De jeunes leaders autochtones s’expriment sur la vérité et la réconciliation au Sénat
AVERTISSEMENT: Cet article comporte des détails qui pourraient troubler certains lecteurs, comme des renseignements sur les pensionnats, les traumatismes continus et les répercussions du colonialisme.
Si vous avez besoin d’aide, veuillez communiquer avec la ligne d’écoute téléphonique nationale sur les pensionnats indiens : 1-866-925-4419 ou consultez Programme de soutien en santé : résolution des questions des pensionnats indiens pour obtenir plus de renseignements.
Dans son enfance, sur une ferme en Nouvelle‑Écosse, la Dre Meghan Beals en savait peu sur son identité micmaque et sur ses origines.
Ce n’est que lorsqu’elle a entrepris ses études en médecine à l’École de médecine du Nord de l’Ontario, à Thunder Bay, qu’elle en a appris davantage sur sa culture. Au cours de ces quatre années, elle a aussi observé les nombreuses disparités que vivent les Autochtones en matière de santé et l’importance de la représentation parmi les professionnels de la santé qui traitent les patients autochtones.
Aujourd’hui résidente en médecine familiale sur la côte Est, et s’identifie fièrement auprès de ses patients en portant un stéthoscope orné de perles. Il s’agit d’un cadeau que des aînés lui ont offert, ainsi qu’à tous les étudiants autochtones diplômés de l’école de médecine. Pour rétablir la confiance des Autochtones dans le système de soins de santé, la Dre Beals croit qu’il est impératif que le Canada augmente le nombre de médecins et professionnels de la santé autochtones, comme on le recommande dans les Appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.
« Je veux que les jeunes autochtones voient qu’il est possible de briser le cycle du traumatisme intergénérationnel et trouver la réconciliation », a dit la Dre Beals au Comité sénatorial des peuples autochtones le 26 septembre 2022.
La Dre Beals faisait partie d’un groupe de cinq jeunes leaders autochtones de partout au pays qui ont témoigné devant le Comité sénatorial des peuples autochtones dans le cadre du programme Voix de jeunes leaders autochtones 2022. Le programme invite de jeunes leaders autochtones de 18 à 35 ans à venir à Ottawa pour rencontrer des sénateurs, parler de leurs expériences personnelles et de leur travail de leadership et participer à des activités de réseautage.
L’événement a été tenu dans les jours qui ont précédé la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, au cours de laquelle on rend hommage aux survivants des pensionnats autochtones, à leurs familles ainsi qu’aux enfants qui ne sont jamais rentrés chez eux.
Le dernier pensionnat autochtone au Canada a fermé en 1996. Gabrielle Fayant de l’établissement métis de Fishing Lake, en Alberta, a expliqué au comité que les communautés autochtones vivent encore le douloureux héritage des pensionnats et leurs répercussions socioéconomiques généralisées.
« Les descendants des survivants, les jeunes d’aujourd’hui, connaissent les plus hauts taux d’institutionnalisation, du système des services à l’enfance au système carcéral », a-t-elle expliqué.
Mme Fayant — cofondatrice de l’Assembly of Seven Generations (A7G), un groupe de soutien pour les jeunes autochtones — a déclaré que les groupes partout au pays vivent un « syndrome d’épuisement professionnel » en tentant de fournir des fonds essentiels aux jeunes autochtones confrontés à la pauvreté, à l’institutionnalisation, à de graves problèmes de logement et à des crises de santé mentale.
Elle a exhorté le Sénat à superviser l’appel à l’action 66 de la Commission de vérité et réconciliation, qui recommande au gouvernement fédéral d’établir « un financement pluriannuel destiné aux organisations communautaires œuvrant auprès des jeunes ».
« Nous sommes parfois debout toute la nuit pour nous assurer que les jeunes sont en sécurité et il n’y a pas de soutien », a dit Mme Fayant.
« Nous sommes la bouée de sauvetage. »
Jama Maxie, conseiller en toxicomanie de la Première Nation de White Bear en Saskatchewan, a soulevé la question de la réforme des services à l’enfance. Les statistiques montrent que 52,2 % des enfants dans les foyers d’accueil sont autochtones, bien qu’ils ne représentent que 7,7 % des enfants au pays.
Il a parlé de son enfance dans le système des services à l’enfance à Toronto, des mauvais traitements qu’il a subis et de la façon dont il s’est sorti de la toxicomanie et de l’itinérance. Adulte, il a renoué avec sa culture et souhaite maintenant faire naître l’espoir chez les jeunes autochtones.
« Être ici compte beaucoup », a dit M. Maxie au comité.
Tyrone Sock, de la Première Nation d’Elsipogtog au Nouveau‑Brunswick et coordonnateur jeunesse auprès de Mawiw Council Inc., a parlé du vécu de son défunt père, un pêcheur et un entraîneur de hockey aimé de tous, afin de souligner l’importance des modèles d’identification pour les jeunes autochtones. Il a étudié en enseignement, dans le but d’aider les jeunes autochtones à établir un lien avec leur culture et le savoir sacré.
Taylor Behn-Tsakoza, une Dénée des Premières Nations de Fort Nelson et Prophet River en Colombie‑Britannique, a parlé au comité de son travail de défense des intérêts des jeunes autochtones dans divers forums nationaux et internationaux, y compris le Conseil national des jeunes de l’Assemblée des Premières Nations, l’Organisation des Nations Unies et lors d’une rencontre avec le pape François au Vatican en mars 2022.
À partir de la gauche, la cofondatrice de l’Assembly of Seven Generations Gabrielle Fayant, le coordonnateur jeunesse de Mawiw Council Inc. Tyrone Sock, le représentant des jeunes de la British Columbia Assembly of First Nations Taylor Behn-Tsakoza et le conseiller d’Addiction Rehab Toronto Jama Maxie dans l’édifice du Sénat du Canada lors de l’événement Voix de jeunes leaders autochtones le 6 septembre 2022.
La Dre Meghan Beals, résidente en médecine familiale de la Première Nation de Glooscap en Nouvelle‑Écosse, témoigne devant le Comité sénatorial des peuples autochtones le 26 septembre 2022 dans le cadre du programme Voix de jeunes leaders autochtones.
La sénatrice Mary Coyle (deuxième à partir de la gauche) s’adresse aux jeunes leaders autochtones invités à témoigner devant le Comité sénatorial des peuples autochtones le 26 septembre 2022. Figurent également dans la photo, de gauche à droite, la sénatrice Jane Cordy, le sénateur David M. Arnot et la sénatrice Michèle Audette.
M. Maxie de la Première Nation de White Bear en Saskatchewan, à droite, étreint la sénatrice Kim Pate lors de l’événement Voix de jeunes leaders autochtones à l’édifice du Sénat du Canada. Figurent également dans la photo le sénateur Brian Francis, président du Comité sénatorial des peuples autochtones, à gauche, et la sénatrice Nancy J. Hartling.
« Les jeunes doivent être à cette table. L’avenir pour lequel vous luttez est l’avenir dont nous hériterons. Mais nous devons participer à ce processus », a‑t‑elle déclaré.
Voyez les témoignages de Voix de jeunes leaders autochtones 2022.
Le sénateur Brian Francis, président du Comité sénatorial des peuples autochtones, a encouragé ses collègues sénateurs à écouter le témoignage émouvant des jeunes leaders et à tenir les jeunes autochtones « à l’avant-scène » dans la promotion de la vérité et de la réconciliation.
« Comme ils représentent le segment de la population canadienne qui croît le plus rapidement, nous avons la responsabilité et l’obligation de les aider non simplement à survivre, mais bien à vivre en santé et en sécurité et à s’épanouir », a‑t‑il dit dans une déclaration à la Chambre rouge le lendemain de l’événement.
« Nous avons beaucoup de travail à faire et n’avons plus de temps à perdre pour transformer cette vision en réalité. »
Les témoignages des jeunes participants, ainsi que plusieurs soumissions écrites, ont été publiés par le comité dans un rapport — Visions de la vérité et de la réconciliation : Voix de jeunes leaders autochtones 2022 — qui est disponible sur le site Web du Sénat. Le rapport souligne à quel point les perspectives des jeunes autochtones sont cruciales pour le travail du comité et du Parlement dans son ensemble.
Mme Fayant, dont la famille est de l’établissement métis de Fishing Lake en Alberta, témoigne devant le Comité sénatorial des peuples autochtones le 26 septembre 2022.
Le sénateur Patrick Brazeau prend la parole lors d’une réunion du Comité sénatorial des peuples autochtones le 26 septembre 2022.
À partir de la gauche, Gérald Lafrenière, Greffier du Sénat intérimaire, Gabrielle Fayant, le sénateur Brian Francis, la gardienne du savoir métisse Marie-Louise Perron, la sénatrice et Présidente intérimaire Pierrette Ringuette, Jama Maxie, Taylor Behn-Tsakoza, la sénatrice Nancy J. Hartling, Tyrone Sock et la sénatrice Kim Pate, dans la Chambre du Sénat lors de l’événement Voix de jeunes leaders autochtones le 26 septembre 2022.
Taylor Behn-Tsakoza, une Dénée des Premières Nations de Fort Nelson et Prophet River en Colombie‑Britannique, participe à l’événement Voix de jeunes leaders autochtones 2022.
Jama Maxie, participant de Voix de jeunes leaders autochtones 2022, pose dans l’édifice du Sénat du Canada.
Tyrone Sock, de la Première Nation d’Elsipogtog au Nouveau‑Brunswick, participe à l’événement Voix de jeunes leaders autochtones 2022.
Gabrielle Fayant, participante de Voix de jeunes leaders autochtones 2022, pose dans l’édifice du Sénat du Canada.