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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des 
Pêches et des océans

Fascicule 17 - Témoignages du 22 octobre 2003


OTTAWA, le mercredi 22 octobre 2003

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui à 18 h 22 pour étudier, afin d'en faire rapport, les questions relatives aux allocations de quotas accordées aux pêcheurs du Nunavut et du Nunavik, ainsi qu'aux bénéfices en découlant.

Le sénateur Joan Cook (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Note de la rédaction: Certains témoignages ont été présentés par l'entremise d'un interprète inuktitut.]

[Traduction]

La vice-présidente: Honorables sénateurs, nous nous réunissons aujourd'hui pour reprendre notre étude des questions relatives aux allocations de quotas accordées aux pêcheurs du Nunavut et du Nunavik ainsi qu'aux bénéfices en découlant. Ce soir, nous accueillons — et pardonnez-moi si je prononce mal le nom de votre groupe — Nunavut Sivuniksavut, programme collégial unique destiné aux jeunes Inuits. Soyez les bienvenus.

Nous avons déjà entendu un éventail considérable de témoins, et nous accueillons aujourd'hui le ministre du Développement durable du Nunavut, l'honorable Olayuk Akesuk. Le ministre est accompagné de fonctionnaires de son ministère, notamment Alex Campbell, sous-ministre, et Carey Bonnell, directeur, Pêches et chasse au phoque. Nous accueillons également des représentants du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, soit Ben Kovic, président, Michael d'Eca, conseiller juridique, et Michelle Wheatley, directrice, Gestion de la faune.

Mesdames et messieurs, soyez les bienvenus au comité.

Si je comprends bien, le ministre prendra d'abord la parole, puis ce sera au tour de représentants du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut d'intervenir. Après, nous passerons à la période de questions et aux discussions, selon notre habitude.

[Traduction de l'interprétation]

L'honorable Olayuk Akesuk, ministre du Développement durable, gouvernement du Nunavut: Au nom du gouvernement du Nunavut, je tiens à remercier les membres du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans de m'avoir invité à prendre aujourd'hui la parole devant lui pour parler des questions concernant la pêche au Nunavut. Se joignent à moi ce soir mon sous-ministre, Alex Campbell, mon adjoint exécutif, Udloriak Comeau et mon directeur, Pêches et chasse au phoque, Carey Bonnell. Ils m'aideront à répondre à vos questions.

[Traduction]

Je tiens à souhaiter la bienvenue aux personnes qui suivent les cours au Nunavut Sivuniksavut. Merci beaucoup. Un jour, vous serez probablement assis ici même. Je vous invite donc à continuer votre bon travail.

Je suis heureux d'être ici pour la deuxième fois en un peu plus de deux ans. La plupart d'entre vous se rappellent peut-être que j'ai comparu devant vous en mai 2000, à l'occasion de vos délibérations sur les pêches en eau douce et les pêches du Nord.

Le rapport que vous avez rendu public en 2002, intitulé «Thèmes choisis sur les pêches en eau douce et les pêches du Nord» rend fidèlement compte des discussions que nous avons eues au moment de notre comparution de même qu'à la faveur de visites au Nunavut en 2000. À cet égard, je tiens à féliciter tous les membres du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans de leur travail.

Je suis fermement convaincu que le document en question a beaucoup fait pour favoriser une meilleure compréhension des principaux problèmes et défis auxquels nous faisons face dans nos tentatives de créer une industrie de la pêche viable au Nunavut. Je tiens à souligner brièvement trois recommandations formulées par votre comité dans son rapport de 2002.

Dans votre quatrième recommandation, vous invitiez le ministère des Pêches et des Océans à augmenter les fonds affectés aux évaluations pluriannuelles des stocks de poissons et de mammifères marins dans le Nord.

Votre onzième recommandation portait sur la nécessité, pour le gouvernement du Canada, de mettre en œuvre le protocole d'entente signé avec le gouvernement du Nunavut en août 2000.

Enfin, dans votre douzième recommandation, vous souligniez que le ministre des Pêches et des Océans devait adopter une politique équitable et cohérente en ce qui a trait à l'accès du Nunavut à ses ressources halieutiques dans l'Atlantique et aux allocations s'y rapportant, conformément surtout à l'article 15.3.7 de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

Il est juste de dire que le gouvernement fédéral, au cours des deux dernières années, a accompli peu de progrès sur la voie de la reconnaissance ou du soutien de ces recommandations.

À l'occasion de mon témoignage de 2001, je vous ai donné un aperçu du territoire du Nunavut ainsi que des principaux défis auxquels nous sommes confrontés dans notre volonté de créer une industrie de la pêche viable et durable au Nunavut. Parmi les défis en question, mentionnons l'obtention d'un accès équitable à nos ressources continues et aux allocations s'y rapportant, l'élaboration d'infrastructures nécessaires à l'expansion de l'industrie, un engagement envers la production des données scientifiques soutenues nécessaires au maintien d'une pêche durable, la formation des habitants du Nunavut, de façon qu'ils puissent profiter à fond des débouchés offerts par l'industrie de la pêche, et, enfin, l'obtention d'un engagement envers la R et D liée à la pêche.

Je suis heureux de préciser que nous avons continué de faire des progrès dans le cadre de ces initiatives. En 2001, nous avons vu naître l'organisation qui a pour objectifs à long terme de stimuler la capacité des pêcheurs du Nunavut de récolter les ressources en flétan des eaux contiguës au Nunavut, d'accroître la crédibilité des pêcheurs du Nunavut dans l'industrie de la pêche de l'Atlantique et, enfin, d'optimiser l'expansion de la pêche au cours des cinq à dix prochaines années.

La Baffin Fisheries Coalition est une société appartenant à 100 p. 100 à des Inuits, en l'occurrence à 11 organisations inuites, y compris les associations des pêcheurs et de trappeurs de chacune des collectivités établies le long de la côte est de l'île de Baffin. La coalition, vieille d'à peine trois ans, a à son actif un certain nombre de réussites, y compris l'élaboration d'un plan d'activités détaillé qui régira ses activités au cours des cinq prochaines années.

Au nombre des principales priorités de la coalition pour l'année prochaine, mentionnons l'étude des options qui s'offrent pour l'acquisition d'un navire de même que la mise en œuvre d'un plan de formation détaillé d'une durée de cinq ans. Je suis heureux de dire que j'appuie sans réserve les initiatives de la Baffin Fisheries Coalition et que je suis déterminé à travailler avec elle au cours des mois et des années à venir pour réaliser les avantages de la pêche dans les eaux contiguës au Nunavut.

[Traduction de l'interprétation]

J'aimerais maintenant clarifier un certain nombre de mesures que le gouvernement du Nunavut a prises pour stimuler et diversifier l'industrie de la pêche au Nunavut. L'année dernière, nous avons introduit un nouveau programme — le programme d'expansion et de diversification des pêches — assorti d'un financement de 350 000 $ par année, montant qui sera versé sous forme de contributions sur le territoire du Nunavut. On a d'abord et avant tout mis ce programme sur pied pour soutenir des projets communautaires comme les pêches expérimentales, le transfert technologique et d'autres initiatives liées à la pêche.

Au cours de l'exercice 2002-2003, nous avons réussi à dégager un financement additionnel de 600 000 $ provenant d'autres sources, ce qui a fait passer à près de un million de dollars les sommes affectées à la R et D sur l'industrie de la pêche au Nunavut au cours de la dernière année.

[Traduction]

C'est probablement le lancement de la première stratégie de développement économique du Nunavut qui a constitué l'élément le plus important. Le gouvernement du Nunavut et Nunavut Tunngavik Incorporated ont lancé cette stratégie le mois dernier, au nom de plus de 20 organisations et groupes, y compris le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. La stratégie définit les valeurs et les priorités qui guideront le développement économique du Nunavut au cours des dix prochaines années. Cette stratégie fait une place importante au secteur de la pêche en particulier.

Si nous continuons de réaliser des progrès importants dans certains secteurs, nos efforts de développement demeurent malgré tout considérablement limités dans un certain nombre de domaines clés. Permettez-moi de vous donner quelques exemples de problèmes auxquels nous sommes confrontés dans les efforts que nous déployons pour créer une industrie de la pêche au Nunavut.

Du point de vue stratégique, nous avons réalisé des progrès considérables dans les efforts que nous déployons pour assurer une répartition juste et équitable de nos ressources contiguës comparables à celles qu'on retrouve dans des administrations voisines.

Sur ce plan, le rapport de 2002 du Groupe indépendant sur les critères d'accès (GICA), commandé par le ministre des Pêches et des Océans, se distingue particulièrement. Les membres du groupe ont jugé que le Nunavut constituait un cas particulier dans l'industrie de la pêche de l'Atlantique, étant donné que nous ne bénéficions pas d'un accès et d'allocations comparables à celles qu'on trouve dans des administrations voisines. Conformément à l'esprit de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut et à une application équitable et cohérente du principe de la contiguïté, le groupe a recommandé ce qui suit: «que l'on cesse d'octroyer à des intérêts étrangers au Nunavut l'accès aux eaux contiguës du Nunavut tant que celui-ci n'aura pas obtenu l'accès à une grande partie de ses ressources halieutiques contiguës.»

Le 8 novembre 2002, le ministre des Pêches et des Océans a accepté la recommandation et s'est engagé à assurer au Nunavut la majeure partie de ses ressources contiguës.

Depuis la publication du rapport du GICA, on a majoré à deux reprises les quotas de pêche commerciale dans les eaux contiguës du Nunavut, dans les deux cas pour la pêche à la crevette dans la zone 1. La première majoration, qui remonte à septembre 2002, a entraîné une augmentation des quotas de 2 690 tonnes métriques. Or, des intérêts du Nunavut n'ont eu droit qu'à moins de 9 p. 100 du total.

La deuxième majoration, qui date du mois de mai de cette année, a entraîné une augmentation des quotas de 2 127 tonnes métriques, des intérêts du Nunavut ayant eu droit à environ 51 p. 100 du total. À la suite de cette dernière majoration, la part de la pêche à la crevette nordique dans nos eaux contiguës qui revient au Nunavut est passée à à peine 25 p. 100 ou 26 p. 100, soit 7 847 tonnes métriques pour des quotas totaux de 29 717 tonnes métriques. On est loin des engagements pris par le GICA pour le Nunavut.

Si certaines décisions stratégiques d'importance ont été prises en principe, le ministère des Pêches et des Océans, en pratique, n'a pas respecté ses obligations et n'a pas non plus amélioré notre sort de façon marquée en ce qui a trait à l'accès aux ressources contiguës et aux allocations s'y rapportant.

En ce qui concerne l'expansion de la structure, on ne pourra doter le Nunavut d'une industrie de la pêche prospère sans une infrastructure de base, par exemple des ports et des ports pour petits bateaux. À l'heure actuelle, nous n'avons ni installations portuaires, ni ports pour petits bateaux ni centres de services maritimes pour soutenir une industrie de la pêche côtière ou hauturière au Nunavut.

Cette année seulement, le ministère des Pêches et des Océans a, dans le cadre de son Programme des ports pour petits bateaux, engagé près de 56 millions de dollars dans des projets d'expansion et de réfection des ports dans le reste du Canada. Cependant, je suis au regret d'affirmer que le Nunavut a été laissé pour compte, en dépit des demandes répétées formulées par le gouvernement du Nunavut pour que le programme s'applique sur son territoire et favorise le développement de notre industrie de la pêche.

En ce qui concerne le programme scientifique pour la pêche du Nord, une solide plate-forme scientifique est le fer de lance du développement fructueux de toute pêche, où que ce soit dans le monde. Sans la science, il ne peut y avoir de véritable expansion de la pêche.

Le programme scientifique sur le flétan d'une durée de trois ans, que le ministère des Pêches et des Océans et le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut ont financé conjointement en 1999 à 2001, constitue une illustration éloquente des succès que nous pouvons obtenir lorsque nous travaillons en collaboration. Il en est résulté l'établissement d'un quota de 4 000 tonnes métriques pour des intérêts du Nunavut dans la zone de pêche 0A de l'OPANO, sans compter les renseignements les plus précieux que nous avons recueillis sur le bilan de santé général des stocks.

Il est évident que nous devons nous inspirer de la réussite de ce programme et mettre au point un programme pluriannuel et plurispécifique pour soutenir le développement de pêches nouvelles et émergentes au Nunavut. C'est particulièrement important dans le contexte du Nunavut, étant donné que notre région compte de nombreux secteurs inconnus et inexplorés, et le fait que, partout où nous nous tournons, nous découvrons de nouvelles ressources marines susceptibles d'être disponibles à des fins commerciales. Sans un tel programme scientifique, nous ne serons jamais en mesure de réaliser le véritable potentiel et les avantages de nos ressources contiguës.

Le ministère des Pêches et des Océans admet la nécessité de plus de données scientifiques détaillées sur les ressources du Nord, mais il n'est pas parvenu à investir les ressources financières requises pour mettre au point un tel programme au Nunavut.

En ce qui concerne la formation, le développement d'une main-d'œuvre qualifiée dans le Nord est manifestement la clé de l'expansion réussie de l'industrie de la pêche au profit de tous les habitants du Nunavut. Je suis heureux de dire que nous réalisons des progrès notables dans ce domaine. Des groupes industriels comme la Qikiqtaaluk Corporation et la Baffin Fisheries Coalition ont élaboré un plan de formation à long terme pour l'emploi dans l'industrie de la pêche hauturière.

Nous assurons également une formation poussée dans l'industrie de la pêche côtière. À titre d'exemple, nous avons cofinancé, le printemps dernier, un programme de formation à la pêche au flétan en hiver à Clyde River, en faisant appel aux compétences de pêcheurs de Pangnirtung qui exploitent avec succès le flétan en hiver. Il en est résulté un projet de transfert de technologies des plus efficaces offrant des débouchés importants pour l'avenir.

En ce qui concerne le développement de pêches émergentes, nulle part au Canada le potentiel de croissance n'est-il aussi grand que dans le Nunavut. Une bonne part des vastes régions qui forment nos eaux contiguës n'ont pas fait l'objet d'activités expérimentales ni exploratoires.

Comme la plupart d'entre vous le savez, mon ministère, en 2000, signait un protocole d'entente avec le ministère des Pêches et des Océans sur le développement des nouvelles pêches au Nunavut. Dans le protocole d'entente, nous reconnaissons assumer conjointement la responsabilité du développement d'une industrie de la pêche saine et viable au Nunavut, en plus de définir les autres principes qui guideront les efforts des deux ordres de gouvernement.

Le protocole d'entente est un exemple de politique séduisant en principe; cependant, le ministère des Pêches et des Océans a peu fait pour faire passer le projet au stade opérationnel. Il ne semble y avoir ni stratégie ni approche concernant l'émergence de l'industrie de la pêche au Nunavut.

Le développement des pêches constitue l'une des meilleures occasions de développement économique et de création d'emplois au Nunavut, région où les possibilités sont limitées. À l'heure actuelle, la valeur totale au débarquement des quotas de pêche dans les eaux contiguës du Nunavut se chiffre à près de un milliard de dollars. Malheureusement, à l'heure actuelle, ce sont des intérêts étrangers au Nunavut qui détiennent la vaste majorité de ces quotas.

Le gouvernement du Nunavut, de concert avec ses partenaires, Nunavut Tunngavik Incorporated et le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, a, au cours des dernières années, consacré un temps et des ressources énormes à la mise au point d'une stratégie de développement de l'industrie de la pêche. Comme vous le constaterez dans le mémoire écrit que nous avons préparé à votre intention, nous avons une idée claire de ce qu'il faut pour que l'industrie progresse. Pour ce faire, il faut aussi que le gouvernement fédéral devienne un partenaire à part entière.

Étant donné les défis mentionnés ci-dessus, notre plan est relativement dynamique et ambitieux. Nous savons que la situation ne changera pas du jour au lendemain. Le gouvernement fédéral devra consentir des investissements majeurs pour établir l'infrastructure de base, nécessaire à l'expansion de la pêche au Nunavut. Sinon, nous risquons de nous trouver devant vous une fois de plus dans cinq ans sans progrès notables à mentionner.

À l'intention des sénateurs de la Région de l'Atlantique présents ici ce soir, j'aimerais, en conclusion, situer brièvement notre situation dans un contexte différent. Faites-vous une image mentale de vos propres collectivités côtières. Je vous invite maintenant à gommer du portrait vos ports et vos installations portuaires, vos centres de services maritimes, vos programmes scientifiques régionaux de base, le financement de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et vos programmes de diversification de la pêche. Dans vos collectivités autochtones de l'Atlantique, supprimez l'arrêt Marshall et le financement de la Stratégie des pêches autochtones. Imaginez maintenant qu'on vous dise de développer la pêche sans ces structures d'un point fondamental. Voilà ce que nous tentons de faire pour développer une industrie de la pêche au Nunavut.

Merci beaucoup, madame la présidente, de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant vous.

La vice-présidente: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Le sénateur Cochrane, ayant un engagement antérieur, doit nous quitter. Avant de céder la parole aux autres témoins, nous allons lui donner l'occasion de poser des questions au ministre sur son exposé.

Le sénateur Cochrane: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Je suis heureuse que vous soyez venu. Il est bon de vous voir ici, surtout quand on pense que vous êtes venu d'aussi loin que le Nunavut.

Avant de commencer, monsieur le ministre, j'aimerais souligner la présence ici de jeunes du Nunavut. Ils participent à un programme de leadership?

M. Akesuk: Oui.

Le sénateur Cochrane: Ils suivent ce programme ici, à Ottawa?

M. Akesuk: Oui.

Le sénateur Cochrane: S'agit-il d'un nouveau programme? Je suis impressionnée de constater que de si nombreux jeunes sont intéressés à se perfectionner et à apporter une contribution à leur région. Je suis certaine que bon nombre d'entre eux travailleront dans leur région et feront du Nunavut un territoire prospère.

J'ai visité la région. Je dois avouer être très impressionnée de constater la présence ici de si nombreuses personnes de votre région.

Sont-elles parrainées par le gouvernement fédéral?

M. Akesuk: Oui.

Le sénateur Cochrane: C'est merveilleux. Je suis ravie, et je suis certaine que vous l'êtes aussi.

Je sais que le Nunavut a récemment établi un nouveau gouvernement. Comment le ministre des Pêches de votre nouveau gouvernement réagit-il à l'absence de quotas, de ports, d'installations portuaires — ou tout ce qui concerne l'habitat marin ou est de nature à améliorer la situation des quotas?

M. Akesuk: Je suis le ministre des Pêches.

Le sénateur Cochrane: Pardonnez mon ignorance. C'est merveilleux.

Quel genre de conversation avez-vous eue avec vos homologues fédéraux?

M. Akesuk: Avant l'arrivée de M. Thibault au poste de ministre des Pêches et des Océans, nous avions affaire à M. Dhaliwal, qui, en ce qui concerne le dossier des pêches, nous appuyait à 100 p. 100 ou peu s'en faut. Du point de vue de l'allocation des quotas, nous avons reçu un appui plus mitigé de la part de M. Thibault. Au moment de l'établissement des dernières allocations, M. Dhaliwal nous a accordé 100 p. 100. Voilà que M. Thibault nous accorde 51 p. 100.

Nous avons parlé à nos homologues, et nous nous assurons de communiquer avec eux par écrit ou verbalement. Nous continuerons de faire passer notre message à M. Thibault ou à quiconque occupera le poste de ministre des Pêches et des Océans dans le prochain gouvernement.

Nous avons exercé des pressions sur le gouvernement fédéral pour qu'il reconnaisse que le Nunavut a besoin d'une infrastructure pour se doter d'une prospère industrie de la pêche.

Le sénateur Cochrane: Y a-t-il des représentants du MPO en poste au Nunavut?

M. Akesuk: Oui.

Le sénateur Cochrane: Comment qualifieriez-vous les relations que vous entretenez avec eux?

M. Akesuk: Elles sont bonnes. Notre gouvernement tente de travailler avec eux. Notre collègue, M. Kovic, est également proche du MPO. Au sein du territoire, la collaboration est bonne.

Le sénateur Cochrane: Entrevoyez-vous des changements positifs?

M. Akesuk: Nous souhaitons que des changements positifs soient apportés. Nous souhaitons l'aménagement de nouvelles infrastructures et un meilleur soutien pour les allocations de quotas dans les eaux contiguës du Nunavut.

Le sénateur Cochrane: Vous avez dit bénéficier du quart seulement du nombre total de prises autorisées. J'ai examiné les chiffres. J'ai l'impression qu'il ne s'agit que du quart des quotas, n'est-ce pas?

M. Akesuk: Il s'agit de 26 p. 100 des quotas disponibles dans les eaux contiguës du Nunavut. Nous n'en avons que 26 p. 100.

Le sénateur Cochrane: À qui les autres — je vous invite à être spécifique — appartiennent-ils?

M. Carey Bonnell, directeur, Pêches et chasse au phoque, ministère du Développement durable du Nunavut: Le ministre fait référence à la pêche à la crevette nordique. Il y a un accord de partage des ressources hauturières. Dans l'industrie de la pêche à la crevette nordique, on dénombre 17 titulaires de permis de pêche hauturière.

Pour l'essentiel, la pêche dans nos eaux est répartie en 17 permis. Le Nunavut est titulaire de 1,5 des 17 permis, ce qui représente pour nous une augmentation d'environ 9 p. 100. Le nord du Québec est titulaire de 1,5 permis, et les autres sont répartis entre Terre-Neuve et le Labrador, la Nouvelle-Écosse et peut-être d'autres intérêts québécois. Essentiellement, c'est ainsi que la pêche à la crevette nordique est répartie dans nos eaux contiguës.

En ce qui concerne d'autres pêches exploratoires, il y a d'autres allocations dont un pourcentage plus élevé nous revient. Dans nos eaux contiguës, il y a deux principaux noyaux de pêche à la crevette. Le premier, la zone de pêche à la crevette 1, se trouve au large de Qikiqtarjuaq. Il s'agit d'un quota de 14 000 tonnes métriques. À l'heure actuelle, nous détenons 15 p. 100 de ce quota.

L'autre est la zone de pêche à la crevette 2, au large de l'île Resolution. Cette pêche s'effectue probablement à une distance de 12 à 14 milles de notre littoral. Nous détenons environ 9 p. 100 de ce quota. Voilà, en gros, comment les choses se ventilent.

M. Akesuk: Il y a une carte à la première page de notre mémoire. Elle devrait clarifier la situation à vos yeux, sénateur.

Le sénateur Cochrane: Vos allocations de quotas ne sont pas très généreuses, ainsi que quelques personnes du Nunavut ou de cette région nous l'ont déjà dit. Nous avons entendu une dame dire qu'elle veut faire l'acquisition d'un bateau de pêche, mais qu'elle ne peut le faire car elle n'arrive pas à obtenir un quota. Ces allocations de quotas demeureront les mêmes jusqu'en 2005?

Mme Michelle Wheatley, directrice, Gestion de la faune, Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut: Le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut (CGRFN) assure la répartition des quotas alloués au Nunavut. Dans son exposé, M. Kovic vous parlera de la politique du conseil. Nous avons un système d'allocations. Comme les mêmes intervenants revenaient d'année en année, nous avons décidé en 2002 que les allocations demeureraient valables pour une période de trois ans — 2002, 2003 et 2004, en l'occurrence — à condition que les titulaires actuels des quotas respectent les plans et exploitent effectivement leurs quotas.

Lorsque quelqu'un souhaite faire son entrée dans le domaine de la pêche, quel exploitant devons-nous pénaliser en lui retirant une partie de son quota? Sans nouvelle allocation, nous ne pouvons pas retirer à des exploitants une partie des quotas qui leur ont été attribués simplement parce que quelqu'un souhaite faire son entrée dans l'industrie.

Le sénateur Cochrane: Combien de pêcheurs y a-t-il au Nunavut?

M. Bonnell: Il est difficile de répondre à cette question. Tout dépend de la région. Dans l'industrie de la pêche hauturière, on dénombre en tout temps de 40 à 50 personnes travaillant à bord de bateaux de pêche hauturière, selon les sociétés pour le compte de qui elles travaillent. Nous avons une pêche d'hiver à Cumberland Sound, près de Pangnirtung. Pendant quatre mois de l'année, on pêche sur la glace. Vous trouverez des renseignements sur le sujet dans les documents qui vous ont été distribués. De 50 à 60 personnes participent à cette pêche d'hiver. Il y a aussi une usine de transformation du poisson où travaillent de 50 à 60 personnes de plus.

Sur l'ensemble du territoire du Nunavut, on note aussi l'existence d'une pêche traditionnelle à l'omble chevalier. Des centaines de personnes s'adonnent à cette pêche.

Il y a aussi un certain nombre de groupes différents, selon le type de pêche dont il est question.

Le sénateur Cochrane: Certaines personnes travaillent dans l'industrie de la pêche hauturière. Travaillent-elles pour le compte d'autres propriétaires? Transforme-t-on le poisson à bord de ces bateaux, de ces chalutiers-congélateurs?

M. Bonnell: Oui. À l'heure actuelle, selon l'identité de la société qui détient des quotas au Nunavut, le titulaire crée plus ou moins un partenariat avec le groupe industriel du Canada atlantique. Aux termes de ces partenariats, un certain nombre de résidents du Nunavut doivent travailler à bord des navires en question. À l'heure actuelle, c'est ainsi qu'on fonctionne normalement.

Le sénateur Cochrane: Les choses se passent bien?

M. Bonnell: Les choses se passent bien, mais, comme le ministre l'a indiqué dans son témoignage, le Nunavut a pour objectif à long terme de faire l'acquisition de navires, de s'approprier ses propres ressources et d'exercer une mainmise sur elles. On sera ainsi en mesure de créer un grand nombre de nouveaux emplois. Nous sommes heureux de l'état actuel des choses, mais nous envisageons un remarquable potentiel de croissance au cours des cinq à dix prochaines années.

Si on remonte dans le passé, on se rend compte que l'histoire de la pêche hauturière remonte à tout au plus une quinzaine d'années. À Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse, les pêcheries ont des centaines d'années d'histoire. Il est étonnant de constater les progrès que nous avons accomplis au cours des 20 dernières années, étant donné l'absence d'infrastructures, problème dont il a été question ce soir. Les possibilités de croissance qui se profilent à l'horizon sont considérables, à condition que l'on prenne les bonnes décisions concernant l'aménagement des infrastructures.

Le sénateur Cochrane: Comme vous n'avez ni ports ni installations portuaires, où les bateaux de pêche hauturière venus d'autres provinces s'amarrent-ils?

M. Bonnell: Il y a un ou deux endroits. Ils peuvent se ravitailler et débarquer leurs prises à Terre-Neuve, disons à Harbour Grace. Certains navires se rendent au Groenland. De toute évidence, le temps qu'il faut pour effectuer la navette entre Terre-Neuve et le Nunavut constitue un facteur dissuasif, si bien que certains exploitants débarquent leurs prises, qu'il s'agisse de crevettes ou de flétans, à Nuuk, capitale du Groenland, et les font transborder.

M. Akesuk: On débarque aussi de 300 à 400 tonnes métriques à l'usine de transformation du poisson de Pangnirtung.

Le sénateur Cochrane: Vous avez une usine de transformation à Pangnirtung?

M. Akesuk: Oui, pour le flétan.

Le sénateur Cochrane: Combien de personnes y travaillent?

M. Akesuk: L'usine emploie de 50 à 60 résidents de la région. Il s'agit d'emplois saisonniers, qui durent probablement pendant neuf mois de l'année.

Le sénateur Cochrane: Ce n'est pas mal.

Le sénateur Watt: Cela correspond-il à neuf mois de pêche proprement dite?

M. Akesuk: Non, on parle de neuf mois de transformation du poisson.

La vice-présidente: J'ai une question supplémentaire qui pourrait nous aider toutes les deux à comprendre.

Les allocations de quotas sont toutes réparties. Vous aimeriez que vos allocations soient majorées. Y a-t-il une capacité qui permettrait la majoration des quotas de façon à introduire un nouveau processus? À l'heure actuelle, tous les quotas sont utilisés. Y a-t-il suffisamment de ressources pour donner au Nunavut la possibilité d'avoir un ou deux permis de plus? Est-ce réaliste?

Mme Wheatley: Il y a assurément de l'intérêt. Nous recevons de trois à quatre fois plus de demandes que ce que nous pouvons offrir.

À l'heure actuelle, tous les quotas sont exploités suivant un régime de redevances. Jusqu'à ce que les quotas soient suffisants pour permettre l'exploitation à long terme d'un navire, nous devons faire appel aux régimes de redevances. Si les quotas augmentent, nous serons mieux en mesure d'évoluer vers l'autosuffisance et de justifier l'achat et l'entretien d'un navire.

La vice-présidente: Aidez-moi à comprendre encore un peu mieux. Les allocations de ressources sont-elles révisées annuellement ou fixées?

Mme Wheatley: Vous voulez parler des allocations au Nunavut?

La vice-présidente: Je veux parler des allocations totales.

Mme Wheatley: Le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut alloue des quotas qui sont révisés annuellement. Nous reprenions depuis le début l'étude des demandes tous les ans, mais le fait de préparer de nouvelles demandes tous les ans exigeait beaucoup de temps de la part de nos employés — et des participants. Nous n'entrevoyions pas de véritables changements puisque les intéressés se conformaient aux exigences. En 2002, nous avons adopté des allocations pour une période de trois ans.

À la fin de la saison de pêche, les participants doivent nous présenter un rapport montrant qu'ils ont fait ce qu'ils s'étaient engagés à faire, qu'ils ont consenti les efforts requis et qu'ils ont exploité leurs quotas. Si certaines parties n'ont pas exploité leurs quotas, nous pouvons rajuster les allocations dont bénéficient des particuliers ou des entreprises. Nous ne reprenons pas la procédure de demande depuis le début tous les ans.

La vice-présidente: Je vous remercie. J'invite maintenant M. Kovic à prendre la parole.

M. Ben Kovic, président, Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut: Merci de l'occasion qui nous est donnée de comparaître ce soir devant le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut m'accompagnent aujourd'hui la directrice, Gestion de la faune, Michelle Wheatley, et le conseiller juridique, Michael d'Eca. Ils m'aideront à répondre aux questions des sénateurs. Dans le cadre des remarques liminaires du CGRFN, M. d'Eca prendra quelques minutes pour parler de la pertinence de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut et du principe de contiguïté pour votre étude.

D'entrée de jeu, je précise que le CGRFN appuie sans réserve les propos que vient tout juste de tenir mon collègue, le ministre Akesuk. Outre ce que le ministre a déjà dit, le CFRFN aimerait, dans ses remarques d'ouverture, aborder brièvement quatre questions.

Premièrement, je vais expliquer le rôle que le CGRFN est appelé à jouer en vertu de l'accord sur les revendications territoriales, que je qualifierai d'«accord». Deuxièmement, je vais présenter brièvement la politique que suit le CGRFN pour allouer des quotas de pêche commerciale. Troisièmement, M. d'Eca expliquera l'importance que revêt l'article 15.3.7 de l'accord aux fins de votre étude, et il analysera également l'application du principe de contiguïté aux pêches dans l'Atlantique. Quatrièmement, en conclusion, je vais vous faire part de l'aide que le CGRFN attend du comité du Sénat.

Je vais commencer par vous parler du rôle du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut. Le CGRFN se compose de neuf membres, dont quatre sont nommés par des Inuits, trois, par le gouvernement fédéral et un par le gouvernement territorial, le président étant nommé par les huit autres membres et désigné par le gouvernement fédéral.

Aux termes de l'accord, le CGRFN agit à titre de tribunal indépendant chargé de prendre la plupart des décisions concernant la gestion de la faune dans la région du Nunavut. Cette dernière s'étend sur l'ensemble du territoire du Nunavut, à l'exception de quelques petites îles de la baie d'Hudson — l'ensemble de ses eaux intérieures et des régions maritimes jusqu'à la limite extérieure de la mer territoriale contiguë.

Dans la région du Nunavut, c'est le CGRFN qui prend les décisions concernant l'établissement, la modification ou le retrait des limites imposées aux récoltes. En ce qui concerne la pêche commerciale, par exemple, le CGRFN fixe les quotas, les restrictions relatives aux engins et les saisons. Si un quota, une restriction relative aux engins ou une saison doit être modifié, le projet doit d'abord être soumis au CGRFN, instance à laquelle revient de prendre une décision. Le CGRFN est aussi responsable de l'allocation des quotas commerciaux dans la région du Nunavut.

Toutes les décisions prises par le CGRFN relativement aux limites imposées aux récoltes sont sujettes à un examen de la part du ministre compétent. Même si cela se produit rarement, le ministre peut rejeter les décisions du CGRFN s'il se conforme aux conditions définies dans l'accord. À l'extérieur de la région du Nunavut, le ministre prend toutes les décisions relatives à la gestion de la faune, y compris l'établissement des quotas commerciaux, les restrictions relatives aux engins et les saisons. Aux termes de l'accord, le CGRFN joue toutefois un rôle consultatif important concernant la gestion de la faune à l'extérieur de la région du Nunavut, et le ministre doit en tenir compte.

Le rôle consultatif du CGRFN s'étend à l'est de la région du Nunavut, dans les eaux du détroit de Davis et de la baie de Baffin — sous réserve des compétences du Canada — qui ne font partie ni de la région du Nunavut ni d'une autre région visée par un règlement sur des revendications territoriales; cette compétence s'étend aussi au sud de la région du Nunavut, dans les eaux de la baie James, de la baie d'Hudson et du détroit d'Hudson qui ne sont pas visées par un règlement sur des revendications territoriales.

Même si l'accord ne les oblige pas à le faire, le gouvernement du Canada et le CGRFN ont convenu que c'est le conseil qui assume la responsabilité de l'allocation de la part des quotas commerciaux du Nunavut à l'extérieur de la région du Nunavut. Il s'agit d'un détail important dans la mesure où les deux principales pêches commerciales du Nunavut, la pêche au flétan et la pêche à la crevette, s'effectuent pour la majeure partie dans des eaux contiguës au Nunavut, mais extérieures à la région du Nunavut.

À titre d'exemple, dans la zone de pêche 0B de l'OPANO, la pêche au flétan s'effectue presque en totalité dans les eaux hauturières, au-delà de la mer territoriale — et, par conséquent, de la région du Nunavut. Cependant, c'est le CGRFN qui alloue aux pêcheurs du Nunavut la totalité des ressources du Nunavut dans la zone 0B, soit 1 500 tonnes métriques. Il en va de même pour la pêche au flétan dans la zone 0A au nord ainsi que pour les zones de pêche à la crevette 1, 2 et 3.

Je vais maintenant dire un mot de la politique d'allocation du CGRFN. La politique d'allocation du conseil pour les pêches commerciales figure en détail dans l'Annexe 1 de notre mémoire conjoint. La politique s'appuie résolument sur un certain nombre de principes, d'objectifs et d'autres orientations déjà fixés dans l'accord. Le CGRFN utilise ces orientations comme lignes directrices pour établir des critères à la lumière desquels il évalue les demandes pour les pêches où des quotas commerciaux sont déjà établis ou encore pour des pêches nouvelles.

Dans les eaux contiguës du Nunavut, il y a déjà des quotas de pêche commerciale pour le flétan et la crevette. Dans ces pêches, il y a toujours plus de demandeurs que d'allocations disponibles. Par conséquent, il est extrêmement important que le CGRFN évalue les demandes de façon impartiale, à la lumière de critères équitables et objectifs.

Le CGRFN se fonde sur neuf critères pour évaluer les demandes d'allocation pour les pêches au flétan et à la crevette dans les eaux contiguës. Le premier a trait à la contiguïté de la zone de pêche. Les collectivités les plus rapprochées de la zone de pêche auront la préséance sur les collectivités plus éloignées.

Le deuxième critère a trait à la propriété ou à la commandite de l'entreprise qui présente la demande de quota. Les organisations régionales des ressources fauniques (ORRF), les organisations de chasseurs et de trappeurs (OCT) ou les entreprises appartenant à un résident du Nunavut auront la priorité.

Le troisième critère a trait aux emplois mis à la disposition de résidents du Nunavut. Les demandeurs qui assurent des emplois liés à la récolte ou au traitement à des résidents du Nunavut, en particulier les Inuits, auront la préséance.

En quatrième lieu, il y a la formation assurée aux résidents du Nunavut. Les demandeurs qui assurent une formation liée à la récolte ou au traitement à des résidents du Nunavut, en particulier les Inuits, auront la préséance.

Le cinquième critère concerne les avantages économiques pour les résidents du Nunavut. Les demandeurs qui assurent des avantages économiques aux résidents du Nunavut, en particulier les Inuits, auront la priorité.

Le sixième critère a trait aux antécédents dans la pêche. Les demandeurs qui ont fait la preuve de leur capacité d'exploiter leurs quotas auront la priorité.

Le septième critère porte sur la dépendance économique à l'égard des ressources maritimes. Les demandeurs et les collectivités qui dépendent actuellement de la pêche auront la priorité.

Le huitième critère concerne la méthode de récolte utilisée. Les demandeurs qui utilisent les méthodes de récolte les plus respectueuses des principes de la conservation auront la priorité.

Le neuvième critère a trait au respect du plan de gestion, de conservation ou de récolte approuvé par le CGRF. Les demandeurs qui ont fait la preuve de leur respect de tels plans auront la priorité.

De façon professionnelle, indépendante et impartiale, le CGRFN tient compte des neuf facteurs ci-dessous au moment de l'étude de toutes les demandes.

Je vais maintenant céder la parole à mon conseiller juridique, Michael d'Eca.

M. Michael d'Eca, conseiller juridique, Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut: Le troisième sujet que nous souhaitons aborder ce soir est l'article 15.3.7 de l'accord. D'autres témoins, notamment le ministre Akesuk, plus tôt ce soir, y ont déjà fait allusion devant le comité. Nous voulons également aborder le principe connexe de la contiguïté.

L'accord, comme vous le savez sans doute, est un accord sur des revendications territoriales au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui est la loi suprême du Canada. Il est extrêmement important de ne pas oublier que l'accord a été conclu en échange de la cession de droits que les Autochtones détenaient depuis des milliers d'années. En cas de contradiction ou de conflit entre des lois fédérales, provinciales ou locales et l'accord, ce dernier, en raison de son statut constitutionnel, l'emporte.

L'article 15.3.7, dans la mesure où il fait partie de l'accord, est bien entendu protégé par la Constitution. On vous a sans doute fait lecture de la disposition en question à un moment ou à un autre. Il s'agit d'un article relativement long comportant un certain nombre d'éléments différents. J'aimerais prendre quelques minutes pour le décortiquer avec vous, simplement parce qu'il revêt une grande importance pour les questions que vous étudiez. Avec un peu de chance, je réussirai à en éclairer la signification.

L'article 15.3.7 confère à la Couronne quatre obligations interreliées vis-à-vis des Inuits du Nunavut. La première a trait à la reconnaissance de l'importance du principe de contiguïté. Selon le Canadian Oxford Dictionary, «principe» s'entend d'une loi ou d'une vérité fondamentale utilisée comme fondement à un raisonnement ou une action.

Deuxièmement, la Couronne est tenue de reconnaître l'importance du principe de la dépendance économique de collectivités de la région du Nunavut à l'égard de ressources marines.

Troisièmement, la Couronne est tenue d'accorder une attention spéciale à ces principes au moment de l'attribution de permis de pêche commerciale dans la baie de Baffin, le détroit de Davis, le détroit de Hudson, la baie de Hudson et la baie James, sauf dans les régions qui font partie d'une autre région ayant fait l'objet d'un règlement des revendications territoriales.

Enfin, la Couronne est tenue d'appliquer ces deux principes de manière à promouvoir une répartition équitable des permis entre les résidents de la région du Nunavut et les autres résidents du Canada, conformément aux obligations intergouvernementales du Canada.

Le CDRFN prie le comité, au moment où il entreprend son étude spéciale des allocations de quota et des bénéfices en découlant, d'utiliser ces obligations constitutionnelles de la Couronne comme jalon pour déterminer si les allocations et les bénéfices actuels alloués aux pêcheurs du Nunavut sont équitables; s'ils ne le sont pas, nous invitons le comité à déterminer les allocations et les bénéfices qui seraient équitables à l'avenir.

Outre ces jalons constitutionnels, il y a deux autres outils très utiles qui, croit le conseil, vous aideront à évaluer la mesure dans laquelle la pêche au flétan et à la crevette dans les eaux contiguës du Nunavut est équitable. Il s'agit de deux rapports sur l'accès aux ressources produits par le groupe de travail du Comité fédéral-provincial des pêches de l'Atlantique.

En 1997, le groupe de travail a produit un document que vous connaissez peut-être. Il a pour titre «Antécédents d'accès aux ressources/Parts provinciales — Poisson de fond — Rapport sommaire». Ce rapport, dont l'exactitude a été examinée et acceptée par le ministère des Pêches et des Océans et les provinces de l'Atlantique, a confirmé que, de 1979 à 1991, les pêcheurs d'une province contiguë à une zone de pêche avaient bénéficié de la majeure partie des ressources en poisson de fond contiguës. De façon générale, la proportion a été de l'ordre de 80 à 90 p. 100 ou plus.

Par exemple, dans les vastes zones marines contiguës à Terre-Neuve et au Labrador, les pêcheurs de la province de Terre-Neuve bénéficiaient et continuent de bénéficier d'un peu plus de 90 p. 100 de la ressource. Le rapport a révélé une exception flagrante à cette forte corrélation entre la contiguïté et l'accès — soit le territoire du Nunavut.

En 1999, le groupe de travail a produit un document d'accompagnement intitulé «Resource Access/Provincial Shares Shellfish Summary Report.» Cette fois, le groupe de travail ne s'est intéressé qu'à l'accès courant, en 1997. Cependant, les conclusions ont été essentiellement les mêmes. En fait, les auteurs du rapport n'ont même pas examiné la majeure partie des pêches aux mollusques et aux crustacés, puisqu'ils en sont venus à la conclusion suivante: «[Traduction] Pour la vaste majorité des pêches aux mollusques et aux crustacés, l'accès est à l'heure actuelle limité aux pêcheurs d'une province. Par conséquent, elles ne posent pas de problème.»

Pour ce qui est de la pêche à la crevette, le groupe de travail a fait état de trois secteurs où les pêcheurs de plus d'une province pratiquaient leur métier. Ces résultats concordent avec ceux du rapport de 1997 sur le poisson de fond.

Dans le golfe du Saint-Laurent, tout juste à côté de Terre-Neuve et du Québec, les pêcheurs des deux provinces prennent une part presque identique de 86 p. 100 du quota. Sur la plate-forme Scotian, tout juste à côté de la Nouvelle- Écosse, les pêcheurs néo-écossais ont droit à 75 p. 100 du quota du secteur des engins mobiles et à l'intégralité du quota du secteur des engins fixes.

Puis il y a Offshore Northern, qui compte sept zones de pêche à la crevette — 0, 1, 2, 3, 4, 5 et 6. Quatre des zones en question sont tout juste à côté du Nunavut. Sur le vaste terrain ici délimité, quatre provinces et un territoire se partagent 17 permis. Terre-Neuve en a huit; le Québec, trois et demi; la Nouvelle-Écosse, deux; le Nouveau-Brunswick, deux; et le Nunavut, un et demi.

Le CGRFN est d'avis que le rapport du GICA, auquel le ministre Akesuk a déjà fait allusion, combiné aux deux rapports du groupe de travail et à l'article 15.3.7 constitue une assise solide pour les 12 objectifs et recommandations présentés dans le mémoire du gouvernement du Nunavut, de NTI et du CGRFN à l'intention du comité sénatorial.

Sur ce, je cède la parole à M. Kovic, pour qu'il puisse conclure.

M. Kovic: Merci. Notre dernière observation porte sur l'aide que demande le CGRFN au comité sénatorial. Au cours des quelques dernières années, les observateurs attentifs en sont venus à s'entendre sur le fait que le Nunavut n'a pas eu droit à un traitement équitable en ce qui concerne les pêches en eau contiguë. Ce dont le Nunavut a besoin aujourd'hui, c'est qu'Ottawa ait la volonté politique d'agir et prenne les mesures nécessaires pour que toutes les modifications requises soient apportées dans un délai raisonnable.

Le ministre Akesuk a déjà fait l'allusion à l'excellent rapport que vous avez produit l'an dernier à propos de la pêche en eau douce et des pêches du Nord au Canada. Le rapport en question et les recommandations qu'il comporte ont eu un effet salutaire. Vous vous souviendrez qu'à l'époque où le ministre des Pêches et des Océans a comparu devant votre comité, en juin 2002, il a dit: Votre comité est bien respecté au sein de mon ministère. Vos rapports récents sur l'aquaculture et la pêche en eau douce et dans le Nord nous ont beaucoup fait réfléchir au ministère. De fait, notre décision d'accroître de 4 000 tonnes les pêches autorisées de flétan au Nunavut, dans la division 0A de l'OPANO, s'est fondée en partie sur votre recommandation, soit que notre nouveau territoire ait un accès équitable aux pêches dans l'Atlantique.

Compte tenu de l'appui ici donné par votre comité et du rapport qu'il a produit en 2002, sans oublier les résultats que le rapport a aidé à atteindre, la demande que le CGRFN adresse à votre comité est assez simple et directe: un autre rapport solide — un rapport qui aidera à stimuler la volonté politique, pour que les modifications qui s'imposent soient apportées.

Nous espérons que, dans votre rapport, vous appuierez vigoureusement les 12 objectifs et 12 recommandations que renferme notre mémoire collectif. Le CGRFN est prêt à répondre à vos questions et à aider le comité à accomplir le travail important qui lui revient, ce soir même et à tout moment, à l'avenir.

La vice-présidente: Merci, monsieur Kovic. Chers collègues, nous allons entamer notre période de questions, et nous prendrons 10 minutes chacun.

Le sénateur Watt: Je parlerai en inuktitut.

[Traduction de l'interprétation]

Un accord a été conclu avec le Canada. Votre premier exposé remonte à un an. Y a-t-il eu des changements jusqu'à maintenant?

M. Akesuk: Cela fait presque deux ans maintenant. Nous étions là en mai 2001. Aucun changement n'a été apporté depuis la dernière fois que je suis venu ici. Tout de même, le gouvernement du Nunavut travaille là-dessus. Nous aimerions pouvoir nous consacrer davantage aux pêches et mieux développer le secteur. La Baffin Fisheries Coalition s'y est appliquée; elle aimerait pouvoir compter sur l'existence d'une orientation judicieuse adoptée du point de vue des pêches. Cela a vraiment représenté de bons appuis pour nous, et les choses se sont améliorées depuis que je suis venu ici l'an dernier. Si nous regardons la question du développement au Nunavut, nous constatons qu'il y a eu certains progrès. Cela montre la force dont nous pouvons faire preuve, et le but que nous avons pour l'avenir.

Le sénateur Watt: Après avoir écouté votre exposé et, de même, celui de M. Kovic, je tiens à souligner qu'il y aura 100 millions de dollars qui seront versés en dehors du Nunavut. Vous envisagez la chose en rapport avec la question des zones contiguës. La balle est dans le camp de votre gouvernement. Mme Towtongie a affirmé que, en dernière analyse, 90 p. 100 de l'affaire se situe en dehors du Nunavut et que le gouvernement du Canada a conclu un accord, comme en fait foi l'article 15.3.7. Si je me souviens bien, Jose Kusugak, à l'époque où il était président de NTI, vous aiguillait vers les tribunaux en rapport avec ce point — c'est bien cela?

M. Akesuk: Je ne me souviens pas très bien de ce qui se passait au moment où Jose a porté cela devant les tribunaux, mais le développement économique des habitants du Nunavut et le développement dans nos eaux sont accessibles à tous. Tout de même, nous envisageons un développement économique possible et, de même, les quotas de 26 p. 100 qui nous sont attribués. Nous pouvons aller plus loin. Il peut y avoir plus de développement si nous obtenons un quota plus généreux que celui que nous avons en ce moment. Vous avez posé une question au sujet de Jose Kusugak. Je me demande si les autres personnes qui m'accompagnent ne seraient pas mieux placées pour répondre à cette question.

[Traduction]

M. d'Eca: NDI est bel et bien allé en cour au sujet de l'article 15.3.7 — pas une fois, mais, de fait, quatre fois — à l'occasion de procès différents, dont un a abouti à la Cour fédérale, puis à la Cour d'appel fédérale. Les tribunaux se sont penchés sur la question; nous avons obtenu un succès mitigé à cet égard. Des quatre fois où nous sommes allés en cour, NDI a obtenu gain de cause deux fois, et le gouvernement, deux fois aussi.

Quant à l'interprétation que fait le tribunal de l'article 15.3.7, j'ai affirmé que l'article en question dit que la Couronne doit accorder une attention spéciale à ces principes. Un juge en particulier a dit: «cela revient à dire qu'il faut tenir compte en priorité des Inuits du Nunavut au moment d'octroyer les permis de pêche commerciale dans les zones en question.» La question a été portée à la Cour fédérale d'appel, le Canada en ayant appelé. Décision de la cour d'appel: Non, le gouvernement n'a pas à tenir compte en priorité des uns ou des autres au moment d'octroyer les permis; plutôt, l'article 15.3.7 exige qu'il établisse un principe d'équité touchant la répartition des permis de pêche commerciale dans les zones en question. Il est donc question d'équité. Voilà où en est le droit à ce sujet.

Je veux souligner que c'est aussi, en vérité, ce que dit ce groupe. S'il faut que ce soit équitable, alors regardons quelle est la norme adoptée. Si on regarde l'ensemble des pêches dans l'Atlantique, la norme est la suivante: si vous êtes dans une zone contiguë d'une zone de pêche, vous obtenez de 80 à 90 p. 100 de la ressource. Par ailleurs, plusieurs arguments ont été formulés au sujet du montant du financement consacré à l'infrastructure des pêches. Encore une fois, nous voulons que ce soit équitable, ce que les tribunaux ont interprété comme étant le but de l'article 15.3.7.

Le sénateur Watt: Je ne m'attarderai pas à cela: c'est une question qu'il faudra régler à l'avenir.

[Traduction de l'interprétation]

Je vais continuer en inuktitut.

Pour ce qui est de l'accord de 100 millions de dollars de votre région, que faites-vous des 26 p. 100 qui vous sont attribués? Quel argent cela représente-t-il, du point de vue de vos ressources?

[Traduction]

M. Bonnell: Je pourrais répondre à cette question. Si vous prenez le cas de la zone de pêche à la crevette ou au flétan au large des côtes, vous voyez que cela a une valeur pour le Nunavut, pour le territoire lui-même, qui est de l'ordre de neuf ou dix millions de dollars en redevances, et du point de vue du travail à faire à bord des bateaux, dans les usines et dans le secteur.

Nous devons reconnaître qu'il faut une ressource protégée pour pouvoir édifier une certaine capacité. Il est très difficile pour une collectivité de faire grand-chose avec 200 tonnes métriques de poissons, du point de vue de l'édification d'une capacité. Cela nous ramène aux discussions qui ont eu lieu au sein de la coalition à propos de la façon d'édifier la capacité, en tant que groupe. Quant à savoir vers quoi nous nous dirigeons, nous employons le terme «environ 100 millions de dollars». Ce serait la valeur totale au débarquement des quotas, dans nos eaux. Tous les quotas en question ne sont pas exploités à fond, mais une part bonne l'est.

En ce moment même, si nous parlons des ressources dont dispose le Nunavut, nous savons que les terres et tous les autres éléments de valeur compris donneraient plus de 30 millions de dollars. Nous voyons notre part de ce gâteau qui s'accroît durant les années à venir, car nous allons investir dans des bateaux et devenir propriétaires, prendre le contrôle et répartir les recettes, en délaissant les redevances. C'est dans cette direction que va l'industrie.

On a soulevé ce soir certains problèmes, par exemple le manque d'infrastructures et la question de savoir comment nous allons débarquer notre produit si nous n'avons pas de ports. Quiconque se rendra dans nos collectivités du Nord y verra des bateaux de 35 à 45 pieds qui ont des trous sur le côté: c'est qu'il n'y a pas de place pour accoster. Nous avons des problèmes avec les marées, et nous n'avons pas de budget de base pour les sciences. Le quota n'est pas réparti de manière équitable. Nous en avons 26 p. 100, mais, comme je l'ai dit plus tôt, en fait, si on exclut le cas des quotas exploratoires, c'est encore pire. Aucune autre instance ne tolérerait cela. Vous pouvez poser la question: Comment les habitants de Terre-Neuve le prendraient-ils si 70 à 80 p. 100 du crabe sur la côte Nord-Est allait à des groupes du Nouveau-Brunswick ou de la Nouvelle-Écosse, ou inversement? C'est la situation à laquelle nous faisons face aujourd'hui.

[Traduction de l'interprétation]

Le sénateur Watt: Le cas des 100 millions de dollars n'est qu'un exemple. Comme vous avez droit à 26 p. 100 et qu'il faut du développement, une infrastructure et des ressources, avez-vous déterminé quelle somme d'argent il vous faut?

[Traduction]

Vous apportez 10 millions de dollars en ce moment. Quel est le coût total de l'infrastructure? Avez-vous fait des études là-dessus?

M. Bonnell: Dans le mémoire que nous avons fourni, nous étudions plusieurs facteurs en rapport avec les ports pour petites embarcations, par exemple. Le coût d'un port pour petites embarcations est de l'ordre de trois millions de dollars.

Le sénateur Watt: Pouvez-vous m'en brosser le tableau d'ensemble, si vous êtes au courant?

M. Bonnell: Vous voulez connaître la valeur totale de l'infrastructure, en dollars?

Le sénateur Watt: Le total pour ce que vous souhaitez faire.

M. Bonnell: Pour ce qui est de l'infrastructure matérielle, il faudrait deux ou trois ports pour petites embarcations, ce qui coûterait autour de 10 millions de dollars.

Le sénateur Watt: Chacun?

M. Bonnell: Non, pour en avoir deux ou trois, comme point de départ, pour certaines de nos localités côtières. En ce moment, Pangnirtung a une usine de transformation du poisson, mais nulle part où le débarquer; il n'y a pas d'installations portuaires. Si vous étudiez la question du développement et de la diversification des pêches, et je n'ai pas les chiffres exacts sur ce qu'il faut, mais, quand on songe à des affaires comme le rachat des bateaux, s'il est question d'un bateau de 65 pieds, cela peut donner entre 2,5 et 6 millions de dollars. C'est ce genre de chiffre dont il est question. Nous aimerions que les choses progressent au fil du temps. On ne fera pas tout du jour au lendemain, tout le monde le sait, mais il faut prendre des mesures en rapport avec les quatre ou cinq secteurs clés qui vont nous permettre de nous lancer sur la bonne voie.

[Traduction de l'interprétation]

Le sénateur Adams: Je tiens à remercier les étudiants du Nunavut d'être venus assister à notre audience ce soir. Comme le ministre l'a mentionné, vous allez peut-être vous retrouver ici à l'avenir. Vous êtes ici pour parfaire votre éducation.

Merci monsieur le ministre. Je vais vous poser des questions en inuktitut, mais certaines questions seront posées en anglais.

Monsieur le ministre, vous avez mentionné pendant votre exposé le travail que vous faites avec la BFC. Comment cela a-t-il commencé? Comment les allocations ont-elles été établies? Qu'a fait le gouvernement du Nunavut?

M. Akesuk: Nous regardions les pêcheries dans la région du Nunavut et ce que les Inuits pourraient faire. Nous regardions les allocations des pêcheries accordées en dehors du Nunavut, à Terre-Neuve et à la Nouvelle-Écosse. Nous voulons voir si nous pouvons avoir des pêcheries appartenant au Nunavut, et dont les ressources économiques viennent sur nos territoires. Nous voyons que des organisations du secteur sortent les ressources économiques du Nunavut. Nous regardons le cas des pêcheries contiguës pour voir ce que nous pouvons faire de concert avec le MPO, avant que cela n'aille trop loin.

Les stocks de poissons sont là, dans nos eaux, mais une grande proportion du poisson est pêchée en dehors de nos régions.

Nous aimerions qu'une plus grande part des ressources économiques demeurent au Nunavut. Cela nous aidera à bâtir notre économie. Cela aidera les Inuits au Nunavut.

Voilà notre but. C'est la raison d'être de notre proposition. M. Bonnell peut y ajouter quelque chose.

[Traduction]

M. Bonnell: La coalition remonte à trois ans environ. Au moment où il y a eu l'augmentation des quotas, nous, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut Tunngavik Incorporated et le ministère des Pêches et des Océans, nous sommes réunis avec tous les groupes qui ont affaire à l'industrie et avons affirmé qu'il existe quelques options. Nous pourrions envisager d'étudier ensemble une certaine capacité, de mettre en commun des ressources et de nous donner une sorte de rôle de défenseur du secteur, pour réinvestir dans les nouvelles pêcheries, la formation, les pêcheries côtières et hauturières, et appuyer les collectivités locales. C'est un effort qui est centré sur la collectivité.

Les membres à l'époque — les organisations de chasseurs et de trappeurs, et les autres groupes — ont affirmé que c'était la voie qu'ils souhaitaient prendre. Ils se sont mis ensemble et ont formé la coalition. Voilà comment cela s'est formé au cours des quelques dernières années. Ils ont mis de côté X pourcentage des recettes en redevances pour l'investissement dans les bateaux; X pourcentage pour la formation et X pour le développement des nouvelles pêcheries au sein des collectivités et le soutien de l'usine de transformation du poisson à Pangnirtung. Le renforcement de la capacité est un thème qui revient depuis plusieurs années. Comment développer notre capacité? Utilisons donc les redevances de manière à ce que cela donne un investissement dans les bateaux et qu'on se retrouve propriétaire de bateaux. C'est la vision qui a été esquissée, et elle fonctionne très bien.

Mme Wheatley: C'est le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut qui s'occupe de l'allocation. L'allocation initiale s'élevait à 2 000 tonnes métriques, données établies à partir des recherches faites dans le secteur 0A en 1999 et financées par le CGRSN, aux côtés du MPO.

Avant cela, quelques pêcheries indicatrices préliminaires avaient été établies, là où les bateaux prennent le poisson, pour voir ce que ça donne. La pêche a été exprimée non pas en termes de quotas, mais plutôt en nombre de jours de pêche. Personne n'avait d'antécédents dans ce coin-là. Personne n'avait établi d'antécédents. Il n'y avait pas de ces précédents sur lesquels on puisse se fonder. Nous avons eu de nombreuses discussions avec le Groupe de travail sur les pêches du Nunavut, pour dire: pour que les pêches prennent enfin leur essor au Nunavut, nous devons consolider plutôt que nous fragmenter. Les pêches n'allaient pas se développer avec quelques centaines de tonnes métriques attribuées à chacune des localités. Ce serait la sorte de gratification immédiate pour les localités en question, qui toucheraient un revenu sans tarder, mais, à long terme, la seule façon de développer les pêches consistait pour nous à rester soudés et à profiter de l'effet de levier — ce que nous avons fait — pour obtenir un bateau et développer d'autres pêcheries.

C'était la recommandation du groupe de travail sur les pêches. Nous nous sommes réunis avec les pêcheurs, avec les diverses organisations intéressées, et cela a mené à la création à la Baffin Fisheries Coalition.

[Traduction de l'interprétation]

Le sénateur Adams: En trois ans, depuis que cela est commencé, quel progrès avez-vous constatés? Que faut-il faire encore à l'avenir pour développer cette ressource économique? Qu'est-ce que les Inuits peuvent en tirer? Est-ce qu'ils vous font part de leurs progrès tous les ans?

M. Akesuk: Ils sont venus me voir justement la semaine dernière. Ils m'ont remis une proposition sur ce qu'ils souhaiteraient faire et ont fait rapport sur ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant. Ils viennent me voir une fois par année. En tant que gouvernement, nous leur donnons bien l'appui dont ils ont besoin. Nous regardons ce que nous pouvons faire pour les appuyer.

Les membres du comité viendront ici pour témoigner devant votre comité. À titre de ministre, je viens ici, quant à moi, pour m'adresser à divers ministres du gouvernement fédéral. J'ai parlé à M. Martin aujourd'hui à propos de cette question.

Nous essayons, en tant que gouvernement, de donner le plus d'appui possible. Nous regardons ce que nous pouvons faire pour aider le MPO. Nous leur sommes très reconnaissants du travail qu'ils ont fait jusqu'à maintenant et des efforts qu'ils ont fournis.

Le sénateur Adams: Vous avez parlé de la somme d'argent qu'il faudra, de 350 000 $ à 600 000 $. Est-ce pour former les gens des pêcheries? Que faites-vous avec cet argent aider à vous préparer? Quel genre de formation l'argent permet- il de financer?

M. Akesuk: Il y a de la formation là-dedans. Nous avons divers programmes de pêche. Les diverses mesures qui s'imposent sont précisées. Il y a là des programmes de formation qui s'imposent et l'embauche que cela suppose. Nous regardons en quoi cela nous permettra de nous organiser mieux pour utiliser les sommes d'argent et nous regardons la façon de répartir l'argent entre les divers programmes.

Prenons pour exemple l'achat d'un bateau. Un bateau coûterait 17 millions de dollars. Il nous faudrait offrir un soutien à cet égard et travailler en tant que partenaires en vue d'atteindre l'objectif. Nous répartissons les sommes entre les différents projets.

Le sénateur Adams: Qui s'occupe du groupe de travail sur les pêches et les redevances? Comment ces gens-là viennent-ils en aide à la BFC? Est-ce qu'on relève de la BFC dans les deux cas, ou est-ce une organisation différente?

[Traduction]

M. Bonnell: Le Groupe de travail sur les pêches du Nunavut est tout à fait un groupe ad hoc constitué en 1999 sinon au début de 2000, et il se compose de notre ministère, du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, de Nunavut Tunngavik Incorporated et du ministère des Pêches et des Océans. C'est un instrument qui visait à réunir les parties pour qu'on puisse discuter des questions clés touchant le développement des pêches et travailler ensemble pour que le dossier progresse au Nunavut. C'est un groupe ad hoc qui se compose de quatre organismes. Nous fournissons des appuis et des conseils là où il est recommandé de le faire, que ce soit à la Baffin Fisheries Coalition, à Pangnirtung Fisheries ou à tout autre groupe lié à la pêcherie ou qui s'y intéresse. C'est un conseil ad hoc qui fait un travail très efficace depuis quelques années.

[Traduction de l'interprétation]

Le sénateur Adams: Durant leur exposé, les organisations de chasseurs et de trappeurs ont parlé des pêcheries à la crevette et au flétan. Quel est le montant des redevances qu'ils permettent d'obtenir?

[Traduction]

M. Bonnell: Je ne suis pas sûr d'avoir compris la question. Est-ce que vous voulez savoir quelles sont les redevances qui sont actuellement attribuées dans l'industrie de la pêche hauturière?

Le sénateur Adams: Oui, pour les trois dernières années.

M. Bonnell: Le groupe en question le saurait — qu'il s'agisse des chasseurs et trappeurs ou de la Baffin Fisheries Coalition. Il aurait l'information en question. Les redevances pourraient varier considérablement. Ce n'est pas très élevé en ce moment dans le cas de la crevette, étant donné les piètres conditions du marché. Le flétan va mieux de nos jours, parce que le marché est assez bon. Je ne connais pas les chiffres exacts, mais les redevances pourraient varier entre 400 $ à 700 $ la tonne métrique de flétan, suivant l'entrepreneur dont il est question, les exigences applicables, le nombre de personnes travaillant à bord du bateau, la quantité de poissons débarqués à Pangnirtung et plusieurs autres questions. Nous ne saurions pas cela, car c'est le groupe qui a cette information, mais voilà une idée approximative, si vous voulez le savoir ce que les groupes obtiennent en ce moment en fait de redevances.

Le sénateur Adams: Je me souviens que, il y a quelques années, le ministre est venu au Comité des pêches, et je lui ai demandé si, à l'avenir, nous aurions un fonds pour le matériel et les gens au sein de la collectivité. Il m'a dit, devant le comité, qu'on n'obtiendrait que des redevances de 27 p. 100. Cela est censé aller aux pêcheurs. Est-ce que le gouvernement vous a dit comment fonctionne cette politique ou le gouvernement du Nunavut dit-il que vous pouvez l'allouer à l'OCT communautaire ou à toute autre organisation? Est-ce la formule qui est appliquée en ce moment, pour les redevances provenant du gouvernement?

M. Bonnell: Si vous parlez de l'allocation, il vaudrait mieux poser cette question au Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut. La seule observation que je ferai au sujet des redevances, c'est celle que j'ai faite plus tôt, soit que le Nunavut doit progresser encore vers la propriété, délaisser les redevances et la nécessité de négocier des ententes qui peuvent être ou ne pas être dans l'intérêt des diverses collectivités. C'est vers cela que l'industrie doit se diriger, et c'est vers cela qu'elle se dirige. Je ne sais pas très bien dans le cas des allocations. Peut-être que le CGRFN peut répondre à cette question.

Mme Wheatley: Quand nous évaluons les demandes des organisations de chasseurs et de trappeurs, les OCT, ou des organisations régionales des ressources fauniques, les ORRF, la question de la propriété figure parmi les premières, comme c'est le cas pour les organisations existantes. Il y a une liste. Les priorités sont énoncées dans l'accord sur la revendication territoriale. Certes, si nous avons affaire à deux demandes provenant de la même localité, une qui est appuyée par l'OCT et une provenant d'un particulier, c'est celle qui est appuyée par l'OCT qui vient en premier, car elle profite à la collectivité dans son ensemble.

Le sénateur Hubley: Je serais très heureuse de passer mon tour pour permettre au sénateur Adams ou au sénateur Watt de poser des questions, car ils font certes un bon travail pour que notre comité demeure au fait des questions touchant le Nord, toutes les questions touchant les pêches dans le Nord.

Je veux vous souhaiter la bienvenue et vous remercier d'être venus. J'aimerais aussi souhaiter la bienvenue aux étudiants. Qu'un groupe de jeunes viennent nous écouter à une de nos audiences, voilà un plaisir rare. J'espère que vous trouvez cela intéressant. Il est difficile de ne pas donner des conseils aux jeunes de nos jours, mais si je dois en donner, puisque je suis certainement plus vieille que vous, je vous dirais de ne jamais oublier vos origines.

Cela dit, je n'ai pas une longue liste de questions, puisque le sénateur Adams et le sénateur Watt sont tout à fait au courant de la situation.

Je m'intéresse pour moi-même à la ressource que vous avez dans les pêcheries et à l'avantage qu'elles devraient procurer à vos gens. J'ai écouté avec beaucoup d'attention et je vous ai entendu parler de programmes de formation à plusieurs reprises. Je crois que c'est le ministre qui nous a parlé du nombre de personnes qui touchent à diverses étapes des pêcheries — 40 à 50 dans un cas, 50 à 60, et de 50 à 60, ce qui donne environ 170 personnes, plus les nombreux acteurs du secteur de la pêche à l'omble chevalier. Ils ne semblent pas être très nombreux.

Il y avait là tant de choses. Le numéro 4 indique qu'une main-d'œuvre bien formée, qui vient du Nord, est évidemment l'élément clé du développement fructueux de l'industrie de la pêche et est à l'avantage de tous les gens au Nunavut. Je suis tout à fait d'accord. Étant donné un tel manque du point de vue de l'infrastructure, je me demande quelle stratégie vous envisagez. Qu'est-ce que nous pourrions mettre en place et quelles sont les recommandations que nous pourrions formuler pour que vous ayez une infrastructure raisonnable et que les gens dans vos collectivités soient les premiers à profiter des ressources que vous avez?

M. Bonnell: La formation est un enjeu clé avec lequel nous devons composer. Spontanément, je vous répondrais que nous faisons de notre mieux avec ce que nous avons. Nous n'avons pas l'infrastructure nécessaire, mais nous reconnaissons qu'il est essentiel d'être doté d'une main-d'œuvre compétente.

Je vous donne un exemple lié à la pêche hauturière. En juin dernier, la Baffin Fisheries Coalition a établi un programme de formation, en partenariat avec le Nunavut Arctic College, et a chargé le Marine Institute de Terre- Neuve de l'exécuter. On a formé 20 personnes dans le cadre de ce programme de formation. Je crois que de 12 à 14 de ces personnes travaillent actuellement dans l'industrie de la pêche hauturière.

Nos résultats sont peu reluisants, certes, mais les économies d'échelle réalisées montrent que nous progressons vraiment rapidement et qu'il y a un potentiel énorme pour l'avenir. La Baffin Fisheries Coalition, en particulier, s'apprête à présenter à DRHC une importante proposition concernant la création éventuelle d'un programme de formation à long terme, ce qui est essentiel.

Ce sont là quelques-uns des enjeux clés. Comme vous l'avez mentionné, l'infrastructure de base comme les installations portuaires, ainsi que l'obtention d'un budget central de recherche, sont essentielles au développement de la pêche. En ce qui concerne les installations portuaires, certains avanceraient qu'il s'agit d'une forme de développement national qui tarde à s'effectuer dans notre environnement nordique. Sans cela, il sera difficile d'aller de l'avant et de tirer avantage pleinement de la ressource. Les programmes de formation sont en place et progressent. Ils continueront de produire des résultats et de réussir.

M. Alex Campbell, sous-ministre, ministère du Développement durable du Nunavut: Madame la présidente, l'un des aspects sur lesquels nous avons passé rapidement pendant notre exposé est la stratégie de développement économique que nous avons élaborée au cours des deux dernières années. Je crois que les honorables sénateurs ont des copies de cette stratégie. Le gouvernement tente de rallier les divers secteurs afin qu'on s'entende sur le développement de l'économie du Nunavut au cours des cinq à dix prochaines années.

On ne saurait passer sous silence le fait que cette stratégie est le fruit d'un effort collaboratif. Au total, 24 organismes y ont pris part. Bien sûr, le secteur des pêches, dont nous parlons actuellement, était du nombre. Nous élaborons aussi une stratégie à cet égard.

Nous sommes d'accord avec vous: il n'y a pas d'infrastructures, et nous avons soulevé ce point ici: au Nunavut, où la population est de 28 000 personnes, dont un grand nombre de jeunes, 100 ou 200 emplois, c'est beaucoup. Tout emploi saisonnier ou permanent créé grâce à nos stratégies sera certainement perçu comme une récompense pour nos efforts.

L'un des facteurs qui contribuera à la cause du Nunavut explique pourquoi nous sommes ici: nous voulons vous convaincre de recommander au gouvernement d'accroître la répartition des quotas pour la ressource. C'est la première chose.

La deuxième chose, c'est le développement de l'infrastructure. Le sénateur Watt a demandé combien d'argent était nécessaire. Il s'agirait probablement d'un investissement d'environ 50 millions de dollars, seulement pour l'infrastructure, pour faire démarrer l'industrie. C'est le genre de chiffre que nous envisageons, et cela ne concerne que le secteur des pêches.

Nous cherchons à obtenir un investissement à long terme du gouvernement. À l'heure actuelle, nous ne possédons pas d'infrastructures. Nous ne disposons pas d'une main-d'œuvre qualifiée. Nous devons renforcer cette capacité, et c'est le principal objectif de notre présentation ce soir.

Le sénateur Hubley: Puis-je vous demander comment vous dépenseriez les 50 millions de dollars? Je vous laisse un instant pour y réfléchir.

Vous avez mentionné que les ports pour petits bateaux reviendraient à trois millions de dollars chacun. Vous avez envisagé 10 millions de dollars. Ensuite, il y a l'achat de bateaux, et, ça, c'est coûteux. Combien de bateaux achèteriez- vous exactement? Et de quelle taille seraient-ils? Est-ce que vos ports pour petits bateaux seraient en mesure d'accueillir les navires de toutes tailles?

M. Campbell: Non.

Le sénateur Hubley: Il est donc vraiment question d'un port pour petits bateaux. Même les chalutiers-congélateurs ne seront pas en mesure d'aller dans vos ports. C'est un autre volet de l'industrie, n'est-ce pas?

M. Campbell: Effectivement. Vous mentionnez les ports pour petits bateaux. Nous proposons la création immédiate de trois ports. Il y a d'autres collectivités au Nunavut qui auraient besoin d'une telle infrastructure. Il y a aussi les bateaux dont nous avons parlé. On estime à 17 millions de dollars le prix d'achat d'un bateau.

Le sénateur Hubley: De combien de navires auriez-vous besoin?

M. Campbell: Pour l'instant, nous envisageons l'achat d'un seul bateau.

M. Akesuk: Nous n'avons qu'une seule usine de transformation de la viande. Nous aimerions en bâtir plusieurs autres dans des localités plus modestes. Cela leur serait très utile. Le taux de chômage est très élevé dans un grand nombre de localités du Nunavut. C'est pourquoi nous sommes très intéressés par le secteur de la pêche et nous assurons notre succès futur afin d'aider les gens qui ont besoin de travail, ainsi que les jeunes qui obtiennent leurs diplômes et qui n'ont aucun débouché. C'est un gros investissement, et nous déploierons tous les efforts nécessaires pour veiller à ce qu'ils mènent à la création d'emplois pour les gens.

Le sénateur Hubley: Je suis tout à fait d'accord. Puisque vous avez accès à une ressource si riche, ce serait bien si vous pouviez en jouir un peu. Le fait de pouvoir en transformer une partie permettrait à tout le moins de créer des emplois au sein de votre collectivité. Cela contribue à bâtir les collectivités. Si vous avez des collectivités en santé, vous avez une population en santé.

M. Campbell: Nous tentons aussi de réduire la dépendance envers le trésor public. Plus les habitants du Nunavut auront accès à des ressources et à des initiatives de développement, moins ils seront dépendants du gouvernement et du reste du Canada. On n'échappe pas à cela.

La vice-présidente: Le temps prévu est écoulé, mais puisque nous nous sommes entendus là-dessus, nous poserons une brève question à chacun de vous.

Depuis 1992, la Stratégie des pêches autochtones a pris pour plus de 326 millions de dollars d'engagement, dont 78 millions de dollars sous le régime du Programme de transfert des allocations aux Autochtones, pour la répartition des permis, du matériel pour les bateaux, et cetera. On a acheté ou cédé 90 bateaux aux collectivités autochtones. Le gouvernement fédéral estimait que les groupes du Nunavut n'étaient pas admissibles à ces programmes de financement.

À l'occasion de son témoignage devant le comité en septembre, Cathy Towtongie, présidente de NTI, a laissé savoir que c'est un aspect auquel le Nunavut accorde beaucoup d'importance, alors je suis intéressé à connaître la stratégie que vous comptez mettre en œuvre pour obtenir certains de ces avantages.

M. Bonnell: Je pourrais commenter cet aspect. Nous avons souvent soulevé cette question auprès du ministère des Pêches et des Océans au cours des trois dernières années et nous avons aussi insisté sur le fait qu'il était important pour nous de pouvoir tirer avantage de la Stratégie des pêches autochtones et, en particulier, de son Programme de transfert des allocations aux Autochtones. Ce programme consiste à racheter des permis de pêche commerciale et à soutenir les groupes d'Autochtones du Canada atlantique. Il s'est révélé très efficace. Le ministère des Pêches et des Océans estime que nous ne sommes pas admissibles à ce programme, car nous avons conclu un accord de revendication territoriale.

Vous avez probablement déjà entendu le témoignage d'un certain nombre de personnes avec lesquelles nous ne sommes pas d'accord. L'article 2.7.3 de l'accord de revendication territoriale prévoit qu'aucune disposition de l'accord ne minera la capacité des Inuits de participer aux programmes gouvernementaux destinés aux Inuits et au peuple autochtone. Cela me semble assez clair; toutefois, ce programme n'a pas été offert au Nunavut. Nous parlons souvent de cela maintenant. Nous avons rencontré les représentants de Nunavut Tunngavik pour en parler. Il faudra qu'on examine la situation de plus près, à la lumière de nos besoins, de l'orientation que nous voulons prendre et du fait qu'il s'est révélé très restrictif pour nous jusqu'à maintenant. Nous avons déclaré que, si nous ne sommes pas admissibles, le gouvernement devrait créer un programme qui est conforme à nos normes. Cependant, le besoin est tout aussi marqué.

Pour ce qui est de l'accroissement des quotas, il est difficile de déterminer quels sont nos besoins si nous ne disposons pas des ressources nécessaires. Nous devons nous assurer de la disponibilité de la ressource avant d'investir, et il est difficile, pour l'instant, d'attribuer une valeur à nos besoins en ce qui concerne ce type de programme. La disponibilité des ressources doit être confirmée avant qu'on envisage d'investir dans un programme. Ainsi, le Programme de transfert des allocations de la stratégie des pêches autochtones serait tout indiqué.

Le sénateur Watt: Ma prochaine question est difficile. Je tenterai d'être concis, mais je suis certain que la réponse sera plus détaillée.

D'une part, vous dites: «Écoutez, nous sommes ici et nous avons les ressources. Nous avons conclu un accord avec le pays. Nous ne voulons pas continuer de dépendre de l'aide gouvernementale. Nous voulons être en mesure de mettre nos ressources en valeur. Le gouvernement devra prendre une décision. Vous continuez de nous donner de l'argent pour l'infrastructure tout en nous imposant un quota.» D'autre part, vous dites: «Donnez-nous un quota suffisant. Laissez-nous prendre ce quota, et l'utiliser pour négocier auprès des institutions financières et obtenir le financement nécessaire pour établir l'infrastructure.» C'est ce que vous dites, non?

M. Akesuk: Oui, c'est ça.

Le sénateur Watt: C'est un ou l'autre.

M. Akesuk: Oui. Comme je l'ai dit à la fin de mon discours, imaginez vos collectivités côtières sans installations portuaires ni centres de service maritime, et cela correspond à la situation au Nunavut. Même si nous n'avons pas ces choses et que les autres provinces et territoires les ont, nous faisons de notre mieux pour veiller à ce que notre industrie de la pêche connaisse du succès dans l'avenir. Si nous avions accès aux programmes offerts aux autres provinces et territoires, notre industrie de la pêche serait probablement en très bonne santé. Il est très difficile pour le territoire du Nunavut de réussir sans pouvoir jouir de ces programmes. Nous devons être admissibles à ces programmes pour assurer le succès futur de notre industrie de la pêche.

Le sénateur Watt: Merci.

[Traduction de l'interprétation]

Le sénateur Adams: Monsieur Kovic, j'aimerais vous poser une question sur votre affirmation selon laquelle le CGRFN compte neuf membres; il y a environ 17 personnes ici qui représentent votre conseil. Lorsque vous vous rencontrez en vue de répartir les quotas, comment procédez-vous?

M. Kovic: Merci, sénateur Adams. Le comité examine les répartitions antérieures. Comme je l'ai déjà mentionné, on se penche sur les diverses choses qui ont été effectuées jusqu'à maintenant. Au moment de répartir les quotas, il n'y a pas vraiment d'autres façons de procéder que d'appliquer les lignes directrices qui ont été établies pour nous.

Le sénateur Adams: Et au Nunavut, est-ce qu'on est d'accord avec votre évaluation des besoins, avec les choses que vous demandez? Est-ce qu'on est d'accord avec ce que vous demandez, par exemple en ce qui concerne les demandes adressées au MPO?

M. Kovic: Je ne suis pas certain de comprendre ce que vous voulez savoir. Parlez-vous de tonnage ou de quotas?

Le sénateur Adams: De tonnage. Est-ce suffisant?

M. Kovic: Le tonnage pour le flétan et pour la crevette est fixé par l'OPANO, et ensuite nous tentons de déterminer comment effectuer la répartition. Nous avons mentionné notre désir d'obtenir des allocations supplémentaires; nous voulons obtenir plus de quotas. Lorsque l'OPANO nous présente les études sur les ressources qu'on peut pêcher, et qu'il nous avise du tonnage, nous pouvons ensuite répartir les quotas.

Le sénateur Adams: Ma prochaine question concerne les trois localités qui nous ont télécopié ce document au sujet de la Division 0A. Je ne crois pas que vous ayez beaucoup de contrôle en ce qui concerne les 4 000 tonnes métriques. Ces localités, et les huit localités adjacentes, veulent 1 000 tonnes métriques chacune — Pond Inlet, Clyde River et Qikiqtarjuaq. Si elles vous demandent cela, est-ce que vous seriez plus en mesure d'effectuer la répartition?

M. Kovic: Sénateur Adams, je n'ai pris connaissance de cette demande que lorsque je me suis présenté ce soir. Je ne peux répondre à votre question pour l'instant. Les membres du conseil doivent examiner le document afin que nous puissions le commenter. Nous avons parlé de la Baffin Fisheries Coalition et de son plan triennal pour les 4 000 tonnes métriques. Ce soir, nous avons parlé des 4 000 tonnes métriques accordées à la Baffin Fisheries Coalition pour les trois prochaines années, et aucun autre quota ne sera attribué. On a aussi parlé de nouveaux quotas. À moins que des nouveaux quotas ne soient attribués, il faudrait prendre des quotas déjà attribués à d'autres personnes, et nous ne pouvons pas vraiment faire ça.

Compte tenu de nos efforts actuels en vue d'accroître notre développement économique, il est très difficile de piger dans des quotas existants et déjà attribués. Nous ne pouvons pas vraiment attribuer des quotas à des nouveaux pêcheurs de flétan ou de crevette, à moins que des nouveaux quotas nous soient confiés. C'est ce dont nous avons besoin pour les nouvelles activités de pêche dans nos régions. Nous avons besoin de quotas plus généreux dans la division 0B. Si les quotas ne sont pas atteints dans les zones adjacentes qui nous sont confiées, on pourrait peut-être les attribuer aux nouveaux pêcheurs.

M. Akesuk: De plus, les 4 000 tonnes métriques du secteur 0A dont nous parlons sont prises. Le quota établi dans cette zone est atteint. On en est à 3 800 tonnes métriques dans ce secteur. C'est une réussite. Il y a longtemps, quand on a commencé à répartir ces allocations, les quotas étaient confiés à des pêcheurs qui ne provenaient pas du Nunavut.

Le gouvernement du Nunavut doit acheter des parties d'autres quotas. C'est ce dont je parlais précédemment — si les pêcheurs de Terre-Neuve qui se rendent dans le secteur 0B n'atteignent pas leur quota, nous pourrions acheter la part de quotas qui reste. Même s'il s'agit de nos eaux, le quota est attribué à ces pêcheurs. Nous devons examiner cette question de façon approfondie et déterminer ce que nous pouvons faire à l'avenir — envisager la possibilité d'acheter le quota d'autres pêcheurs. Le gouvernement du Nunavut doit collaborer avec le gouvernement du Canada afin que nos objectifs futurs à cet égard soient réalisés. Nous aimerions travailler avec votre comité afin d'assurer le succès du Nunavut à cet égard.

[Traduction]

Le sénateur Adams: Ces gens viennent du Nunavut. Ils ne reviendront peut-être pas pour une autre année.

[Traduction de l'interprétation]

À quelle date cet accord triennal entre-t-il en vigueur?

[Traduction]

Je croyais avoir entendu M. Kovic dire que l'accord sur les quotas pour le secteur 0A était pour trois ans, et qu'il n'était pas possible d'attribuer d'autres quotas; ce serait contraire aux règles, car on a conclu un accord triennal pour ce quota de 4 000 tonnes métriques. À quel moment l'accord est-il entré en vigueur — est-ce il y a un an, ou l'an dernier?

Mme Wheatley: Je crois que nous en sommes à la troisième année de l'accord conclu avec la Baffin Fisheries Coalition. Je crois que l'accord initial avec la Baffin Fisheries Coalition prévoyait qu'on travaillerait ensemble pendant trois ans. L'accord s'assortissait d'une garantie de renouvelabilité. Les choses augurent bien: nous devons discuter de ce qui se produira à la fin de l'accord, mais l'intention est certainement de maintenir l'entente.

Concernant votre question précédente sur le secteur 0A et le quota qu'on y applique, j'aimerais parler du secteur 1A, adjacent à 0A, du côté du Groenland; les recherches initiales effectuées en 1999 dans le secteur 0A ont mené à la formulation d'une recommandation de 4 000 tonnes métriques de flétan pour les secteurs 0A et 1A. Dès le début, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut et le Groupe de travail sur les pêches du Nunavut ont recommandé que la majeure partie de ce quota soit pêchée du côté du Nunavut.

Toutefois, dans toutes nos discussions — car nous participons aux rencontres bilatérales entre le Canada et le Groenland —, le Groenland insistait pour obtenir 50 p. 100. On a effectué des recherches dans 1A au même moment où on procédait à la deuxième ronde de recherche dans 0A, et les résultats combinés ont mené à la recommandation d'un quota de 8 000 tonnes métriques pour 0A et 1A. Il y a très peu de preuves historiques de la présence de pêcheurs du Groenland dans le secteur 1A, mais depuis l'obtention de ces nouveaux résultats, il y en a eu quelques-uns. Toutefois, le Groenland insiste chaque année pour obtenir 50 p. 100 de ce quota, même s'il n'est même pas prêt de pêcher une telle quantité — et c'est probablement cela qui limite les choses à l'heure actuelle.

Même si les recherches semblent montrer que la majeure partie de la ressource se trouve du côté canadien, on la partage à parts égales avec le Groenland. Le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut a recommandé au ministre que le Canada lutte pour obtenir une part plus grande, mais cela ne s'est pas produit. Nous avons toujours recommandé cela; c'est donc l'un des secteurs qu'on pourrait convoiter à l'occasion de discussions internationales.

Le sénateur Watt: J'aimerais obtenir des précisions sur le point que le sénateur Adams a soulevé concernant les 4 000 tonnes métriques de flétan - 100 p. 100 — pêchées, supposons, dans le secteur 0A, si j'ai bien compris, il s'agit d'une expérience visée par un accord de quatre ans. Est-ce pour trois ou pour quatre ans qu'on utilise ce secteur à des fins expérimentales? Quelle est la durée de cet accord?

M. Bonnell: Si vous désirez savoir s'il s'agit d'une pêche exploratoire ou d'une pêche commerciale, c'est la troisième année de pêche exploratoire. Les résultats sont bons, les taux de capture sont bons, et le tout se déroule relativement bien. Par conséquent, je crois que le secteur fera l'objet d'une pêche commerciale pleine et entière au cours des prochaines années. Toutefois, pour l'instant, il s'agit toujours d'une pêche exploratoire.

Le sénateur Watt: Il n'y a pas d'échéance.

M. Bonnell: À ma connaissance, non; mais le MPO a des méthodes à suivre: lorsqu'il estimera posséder suffisamment d'informations pour lui permettre de déterminer le quota permanent pour une pêche commerciale, la décision sera prise. Je ne sais pas quand, mais cela se produira un jour.

Le président suppléant: Au nom des membres du comité, je tiens à vous remercier de nous avoir présenté clairement les enjeux qui vous importent. Je crois pouvoir parler pour tous les membres du comité lorsque j'affirme que nous mettrons vos préoccupations à l'avant-plan. Je crois que vous êtes sur la bonne voie pour assurer la viabilité de votre territoire et lui permettre de prendre sa place dans l'économie canadienne. Je suis convaincue, avec tous ces jeunes qui vous accompagnent ce soir, que vous êtes voué à un brillant avenir, et je vous remercie d'avoir pris le temps de nous rencontrer.

La séance est levée.


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