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Art et architecture

Bâton noir

Les lecteurs de l’édition du 11 février 1916 du journal The Weekly Star de Whitehorse ont pu lire un titre alarmant : « Désastre à Ottawa : le gouvernement profondément bouleversé par une supposée attaque ». Plusieurs jours auparavant, dans la soirée du 3 février, un petit incendie s’était déclaré dans la salle de lecture du Parlement et s’était rapidement propagé, détruisant la quasi-totalité de l’édifice du Centre. Bien que l’incendie se soit avéré accidentel, il était tout à fait normal qu’au cours de la troisième année d’une guerre mondiale, des soupçons d’incendie criminel surgissent immédiatement et que des médias comme The Weekly Star les rapportent.

Le journal n’a cependant pas fait état des efforts de ceux qui, comme le gentilhomme huissier de la verge noire, le lieutenant-colonel Ernest Chambers, ont coordonné le sauvetage réussi de la masse du Sénat et des tableaux de la Chambre du Sénat. Malheureusement, le bâton noir, duquel le lieutenant-colonel tirait son titre et qui faisait partie du Sénat depuis la Confédération, a été perdu. Ainsi, le 21 juin 1918, le premier ministre Robert Borden a accepté un cadeau de la Chambre des lords et de la Chambre des communes britanniques : un bâton de remplacement, fabriqué par les bijoutiers de la Couronne Garrard & Co. Ltd. Il est encore utilisé par le Sénat aujourd’hui.

Cet objet de cérémonie est un symbole d’autorité emprunté au régime parlementaire britannique. Son porteur, l’huissier du bâton noir, qui peut également être appelé l’huissier, agit en tant que serviteur personnel et messager du souverain ou de la souveraine, ou de son représentant au Parlement. Cette fonction englobe également d’autres rôles.

Le bâton noir se compose d’une canne en ébène coiffée à chaque extrémité d’ornements en or ou plaqués or, avec un ornement en argent au centre. Au sommet se trouve un lion tenant un bouclier avec le monogramme du roi George V, puis à la base, une pièce souveraine en or de 1904 avec saint Georges terrassant le dragon, une pièce jumelle de celle du bâton noir britannique. Les trois ornements présentent des sphères décorées de feuilles d’érable. Le bâton noir s’est détérioré en raison de l’usure et de dommages plus graves au fil des décennies. La reine Elizabeth II l’a fait restaurer comme cadeau pour le 150anniversaire du Canada. Le nom et le monogramme de Sa Majesté ont alors été gravés sur l’ornement central.

Fait intéressant, The Weekly Star a noté que le premier ministre Borden avait accepté une nouvelle masse pour la Chambre des communes (l’originale ayant été détruite par l’incendie de 1916), mais il n’a pas mentionné le bâton noir. À l’époque, le Yukon n’avait ni siège au Sénat ni vice-roi. Le chef d’État était, et demeure le commissaire, à savoir un représentant du gouvernement fédéral, plutôt que le souverain. Le Yukon n’a obtenu un siège au Sénat qu’en 1975, après l’adoption de la Loi constitutionnelle. Toutefois, le territoire détenait un siège à la Chambre des communes, et les journaux de l’époque faisaient état des actions du représentant du Yukon. Ainsi, même si les activités du Sénat et le symbolisme du bâton noir avaient certainement un lien avec le territoire, en tant que membre du Canada, ils n’auraient probablement pas occupé une place importante dans les pensées quotidiennes des Yukonnais.

Quoi qu’il en soit, l’histoire du bâton noir est fascinante, et ce magnifique artéfact permet de mieux comprendre le Parlement, les relations avec la Couronne et le Sénat du Canada.


Lianne Maitland est directrice générale à la Yukon Historical and Museums Association à Whitehorse, au Yukon.

Bâton noir

Détails de l'objet

Artiste
Garrard & Co. Ltd., Goldsmiths & Silversmiths
Britannique
Londres (Angleterre)

Titre
Bâton noir

Date
1916

Technique
Ébène, or, argent et émail

Dimensions
L : 97,5 cm
P : 4,5 cm

Crédit
Collection d’œuvres d’art et de biens patrimoniaux du Sénat

Droits d’auteur sur l’image
Sénat du Canada

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