« Way to be » : le sénateur Mitchell revient sur sa carrière au Sénat où il a défendu l’égalité
Marqué par l’expérience de soldat que son père a vécue durant la Deuxième Guerre mondiale, le sénateur Grant Mitchell a fait de l’égalité son cheval de bataille pendant sa carrière au Sénat. Que ce soit le mariage entre conjoints de même sexe, les droits des femmes, les protections de l’identité de genre ou le changement climatique, il a défendu l’équité pour tous.
Après une vie publique de près de 30 ans au service de l’Alberta, sa province d’origine — dont 15 ans dans la Chambre rouge — le sénateur Mitchell a pris sa retraite en avril 2020. Dans une entrevue avec SenCAplus, il revient sur sa carrière à la Chambre haute et la fonction du Sénat dans la démocratie canadienne.
Il y a 15 ans, le premier ministre Paul Martin vous a nommé sénateur. Vous aviez déjà été député libéral à l’Assemblée législative de l’Alberta pendant 12 ans, dont quatre à titre de chef de parti. Comment votre expérience politique vous a-t-elle préparé au Sénat?
Mon expérience à une assemblée législative ainsi que ma connaissance du processus législatif et du rôle des comités se sont révélées des atouts. Mon passage au Sénat a été relativement facile, puisque j’ai pris la parole tant de fois à l’Assemblée législative de l’Alberta.
J’ai aussi un sens aigu du patriotisme, qu’il est important d’avoir au Sénat. Comme mon père était militaire, j’ai habité dans sept provinces. Quand j’étais député, j’ai parcouru et visité l’Alberta et j’ai cogné aux portes de tous ses recoins. Ce travail a forgé de bonnes et profondes relations avec les Albertains et ce qui leur tient à cœur.
Votre premier vote majeur au Sénat concernait le mariage entre conjoints de même sexe. Vous avez continué à défendre l’égalité, notamment les droits des personnes transgenres, les droits des femmes, la lutte contre le harcèlement, et le fait de considérer le changement climatique comme une question de droits. Pourquoi ce travail a-t-il été si important pour vous?
Je ne me prétends pas un spécialiste des droits constitutionnels, mais ma grande motivation reste de faire mon possible pour que tous soient traités également, que personne ne soit maltraité ou rabaissé.
Mon père a combattu le mal durant la Deuxième Guerre mondiale. La défense du bien et des victimes d’injustice a toujours eu une grande influence dans nos vies. Mon père détestait les intimidateurs, et moi aussi. Personne n’a le droit de faire mal aux autres, de les rejeter ou de les rabaisser. Il faut traiter tout le monde de la même manière.
Le Canada se distingue grâce à sa diversité et à la façon dont il a créé une société ouverte et bienveillante. Cela dit, nous ne sommes pas parfaits. Les préjugés ont une nature insidieuse : les femmes ne sont pas encore fondamentalement égales aux hommes. Il y a tout juste deux ans à l’échelon fédéral, nous avons établi les droits des personnes transgenres qui ont été victimes de pressions et d’agonies dans une mesure inimaginable pour la plupart d’entre nous. Nous pouvons être fiers de nos avancées, mais il reste encore beaucoup à faire.
Vous avez abondamment travaillé dans les comités. Quel en est votre souvenir le plus mémorable?
Mon souvenir le plus mémorable de mon travail en comité restera, sans contredit, ma visite avec le Comité sénatorial de la sécurité nationale et de la défense en Afghanistan durant la guerre. C’était une expérience remarquable du moment où nous avons atterri à la base aérienne de Kandahar. Je n’oublierai jamais ma rencontre avec les Canadiennes et les Canadiens là-bas qui dirigeaient le monde. Lors de notre visite, un général canadien était à la tête des troupes occidentales stationnées en Afghanistan, et un autre général canadien dirigeait les opérations à Kandahar. Nous avons eu la chance de voir le personnel militaire en action, vivre la vie des Afghans et observer comment les femmes étaient traitées.
C’était poignant. Les visites de ce genre ont éclairé les recommandations du comité, notamment à propos du besoin de chars d’assaut et d’hélicoptères. Les soldats canadiens ne volaient pas au-dessus des engins explosifs improvisés comme les autres militaires; le Canada a donc décidé de leur fournir des hélicoptères et des chars d’assaut plus lourds afin qu’ils s’adaptent à la nature du combat.
Un autre volet important de mon travail en comité a porté sur le harcèlement sexuel dans la Gendarmerie Royale du Canada (GRC). J’ai lancé cette étude avec le consensus de tous les partis au Sénat, qui est devenu un projet à long terme qui a amorcé un changement de culture à la GRC.
J’ai également été membre de longue date du Comité sénatorial de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Le comité a souvent été pris dans le tourbillon du débat sur l’économie et l’environnement, mais nous avons fait beaucoup de travail pour mettre en lumière la question du changement climatique.
À la dernière session de la législature, vous êtes devenu le premier sénateur à devenir agent de liaison du gouvernement au Sénat qui fait partie du Bureau du représentant du gouvernement. Qu’avez-vous appris de cette expérience et comment cette fonction façonnera-t-elle le Sénat?
Personne dans le monde n’avait encore occupé ce poste. C’était intéressant parce qu’on était chargé d’adopter des projets de loi du gouvernement sans le caucus habituel sur qui compter.
Il faut comprendre qu’il est dangereux pour le Sénat de rejeter un projet de loi du gouvernement sans raison particulièrement valable, et qu’un rejet n’est arrivé qu’à quelques reprises depuis 1945. Rien ne garantit qu’un projet de loi soit adopté malgré la pression énorme et la grande responsabilité de faire accepter les mesures législatives. Il s’agit d’une fonction terriblement exigeante – dans le bon sens – et inédite, car elle n’a jamais existé auparavant.
J’ai toujours été impressionné par le grand souci des sénateurs et des parlementaires à faire ce qu’il faut et à prendre très à cœur les intérêts des Canadiens. J’ai appris que les gens sont réceptifs aux bons arguments. J’ai aussi beaucoup appris de mes collègues du Bureau du représentant du gouvernement, le sénateur Peter Harder et la sénatrice Diane Bellemare, qui ont enrichi un des moments forts de ma carrière. Je suis reconnaissant d’avoir eu la chance d’être agent de liaison du gouvernement, et du fait que le premier ministre m’ait accordé sa confiance pour cette responsabilité.
J’ai aussi appris qu’il nous serait impossible d’effectuer notre travail au Sénat sans notre personnel remarquable. J’ai été très chanceux d’avoir eu le soutien de gens exceptionnels y compris Sarah Gray, qui a été ma chef de cabinet pendant 12 ans.
Pour ce qui est du Bureau du représentant du gouvernement et de la manière dont il façonne le Sénat, je suis d’avis que les nouveaux sénateurs ne sont pas meilleurs que les anciens. Je crois plutôt que les personnes nommées dans le nouveau système ne sont pas exposées aux idées partisanes et que ce modèle contribue à la crédibilité générale du Sénat. Le Sénat a certes accompli du bon travail dans les deux systèmes, mais le travail réalisé aujourd’hui se distingue par un plus grand sens de l’indépendance.
On se rapproche d’un modèle perfectionné de complémentarité, ce qui revêt énormément d’importance. Personne n’a besoin d’une autre chambre animée par un esprit de partisanerie et formé de caucus. La Chambre des communes tient déjà ce rôle et c’est bien dans l’ordre des choses. Il faut un dernier élément : un regard plus technique et plus impartial. Il ne s’agit pas d’être meilleur, mais bien d’être différent.
En plus du programme législatif du Sénat, vous avez appuyé les changements au soutien que l’Administration apporte aux sénateurs. Pourquoi cela était-il si important pour vous?
Mon soutien à l’Administration portait surtout sur les communications. Nos institutions se battent pour leur crédibilité. Le Sénat a maintenant un service de communication moderne et une direction qui attirent l’attention d’autres législatures au Canada et à travers le monde. Il est extrêmement difficile de tenir les rênes durant les épreuves si nous ne respectons pas les institutions. Les médias sociaux et le cynisme continuent à éroder leur crédibilité. Pour les en empêcher, il nous faut faire connaître le travail accompli afin que les Canadiens soient rassurés et aient confiance dans leurs institutions. Il est capital de contribuer à une gouvernance politique solide, positive et efficace pour faire du Canada un pays où il fait si bon vivre.
De manière plus générale, j’ai un profond respect pour le personnel de l’Administration, qu’il s’agisse des pages, des greffiers, des gardes de sécurité ou des guides. Les gens qui travaillent au Sénat croient fermement dans l’institution. Comme nous, ils aiment l’institution. Ils appuient le soutien du Sénat de façon si remarquable et que l’on ne peut pas tenir pour acquis.
Votre expression favorite « way to be » est bien connue de tous. Que signifie-t-elle et quel en est l’effet espéré sur les autres?
Je l’ai reprise d’un jeune qui a travaillé pour moi il y a une trentaine d’années. Il est important de faire preuve d’optimisme en présence de ses collègues et de ses subalternes. Il est facile de croire que des gens intelligents et importants dans l’organisation n’en ont pas besoin, car ils sont capables et confiants. Tout le monde a pourtant besoin d’encouragement et de reconnaissance. « Way to be » est devenue ma façon de dire merci et « bon travail ». J’aime simplement la dire!
À propos d’encourager les autres, avez-vous des conseils à donner aux nouveaux sénateurs?
Quand je discute avec mes nouveaux collègues, je commence par indiquer la nature remarquable du Sénat et du régime parlementaire, qui est le plus réussi de la planète. Sa pérennité d’au moins 900 ans tient à la capacité de montrer la condition humaine et de s’adapter aux besoins de l’homme.
Ensuite, je les avertis de mettre les choses dans leur contexte. Il est facile de croire que je suis important, mais je ne le suis pas. J’ai eu la chance d’occuper des fonctions importantes et j’espère que je les ai remplies avec honneur.
Mon dernier conseil est que la spécialisation est importante. Selon mon expérience, les grands sénateurs se spécialisent dans un ou deux dossiers. L’ancienne sénatrice Sharon Carstairs figure parmi les plus grands sénateurs que j’ai connus, et elle est devenue une spécialiste internationale des soins palliatifs. Pour ma part, j’ai choisi les droits des femmes et le changement climatique et j’ai fourni des informations aux comités auxquels j’ai siégé et pour les études auxquelles je tenais. Il n’y avait donc qu’un petit pas à franchir pour passer de l’égalité des femmes à l’égalité en général et ensuite à l’égalité d’accès au mariage. Par la suite, le parrainage du projet de loi C-16 sur les droits des personnes transgenres a été sans aucun doute le dossier le plus important et le plus valorisant auquel j’ai pu travailler.
En tant que sénateur de l’Alberta, qu’est-ce que les Canadiens devraient connaître de votre province et comment cela a‑t‑il influencé votre travail de sénateur?
Les gens de l’Alberta sont d’une grande bonté : ils respectent et prennent soin de leurs voisins. Le discours national comprend parfois un sentiment d’aliénation, mais les Albertains sont très attachés au Canada et aux questions qui préoccupent les Canadiens comme l’environnement. Ce sont des gens très vaillants qui travaillent sans relâche et qui mesurent leur contribution à la société à la lumière de leur prospérité. Il s’agit simplement de très bonnes personnes qui veulent faire de leur province et de leur pays un endroit où il fait encore mieux vivre.
Quelles seront vos priorités dans le prochain chapitre de votre vie?
Mon épouse Teresa et moi avons trois fils qui habitent à Vancouver, tout comme notre petit-fils. Si vous le croisez dans la rue, vous le reconnaîtrez tout de suite parce qu’il est le plus beau bébé du monde. Nous aimons Edmonton et y avons passé de bons moments, mais les allers-retours entre Ottawa et Edmonton semblaient nous éloigner de plus en plus de nos enfants. Je me suis toujours beaucoup absenté, et mon absence me hante. C’est pourquoi nous avons déménagé en Colombie‑Britannique, dans la vallée de l’Okanagan qui se trouve à cinq heures de voiture de Vancouver. Ma mère est originaire de la vallée et c’est ici qu’elle a rencontré mon père. J’y ai donc des racines.
Je veux aussi me remettre en forme. Par le passé, j’ai fait des triathlons Ironman à Penticton, en Colombie-Britannique, et à Hawaï. J’ai couru, nagé, et pédalé des milliers de kilomètres. Je veux me sentir à nouveau en pleine forme. En fait, je pars à vélo après cette entrevue!
L’honorable Grant Mitchell a pris sa retraite du Sénat du Canada en avril 2020. Visitez le site web Parlinfo de la bibliothèque du parlement et apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.
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Après une vie publique de près de 30 ans au service de l’Alberta, sa province d’origine — dont 15 ans dans la Chambre rouge — le sénateur Mitchell a pris sa retraite en avril 2020. Dans une entrevue avec SenCAplus, il revient sur sa carrière à la Chambre haute et la fonction du Sénat dans la démocratie canadienne.
Il y a 15 ans, le premier ministre Paul Martin vous a nommé sénateur. Vous aviez déjà été député libéral à l’Assemblée législative de l’Alberta pendant 12 ans, dont quatre à titre de chef de parti. Comment votre expérience politique vous a-t-elle préparé au Sénat?
Mon expérience à une assemblée législative ainsi que ma connaissance du processus législatif et du rôle des comités se sont révélées des atouts. Mon passage au Sénat a été relativement facile, puisque j’ai pris la parole tant de fois à l’Assemblée législative de l’Alberta.
J’ai aussi un sens aigu du patriotisme, qu’il est important d’avoir au Sénat. Comme mon père était militaire, j’ai habité dans sept provinces. Quand j’étais député, j’ai parcouru et visité l’Alberta et j’ai cogné aux portes de tous ses recoins. Ce travail a forgé de bonnes et profondes relations avec les Albertains et ce qui leur tient à cœur.
Votre premier vote majeur au Sénat concernait le mariage entre conjoints de même sexe. Vous avez continué à défendre l’égalité, notamment les droits des personnes transgenres, les droits des femmes, la lutte contre le harcèlement, et le fait de considérer le changement climatique comme une question de droits. Pourquoi ce travail a-t-il été si important pour vous?
Je ne me prétends pas un spécialiste des droits constitutionnels, mais ma grande motivation reste de faire mon possible pour que tous soient traités également, que personne ne soit maltraité ou rabaissé.
Mon père a combattu le mal durant la Deuxième Guerre mondiale. La défense du bien et des victimes d’injustice a toujours eu une grande influence dans nos vies. Mon père détestait les intimidateurs, et moi aussi. Personne n’a le droit de faire mal aux autres, de les rejeter ou de les rabaisser. Il faut traiter tout le monde de la même manière.
Le Canada se distingue grâce à sa diversité et à la façon dont il a créé une société ouverte et bienveillante. Cela dit, nous ne sommes pas parfaits. Les préjugés ont une nature insidieuse : les femmes ne sont pas encore fondamentalement égales aux hommes. Il y a tout juste deux ans à l’échelon fédéral, nous avons établi les droits des personnes transgenres qui ont été victimes de pressions et d’agonies dans une mesure inimaginable pour la plupart d’entre nous. Nous pouvons être fiers de nos avancées, mais il reste encore beaucoup à faire.
Vous avez abondamment travaillé dans les comités. Quel en est votre souvenir le plus mémorable?
Mon souvenir le plus mémorable de mon travail en comité restera, sans contredit, ma visite avec le Comité sénatorial de la sécurité nationale et de la défense en Afghanistan durant la guerre. C’était une expérience remarquable du moment où nous avons atterri à la base aérienne de Kandahar. Je n’oublierai jamais ma rencontre avec les Canadiennes et les Canadiens là-bas qui dirigeaient le monde. Lors de notre visite, un général canadien était à la tête des troupes occidentales stationnées en Afghanistan, et un autre général canadien dirigeait les opérations à Kandahar. Nous avons eu la chance de voir le personnel militaire en action, vivre la vie des Afghans et observer comment les femmes étaient traitées.
C’était poignant. Les visites de ce genre ont éclairé les recommandations du comité, notamment à propos du besoin de chars d’assaut et d’hélicoptères. Les soldats canadiens ne volaient pas au-dessus des engins explosifs improvisés comme les autres militaires; le Canada a donc décidé de leur fournir des hélicoptères et des chars d’assaut plus lourds afin qu’ils s’adaptent à la nature du combat.
Un autre volet important de mon travail en comité a porté sur le harcèlement sexuel dans la Gendarmerie Royale du Canada (GRC). J’ai lancé cette étude avec le consensus de tous les partis au Sénat, qui est devenu un projet à long terme qui a amorcé un changement de culture à la GRC.
J’ai également été membre de longue date du Comité sénatorial de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Le comité a souvent été pris dans le tourbillon du débat sur l’économie et l’environnement, mais nous avons fait beaucoup de travail pour mettre en lumière la question du changement climatique.
À la dernière session de la législature, vous êtes devenu le premier sénateur à devenir agent de liaison du gouvernement au Sénat qui fait partie du Bureau du représentant du gouvernement. Qu’avez-vous appris de cette expérience et comment cette fonction façonnera-t-elle le Sénat?
Personne dans le monde n’avait encore occupé ce poste. C’était intéressant parce qu’on était chargé d’adopter des projets de loi du gouvernement sans le caucus habituel sur qui compter.
Il faut comprendre qu’il est dangereux pour le Sénat de rejeter un projet de loi du gouvernement sans raison particulièrement valable, et qu’un rejet n’est arrivé qu’à quelques reprises depuis 1945. Rien ne garantit qu’un projet de loi soit adopté malgré la pression énorme et la grande responsabilité de faire accepter les mesures législatives. Il s’agit d’une fonction terriblement exigeante – dans le bon sens – et inédite, car elle n’a jamais existé auparavant.
J’ai toujours été impressionné par le grand souci des sénateurs et des parlementaires à faire ce qu’il faut et à prendre très à cœur les intérêts des Canadiens. J’ai appris que les gens sont réceptifs aux bons arguments. J’ai aussi beaucoup appris de mes collègues du Bureau du représentant du gouvernement, le sénateur Peter Harder et la sénatrice Diane Bellemare, qui ont enrichi un des moments forts de ma carrière. Je suis reconnaissant d’avoir eu la chance d’être agent de liaison du gouvernement, et du fait que le premier ministre m’ait accordé sa confiance pour cette responsabilité.
J’ai aussi appris qu’il nous serait impossible d’effectuer notre travail au Sénat sans notre personnel remarquable. J’ai été très chanceux d’avoir eu le soutien de gens exceptionnels y compris Sarah Gray, qui a été ma chef de cabinet pendant 12 ans.
Pour ce qui est du Bureau du représentant du gouvernement et de la manière dont il façonne le Sénat, je suis d’avis que les nouveaux sénateurs ne sont pas meilleurs que les anciens. Je crois plutôt que les personnes nommées dans le nouveau système ne sont pas exposées aux idées partisanes et que ce modèle contribue à la crédibilité générale du Sénat. Le Sénat a certes accompli du bon travail dans les deux systèmes, mais le travail réalisé aujourd’hui se distingue par un plus grand sens de l’indépendance.
On se rapproche d’un modèle perfectionné de complémentarité, ce qui revêt énormément d’importance. Personne n’a besoin d’une autre chambre animée par un esprit de partisanerie et formé de caucus. La Chambre des communes tient déjà ce rôle et c’est bien dans l’ordre des choses. Il faut un dernier élément : un regard plus technique et plus impartial. Il ne s’agit pas d’être meilleur, mais bien d’être différent.
En plus du programme législatif du Sénat, vous avez appuyé les changements au soutien que l’Administration apporte aux sénateurs. Pourquoi cela était-il si important pour vous?
Mon soutien à l’Administration portait surtout sur les communications. Nos institutions se battent pour leur crédibilité. Le Sénat a maintenant un service de communication moderne et une direction qui attirent l’attention d’autres législatures au Canada et à travers le monde. Il est extrêmement difficile de tenir les rênes durant les épreuves si nous ne respectons pas les institutions. Les médias sociaux et le cynisme continuent à éroder leur crédibilité. Pour les en empêcher, il nous faut faire connaître le travail accompli afin que les Canadiens soient rassurés et aient confiance dans leurs institutions. Il est capital de contribuer à une gouvernance politique solide, positive et efficace pour faire du Canada un pays où il fait si bon vivre.
De manière plus générale, j’ai un profond respect pour le personnel de l’Administration, qu’il s’agisse des pages, des greffiers, des gardes de sécurité ou des guides. Les gens qui travaillent au Sénat croient fermement dans l’institution. Comme nous, ils aiment l’institution. Ils appuient le soutien du Sénat de façon si remarquable et que l’on ne peut pas tenir pour acquis.
Votre expression favorite « way to be » est bien connue de tous. Que signifie-t-elle et quel en est l’effet espéré sur les autres?
Je l’ai reprise d’un jeune qui a travaillé pour moi il y a une trentaine d’années. Il est important de faire preuve d’optimisme en présence de ses collègues et de ses subalternes. Il est facile de croire que des gens intelligents et importants dans l’organisation n’en ont pas besoin, car ils sont capables et confiants. Tout le monde a pourtant besoin d’encouragement et de reconnaissance. « Way to be » est devenue ma façon de dire merci et « bon travail ». J’aime simplement la dire!
À propos d’encourager les autres, avez-vous des conseils à donner aux nouveaux sénateurs?
Quand je discute avec mes nouveaux collègues, je commence par indiquer la nature remarquable du Sénat et du régime parlementaire, qui est le plus réussi de la planète. Sa pérennité d’au moins 900 ans tient à la capacité de montrer la condition humaine et de s’adapter aux besoins de l’homme.
Ensuite, je les avertis de mettre les choses dans leur contexte. Il est facile de croire que je suis important, mais je ne le suis pas. J’ai eu la chance d’occuper des fonctions importantes et j’espère que je les ai remplies avec honneur.
Mon dernier conseil est que la spécialisation est importante. Selon mon expérience, les grands sénateurs se spécialisent dans un ou deux dossiers. L’ancienne sénatrice Sharon Carstairs figure parmi les plus grands sénateurs que j’ai connus, et elle est devenue une spécialiste internationale des soins palliatifs. Pour ma part, j’ai choisi les droits des femmes et le changement climatique et j’ai fourni des informations aux comités auxquels j’ai siégé et pour les études auxquelles je tenais. Il n’y avait donc qu’un petit pas à franchir pour passer de l’égalité des femmes à l’égalité en général et ensuite à l’égalité d’accès au mariage. Par la suite, le parrainage du projet de loi C-16 sur les droits des personnes transgenres a été sans aucun doute le dossier le plus important et le plus valorisant auquel j’ai pu travailler.
En tant que sénateur de l’Alberta, qu’est-ce que les Canadiens devraient connaître de votre province et comment cela a‑t‑il influencé votre travail de sénateur?
Les gens de l’Alberta sont d’une grande bonté : ils respectent et prennent soin de leurs voisins. Le discours national comprend parfois un sentiment d’aliénation, mais les Albertains sont très attachés au Canada et aux questions qui préoccupent les Canadiens comme l’environnement. Ce sont des gens très vaillants qui travaillent sans relâche et qui mesurent leur contribution à la société à la lumière de leur prospérité. Il s’agit simplement de très bonnes personnes qui veulent faire de leur province et de leur pays un endroit où il fait encore mieux vivre.
Quelles seront vos priorités dans le prochain chapitre de votre vie?
Mon épouse Teresa et moi avons trois fils qui habitent à Vancouver, tout comme notre petit-fils. Si vous le croisez dans la rue, vous le reconnaîtrez tout de suite parce qu’il est le plus beau bébé du monde. Nous aimons Edmonton et y avons passé de bons moments, mais les allers-retours entre Ottawa et Edmonton semblaient nous éloigner de plus en plus de nos enfants. Je me suis toujours beaucoup absenté, et mon absence me hante. C’est pourquoi nous avons déménagé en Colombie‑Britannique, dans la vallée de l’Okanagan qui se trouve à cinq heures de voiture de Vancouver. Ma mère est originaire de la vallée et c’est ici qu’elle a rencontré mon père. J’y ai donc des racines.
Je veux aussi me remettre en forme. Par le passé, j’ai fait des triathlons Ironman à Penticton, en Colombie-Britannique, et à Hawaï. J’ai couru, nagé, et pédalé des milliers de kilomètres. Je veux me sentir à nouveau en pleine forme. En fait, je pars à vélo après cette entrevue!
L’honorable Grant Mitchell a pris sa retraite du Sénat du Canada en avril 2020. Visitez le site web Parlinfo de la bibliothèque du parlement et apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.