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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie


La santé des Canadiens – Le rôle du gouvernement fédéral

Rapport final

Volume six : Recommandations en vue d'une réforme

Le comité sénatorial permanent des Affaires sociales, de la science et de la technologie

Président : L’honorable Michael J. L. Kirby
Vice-président : L’honorable Marjory LeBreton

Octobre 2002


TABLE DES MATIÈRES

TABLE DES MATIÈRES

ORDRE DE RENVOI

SÉNATEURS

LISTE DES ABRÉVIATIONS

REMERCIEMENTS

AVANT-PROPOS

INTRODUCTION

PARTIE I : RESPONSABILISATION

CHAPITRE UN
LA NÉCESSITÉ D'UN RAPPORT ANNUEL SUR L'ÉTAT DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ ET SUR L'ÉTAT DE SANTÉ DES CANADIENS
1.1 Résumé de quelques points saillants des volumes un à cinq
    1.1.1 Le rôle du gouvernement fédéral
    1.1.2 Objectifs de la politique fédérale en matière de soins de santé
    1.1.3 L'actuel système n'est pas financièrement viable
    1.1.4 Une garantie nationale de soins de santé est essentielle au succès de la réforme 
1.2 Améliorer la gouvernance - La nécessité d'un commissaire national aux soins de santé
    1.2.1 Association médicale canadienne (AMC)
    1.2.2 Colleen Flood et Sujit Choudry
    1.2.3 Tom Kent
    1.2.4 Duane Adams
    1.2.5 Lawrence Nestman
1.3 La proposition du Comité

PARTIE II : MESURES VISANT L'EFFICIENCE

CHAPITRE DEUX
RESTRUCTURATION ET FINANCEMENT DES HÔPITAUX AU CANADA
2.1 Méthodes de financement des hôpitaux au Canada : Avantages et inconvénients
    2.1.1 Financement élément par élément 
    2.1.2 Discrétion ministérielle
    2.1.3 Financement fondé sur la population
    2.1.4 Financement par budget global
    2.1.5 Financement fondé sur les politiques
    2.1.6 Financement fondé sur les établissements
    2.1.7 Financement par projet
    2.1.8 Financement fondé sur les services dispensés
2.2 Financement fondé sur les services dispensés : Examen de l'expérience internationale
    2.2.1 États-Unis
    2.2.2 Royaume-Uni
    2.2.3 France
    2.2.4 Danemark
    2.2.5 Norvège
    2.2.6 Examen de l'expérience internationale par le comité Bédard
2.3 Justification du financement fondé sur les services dispensés au Canada
    2.3.1 Pertinence du choix de services
    2.3.2 Services excessifs et surévaluation
    2.3.3 Taux, information et données
    2.3.4 Innovation
    2.3.5 Soins de santé complets
    2.3.6 Escalade des coûts
    2.3.7 Manque de simplicité
    2.3.8 Commentaires du Comité
2.4 Les centres universitaires des sciences de la santé et la complexité des hôpitaux d'enseignement
2.5 Petits hôpitaux et hôpitaux communautaires ruraux
2.6 Financement des besoins en immobilisations des hôpitaux canadiens
2.7 Établissements de soins de santé publics ou privés?
Annexe 2.1 : Centres universitaires des sciences de la santé et hôpitaux et régies régionales de la santé affiliés

CHAPITRE TROIS
DÉLÉGUER PLUS DE RESPONSABILITÉS AUX RÉGIES RÉGIONALES DE LA SANTÉ
3.1 Un tableau des RRS au Canada
3.2 RRS : Objectifs et réalisations
3.3 Obstacles qui empêchent les RRS de mettre pleinement à profit leur potentiel
3.4 Les RRS et le potentiel des marchés internes
3.5 Commentaires du Comité

CHAPITRE QUATRE
RÉFORME DES SOINS DE SANTÉ PRIMAIRES

4.1 Pourquoi une réforme des soins de santé primaires est?elle nécessaire?
4.2 Les provinces et la réforme des soins primaires
    4.2.1 Rapports récents
    4.2.2 Le Réseau santé-famille de l'Ontario
    4.2.3 Québec
    4.2.4 Nouveau?Brunswick
4.3 Surmonter les obstacles au changement
4.4 Le rôle du gouvernement fédéral
Annexe 4.1 : Régime d'envellopes budgétaires pour les omnipraticiens en Grande-Bretagne

PARTIE III : LA GARANTIE DE SOINS DE SANTÉ

CHAPITRE CINQ
DES SOINS DE SANTE EN TEMPS OPPORTUN
5.1 Le droit aux soins de santé - Perception du public ou droit reconnu par la loi?
5.2 Disponibilité des services couverts par le régime public à l'extérieur du système public de soins de santé
5.3 Prestation de soins de santé en temps opportun et article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés
5.4 Commentaires du Comité

CHAPITRE SIX
LA GARANTIE DE SOINS DE SANTÉ

6.1 Le problème des listes d'attente : la perception du public
6.2 Le problème des listes d'attente : la situation réelle
6.3 L'expérience canadienne
    6.3.1 Réseau de soins cardiaques de l'Ontario (RSCO)
    6.3.2 Projet de rationalisation des listes d'attente dans l'Ouest canadien
6.4 Expérience internationale
    6.4.1 Suède
    6.4.2 Danemark 
6.5 Recommandations du Comité
6.6 Les conséquences possibles d'une non-application de la garantie de soins de santé
6.7 Quelques réflexions sur la garantie de soins de santé 

PARTIE IV : RESSERRER LES MAILLES DU FILET DE SÉCURITÉ

CHAPITRE SEPT
ÉTENDRE LA COUVERTURE POUR INCLURE LA PROTECTION CONTRE LES COÛTS EXORBITANTS DES MÉDICAMENTS DE PRESCRIPTION
7.1 Tendances des dépenses au titre des médicaments
7.2 Comparaisons avec d'autres pays
7.3 L'assurance pour les médicaments de prescription au Canada
    7.3.1 Régimes publics d'assurance-médicaments
    7.3.2 Régimes privés d'assurance-médicaments
    7.3.3 Les caractéristiques des régimes d'assurance et leur incidence sur la protection contre les frais élevés de médicaments
7.4 Un phénomène nouveau : Les dépenses exorbitantes en médicaments de prescription
7.5 Protéger les Canadiens contre les frais exorbitants de médicaments de prescription 149
    7.5.1 Comment fonctionnerait le régime
    7.5.2 Avantages du régime proposé
    7.5.3 Combien coûterait le régime?
    7.5.4 Proposition du Comité relative à un régime d'assurance contre les frais exorbitants de médicaments de prescription
7.6 Nécessité d'une liste nationale des médicaments admissibles

CHAPITRE HUIT
ÉLARGIR LA COUVERTURE POUR INCLURE LES SOINS ACTIFS À DOMICILE

8.1 Bref aperçu des principaux points relevés dans les volumes deux et quatre à propos des soins à domicile
8.2 Autres options
8.3 Le programme extra-mural au Nouveau-Brunswick
    8.3.1 S'inspirer de l'exemple du Nouveau-Brunswick : renvois directs aux soins à domicile
8.4 Organiser et fournir des soins actifs à domicile
    8.4.1 Définition des soins actifs à domicile
        8.4.1.1 Quand les services de soins actifs à domicile (SAD) commencent-ils? 164
        8.4.1.2 Quand les SAD se terminent-ils?
    8.4.2 Dispositions organisationnelles pour les SAD
    8.4.3 Qui fournit des SAD?
8.5 Le coût d'un programme national de soins actifs à domicile
    8.5.1 Comment calculer le coût d'un programme national de SAD
    8.5.2 Et les coûts cachés?
    8.5.3 Combien coûtera un programme national de SAD?
8.6 Payer les soins post-hospitaliers à domicile

CHAPITRE NEUF
ÉTENDRE LA COUVERTURE POUR INCLURE LES SOINS PALLIATIFS À DOMICILE

9.1 Nécessité d'un programme national de soins palliatifs
9.2 Aide financière aux fournisseurs de soins palliatifs à domicile
9.3 Crédit d'impôt pour fournisseurs de soins
9.4 Protection des emplois
9.5 Conclusion

PARTIE V : ACCROÎTRE LA CAPACITÉ ET CONSTRUIRE L'INFRASTRUCTURE

CHAPITRE DIX
LE RÔLE DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL DANS L'INFRASTRUCTURE DE SOINS DE SANTÉ
10.1 Technologies de la santé
10.2 Dossiers de santé électroniques
10.3 Évaluation de la qualité, de l'efficacité et des résultats
10.4 Protection des renseignements personnels sur la santé

CHAPITRE ONZE
LES RESSOURCES HUMAINES DE LA SANTÉ
11.1 La gravité de la pénurie de ressources humaines en santé
11.2 Les ressources humaines de la santé : Nécessité d'une stratégie nationale
11.3 Accroître le nombre de médecins formés au Canada
11.4 Intégration des diplômés en médecine étrangers
11.5 Réduire la pénurie d'infirmières
11.6 Professions paramédicales
11.7 Financement des études supérieures
11.8 Ressources humaines de la santé : Examen des règles relatives au champ de pratique
11.9 Commentaires du Comité

CHAPITRE DOUZE
FAVORISER L'EXCELLENCE DANS LA RECHERCHE CANADIENNE EN SANTÉ
12.1 Assumer le leadership dans la recherche en santé
12.2 S'engager dans la révolution scientifique
12.3 Garantir un environnement de recherche prévisible
    12.3.1 Le financement fédéral de la recherche en santé
    12.3.2 La recherche fédérale interne en santé
12.4 Rehausser la qualité des services de santé et de la prestation des soins
12.5 Améliorer l'état de santé des populations vulnérables
12.6 Commercialiser les résultats de la recherche en santé
12.7 Respecter les normes d'éthique les plus élevées dans la recherche en santé
    12.7.1 La recherche sur des sujets humains
    12.7.2 Questions suscitées par la recherche sur des sujets humains
    12.7.3 L'utilisation d'animaux dans la recherche
    12.7.4 La confidentialité des renseignements médicaux personnels
    12.7.5 La confidentialité de l'information génétique
    12.7.6 Les situations possibles de conflit d'intérêts

PARTIE VI : PROMOTION DE LA SANTÉ ET PRÉVENTION DE LA MALADIE

CHAPITRE TREIZE
UNE POLITIQUE PUBLIQUE " PRO?SANTÉ " - LA SANTÉ AU-DELÀ DES SOINS DE SANTÉ

13.1 Tendances de la maladie
    13.1.1 Maladies infectieuses
    13.1.2 Maladies chroniques
    13.1.3 Blessures
    13.1.4 Problèmes de santé mentale
13.2 Fardeau économique de la maladie
13.3 Nécessité d'une stratégie nationale de prévention des maladies chroniques
13.4 Renforcer la santé publique et la promotion de la santé
13.5 Vers une politique publique pro-santé - Nécessité d'élaborer des stratégies d'amélioration de la santé de la population

PARTIE VII : FINANCER LA REFORME

CHAPITRE QUATORZE
COMMENT ADMINISTRER LES FONDS SUPPLÉMENTAIRES QUE LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL CONSACRERA À LA SANTÉ

14.1 Il faut investir davantage dans le système de soins de santé
14.2 Le rôle du gouvernement fédéral en matière de financement
14.3 Comment gérer les nouveaux fonds que le gouvernement fédéral destinera aux soins de santé

CHAPITRE QUINZE
COMMENT GÉNÉRER DES FONDS ADDITIONNELS POUR LES SOINS DE SANTÉ

15.1 Ampleur du financement fédéral additionnel requis
15.2 Sources possibles de financement fédéral accru
15.3 Impôts généraux
15.4 Impôts spécifiques
15.5 Charges sociales
15.6 Prime nationale d'assurance-santé
15.7 Frais d'utilisation
15.8 Comptes d'épargne-santé
15.9 Financement anticipé des soins de santé
15.10 Commentaires du Comité
15.11 Financement fédéral actuel des soins de santé

CHAPITRE SEIZE
VIABILITÉ FINANCIÈRE DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ : LES CONSÉQUENCES DE L'INACTION

16.1 L'assurance-santé privée au Canada et dans certains pays de l'OCDE
16.2 Examen de la documentation récente sur les effets d'un système privé d'assurance-santé et de prestation de soins à but lucratif
16.3 Commentaires du Comité

PARTIE VIII : LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ

CHAPITRE DIX-SEPT
LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ
17.1 Universalité
17.2 Intégralité
17.3 Accessibilité 
17.4 Transférabilité
17.5 Gestion publique
17.6 Commentaires du Comité

CONCLUSION

ANNEXE A
LISTE DES RECOMMANDATIONS PAR CHAPITRE

ANNEXE B
LIST DES PRINCIPES DU VOLUME CINQ (AVRIL 2002)

ANNEXE C
LISTE DES TÉMOINS


ORDRE DE RENVOI

Extrait des Journaux du Sénat du 8 octobre 2002 :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kirby, appuyée par l'honorable sénateur Pépin,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner pour en faire rapport l'état du système de soins de santé au Canada. Plus particulièrement, que le Comité soit autorisé à examiner :

a) Les principes fondamentaux sur lesquels est fondé le système public de soins de santé au Canada;

b) L'historique du système de soins de santé au Canada;

c) Les systèmes de soins de santé dans d'autres pays;

d) Le système de soins de santé au Canada — pressions et contraintes;

e) Le rôle du gouvernement fédéral dans le système de soins de santé au Canada;

 

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le Comité dans la deuxième session de la trente-sixième législature et la première session de la trente-septième législature soient déférés au Comité;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 31 octobre 2002;

Que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion de ses constatations pendant soixante jours après le dépôt de son rapport; et

Que le Comité soit autorisé, par dérogation aux règles usuelles, à déposer tout rapport auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là; et que le rapport soit réputé avoir été déposé à la Chambre du Sénat.

La motion, mise aux voix, est adoptée.

ATTESTÉ :

Le greffier du Sénat,
Paul C. Bélisle


SÉNATEURS

Les sénateurs suivants ont participé à l’étude du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur l’état du système de soins de santé : 

L’honorable Michael J. L. Kirby, président du Comité
L’honorable Marjory LeBreton, vice-présidente du Comité 

et 

Les honorables sénateurs : 

Catherine S. Callbeck
Joan Cook
Jane Cordy 
Joyce Fairbairn, P.C.
Wilbert Keon
Yves Morin
Lucie Pépin
Brenda Robertson
Douglas Roche 

Membres d’office du Comité :

Les honorables sénateurs : Sharon Carstairs C.P. (ou Fernand Robichaud, C.P.) et John Lynch-Staunton (ou Noel A. Kinsella)

Autres sénateurs ayant participé de temps à autre à cette étude :

Les honorables sénateurs Atkins, Banks, Beaudoin, Carney, Cochrane, Cohen,* DeWare,* Ferretti Barth, Grafstein, Graham, P.C., Hubley, Joyal, P.C., Lawson, Léger, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Meighen, Milne, Murray, Rompkey, St. Germain, Sibbeston, Stratton, Tunney*, et Wilson*

  * retraité


LISTE DES ABRÉVIATIONS

ACDI

Agence canadienne de développement international

ACISU

Association canadienne des institutions de santé universitaires

AFMC

Association des facultés de médecine du Canada

AIIC

Association des infirmières et infirmiers du Canada

AMC

Association médicale canadienne

APMCC

Alliance pour la prévention des maladies chroniques au Canada

CAPE

Clinicians Assessment and Professional Enhancement (évaluation clinique et de perfectionnement professionnel)

CCASS

Conseil canadien d’agrément des services de santé

CCCB

Conseil consultatif canadien de la biotechnologie

CCNTA

Conseil consultatif national sur le troisième âge

CCPA

Conseil canadien de protection des animaux

CER

Comité d’éthique de la recherche

CES

compte d’épargne-santé

CEST

Conseil d’experts en sciences et en technologie

CHR

corporation hospitalière régionale

CNBRH

Conseil national de la bioéthique en recherche chez les sujets humains

CNERH

Conseil national d’éthique en recherche chez l’humain

CNRC

Conseil national de recherche du Canada

CRBS

Coalition pour la recherche biomédicale et en santé

CRDI

Centre de recherche pour le développement international

CRM

Conseil de recherches médicales du Canada

CRSNG

Conseil de recherche en sciences naturelle et en génie

CUSS

centre universitaires des sciences de la santé

 

DRG

diagnostic related groups (groupes homogènes de patients)

DRHC

Développement des ressources humaines Canada

DSE

dossier de santé électronique

EDTR

Enquête sur la dynamique du travail et du revenu

EPTC

Énoncé de politique des Trois Conseils

ETS

évaluation des technologies de la santé

FAMM

Fonds pour l’acquisition de matériel médical

FASS

Fonds pour l’adaptation des services de santé

FASSP

fonds pour l’adaptation des services de santé primaires

FCI

Fondation canadienne pour l’innovation

FCRSS

Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé

FPE

financement des programmes établis

FPT

fédéral-provincial-territorial

GMF

groupe de médecine de famille

GP

general practitioner (omnipraticien)

GSP

groupe de soins primaires

ICIS

Institut canadien d’information sur la santé

ICRA

Institut canadien de recherches avancées

IRM

imagerie par résonance magnétique

IRSC

Institut de recherche en santé du Canada

IRSM

Initiative de recherche en santé mondiale

JPPC

Joint Policy and Planning Committee

LPRPDE

Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques

MSSLD

ministère de la Santé et des Soins de longue durée (de l’Ontario)

NHS

National Health Service (système national de soins de santé;)

NICE

National Institute for Clinical Evidence

OCCETS

Office canadien de coordination de l’évaluation des technologies de la santé

OCDE

Organisation de coopération et de développement économiques

OMA

Ontario Medical Association

PCRC

Programme des chaires de recherche du Canada

PEM

programme extra-mural

PIB

produit intérieur brut

PME

petite et moyenne entreprise

PMSI

Programme de Médicalisation du Système d’Information

REER

Régime enregistré d’épargne-retraite

RRS

régie régionale de la santé

RSCO

Réseau de soins cardiaques de l’Ontario

RSF

réseau santé famille

RSFO

Réseau santé-famille de l’Ontario

SAD

soins actifs à domicile

SRG

supplément de revenu garanti

TCSPS

Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux

URS

Urgency Rating Score  (indice d’urgence)

WCWL

Western Canada Waiting List  (projet de rationalisation des listes d’attente dans l’Ouest canadien)


REMERCIEMENTS

Le Comité tient à remercier publiquement tous ceux dont l’appui indéfectible ces deux dernières années lui ont permis de publier les six volumes de son rapport.

Il tient en particulier à exprimer sa profonde reconnaissance aux personnes suivantes :

·        Mme Odette Madore et M. Howard Chodos de la Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque du Parlement qui, en leur qualité d’attachés de recherche affectés au Comité à temps plein, ont rédigé le gros des six volumes du rapport du Comité. Sans leur extraordinaire contribution, ces documents n’auraient pas pu être produits avec autant de brio et dans des délais aussi courts.

·        Mme Catherine Piccinin, la greffière du Comité, et son adjointe, Mme Debbie Pizzoferrato, qui ont organisé toutes les réunions du Comité portant sur le secteur de la santé, et se sont notamment occupées de préparer l’audition des témoins, de superviser la traduction et l’impression des six volumes du rapport, de répondre à des milliers de demandes de renseignements sur les travaux du Comité et de distribuer des exemplaires des volumes du rapport.

·        Le Dr Duncan Sinclair, ancien président de la Commission de restructuration des services de santé de l’Ontario, qui nous a généreusement fait profiter de son expérience, ne ménageant ni son temps ni ses conseils, et dont les nombreuses suggestions ont permis d’améliorer tous les volumes du rapport.

·        Le personnel des membres du Comité, dont la charge de travail s’est trouvée substantiellement accrue ces deux dernières années.

À tous et toutes, nous tenons à exprimer nos sincères remerciements pour leur excellent travail.

Le Comité a abattu un travail considérable ces deux dernières années et a pour cela dû compter sur une petite armée de préposés à la procédure, à la recherche et à l’administration, de sténographes, de correcteurs, d’interprètes, de traducteurs, de messagers, d’employés des services de publication, de radiodiffusion et d’imprimerie et de personnel technique et logistique. Nous tenons à remercier toutes ces personnes pour leur efficacité et leur labeur.


AVANT-PROPOS

Le présent rapport est l’aboutissement d’une étude entreprise il y a deux ans par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Au cours de cette période, nous avons recueilli le point de vue d’au-delà de 400 témoins. Le Comité tient à leur exprimer ses plus sincères remerciements pour lui avoir fait part de leur avis sur ce qui doit être fait pour réformer le système de soins de santé au Canada et le rendre financièrement viable.

Comme il fallait s’y attendre, étant donné la complexité des questions touchant les soins de santé et leur portée idéologique et politique, les avis recueillis étaient souvent contradictoires. Le Comité a néanmoins procédé à un examen attentif de tous les points de vue exprimés pour arriver à ses recommandations.

Les recommandations du présent rapport correspondent au point de vue unanime des onze sénateurs membres du Comité (sept libéraux, trois conservateurs et un indépendant). L’expérience des onze membres du Comité en matière de politique gouvernementale et de questions liées à la santé est aussi approfondie que variée. Le Comité compte en effet :

·        deux médecins : Yves Morin, ex-doyen de la Faculté de médecine de l’Université Laval, et Wilbert Keon, président-directeur général de l’Institut de cardiologie d’Ottawa;

·        deux ex-ministres de la Santé provinciaux : Brenda Robertson et Catherine Callbeck, qui a été première ministre provinciale;

·        deux ex-députés fédéraux : Douglas Roche et Lucie Pépin, qui était également infirmière;

·        une ex-ministre du Cabinet fédéral  et ex-journaliste: Joyce Fairbairn;

·        deux ex-militantes d’action communautaire : Joan Cook, qui a fait partie pendant de nombreuses années de conseils d’administration d’hôpitaux, et Jane Cordy, qui était enseignante;

·        deux ex-hauts fonctionnaires du Cabinet du premier ministre : Marjory LeBreton et Michael Kirby, qui à l’époque a aussi occupé le poste de secrétaire du Cabinet fédéral pour les relations fédérales-provinciales.

Le Comité estime que ses recommandations respectent les quatre objectifs qu’il s’était fixés au début de ses travaux, à savoir :

·        formuler un plan d’action détaillé et concret qui ne mette pas trop l’accent sur les questions de gouvernance ni sur les structures intergouvernementales;

·        établir le coût de ses recommandations et proposer un plan précis pour générer des recettes. Pour être vraiment utile, le Comité a estimé qu’il ne pouvait se permettre de rester vague sur la question de savoir de quelle façon au juste la mise en œuvre de ses recommandations allait être financée;

·        préciser clairement les changements que chacun des principaux intervenants — les Canadiens, les professionnels de la santé, les gouvernements provinciaux et fédéral, etc. — vont devoir effectuer pour que la mise en œuvre du plan de réforme du Comité puisse être menée à bien.

·        exposer clairement les conséquences auxquelles nous nous exposons si nous renonçons à modifier et donc à réformer le système de soins de santé.

Le Comité est d’avis que l’occasion est idéale pour mettre en œuvre le genre de réforme nécessaire pour assurer la viabilité à long terme du système de soins de santé au Canada. Il croit avoir réussi à mettre au point un plan détaillé, concret et réaliste qui, s’il est appliqué intégralement, contribuera au renforcement du système public de soins de santé au Canada et permettra d’en assurer la viabilité dans un avenir prévisible. Il espère poursuivre ses efforts en ce sens, de concert avec tous ceux qui partagent cet objectif.


INTRODUCTION

Au cours des deux dernières années, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie s’est penché sur l’état du système de soins de santé au Canada et sur l’évolution du rôle du gouvernement fédéral dans le secteur de la santé. Le Comité a siégé pendant plus de 200  heures et tenu 76 séances. La plupart de ces séances étaient publiques et lui ont permis de recueillir le point de vue d’au-delà de 400 témoins, dont bon nombre de représentants d’organismes regroupant des milliers de membres (comme l’Association médicale canadienne ou l’Association des infirmières et infirmiers du Canada).

Jusqu’ici, le Comité a publié cinq rapports. Le sixième rapport renferme les recommandations finales du Comité en vue d’une réforme et d’un renouvellement du système canadien de soins de santé. Ces recommandations découlent des principes énoncés dans le volume cinq. Les principaux sujets abordés dans les cinq rapports précédents, de même que les sujets qui seront abordés dans des rapports subséquents, sont résumés dans le tableau suivant :

Phases

Contenu

Échéance du rapport

Un

Contexte historique et aperçu

Mars 2001

Deux

Tendances futures, leurs causes et répercussions sur les coûts des soins des santé

Janvier 2002

Trois

Modèles et pratiques d’autres pays

Janvier 2002

Quatre

Enjeux et options

Septembre 2001

Cinq

Principes de restructuration des services hospitaliers et des services médicaux et recommandations visant plusieurs enjeux de la santé

Avril 2002

Six

 

Recommandations quant au financement et à la restructuration des services hospitaliers et des services médicaux et aux lacunes de la couverture relativement aux médicaments et aux soins à domicile

Octobre 2002

Études thématiques

La santé des Autochtones, la santé des femmes, la santé mentale, les services de santé en région rurale, la santé de la population, les soins à domicile et les soins palliatifs

Dates ultérieures à déterminer

Comme ce tableau l’indique, après la publication du présent rapport, le Comité entend examiner un certain nombre d’autres questions qui feront l’objet d’une série de rapports thématiques portant sur les sujets suivants : 1) la santé des Autochtones, 2) la santé des femmes, 3) la santé mentale, 4) les services de santé en région rurale, 5) la santé de la population, notamment les questions relatives à l’alphabétisation, 6) les soins à domicile et 7) les soins palliatifs.

Le Comité a en outre tenu des audiences publiques en septembre 2002 pour examiner le document intitulé Santé en français — Pour un meilleur accès à des services de santé en français, dont la publication fait suite à une étude coordonnée par la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada pour le Comité consultatif des communautés francophones en situation minoritaire. Le Comité publiera un rapport à ce sujet et les lecteurs du présent volume sont fortement invités à en prendre connaissance aussi.

Les recommandations contenues dans le volume six se subdivisent en six catégories :

·        des recommandations en vue de la restructuration des services hospitaliers et des services médicaux pour en accroître l’efficacité et ainsi permettre la prestation en temps opportun de soins de qualité;

·        des recommandations relatives à la « promulgation d’une garantie de soins » qui ferait en sorte que les patients soient traités à l’intérieur d’un délai maximal précis lorsqu’ils doivent subir une intervention importante ou obtenir un diagnostic. Une fois le délai expiré, la « garantie de soins » obligerait l’assureur/gouvernement à assumer les coûts encourus pour que le patient obtienne le service nécessaire dans un autre territoire ou dans un autre pays;

·        des recommandations pour élargir la portée du régime public d’assurance-santé afin d’absorber les coûts astronomiques des médicaments de prescription, les coûts des soins post-hospitaliers offerts à domicile et les coûts liés à la prestation de soins palliatifs aux patients qui choisissent de passer les dernières semaines qui leur restent à vivre à la maison;

·        des recommandations pour renforcer la contribution fédérale à l’élaboration de l’infrastructure des soins de santé et son rôle à cet égard, notamment en ce qui a trait aux systèmes d’information sur la santé, aux technologies de la santé, à l’évaluation de la performance et de l’efficacité du système de soins de santé, aux ressources humaines disponibles dans le secteur des soins de santé, à la recherche en santé, à la promotion du mieux-être et à la prévention de la maladie ainsi qu’aux seize centres universitaires des sciences de la santé;

·        des recommandations quant à la façon de générer ces nouvelles recettes fédérales et de les administrer de façon transparente et responsable pour assurer la mise en œuvre des recommandations énoncées dans le présent rapport;

·        des observations quant à ce qui risque d’arriver si les recettes fédérales supplémentaires que le Comité recommande d’investir dans le système de soins de santé ne le sont pas.


Comme certaines de ces recommandations, si elles sont mises en œuvre, exigeront la participation financière des gouvernements provinciaux et territoriaux, , le Comité est pleinement conscient de l’importance de favoriser un esprit de coopération et de collaboration entre les divers ordres de gouvernement pour mener à bien la refonte et le renouvellement du système canadien de soins de santé.

PARTIE I : RESPONSABILISATION


CHAPITRE UN

La nécessité d’un rapport annuel sur l’état du système de soins de santé et sur l’état de santé des canadiens

Pour pouvoir formuler des recommandations réalistes en vue d’améliorer la prestation de soins de santé auprès des Canadiens, il faut tout d’abord avoir une vision claire du système dans son état actuel et une évaluation de ses forces et de ses faiblesses. Dès le départ, le Comité a cherché à tracer un portrait fidèle du système canadien de soins de santé et à distinguer entre mythe et réalité[1].

D’après le Comité, il est essentiel de réaliser, le plus objectivement possible, une évaluation continue du système de soins de santé. Le Comité expose dans le présent chapitre ses recommandations visant la création d’un nouveau conseil national des soins de santé, présidé par un commissaire aux soins de santé chargé de produire un rapport annuel sur l’état du système de soins de santé et sur l’état de santé des Canadiens. (Dans le présent document, le genre masculin est utilisé par souci de brièveté.  Le masculin doit être interprété comme comprenant le féminin).

Mais avant d’approfondir cette question, le Comité veut donner un bref aperçu de quelques éléments clés des volumes précédents de son étude. Il souhaite ainsi résumer l’approche globale qu’il a adoptée pour la réalisation de son étude en multiples volumes, ainsi que les objectifs de ses recommandations.

 

1.1     Résumé de quelques points saillants des volumes un à cinq

1.1.1   Le rôle du gouvernement fédéral

Le Comité a cerné les divers rôles du gouvernement fédéral en matière de santé et de soins de santé, décrivant au volume quatre chaque rôle en indiquant pour chacun l’ensemble desobjectifs que doivent viser les politiques[2]. Le Comité a aussi confirmé la légitimité et l’importance des divers rôles du gouvernement fédéral, et ce sous divers rapports  :

·        en premier lieu, il est clair que les Canadiens appuient vivement les principes nationaux des soins de santé et veulent que le gouvernement fédéral joue un grand rôle dans le respect de ces principes;

·        en deuxième lieu, le financement fédéral des soins de santé est particulièrement important en cette époque de réforme et de renouvellement. En effet, le Comité explique dans le présent volume  que pour changer la structure et le fonctionnement du système de soins de santé, il faudra plus d’argent, et ces fonds devront être levés principalement par le gouvernement fédéral;

·        en troisième lieu, et surtout, selon certains, seul le gouvernement fédéral est à même de faire en sorte que toutes les provinces et tous les territoires, quelle que soit la taille de leur économie, aient à leur disposition les ressources financières nécessaires pour répondre aux besoins en soins de santé de leurs citoyens. Ce rôle de redistribution que joue le gouvernement fédéral fait partie intégrante de ce que bon nombre appellent « la manière canadienne »;

·        en quatrième lieu, il faudra que les changements fondamentaux apportés au système de soins de santé ne s’appliquent pas seulement à une ou deux provinces. Notre système national doit reposer sur une harmonisation interprovinciale, et le gouvernement fédéral a un rôle vital à jouer à cet égard, par exemple, en ayant recours à des mesures incitatives ou à des sanctions financières afin d’encourager les provinces et les territoires à adopter des normes pancanadiennes;

·        en cinquième lieu, le Comité est résolument d’avis que les importantes sommes d’argent que le gouvernement fédéral transfère aux provinces et aux territoires pour les soins de santé doivent assurer à ce dernier une place lors des discussions sur la restructuration du système de soins de santé. Puisqu’il doit rendre compte aux contribuables, le gouvernement fédéral a son mot à dire dans la façon dont l’argent est dépensé.

Il est très clair pour le Comité que les Canadiens veulent que les provinces et les territoires ainsi que le gouvernement fédéral travaillent en collaboration comme partenaires afin de faciliter le renouvellement des soins de santé. Les Canadiens estiment que le temps n’est plus aux reproches; ils veulent une coopération intergouvernementale et des résultats concrets.

 

1.1.2   Objectifs de la politique fédérale en matière de soins de santé

Le Comité a souligné que la politique fédérale en matière de soins de santé découle de deux objectifs primordiaux que le Comité appuie sans réserve comme étant les buts principaux que doit viser le gouvernement fédéral dans le domaine des soins de santé. Ces deux objectifs sont les suivants :

·        Assurer à tous les Canadiens un accès en temps opportun aux services de santé médicalement nécessaires, sans égard à leur capacité de payer;

·        Veiller à ce qu’aucun Canadien ne souffre de difficultés financières excessives du fait du coût des soins de santé.

Ces deux objectifs, et particulièrement le premier, sous-entendent que les services médicalement nécessaires fournis dans le cadre de l’assurance-santé sont de qualité élevée. En effet, à quoi servirait, aux fins du système de soins de santé du Canada, de fournir l’accès à des services de qualité inférieure?

En ce qui concerne la loi fédérale prééminente en matière de soins de santé, soit la Loi canadienne sur la santé (1984), le Comité a signifié à maintes reprises qu’il appuie sans réserve les quatre principes de la Loi axés sur le patient. Il souscrit aussi à l’esprit du cinquième principe de la Loi, bien qu’il soit d’une autre nature :

·        le principe d’universalité, qui signifie que tous les Canadiens ont droit à un régime public d’assurance-santé;

·        le principe d’intégralité, qui est censé garantir que tous les services médicalement nécessaires fournis par des hôpitaux ou des médecins sont couverts par l’assurance-santé publique;

·        le principe d’accessibilité, qui décourage le recours à des mesures financières pouvant faire obstacle à la prestation de services de santé publics, comme les frais d’utilisation, afin que les tous les Canadiens aient accès aux soins nécessaires quel que soit leur revenu;

·        le principe de transférabilité, qui signifie que tous les Canadiens sont couverts par l’assurance-santé publique quand ils se déplacent au Canada ou déménagent dans une autre province;

·        le principe de gestion publique n’est pas axé sur le patient, mais met l’accent « plutôt sur les moyens de réaliser les objectifs visés par les quatre autres principes » [3]. Or, c’est sur ce principe que repose le modèle à source unique de financement ou d’assurance que prône le Comité au volume cinq, dans le cadre du principe un[4]. En vertu de la condition de gestion publique que prévoit la Loi, les régimes d’assurance-santé provinciaux et territoriaux doivent être gérés par un organisme public, sans but lucratif.

Le Comité pense aussi, comme l’honorable Monique Bégin, ministre fédérale de la Santé au moment de l’adoption de la Loi canadienne sur la santé, que le principe de la gestion publique a depuis été mal interprété[5]. Il appuie vivement le système d’assurance à payeur unique en vertu duquel seul le gouvernement finance les services fournis par les hôpitaux et les médecins. Or, le principe de la gestion publique touche le financement des services fournis par les hôpitaux et les médecins, et non leur prestation.

Il y a un malentendu concernant le principe de la gestion publique parce que l’on n'a pas su faire une distinction entre, d’une part, le financement et la gestion de l’assurance-santé par l’État et, d’autre part, la prestation comme telle des services de soins de santé. En vertu de la Loi canadienne sur la santé, la prestation de ces services ne relève pas nécessairement d’organismes publics. En fait, de nos jours au Canada, la grande majorité des services de soins de santé sont dispensés par tout un éventail d’établissements et de fournisseurs privés.

Le Comité a réaffirmé sa volonté de faire respecter le principe voulant que chaque Canadien ait un accès garanti aux services médicalement nécessaires, fournis par un programme d’assurance-santé financé et géré par l’État, partout au Canada. Ce principe forme l’essence même de la politique canadienne en matière de soins de santé depuis plus de trente ans et figure clairement dans la Loi canadienne sur la santé.

La réalisation des objectifs de la politique canadienne en matière de soins de santé dépend du « contrat » conclu entre les Canadiens et leurs gouvernements fédéral et provinciaux ou territoriaux. Les Canadiens versent des impôts à leurs gouvernements, lesquels utilisent une partie de cet argent pour financer un régime d’assurance universelle qui fournit à tous les Canadiens une couverture au premier dollar des services médicalement nécessaires dispensés par les hôpitaux et les médecins. Ces services doivent être accessibles et complets, ainsi que transférables d’une province et d’un territoire à l’autre. En vertu du « contrat », les gouvernements — fédéral et provinciaux-territoriaux — doivent, en leur qualité d’assureur, utiliser les fonds versés par les Canadiens afin de satisfaire les deux objectifs énoncés ci-dessus, c’est-à-dire veiller à ce que les Canadiens bénéficient d’une assurance publique et qu’ils aient accès en temps opportun à des services médicalement nécessaires de haute qualité fournis par des hôpitaux et des médecins.

 

1.1.3   L’actuel système n’est pas financièrement viable

À l’étape suivante, le Comité a cherché à savoir si le système est viable sous sa forme courante, avec les niveaux actuels de financement par le gouvernement. Dans le volume cinq, le Comité a établi la définition d’un système de soins de santé viable sur le plan financier, soit un système sur lequel les Canadiens peuvent compter maintenant et pourront compter dans l’avenir, compte tenu des moyens de l’État et de la volonté de payer des contribuables.

Deux facteurs doivent être pris en considération dans l’évaluation de la viabilité financière. Le premier facteur est la volonté de payer des contribuables (consentement des personnes gouvernées). Le deuxième est la nécessité pour les gouvernements de conserver des taux d’imposition concurrentiels par rapport aux autres pays de l’OCDE, particulièrement les États-Unis, à des fins de développement économique.

De l’avis du Comité, la viabilité financière à long terme dépend du rapport entre les dépenses publiques au titre des soins de santé et les autres dépenses. Si ce rapport devient trop élevé, ce peut être signe que les dépenses au titre de la santé empêchent d’effectuer d’autres dépenses nécessaires.

Le Comité reconnaît également que la viabilité peut être étudiée sous l’angle de la proportion du produit intérieur brut (PIB) consacrée aux soins de santé, que les fonds proviennent du trésor public ou du privé. Toutefois, il est impossible de dire quelle devrait être cette proportion sans une analyse détaillée des avantages que tirent les Canadiens des soins de santé. Or, comme le système manque de moyens pour saisir, enregistrer, partager et gérer l’information sur la santé, il n’est pas possible pour l’instant d’effectuer une telle analyse coût‑avantage. Le Comité doit donc se contenter de constater que le Canada consacre aux soins de santé une part des dépenses, exprimée en termes de proportion du PIB, comparable en gros à celle d’autres pays développés, à l’exception des États-Unis qui consacrent à ce chapitre beaucoup plus que n’importe quel autre pays industrialisé.

Le Comité ne sait que trop bien que le transfert d’une plus grande part des coûts aux patients et à leurs familles en leur imposant des paiements directs, soit la « solution » facile que d’aucuns recommandent, n’est en fait qu’un moyen coûteux de régler, ou du moins d’alléger, le problème du gouvernement. Quelle que soit la façon dont elle est exprimée (en pourcentage du PIB, des dépenses gouvernementales, etc.), il n’existe qu’une source de financement des soins de santé, soit la population canadienne, et on a montré de façon concluante que la façon la plus rentable de financer les soins de santé est d’utiliser un modèle à assureur/payeur unique (en l’occurrence, un régime public ou gouvernemental).

Le Comité est convaincu que le Canada doit continuer d’adhérer au modèle le plus efficace d’assurance-santé universelle, et il est clair que la population canadienne est du même avis. Par conséquent, quand il a formulé ses recommandations, le Comité n’a pas retenu les mesures de financement liées au PIB. Il a plutôt cherché à évaluer à combien doivent s’élever les dépenses publiques nécessaires pour soutenir l’assurance-santé et, en particulier, combien il faut pour réaliser les changements qui s’imposent pour que ce programme très prisé, financé en majeure partie par l’État, puisse répondre aux besoins des Canadiens au XXIe siècle.

Au cours des audiences que le Comité a tenues d’un bout à l’autre du pays, un large éventail de témoins, dont des gestionnaires, des fournisseurs et des consommateurs de soins de santé, ont exprimé de vives préoccupations face à l’escalade des coûts des soins de santé et à son incidence sur les budgets gouvernementaux et sur la qualité des soins dispensés aux patients. Fort de ces témoignages et de nombreux rapports, le Comité a conclu que la montée des coûts indique clairement que le système public de soins de santé du Canada, tel qu’il est structuré et qu’il fonctionne en ce moment, n’est pas financièrement viable compte tenu des niveaux actuels de financement.

Le manque de viabilité est déjà évident puisque le système n’a pas en ce moment les ressources voulues pour répondre à toutes les demandes, et on note en particulier que l’accès en temps opportun à des services de santé de qualité est de moins en moins la norme. Le Comité est bien conscient qu’aucun système fournissant des services perçus comme étant « gratuits » ne saura répondre à toutes les demandes qu’il reçoit, et qu’à l’heure actuelle nous ne sommes pas à même de faire la différence entre la demande et le véritable besoin d’accès en temps opportun à des services de santé de toutes sortes. Néanmoins, l’impression répandue d’une détérioration de la qualité des services montre bien que la population doit décider quelle orientation elle souhaite voir prendre à ses gouvernements. Selon le Comité, il existe essentiellement trois options à cet égard :

·        rallonger les listes d’attente par un rationnement croissant des services de santé assurés par l’État;

·        accroître les recettes du gouvernement;

·        offrir certains services plus rapidement à ceux qui peuvent se les payer en autorisant l’établissement d’un système parallèle de services de santé privés qui s’ajouterait au système public offert à tous les autres Canadiens[6].

Ainsi qu’en témoignera le reste du rapport, le Comité souhaite ardemment que les Canadiens considèrent la deuxième option comme étant la meilleure. Parvenu à cette conclusion à l’unanimité, le Comité, s’écartant de la façon de faire habituelle dans les rapports des comités parlementaires, a choisi de préciser les sommes supplémentaires nécessaires pour assurer la viabilité financière à long terme du système de soins de santé, de dire comment cet argent devra être dépensé et de suggérer des options pour accroître les recettes du gouvernement.

Le Comité a conclu qu’il faut cinq milliards de dollars de plus par année pour réformer et renouveler le système de soins de santé, puisque c’est ce qu’il évalue être le coût annuel de mise en œuvre de ses recommandations. Le Comité tient toutefois à souligner aussi qu’à moins que des changements ne soient apportés à la structure et au fonctionnement du système, il n’y aura jamais assez d’argent pour en assurer la viabilité à long terme. Cette nouvelle injection de cinq milliards de dollars en fonds fédéraux doit donc servir à acheter des changements et ainsi qu’à réformer et à renouveler le système.

 

1.1.4   Une garantie nationale de soins de santé est essentielle au succès de la réforme

En général, dans sa vision de la réforme du système, le Comité a posé comme principe l’adoption de mesures incitatives pour encourager tous les participants au système public de services hospitaliers et médicaux — soit les fournisseurs, les établissements, les gouvernements et les patients — à dispenser, à gérer et à utiliser les soins de santé de façon plus efficace. Un élément en particulier, essentiel au succès de la réforme du système mais qui ne saurait exister isolément, réside dans  ce que le Comité a appelé la « garantie de soins de santé ».

La recommandation à cet égard, décrite en détail au chapitre six, vise à régler le problème des temps d’attente croissants pour obtenir des services de santé; il s’agit d’exiger que les gouvernements respectent des normes raisonnables, c’est-à-dire que les patients aient accès aux services dans leur propre province ou territoire, ailleurs au Canada ou, au besoin, à l’étranger. Le respect de normes raisonnables pour les services aux patients est un élément essentiel du contrat de soins de santé conclu entre les Canadiens et leurs gouvernements. Selon le Comité, en investissant judicieusement l’argent frais et en inscrivant dans la loi le principe de la « garantie de soins de santé », il sera possible de redonner confiance aux Canadiens que leurs gouvernements dépenseront l’argent perçu de façon à renforcer le système public de soins de santé et pour qu’il donne accès aux services médicalement nécessaires à l’endroit et au moment où les gens en ont besoin.

Tout en formulant des propositions, le Comité estime important de reconnaître que l’option qu’il préfère — soit la perception de recettes additionnelles   - assortie d’un plan de dépenses et de la mise en œuvre de la garantie de soins de santé, ne constitue pas la seule possibilité. Si, après un débat public, les gouvernements refusent de verser davantage pour les services hospitaliers et médicaux ou si l’assureur (le gouvernement) décide de ne pas mettre en œuvre la garantie de soins de santé, le résultat sera le rationnement continu (et sans doute accru) des services et la prolongation des temps d’attente.

Or, comme le souligne le Comité plus loin au chapitre cinq, la prolongation des temps d’attente, si la garantie de soins de santé n’est pas mise en oeuvre, risque d’avoir d’autres conséquences importantes. En outre, s’il y a inaction sur ce plan, la Cour suprême risque fort de juger qu’étant donné la non-prestation de services médicaux en temps opportun dans le cadre du système public, le gouvernement ne peut refuser aux Canadiens le droit de souscrire une assurance privée pour couvrir le coût d’achat de services ailleurs, c’est‑à‑dire auprès d’établissements privés de soins de santé au Canada. Ainsi, en omettant de mettre en œuvre la garantie de soins de santé, nous risquons fort de pousser le système canadien de soins de santé à devenir un système à deux vitesses, dont ne profiteront que ceux qui peuvent payer de leurs poches ou au moyen d’une assurance-santé privée.

Quand cette possibilité a été soulevée dans les rapports précédents, certains observateurs ont cru que le Comité préconisait une plus grande privatisation du système de soins de santé. Or, le présent volume devrait montrer clairement qu’il n’en est rien.

Le Comité a élaboré un plan détaillé, concret et réaliste qui, s’il est mis en œuvre intégralement, renforcera le système public de soins de santé au Canada et garantira sa viabilité dans un avenir prévisible. Cependant, cette option comporte un coût, et la grande majorité des contribuables canadiens seront mis à contribution en vue de la réalisation du plan proposé. Il est essentiel que les Canadiens comprennent toutes les répercussions auxquelles ils pourront s’attendre s’il arrivait que les gouvernements se montrent réticents à percevoir plus d’argent afin de l’injecter dans le système public de soins de santé. Or, une des conséquences possibles est non seulement la détérioration continue du système, mais aussi des jugements qui précipiteront l’émergence d’un système parallèle de soins de santé privés au Canada.

 

1.2     Améliorer la gouvernance — La nécessité d’un commissaire national aux soins de santé

Pour pouvoir faire des choix éclairés, maintenant et à l’avenir, la population canadienne doit absolument avoir accès à une évaluation fiable et objective de l’état réel du système de soins de santé. Le reste du présent chapitre décrit donc la proposition du Comité afin de créer une structure institutionnelle qui fournira une telle évaluation aux Canadiens chaque année.

Il est essentiel d’améliorer la gestion du système de soins de santé du Canada. La question de la gouvernance (c.‑à‑d., du leadership) comporte plusieurs éléments que le Comité a soulevés dans les volumes précédents et que les témoins ont abordé sous divers rapports.

Une chose est très claire. Les Canadiens en ont assez de voir les responsables des relations intergouvernementales dans le domaine des soins de santé s’adresser d’incessants reproches et se renvoyer la balle. L’honorable Monique Bégin a d’ailleurs souligné le caractère dysfonctionnel des relations fédérales-provinciales[7]. Beaucoup trop souvent, les deux parties semblent davantage intéressées à se reprocher l’une l’autre l’apparente détérioration du système qu’à prendre les devants pour s’assurer que les Canadiens aient accès aux services de santé dont ils ont besoin et qu’ils méritent.

Au fond, tout est une question d’imputabilité. Le Comité a souligné à maintes reprises qu’il faut des renseignements détaillés et fiables sur le rendement du système et les résultats afin de déterminer qui doit être tenu responsable des lacunes (ainsi que des forces) du système de soins de santé. Voilà pourquoi le Comité a accordé une telle importance à l’élaboration d’une capacité de gestion des renseignements sur la santé, à la création d’un système national de dossiers de santé électroniques[8] et à la nécessité de soutenir et d’élargir l’infrastructure de la recherche en matière de santé[9]. Le Comité a attiré l’attention sur l’importante contribution qu’a déjà faite l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS) pour ce qui est d’améliorer notre connaissance de l’état du système de soins de santé; il est clair qu’il faut tabler sur cette source d’expérience positive.

Il faut analyser et interpréter l’information objectivement pour qu’elle puisse servir de guide fiable à la prise de décisions fondées sur les faits. Dans le volume cinq, le Comité a énuméré quatre éléments fondamentaux nécessaires pour créer la capacité voulue afin d’évaluer de façon juste et complète le rendement du système de soins de santé et l’état de santé de la population canadienne, ainsi que pour obliger les parties compétentes à rendre des comptes :

·        En premier lieu, une telle évaluation doit être menée par une entité indépendante du gouvernement. Le Comité appuie fortement « le point de vue exprimé par des témoins et des rapports provinciaux selon lequel les rôles de l’assureur et du fournisseur doivent être séparés de celui de l’évaluateur pour qu’il soit possible d’obtenir une évaluation indépendante du rendement et des résultats du système de soins de santé »[10]. C’est la seule façon d’éviter les conflits d’intérêts réels ou perçus et d’assurer la crédibilité des rapports d’évaluation auprès de la population canadienne.

·        En deuxième lieu, le Comité est d’avis « qu’une telle évaluation indépendante doit être effectuée au niveau national (et non fédéral) »[11] . Le fait est que la responsabilité du système canadien de soins de santé incombe à la fois aux provinces et territoires et au gouvernement fédéral. Aucun organisme relevant exclusivement de l’un ou l’autre de ces niveaux ou créé exclusivement par un niveau ou l’autre n’aura la crédibilité nécessaire.

·        En troisième lieu, même si l’évaluation doit être menée par un organisme indépendant, elle doit être financée par le gouvernement. En outre, comme nous l’expliquerons plus loin, c’est le gouvernement fédéral qui devra prendre les devants pour assurer le financement nécessaire à ce projet, malgré le caractère « national » (par opposition à fédéral) de l’organisme d’évaluation.

·        En dernier lieu, ainsi que souligné ci‑dessus, il est essentiel que cette entreprise prenne appui sur le succès des organismes existants, comme l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS) et le Conseil canadien d’agrément des services de santé (CCASS). Le Comité présente au chapitre dix des recommandations particulières à l’égard de ces organismes.

Le Comité estime toutefois que ces organismes, à eux seuls, ne suffisent pas. Il faut donc un organisme indépendant permanent chargé de faire rapport annuellement à la population canadienne de l’état du système de soins de santé du pays et de l’état de santé des Canadiens. Le Comité pense aussi que cet organisme doit avoir la responsabilité de conseiller chaque année le gouvernement fédéral sur l’affectation du surcroît de recettes perçu afin de renouveler et de réformer le système de soins de santé. Cet organisme doit aussi être doté de ressources suffisantes et travailler en collaboration avec l’ICIS et le CCASS (et peut-être d’autres organismes) afin de recueillir et d’évaluer les données et l’information dont il a besoin.

Avant d’exposer sa propre proposition, le Comité examine brièvement quelques autres idées présentées au cours des derniers mois, sur des façons de fournir chaque année au public canadien des rapports sur l’état du système de soins de santé. Le Comité considère que les diverses propositions contiennent de nombreux éléments utiles, mais qu’aucune ne répond à toutes ses exigences.

 

1.2.1   Association médicale canadienne (AMC)

L’AMC propose une approche à deux volets[12]. En premier lieu, elle prône l’adoption d’une charte canadienne de la santé en trois parties : un énoncé de vision, une section sur la planification et la coordination nationales, et une section sur les rôles, les droits et les responsabilités. Cette charte établirait les paramètres d’une meilleure planification et coordination nationales, particulièrement en ce qui concerne : l’examen de services de santé de base; l’élaboration de repères nationaux pour déterminer la rapidité et la qualité des soins de santé; l’établissement des besoins en ressources, dont les ressources humaines et en technologie de l’information; et l’établissement d’objectifs nationaux pour ce qui est de l’amélioration de la santé des Canadiens.

La proposition de l’AMC prévoit aussi la création d’une commission canadienne de la santé, soit une tribune permanente dépolitisée au niveau national, permettant un dialogue et un débat continus. La commission aurait notamment pour mandat de :

·        surveiller l’application ce de la charte canadienne de la santé;

·        faire rapport chaque année aux Canadiens sur le rendement du système de soins de santé et sur l’état de santé de la population;

·        conseiller la Conférence des ministres fédéral et provinciaux-territoriaux de la Santé sur les questions importantes liées à la santé.

La commission proposée par l’AMC serait présidée par un commissaire à la santé qui serait un mandataire du Parlement (tout comme le vérificateur général) nommé pour un mandat de cinq ans par consensus des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. La commission serait indépendante des gouvernements mais aurait des liens étroits avec des organismes gouvernementaux comme l’Institut canadien d’information sur la santé et les Instituts de recherche en santé du Canada. Ses délibérations seraient rendues publiques, et elle serait composée non pas de façon à représenter les circonscriptions mais de manière à refléter un large éventail de perspectives et de compétences.

 

1.2.2   Colleen Flood et Sujit Choudry

Dans un document préparé pour la Commission Romanow[13], les professeurs Colleen Flood et Sujit Choudry de l’Université de Toronto se disent d’avis qu’il existe un besoin réel d’avoir un organisme national non partisan, non soumis aux aléas politiques de l’heure, et plus capable d’adopter une vision à long terme que ne l’est un gouvernement élu. Ils proposent donc la création d’une commission de l’assurance-santé qui serait un organisme spécialisé et indépendant, dont les membres seraient nommés par le gouvernement fédéral et les provinces, mais dont le financement serait assuré par le gouvernement fédéral.

Le rôle confié à la commission de l’assurance-santé serait le suivant :

·        établir des indicateurs de performance spécifiques pour aider les provinces à atteindre les normes nationales énoncées dans la Loi canadienne sur la santé;

·        publier (en collaboration avec l’Institut canadien d’information sur la santé) des rapports annuels sur la performance des régimes d’assurance-santé des provinces;

·        fournir de l’aide financière aux provinces qui entreprennent la mise en œuvre de processus ou de programmes identifiés par la commission.

Le financement de la commission serait distinct des transferts fédéraux au titre des soins de santé. Il proviendrait plutôt de nouvelles ressources fédérales qui intégreraient toutes les initiatives de paiement actuelles du gouvernement fédéral dans le domaine des soins de santé (p. ex., les soins primaires et d’autres domaines).

Les professeurs Flood et Choudry proposent une méthode pour établir la composition de la commission, soit que chaque province nomme un commissaire et que le gouvernement fédéral en nomme cinq, pour un total de 15 membres. Les commissaires serviraient à plein temps et choisiraient, dans leurs rangs, un commissaire en chef. Toutes les décisions seraient prises à la majorité des deux tiers, ce qui signifie que les commissaires fédéraux auraient besoin de l’appui d’une majorité de commissaires provinciaux pour toute décision[14]. La commission proposée aurait un effectif de spécialistes constitué de chercheurs du secteur de la santé et elle rendrait ses rapports publics, y compris ses observations sur la conformité des régimes de soins de santé provinciaux aux normes nationales.

 

1.2.3   Tom Kent

Tom Kent, haut fonctionnaire fédéral au moment de la création du régime d’assurance-santé et souvent appelé le père de ce régime, a suggéré qu’Ottawa et les provinces nomment par consensus un conseil consultatif composé d’un large éventail de spécialistes[15]. Le but n’est ni de remplacer la gestion provinciale des programmes, ni de porter atteinte à la responsabilité fédérale à l’égard des principes de l’assurance-santé. Le conseil est plutôt vu comme un mécanisme de collaboration permettant de jeter un pont entre les deux niveaux de gouvernement de façon à ramener la réalité politique en harmonie avec la vision qu’ont la plupart des Canadiens du régime d’assurance-santé, c’est‑à‑dire une responsabilité conjointe au sein du système fédéral.

Le conseil que propose M. Kent serait financé à la fois par le gouvernement fédéral et les provinces. Il compterait un directeur exécutif et un effectif qui ne seraient des agents ni fédéraux ni provinciaux. L’organisme relèverait d’un comité mixte de ministres de la santé qui le chargerait d’effectuer des enquêtes et de formuler des recommandations sur toute une gamme de principes et de pratiques liés à l’assurance-santé.

L’organisme proposé servirait de plaque tournante à la collaboration et faciliterait l’innovation et les économies, en plus de servir de tribune pour une plus vaste consultation sur les politiques en matière de santé. Sur le plan administratif, il pourrait servir à superviser la mise en œuvre d’ententes sur des questions comme les dossiers de santé informatisés, l’information sur les soins de santé, une liste nationale des médicaments admissibles, l’achat en vrac, le partage d’installations, etc. Surtout, selon Kent, l’organisme favoriserait la reddition de comptes au public en préparant régulièrement des rapports pour fins de publication par le comité ministériel.

 

1.2.4   Duane Adams

Ayant examiné les propositions en vue d’améliorer la gouvernance du système de soins de santé canadien[16], le feu professeur Duane Adams, directeur fondateur de la Saskatchewan Institute of Public Policy, a souligné que l’ajout, au mécanisme de gouvernance du système canadien de la santé, d’un organisme de surveillance de la santé extérieur au gouvernement aurait des avantages pour la fédération et pour la population canadienne. Il a signalé que même si la majorité des gouvernements sont très sceptiques et méfiants face à ces organismes « indépendants », sous prétexte qu’ils pourraient amoindrir le pouvoir unilatéral des gouvernements, un organisme de surveillance autonome doit être vu comme une solution parmi d’autres pour accroître la participation du public, la transparence, la responsabilité à l’égard du public et la confiance de la population.

Une option proposée par M. Adams est un conseil canadien de la santé doté d’un petit effectif d’employés permanents et faisant appel à la participation du public. Son rôle pourrait notamment consister à :

·        suivre le système de soins de santé canadien et informer régulièrement les gouvernements et la population canadienne de ses constatations;

·        évaluer certaines questions de santé pancanadiennes qui intéressent immédiatement le public et élaborer des options pratiques pour les régler;

·        servir d’organisme neutre d’enquête sur les faits lors de différends intergouvernementaux touchant la Loi canadienne sur la santé et d’autres questions qui lui sont confiées par les gouvernements et agir, à la demande des gouvernements, comme facilitateur/médiateur dans les processus de résolution de conflits;

·        présenter au public un rapport annuel sur le rendement du système de santé et sur les questions émergentes connexes;

·        assumer une certaine responsabilité dans la vérification de concepts innovateurs pour la prestation et la gestion de services de santé d’importance nationale;

·        peut-être servir de vecteur pour réunir et diffuser les pratiques exemplaires des régies régionales de la santé d’un bout à l’autre du Canada.

Le conseil ferait partie d’un réseau d’organismes servant à améliorer la gestion du système de soins de santé. Il pourrait comprendre des représentants de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, des Instituts de recherche en santé du Canada, de l’Institut canadien d’information sur la santé et du Conseil canadien d’agrément des services de santé.

 

1.2.5   Lawrence Nestman

Lors de son témoignage devant le Comité[17], le professeur Lawrence Nestman, de l’École d’administration des services de soins de santé de l’Université Dalhousie, s’est inspiré de l’expérience du Conseil fédéral d’hygiène qui existait dans les années 60. C’était un organisme permanent qui permettait aux ministres et aux sous-ministres de faire la liaison avec un certain nombre de commissions de la santé actives aux niveaux fédéral ou provincial. Il était doté d’un secrétariat permanent où travaillaient des gens hautement qualifiés qui traitaient avec les fonctionnaires dans les ministères de la Santé des provinces. Cette situation permettait une certaine continuité dans l’élaboration des politiques et une meilleure coordination des relations fédérales-provinciales que la situation actuelle. Le professeur Nestman a donc proposé : « [L]e concept d’un conseil fédéral d’hygiène version révisée pour le gouvernement fédéral, auquel s’ajouterait une quelconque infrastructure permanente dans les provinces, [qui] améliorerait les relations fédérales-provinciales et assurerait une certaine continuité, tout en injectant une certaine dose d’autonomie pour l’administration au jour le jour [18]».

1.3     La proposition du Comité

Toutes les propositions qui précèdent contiennent des éléments intéressants et des suggestions précieuses, mais aucune ne répond à toutes les exigences que le Comité juge nécessaires. En outre, toutes ces propositions attribuent aux organismes proposés des mandats beaucoup plus vastes que ce qu'envisage le Comité à l’heure actuelle. Ce dernier pense toutefois, comme de nombreux témoins, qu’il faut prendre des mesures pour « dépolitiser » la gestion du système de soins de santé. Comme il estime que ce processus en est un à très long terme, il considère important se concentrer pour commencer sur la fonction d’évaluation. Par conséquent, d’après le Comité, l’organisme indépendant d’évaluation doit avoir pour mandat de publier un rapport annuel sur l’état du système de soins de santé et sur l’état de santé des Canadiens, ainsi que de produire tous les autres rapports qu’il jugera nécessaires pour susciter des améliorations dans les résultats et la prestation des soins de santé au Canada. Le Comité estime en outre qu’il conviendrait que cet organisme conseille le gouvernement fédéral sur la façon de dépenser les recettes additionnelles perçues afin de réformer et de renouveler le système de soins de santé (voir le chapitre quatorze).

Pour légitimer de tels rapports auprès de tous les niveaux de gouvernement tout en assurant leur production indépendante et, par conséquent, leur crédibilité aux yeux de la population canadienne, le Comité recommande l’adoption des structures et des procédures suivantes.

En premier lieu, il faut un nouvel organisme, soit un comité fédéral-provincial-territorial (FPT). Ce comité doit être structuré de façon à ce que ni les représentants fédéraux, ni les représentants provinciaux ou territoriaux ne puissent dominer. Il est donc proposé qu’il soit composé d’un représentant provincial-territorial pour chacune des cinq grandes régions du pays (Atlantique, Québec, Ontario, Prairies, Colombie-Britannique) pour un total de cinq, ainsi que de cinq représentants du gouvernement fédéral. Le mode de sélection des représentants provinciaux-territoriaux reste à déterminer[19].

Après consultation auprès d’un vaste éventail d’intervenants en santé, le comité FPT nommera alors un commissaire national aux soins de santé. Il choisira également les membres d’un conseil national des soins de santé présidé par le commissaire, en faisant une sélection parmi les candidats proposés par ce dernier. Lors des nominations au conseil, le commissaire sera chargé d’y assurer l’équilibre et de voir à ce que l’ensemble de la population soit représenté. Les conseillers seront nommés en fonction de leur capacité d’avoir une vue globale du système de soins de santé, et non en tant que représentants de groupes d’intérêts particuliers en matière de soins de santé.

Pour que la sélection du commissaire et des membres du conseil ne soit dominée ni par les représentants fédéraux, ni par les représentants provinciaux-territoriaux, toutes les nominations se feront à la majorité des deux tiers. Si le comité FPT compte 10 membres, il faudra sept voix pour confirmer une nomination, ce qui signifie que ni les représentants fédéraux ni les représentants provinciaux-territoriaux ne réussiront à eux seuls à faire élire un des leurs. Cette procédure garantira que les membres du conseil sont indépendants du gouvernement (puisqu’ils auront été nommés par le commissaire), mais ils jouiront d’une légitimité suffisante pour donner du poids à leur rapport (puisqu’ils auront été nommés par le comité FPT).

Le commissaire sera nommé pour un mandat de cinq ans, qui pourra être reconduit une seule fois. Les membres du conseil seront nommés pour des mandats de trois ans, lesquels pourront aussi être renouvelés une fois. La moitié du conseil sera donc renouvelée tous les trois ans. On considère que huit est un nombre raisonnable de conseillers, soit neuf au total en comptant le commissaire. Leur travail au conseil sera rémunéré adéquatement, mais ne constituera pas un emploi à plein temps. Le commissaire pourra compter sur un effectif d’employés à temps plein.

Le conseil sera responsable en dernière analyse de la publication du rapport annuel et le présentera à chaque ministère de la Santé en demandant qu’il soit déposé devant toutes les législatures, soit fédérale, provinciales et territoriales. Le Comité recommande que tous les ministres de la Santé réagissent officiellement, dans les six mois, au rapport annuel que le conseil national des soins de santé produira chaque année. Le Comité reconnaît qu’il n’est pas possible d’obliger légalement les ministres de la Santé à réagir au rapport annuel mais espère qu’ils accepteront de le faire, tout comme le gouvernement fédéral est tenu de réagir aux recommandations formulées par les comités de la Chambre des communes dans un délai établi. Une telle procédure fera en sorte que le rapport annuel du conseil soit pris au sérieux. En outre, comme le rapport annuel du conseil sera présenté simultanément au public, celui‑ci exercera des pressions supplémentaires sur tous les gouvernements pour qu’ils étudient soigneusement le rapports et ses recommandations et y répondent.

D’après le Comité, le gouvernement fédéral doit faire preuve de leadership et financer le travail du commissaire et du conseil. Ces fonds proviendront du surcroît de recettes dont le Comité recommande la perception au chapitre quinze.

Si le commissaire et le conseil jugent nécessaire d’étendre la portée de leurs travaux, ou si les gouvernements fédéral et provinciaux demandent l’élargissement de leurs fonctions, le financement supplémentaire nécessaire devra être fourni également par les provinces et le gouvernement fédéral et ne pas incomber exclusivement à ce dernier.

Le commissaire sera chargé d’embaucher le personnel professionnel et technique nécessaire pour réaliser le mandat du conseil. Toutefois, le commissaire ne devra pas faire double emploi avec les travaux d’organismes existants. Il devra plutôt collaborer avec l’ICIS, la FCRSS et d’autres organismes fédéraux et provinciaux intéressés, afin de veiller à l’application des méthodes les plus efficaces possible pour recueillir les données et l’information nécessaires afin de produire le rapport annuel (voir le chapitre dix).

D’après le Comité, un conseil national des soins de santé ainsi structuré et présidé par un commissaire aux soins de santé indépendant répond aux quatre conditions décrites précédemment, c’est-à-dire :

·        le processus revêt un caractère national et non purement fédéral;

·        le commissaire et le conseil sont indépendants du gouvernement, mais leur légitimité est assurée du fait qu’ils sont nommés par des représentants du gouvernement;

·        la production d’un rapport annuel est financée par le gouvernement;

·        les travaux du commissaire et du conseil prennent appui sur ceux des organismes existants.

En résumé donc, le Comité recommande :

Qu’un nouveau comité fédéral-provincial-territorial composé de cinq représentants provinciaux-territoriaux et cinq représentants fédéraux soit mis sur pied. Il aura pour mandat de nommer un commissaire national aux soins de santé et les huit autres membres d’un conseil national des soins de santé, choisis parmi les candidats proposés par le commissaire.

Que le commissaire national aux soins de santé soit chargé des responsabilités suivantes :

§         présenter au comité fédéral-provincial-territorial des candidatures pour le conseil national des soins de santé et présider le conseil une fois les nominations ratifiées;

§         surveiller la production d’un rapport annuel sur l’état du système de soins de santé et sur l’état de santé des Canadiens qui comprendra des constatations et des recommandations pour améliorer la prestation et les résultats des soins de santé au Canada;

§         travailler en collaboration avec le conseil national des soins de santé afin de conseiller le gouvernement fédéral sur l’affectation des recettes additionnelles perçues afin de réformer et de renouveler le système de soins de santé conformément aux recommandations formulées dans le présent rapport;

§         embaucher le personnel nécessaire pour réaliser cet objectif et travailler en étroite collaboration avec les organismes indépendants existants afin de réduire au minimum le chevauchement des fonctions.

Que le gouvernement fédéral verse 10 millions de dollars par année afin de financer le travail de ce commissaire et de ce conseil en vue de produire un rapport annuel sur l’état du système de soins de santé et sur l’état de santé des Canadiens, ainsi que de conseiller le gouvernement fédéral sur l’affectation du surcroît de recettes perçu afin de réformer et de renouveler le système de soins de santé.


Figure 1.1

Création proposée d’une charge de commissaire national aux soins de santé et d’un conseil national des soins de santé

 


[1] Voir le volume un, Le chemin parcouru, chapitre six, Mythes et réalités, p. 101 et suivantes.

[2] Voir le volume quatre,  Questions et options, chapitres trois et quatre, p. 11-28.

[3] Volume un, p. 43.

[4] Volume cinq, p. 25-27.

[5] Voir son témoignage devant le Comité le 8 mai 2002 (54:5).

[6] Veuillez remarquer que la désassurance de services signifie que les Canadiens devront payer de leur poche certains services offerts auparavant dans le cadre du programme public d’assurance-santé.

[7] Monique Bégin, « Renewing Medicare », tiré du Journal de l’Association médicale canadienne, 9 juillet 2002, p. 47.

[8] Voir le chapitre10.

[9] Voir le chapitre12.

[10] Volume 5, p. 54.

[11] Ibid.

[12] Voir son document intitulé A Prescription for Sustainability, juin 2002.

[13] Collen M. Flood et Sujit Choudry, Consolider les fondements : La modernisation de la Loi canadienne sur la santé, publié par la Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada, août 2002.

[14] Il convient toutefois de souligner que cette formule semble permettre aux commissaires provinciaux de se liguer ensemble pour faire adopter des décisions rejetées à l’unanimité par les commissaires fédéraux.

[15] Tom Kent, Medicare: It’s Decision Time, The Caledon Institute of Social Policy, 2002.

[16] Duane Adams, « Conclusions: proposals for advancing federalism, democracy and governance of the Canadian health system », dans Federalism, Democracy and Health Policy in Canada, publié par Duane Adams, McGill-Queen’s University Press, 2002.

[17] 9 mai 2002 (Témoignages, fascicule n55).

[18] Ibid.

[19] Cette forme de représentation provinciale-territoriale a été utilisée pour le conseil d’administration de la Société canadienne du sang dont la mission est de gérer le système d’approvisionnement en sang et en produits sanguins de toutes les provinces sauf le Québec. Chacune des quatre régions suivantes est représentée par un directeur différent : a) Colombie-Britannique et Yukon; b) Prairies, Territoires du Nord-Ouest et Nunavut; c) Ontario; d) Atlantique.


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