. En fait, le nombre de mises en chantier a diminué au lieu d’augmenter.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-59 constitue le ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités. Étant donné que le gouvernement crée un nouveau ministère du Logement pour répondre à la crise du logement, je m’attendais à ce que la nouvelle loi soit plus rigoureuse. Si l’on exclut les dispositions transitoires et les modifications corrélatives contenues dans le projet de loi, celui‑ci ne fait que trois pages et demie. Le projet de loi sur le logement ne prévoit visiblement pas d’obligation pour le ministre du Logement de présenter chaque année au Parlement un rapport de reddition de comptes. Il ne m’a pas échappé que le fonctionnaire qui a présenté la nouvelle loi sur le logement au Comité des finances était le sous-ministre adjoint des politiques et des résultats, car il n’y a rien dans le projet de loi qui exige un rapport sur les résultats. Le ministre devrait au moins être tenu d’indiquer chaque année le nombre de logements qui ont été construits dans le cadre de chacun des programmes fédéraux sur le logement. Cette mesure permettrait de faire le point chaque année sur les progrès réalisés par le gouvernement pour atteindre son propre objectif de construire 1,2 million de logements.
Comparons ce projet de loi au projet de loi C-50 — que je n’appuie pas d’ailleurs, mais je souligne simplement ce qui s’y trouve —, dont le Parlement est également saisi. Ce projet de loi exige un plan d’action détaillé, énumère ce que ce plan doit contenir et exige que le plan soit déposé au Parlement.
De plus, le projet de loi C-50 exige des rapports d’étape, qui doivent également être déposés au Parlement. Comme le Canada est en pleine crise du logement et qu’il crée un nouveau ministère pour y répondre, il est incompréhensible que la nouvelle loi n’exige pas de rapports annuels au Parlement.
Honorables sénateurs, alors que le gouvernement a du mal à construire plus de logements, les Canadiens ont du mal à faire face à l’augmentation des coûts de leur dette hypothécaire. Selon un récent sondage de l’Angus Reid Institute, le nombre de Canadiens qui disent avoir beaucoup de difficulté à payer leur hypothèque a doublé depuis mars dernier. Plus précisément, en mars de l’année dernière, 8 % des emprunteurs hypothécaires disaient éprouver des difficultés. En octobre dernier, ce taux est passé à 15 % et il continue d’augmenter.
Les emprunteurs hypothécaires qui ont une hypothèque à taux variable ont vu leurs paiements augmenter de façon constante depuis mars 2022 — il y a tout juste deux ans —, alors que la Banque du Canada a procédé à la première de dix augmentations des taux d’intérêt. La Banque du Canada a fait passer le taux de 0,25 % en mars 2022 à 5 % en septembre 2023. Ceux qui ont contracté une hypothèque entre 2018 et 2020 verront probablement leurs paiements augmenter considérablement lors du renouvellement. Près de 60 % des personnes qui doivent renouveler leur hypothèque au cours des 12 prochains mois sont très inquiètes.
Les locataires canadiens sont confrontés à des problèmes semblables. Des données publiées en mars par Rentals.ca et Urbanation indiquent que le prix moyen demandé pour un logement locatif au Canada était de 2 193 $ par mois en février, ce qui représente une hausse de 10,5 % par rapport à l’année précédente et la croissance annuelle la plus rapide depuis septembre 2023.
Par rapport à il y a deux ans, les loyers au Canada ont augmenté de 21 % ou, en moyenne, de 384 $ par mois. L’enquête de l’Institut Angus Reid a révélé que les Canadiens sont de plus en plus négatifs quant à leur situation et à leurs perspectives financières, et 50 % d’entre eux affirment que leur situation financière est pire qu’il y a un an, tandis que 35 % s’attendent à ce qu’elle soit pire dans un an. L’institut Angus Reid a déclaré que ces données sont les pires jamais enregistrées en 13 ans.
Des données semblables publiées par l’institut en janvier indiquaient que 61 % des Canadiens déclarent ne pas pouvoir faire face au coût de la vie, soit la troisième année au cours de laquelle une majorité des personnes interrogées ont exprimé une telle préoccupation. Parmi les personnes interrogées, 43 % se disent toujours ou souvent stressées par l’argent, ce qui représente une augmentation de 12 points par rapport à 2018.
L’augmentation des paiements hypothécaires et la hausse des loyers contribuent à ce contexte. Il y a 49 % des locataires qui se disent inquiets de ne pas pouvoir couvrir les frais de leur loyer au cours des six prochains mois, et 32 % des titulaires d’un prêt hypothécaire déclarent qu’en l’absence de taux d’intérêt réduits, ils craignent eux aussi de ne pas pouvoir couvrir leurs frais de logement dans les six mois à venir.
Soixante-et-un pour cent des Canadiens disent ne pas arriver à composer avec la hausse du coût de la vie. Comme on peut s’y attendre, cette hausse semble surtout accabler les personnes à faible revenu, mais même la majorité des ménages gagnant dans les six chiffres ou plus disent ne plus arriver à joindre les deux bouts. Ces données concordent avec les données du gouvernement.
Si les Canadiens qui ont une hypothèque et ceux qui sont locataires ont du mal à joindre les deux bouts, un autre groupe de Canadiens éprouvent des problèmes en matière de logement. Il s’agit des sans-abri, dont certains vivent dans des campements ou « villages de tentes », comme on les appelle communément. Ces personnes n’ont pas de logement pour des raisons telles que le manque de logements abordables.
Dans de nombreuses villes canadiennes, on trouve aujourd’hui des villages de tentes ou campements. Certains résidants de ces campements ont déjà utilisé des refuges pour sans-abri, mais même les refuges pour sans-abri sont mis à rude épreuve en raison de la crise du coût de la vie.
L’année dernière, la toute première défenseure fédérale du logement a lancé un examen officiel des campements au Canada, dans le but de présenter au ministre du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités un rapport assorti de recommandations visant à résoudre les problèmes systémiques de logement que vivent les itinérants. En février de cette année, elle a publié son rapport sur les campements de personnes en situation d’itinérance. Elle a indiqué qu’elle avait rencontré et entendu des personnes qui avaient vécu dans des campements dans tout le pays. Son rapport a été conçu pour les placer au centre des efforts de lutte contre l’itinérance.
Dans son rapport, la défenseure fédérale du logement a dit que le nombre de campements a considérablement augmenté au cours des cinq dernières années, surtout depuis la pandémie de COVID-19. Elle considère que le Canada a la capacité de résoudre la crise du logement. Pour ce faire, il doit y avoir suffisamment de volonté politique, de ressources et de coordination. La coordination inefficace entre les nombreux organismes, les ministères ainsi que les divers organes de gouvernance concernés affaiblissent les solutions mises de l’avant pour régler la crise de l’itinérance. Elle a dit que cette crise nationale exige une réponse à l’échelle nationale.
Dans son rapport, la défenseure fédérale du logement recommande que le gouvernement du Canada présente, au plus tard le 31 août de cette année, un plan d’intervention nationale pour trouver une solution aux campements. Les conclusions et les recommandations du rapport ont été présentées au ministre fédéral du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités le 8 février dernier, soit quelques jours avant sa publication officielle. La défenseure fédérale du logement en avait d’ailleurs profité pour rencontrer le ministre.
La Loi sur la stratégie nationale sur le logement précise que, quand le gouvernement fédéral reçoit le rapport d’un tel examen systémique, le ministre responsable du Logement doit répondre dans un délai de 120 jours. Comme l’échéance de 120 jours n’est pas encore dépassée, la réponse du ministre à ce moment-ci n’est pas connue.
La semaine dernière, le directeur parlementaire du budget a publié un rapport sur le financement fédéral pour lutter contre l’itinérance. Les fonds attribués par le gouvernement du Canada pour prévenir et réduire l’itinérance sont presque entièrement versés au programme Vers un chez-soi, d’Infrastructure Canada, qui sera intégré au nouveau ministère du Logement. Ce programme offre du financement aux collectivités afin de les aider à réduire et à prévenir l’itinérance.
Le rapport indique les dépenses annuelles réelles et prévues pour les programmes de lutte contre l’itinérance à Infrastructure Canada sur une période de 20 ans, de 2008 à 2027-2028. Les dépenses réelles et prévues s’élèvent en moyenne à 561 millions de dollars par an de 2018-2019 à 2027-2028, ce qui représente une augmentation des dépenses nominales de 443 millions de dollars par rapport à la décennie précédente.
De 2019-2020 à 2022-2023, le financement du programme Vers un chez-soi a permis de placer près de 18 000 personnes dans des logements plus stables chaque année, de financer des logements d’urgence pour 5 400 personnes par an et de fournir annuellement des services de prévention de base à 31 000 personnes.
La Stratégie nationale sur le logement du Canada avait initialement un objectif de réduction de 50 % de l’itinérance chronique d’ici 2027-2028 et, plus récemment, le gouvernement s’est engagé à éliminer l’itinérance chronique d’ici 2030.
Le rapport du directeur parlementaire du budget conclut que, selon les meilleures données disponibles, le nombre de sans-abri a augmenté, malgré le financement fourni dans le cadre du programme Vers un chez-soi. Selon les données publiées par Infrastructure Canada, le nombre de sans-abri a augmenté de 20 % par rapport à 2018, atteignant 34 000 personnes, tandis que le nombre de personnes en situation d’itinérance chronique a augmenté de 38 % par rapport à 2018, et le nombre de personnes vivant à l’extérieur a également augmenté de 88 %.
Compte tenu de ces deux rapports récents sur l’itinérance au Canada, l’un du bureau du défenseur fédéral du logement, l’autre du directeur parlementaire du budget, je pense que le plan du Canada sur le logement devra être revu par le ministre responsable du logement afin de déterminer s’il doit être modifié.
Honorables sénateurs, il y a neuf ans, l’actuel gouvernement a publié sa plateforme électorale de 2015, intitulée Changer ensemble : Le bon plan pour renforcer la classe moyenne. Les libéraux ont promis qu’il serait plus facile pour les Canadiens de trouver un logement abordable. Ils ont promis de renouveler le leadership fédéral en matière de logement et d’accorder la priorité aux investissements dans le logement abordable, de construire davantage de nouveaux logements et de rénover les anciens. Ils ont également promis de revoir les prix des logements sur les marchés à prix élevés tels que Toronto et Vancouver, afin de permettre à un plus grand nombre de Canadiens d’accéder à la propriété.
Ils ont promis d’encourager la construction de nouveaux logements locatifs en supprimant la TPS sur les nouveaux investissements dans les logements locatifs abordables. Ils ont tenu cette promesse, mais ils ne nous ont pas dit qu’il nous faudrait attendre neuf ans — jusqu’à ce que nous connaissions une crise majeure du logement — avant qu’ils n’honorent leur promesse.
Honorables sénateurs, l’énoncé économique de l’automne et le projet de loi C-59 s’inscrivent dans la continuité de l’action du gouvernement visant à soutenir une classe moyenne forte. Depuis 2015, le gouvernement se concentre sur la classe moyenne et ceux qui travaillent fort pour en faire partie. Il présenté un plan pour renforcer la classe moyenne et pour favoriser sa croissance et sa sécurité économique. Les budgets et les mises à jour économiques budgétaires publiés par le gouvernement étaient tous axés sur la classe moyenne, comme le montrent les titres choisis pour les budgets : « Assurer la croissance de la classe moyenne », « Bâtir une classe moyenne forte », « Égalité et croissance pour une classe moyenne forte », « Investir dans la classe moyenne », et « Un plan canadien : une classe moyenne forte, une économie abordable, un avenir prospère ».
Même les mises à jour économiques de l’automne étaient axées sur la classe moyenne. Le chapitre 2 de l’Énoncé économique de l’automne 2023, qui a été publié juste avant Noël, est placé sous le thème « Soutenir une classe moyenne forte ». Nous avons même déjà eu une ministre de la Prospérité de la classe moyenne. Cependant, malgré l’accent mis sur la classe moyenne, celle-ci n’a pas la vie facile sous le gouvernement actuel.
Pendant des réunions du Comité sénatorial des finances nationales, on a très souvent demandé à l’ancien ministre des Finances Bill Morneau — qui a été le premier ministre des Finances de l’actuel gouvernement libéral — de définir la « classe moyenne », puisque c’était la bénéficiaire de nombreux programmes du gouvernement. Malheureusement, il ne le savait pas. Quand on a demandé à Mona Fortier, l’ancienne ministre de la Prospérité de la classe moyenne, de définir ce qu’est la « classe moyenne », elle ne le savait pas non plus.
Je ne comprenais pas comment un gouvernement pouvait savoir si sa classe moyenne se développait sans avoir défini les critères permettant de déterminer qui fait partie de la classe moyenne. Ces informations sont nécessaires pour déterminer qui fait partie de la classe moyenne au début de l’initiative, puis pour analyser l’évolution des données afin de déterminer si la classe moyenne se développe ou non.
L’Organisation de coopération et de développement économiques, ou OCDE, a publié des données qui montrent qu’en fait, au Canada, la classe moyenne est en train de diminuer, et non de croître, malgré les programmes du gouvernement de ces neuf dernières années axés sur cette classe. Le profil de l’OCDE indique que le Canada est en train de perdre sa classe moyenne par rapport au reste des pays développés, et que la part des personnes à revenu moyen au Canada a diminué plus que dans la plupart des autres pays. L’OCDE indique que le nombre de Canadiens qui vivent dans des ménages à revenu moyen est de 58 %, alors que la moyenne de l’OCDE est de 61 %.
Dans un sondage réalisé en 2020 par Polaris Strategy + Insight, 79 % des personnes interrogées se disaient convaincues que leurs enfants atteindraient la classe moyenne en travaillant assidûment. En 2023, trois ans plus tard, au lieu de 79 %, elles n’étaient plus que 52 % à penser ainsi.
Honorables sénateurs, la contraction de la classe moyenne n’est qu’une indication de l’appauvrissement du Canada par rapport à ses pairs. Le PIB par habitant au Canada suit une tendance à la baisse depuis 40 ans, une tendance qui s’est accélérée sous le gouvernement actuel. Même si le gouvernement aime nous dire que le PIB total est en croissance, il en va de même pour notre population. La part du PIB par habitant diminue. Si on tient compte de l’inflation, la part du PIB que détient chaque Canadien est en fait inférieure à ce qu’elle était en 2014. En 1981, le PIB par habitant du Canada représentait 92 % de celui des États-Unis. Nous occupions le 6e rang parmi les pays de l’OCDE pour ce qui est du PIB par habitant. En 2022, le PIB par habitant du Canada par rapport à celui des États-Unis était passé de 92 % en 1981 à 73 %. Nous avons dégringolé du 6e rang en 1981 au 15e rang. Des pays qui étaient plus pauvres que nous en 1981 ont fait un bond en avant et sont aujourd’hui plus riches que nous. Nous nous rapprochons des pays les plus pauvres.
Le budget de 2022 — le plan budgétaire de la ministre Freeland — nous a indiqué que « l’OCDE prévoit que la croissance du PIB par habitant du Canada sera la plus faible de tous ses pays membres » de 2020 à 2060.
Honorables sénateurs, les médias ont publié de nombreux articles faisant référence à la croissance du PIB du Canada et au déclin du PIB par habitant. Je vous fais part de mes observations sur ces indicateurs économiques.
La valeur réelle des biens et services finaux produits dans l’économie au cours de la période du PIB réel, rajusté en fonction de l’inflation, est la mesure la plus largement utilisée de l’activité économique globale. Le PIB n’est pas le seul indicateur de la performance économique. La mesure des investissements des entreprises et l’évolution du marché du travail sont également des indicateurs importants de la performance économique, et nombre d’entre eux sont inclus dans les documents budgétaires de la ministre.
Le gouvernement cite la croissance du PIB dans bon nombre de ses documents financiers, y compris l’Énoncé économique de l’automne 2023, qui appuie le projet de loi C-59 dont nous débattons aujourd’hui. Cet énoncé comprend des données sur la croissance du produit intérieur brut réel, tant historique que prévue, ainsi que des données sur le marché du travail. En fait, l’énoncé économique de l’automne indique qu’entre le premier trimestre de 2022 et le deuxième trimestre de 2023, le Canada a enregistré la plus forte croissance du PIB réel parmi les pays du G7. Les pays du G7 comprennent le Canada, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis. De plus, entre 2000 et 2023, le Canada a enregistré le deuxième taux de croissance du PIB le plus élevé des pays du G7.
Le PIB est généralement mesuré dans son ensemble ou par personne, et de nombreux économistes sont d’avis que le PIB par personne est une mesure plus utile du niveau de vie d’un pays lorsqu’il s’agit de comparer des données dans le temps ou entre pays. Quand je dis cela, je le dis en tant que comptable, car je ne suis pas économiste, même si j’ai lu pour essayer de me familiariser avec ce qui se passe dans l’économie.
Si la croissance globale du PIB du Canada semble favorable par rapport à celle des autres pays du G7, elle est l’une des plus faibles quand on mesure le PIB par habitant. En fait, quand on mesure la croissance du PIB par habitant, le Canada a le taux de croissance le plus faible du G7. L’Institut Fraser a récemment publié une étude dans laquelle il a effectué une analyse très détaillée du PIB par habitant sur chacune des 40 périodes trimestrielles entre 1985 et 2023. Autrement dit, il a analysé en détail les données de 40 trimestres d’exercice. Son analyse s’est concentrée sur l’ampleur et la durée relatives de chaque baisse du PIB par habitant, ainsi que sur la durée de la reprise. Elle a aussi comparé la durée et l’ampleur de la croissance du PIB réel par habitant entre les différentes périodes de déclin.
Son analyse a révélé ce qui suit. Sur la période de 40 ans, il y a eu neuf périodes de trimestres consécutifs où le PIB réel par habitant a diminué, mais qui ont été suivies de périodes de croissance. La baisse pendant 12 trimestres d’affilée entre le deuxième trimestre de 1989 et le deuxième trimestre de 1992 a été la plus longue sur les 40 années analysées, et le PIB par habitant a baissé de 5,3 %. Les baisses entre le quatrième trimestre de 2014 et le deuxième trimestre de 2016 ainsi qu’entre le deuxième trimestre de 2022 et le quatrième trimestre de 2023, qui vient de se terminer, sont ex aequo au deuxième rang des baisses les plus longues, avec six trimestres chacune. Sur la période de 2014 à 2016, le PIB réel par habitant a diminué de 1,5 %.
Pour la période la plus récente, entre le deuxième trimestre de 2022 et le quatrième trimestre de 2023, le PIB par habitant a diminué de 3,4 %. J’ai écrit ici qu’on ne dispose pas encore de données qui permettraient de déterminer si la baisse se poursuivra en 2024, mais l’information a été publiée ce matin. Toutefois, le PIB par habitant a diminué de 0,8 % entre le troisième trimestre de 2023 et le quatrième trimestre de 2023, ce qui signifie qu’on ne peut pas supposer que la baisse s’est arrêtée au quatrième trimestre de 2023. La quatrième baisse en importance s’est produite entre le deuxième trimestre de 2019 et le deuxième trimestre de 2020, lorsque le PIB par habitant a diminué de 13,6 %.
L’analyse conclut que, depuis le milieu de l’année 2019 — c’est-à-dire le deuxième trimestre de 2019 —, le Canada a connu l’une des baisses les plus longues et les plus profondes du PIB réel par habitant des quatre dernières décennies. Il y a eu une brève reprise au deuxième trimestre de 2022, mais il semble qu’il s’agisse simplement d’une brève interruption de ce qui semble être un déclin plus important. Pendant 16 des 18 trimestres entre le deuxième trimestre de 2019 et le quatrième trimestre de 2023, le PIB réel par habitant a été inférieur au niveau enregistré au deuxième trimestre de 2019. On dit que le déclin depuis le deuxième trimestre de 2019 représente l’une des baisses les plus longues et les plus profondes du PIB par habitant depuis 1985, dépassée à ces deux égards uniquement par le déclin de la reprise qui s’est produit entre le deuxième trimestre de 1989 et le troisième trimestre de 1994. Toutefois, le déclin amorcé en 2019 se poursuit et pourrait dépasser en durée le ralentissement de la fin des années 1980 et du début des années 1990.
Ce matin, j’ai reçu un courriel m’indiquant que les chiffres pour le premier trimestre de 2024 étaient sortis. En tenant compte de l’inflation, le PIB par habitant a diminué de 0,2 % au premier trimestre de 2024. On dit que la raison pour laquelle l’économie est en croissance alors que le niveau de vie recule, c’est que la croissance économique n’est pas assez forte face à la croissance de la population. Pendant les trois premiers mois de 2024, la croissance économique était de 0,4 % alors que la croissance de la population était de 0,6 %.
Je vais passer aux soins de santé universels, car la mise à jour économique de l’automne donne un aperçu des fonds versés aux provinces et aux territoires pour les soins de santé au cours des 10 prochaines années, notamment les fonds supplémentaires par rapport à ceux fournis en 2022-2023.
Les sommes versées en 2022-2023 pour les soins de santé s’élevaient à 47 milliards de dollars, elles sont passées à 52 milliards de dollars cette année et elles passeront à 62,8 milliards de dollars en 2028-2029. Malgré les dépenses historiques dans les soins de santé, 6,5 millions de Canadiens n’ont pas de médecin de famille, et ce chiffre devrait augmenter.
Les salles d’urgence sont pleines, et nous avons tous entendu des histoires de personnes qui sont mortes à l’urgence en attendant d’obtenir des soins de santé. De nombreux Canadiens sont inscrits sur des listes d’attente pour des procédures médicales ou des opérations chirurgicales, et plusieurs personnes vivent dans la douleur en attendant de recevoir des soins de santé.
Selon une étude réalisée l’année dernière, le Canada dépense plus pour les soins de santé que la majorité des pays à revenu élevé de l’Organisation de coopération et de développement économiques dotés d’un système de santé universel. L’étude a comparé le coût et le rendement de 30 systèmes de santé universels dans des pays à revenu élevé. En tenant compte du pourcentage de la population ayant plus de 65 ans, le Canada est le pays qui dépense le plus pour la santé en pourcentage du PIB et il se classe au 9e rang en ce qui concerne les dépenses en santé par habitant.
De plus, selon les données de l’étude, le Canada dispose de moins de ressources humaines médicales que de nombreux pays pairs qui dépensent des sommes comparables pour les soins de santé. Par exemple, nous avons moins de postes et moins de technologies médicales que la moyenne des pays à revenu élevé de l’OCDE dotés d’un système de santé universel pour lesquels il existe des données comparables.
En résumé, les données suggèrent que, même si le Canada possède l’un des systèmes de santé universels les plus coûteux parmi les pays membres de l’OCDE, son rendement est modeste, voire médiocre.
Je voulais parler d’un sondage commandé par l’Institut économique de Montréal. Je vois qu’il me reste peu de temps, alors je vais parler rapidement.
Le gouvernement continue d’expliquer les vertus du système de santé universel du Canada, affirmant que la promesse de l’accès à ce système de santé est au cœur du filet de sécurité sociale du pays. Le sondage comprenait un échantillon de 1 116 résidents canadiens âgés de 18 ans et plus et un échantillon de plus de résidents du Québec qui ont été interrogés entre le 22 et le 27 mars de cette année. La pondération en fonction de l’âge, du sexe, de la région et de la langue a été utilisée pour s’assurer que la composition de l’échantillon reflète la population globale, selon le dernier recensement.
Voici les principales conclusions, que j’ai trouvées intéressantes : moins de la moitié des Canadiens — 48 % — sont satisfaits de leur système de santé provincial. Les Canadiens de l’Atlantique affichent le taux de satisfaction le plus faible, à 30 %. Sept Canadiens sur dix croient que les entrepreneurs privés peuvent fournir des services de santé plus rapidement que les hôpitaux gérés par le gouvernement, 77 % des résidants du Québec étant de cet avis.
Seulement le quart — 25 % — des Canadiens pensent que les sommes supplémentaires injectées dans le système de soins de santé au cours des 10 dernières années — ce qui représente des milliards de dollars — ont permis d’améliorer la situation, et 33 % sont d’avis que le système s’est en fait détérioré.
La moitié des Canadiens aimeraient avoir un meilleur accès à des soins de santé offerts par des entrepreneurs indépendants, et plus de la moitié des Canadiens disent que le rythme des dépenses de leur système de soins de santé provincial est intenable.
Honorables sénateurs, les soins de santé privés sont arrivés au Canada, qu’on le veuille ou non. Notre système de soins de santé universel est sur le point de s’effondrer — certains disent que c’est déjà fait — à cause de la pénurie de médecins, de personnel infirmier et de professionnels de la santé. Les Canadiens qui cherchent à obtenir des soins de santé en ont assez de faire la queue.
Bien que de nombreux Canadiens pourront se permettre de payer pour des soins de santé privés, de nombreux autres vont se morfondre sur de longues listes d’attente, incapables de payer des soins de santé privés.
J’ai quelques mots à dire à ce sujet. J’ai passé un peu de temps à me préparer. Je ne vais peut-être pas répondre à des questions.
L’Énoncé économique de l’automne 2023 fournit une mise à jour sur la mise en œuvre du système pancanadien de services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, qui a été annoncé dans le budget de 2021. Le budget de 2021 comprenait un investissement de 30 milliards de dollars pour établir un programme de garderies à 10 $ sur une période de cinq ans. Le gouvernement fédéral a négocié avec l’ensemble des provinces et des territoires et a négocié une entente particulière avec le Québec, qui avait déjà un programme, afin qu’on détermine ensemble les modalités de financement et les objectifs. Ces négociations ont permis de conclure des accords sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants avec l’ensemble des provinces et des territoires.
Deux des engagements du programme consistent à créer 250 000 nouvelles places en garderie partout au pays d’ici mars 2026 et à embaucher 40 000 autres éducateurs de la petite enfance, d’ici mars 2026 également.
En plus de fournir une mise à jour sur les modalités du programme dans les provinces et les territoires, l’énoncé économique de l’automne indique aussi séparément le coût annuel du programme jusqu’à l’exercice 2028-2029 inclusivement. Bien que l’énoncé économique de l’automne indique que des provinces et territoires offrent déjà des services de garde à 10 $, ce ne sont pas toutes les familles qui peuvent avoir accès à ces services. D’ailleurs, bon nombre de familles n’ont pas du tout accès à des services de garde, ce qui a entraîné une crise dans bien des endroits au pays qu’on appelle maintenant des « déserts en matière de services de garde ».
Les listes d’attente dans les garderies ont explosé dans tout le pays, car la demande dépasse de loin la création de nouvelles places. En outre, dans certaines provinces, des exploitants de garderies menacent de se retirer du programme ou de fermer leur établissement, affirmant qu’ils n’arrivent pas à joindre les deux bouts. Ils affirment que les accords fédéraux-provinciaux qui limitent les frais qu’ils peuvent facturer ne fournissent pas suffisamment d’argent pour couvrir les coûts.
Si le financement des coûts de fonctionnement est un problème majeur dans de nombreuses régions, la dotation en personnel des garderies en est un autre. En effet, de nombreuses garderies fonctionnent à capacité réduite et limitent les inscriptions parce qu’elles n’arrivent pas à recruter suffisamment de travailleurs en éducation de la petite enfance. La crise du personnel est un obstacle majeur à l’expansion du secteur des garderies et à la réalisation des objectifs du nouveau programme de services d’éducation préscolaire et de garde d’enfants.
Une analyse réalisée par Cardus, un groupe qui s’intéresse aux politiques publiques, indique que le déploiement des programmes d’expansion des services de garde en Colombie-Britannique, en Saskatchewan et au Nouveau-Brunswick a été lent à démarrer et que les résultats sont décevants. Au cours de la première année, le Nouveau-Brunswick n’a créé que 300 places en garderies sur les 3 400 places supplémentaires qu’il s’était fixées comme objectif sur cinq ans.
L’énoncé économique de l’automne indique que plus de 50 000 places ont déjà été créées au Canada. Cependant, nous en sommes à la quatrième année du programme quinquennal, et l’objectif du gouvernement fédéral était de créer 250 000 places en garderie d’ici mars 2026, soit dans moins de deux ans.
Le budget de 2024 prévoit 1 milliard de dollars pour un programme de prêts pour l’expansion des services de garde. Or, les représentants de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, ou SCHL, ont indiqué que ce programme n’a pas encore été établi et que ces prêts ne devraient être disponibles qu’au prochain exercice financier.
On verra bien si beaucoup de garderies survivront malgré leurs difficultés financières ou si le programme de prêts promis leur fournira l’aide financière dont elles ont besoin. Vu les problèmes éprouvés, je doute fort que l’on crée 250 000 places en garderie d’ici mars 2026, ou que l’on trouve 40 000 nouveaux éducateurs de la petite enfance.
Plus tôt ce mois-ci la Banque du Canada a publié son Rapport sur la stabilité financière —2024. Ce rapport évalue la stabilité du système financier canadien. Il conclut que ce dernier demeure résilient. Cependant, la stabilité financière demeure vulnérable à certains risques et ce qui suit résume certaines des préoccupations soulevées dans le rapport de la banque. Ces préoccupations sont symptomatiques de la crise de l’abordabilité.
Même si le rapport indique que la plupart des ménages s’adaptent à des taux d’intérêt plus élevés, certains ménages présentent des signes de tensions financières. La proportion des emprunteurs sans prêt hypothécaire qui sont en retard dans leurs paiements de carte de crédit et de prêt automobile est revenue à des niveaux plus normaux depuis la pandémie ou les a dépassés. Les signes de tensions sont principalement concentrés chez les ménages sans prêt hypothécaire, et les données d’enquête donnent à penser que ce sont les locataires qui sont les plus touchés.
Comme je l’ai mentionné plus tôt dans mes commentaires — ou comme quelqu’un d’autre l’a dit —, le coût des logements locatifs a augmenté considérablement au cours des dernières années, et cela a une incidence sur la capacité des ménages de rembourser leurs dettes.
Le taux d’arriérés sur les cartes de crédit et les prêts automobiles pour les ménages sans hypothèque, ce qui inclut les locataires et les propriétaires, se situent à des niveaux aussi élevés qu’avant la pandémie et ils continuent d’augmenter. Cependant, les arriérés sur les cartes de crédit et les prêts automobiles pour les ménages ayant un prêt hypothécaire sont demeurés faibles et stables. Les emprunteurs sans prêt hypothécaire et dont le solde de carte de crédit impayé est d’au moins 80 % de leur limite de crédit présentent un risque beaucoup plus important de se retrouver en défaut de paiement de leur dette. Au cours de la dernière année, la proportion de ces emprunteurs a continué d’augmenter.
Environ la moitié des titulaires d’un prêt hypothécaire n’ont pas encore été confrontés à une hausse des taux d’intérêt. Ils devront généralement faire face à une augmentation plus importante de leurs paiements que ceux qui ont déjà renouvelé leur prêt. Les ménages qui ont contracté un prêt hypothécaire en 2021 et au début de 2022, lorsque les prix de l’immobilier étaient proches de leur sommet et que les taux hypothécaires étaient très bas, subiront la plus forte augmentation. Qu’un ménage soit locataire ou titulaire d’un prêt hypothécaire, les deux catégories seront confrontées à des pressions financières.
Le stress croissant auquel les emprunteurs sont confrontés n’a pas eu d’incidence majeure sur les grandes banques, mais certains petits prêteurs hypothécaires ont constaté une forte augmentation des arriérés de crédit. Les titulaires d’un prêt hypothécaire seront également soumis à des pressions lorsqu’ils refinanceront leur prêt hypothécaire actuel à des taux plus élevés.
Honorables sénateurs, le Bureau du surintendant des institutions financières est un organisme indépendant du gouvernement du Canada, chargé de superviser les institutions financières et les régimes de pension sous réglementation fédérale afin de contribuer à la confiance du public dans le système financier du Canada. Il réglemente et supervise plus de 400 institutions financières et 1 200 régimes de pension.
Le 22 mai 2024, le Bureau a publié son rapport annuel sur le risque pour 2024-2025, intitulé Regard annuel sur le risque — Exercice 2024-2025, qui donne un aperçu du contexte de risque actuel et qui cerne les principaux risques auxquels le système financier canadien est confronté. Même si les perspectives se concentrent sur un certain nombre de risques, y compris les risques liés aux prêts immobiliers commerciaux ainsi qu’à la dette des entreprises et des commerces, qui demeurent un risque important pour les institutions financières, mes observations se concentrent sur les risques liés à la dette hypothécaire et l’incidence de cette dette sur la crise de l’abordabilité qui touche les familles canadiennes.
Le Bureau du surintendant des institutions financières s’attend à ce que des taux d’intérêt élevés et la volatilité des marchés entraînent une augmentation du risque de refinancement hypothécaire, des coûts d’emprunt plus élevés, une diminution des dépenses de consommation et une diminution des investissements des entreprises. À l’heure actuelle, le marché du travail canadien demeure relativement fort, mais le Bureau du surintendant des institutions financières prévient que si le marché du travail s’affaiblit, cette situation pourrait avoir des répercussions concrètes sur la qualité de crédit des prêts hypothécaires et d’autres dettes à la consommation.
Certains signes semblent indiquer que les paiements hypothécaires plus élevés accaparent une plus grande partie des revenus des ménages, ce qui fait en sorte qu’un plus grand nombre d’emprunteurs ne sont plus capables de respecter les paiements d’autres prêts et dettes. Soixante-seize pour cent des prêts hypothécaires en cours en date de février 2024 viendront à échéance d’ici la fin de 2026. Les nouveaux paiements plus élevés causeront un choc important aux propriétaires de maison qui ont contracté une hypothèque entre 2020 et 2022, lorsque les taux hypothécaires étaient plus bas. Les ménages les plus lourdement endettés et qui ont une hypothèque à taux variable mais des versements fixes vont subir un choc encore plus grand. Le Bureau du surintendant des institutions financières s’attend à ce que la hausse des paiements fasse augmenter le nombre de prêts hypothécaires résidentiels en souffrance ou en défaut. Les prêts hypothécaires pour lesquels les paiements ont déjà augmenté du fait du renouvellement ou du type de produit, comme les prêts à taux et à versements variables, affichent déjà des taux d’improductivité accrus.
Lors de son témoignage devant le Comité des banques, le surintendant des institutions financières a répété à maintes occasions que les prêts hypothécaires à taux variable et à versements fixes sont particulièrement problématiques. Les prêts hypothécaires à taux variable et à versements fixes constituent une part importante des prêts hypothécaires résidentiels en souffrance au Canada. Environ 15 % de ces prêts hypothécaires font l’objet d’un amortissement négatif, ce qui veut dire que les paiements prévus ne suffisent plus à rembourser l’intégralité des intérêts ou le principal. Dans ces cas, les prêteurs compensent le manque à gagner par l’augmentation du solde du principal et les nouveaux paiements hypothécaires sont fondés sur le principal ainsi augmenté.
Le Bureau du surintendant des institutions financières a fait savoir qu’il poursuivrait le dialogue avec l’industrie pour s’assurer que les institutions évaluent activement les risques que posent les prêts hypothécaires à taux variable et à versements fixes. À cet égard, il veillera notamment à :
[...] mettre en place des provisions et des fonds propres adéquats pour couvrir le risque de crédit accru, ainsi qu’à faire la promotion d’une intervention rapide (avant le renouvellement) auprès des emprunteurs vulnérables à un choc de paiement.
Honorables sénateurs, depuis que le gouvernement a publié l’Énoncé économique de l’automne 2023 en novembre dernier, il a publié deux rapports sur la dette du Canada.
Depuis son élection en 2015, le gouvernement a inscrit un déficit chaque année. Il doit donc emprunter pour financer les dépenses qui dépassent les recettes du gouvernement. Je pense qu’il attend toujours que le budget s’équilibre par lui-même. Il s’agit là de mon commentaire personnel et non de celui de la sénatrice Marshall.
Tous les budgets et les énoncés économiques de l’automne comprennent une mise à jour sur la stratégie de gestion de la dette du gouvernement. Celle-ci décrit notamment les activités d’emprunt prévues, les sources des emprunts, leur montant et la façon dont ils seront utilisés, ainsi qu’une prévision des frais de la dette publique.
L’énoncé économique de l’automne donne une mise à jour de la stratégie de gestion de la dette qui a été publiée dans le budget de l’année dernière. Dans cette stratégie, le gouvernement annonçait une augmentation de l’émission de titres et de bons du Trésor de 414 à 485 milliards de dollars, soit une augmentation de 71 milliards de dollars. On ne donne aucune raison pour cette augmentation. Le gouvernement signale également une augmentation des frais de la dette publique pour le dernier exercice, c’est-à-dire 2023-2024, de 43,9 milliards de dollars dans le budget de 2023 à 46,5 milliards de dollars dans l’énoncé économique de l’automne.
L’énoncé économique de l’automne fait également état d’une augmentation des frais de la dette publique pour l’exercice en cours, c’est-à-dire 2024-2025, qui passent de 46 milliards de dollars dans le budget de 2023 de l’an dernier à 52,4 milliards de dollars dans l’énoncé économique de l’automne 2023. Compte tenu de la récente présentation du nouveau budget, pour 2024-2025, le gouvernement a une fois de plus augmenté le coût estimé des frais de service de la dette pour cette année à 54,1 milliards de dollars.
En bref, les frais du service de la dette pour cette année ont augmenté sur une période de 12 mois, passant de 46 milliards de dollars dans le budget de l’année dernière à 52,4 milliards de dollars dans l’énoncé économique de l’automne, puis à 54,1 milliards de dollars dans le budget de cette année. Cela représente une augmentation de 8,1 milliards de dollars sur une période de 12 mois, soit 18 %.
Tous les coûts estimés du service de la dette ont connu des augmentations significatives. Le budget 2023 estimait que les coûts du service de la dette pour 2027-2028 s’élèveraient à 50,3 milliards de dollars. Un an plus tard, ces 50,3 milliards sont passés à la somme ahurissante de 60,9 milliards.
Les estimations des coûts du service de la dette augmentent continuellement, dans chaque nouveau document budgétaire du gouvernement. Outre une mise à jour de la stratégie de gestion de la dette dans chaque budget, sous la forme de l’énoncé économique de l’automne, la Loi sur la gestion des finances publiques exige le dépôt d’un rapport annuel sur la gestion de la dette dans les 30 jours suivant le dépôt des Comptes publics.
Malheureusement, le gouvernement ne publie le rapport sur la gestion de la dette qu’à la date limite prévue par la loi. En l’occurrence, le rapport sur la gestion de la dette a été publié avant Noël — les données dataient alors de neuf mois.
Ce rapport indiquait qu’en mars 2023, la dette contractée sur les marchés du gouvernement s’élevait à 1,259 billion de dollars, y compris la dette contractée sur les marchés des sociétés d’État. Ce montant de 1,259 billion de dollars est passé à 1,574 billion de dollars.
Il y a aussi l’obligation légale, en vertu de la Loi autorisant certains emprunts, de produire tous les trois ans un rapport sur les emprunts effectués.
Tout cela me déprime.
Le plus récent rapport sur les emprunts effectués a été déposé le 3 mai dernier. La Loi autorisant certains emprunts prévoit un plafond d’endettement pour le gouvernement; ce plafond s’élève actuellement à 1,831 billion de dollars. Le rapport indique un total d’emprunts plus à jour de 1,710 billion de dollars, en date du 23 mars 2024.
Étant donné que les emprunts du gouvernement approchent le plafond, nous nous attendions à ce qu’un projet de loi propose de relever ce plafond. Cette augmentation est prévue dans le projet de loi C-69, qui ferait passer le plafond de la dette publique de 1,831 billion de dollars à plus de 2 billions de dollars.
Chers collègues, ce scénario est déprimant.
Je tiens à remercier la sénatrice Marshall pour l’énorme travail qu’elle a accompli et pour l’aide qu’elle m’a apportée dans la préparation de mon discours.
Je suis certain que la sénatrice Marshall conviendra qu’il s’agit là d’une proposition que nous ne pouvons pas appuyer. Nous encourageons assurément tout le monde à réexaminer la question. Nous serions prêts à voter contre aujourd’hui. Ce qui doit arriver arrivera.
Merci, chers collègues.
Je poserai ma question au sénateur Plett; même s’il ne peut remplacer la sénatrice Marshall, nous lui donnerons l’occasion de répondre.
J’ai une question complémentaire à propos de ces montants astronomiques. Nous avons interrogé le gouverneur de la Banque du Canada à ce sujet dans une réunion du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie. La même semaine où le budget a été publié, les nouveaux chiffres relatifs à l’autorisation d’emprunt ont été dévoilés en toute discrétion. Cette dernière a augmenté de 16 % pour atteindre 2,13 billions de dollars.
Pensez-vous que l’augmentation du pouvoir d’emprunt indique que le gouvernement a l’intention de dépenser cette somme, au-delà des données budgétaires présentées dans l’énoncé économique de l’automne et dans le budget?
Vous pouvez vous tourner vers la sénatrice Marshall.
Je vous remercie de la question, sénatrice Wallin. Elle me rappelle la question facile que le sénateur Cuzner a posée à la ministre des Pêches plus tôt lui permettant de frapper un coup de circuit.
Comme mes observations et celles de la sénatrice Marshall l’ont illustré, le gouvernement a montré clairement qu’il est incapable de faire preuve d’un tant soit peu de retenue. La ministre des Finances l’a montré. Les libéraux se sont lancés dans une frénésie de dépenses qui ne cessera pas.
Je sais que c’est un peu cliché d’y revenir, mais il a été dit que le budget allait s’équilibrer de lui-même. Je pense que le premier ministre le croit parce qu’il n’a jamais dû équilibrer un livret de banque au cours de sa vie, et ce n’est pas maintenant qu’il commencera.
Merci. J’ai remarqué que d’autres sénateurs de votre groupe, y compris la sénatrice Marshall, ont hoché de la tête lorsque j’ai posé ma question très précise, à savoir si la hausse du pouvoir d’emprunt indique que les dépenses augmenteront de 2,13 billions de dollars.
Je suis désolé, oui, je pense que c’est ce que cela indique.
Sénateur Plett, accepteriez-vous de répondre à une autre question?
Si la question est facile, oui.
Vous avez demandé une question facile, et c’est ce que vous allez obtenir.
Je tiens à souligner que le discours que vous avez prononcé était instructif, équilibré et raisonnable. En disant cela, je remercie la sénatrice Marshall pour le travail soutenu qu’elle accomplit dans cette enceinte. Je la considère comme une ressource pour nous tous, et je l’apprécie vraiment.
Ma question, sénateur Plett, est la suivante : envisageriez-vous de demander à la sénatrice Marshall de vous aider à préparer tous vos discours à l’avenir?
Eh bien, sénatrice Lankin, j’apprécie également la sénatrice Marshall. Je ne peux qu’espérer et prier pour qu’elle siège encore dans cette auguste assemblée en 2025, lorsque les bonnes personnes seront de l’autre côté de la Chambre et qu’elle sera en mesure d’aider le gouvernement de Pierre Poilievre à équilibrer le budget, ce que le gouvernement actuel n’a jamais réussi à faire.
J’apprécie toujours énormément la contribution de la sénatrice Marshall à tout ce que je dis au Sénat. Je vous remercie.
Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?
Avec dissidence?
Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix : Oui.
Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.
Des voix : Non.
Son Honneur la Présidente : À mon avis, les oui l’emportent.
Je vois des sénateurs se lever.
Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?
Sénatrice Saint-Germain, sénateur Downe, êtes-vous d’accord pour que la sonnerie retentisse pendant quinze minutes?
Oui.
Sénateur Dalphond, une sonnerie de quinze minutes vous convient?
Oui.
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Le vote aura lieu à 18 h 33. Convoquez les sénateurs.