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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 5 mai 2022

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), en séance publique et à huis clos, avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-5, Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé.

Le sénateur Paul J. Massicotte (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je m’appelle Paul Massicotte, sénateur du Québec et président du comité.

Nous tenons aujourd’hui une séance de Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.

Avant de commencer, j’aimerais rappeler aux témoins ainsi qu’aux sénateurs qu’ils sont priés de garder leur micro éteint en tout temps, à moins que le président leur donne la parole. Lorsque vous parlez, veuillez le faire lentement et clairement.

J’aimerais rappeler aux honorables sénateurs que, dans le but d’obtenir plus d’information, nous avons composé des groupes de trois témoins. Je ferai de mon mieux pour permettre à tous ceux qui veulent poser une question de le faire, mais je vous demande d’être brefs dans vos questions et préambules afin d’y arriver. Cela s’applique également à nos témoins, si possible.

Chaque sénateur aura droit à une question, de même qu’à une question complémentaire ou à un suivi après la première question seulement.

Je vais maintenant présenter les membres du comité qui participent à la réunion aujourd’hui : la sénatrice Margaret Dawn Anderson, des Territoires du Nord-Ouest; le sénateur David Arnot, de la Saskatchewan; la sénatrice Rosa Galvez, du Québec; le sénateur Clément Gignac, du Québec; la sénatrice Julie Miville-Dechêne, du Québec; la sénatrice Judith Seidman, du Québec; la sénatrice Karen Sorensen, de l’Alberta; la sénatrice Josée Verner, du Québec. Nous avons aussi avec nous le sénateur Stan Kutcher, qui est parrain du projet de loi.

Bienvenue à tous, chers collègues, ainsi qu’à tous les Canadiens et Canadiennes qui nous regardent.

Aujourd’hui, nous continuons notre examen du projet de loi S-5, Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé.

Pour notre premier groupe de témoins, nous accueillons, de l’Alliance de l’industrie cosmétique du Canada, M. Darren Praznik, président et chef de la direction et M. Beta Montemayor, directeur de la science, de la réglementation et de l’accès aux marchés.

Nous accueillons aussi, de l’Association canadienne de l’industrie de la chimie, M. Bob Masterson, président et directeur général et Mme Danielle Morrison, gestionnaire des politiques, Santé chimique.

Nous accueillons enfin, de l’Association canadienne de l’industrie de la peinture et du revêtement, M. J. Gary LeRoux, président et chef de la direction.

Bienvenue à tous, et merci d’avoir accepté notre invitation.

[Traduction]

Darren Praznik, président et chef de la direction, Alliance de l’industrie cosmétique du Canada : Merci beaucoup, monsieur le président et honorables sénateurs. Je vous remercie de me donner l’occasion de présenter cet important projet de loi. Nous avons distribué — j’espère que les membres du comité l’ont reçu — le texte de notre déclaration officielle en anglais et en français. Je ne vais évidemment pas le lire. Je veux simplement souligner quelques points clés dans mon exposé, et je serai certainement prêt à répondre à vos questions.

L’interaction entre la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, ou la LCPE, et notre industrie est un élément clé pour comprendre nos intérêts en tant qu’association de l’industrie des cosmétiques et des produits de soins personnels au Canada. Nos produits finis sont principalement réglementés par la Loi sur les aliments et drogues. Cependant, la LCPE, qui a été un élément clé du Plan de gestion des produits chimiques, le PGPC, au cours de la dernière décennie et même avant, évalue les ingrédients que nous utilisons dans le cadre du Plan de gestion des produits chimiques pour l’environnement et la santé humaine. À bien des égards, nous avons deux niveaux de réglementation pour assurer la sécurité de l’environnement et de la santé humaine. Il y a le Plan de gestion des produits chimiques, tant pour l’environnement que pour la santé humaine, et, bien sûr, la réglementation visant les produits comme tels. C’est la façon dont ces deux instruments interagissent à l’égard des produits de consommation finis qui est vraiment au centre de nos préoccupations et de nos intérêts.

Je tiens à souligner que nous participons activement au processus du Plan de gestion des produits chimiques depuis plus d’une décennie. M. Montemayor, qui travaille avec moi, est l’un des toxicologues environnementaux de notre industrie. Nous avons été l’une des premières associations à en engager un, il y a plus de 10 ans, et il a participé activement au Plan de gestion des produits chimiques.

Il est vraiment fondamental que la LCPE établisse la structure — le système — pour examiner les substances. Il est essentiel que le système soit crédible, fondé sur la science et le risque. Au cours de la dernière décennie, le Plan de gestion des produits chimiques et la LCPE ont examiné plus de 4 300 substances, dont bon nombre sont utilisées dans notre industrie. Nous avons constaté que le système était très crédible, fondé sur la science et le risque.

Il y a des substances que nos membres ont utilisées et qui ont été interdites ou restreintes en vertu de la LCPE. Certaines ont été approuvées et ont reçu une bonne note. Mais, quelles que soient les décisions qui ont été prises, ce système a été considéré comme étant fondé sur la science, et une solide évaluation des risques. Nous avons vécu avec ces décisions et les avons pleinement acceptées en raison de la crédibilité du système.

Comme pour toutes les lois — j’ai déjà été ministre de la Santé du Manitoba et j’ai acquis une grande expérience des structures de réglementation lorsque j’étais au gouvernement —, ce qui est vraiment important, c’est la crédibilité et le fonctionnement du système. Nous pensons que le système possède ces atouts.

Il est également important de moderniser les systèmes de temps à autre. C’est pourquoi, en examinant ce projet de loi, nous pensons qu’il s’agit d’une modernisation qui se fait attendre depuis longtemps et qui, de façon générale, mérite d’être soutenue. Nous appuyons ce projet de loi et l’initiative visant à moderniser le système.

Il y a quelques points que nous voulons signaler au sujet des amendements. Cela devient important parce que cette loi est extrêmement complexe et interagit avec d’autres lois qui réglementent — dans notre cas — les produits finis, comme la Loi sur les aliments et drogues.

Il est vraiment essentiel, chaque fois qu’on apporte des changements particuliers, de se demander comment ils réagissent ou interagissent avec les autres lois qui réglementent les produits en question.

Par conséquent, nous n’appuyons aucun amendement pour le moment. Lorsqu’on examine les amendements, en raison de leur complexité, il faut être très prudent, car chaque changement peut entraîner des conséquences imprévues ailleurs. Les amendements, pour qu’ils fonctionnent bien, sont très complexes. Nous pensons que si vous envisagez d’apporter des modifications importantes, vous devez vraiment vous assurer de ne pas créer de conséquences imprévues et de comprendre comment elles interagissent le mieux avec les autres lois et les autres régimes qui sont touchés.

Il y a deux dispositions que j’aimerais particulièrement souligner maintenant, parce que nous croyons savoir que certains souhaiteraient les modifier. L’une porte sur les solutions de rechange à l’expérimentation animale. Au fil des ans, nous en sommes venus à travailler en étroite collaboration avec les campagnes Be Cruelty-Free de la Humane Society International et de l’Alliance animale du Canada, et nos organisations ont collectivement, je crois, conclu une très bonne entente sur l’approche de l’interdiction des essais sur les animaux pour les cosmétiques. Nous avons collaboré avec Santé Canada. L’une des choses sur lesquelles nous nous sommes tous entendus, c’est que les modifications à la Loi sur les aliments et drogues doivent être rédigées par Santé Canada et non par nous pour qu’elles s’inscrivent dans le système de réglementation canadien.

Nous avons très hâte de voir les amendements que le gouvernement présentera sous peu. Vous verrez, je pense, qu’ils feront l’objet d’un large soutien.

Nous constatons qu’il est proposé, dans le préambule, de reconnaître la nécessité de solutions de rechange à l’expérimentation animale. Nous sommes entièrement d’accord. Nous comprenons qu’on pourrait vouloir ajouter quelque chose au projet de loi au-delà du préambule. Si le comité ou le Parlement souhaite le faire, nous suggérons qu’il s’agisse d’un règlement d’application de sorte que le ministre et le gouverneur en conseil puissent ensuite s’occuper de tous les détails — comme nous avons dû le faire en tant qu’intervenants avec Santé Canada dans le dossier des cosmétiques — et leur donner le temps et la capacité de régler les détails.

C’est ce que nous préconisons. Nous pensons que c’est la voie à suivre. À long terme, les solutions de rechange à l’expérimentation animale sont, encore une fois, d’une grande complexité, mais si vous envisagez d’aller au-delà du préambule, nous ne nous y opposerons pas. Cependant, nous pensons que cela devrait se faire par l’entremise du pouvoir du gouverneur en conseil de prendre les règlements appropriés dans la législation appropriée afin de tenir compte de ce programme particulier et de le faire progresser.

L’autre aspect que nous voulons signaler est celui de l’étiquetage. Cela devient important parce que nos produits sont tous assujettis aux règles d’étiquetage de la Loi sur les aliments et drogues, dont bon nombre sont en voie d’être modernisés conformément à la Loi de Vanessa que le Parlement a adoptée il y a quelques années.

Si vous envisagiez d’élargir les exigences en matière d’étiquetage, leur interaction avec d’autres mesures législatives serait problématique pour nous. Nous croyons que le principe de la loi la mieux placée est important et que les exigences en matière d’étiquetage des produits finis devraient être appliquées en vertu de la loi qui régit la mise en marché de ces produits. Diverses lois ont actuellement des exigences différentes. Il est essentiel que vous en teniez compte si vous voulez vous rendre dans cet espace particulier.

D’après notre expérience de Santé Canada et de sa modernisation — et je crois qu’un sénateur l’a signalé —, si vous ajoutez des exigences à l’étiquette d’un produit, vous ne faites qu’augmenter l’emballage du produit et créer d’autres problèmes environnementaux. Nous avons constaté qu’à cause de ce même problème, Santé Canada envisage maintenant l’étiquetage électronique comme solution pour obtenir plus de renseignements. Si l’intention est de fournir au consommateur plus d’information sur les substances contenues dans son produit, l’étiquetage électronique fournit la réponse, surtout dans un monde où plus de produits sont vendus par voie électronique. À l’heure actuelle, vous pouvez acheter un produit sur le Web et vous ne voyez peut-être pas du tout l’étiquette. Si vous voulez un amendement dans ce domaine, il faudrait qu’il habilite à la fois la réglementation et l’utilisation d’étiquettes électroniques pour les produits en vertu de la loi la mieux placée.

Mon dernier point n’est pas législatif, mais administratif, à savoir que lorsqu’il s’agit de produits de consommation finis, le fait d’avoir deux ministères différents qui réglementent, administrent et appliquent la réglementation peut être très lourd. Nous avons remarqué que le ministère de l’Environnement commence à appliquer la réglementation environnementale sur les produits finis, tandis que le ministère de la Santé applique la réglementation sur les ingrédients liés à la santé. Très franchement, nous ne nous opposons pas à la réglementation. Cependant, nous pensons qu’elle devrait être regroupée en un seul système d’administration et d’application de la loi.

Voilà ce que j’avais à dire, monsieur le président. Merci de votre attention.

Le président : Merci beaucoup. Monsieur Masterson, vous disposez d’un maximum de cinq minutes.

Bob Masterson, président et chef de la direction, Association canadienne de l’industrie de la chimie : Merci, monsieur le président. Je serai bref.

C’est un plaisir d’être ici aujourd’hui au nom de l’Association canadienne de l’industrie de la chimie. Notre industrie de la chimie est le troisième secteur manufacturier en importance au Canada, et nous sommes sur le point de connaître une croissance extraordinaire. Nous poursuivons énergiquement la transition vers une économie circulaire à faibles émissions de carbone pour nos matériaux. C’est une période passionnante pour faire partie de l’industrie de la chimie.

J’ai le plaisir d’être accompagné aujourd’hui de Danielle Morrison, gestionnaire des politiques, Produits chimiques et santé, à l’Association canadienne de l’industrie de la chimie. Avant de commencer, j’aimerais prendre quelques instants pour remercier la greffière et l’équipe formidable qui l’a aidée à rendre possible la réunion d’aujourd’hui.

Notre industrie et nos membres sont tous des organismes de gestion responsable. Fondamentalement, la gestion responsable est un engagement à l’égard de l’amélioration continue au quotidien. Nous tirons des leçons de nos activités, de nos erreurs et des bonnes pratiques des autres dont nous nous inspirons afin de pouvoir faire mieux demain.

Dans ce contexte, nous accueillons favorablement le projet de loi S-5, car il représente une mise à jour complète et appropriée de la LCPE et une occasion d’apprendre — de 1999 à aujourd’hui — ce qui a bien fonctionné, ce qui a moins bien fonctionné et ce que les autres font et dont nous pouvons tirer des leçons pour améliorer nos propres efforts.

Ce projet de loi fait suite à des années d’étude par des comités parlementaires et à des années de participation et d’engagement de la part des meilleurs experts des ministères et d’autres intervenants, comme nous-mêmes et des représentants de la société civile. Ce que vous voyez, c’est un ensemble complet de modifications proposées qui sont généralement en accord et nécessaires pour améliorer la LCPE.

Le Plan de gestion des produits chimiques est au cœur du projet de loi et de la loi. Nous sommes très fiers de ce que le programme de gestion des produits chimiques a accompli jusqu’à maintenant.

Un principe clé de ce programme, cependant, est l’idée que les expositions préoccupantes sont évaluées et gérées au moyen d’un instrument proportionnel. Qu’est-ce que cela signifie? M. Praznik l’a déjà dit, mais le concept de la loi la mieux placée et d’une approche fondée sur le risque pour gérer les substances préoccupantes est au cœur de la LCPE. Au bout du compte, cela a été conservé dans le projet de loi S-5. Les résultats de ce processus doivent demeurer fondés sur le risque afin de permettre l’utilisation de l’instrument le plus approprié. C’est tout à fait conforme à la directive réglementaire rigoureuse du Canada.

Encore une fois, le PGPC a été un programme très réussi. Aucune autre administration n’a réussi à obtenir les progrès que nous avons vus dans le cadre du PGPC. Nous avons commencé par classer 23 000 substances déjà commercialisées. Nous avons réalisé des évaluations solides des risques pour près de 4 000 des 4 300 priorités les plus importantes et nous avons pris de nombreuses mesures de gestion des risques.

On l’oublie souvent, mais une composante tout aussi importante de la LCPE et du PGPC est le programme de déclaration des substances nouvelles. Cela permet de s’assurer que toute nouvelle substance commercialisée est sûre avant son utilisation prévue, avant sa mise en marché. Chaque année, nous voyons 500 autres évaluations de déclaration de substances nouvelles et environ 30 mesures de contrôle pour assurer la préservation de la santé publique et de la santé environnementale. C’est un excellent programme. Il a donné d’excellents résultats. Nous pouvons continuer à l’améliorer, mais nous devons veiller à ne pas lui nuire.

Le travail accompli a également permis d’obtenir des résultats tangibles, mesurables et visibles pour la santé humaine et l’environnement. C’est ce qui ressort de l’étude de biosurveillance publiée l’an dernier. Ce sont des résultats importants. Nous pouvons voir les résultats des évaluations et des instruments de gestion des risques qui ont été mis en place.

Je remarque également que le projet de loi arrive à point nommé. C’est la fin naturelle, si vous voulez, de la troisième phase, la plus récente, du programme de gestion des produits chimiques et de la première itération de ce programme. Comme nous passons maintenant à la phase quatre, il est possible de tirer parti des leçons apprises et de discuter de la façon dont nous nous préparons pour cette nouvelle phase.

Grâce au PGPC, nous avons acquis la réputation d’être la référence en matière de gestion des produits chimiques. Alors que nous passons à la prochaine étape, nous avons l’occasion de pousser le programme encore plus loin. L’une des choses que nous pouvons faire avec notre système de catégorisation des risques et de gestion des risques, c’est encourager l’uniformité afin d’avoir un commerce plus harmonisé, une capacité plus harmonisée de gérer les risques liés aux substances et aux articles qui entrent dans l’économie en exportant l’approche canadienne vers d’autres administrations. Une approche fondée sur le risque semblable à la nôtre est déjà en place aux États-Unis et en Australie. Nous pouvons faire plus sur ce plan-là.

La mise en œuvre de certains éléments du projet de loi nous préoccupe. Cela comprend des choses comme la liste de surveillance. Cela soulève beaucoup de questions. De façon plus générale, nous avons exprimé publiquement notre appui au projet de loi, et bon nombre de ses éléments sont importants pour nous, comme je l’ai déjà dit.

Nous avons hâte de discuter de nos observations générales sur le projet de loi, de répondre à vos questions et de continuer à collaborer avec vous et le gouvernement, alors que nous nous dirigeons vers la version finale du projet de loi révisé. Merci de m’avoir écouté ce matin.

Le président : Monsieur LeRoux, vous disposez de cinq minutes.

J. Gary LeRoux, président et chef de la direction, Association canadienne de l’industrie de la peinture et du revêtement : Merci, monsieur le président. Notre industrie représente tous les fabricants, fournisseurs et distributeurs de produits de peinture et d’enduit au Canada. Elle représente environ 12,5 milliards de dollars en retombées économiques et approvisionne 5 000 points de vente au détail, comme les magasins à grande surface. Nos membres sont propriétaires de 3 000 magasins de détail. Nous fournissons des produits aux secteurs de l’architecture, de l’industrie et de l’automobile, y compris le secteur de la fabrication d’équipement d’origine — toutes les voitures qui sortent des chaînes de production — et le secteur maritime. Nous nous occupons de tous les aspects des revêtements.

De façon générale, nous appuyons les amendements proposés au projet de loi S-5 — et j’aimerais entrer dans les détails —, mais nous avons certaines préoccupations, surtout en ce qui concerne le fait de compter sur des directives futures pour clarifier certains amendements clés. Je pense que c’est là que le Sénat pourrait faire du bon travail en clarifiant et en interprétant mieux la loi dont nous sommes saisis, plutôt que d’avoir à s’en occuper après la promulgation des modifications à la loi.

L’industrie a vraiment besoin de clarté maintenant. Le ministre a dit au comité, la semaine dernière, que les Canadiens s’attendent à ce que le gouvernement veille « à ce que les substances soient gérées efficacement par des approches et des activités transparentes. » L’Association canadienne de l’industrie de la peinture et du revêtement appuie ce point de vue. Toutefois, nous ajoutons que ces approches et activités doivent reposer uniquement sur des données scientifiques fondées sur des données probantes. Si ce n’est pas fondé sur des données probantes, de quel genre de données s’agit-il?

L’Association canadienne de l’industrie de la peinture et du revêtement a, comme M. Masterson l’a mentionné, classé 4 300 substances par ordre de priorité au cours des trois dernières phases du PGPC — en 15 ans —, dont 1 538, soit le tiers, dans le secteur de la peinture et du revêtement au Canada. Nous avons une grande expérience des évaluations et de la communication des données dont les fonctionnaires ont besoin pour faire des évaluations en toute connaissance de cause.

Le travail effectué par l’industrie et le gouvernement sur l’évaluation des produits chimiques fait en sorte que les diverses étapes de l’évaluation préalable des produits chimiques sont solides. Cela exige un engagement important avec l’industrie et d’autres intervenants — comme mes collègues l’ont mentionné — et d’innombrables réunions bilatérales et multilatérales jusqu’à ce que nous franchissions la ligne d’arrivée, ce qui mène souvent à la publication de règlements dans la Gazette du Canada. Ce n’est pas facile. Cela prend du temps. Il faut de la patience. Si l’on précipite la prise de décisions fondées sur le risque et sur des données scientifiques en imposant arbitrairement un échéancier rigoureux, comme le suggèrent les amendements, cela ne sert les intérêts de personne, surtout pas ceux de l’environnement ou de la santé humaine. Cela exerce une pression accrue sur les fonctionnaires et les gens de l’industrie qui appuient leur travail.

Le ministre a également dit au comité que l’industrie a besoin d’un environnement réglementaire stable et prévisible pour nous aider à atteindre nos objectifs de gestion des produits chimiques.

Nous sommes d’accord avec le ministre. Le système a bien fonctionné grâce aux fonctionnaires dévoués, qui ont une solide formation et une vaste expérience dans tous les domaines scientifiques, tout comme notre personnel et nos membres. Ils appliquent ce principe en premier pour la priorisation des produits chimiques à évaluer — ceux qui suscitent le plus de préoccupations. Ensuite, on procède à un examen approfondi des données requises pour conclure des évaluations rigoureuses des produits chimiques.

C’est ce qui fait que le PGC fonctionne. Ce que l’industrie apprécie le plus, tout comme nos membres, c’est que les décisions fondées sur le risque ne dépendent pas de la politique ou d’un programme politique en particulier. Elles sont fondées sur des données scientifiques, comme mes collègues l’ont souligné.

Il ne suffit pas de laisser entendre, comme un sénateur l’a fait la semaine dernière, que « les effets cumulatifs accentuent la toxicité des substances au lieu de l’atténuer ». Cela a toujours été le cas. De tels énoncés généraux, bien que vrais, minimisent ce qu’il faut faire pour ajouter une valeur réelle aux évaluations des risques.

Les évaluateurs et ceux qui sont tenus en vertu de la LCPE de fournir les données de fond doivent respecter une norme plus élevée, et ils le font. Les données scientifiques sont toujours prises en compte et le seront toujours. Comme le ministre l’a également fait remarquer, « la LCPE et les lois évoluent au même rythme que la science en cette matière ». C’est vrai. C’est ce que nous constatons à bien des égards avec de nouvelles méthodes d’évaluation des produits chimiques et d’autres initiatives visant à améliorer ces évaluations.

Un effort concerté est fait pour améliorer les choses. Il n’a pas été nécessaire pour cela de modifier la LCPE. Il n’en reste pas moins que personne ne peut devancer la science. Nous avons vu beaucoup de prétendues données scientifiques et de faits pendant la pandémie, et cela n’a pas bien servi les gouvernements et les Canadiens. Ne nous engageons pas dans cette voie.

À titre d’exemple, je ne crois pas que le fait d’avoir une liste de surveillance, par exemple, fonctionne lorsque des substances peuvent être désignées sans qu’il y ait un processus de priorisation prévisible. La science est beaucoup plus complexe.

Il ne suffit pas de soupçonner qu’un produit pourrait devenir toxique à l’avenir, comme le prévoit le projet de loi S-5.

Le président : Pourriez-vous conclure, monsieur LeRoux, s’il vous plaît?

M. LeRoux : Je vais conclure. Les amendements à ce projet de loi doivent être prévisibles et transparents pour tout le monde. J’aimerais dire que le Sénat et le gouvernement ont la responsabilité de se concentrer sur la façon dont nous pouvons améliorer le système de gestion des produits chimiques, et notre industrie travaillera avec vous pour s’assurer que c’est ce que fera ce projet de loi.

Le président : Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Ma question s’adresse à M. Masterson, de l’Association canadienne de l’industrie de la chimie. Pour revenir sur les propos de votre collègue au sujet de la transparence, vous dites, dans votre mémoire, que vous vous opposez à la modification visant à exiger la divulgation des noms chimiques ou biologiques explicites des substances ou des organismes vivants lorsque vous avez des instruments de gestion des risques.

Si je comprends bien, vous jugez que la plus grande transparence exigée par le gouvernement va trop loin.

Ma question est assez simple : est-ce que la priorité ne devrait pas être la santé des citoyens et la santé de la planète, plutôt que le fait que vous voulez éviter de voir vos substances analysées? J’imagine que vous allez dire que tout cela est confidentiel.

Il me semble qu’à ce stade, la santé des citoyens et celle de la planète devraient peser dans votre analyse de la transparence.

[Traduction]

M. Masterson : Je vous remercie de la question. Premièrement, c’est peut-être une mauvaise interprétation de ce que nous avons dit, et c’est de notre faute.

Il ne fait aucun doute que les renseignements doivent être fournis aux organismes de réglementation et aux évaluateurs. Ils en ont besoin pour faire leur travail. Cela ne fait aucun doute.

Il ne fait aucun doute non plus que nous n’avons pas dit que le gouvernement était allé trop loin. C’est plutôt le contraire, et cela correspond à ce que M. LeRoux et M. Praznik ont dit récemment. Vous proposez des amendements sans donner suffisamment de détails en disant : « Faites-nous confiance; nous ferons les choses correctement à l’avenir. »

Il ne s’agit donc pas de savoir si nous nous opposons à la divulgation de plus d’information, mais dans quelles circonstances, et si ces circonstances sont conformes à d’autres lois et règlements au Canada?

Toutefois, voici ce qui préoccupe le plus l’industrie quand nous regardons ce qui se passe dans d’autres secteurs réglementés, comme celui des produits pharmaceutiques. Les Canadiens se voient refuser les médicaments et les traitements les plus récents et les meilleurs disponibles pour protéger leur santé. Pourquoi? Ce n’est pas parce que l’industrie ou le gouvernement n’en veulent pas au Canada, mais parce que nous avons créé des systèmes de réglementation qui sont si lourds et si coûteux à gérer qu’il ne vaut pas la peine pour l’industrie de mettre en marché de nouveaux produits novateurs.

Nous devons nous assurer que nous avons établi un juste équilibre. Oui, le gouvernement et les évaluateurs doivent avoir toute l’information dont ils ont besoin pour prendre une décision sur la toxicité d’une substance donnée. Le public a le droit de connaître les conséquences et le contenu des produits qu’il utilise. Mais il faut équilibrer cela avec un système qui permet la protection des renseignements commerciaux confidentiels des concurrents et qui n’est pas si lourd qu’il dissuade l’industrie d’introduire de nouveaux produits ou de nouvelles solutions novatrices qui seront bénéfiques pour l’environnement et la santé humaine. C’est là qu’est l’équilibre. Ce n’est pas une question tranchée, mais je suis content d’avoir l’occasion d’en parler.

La sénatrice Miville-Dechêne : J’essaie de comprendre votre réponse. Dans quelles circonstances demanderiez-vous au gouvernement de ne pas publier ou révéler certaines des substances que vous utilisez? Est-ce simplement une question de renseignements confidentiels? Comment les renseignements confidentiels s’équilibreraient-ils avec la santé des gens et de la planète?

M. Masterson : Encore une fois, c’est une question de renseignements commerciaux confidentiels. Ce n’est peut-être pas confidentiel par rapport au public, mais par rapport à vos concurrents. Lorsque vous parlez d’ingrédients désignés et brevetés, et des concentrations de ceux qui font du produit ce qu’il est, c’est ce qui ajoute de la valeur pour les entreprises et mérite d’être protégé, et le Canada a des lois à cet égard.

La sénatrice Miville-Dechêne : Est-ce une raison suffisante, monsieur, pour ne pas révéler ce que contient votre produit? Je suis désolée de le répéter, mais cela me semble très différent de l’équilibre des risques.

M. Masterson : Je pense que c’est une question d’équilibre. Il y a des renseignements qui sont fournis et des règles qui déterminent — ce n’est pas parce que l’industrie dit qu’un renseignement est confidentiel qu’il l’est forcément. Des règles et des procédures guident la décision de protéger ou non les renseignements. Nous sommes raisonnablement confiants à l’égard de ceux qui sont déjà protégés. Nous sommes quelque peu préoccupés par la possibilité de les modifier d’une manière qui limitera, encore une fois, l’innovation et la capacité d’introduire de nouvelles substances au Canada.

Le président : Merci.

La sénatrice Seidman : Je vous remercie de vos exposés. Commençons peut-être par M. Praznik, de l’Alliance canadienne des cosmétiques. Dans votre lettre à notre comité, vous avez dit que la façon dont la Loi canadienne sur la protection de l’environnement et la Loi sur les aliments et drogues interagissent est importante pour votre industrie :

[...] pour veiller à ce que ces cadres réglementaires qui se chevauchent soient harmonisés, ne prévoient pas d’exigences contradictoires et favorisent efficacement la conformité et l’application.

Moi aussi, je m’intéresse beaucoup à la façon dont cela s’harmonisera. Il s’agit-là d’une mesure spéciale parce qu’elle exige maintenant que le ministre de l’Environnement et le ministre de la Santé travaillent ensemble pour évaluer la toxicité des substances, et il existe un seul régime d’évaluation en vertu de la Loi sur les aliments et drogues pour évaluer les risques des médicaments pour l’environnement et la santé.

Ce que j’aimerais vous demander, c’est qu’il semble que les professionnels de la santé continuent de critiquer la LCPE modifiée et qu’ils proposent de prioriser l’interdiction des substances toxiques avec des délais et une substitution plus sûre. J’aimerais savoir si vous comprenez ou si vous pouvez nous aider à comprendre à quoi ils pourraient faire référence. Peut-être que les deux autres témoins auraient aussi quelque chose à dire à ce sujet. Merci.

M. Praznik : Je vous en remercie, sénatrice. Pour mettre les choses en contexte, dans la définition générale de « drogue » dans la Loi sur les aliments et drogues, on peut tout inclure, d’un médicament d’ordonnance traitant le cancer à un rouge à lèvres avec un écran solaire. À l’heure actuelle, l’une des réformes de Santé Canada — le cadre d’autogestion de la santé — consiste à regrouper tous les médicaments en vente libre à faible risque, les produits de santé naturels et les cosmétiques dans un système de réglementation commun axé sur le risque appelé le cadre d’autogestion de la santé. Lorsque les gens parlent de ces systèmes, je pense qu’il est important de mettre l’accent sur les médicaments d’ordonnance à haut risque par opposition aux soins auto-administrés à faible risque. C’est important.

Deuxièmement, les régimes qui régissent les produits d’autosoins sont tous ce que j’appellerais des régimes de produits sûrs. Ils exigent tous que, pour pouvoir être mis en marché, un produit soit sans danger pour la santé humaine lorsqu’il est utilisé comme prévu. C’est très important. Nous savons que dans un modèle fondé sur le risque, une substance qui peut présenter un danger potentiel peut ne pas être un danger en fonction de la façon dont elle est utilisée, du volume, de ce genre de choses, et cela fait partie de l’évaluation.

Il est important de séparer ces deux préoccupations particulières et de nous assurer que nous appliquons le bon cadre réglementaire au bon niveau de risque.

Nous avons une longue expérience de la façon dont les deux lois interagissent dans le cadre du Plan de gestion des produits chimiques, nous sommes tout à fait d’accord avec l’évaluation de toutes les substances, tant du point de vue de la santé humaine que de l’environnement, et nous avons une bonne expérience à cet égard. Ce qui nous préoccupe, c’est qu’une fois que vous avez fait cette évaluation, où administrez-vous et appliquez-vous le règlement? Santé Canada dispose déjà d’un mécanisme d’administration et d’application de la loi important et bien connu. Il a ce qu’on appelle la liste critique des ingrédients interdits et restreints et utilise une nomenclature internationale. Nous espérons qu’on appliquera et administrera les règles environnementales au moyen de ce même système au lieu de créer un autre système administratif à Environnement Canada.

La sénatrice Seidman : J’aimerais savoir si M. Masterson ou M. LeRoux ont quelque chose à dire à ce sujet. Merci.

M. LeRoux : En ce qui concerne les délais, le projet de loi propose qu’il y ait un délai précis pour effectuer une évaluation. Nous savons, pour avoir travaillé sur ces questions pendant un certain nombre d’années dans le cadre du PGPC, que cela pourrait prendre beaucoup plus de temps que prévu. Il faudra peut-être beaucoup plus d’information que les fonctionnaires n’en ont maintenant. C’est un processus itératif qui se poursuit pendant un certain temps. Il ne serait pas juste de mettre fin à l’évaluation et de déclarer que la substance est toxique ou non alors que vous ne disposez pas de tous les faits, et ce ne serait pas une façon stable, prévisible ou transparente d’aller de l’avant.

Pour ce qui est des substitutions que vous avez mentionnées, oui, nous envisageons déjà des substitutions. Nous en utilisons beaucoup. Les matériaux d’origine biologique constituent une grande partie de notre industrie à l’heure actuelle, de même que la chimie verte. Nous investissons beaucoup dans la R-D. Des centaines de millions de dollars y sont consacrés. Nous voulons nous engager dans cette voie. Nous sommes à bord de ce navire avec tout le monde, pour devenir plus écologiques et plus respectueux de l’environnement, mais il en coûte beaucoup d’argent pour faire la recherche et trouver les formulations qui fonctionnent avec les caractéristiques de rendement que veulent les consommateurs. Voilà où nous en sommes. Lorsque vous demandez au gouvernement de proposer une substitution, il ne peut pas le faire en raison de la structure du règlement, mais c’est ce que nous recherchons. Des substitutions éclairées sont certainement à l’ordre du jour.

Je vais ajouter une chose. Notre industrie sait également quelles sont les substances très préoccupantes. Certains de nos membres ont une liste de ces substances. Ils les connaissent et ils ont un plan pour surpasser la réglementation et retirer ces substances de leur arsenal.

Nous essayons de progresser. Tous les rapports sur la durabilité que nos membres publient et les échéanciers pour la réduction des substances préoccupantes au cours des prochaines années sont très impressionnants, et tout le monde est d’accord.

La sénatrice Sorensen : Ma question s’adresse également à M. Masterson. Je veux faire référence à la section de votre document qui porte sur la création d’une soupape de sécurité qui donnerait au gouverneur en conseil le droit de suspendre l’application de certaines dispositions de la loi en cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles.

Je sais que vous avez mentionné la COVID-19. Peut-être pourriez-vous nous parler davantage des dispositions qui auraient été idéales pendant cette situation d’urgence, des autres types d’urgences qui empêcheraient les entreprises de respecter les exigences de la LCPE, et de la façon dont cette soupape de sécurité pourrait être aménagée sans mettre en péril la santé et la sécurité des Canadiens?

M. Masterson : C’est un problème qui a été soulevé par le gouvernement fédéral dans le contexte de la pandémie. Prenons, par exemple, une grande installation de produits chimiques qui doit faire des types précis d’échantillonnages ou de contrôles et qui a besoin de la présence de tierces parties externes. Cependant, si la loi empêche des tierces parties de se déplacer partout au pays et d’entrer dans votre site, il est très difficile de poursuivre ces activités.

Dans certaines provinces, les gouvernements ont été en mesure de proposer un amendement — appelons cela une soupape de sécurité — disant qu’il n’était pas nécessaire de faire telle ou telle chose pendant un certain temps. Ce n’était pas disponible. Vous courriez donc un risque, et il est probable que des entreprises ont contrevenu aux exigences réglementaires pendant cette brève période.

Quelle est la prochaine urgence? L’un d’entre nous aurait-il pu prévoir la COVID-19? Absolument pas. Nous ne savons pas ce que ce sera, mais nous pensons qu’il devrait y avoir une mesure quelconque assortie d’un critère très rigoureux selon lequel, dans des circonstances d’urgence uniques, inhabituelles et nationales, le ministre ou le gouverneur en conseil aura le droit de suspendre certaines dispositions de la loi à des fins temporaires uniquement.

Le président : Il nous reste 13 minutes, alors si nous pouvions avoir des questions courtes et des réponses encore plus courtes, je vous en saurais gré.

[Français]

Le sénateur Gignac : Ma question s’adresse à M. LeRoux. Vous avez mentionné que vous travaillez de près avec l’industrie de l’automobile. Ce qui m’intéresse, ce sont les conséquences inattendues que pourrait avoir le projet de loi.

Il a été dit que les décisions au Canada seront basées sur la science. Toutefois, on a vu pendant cette pandémie que l’interprétation de la science aux États-Unis et au Canada n’était pas toujours la même. Pourrait-il y avoir des conséquences sur la compétitivité du secteur de l’automobile? Une réglementation ou des décisions pourraient être différentes au Canada et aux États-Unis, ce qui risquerait d’affecter la chaîne d’approvisionnement du secteur de l’automobile nord-américain, qui est très intégré.

[Traduction]

M. LeRoux : Absolument. C’est toujours une des préoccupations de notre industrie. Il y a beaucoup de décalage entre les règlements du Canada et ceux des États-Unis, et nous savons pourquoi au cours des quatre années précédentes, mais un effort est fait pour remettre les choses sur la bonne voie. Cependant, cela a des répercussions importantes sur nous. Beaucoup d’entreprises transfèrent leurs installations de fabrication et de production du Canada aux États-Unis, mais elles continuent d’expédier leurs produits au Canada. C’est à cause de la structure des coûts.

Quelqu’un a parlé de la réglementation des produits chimiques. Le Canada a 50 000 règlements sur les produits chimiques, comme l’a souligné le Conseil du Trésor en 2018, et la Chambre de commerce, 300 000, dont 50 000 pour les produits chimiques seulement au Canada. Alors oui, cela a une incidence sur le fait qu’on expédie des marchandises au Canada au lieu de les produire au Canada. Malheureusement, une partie de la fabrication est perdue ici, mais le volume reste le même. Je ne pense pas que cela devrait avoir un impact parce que les entreprises américaines sont toujours assujetties aux mêmes règlements pour ce qu’elles expédient au Canada à partir des États-Unis, alors cela ne posera pas de problème.

La principale question est de savoir si nos règlements s’alignent sur les leurs alors que 10 % de ce qui sort de la chaîne de production aux États-Unis est destiné au Canada. Donc, plus nous avons de production ici, mieux c’est. Si nous n’harmonisons pas la réglementation, le pourcentage de production qui arrive au Canada pourrait être de 5 %. Les fabricants n’auront pas accès à des matériaux pour les revêtements des véhicules ou autre chose. Je dirais que les revêtements automobiles contiennent 30 % de moins de produits à base de solvant que par le passé.

Le sénateur Arnot : Je m’adresse à tous les témoins et je vous remercie d’être venus aujourd’hui. Vous avez tous exprimé des préoccupations au sujet de la liste de surveillance. Y a-t-il un moyen pour l’industrie d’appuyer la liste de surveillance? Vous avez demandé, je crois, de l’éliminer complètement. Y aurait-il un compromis ou une meilleure définition du seuil pour figurer sur la liste de surveillance? Pouvez-vous nous fournir des réponses ou des recommandations précises à ce sujet?

M. Praznik : Tout d’abord, nous ne nous sommes pas opposés à la liste de surveillance. Encore une fois, il s’agit des précisions quant à la façon dont on s’en servira. En tant qu’ancien ministre de la Santé du Manitoba, je peux vous dire que j’aime l’idée d’un feu rouge, d’un feu vert, d’un feu jaune.

La liste de surveillance a le potentiel de devenir une liste sur laquelle une substance qui suscite des préoccupations peut être placée, et vous pouvez avoir un plan pour la surveiller, la suivre et obtenir plus d’information à son sujet. En tant qu’association de l’industrie, nous pensons que si elle est bien utilisée et élaborée, la liste de surveillance peut être un outil très efficace. Je ne l’écarterais pas, et nous n’avons pas indiqué que nous nous y opposions. Nous avons quelques questions sur la façon dont elle sera élaborée.

M. Masterson : J’aimerais demander à Danielle Morrison de répondre à cette question. Elle en a longuement discuté avec les fonctionnaires du ministère.

Danielle Morrison, gestionnaire des politiques, Santé chimique, Association canadienne de l’industrie de la chimie : Ce qui nous préoccupe au sujet de la liste de surveillance, c’est le chevauchement, non seulement avec l’annexe 1 de la LCPE — les parties 1 et 2 —, mais aussi avec la série existante d’arrêtés de nouvelle activité, qui sont émis lorsqu’il y a une nouvelle exposition préoccupante au Canada. Tout risque posé par une nouvelle exposition serait évalué par un avis de nouvelle activité.

Avec l’annexe 1 de la LCPE — les deux parties —, le critère actuel est que la substance « peut avoir des effets nocifs ». Nous avons simplement besoin de plus de clarté quant à ce que cela signifie, en ce qui concerne le chevauchement, ainsi que de mécanismes clairs pour inscrire une substance sur la liste et l’en retirer. Cela donnerait de la certitude à l’industrie pour ce qui est de la voie à suivre.

M. Masterson : J’ajouterais que, même lors de la comparution des fonctionnaires du ministère, la semaine dernière, j’ai cru comprendre qu’ils ne savaient pas exactement ce que cela signifiait. Ils voient que c’est redondant, ils ne sont pas certains de ce que cela vaut et peut apporter, ni de la façon dont ce serait mis en œuvre efficacement. Cela suscite beaucoup de questions ici, pas seulement de la part de l’industrie, mais de tous les participants.

M. LeRoux : Je suis d’accord avec les deux collègues précédents. Si vous inscrivez sur une liste de surveillance une substance qui risque de devenir toxique à l’avenir, tout le monde conclura que la substance en question est toxique, et chaque produit qui en contient sera perçu comme un mauvais produit par les consommateurs. Cela ne fonctionnera tout simplement pas. Si vous décidez arbitrairement que quelque chose risque de devenir toxique à l’avenir, vous aurez alors la liste la plus longue que vous ayez jamais vue.

Je suis d’accord pour dire que c’est ce que fait la liste des nouvelles activités déjà en place. Maintenant, si vous avez une nouvelle utilisation pour un produit chimique qui est déjà sur le marché et que vous utilisez ce produit à d’autres fins que celles qui sont actuellement prévues, c’est alors inscrit sur une liste dans le but de surveiller tout risque potentiel à l’avenir. Cela fonctionne. Je ne vois pas pourquoi nous devrions faire plus.

La sénatrice Galvez : Merci beaucoup à nos témoins d’aujourd’hui. J’ai remarqué que vous avez tous les trois dit que vous étiez d’accord avec l’approche fondée sur la science et l’évaluation des risques, mais qu’il y a aussi des « points faibles », que c’est trop compliqué et que cela pourrait être lourd. Pouvez-vous nous expliquer qui est responsable de l’évaluation complète des risques? Combien de temps cela prend-il? Quel est le niveau de risque acceptable qui fait que quelque chose passe d’une liste à une autre?

M. Masterson : Oui. C’est une question complexe. Il y a d’abord la question du temps que cela prend. La loi actuelle fixe un délai maximum, et on propose de le raccourcir. Encore une fois, nous dirions que vous avez la capacité de le raccourcir maintenant et qu’il suffit de fournir plus de ressources. Ce n’est pas nécessairement facile.

Le gouvernement, par l’entremise de l’évaluation des risques, porte un jugement scientifique. Ce ne sont pas des élus. Ce ne sont pas des spécialistes des politiques. Ce n’est pas l’industrie. Ce sont des scientifiques qui décident si la substance en question pose un risque inacceptable pour la santé humaine et l’environnement. Il vaut mieux demander aux représentants de Santé Canada, en particulier aux scientifiques eux-mêmes, comment ils prennent ces décisions.

M. LeRoux : Je dirais que nous n’avons aucune réserve, sénatrice. Le système est en place, comme nous l’avons dit, et il fonctionne. D’aucuns laissent entendre que nous voulons changer ce qui fonctionne d’une quelconque façon. Nous disons que ce n’est peut-être pas la meilleure façon de procéder. La liste des NAc est là. Pour ce qui est des évaluations des produits chimiques, les NAc doivent fournir des données solides. Les données d’autres administrations et du milieu universitaire sont recueillies. La plupart des renseignements proviennent de l’industrie parce que l’industrie a des données. Elles sont obligées de les fournir en vertu de l’article 71 de la LCPE, mais parfois ce n’est pas obligatoire.

Nous voulons que toutes les données soient mises à disposition. Nous ne voulons pas tout simplement dire : « Examinons un produit qui n’est peut-être pas toxique maintenant, mais qui pourrait le devenir. » Cela va trop loin, et les fonctionnaires d’Ottawa sont déjà dépassés par les évaluations en cours des produits chimiques actuels. L’industrie est dans la même situation. Quatre-vingt-dix pour cent du temps que je consacre à travailler avec des comités techniques concerne le Plan de gestion des produits chimiques. C’est très lourd. Nous essayons de nous assurer qu’ils ont toutes les données dont ils ont besoin. Je ne dirais pas qu’il n’y a pas de « réserve ». Il y a déjà de nouvelles initiatives en cours, comme de nouvelles approches méthodologiques, qui examinent la substitution éclairée.

Les fonctionnaires ont déjà dit souhaiter toutes sortes d’initiatives, et ils font du bon travail pour placer la barre encore plus haut. Nous les appuyons à cet égard. C’est ce qui se passe. On n’a pas vraiment besoin du projet de loi pour faire cela, parce que je pense que c’est déjà en cours. Tout manque de clarté additionnel à ce sujet fait en sorte que tout devient plus difficile.

[Français]

Le sénateur Carignan : Je vais poser la même question que le sénateur Gignac, mais pour l’industrie des cosmétiques.

Est-ce que vous entrevoyez des effets négatifs... L’industrie des cosmétiques est très forte en Europe, notamment parce qu’on y respecte des normes et qu’on utilise le principe de précaution, comme en France. Est-ce que vous entrevoyez des difficultés au Canada, plus particulièrement pour cette industrie, comparativement aux pays européens ou aux États-Unis?

Le président : À qui adressez-vous principalement votre question?

Le sénateur Carignan : À l’Alliance de l’industrie cosmétique du Canada.

[Traduction]

M. Praznik : Merci beaucoup, sénateur. Tout d’abord, au cours de la dernière décennie, notre industrie a connu beaucoup de succès avec le Plan de gestion des produits chimiques, qui évalue les ingrédients utilisés tant sur le plan de la santé humaine que sur celui de l’environnement.

La question précédente portait sur la santé. Je vous rappelle que les produits finis doivent être sécuritaires quand ils sont utilisés comme prévu. C’est la loi. Nous avons un régime de réglementation très strict pour nous assurer que nos produits ne présentent aucun danger pour la santé des consommateurs.

L’Europe a son programme REACH, qui est très important — comme le Plan de gestion des produits chimiques — pour l’examen des substances. Il y a une différence entre les régimes canadien et européen, et je pense que c’est important. Dans le cadre de notre Plan de gestion des produits chimiques, lorsqu’on a un risque théorique, cela déclenche habituellement une évaluation réelle. Donc, en théorie, si quelque chose présentait un danger ou un risque potentiel à gérer, nous étudierions ce qu’il en est pour le confirmer éventuellement. En Europe, malheureusement, le système de risque théorique aurait tendance à déclencher des mesures réglementaires, qu’il y ait ou non un problème réel. C’est pourquoi le Plan de gestion des produits chimiques du Canada a été salué partout dans le monde comme étant de premier ordre, et le projet de loi continue de le renforcer. Nous en sommes très heureux.

Nous sommes également très engagés; notre industrie est un chef de file mondial dans la mise au point de méthodes d’essai sans expérimentation animale. Cette interdiction existe en Europe depuis 20 ans. Il y a eu d’énormes investissements. En fait, je siège au conseil d’administration d’une nouvelle collaboration visant non seulement à élaborer d’autres solutions de rechange, mais aussi à fournir de la formation et à travailler à l’acceptation réglementaire. Je siège à ce conseil avec des représentants de la Humane Society et de Cruelty Free International. Nous avons vraiment été des chefs de file dans ce domaine, alors je ne vois pas cela comme un problème.

[Français]

Le président : Merci. Cela met fin à la première partie de la réunion avec M. Darren Praznik et M. Beta Montemayor, de l’Alliance de l’industrie cosmétique du Canada, M. Masterson et Mme Morrison, de l’Association canadienne de l’industrie de la chimie, ainsi qu’avec M. J. Gary LeRoux, de l’Association canadienne de l’industrie de la peinture et du revêtement.

Merci beaucoup à vous tous d’avoir partagé vos connaissances et vos opinions; c’est très apprécié.

Nous allons passer maintenant à notre deuxième groupe de témoins.

Nous accueillons, de Dow Chemical Company (Canada), M. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales. De l’Association canadienne de produits de consommation spécialisés, nous accueillons Mme Shannon Coombs, présidente. De Manufacturiers et Exportateurs du Canada, nous accueillons Mme Allison Bernholtz, gestionnaire, Environnement et politique industrielle, ainsi que M. Mathew Wilson, vice-président principal, Politique, relations gouvernementales et division de l’Ontario.

Bienvenue à tous et merci d’avoir accepté notre invitation.

[Traduction]

W. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales, Dow Chemical Company (Canada) : Bonjour, monsieur le président et honorables sénatrices et sénateurs. Je suis heureux de me joindre à vous aujourd’hui pour vous parler du projet de loi S-5.

Je représente la société Dow Canada, entreprise présente dans plus de 30 pays, qui s’efforce d’être la plus innovante, la plus centrée sur le client, la plus inclusive et la plus durable des entreprises de science des matériaux dans le monde. Compte tenu de notre empreinte mondiale, notre entreprise a une grande expérience de la question de la gestion des produits chimiques.

Depuis la proclamation de la LCPE et l’avènement subséquent du Plan de gestion des produits chimiques, l’approche fondée sur le risque qui est au cœur de la gestion des substances chimiques au Canada suscite l’intérêt d’un grand nombre d’acteurs du milieu.

Vous n’avez pas besoin que je répète la genèse du PGPC fournie par le ministre et M. Masterson, mais comme nous sommes une entreprise active à l’échelle mondiale, permettez-moi d’affirmer au comité que le PGPC est en fait la référence mondiale en matière de gestion des produits chimiques en raison de la consultation publique transparente, visible et solide qu’il offre aux parties prenantes tout au long du processus de réglementation. L’obligation de rendre des comptes au public est un élément clé pour maintenir la confiance de la population canadienne dans les produits qu’elle utilise.

Le projet de loi S-5 fait beaucoup de choses importantes, mais la plus importante est qu’il pave la voie à la prochaine phase de la gestion des produits chimiques au Canada. Si le projet de loi S-5 est adopté, les ministres devront collaborer avec les acteurs concernés pour établir un nouvel ensemble de priorités réglementaires.

Il y a beaucoup de choses à dire à ce sujet, et je répondrai volontiers à vos questions sur les mécanismes actuels d’établissement des priorités, ainsi que sur notre soutien à un amendement que j’ai affectueusement surnommé l’article « Cher monsieur le ministre ».

Sur le fond, j’aimerais attirer l’attention du comité sur la nouvelle annexe 1. Il est important d’en avoir une compréhension commune afin d’instaurer la confiance dans la gestion des produits chimiques. Pour être clair, de nombreuses substances figurant à l’actuelle annexe 1 ne sont pas toxiques au sens propre du terme, dans le langage courant. En fait, cette liste contient des nutriments essentiels. Ce ne sont que certaines expositions à certaines substances qui peuvent avoir un effet néfaste. Il est essentiel de le souligner.

La division de la liste en deux catégories codifie ostensiblement une pratique que l’on retrouve dans les règlements d’interdiction actuels. Les critères qui font qu’une substance est inscrite à la partie 1 de l’annexe 1 — les substances présentant les risques les plus élevés — doivent faire l’objet d’une discussion importante et d’une consultation approfondie.

Sachant qu’une priorité sera accordée à l’interdiction, nous devons créer un système qui reconnaît le rôle de la chimie transformatrice dans l’économie. Je répondrai volontiers aux questions des sénatrices et sénateurs sur les dangers de l’utilisation de marqueurs de danger pour la désélection de substances sans contexte scientifique approprié et sans exception.

L’appui de l’industrie pour ce modèle repose sur certaines exceptions fondamentales. Si le temps le permet, je me ferai un plaisir de donner des exemples où une substance dangereuse dans un état peut ne pas être du tout une préoccupation dans un autre.

Dans le groupe de témoins précédent, on a posé une question au sujet des renseignements commerciaux confidentiels et de ce qui devrait être rendu public. Pour être clair, l’industrie fournit beaucoup de renseignements au gouvernement. Nous sommes convaincus que le gouvernement conservera ces renseignements et les utilisera pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens. Les renseignements commerciaux confidentiels ne concernent pas seulement la LCPE; ils concernent la façon dont le gouvernement fédéral détient tous les renseignements commerciaux confidentiels.

Enfin, je voudrais attirer votre attention sur la soi-disant liste de surveillance proposée par les ministres. Franchement, je ne sais pas pourquoi elle est nécessaire, si ce n’est pour diffamer les produits chimiques qui ont été soumis au processus d’évaluation des risques. Si le gouvernement souhaite envoyer un message à l’industrie sur l’utilisation d’une substance et la mettre en garde contre celle-ci, un avis de nouvelle activité remplit parfaitement cette tâche. Le gouvernement dispose déjà de ce pouvoir. Si un avis de nouvelle activité est créé pour une substance, l’industrie devra obtenir l’autorisation du gouvernement avant qu’une substance soit approuvée pour une nouvelle utilisation ou une augmentation des volumes. Je peux vous assurer que cela est éloquent.

Honorables sénatrices et sénateurs, il s’agit d’un domaine qui doit être examiné de plus près, y compris le processus permettant qu’une substance soit inscrite sur cette liste ou en soit retirée. Je serai heureux de répondre aux questions du comité sur les points que j’ai évoqués et j’aimerais appuyer cette réforme globale essentielle du gouvernement. Merci beaucoup.

Le président : Merci. Madame Coombs, vouliez-vous ajouter autre chose?

Shannon Coombs, présidente, Association canadienne de produits de consommation spécialisés : Bonjour, monsieur le président et honorables sénatrices et sénateurs. Je suis heureuse d’être ici aujourd’hui et de vous faire part de notre point de vue sur l’examen que fait votre comité du projet de loi S-5, qui vise à modifier la LCPE.

Je représente fièrement depuis 24 ans les nombreuses réalisations de cette industrie proactive et responsable. Je préside l’association depuis 19 ans. Les deux dernières années de mon mandat à l’Association canadienne de produits de consommation spécialisés ont été une période très stimulante, mais enrichissante pour l’industrie et le gouvernement, alors que nous avons collectivement livré des produits désinfectants, des assainisseurs, des désinfectants pour les mains et des nettoyants tout usage pour faire en sorte que les Canadiens disposent des produits dont ils ont besoin pour assurer leur sécurité, que ce soit à la maison, au travail ou à l’école. Nous sommes les membres fondateurs du Canadian Hand Sanitizer Exchange, où nous avons pu aider les entreprises à se procurer des matériaux, des ingrédients et des emballages pour fabriquer des désinfectants pour les mains pendant la pandémie.

En ce qui concerne les désinfectants et les assainisseurs, nous avons travaillé directement avec Santé Canada pour remédier aux pénuries d’ingrédients, de bouteilles et d’autres matériaux, et nous avons collaboré à l’élaboration de politiques visant à permettre l’introduction de technologies nouvelles et novatrices sur le marché canadien.

Je tiens à remercier les sénatrices et les sénateurs qui nous suivent sur Twitter et qui ont retransmis des gazouillis au cours des 25 derniers mois alors que nous faisions la promotion du lavage des mains et que nous avons prodigué de nombreux conseils importants sur la COVID — sur la fraude et sur l’importance de ne pas faire votre propre désinfectant pour les mains — pendant la pandémie. Fournir des renseignements factuels, utiles et de qualité aux consommateurs pendant la pandémie représentait une priorité essentielle pour notre association.

Aujourd’hui, j’ai déposé un document d’une page intitulé Que serait la vie sans nous? qui illustre le genre de produits que représente l’Association canadienne de produits de consommation spécialisés. Nous sommes une association commerciale nationale qui représente 39 entreprises membres dans tout le pays — une industrie de 20 milliards de dollars qui emploie équitablement 12 000 Canadiens dans plus de 82 installations.

J’aimerais vous donner un bref aperçu de la façon dont la loi fonctionne pour notre industrie, du succès du Plan de gestion des produits chimiques dans le cadre de la LCPE, qui fait du Canada un chef de file mondial, et de notre appui au projet de loi S-5 pour l’avenir.

Qu’est-ce que la LCPE et pourquoi est-elle importante pour l’Association canadienne de produits de consommation spécialisés et ses membres? La LCPE est un texte législatif important et sophistiqué de 400 pages au Canada qui vise la prévention de la pollution et la protection de l’environnement et de la santé humaine en vue de contribuer au développement durable. En 1999, après un examen exhaustif par vos prédécesseurs dans cette même enceinte, le Comité de l’environnement a examiné plus de 550 propositions de modification, dont 150 ont été incluses dans le projet de loi final après 93 heures d’examen. Cela nous a permis d’obtenir des résultats importants pour les Canadiens.

L’un de ces résultats est le Plan de gestion des produits chimiques, qui est un programme d’évaluation scientifique des risques liés aux produits chimiques et à leur gestion. En quelque sorte, la LCPE régit nos ingrédients, tant les substances existantes que les nouvelles. Nous avons soutenu ce programme gouvernemental de premier plan — le PGPC — depuis son annonce officielle en 2006, et nous nous sommes efforcés, comme industrie, de veiller à ce que nos piliers, à savoir une science solide, une procédure régulière et des communications efficaces, soient respectés par le programme. Les Canadiens devraient être fiers de ce programme; en effet, notre pays est un chef de file mondial pour ce qui est de la manière dont les substances sont évaluées et gérées, indépendamment de l’endroit où le produit chimique en question est utilisé. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions des sénatrices et sénateurs.

Nous avons également été heureux de voir les modifications tant attendues à la LCPE déposées au Sénat le 9 février. Cet ensemble de mesures est une proposition réfléchie de nombreux points de vue, y compris les examens parlementaires de 2006 et de 2016, et comprend les politiques actuelles qui sont codifiées et certaines idées audacieuses visant à moderniser la loi.

Que codifie ou clarifie l’ensemble de mesures depuis la politique existante jusqu’au projet de loi? C’est le droit à un environnement sain, des populations vulnérables, des effets cumulatifs et l’information sur les risques des substances toxiques, notamment l’étiquetage. Qu’y a-t-il de neuf? La loi la mieux placée, on renomme l’annexe 1, la résolution de la Liste des substances commercialisées et la liste de surveillance.

Je conclurai en disant que l’Association canadienne de produits de consommation spécialisés s’est engagée, et demeure engagée, à travailler avec le gouvernement pour appuyer un cadre législatif et réglementaire efficace et efficient pour la LCPE.

Le projet de loi établit un équilibre important entre la codification de principes améliorés et la santé et la sécurité des Canadiens et de l’environnement. J’ai hâte de répondre aux questions des sénateurs. Merci, monsieur le président.

Le président : Merci beaucoup. Madame Bernholtz, c’est à vous.

Allison Bernholtz, gestionnaire, Environnement et politique industrielle, Manufacturiers et Exportateurs du Canada : Mesdames et messieurs les sénateurs, c’est pour moi un honneur de témoigner devant ce comité, au nom des Manufacturiers et Exportateurs du Canada ainsi que des 2 500 membres directs de l’association.

Si je suis ici aujourd’hui, c’est pour vous exprimer notre appui au projet de loi S-5. Plus précisément, nous appuyons fortement le maintien de l’approche fondée sur les risques pour la gestion des produits chimiques prévue dans le cadre de ce projet de loi. Mon but aujourd’hui est de vous expliquer en quoi cette approche est cruciale pour les manufacturiers canadiens, notre environnement et la santé et la sécurité de tous les Canadiens.

Le secteur manufacturier est l’un des plus importants secteurs de l’économie canadienne; il regroupe des entreprises de toutes tailles et des employés de pratiquement toutes les collectivités à l’échelle du pays. Nos membres ont à cœur de travailler dans un environnement propre et sain. Sur notre chemin vers une économie carboneutre, ce sont les manufacturiers qui sont appelés à innover et à créer des produits, ainsi qu’à offrir des solutions de rechange à la fois sécuritaires et respectueuses de l’environnement, dans le but de répondre à la demande croissante des consommateurs pour des biens plus durables. Or les compositions chimiques de ces produits doivent être évaluées et approuvées de la façon la plus sécuritaire et fiable qui soit, sans toutefois compromettre l’efficacité et la fonction du produit.

Bien que nous ayons à l’égard du projet de loi S-5 des préoccupations qu’il sera plus opportun d’examiner lors des consultations pour la mise en œuvre de la loi, nous pensons que, dans l’ensemble, les modifications de la LCPE en vertu du projet de loi S-5 actuel, en maintenant l’approche fondée sur les risques pour la gestion des produits chimiques, sont conformes aux normes. En effet, cette approche demeure la norme la plus sécuritaire et fiable pour garantir un environnement sain et sécuritaire pour les Canadiens. Ces normes sont une priorité absolue pour les manufacturiers canadiens dans la conception et la fabrication des produits essentiels à notre quotidien.

J’ai chanté les louanges de l’approche fondée sur les risques, mais en quoi consiste-t-elle? L’approche fondée sur les risques évalue s’il peut y avoir un risque d’exposition à un danger, le contexte dans lequel ce risque surviendrait et les probabilités qu’il survienne. L’approche fondée sur les risques pour la gestion des produits chimiques maintenue dans le cadre du projet de loi S-5 reconnaît qu’il faut laisser aux experts le pouvoir de mesurer toutes les données probantes lors de l’évaluation scientifique des substances, de l’évaluation des risques et des activités de gestion des risques. Il est important pour les Canadiens d’avoir la certitude que les substances utilisées et améliorées par les manufacturiers sont rigoureusement évaluées et répondent aux normes réglementaires. Cela maintiendra la confiance des Canadiens dans les produits qu’ils utilisent.

Enfin, comme nous l’avons exprimé plus tôt, s’il est vrai que Manufacturiers et Exportateurs Canada serait globalement satisfait que le projet de loi S-5 soit adopté tel quel, nous avons de nombreuses recommandations supplémentaires qu’il sera plus opportun d’examiner lors des consultations pour la mise en œuvre de la loi. Parmi celles-ci, nous soulignons qu’il est essentiel que les produits importés du Canada soient soumis aux mêmes normes que les produits fabriqués au pays. Pour assurer une concurrence équitable entre les entreprises canadiennes et étrangères, ainsi que pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens, il faut que les normes des produits importés au Canada soient identiques à celles des produits achetés au Canada. En d’autres mots, le Canada doit veiller à ce que ses manufacturiers puissent soutenir la concurrence autant à l’échelle nationale que mondiale, selon des règles du jeu les plus équitables possible. Au Canada, nous devrions avoir l’assurance que les produits que nous achetons et sur lesquels nous comptons ont satisfait à certaines normes de contrôle. C’est pourquoi dans nos recommandations pour l’étape de la mise en œuvre de cette mesure législative nous insistons vivement sur l’importance de concevoir des politiques et une réglementation qui indiquent clairement que les normes des produits importés doivent être du même niveau que les normes élevées auxquelles les produits fabriqués localement sont soumis.

En conclusion, je vous témoigne mon appui à adopter le projet de loi S-5 sous sa forme actuelle. En maintenant l’approche fondée sur l’évaluation et la gestion des risques, le projet de loi veille globalement à assurer une conformité réglementaire sûre et adéquate dans le but de protéger la santé et la sécurité des Canadiens et de notre environnement, ce qui est au sommet des priorités des manufacturiers canadiens.

Je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer devant vous aujourd’hui. Je répondrai volontiers à toutes vos questions.

Le président : Merci.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci beaucoup à nos témoins. Ma question s’adresse à M. Thurlow, de Dow Chemical. J’aimerais revenir sur la liste de surveillance que vous avez mentionnée.

On le comprend, le système canadien est moins strict que le système européen. Nous évaluons les risques plutôt que d’utiliser le principe de précaution. C’est déjà un système plus acceptable pour les compagnies.

Par contre, ce que je ne comprends pas, c’est la résistance à cette liste de surveillance, et surtout au fait qu’on y inscrive les substances qui pourraient, selon différents indices, devenir toxiques ou qui devront être réévaluées au cas où elles seraient toxiques. Il me semble que c’est comme cela que les choses fonctionnent quand la science avance.

Je vais prendre un autre exemple, soit celui des cigarettes. Pendant longtemps, on a cru que fumer la cigarette n’était pas dangereux. De plus, il y a toute une période de flottement où l’on peut se demander si ladite substance est dangereuse ou non. Donc, si l’on ne met pas une substance sur une liste en disant : « Attention! Cette substance pourrait être toxique ou dangereuse, soit pour l’environnement, soit pour les personnes », il me semble que l’on va à l’encontre de la science qui évolue dans le temps.

[Traduction]

M. Thurlow : Merci beaucoup de votre question, madame la sénatrice. Il n’y a vraiment rien d’inapproprié dans la formulation de votre question.

Nous avons toujours été préoccupés par la redondance que crée la liste de surveillance. Le gouvernement dispose déjà de tous les pouvoirs nécessaires pour soumettre ces types de produits chimiques à des restrictions et pour les identifier. Il est en train de créer une autre liste à laquelle ajouter ces produits chimiques. Comme M. LeRoux l’a dit dans son exposé, et comme M. Moffet l’a dit dans son exposé du 28 avril, les mécanismes actuels sont redondants.

Un avis de nouvelle activité énumérant clairement les produits chimiques permettra de s’assurer que les niveaux d’exposition au Canada ne changent pas. Comme je l’ai dit dans mon témoignage, si vous voulez envoyer un signal à l’industrie indiquant qu’un produit chimique en particulier ne sera pas accepté au Canada, un avis de nouvelle activité est parfaitement adéquat parce qu’il crée un obstacle réglementaire très important à l’ajout de ce produit et à l’utilisation d’un volume plus important que celui qui est actuellement utilisé au Canada, s’il est effectivement utilisé dans ce pays.

C’est le dernier point que je voulais soulever au sujet de la liste de surveillance. Si on découvre qu’une substance n’est pas commercialisée au Canada et qu’on y ajoute un avis de nouvelle activité, il sera très difficile de commencer à l’utiliser.

La sénatrice Miville-Dechêne : J’aimerais apporter une précision. La liste n’est-elle pas plus transparente que l’autre méthode dont vous parlez pour signaler un problème potentiel? On parle ici de transparence et du fait que les consommateurs ou d’autres pourraient consulter cette liste, qui énumérerait tous les produits.

M. Thurlow : Les consommateurs et tout un chacun peuvent consulter les dispositions relatives aux nouvelles activités. Tout est sur le site Web public.

La sénatrice Miville-Dechêne : Est-il aussi facile de consulter? Je ne le crois pas.

M. Thurlow : Je pense qu’il faut une feuille de route pour l’ensemble du site Web des substances chimiques, mais c’est un problème qui concerne les universitaires. Je ne crois pas qu’une liste de surveillance bien en vue serait plus facile à appréhender que les autres aspects présents sur ce site Web.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup à nos témoins d’être avec nous ce matin. Ma question s’adresse à M. Thurlow. Je vais accepter la proposition que vous avez faite de nous expliquer les mécanismes actuels d’établissement des priorités. Comme je l’ai dit aux témoins du groupe précédent, les mécanismes d’établissement des priorités seront essentiels, et les professionnels de la santé ont exprimé de réelles préoccupations à ce sujet en soulignant la nécessité d’établir des délais et de faire des substitutions plus sécuritaires.

Si, comme vous l’avez proposé, vous pouviez parler des mécanismes actuels d’établissement des priorités, ce serait formidable, merci.

M. Thurlow : Je me ferai un plaisir de vous aider, madame la sénatrice. À l’heure actuelle, la loi prévoit un système très robuste. Il y a des caractéristiques législatives qui obligent les ministres à examiner les substances en fonction des activités d’autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Par exemple, si un instrument de gestion des risques associés aux espèces envahissantes est proposé par un autre pays, le gouvernement doit l’examiner pour voir s’il serait approprié de le mettre en place au Canada.

Dans mon témoignage, j’ai parlé de la disposition adressée au « ministre ». Il n’existe actuellement aucun mécanisme de reddition de comptes au public qui permettrait à Scott Thurlow de lever la main et de dire : « Monsieur le ministre, j’aimerais que vous examiniez la substance suivante. » Nous pensons que c’est un outil très important, mais ce n’est qu’un outil, n’est-ce pas? Et les ministres ont le pouvoir discrétionnaire de dire : « Non, nous n’allons pas faire ceci, et la raison pour laquelle nous n’allons pas le faire est que nous l’avons fait l’an dernier ou il y a deux ans, ou que cette substance est peu utilisée au Canada. »

Cela nous ramène à la question des données. Le gouvernement du Canada détient beaucoup de données. Il examine ces substances et détermine où il pourrait y avoir des expositions préoccupantes.

J’aimerais voir ce processus prioritaire du Programme d’aide à la recherche industrielle s’étendre un peu plus longtemps parce que cela donnerait à l’industrie le temps dont elle a besoin pour effectuer les essais nécessaires pour répondre à toute préoccupation concernant les indicateurs de danger particuliers qui pourraient être associés au produit chimique en question.

À l’heure actuelle, nous avons une idée approximative de ce qui sera avancé au cours des 18 à 24 prochains mois, mais si nous pouvions rendre cela un peu plus robuste et un peu plus facile à comprendre, cela pourrait nous aider à générer des données supplémentaires.

La sénatrice Seidman : Je crois que c’est M. LeRoux, dans le groupe de témoins précédent, qui a exprimé des préoccupations au sujet des délais en disant que s’ils étaient trop courts, les choses seraient interrompues avant que des décisions appropriées soient prises.

Monsieur Thurlow, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Thurlow : Il y a deux types de délais. Les échéanciers du gouvernement et ceux de l’industrie. Nous avons une directive du Cabinet sur la rationalisation de la réglementation et des politiques réglementaires qu’il est important de suivre. Elle a été établie pour s’assurer que les obligations du Canada sont respectées lorsque le gouvernement fédéral traite avec les provinces et les partenaires internationaux.

Concernant les délais, il convient également de noter que les évaluations scientifiques prennent du temps. Par conséquent, si on vous donne très peu de temps pour effectuer une évaluation toxicologique rapide, il est parfois très difficile de respecter ces délais.

De temps à autre, on voit de forts pics de demandes de données, habituellement juste avant Noël. Vous avez alors très peu de temps pour répondre à toutes ces différentes consultations en même temps. Si nous pouvions rendre cela un peu plus prévisible, cela nous permettrait de répartir le fardeau de la paperasserie et de planifier un peu mieux les travaux scientifiques que l’industrie doit faire.

Le président : Merci.

Le sénateur Arnot : Cette question s’adresse à tout le monde, aux trois témoins, parce que je veux savoir à quel point les autres témoins sont préoccupés par la liste de surveillance.

Monsieur Thurlow, vous considérez que la liste de surveillance est redondante et que l’avis de nouvelle activité suffit à traiter la question. Prenons l’hypothèse qu’une liste de surveillance sera mise en place et que vous devrez l’accepter, y a-t-il un compromis que vous pourriez proposer pour mieux définir le seuil ou le mécanisme pour qu’un produit soit inscrit ou retiré de la liste de surveillance. Un compromis qui respecterait cette hypothèse, mais aussi la préoccupation que vous exprimez?

M. Thurlow : Merci beaucoup, monsieur le sénateur, de votre question.

Il y aura certainement beaucoup de discussions et de consultations au sujet de l’utilisation de cette liste et de la façon dont les substances sont inscrites et retirées de la liste. D’après ce que je comprends, d’après la façon dont les fonctionnaires m’ont décrit la situation, la liste de surveillance vise précisément les substances qui ont fait l’objet d’une évaluation des risques concluant qu’elles ne posaient pas de problèmes particuliers d’exposition préoccupante au Canada. Ensuite, il y a des substances qui portent des indicateurs de danger signalant qu’en cas de nouvelle exposition, elles pourraient devenir toxiques à l’avenir.

Il y a deux réponses à cela. La première est que l’avis de nouvelles activités interrompt les choses. Deuxièmement, le libellé de l’article 64 traite justement lui aussi de cette question.

Donc, si les ministres procèdent à une évaluation des risques et constatent que le produit n’est pas toxique, et que plus tard, il y a une nouvelle exposition, ils peuvent procéder à une nouvelle évaluation des risques.

Je pense que les nouvelles activités, ou NAc, font le travail et qu’elles envoient un signal, mais je me ferai un plaisir de consulter les ministres pour m’assurer qu’il y a un processus valable pour qu’une substance soit inscrite sur la liste de surveillance et pour qu’elle en soit retirée.

Mme Bernholtz : À mon tour de répondre. Je vous remercie de la question, monsieur le sénateur.

Je suis d’accord avec M. Thurlow pour dire que de façon générale, nous ne croyons pas que la liste de surveillance apporte quoi que ce soit de plus que les avis de nouvelle activité. Dans l’ensemble, nous voulons simplement que les choses soient claires pour l’industrie. Je crois que Danielle Morrison a soulevé exactement ce sujet dans le précédent groupe de témoins, mais il nous faudrait un mécanisme clair pour l’ajout ou le retrait d’une substance de la liste de surveillance, et l’industrie a simplement besoin de cette précision. Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, nous croyons que le projet de loi S-5 est juste et approprié, et qu’il s’agit d’un détail qui peut être peaufiné à l’étape de la mise en œuvre du projet de loi.

Le président : Madame Coombs, vouliez-vous ajouter quelque chose?

Mme Coombs : Oui. Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de la question. Je pense que nous pourrions cesser de l’appeler la liste de surveillance. Je crois que cela serait un bon début. Cela semble être une source d’angoisse parce que nous avons déjà une liste, une liste des nouvelles activités à laquelle le public peut avoir accès. Je pense qu’à l’avenir, les dispositions relatives aux nouvelles substances ou aux nouvelles activités seront prises en compte, et il y aura aussi une disposition qui sera imposée à l’industrie pour qu’elle puisse communiquer cette information tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

Il y a donc des critères précis qui existent déjà et qui seront développés à l’avenir, et ce pourrait être la voie à suivre. Je pense que nous devons simplement commencer à changer la façon dont nous qualifions cela dans le lexique de la LCPE. Merci, monsieur le président.

Le sénateur Kutcher : Mes questions s’adressent à Mme Bernholtz. Comment les produits qui sont actuellement importés au Canada sont-ils évalués pour ce qui est des effets nocifs sur l’environnement et la santé?

Mme Bernholtz : Les points que j’ai soulevés ne visaient pas nécessairement à cibler ou à exprimer une certaine préoccupation. Nous voulions simplement que ce soit clairement énoncé afin qu’il n’y ait aucun doute quant au fait que les produits importés au Canada seront assujettis à la même norme que les produits fabriqués au pays. Il ne s’agissait pas de dénoncer quelque chose qui n’a pas lieu. Nous voulons simplement que ce soit clair.

Le sénateur Kutcher : Je suis désolé. Vous n’étiez pas visée.

Mme Bernholtz : Et je ne vise personne d’autre.

Le sénateur Kutcher : Je vous demande simplement comment cela se passe.

Mme Bernholtz : Je pense qu’il faudrait tout de suite inclure dans la loi un libellé précis indiquant que nous avons ces procédures d’examen ici, et qu’un produit importé au Canada doit respecter les mêmes normes. Nous voudrions que cela soit inscrit directement dans la loi.

Le sénateur Kutcher : Savez-vous qui fait cette évaluation à l’heure actuelle?

Mme Bernholtz : Malheureusement non. Il faudrait que je vérifie et que je vous recontacte à ce sujet. Au bout du compte, nous voudrions un libellé clair pour nous assurer que, si nous imposons ces normes, celles-ci ne s’appliqueront pas seulement à ce qui est fabriqué au pays, mais à tout ce qui est fabriqué, utilisé et consommé au Canada.

Le sénateur Kutcher : Bien sûr. Merci. Le but de la question était d’essayer de déterminer si le Canada a la capacité, dans le cadre de l’examen accru prévu dans le projet de loi S-5, d’appliquer ce genre d’évaluation des substances toxiques et nuisibles pour la santé et l’environnement aux produits importés.

Mme Bernholtz : Très bien. Désolée, je vois que Mme Coombs a levé la main. Je vais donc répondre rapidement et lui céder la parole. Je ne suis pas certaine de la façon dont cela serait mis en place sur le plan de la réglementation, mais au bout du compte, nous voulons un libellé clair et nous nous attendons à ce que, si nous établissons ces normes élevées en matière de santé et de sécurité, elles s’appliquent, quel que soit le lieu de fabrication d’un produit.

Je cède la parole à Shannon Coombs. J’ai vu votre main.

Mme Coombs : Monsieur le président, si vous me permettez d’intervenir, je dirais que d’après ce que comprend l’Association canadienne de produits de consommation spécialisés, l’exigence actuelle est que toutes nos substances doivent respecter la LCPE, et tous nos produits finis doivent respecter la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation, la Loi sur les aliments et drogues et la Loi sur les produits antiparasitaires. Je pense que le projet de loi S-5 met en lumière la loi la plus adaptée et le ministre le mieux placé pour régler ces problèmes d’importation par d’autres moyens législatifs. Est-ce que cela vous aide?

M. Thurlow : Et si je pouvais appuyer Mme Coombs...

Le président : Madame la sénatrice Galvez?

La sénatrice Galvez : Je suis plutôt d’accord avec vous pour dire qu’il y a beaucoup d’information et que les données sont difficiles d’accès. Je sais aussi que l’Europe et les États-Unis ont beaucoup plus d’information, et qu’elle est plus facile à consulter. Pour vous dire la vérité, dans le cadre de mon travail de professeure de génie de l’environnement, lorsque je veux connaître la toxicité d’une substance, je me tourne vers l’Agence pour la protection de l’environnement des États-Unis ou vers son homologue européen parce qu’il est très difficile de trouver l’information au Canada.

Je pense à un amendement qui faciliterait l’accès à cette information. Cela dit, je pense qu’il y a un problème concernant la diffusion de certains renseignements. Je connais par cœur tous les détails de ce qui s’est passé à Lac-Mégantic, et j’ai été consterné de voir que les pompiers ne savaient pas quelles substances se trouvaient dans ces wagons. Ils ont risqué leur vie. Nous avons dû attendre que le Bureau de la sécurité des transports dise ce qu’il y avait dans ces wagons, alors que tout le monde aurait dû le savoir. Tout le monde aurait dû savoir que cette substance était dangereuse.

Comment pouvons-nous corriger cette situation? Selon vous, quelle serait la meilleure façon de corriger cette situation, de rendre accessible cette information très importante pour la santé des humains et pour l’environnement?

M. Thurlow : Je ne suis pas au courant des détails que vous mentionnez, madame la sénatrice Galvez, mais je suis très surpris que les collectivités locales traversées par le chemin de fer n’aient pas cette information. Cela fait clairement partie du programme de Gestion responsable. En ce qui concerne nos substances, les exigences en milieu de travail sont bien en évidence, surtout pour le transport des marchandises dangereuses.

Je ne peux pas me prononcer sur les détails de cet exemple, mais ce n’est certainement pas conforme aux principes du programme de Gestion responsable.

Rapidement, je voulais appuyer la réponse de Mme Coombs. Absolument, les produits qui sont sur les tablettes doivent être conformes. La question, monsieur le sénateur Kutcher, est de savoir qui veillera à ce qu’ils le soient? Est-ce l’importateur officiel, ou l’Agence des services frontaliers du Canada a-t-elle également un rôle à jouer?

La sénatrice Galvez : Madame Bernholtz, tout le monde dit qu’il y a de l’information disponible, mais qu’elle est difficile à trouver. Comment pouvons-nous résoudre le problème et faciliter l’accès aux données pour que le public soit au courant?

Mme Bernholtz : Merci. Je suis tout à fait d’accord avec M. Thurlow. Encore une fois, cette histoire m’étonne. Cette situation n’aurait pas dû se produire. Au bout du compte, lorsque nous parlons de renseignements commerciaux confidentiels, il s’agit de secrets commerciaux, et non d’une situation comme celle-là.

Mme Coombs : Oui. Merci. Je pense que la sénatrice soulève un très bon point au sujet de l’accès au site Web canadien — le site Web « .ca ». Il est un peu difficile d’y trouver de l’information sur les substances. Je me considère assez bien au fait du monde de la chimie. Lorsque je cherche des choses, j’ai moi aussi de la difficulté à les trouver. Tout ce que nous pouvons faire pour regrouper l’information sur la LCPE et les substances afin de faciliter l’accès des Canadiens à l’information serait utile. Nous faisons également la promotion du processus du Plan de gestion des produits chimiques sur notre site Web Healthy Cleaning 101.

Le sénateur Gignac : Ma question s’adresse à M. Thurlow de Dow Chemical Canada. Votre entreprise est présente dans 30 pays différents, si j’ai bien compris. Les industries chimiques sont très intégrées à l’échelle mondiale. Je comprends que la liste de surveillance vous dérange, ou disons que vous n’êtes pas très à l’aise. De la même façon, je suppose que le ministre a fait son travail, ou du moins que les fonctionnaires ont fait leur travail. Est-ce quelque chose qui existe dans d’autres pays, ou serait-ce un précédent d’avoir un pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques ou un ministre qui crée une liste de surveillance pour votre industrie?

M. Thurlow : Qu’on me corrige si je me trompe, mais à ma connaissance, il n’y a pas d’autre liste semblable au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Je dois également rappeler aux sénateurs que le Plan de gestion des produits chimiques du Canada est unique en ce sens qu’il relève, en vertu de la Constitution, du chef de compétence en matière de droit pénal. Lorsque nous examinons les autres pays, nous devons nous rappeler que leurs chefs de compétence constitutionnels ou leurs systèmes de réglementation suivent une tradition juridique différente. Leur gestion des produits chimiques ne relève pas forcément du droit pénal. D’accord?

Cela dit, comme M. Masterson et le ministre l’ont dit, le Canada est l’étalon-or mondial en ce qui concerne la quantité de substances que nous avons évaluées, catégorisées et soumises à une gestion des risques.

Si quelqu’un du ministère me corrige en me disant qu’il y a une liste de surveillance dans un autre pays, je l’accepterai volontiers, mais je ne crois pas qu’elle existe.

Le président : Si vous me permettez de vous interrompre, monsieur le sénateur Gignac, la question de la facilité d’obtenir de l’information et celle de savoir s’il existe une liste de surveillance est importante pour de nombreux sénateurs.

Monsieur Thurlow, vous dites qu’à votre connaissance, ce n’est pas le cas. Vous pensez qu’aucun autre pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques n’utilise une liste. Puis-je vous demander de vérifier cette réponse et de nous envoyer une confirmation écrite? Une telle liste existe-t-elle ailleurs? Quelles solutions d’autres pays ont-ils choisies pour rendre le processus plus transparent? Puis-je vous demander de répondre à cette question par écrit après avoir vérifié?

M. Thurlow : Je serais heureux de le faire. J’aimerais également souligner qu’il a été fait mention du système européen. Le système européen impose en fait à l’industrie la responsabilité d’évaluer tous ses produits chimiques et de présenter ensuite cette information aux États membres pour savoir si les produits chimiques devraient être réglementés.

Je préfère de loin le modèle canadien où c’est le gouvernement du Canada qui fait cette évaluation et qui élabore l’outil de réglementation. Cela accroît certainement la confiance des citoyens à l’égard des raisons pour lesquelles ce système existe. Je m’engage, monsieur le président, à faire exactement ce que vous me demandez.

[Français]

Le sénateur Gignac : On présente un nouveau concept. Par conséquent, j’aimerais vraiment savoir. Je suis en faveur du projet de loi S-6. Toutefois, comme c’est nouveau, on est toujours à l’affût de conséquences inattendues qui pourraient se produire. J’attendrai les réponses, et on demandera également au ministère de faire ses devoirs. J’aimerais bien avoir cette information.

[Traduction]

Le président : Nous avons terminé les questions, alors je tiens à remercier les témoins de nous avoir fait part de leurs connaissances, de nous avoir aidés à comprendre le projet de loi et d’être venus aujourd’hui.

Nous allons maintenant passer à huis clos.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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