« En un clin d’œil, c’est terminé » : le sénateur Doyle contemple ses 35 années à la fonction publique
Après avoir occupé des postes de ferronnier dans des chantiers de construction qui l’ont amené au sommet des tours du World Trade Center, le sénateur Norman E. Doyle s’est enraciné dans la vie politique de sa province natale, Terre-Neuve-et-Labrador. Il a passé 14 ans en politique provinciale avant de devenir député au fédéral en 1997.
Nommé au Sénat le 6 janvier 2012, le sénateur Doyle a été membre du Comité sénatorial des peuples autochtones et du Comité sénatorial de l’agriculture et des forêts. Avant de prendre sa retraite en novembre 2020, SenCAplus lui a posé quelques questions sur ses huit années passées à la Chambre haute.
Vous avez été ferronnier à Terre-Neuve-et-Labrador, et même sur le site du World Trade Center à New York, avant d’être élu à la Chambre d’assemblée de Terre-Neuve-et-Labrador en 1979. Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire de la politique?
J’avais 25 ans lorsque j’ai quitté Terre-Neuve-et-Labrador pour travailler au World Trade Center comme ferronnier. Mes frères, Jack et George, étaient contremaîtres sur le chantier. Quand je suis arrivé, je crois qu’ils en étaient au 35e étage. J’y suis resté jusqu’à ce que les tours soient terminées, puis j’ai décroché un emploi dans la construction de la raffinerie de pétrole Come By Chance (en anglais seulement).
Durant ma jeunesse, tout le monde parlait de politique et j’y ai pris goût. J’ai décidé que je voulais être plus actif. J’ai commencé à soutenir notre candidat progressiste-conservateur. Je voulais parler de politique, installer des pancartes pour Bill Doody et, plus tard, j’ai commencé à lui donner un coup de main. Par coïncidence, il est devenu sénateur et je lui ai succédé comme député provincial de Harbour Main-Bell Island. J’ai passé 14 ans à représenter cette circonscription.
Vous avez été nommé au Sénat en 2012 après 26 ans de politique provinciale et fédérale. Quelle a été votre réaction lorsque vous avez reçu l’appel de l’ancien premier ministre Stephen Harper vous convoquant au Sénat?
Il va sans dire que j’étais très content. Après quelques mois seulement hors de la vie politique, j’ai commencé à regretter mon départ. À ce moment‑là, j’avais gagné huit élections d’affilée.
Lors d’un voyage à Ottawa en 2011, je suis allé à la Chambre des communes pour discuter avec l’ancienne équipe après la période des questions. L’ancien premier ministre Stephen Harper était là et m’a demandé de monter à son bureau pour discuter. Pour être honnête, c’est moi qui l’ai approché pour obtenir un siège au Sénat. Je me suis senti un peu bizarre en agissant comme ça. Plus tard en décembre, il m’a appelé et j’étais heureux d’être de retour. Je me sentais bien et un peu fier d’avoir réussi à me rendre dans les trois Chambres sans défaite.
Comment votre carrière précédente vous a-t-elle préparé à votre rôle de sénateur?
La Chambre des communes a été une excellente école pour mon aventure à la Chambre rouge. J’ai cependant remarqué que le Sénat était un peu plus docile et qu’on y criait moins. Vous passez d’une Chambre d’environ 300 membres à une autre qui en compte 105.
J’ai consacré presque 12 ans de ma vie à la Chambre des communes et j’ai présidé le Comité de l’immigration pendant quelques années; je connaissais donc le système des comités. En fait, je pense que le système des comités du Sénat fonctionne un peu mieux que celui des comités de la Chambre des communes dont j’ai fait partie et que j’ai présidés. Au Sénat, nous avions plus de temps au sein des comités pour faire un travail détaillé sur un projet de loi donné, alors qu’au sein des comités de la Chambre des communes, nous étions toujours pressés de renvoyer les projets de loi à la Chambre pour qu’on y fasse la troisième lecture et leur accorder la sanction royale. Au Sénat, nous pouvions être un peu plus minutieux et nous pouvions aussi être moins partisans.
En parlant de comités, vous avez passé une grande partie de votre carrière au sein du Comité sénatorial sur l’agriculture et les forêts et du Comité des peuples autochtones. Pourquoi ce travail vous était-il important?
Les questions abordées au sein du Comité des peuples autochtones étaient intenses, comme les relations entre les peuples autochtones et le Canada. Ce comité a dû examiner de nombreux dossiers, notamment ceux liés à la jeunesse et à la famille, à la préservation de la langue et aux traités des peuples autochtones.
Faire partie de ce comité pouvait être épuisant sur le plan émotionnel. Parfois, on ressentait leur douleur quand on voyait des témoins s’effondrer et pleurer lorsqu’ils parlaient de leurs problèmes. J’avais l’impression d’apprendre beaucoup sur les peuples autochtones et sur l’importance de forger une nouvelle relation avec les communautés autochtones.
Je suis également très fier du travail que nous avons accompli au sein du Comité sénatorial de l’agriculture et des forêts. Nous avons produit un excellent rapport intitulé Fabriqué au Canada : Faire croître le secteur alimentaire à valeur ajoutée au Canada, qui, en partie, a examiné comment nous pouvons être plus compétitifs. Les Pays‑Bas, par exemple, ont 34 fois moins de terres agricoles qu’ici au Canada, et pourtant ils transforment deux fois plus de denrées alimentaires que nous. C’était un comité tellement intéressant.
Vous avez été décrit comme un membre diligent et actif de la Chambre rouge. Qu’est-ce qui vous manquera le plus au Sénat?
Le caucus du Sénat est comme une famille, et il va me manquer. Vous formez de grandes amitiés avec différentes personnes et, en un clin d’œil, c’est terminé. Vous ne savez pas si vous les reverrez. Les agents de sécurité, les employés de la cafétéria, les gardiens — vous les rencontrez tous et vous leur parlez de leurs familles. Mon assistante, Jeanette Downey, ancienne Terre-Neuvienne qui vit à Ottawa depuis 36 ans et qui travaille sur la Colline depuis 25 ans, était mon bras droit et dirigeait bien le bureau. Cela va me manquer de la voir, mais je compte rester en contact avec elle. Tout le monde va me manquer.
Quels conseils donneriez-vous aux sénateurs nouvellement nommés?
Ne vous impliquez pas dans trop de comités avant de bien connaître l’environnement et de savoir à quel point votre horaire peut être parfois chargé. Vos journées de travail sont très intenses et bien remplies. Si vous en faites trop, vous risquez d’éprouver un sentiment de frustration. J’ajouterais également qu’il faut traiter chacun comme il se doit, avec dignité et respect.
Au moment où vous avez été convoqué au Sénat, vous avez dit que vous vous étiez senti comme un « poisson hors de l’eau » lorsque vous aviez quitté la politique fédérale pendant trois ans. Est-ce que cette fois-ci ce sera différent? Qu’attendez-vous de votre retraite?
Je pense que ce sera moins un choc de quitter la politique cette fois-ci. Qui sait ce que l’avenir nous réserve? Il est temps maintenant de se reposer un moment et de remercier Dieu pour la longue vie et les belles occasions qui m’ont été données de servir pendant ces 35 ans de vie publique. Je vais également pouvoir passer plus de temps, au lieu de me contenter des fins de semaine, avec ma femme, Belle, qui a été non seulement mon épouse, mais aussi ma directrice de campagne au cours de huit élections et ma plus grande partisane depuis 52 ans.
Je vais passer quelques semaines à penser à ce que sera ma retraite, mais je vais probablement faire du bénévolat.
J’ai deux merveilleux petits‑enfants, Thomas, 12 ans, et Will, 11 ans, qui peuvent me tenir très occupé eux aussi.
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Nommé au Sénat le 6 janvier 2012, le sénateur Doyle a été membre du Comité sénatorial des peuples autochtones et du Comité sénatorial de l’agriculture et des forêts. Avant de prendre sa retraite en novembre 2020, SenCAplus lui a posé quelques questions sur ses huit années passées à la Chambre haute.
Vous avez été ferronnier à Terre-Neuve-et-Labrador, et même sur le site du World Trade Center à New York, avant d’être élu à la Chambre d’assemblée de Terre-Neuve-et-Labrador en 1979. Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire de la politique?
J’avais 25 ans lorsque j’ai quitté Terre-Neuve-et-Labrador pour travailler au World Trade Center comme ferronnier. Mes frères, Jack et George, étaient contremaîtres sur le chantier. Quand je suis arrivé, je crois qu’ils en étaient au 35e étage. J’y suis resté jusqu’à ce que les tours soient terminées, puis j’ai décroché un emploi dans la construction de la raffinerie de pétrole Come By Chance (en anglais seulement).
Durant ma jeunesse, tout le monde parlait de politique et j’y ai pris goût. J’ai décidé que je voulais être plus actif. J’ai commencé à soutenir notre candidat progressiste-conservateur. Je voulais parler de politique, installer des pancartes pour Bill Doody et, plus tard, j’ai commencé à lui donner un coup de main. Par coïncidence, il est devenu sénateur et je lui ai succédé comme député provincial de Harbour Main-Bell Island. J’ai passé 14 ans à représenter cette circonscription.
Vous avez été nommé au Sénat en 2012 après 26 ans de politique provinciale et fédérale. Quelle a été votre réaction lorsque vous avez reçu l’appel de l’ancien premier ministre Stephen Harper vous convoquant au Sénat?
Il va sans dire que j’étais très content. Après quelques mois seulement hors de la vie politique, j’ai commencé à regretter mon départ. À ce moment‑là, j’avais gagné huit élections d’affilée.
Lors d’un voyage à Ottawa en 2011, je suis allé à la Chambre des communes pour discuter avec l’ancienne équipe après la période des questions. L’ancien premier ministre Stephen Harper était là et m’a demandé de monter à son bureau pour discuter. Pour être honnête, c’est moi qui l’ai approché pour obtenir un siège au Sénat. Je me suis senti un peu bizarre en agissant comme ça. Plus tard en décembre, il m’a appelé et j’étais heureux d’être de retour. Je me sentais bien et un peu fier d’avoir réussi à me rendre dans les trois Chambres sans défaite.
Comment votre carrière précédente vous a-t-elle préparé à votre rôle de sénateur?
La Chambre des communes a été une excellente école pour mon aventure à la Chambre rouge. J’ai cependant remarqué que le Sénat était un peu plus docile et qu’on y criait moins. Vous passez d’une Chambre d’environ 300 membres à une autre qui en compte 105.
J’ai consacré presque 12 ans de ma vie à la Chambre des communes et j’ai présidé le Comité de l’immigration pendant quelques années; je connaissais donc le système des comités. En fait, je pense que le système des comités du Sénat fonctionne un peu mieux que celui des comités de la Chambre des communes dont j’ai fait partie et que j’ai présidés. Au Sénat, nous avions plus de temps au sein des comités pour faire un travail détaillé sur un projet de loi donné, alors qu’au sein des comités de la Chambre des communes, nous étions toujours pressés de renvoyer les projets de loi à la Chambre pour qu’on y fasse la troisième lecture et leur accorder la sanction royale. Au Sénat, nous pouvions être un peu plus minutieux et nous pouvions aussi être moins partisans.
En parlant de comités, vous avez passé une grande partie de votre carrière au sein du Comité sénatorial sur l’agriculture et les forêts et du Comité des peuples autochtones. Pourquoi ce travail vous était-il important?
Les questions abordées au sein du Comité des peuples autochtones étaient intenses, comme les relations entre les peuples autochtones et le Canada. Ce comité a dû examiner de nombreux dossiers, notamment ceux liés à la jeunesse et à la famille, à la préservation de la langue et aux traités des peuples autochtones.
Faire partie de ce comité pouvait être épuisant sur le plan émotionnel. Parfois, on ressentait leur douleur quand on voyait des témoins s’effondrer et pleurer lorsqu’ils parlaient de leurs problèmes. J’avais l’impression d’apprendre beaucoup sur les peuples autochtones et sur l’importance de forger une nouvelle relation avec les communautés autochtones.
Je suis également très fier du travail que nous avons accompli au sein du Comité sénatorial de l’agriculture et des forêts. Nous avons produit un excellent rapport intitulé Fabriqué au Canada : Faire croître le secteur alimentaire à valeur ajoutée au Canada, qui, en partie, a examiné comment nous pouvons être plus compétitifs. Les Pays‑Bas, par exemple, ont 34 fois moins de terres agricoles qu’ici au Canada, et pourtant ils transforment deux fois plus de denrées alimentaires que nous. C’était un comité tellement intéressant.
Vous avez été décrit comme un membre diligent et actif de la Chambre rouge. Qu’est-ce qui vous manquera le plus au Sénat?
Le caucus du Sénat est comme une famille, et il va me manquer. Vous formez de grandes amitiés avec différentes personnes et, en un clin d’œil, c’est terminé. Vous ne savez pas si vous les reverrez. Les agents de sécurité, les employés de la cafétéria, les gardiens — vous les rencontrez tous et vous leur parlez de leurs familles. Mon assistante, Jeanette Downey, ancienne Terre-Neuvienne qui vit à Ottawa depuis 36 ans et qui travaille sur la Colline depuis 25 ans, était mon bras droit et dirigeait bien le bureau. Cela va me manquer de la voir, mais je compte rester en contact avec elle. Tout le monde va me manquer.
Quels conseils donneriez-vous aux sénateurs nouvellement nommés?
Ne vous impliquez pas dans trop de comités avant de bien connaître l’environnement et de savoir à quel point votre horaire peut être parfois chargé. Vos journées de travail sont très intenses et bien remplies. Si vous en faites trop, vous risquez d’éprouver un sentiment de frustration. J’ajouterais également qu’il faut traiter chacun comme il se doit, avec dignité et respect.
Au moment où vous avez été convoqué au Sénat, vous avez dit que vous vous étiez senti comme un « poisson hors de l’eau » lorsque vous aviez quitté la politique fédérale pendant trois ans. Est-ce que cette fois-ci ce sera différent? Qu’attendez-vous de votre retraite?
Je pense que ce sera moins un choc de quitter la politique cette fois-ci. Qui sait ce que l’avenir nous réserve? Il est temps maintenant de se reposer un moment et de remercier Dieu pour la longue vie et les belles occasions qui m’ont été données de servir pendant ces 35 ans de vie publique. Je vais également pouvoir passer plus de temps, au lieu de me contenter des fins de semaine, avec ma femme, Belle, qui a été non seulement mon épouse, mais aussi ma directrice de campagne au cours de huit élections et ma plus grande partisane depuis 52 ans.
Je vais passer quelques semaines à penser à ce que sera ma retraite, mais je vais probablement faire du bénévolat.
J’ai deux merveilleux petits‑enfants, Thomas, 12 ans, et Will, 11 ans, qui peuvent me tenir très occupé eux aussi.