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Rencontre avec la sculptrice qui a immortalisé le sénateur au pouvoir de persuasion tranquille

En février 2019, le Sénat a déménagé à l’édifice du Sénat du Canada, une ancienne gare ferroviaire construite en 1912. Le Sénat occupera cet emplacement temporaire pendant la réhabilitation de l’édifice du Centre du Parlement, demeure permanente du Sénat.

Bien que l’édifice du Centre soit fermé pendant les travaux de réhabilitation, les Canadiens peuvent toujours découvrir 
son art et son architecture grâce à la visite virtuelle immersive du Sénat.


La sculptrice gatinoise Rosemary Breault-Landry était excitée mais anxieuse.

C’était le 25 octobre 2001. Le foyer du Sénat était bondé de parlementaires et de représentants des Premières Nations pour le dévoilement de son buste en bronze de l’honorable James Gladstone, le premier sénateur canadien issu d’une Première Nation.

Mme Breault-Landry avait travaillé dur pendant un an et demi pour perfectionner chaque détail. Chaque point de couture de la coiffe cérémoniale était représenté avec justesse, et les barbes de chaque plume étaient parfaitement définies.

Elle s’était particulièrement beaucoup de peine pour rendre l’autorité tranquille du sénateur — un trait de caractère auquel le Président du Sénat Daniel Hays a fait allusion lors de cette soirée lorsqu’il a parlé des qualités de persuasion tranquille du sénateur Gladstone.

Mais le plus important était la manière dont elle avait représenté le nez.

« La famille de James Gladstone était présente, y compris son fils Fred, un homme de peu de mots », se rappelle Mme Breault-Landry. « Il s’est présenté et a dit “Je veux juste voir le nez, et je saurai si c’est réussi ou non” ».

« Je retenais mon souffle pendant qu’il examinait le buste. Enfin, il a dit “Oui, vous avez bien réussi son nez” ».

Esquisse dessinée par Mme Breault-Landry avant de commencer à travailler sur le buste de James Gladstone.
L’œuvre a été déménagée de l’édifice du Centre dans l’édifice du Sénat du Canada en 2018.
Un homme au pouvoir de persuasion tranquille

La cérémonie a eu lieu presque 30 ans exactement après le décès de James Gladstone, un homme qui a consacré sa vie à défendre les droits des Autochtones et qui a contribué à obtenir le droit de vote pour son peuple.

Cri de naissance, il est adopté par la qui fait partie de la nation des Pieds-Noirs, en 1920. Il s’établit dans la Première Nation Kainai, à 200 kilomètres au sud de Calgary. 

Ambitieux et insatiable, il tente sa chance dans tout ce qui peut lui faire gagner sa vie, notamment comme mineur de charbon, camionneur, imprimeur et éclaireur et interprète pour la GRC.

En 1921, il démarre sa propre ferme et il inspire ses voisins à adopter des pratiques agricoles modernes. Il est le premier de sa communauté à posséder un tracteur et le premier à faire installer l’électricité dans sa maison.

Sa défense éloquente de sa communauté, conjuguée à sa diplomatie tranquille, le mène en politique. Élu président de l’Association des Indiens de l’Alberta en 1949, il fait pression sur le gouvernement d’Ottawa pour qu’il apporte des améliorations à la Loi sur les Indiens.

Il devient rapidement une figure politique nationale. Le premier ministre John Diefenbaker, déterminé à étendre le droit de vote à tous les peuples des Premières Nations, nomme M. Gladstone au Sénat en 1958.

Lors de son premier discours, James Gladstone s’exprime partiellement dans la langue des Pieds-Noirs pour « inscrire au compte rendu officiel des Débats quelques mots dans la langue que parle mon propre peuple, les Pieds-Noirs, par déférence pour les premiers habitants du pays ».

Deux années plus tard, sa persévérance et sa force de persuasion permettent aux Indiens inscrits d’obtenir le droit de vote inconditionnel.

Au cours de ses 13 années passées au Sénat, il préside plusieurs comités, notamment le Comité mixte des Affaires indiennes et le Comité spécial sur l’utilisation des terres.

Sa santé étant défaillante, il prend sa retraite en mars 1971; six mois plus tard, il s’éteint à la suite d’une crise cardiaque.

Suivre sa muse

Rosemary Breault-Landry travaillait comme infirmière à Québec lorsqu’elle a eu la piqûre pour les arts.

« C’est Yvonne Dorian, une sculptrice et enseignante formidable de Montréal, qui m’a poussée », révèle Mme Breault-Landry. « Elle m’a encouragée à devenir une artiste à temps plein ».

« Le métier d’infirmière m’a beaucoup donné. Il m’a permis d’élever ma famille, mais j’ai réalisé que la création artistique était ce qui me rendait heureuse ».

Ce qui devait au départ être un cours d’été de trois semaines au Ontario College of Art, maintenant l’, à Toronto, s’est transformé en un programme à temps plein de quatre ans, à la fin duquel elle est retournée à Québec pour devenir sculptrice et professeure d’art à temps plein.

Très vite, une occasion professionnelle exceptionnelle s’est présentée. En octobre 1998, elle tombe sur un avis du Sénat, invitant les artistes à soumettre des propositions pour une sculpture du sénateur Gladstone.

« J’ai envoyé ma soumission un jour avant l’échéance », raconte Mme Breault-Landry. « Une semaine plus tard, je recevais une grande enveloppe en papier manille ».

« Je m’attendais à lire “Nous regrettons de vous informer…”, mais non, j’avais gagné! »

La sculptrice gatinoise Rosemary Breault-Landry a représenté le sénateur James Gladstone en tenue cérémoniale complète de Pied-Noir, avec coiffe et tunique en peau de daim. (Bronze, 2001. 57 cm (h) x 50 cm (l) x 34 cm (p). Collection d’œuvres d’art et de biens patrimoniaux du Sénat.)

Le studio de Mme Breault-Landry à Gatineau où sont exposées des esquisses, des peintures et des sculptures qu’elle a créées au cours de ses 30 années  de carrière.

Mme Breault-Landry apporte la touche finale à une œuvre récente.

Dévoilement du buste lors d’une cérémonie en 2001, pendant laquelle le fils de M. Gladstone, à gauche, et le Président du Sénat Daniel Hays, à droite, ont rendu hommage au sénateur pionnier. (Crédit photo : Famille de l’honorable James Gladstone)

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