LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le lundi 20 juin 2022
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd’hui à 10 h 30 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.
Le sénateur Peter M. Boehm (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Peter Boehm, je suis un sénateur de l’Ontario et le président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Avant de commencer, j’aimerais vous présenter les membres du comité qui participent à la réunion d’aujourd’hui.
Ce matin, nous avons la sénatrice Marty Deacon de l’Ontario, la sénatrice Amina Gerba du Québec, le sénateur Stephen Greene de la Nouvelle-Écosse, le sénateur Peter Harder, vice-président, de l’Ontario, le sénateur Stan Kutcher de la Nouvelle-Écosse, le sénateur Victor Oh de l’Ontario, la sénatrice Ratna Omidvar de l’Ontario, le sénateur Yuen Pau Woo de la Colombie-Britannique et le sénateur MacDonald de la Nouvelle-Écosse.
[Français]
Bienvenue à tous, chers collègues, ainsi qu’à tous les Canadiens et Canadiennes qui nous regardent. Nous tenons une séance hybride. J’aimerais rappeler aux sénateurs et aux témoins qui participent à la réunion par vidéoconférence de garder leur microphone éteint en tout temps, à moins que le président leur donne la parole.
Aujourd’hui, nous entamons notre étude du projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.
[Traduction]
Le projet de loi S-9 a été renvoyé à notre comité par le Sénat le 14 juin. Les collègues se souviendront peut-être qu’une mouture précédente pratiquement identique de ce projet de loi a été examinée par le comité au cours de la dernière législature, en décembre 2020. Le comité avait alors adopté le projet de loi S-2 sans amendement.
Après la troisième lecture au Sénat, le projet de loi a été renvoyé à la Chambre des communes, mais il est mort au Feuilleton lorsque le Parlement a été dissous à la fin de la deuxième session de la 43e législature.
Bref, il nous revient aujourd’hui dans sa plus récente mouture maintenant appelée projet de loi S-9. Pour en discuter, nous accueillons dans cette première heure trois fonctionnaires d’Affaires mondiales Canada, c’est-à-dire Trevor Smith, directeur par intérim de la Division de la non-prolifération et du désarmement; Andrew Halliday, coordonnateur national adjoint de l’Autorité nationale du Canada pour la Convention sur les armes chimiques; et Gregory Newman, avocat-conseil principal des Services juridiques d’Affaires mondiales Canada.
Bienvenue à tous, et merci d’être avec nous. Je crois savoir que M. Halliday prononcera une déclaration liminaire. Cette dernière sera suivie des questions des sénateurs. Monsieur Halliday, nous vous écoutons.
[Français]
Andrew Halliday, coordonnateur national adjoint, Autorité nationale canadienne pour la CAC, Affaires mondiales Canada : On m’a invité aujourd’hui afin de prendre la parole à propos du projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.
En mars 2018, le monde a été choqué d’apprendre que l’agent neurotoxique à usage militaire Novichok avait été utilisé dans le cadre d’une tentative d’assassinat de M. Sergueï Skripal et de sa fille, Mme Ioulia Skripal, dans la ville de Salisbury, au Royaume-Uni. Cette attaque a envoyé les Skripal, un agent de police judiciaire ainsi qu’un passant innocent à l’hôpital, en plus de causer le décès d’une autre passante, Mme Dawn Sturgess.
Le Canada et ses alliés ont évalué que la Fédération de Russie était très vraisemblablement à l’origine de cette attaque. Au Royaume-Uni, trois présumés agents du service de renseignement militaire russe ont été accusés par contumace relativement à cet incident.
Cette attaque a eu lieu plusieurs mois après que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, l’OIAC, a certifié que la Fédération de Russie avait entièrement détruit sa réserve d’armes chimiques déclarée.
Ce n’est pas le seul exemple d’une attaque commise avec une arme chimique dans la mémoire récente. Pas moins de huit attaques avec des armes chimiques en Syrie ont été attribuées au régime de Bachar al-Assad et des douzaines de plus sont soupçonnées. Daesh a employé des armes chimiques en Syrie et en Irak. Le demi-frère du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a été assassiné avec l’agent neurotoxique VX et l’agent neurotoxique Novichok a été utilisé de nouveau dans la tentative d’assassinat du critique du Kremlin Alexeï Navalny.
Aujourd’hui, avec la Russie qui poursuit sa guerre injustifiable et non provoquée contre l’Ukraine, il y a de sérieux soucis que les forces russes utilisent les armes chimiques, possiblement même dans le contexte d’une attaque sous fausse bannière pour essayer de justifier plus d’oppression.
La Convention sur les armes chimiques (CAC) a été signée en 1993 et est entrée en vigueur en 1997. Elle interdit à tout État de développer, de produire, d’acquérir, d’accumuler, de conserver et d’utiliser des armes chimiques. Au cours des 25 dernières années, l’organisme d’exécution de la CAC, l’OIAC, a supervisé la destruction de presque 99 % des réserves d’armes chimiques déclarées existantes.
[Traduction]
Honorables sénateurs, la Convention sur les armes chimiques comprend une annexe divisée en trois tableaux, où sont répertoriés les produits chimiques toxiques les plus courants et leurs précurseurs qui présentent un intérêt pour la fabrication d’armes chimiques. Les produits chimiques du tableau 1 sont extrêmement toxiques et n’ont aucune application commerciale ou industrielle. Ils ne peuvent donc être produits ou utilisés qu’à des fins liées à la préparation d’une défense contre ces armes chimiques. Les tableaux 2 et 3 font état de produits qui sont en partie utilisés dans l’industrie et qui sont donc moins strictement encadrés.
En réponse à l’attaque au Novichok survenue à Salisbury en 2018, le Canada s’est joint à de proches alliés — les États‑Unis et les Pays-Bas — pour mettre au point une proposition de modification technique permettant d’ajouter de nouvelles familles de produits chimiques toxiques au tableau 1 de l’annexe. Après un travail diplomatique considérable, un total de quatre nouvelles catégories de produits chimiques toxiques ont été officiellement ajoutées au tableau 1 le 7 juin 2020.
Qu’est-ce que cela signifie pour le Canada? Depuis le 7 juin 2020, les Canadiens ne sont plus autorisés à manipuler ces produits chimiques sans un permis délivré par l’Autorité nationale canadienne pour la CAC, qui se trouve à Affaires mondiales Canada. Heureusement, comme ces produits chimiques ne sont pas utilisés dans l’industrie, les conséquences de cette modification sont pour ainsi dire nulles. Ceux qui sont autorisés à manipuler les produits chimiques du tableau 1 sont maintenant tenus de déclarer leur travail avec les produits chimiques qui ont été ajoutés, et ils sont soumis à une vérification... [Difficultés techniques]
Le président : Monsieur Halliday, je crois que votre connexion est figée. Nous allons voir si nous pouvons élucider ce problème technique.
Monsieur Smith, avez-vous la déclaration liminaire de M. Halliday et, si oui, pouvez-vous poursuivre à sa place?
Trevor Smith, directeur par intérim, Division de la non-prolifération et du désarmement, Affaires mondiales Canada : Bien sûr, monsieur le président.
Le président : Merci.
M. Smith : La Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques codifie l’interdiction des armes chimiques dans le droit canadien. Elle interdit à quiconque au Canada de posséder ou d’utiliser des armes chimiques. La loi comprend une copie de l’annexe originale de la convention et son tableau, qui sont maintenant périmés. Toutefois, la convention et ses annexes sont définies par référence au texte juridique de la convention conformément aux modifications qui lui sont apportées de temps à autre.
En cas de disparité entre la Convention sur les armes chimiques et l’annexe de la loi, la convention a toujours préséance. Grâce à cette disposition, même si la version de l’annexe de notre loi actuelle est périmée, c’est la liste des produits chimiques figurant dans l’annexe de la Convention sur les armes chimiques qui s’applique au Canada.
Par conséquent, même si l’annexe de notre loi est périmée, les Canadiens doivent d’office se conformer à la liste modifiée de la convention. Or, ce n’est pas la meilleure façon de faire les choses ni la plus transparente. Les Canadiens ne devraient pas avoir d’informations contradictoires sur les produits chimiques qu’il leur est interdit de manipuler sans autorisation. Le gouvernement a décidé que la meilleure façon d’actualiser la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques est de supprimer complètement l’annexe de la Loi. Par conséquent, le projet de loi S-9 modifie la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques en abrogeant l’annexe dans son intégralité. Le projet de loi S-9 modifie également la définition du terme « convention » qui figure au paragraphe 2(1) de cette loi et supprime entièrement le paragraphe 2(3). Ces deux dernières modifications suppriment les références à l’annexe maintenant abrogée.
L’abrogation de l’annexe évite toute confusion possible chez les Canadiens qui, sans cette précaution, verraient une liste de produits chimiques dans leur loi nationale et une autre liste sur le site Web de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques. Il sera évident pour tous les Canadiens que la bonne liste de produits chimiques est celle de ladite organisation. Il n’y aura aucun doute et aucune possibilité de confusion. L’abrogation de l’annexe n’a aucune incidence sur les dispositions canadiennes concernant la manipulation et l’utilisation de ces produits et ne modifie pas les engagements pris par le Canada aux termes de la Convention sur les armes chimiques. Cela signifie aussi que nous n’aurons pas besoin de modifier à nouveau la loi si les États qui souscrivent à la Convention sur les armes chimiques décident de modifier à nouveau l’annexe sur les produits chimiques. Le projet de loi S-9 est assez simple. Il s’agit d’une étape importante et nécessaire pour faire en sorte que la législation canadienne soit claire et facile à comprendre.
Nous sommes maintenant tout à fait disposés à répondre à vos questions sur le projet de loi. Merci.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Smith, et merci d’être intervenu. Désolé, monsieur Halliday, il y a eu un problème technique. Nous ne pouvions ni vous voir ni vous entendre. Heureusement, votre collègue est intervenu — fidèle en cela aux meilleures traditions de votre ministère.
Maître Newman, nous sommes ravis de vous revoir. Souhaitez-vous intervenir au sujet de certains enjeux juridiques de ce projet de loi?
Me Gregory Newman, avocat-conseil principal, Services juridiques, Affaires mondiales Canada : Merci, monsieur le président. Non, je n’ai rien à ajouter pour le moment, si ce n’est que je pense que c’est une amélioration et que cela offre une plus grande clarté.
Le président : Merci beaucoup. Nous allons passer aux questions.
La sénatrice Omidvar : Merci à nos témoins. Ma question s’adresse à M. Halliday ou à ses collègues. La logique de ces changements est indiscutable. Je suis tout à fait d’accord avec les modifications qui ont été présentées...
Le président : Madame la sénatrice, je suis désolé de vous interrompre. Il y a un problème avec votre microphone. Nous percevons un grincement dans la retransmission.
La sénatrice Omidvar : Veuillez passer à l’intervenant suivant.
Le président : Le sénateur Kutcher est le suivant, puis nous reviendrons à la sénatrice Omidvar. Je note également que le sénateur Tony Dean s’est joint à la réunion.
Le sénateur Kutcher : Je tiens à remercier les témoins.
Mes questions ne portent pas tant sur les détails du projet de loi, qui sont assez clairs, mais sur deux autres points.
Le premier concerne le fléau de la désinformation qui nous afflige à l’heure actuelle. Nous avons eu droit à une désinformation sur les armes biologiques. Nous avons également assisté à une désinformation sur les armes chimiques dans le cadre du conflit entre l’Ukraine et la Russie, en particulier l’explosion d’une usine d’engrais qui a été présentée comme une tentative de la part de l’Ukraine de fabriquer des armes chimiques.
Je me demande ce que le Canada fait de façon proactive pour démystifier la désinformation et la mésinformation sur les armes chimiques pour les Canadiens.
Le président : À titre de rappel, nous procédons par segments de quatre minutes.
M. Halliday : Merci, sénateur, et merci à vous, monsieur le président. Toutes mes excuses pour l’interruption de ma connexion Internet. Le service s’est rétabli assez rapidement.
En ce qui concerne la campagne de désinformation, nous la suivons effectivement de très près. Mon travail consiste, en partie, à recevoir toutes les notes diplomatiques que les Russes et les Ukrainiens présentent à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, ou OIAC, puis à en faire le suivi et à vérifier ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas pour ensuite préparer des sujets d’entretien à utiliser à l’OIAC.
La prochaine session du conseil exécutif aura lieu dans environ deux semaines. À cette occasion, nous aborderons très clairement la question de la désinformation russe, tant dans la déclaration préliminaire que dans les interventions ultérieures.
M. Smith ou mes autres collègues auront peut-être quelque chose à ajouter. Je vous remercie et, encore une fois, je vous présente mes excuses.
Le président : Merci. Monsieur Smith, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Smith : Merci, monsieur le président. La désinformation que nous constatons dans le contexte de l’invasion de l’Ukraine n’a, malheureusement, rien de nouveau. Nous avons été aux prises avec des problèmes de désinformation similaires durant la guerre en Syrie, et il y a eu une utilisation répétée et systématique d’armes chimiques dans ce conflit. Je suis très heureux de dire, monsieur le président, que nous avons travaillé très fort avec nos alliés — sous la direction du Canada — pour démystifier cette désinformation. Je renvoie le comité à une excellente ressource en ligne que le gouvernement du Canada a appuyée et qui s’appelle Nowhere to Hide. Il s’agit d’une ressource mise au point par le Global Public Policy Institute, à Berlin. Elle donne un aperçu complet, fondé sur des données, de toutes les différentes attaques qui ont été commises dans ce conflit particulier. Je le répète, l’idée est d’aider à déboulonner les différents mythes véhiculés par les utilisateurs d’armes chimiques.
Dans le contexte de l’Ukraine, je peux également dire que nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires dans le cadre du Partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes, dirigé par le G7. Je rappelle aux sénateurs que le partenariat mondial a été lancé à l’occasion du sommet de Kananaskis en 2002, en guise de réponse du G8 de l’époque aux attaques terroristes du 11 septembre 2001, et qu’il fêtera son 20e anniversaire lundi prochain. Dans le contexte du partenariat mondial, le Canada a collaboré avec ses partenaires, sous la direction de l’Allemagne — qui préside actuellement le partenariat — pour publier, en mars, une déclaration dans laquelle il s’engage à soutenir le gouvernement de l’Ukraine et à prendre des mesures pour contrer toute désinformation provenant de la Fédération de Russie au sujet des armes de destruction massive. Je vous remercie.
Le président : Merci beaucoup.
La sénatrice Omidvar : Ma question s’adresse à M. Halliday ou à ses collègues, et c’est une question simple. Maintenant que l’Annexe sur les produits chimiques sera retirée de notre loi parce qu’il y a la liste maîtresse de la Convention sur les armes chimiques, comment le Parlement va-t-il consulter les intervenants canadiens et les informer lorsque des ajouts seront faits à cette liste?
M. Halliday : Merci, madame la sénatrice. Toute modification future de l’annexe devra être adoptée — je crois que c’est le bon mot à employer —, conformément aux règles de dépôt des traités devant le Parlement. Par conséquent, comme nous l’avons fait pour cette modification, nous déposerons toute modification de l’annexe au Parlement pour qu’elle soit adoptée dans un délai de 21 jours de séance. Il s’agit de l’étape préalable à l’adoption officielle par le gouverneur en conseil. Comme je l’ai dit, c’est ainsi que nous avons procédé lors du cycle précédent, au début de 2020, et c’est ce que nous referons s’il y a des modifications ultérieures.
Pour ce qui est d’informer les Canadiens, nous publions également les annexes au moyen de liens directs vers le site Web de l’OIAC à partir du site Web spécial de l’Autorité nationale canadienne, qui est une ressource pour l’industrie canadienne touchée par la Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques. Je vous remercie.
La sénatrice Omidvar : J’imagine que tout ajout à l’annexe ou toute suppression est d’un grand intérêt pour l’industrie canadienne. À l’avenir, comment l’industrie canadienne sera‑t‑elle non seulement informée, mais aussi consultée lorsqu’il y aura des ajouts? Comment sera-t-elle consultée?
M. Halliday : Je vous remercie. Il s’agit de la différence entre le tableau 1 et les autres tableaux 2 et 3. Si un produit chimique est inscrit au tableau 1 ou est susceptible de l’être — et ce n’est pas un jugement purement canadien, car le Conseil scientifique consultatif de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques en fait également une analyse —, il y a des directives précises sur ce qui pourrait ou ne pourrait pas être un produit chimique du tableau 1. Si le produit chimique figure au tableau 1, il n’est d’aucune utilité à l’industrie canadienne ou à l’industrie tout court. Par conséquent, si nous comptons proposer ou accepter une modification liée à un produit du tableau 1, nous consulterons très étroitement, par exemple, le ministère de la Défense nationale, qui sera partie prenante dans le dossier.
En revanche, si un produit doit être ajouté aux annexes 2 ou 3, il faudra effectivement mener une consultation beaucoup plus vaste auprès de l’industrie, avec laquelle nous collaborons à la fois par l’intermédiaire de l’Autorité nationale canadienne et par nos propres démarches auprès de diverses entreprises. Nous avons également d’autres collègues à Industrie Canada ou dans le domaine du contrôle des exportations et des importations à Affaires mondiales Canada. Ils peuvent ainsi nous fournir des réponses grâce à leurs contacts dans l’industrie, les associations industrielles, etc.
Encore une fois, le tableau 1 n’a essentiellement aucune incidence sur l’industrie, de sorte que cette consultation est beaucoup moins nécessaire. Par contre, s’il est question du tableau 2 ou 3, il s’agit d’un élément absolument essentiel. Je vous remercie.
Le président : Merci.
La sénatrice M. Deacon : Bonjour. Je remercie nos témoins d’être des nôtres ce matin. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Comme nous l’avons dit tout à l’heure, nous avons consacré beaucoup de temps à cette question dans le passé et nous nous rafraîchissons la mémoire pour être sûrs d’être à la hauteur aujourd’hui.
Je voudrais poser une question précise au sujet de la Russie. Nous croyons comprendre que la Russie est signataire de la convention. Étant donné les antécédents de Poutine, un conflit prolongé en Ukraine pourrait l’inciter à utiliser des armes chimiques sur le champ de bataille. C’est une réalité dont nous devons tenir compte.
Le cas échéant, quelles sont les options dont disposent le Canada et les autres signataires précisément dans le cadre de la convention?
M. Halliday : Merci, madame la sénatrice et monsieur le président. Je vais demander à M. Trevor Smith de répondre à cette question.
M. Smith : Je vous remercie de votre question. Il existe différents mécanismes dans le cadre de la convention elle-même, et de façon plus générale, pour permettre au Canada et à ses alliés de soutenir le gouvernement de l’Ukraine si la Fédération de Russie ou une autre partie utilise des armes chimiques.
En fait, un des mécanismes que nous appuyons fermement depuis de nombreuses années ne relève pas de l’OIAC, et il s’agit du mécanisme permettant au secrétaire général des Nations unies d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes biologiques et chimiques. Le Canada soutient depuis très longtemps le renforcement de ce mécanisme afin de s’assurer qu’en cas d’utilisation d’armes chimiques par un État partie, le pays attaqué — en l’occurrence, il pourrait s’agir de l’Ukraine — dispose d’une ressource à laquelle il peut recourir.
Il est essentiel que ce mécanisme ne soit pas lié au Conseil de sécurité. Il n’y a ainsi aucune possibilité de blocage. Le mécanisme fonctionnerait de manière autonome, sous les auspices du secrétaire général lui-même. Il permettrait de détecter rapidement le type de produit chimique utilisé, si tel est le cas, et de donner à la communauté internationale la possibilité de prendre les mesures qui s’imposent. Je vous remercie.
La sénatrice M. Deacon : Je connais bien ce mécanisme des Nations unies, et je suis rassurée de savoir qu’il s’agirait toujours, je suppose, d’une question primordiale, en plus des mesures à prendre tout au long du travail que nous effectuons. Je vous remercie de votre réponse.
Monsieur le président, je serai heureuse de céder le reste de mon temps au sénateur Kutcher pour qu’il termine sa question, si cela vous convient.
Le président : Certainement.
Le sénateur Kutcher : Je remercie la sénatrice de ce beau cadeau. Je lui en suis reconnaissant.
C’est plutôt une question d’intérêt personnel, mais puisque nous parlons d’armes chimiques, je vais la poser. Nous connaissons les agents neurotoxiques, vésicants et cyanogènes, mais il existe aussi des agents psychotomimétiques, qui sont des armes chimiques, comme le LSD en aérosol et les médicaments anticholinergiques. Comment ces substances sont-elles classées dans les tableaux de produits chimiques de la Convention sur les armes chimiques, et quel type d’information les Canadiens peuvent-ils obtenir sur ces composés?
M. Halliday : Merci, monsieur le sénateur. Votre question tombe à point nommé, car, tout récemment, l’OIAC et les États signataires de la Convention sur les armes chimiques ont pris une décision à ce sujet.
Ces autres produits chimiques, que nous appelons souvent collectivement les produits chimiques agissant sur le système nerveux central, et qui comprennent principalement des produits comme les fentanyls et leurs dérivés, ne figurent pas dans les tableaux. Toutefois, les États qui souscrivent à la Convention sur les armes chimiques ont convenu d’interdire leur utilisation comme agents de lutte antiémeute, par exemple. Cette décision découle d’incidents antérieurs où ces substances auraient pu être envisagées à cette fin. Essentiellement, les États ont tous accepté... En fait, je ne suis pas sûr si des produits comme le LSD en font partie. Il n’y a pas de liste précise liée à cette décision. Toutefois, les fentanyls et les produits chimiques similaires agissant sur le système nerveux central sont les principales substances visées par cette décision, qui en interdit l’usage à des fins de maintien de l’ordre.
Pour ce qui est de la sensibilisation des Canadiens, je vais devoir vous revenir là-dessus.
Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup.
[Français]
La sénatrice Gerba : Ma question s’adresse à M. Halliday. Le Soudan du Sud fait partie des quatre pays dans le monde qui n’ont pas encore ratifié la Convention sur les armes chimiques. Pourtant, certaines études semblent indiquer que ces armes ont été utilisées, notamment au Darfour en 2016. Qu’est-ce qui justifie que ce pays n’ait pas encore ratifié la convention, et que fait le Canada, dans ces cas-là, avec ses alliés pour amener les pays à ratifier la convention?
M. Halliday : Merci beaucoup pour la question, madame la sénatrice. Premièrement, pour répondre à la question sur la raison pour laquelle le Soudan du Sud n’a pas ratifié la convention jusqu’à maintenant, je ne veux pas spéculer sur la raison réelle. C’est un pays assez nouveau — peut-être est-ce la raison —, mais je ne veux pas aller plus en détail, car je l’ignore. Cependant, qu’est-ce que le Canada et ses alliés peuvent faire? L’universalisation de la Convention sur les armes chimiques est une priorité pour le Canada. Quant aux pays qui n’ont pas ratifié la convention, soit le Soudan du Sud, l’Égypte, Israël et la Corée du Nord, s’il existe une possibilité de contacter ces gouvernements, nous prêchons toujours l’importance de ratifier la convention le plus rapidement possible. C’est une priorité, comme je l’ai dit. Cette convention est très universelle; on en est presque là. La ratification de la convention par ces quatre derniers pays est une priorité. Merci beaucoup.
La sénatrice Gerba : Dois-je comprendre que certains de ces pays ne sont pas joignables ou qu’ils sont difficiles à contacter?
M. Halliday : Prenons la Corée du Nord; la diplomatie avec ce pays est très difficile. Je ne suis pas un expert de la question, mais c’est comme ça. Les sources ouvertes spéculent que la Corée du Nord a une assez grande quantité d’armes chimiques. Il est vraisemblable et hautement probable que les agents nord‑coréens ont utilisé le VX contre le demi-frère de Kim Jong‑un. Cela fait plusieurs années. Nous souhaitons réellement que la Corée du Nord se joigne à la convention et que le stock soit détruit.
C’est la même chose avec l’Égypte, où les sources ouvertes indiquent que le pays a utilisé des armes chimiques pendant le conflit avec le Yémen dans les années 1960. Nous voulons aussi que l’Égypte se joigne à la convention et déclare toutes les armes qu’elle a en sa possession et tout ce qu’elle a fait par le passé. Je suis un expert de la chimie et de la biologie, pas un expert de la diplomatie. Je demanderais donc à quelqu’un d’autre de répondre à ces questions. Merci.
La sénatrice Gerba : Merci.
Le président : Merci beaucoup.
[Traduction]
Si les sénateurs n’ont pas d’autres questions à poser, j’aimerais remercier nos trois témoins d’avoir été des nôtres et de nous avoir donné des réponses très claires.
Honorables sénateurs, nous allons passer à l’étude article par article du projet de loi. Les témoins resteront avec nous si jamais nous avons des questions de nature technique, mais je les invite à éteindre leur caméra pendant cette partie de la réunion.
Est-il convenu, honorables sénateurs, que le comité procède à l’étude article par article du projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques?
Des voix : D’accord.
Le président : Adopté.
L’étude du titre est-elle reportée?
Des voix : D’accord.
Le président : L’article 1 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : L’article 2 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : Le titre est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : Le projet de loi est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : Merci.
Est-il convenu que je fasse rapport du projet de loi au Sénat?
Des voix : D’accord.
Le président : C’est tout pour ce projet de loi. Je vous remercie, chers collègues.
(La séance est levée.)