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Guerre et Paix : comment la Chambre du Sénat de l’édifice du Centre témoigne des sacrifices du Canada en temps de guerre

La Chambre du Sénat dans l’édifice du Centre

En février 2019, le Sénat a déménagé à l’édifice du Sénat du Canada, une ancienne gare ferroviaire construite en 1912. Le Sénat occupera cet emplacement temporaire pendant la réhabilitation de l’édifice du Centre du Parlement, la demeure permanente du Sénat.

Bien que l’édifice du Centre soit fermé pendant les travaux de réhabilitation, les Canadiens peuvent toujours découvrir son art et son architecture grâce à la visite virtuelle immersive du Sénat.


La construction de l’édifice du Centre a commencé pendant les jours les plus sombres de la Première Guerre mondiale, des mois après que l’édifice original du Parlement a été rasé par les flammes en 1916.

Deux décennies plus tard, une autre guerre mondiale menaçait d’éclater au moment où le sculpteur du Dominion Cléophas Soucy et ses sept adjoints multipliaient les sculptures (plus de cent pièces en trois ans) pour compléter la Chambre du Sénat.

Il n’est pas étonnant que le thème de la guerre et de la paix surgisse de tant de sculptures et de détails décoratifs de la Chambre. Cela témoigne d’un pays qui se remet d’une guerre tout en se préparant à une autre.

« La Grande Guerre a profondément marqué le pays, explique Johanna Mizgala, conservatrice en chef de la Chambre des communes. Tout le monde connaissait quelqu’un qui avait servi, que ce soit un camarade d’école, un membre de la famille ou quelqu’un de la communauté. C’était omniprésent. »

« Cela se reflète nécessairement ici », ajoute-t-elle.

Ces œuvres racontent une histoire solennelle, non seulement sur la Grande Guerre, mais aussi sur la façon dont les conflits et leurs séquelles ont façonné le Canada tout au long de son histoire.


Deux des huit peintures de guerre de la chambre du Sénat
Les peintures de guerre

Huit tableaux monumentaux illustrant les sacrifices du Canada durant la Première Guerre mondiale ont longtemps dominé la Chambre. Larges de plus de trois mètres et hautes de deux mètres chacun, ils font partie des mille œuvres commandées à l’aide du Fonds de souvenirs de guerre canadiens, dans le cadre du premier programme officiel consacré à l’art de guerre par le gouvernement du Canada.

En 1921, ils ont trouvé domicile dans la Chambre rouge, d’abord prêtés par le Musée des beaux-arts du Canada, puis par le Musée canadien de la guerre, lorsque leur propriété a été transférée en 1971. Ils ont été accrochés ici jusqu’au début de 2019, date à laquelle ils ont été retirés pour être restaurés et entreposés à long terme au Musée canadien de la guerre pendant la remise en état de l’édifice du Centre. Ils reviendront une fois le projet terminé.

Étonnamment peut-être, ils ne comportent pas de représentation des batailles.

« Les tableaux se concentrent sur des choses plus personnelles, souligne Mme Mizgala. Il n’y est pas question de la “gloire sur le champ de bataille”. Ces tableaux évoquent les sacrifices, les couts personnels, la souffrance et les séquelles. »

« Ils sont là pour rappeler aux sénateurs que certaines de leurs décisions entrainent des couts terribles, même dans les cas où c’est la bonne décision à prendre », ajoute-t-elle.


Le major-général James Wolfe et le marquis de Montcalm
Des effigies du major-général James Wolfe et le marquis de Montcalm

Des effigies du major-général britannique James Wolfe et du lieutenant-général français Louis‑Joseph, marquis de Montcalm – adversaires dans l’une des batailles les plus marquantes de l’histoire du Canada – nous observent des hauteurs, bien au-dessus de la tribune des spectateurs.

En septembre 1759, Wolfe a dirigé les forces britanniques contre la garnison française de 3 400 hommes postée à Québec. Sous le couvert de la nuit, il a mené une flottille qui a transporté 4 400 hommes le long du fleuve Saint‑Laurent, puis escaladé les falaises à l’ouest de la ville. À l’aube, les Britanniques ont formé leurs rangs sur les plaines d’Abraham, juste au-delà des murs de la ville, prenant le commandant français par surprise.

Montcalm s’est précipité au combat avant même que sa garnison puisse être renforcée et, en moins d’une heure, ses troupes ont été battues en brèche. La ville s’est rendue en quelques jours. Les deux commandants sont morts blessés sous la pluie de tirs de mousquet. Wolfe a rendu l’âme sur le champ de bataille et Montcalm a succombé le lendemain.

Montréal est tombé aux mains des Britanniques moins d’un an plus tard. Cela a marqué la fin de la domination française au Canada. Néanmoins, la population française est restée sur place, préservant sa langue, sa culture et ses institutions.

« Il faut analyser ces deux portraits dans le contexte de l’époque où ils ont été sculptés, dans les années 1930, explique Mme Mizgala. Le récit dominant demeurait celui de deux nations fondatrices qui s’étaient réunies dans le cadre de l’histoire fondatrice du Canada. »

« Nous tendons vers un récit historique différent, plus inclusif, de nos jours », ajoute-t-elle.


Major-général Sir Isaac Brock
Une effigie du major-général Sir Isaac Brock

Le major-général Sir Isaac Brock, surnommé « héros du Haut‑Canada » en raison de son rôle dans la défense de l’Amérique du Nord britannique pendant la guerre de 1812, a lui aussi son effigie tout près de là.

En tant que commandant des forces britanniques dans le Haut-Canada, Brock s’est préparé à une attaque des États-Unis, alors que beaucoup de gens doutaient d’une telle possibilité. Il a renforcé les défenses, organisé la milice et négocié des alliances avec des chefs autochtones, dont le puissant chef chaouanon, Tecumseh.

Lorsque la guerre a éclaté en 1812, Brock a réagi rapidement. Il a dirigé une force largement dépassée en nombre, composée de soldats réguliers, de miliciens et de guerriers autochtones. Il a cependant recouru à la tromperie et à l’effet de surprise pour terroriser le général américain William Hull et l’amener à rendre le fort de Detroit.

Deux mois plus tard, à Queenston Heights, Brock a été frappé par des tirs de mousquet alors qu’il menait une contre-attaque contre les envahisseurs américains. Bien que sa mort ait été un coup dur pour les Britanniques, l’arrivée de renforts a finalement forcé les Américains à reculer.

La représentation de Brock est étonnamment sobre, dans la mesure où le pays lui doit sa survie. « C’est un choix délibéré », explique Mme Mizgala.

« Les bâtisseurs de l’édifice du Centre reconnaissaient qu’il y a toujours un danger à trop mettre l’accent sur l’héroïsme, ajoute-t-elle. On risque d’accorder davantage d’attention à la fabrication de héros et de légendes, plutôt que de rappeler la profonde dévastation qu’apporte la guerre. »

Quatre des peintures de la Chambre du Sénat sur le thème de la guerre sont accrochées au mur ouest et font face à quatre autres peintures sur le mur est. Aucune ne dépeint des scènes de bataille. Elles se concentrent plutôt sur les séquelles de la guerre et sur des représentations du courage et de la détermination, loin des lignes de front.
Quatre des peintures de la Chambre du Sénat sur le thème de la guerre sont accrochées au mur ouest et font face à quatre autres peintures sur le mur est. Aucune ne dépeint des scènes de bataille. Elles se concentrent plutôt sur les séquelles de la guerre et sur des représentations du courage et de la détermination, loin des lignes de front.
Ypres, un centre historique de production de tissus près de la ligne de front belge, a été réduit en ruines pendant la Première Guerre mondiale. L’artiste James Kerr-Lawson, de Hamilton, en Ontario, a représenté les ruines de sa Halle aux draps médiévale et de sa cathédrale. (James Kerr-Lawson, La Halle aux draps, Ypres, huile sur toile, 1919, H : 278 cm x L : 364 cm, Beaverbrook Collection of War Art, Musée canadien de la guerre, CWM 19710261-0334)
Ypres, un centre historique de production de tissus près de la ligne de front belge, a été réduit en ruines pendant la Première Guerre mondiale. L’artiste James Kerr-Lawson, de Hamilton, en Ontario, a représenté les ruines de sa Halle aux draps médiévale et de sa cathédrale. (James Kerr-Lawson, La Halle aux draps, Ypres, huile sur toile, 1919, H : 278 cm x L : 364 cm, Beaverbrook Collection of War Art, Musée canadien de la guerre, CWM 19710261-0334)
Le peintre britannique George Clausen a voyagé en France pour y faire des croquis peu après l’armistice de novembre 1918. Ici, il représente des réfugiés qui retournaient à leurs maisons détruites. (Sir George Clausen, Le retour à la terre reconquise, huile sur toile, 1919, H : 274,3 cm x L : 366,3 cm, Beaverbrook Collection of War Art, Musée canadien de la guerre, CWM 19710261-0121)
Le peintre britannique George Clausen a voyagé en France pour y faire des croquis peu après l’armistice de novembre 1918. Ici, il représente des réfugiés qui retournaient à leurs maisons détruites. (Sir George Clausen, Le retour à la terre reconquise, huile sur toile, 1919, H : 274,3 cm x L : 366,3 cm, Beaverbrook Collection of War Art, Musée canadien de la guerre, CWM 19710261-0121)
Des effigies des commandants britanniques James Wolfe et Isaac Brock flanquent les armoiries du Royaume Uni au-dessus de l’entrée de la Chambre du Sénat.

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