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RIDR - Comité permanent

Droits de la personne

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 2 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 24 octobre 2011

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui, à 16 h 8, pour surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne (sujet : les programmes fédéraux de soutien aux activités sportives et récréatives pour enfants et adolescents handicapés).

Le sénateur Mobina S. B. Jaffer (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Je voudrais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs et membres du public qui assistent à cette séance du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Je suis le sénateur Mobina Jaffer. Je viens de Colombie-Britannique et je suis la présidente de ce comité.

Le 15 mars 2001, le Sénat a modifié son Règlement pour créer un nouveau Comité permanent des droits de la personne. Ce comité joue divers rôles, par exemple en éduquant le public, en assurant l'application et le respect des principes et des lois régissant les droits de la personne au niveau international et en veillant à ce que les lois et les politiques soient bien appliquées et soient conformes à la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Le comité entreprend une étude des politiques et des programmes relatifs aux personnes handicapées dans le sport et les activités récréatives, en portant une attention particulière aux besoins des enfants et des jeunes de moins de 25 ans et aux obligations du Canada en vertu du paragraphe 30(5) de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Nous procéderons à l'audition de notre premier groupe de témoins en commençant par la représentante des Nations Unies, Akiko Ito, chef, Secrétariat pour la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Bienvenue parmi nous. Nous vous remercions pour le temps que vous nous consacrez aujourd'hui. Nous savons que vous êtes très occupée. Nous avons hâte de vous entendre, après quoi nous aurons des questions à vous poser.

Akiko Ito, chef, Secrétariat pour la Convention relative aux droits des personnes handicapées, Nations Unies : Nous vous disons bonjour à partir du siège des Nations Unies à New York. Vous m'avez déjà présentée comme Akiko Ito, du Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies. Je voudrais remercier M. Daniel Charbonneau et le personnel de son bureau des efforts qu'ils ont déployés pour faciliter notre participation à cette réunion.

C'est avec plaisir que nous participons à ces audiences du Comité sénatorial permanent des droits de la personne du Sénat du Canada pour discuter de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et des responsabilités générales des États signataires à l'égard de sa mise en oeuvre au niveau national. Je voudrais féliciter le comité d'insister sur l'amélioration des politiques et des programmes relatifs aux droits des personnes handicapées conformément à la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Dans le cadre de son mandat, l'ONU a travaillé, pendant des décennies, en collaboration étroite avec les gouvernements du monde entier — avant même le début du processus en vue de la conclusion d'un traité — ainsi qu'avec le gouvernement du Canada pour promouvoir les droits humains des personnes handicapées. Par exemple, le Canada a joué un rôle très important, un rôle phare, aux Nations Unies pendant et après l'Année internationale des personnes handicapées, il y a 30 ans, en 1981, dans le cadre de la Décennie des personnes handicapées, décrétée par les Nations Unies.

Le Canada a également donné un très bel exemple au reste de la communauté internationale en ce qui concerne la protection des droits des personnes handicapées tout au long de la décennie et après que la Décennie des personnes handicapées des Nations Unies a suscité un autre document important, intitulé Règles de standardisation pour l'égalisation des chances des personnes handicapées, qui a été suivi, récemment, de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Nous avons eu le plaisir de travailler avec un bon nombre de Canadiens tels que le regretté Henry Enns et M. Steve Estey, le leader mondial actuel. Nous avons eu aussi le plaisir de travailler avec M. Rick Hansen, qui est un champion mondial de la cause du sport et des handicaps.

Si vous le permettez, je voudrais parler du cadre international normatif des Nations Unies visant à promouvoir les droits des personnes handicapées. Comme vous le savez peut-être, le travail que l'ONU accomplit dans le domaine du handicap est profondément enraciné dans sa charte qui lui demande de promouvoir le respect universel des droits de l'homme, de même que le progrès social et le développement, pour l'avènement d'un monde pacifique et prospère. En poursuivant ces objectifs, les Nations Unies ont reconnu depuis longtemps l'interdépendance de ces enjeux et cherchent donc à promouvoir les droits des personnes handicapées. Les Nations Unies ont travaillé au respect universel des droits humains des personnes handicapées en prenant des mesures en vue de l'inclusion des personnes handicapées dans tous les aspects de la société et du développement.

La reconnaissance de la situation des personnes handicapées comme une question touchant à la fois les droits de l'homme et le développement, de même qu'une meilleure compréhension des obstacles énormes auxquels les personnes handicapées sont confrontées ont débouché, en 2006, sur la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif. En adoptant cette convention par consensus, la communauté internationale s'est engagée à explorer ses buts et objectifs afin de promouvoir et de réaliser l'objectif de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Cette convention, qui est entrée en vigueur en 2008, est devenue le premier traité relatif aux droits de l'homme fournissant un cadre normatif détaillé et complet pour la protection et la promotion des droits des personnes handicapées. C'est le premier instrument juridiquement contraignant visant les droits des personnes handicapées ainsi que les activités récréatives, de loisir et sportives mentionnées à l'article 30 et qui font l'objet de vos audiences d'aujourd'hui.

Le droit de participer sur un pied d'égalité aux activités récréatives, de loisir et sportives revêt une importance cruciale pour l'autonomisation des personnes handicapées. La popularité des activités sportives et les avantages qui en découlent sur le plan physique, social et économique font du sport une plateforme et un catalyseur exceptionnels pour favoriser l'inclusion et le bien-être des personnes handicapées au sein de la société et leur participation au développement. L'accès et la participation des personnes handicapées aux activités sportives peut dissiper les préjugés et favoriser l'avancement des droits des personnes handicapées dans tous les aspects de la vie et du développement. Cependant, pour permettre l'accès aux activités récréatives, de loisir et sportives, il faut éliminer un grand nombre d'obstacles, y compris les préjugés sociaux.

Conformément à cet engagement, les Nations Unies ont cherché à éliminer ces obstacles, de concert avec les gouvernements et la société civile, pour que le sport permette de rendre la société et le développement plus solidaires. Pour vous donner un exemple des activités des Nations Unies les plus récentes à cet égard, notre Département des affaires économiques et sociales a organisé, en juin dernier, une table ronde sur les sports comme instrument de développement solidaire à laquelle participaient des représentants des États membres de différentes régions, des organismes de la société civile et des athlètes qui voient dans le sport un moyen d'intégrer les personnes handicapées dans la vie sociale.

Malgré l'engagement de la communauté internationale et la convention, dans bien des cas, il n'y a pas encore eu de changement véritable sur le terrain, y compris en ce qui concerne le droit important de participer aux activités récréatives, de loisir et sportives. Certains progrès ont été réalisés, mais selon le dernier rapport de la Banque mondiale et de l'OMS sur le handicap, la situation de plus d'un million de personnes handicapées dans le monde reste précaire. La majorité de ces personnes vivent dans la pauvreté et restent exclues de la société et du développement. De nombreux obstacles restent dressés, notamment sur les plans physique, environnemental, comportemental et institutionnel et ces obstacles empêchent les personnes handicapées de participer pleinement à la société en tant que membres à part entière.

Aux Nations Unies, alors que l'échéance de 2015 pour la réalisation des objectifs de développement du millénaire se rapproche de plus en plus, la communauté internationale a entamé des discussions préliminaires sur un cadre international pour le développement après 2015. C'est l'occasion, pour toutes les parties prenantes, de promouvoir l'inclusion des personnes handicapées dans tous les aspects du développement économique et social conformément aux objectifs de la convention.

L'Assemblée générale a proposé une réunion de haut niveau sur le handicap et le développement pour sa 67e session. Cette réunion surviendrait à un moment très opportun, car elle fournirait aux États membres la possibilité de maximiser les résultats en matière de développement pour les personnes handicapées d'ici 2015 et de prendre des mesures en faveur de l'élaboration d'un cadre international assurant l'inclusion des personnes handicapées après 2015.

Pour conclure, je tiens à répéter que le défi qui se pose véritablement maintenant, et celui auquel s'attaque, je crois, le Comité sénatorial des droits de la personne, consiste à faire en sorte que les buts et objectifs de la Convention relative aux droits des personnes handicapées se traduisent par des mesures concrètes qui se répercuteront directement sur la vie des personnes handicapées, dans leur collectivité, aux niveaux local, national, régional et international.

La présidente : Merci beaucoup pour votre déclaration.

Nous allons entamer les questions. Quel conseil donneriez-vous aux gouvernements pour rendre la mise en oeuvre de l'article 30 plus concrète et quels effets cela pourrait-il avoir?

Mme Ito : À mon avis, la mise en oeuvre de l'article 30 pourrait peut-être être également envisagée en tenant compte d'autres articles. Comme nous venons de le voir, il s'agit non seulement des activités sportives et récréatives, mais aussi d'un instrument d'autonomisation qui fournit une base solide pour la mise en oeuvre des autres articles. Par exemple, je viens de mentionner la table ronde qui a eu lieu aux Nations Unies et où des pays sont venus nous apporter des idées nouvelles pour la mise en oeuvre de cet article et nous parler de mesures qui ont été prises. Nous pourrions beaucoup apprendre les uns des autres au niveau mondial, mais cela pourrait également être le cas au niveau national étant donné qu'au Canada, par exemple, il y a beaucoup d'initiatives différentes qui ont été prises dans les diverses provinces. Ce genre d'apprentissage mutuel représente peut-être une façon d'enrichir la mise en oeuvre en fournissant des exemples concrets. Ces exemples pourraient donner une idée des différentes mesures qui pourraient être prises pour la mise en oeuvre.

La présidente : Comme vous le savez, le Canada n'a pas signé le protocole facultatif de la Convention relative aux personnes handicapées. J'aimerais que vous nous disiez quelle est l'importance de cette absence de ratification et, si le Canada ne signait pas le protocole facultatif, quelles conséquences cela aurait pour les Canadiens.

Mme Ito : Bien entendu, quand ils ratifient la convention, tous les membres sont également invités à ratifier le protocole facultatif. Je préfère ne pas me lancer dans une interprétation des conséquences que cela aurait pour le système canadien si vous ne ratifiez pas le protocole facultatif, même si vous avez ratifié la convention. Le protocole facultatif fournit un mécanisme distinct qui pourrait donner des exemples concrets pour la promotion de la protection des droits de l'homme. Toutefois, de nombreux États membres abordent le processus de ratification de façon différente.

Mon collègue du Haut-Commissariat aux droits de l'homme s'est joint à nous. Si vous le permettez, nous pourrions peut-être lui demander de participer à notre discussion.

La présidente : Merci beaucoup de vous joindre à nous. Puis-je vous demander de bien vouloir vous présenter, de nous parler un peu de vos fonctions et de nous faire part de vos opinions?

James Turpin, agent des droits de la personne, Haut-Commissariat aux droits de l'homme : Je m'appelle James Turpin. Je travaille au Haut-Commissariat aux droits de l'homme, à New York, mais avant cela, je travaillais à la section des traités du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, à Genève. C'est l'élément du Secrétariat des Nations Unies qui dessert les organes de surveillance des traités relatifs aux droits de l'homme. C'est un élément essential de chacun des traités relatifs aux droits de l'homme, y compris la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Vous demandiez, je crois, s'il était souhaitable ou non de ratifier le protocole facultatif en même temps que la convention. Comme l'a dit Mme Ito, c'est à chaque État qu'il revient d'en décider en fonction de ses propres considérations.

La raison pour laquelle une disposition permet au comité des droits des personnes handicapées d'examiner les plaintes émanant des particuliers, ce qui constitue le principal ajout contenu dans le protocole facultatif, est que certains États sont prêts à souscrire aux principales obligations de la convention, mais sans être encore prêts à accepter les communications émanant des particuliers. D'autre part, étant donné que la procédure permettant de porter ces communications devant le comité sous-entend que les recours nationaux ont été épuisés, cela veut dire qu'un certain délai s'écoule entre la ratification et le moment où les intéressés peuvent porter ces plaintes devant le comité.

Le haut-commissariat invite tous les États à ratifier le protocole facultatif ainsi que la convention, mais estime qu'il n'est pas indispensable de le faire en même temps. C'est à chaque État de décider à quel moment il souhaite permettre à ses citoyens d'exercer, en dernier ressort, le droit de porter plainte devant cet organisme ultime, à Genève, quant à la façon dont la convention est mise en oeuvre.

Ce qu'il faut surtout retenir, c'est que le protocole facultatif accorde aux particuliers le droit de porter plainte devant le comité. Cette disposition supplémentaire est très avantageuse pour tout État qui cherche à mettre en oeuvre pleinement les dispositions de la convention, car cela permet au comité d'examiner les cas particuliers et de donner une opinion d'expert quant à savoir si une situation donnée respecte ou non la convention. Autrement, la procédure de rapport de l'État revêt un caractère beaucoup plus général et ne peut pas entrer dans les détails d'un cas particulier.

La présidente : Merci de nous avoir éclairés à ce sujet.

Le sénateur Martin : Je vous remercie tous les deux pour vos réponses.

Mme Ito a mentionné le défi à relever pour tous les États membres qui doivent voir comment traduire ces objectifs et ces conventions en actes concrets. En tant qu'ancienne éducatrice, je pense au programme des écoles secondaires de premier et second cycles du Canada qui comprend beaucoup de renseignements sur les Nations Unies et le bon travail que vous accomplissez.

Les changements d'attitude que nous aimerions voir au sein de la société peuvent se produire dès l'enfance et j'aimerais donc que vous nous parliez du travail que vous faites sur le plan de l'éducation pour veiller à ce que ces objectifs et ces conventions soient présentés de façon à intéresser le grand public, surtout l'auditoire captif des écoles, afin que la prochaine génération change vraiment d'attitude. Si vous pouviez nous parler de certaines initiatives éducatives de ce genre et de ce que vous avez vu, cela m'intéresserait beaucoup.

Mme Ito : L'éducation est une de nos priorités pour sensibiliser le public, comme vous venez de le mentionner. Au niveau mondial, nous avons pris des mesures pour promouvoir notre législation par l'entremise de l'éducation inclusive et promouvoir les droits des personnes handicapées dans ce domaine en organisant un certain nombre d'activités centrées autour d'un deuxième mécanisme de surveillance qui s'appelle la Conférence des États parties à la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Ce mécanisme fournit un vaste forum d'échanges non seulement entre les États membres, mais avec la société civile et les spécialistes de l'enseignement spécialisé ou les praticiens de domaines d'éducation différents.

Nous avons fourni une tribune à ces représentants du gouvernement et spécialistes de l'éducation, de même qu'à nos collègues de l'UNESCO et de la Banque mondiale qui ont lancé cette initiative pour promouvoir l'éducation inclusive, il y a deux ans. Nous réunissons ces intervenants pour discuter de moyens visant non seulement à mettre en oeuvre la convention dans le cadre des obligations juridiques, mais aussi à promouvoir plus largement l'idée de l'éducation inclusive et des activités inclusives dans tous les aspects du travail que nous faisons en tant que pays ou spécialistes de l'éducation. Nous utilisons ces mécanismes institutionnels pour mieux promouvoir le droit à l'éducation des personnes handicapées.

Une des dernières activités que nous avons organisées était centrée sur les jeunes filles handicapées et la formation aux TIC, par exemple, ainsi que la réussite scolaire. Nous avons organisé cette activité avec des collègues de l'UNESCO, de la Banque mondiale, des organismes de défense des droits de l'homme ainsi que des spécialistes des TIC, de même que des champions et praticiens de l'éducation pour promouvoir l'idée que l'éducation est un droit fondamental pour les enfants handicapés. Nous avons des mesures législatives pour atteindre notre but, mais quand nous discutons avec les États membres, les spécialistes ou qui que ce soit d'autre, nous constatons très souvent que nous devons changer l'attitude des gens et il est donc très important de mieux sensibiliser le public. Si les gens ne savent pas et ne comprennent pas l'importance de l'éducation inclusive et du droit à l'éducation pour les personnes handicapées et tous les enfants, nous ne pourrons pas atteindre les objectifs de développement ou les objectifs sociaux que nous visons.

Le sénateur Martin : Je voudrais vous signaler que cette séance a lieu au bon moment, car Rick Hansen viendra sur la Colline demain pour poursuivre sa traversée du Canada afin de célébrer le 25e anniversaire de sa Tournée mondiale. C'est maintenant toute la nation qui doit participer à cette tournée.

Mercredi, un groupe de sensibilisation va travailler avec l'Association canadienne des paraplégiques. La journée parlementaire en fauteuil roulant aura cours une nouvelle fois pour mieux sensibiliser le public. J'ai vu beaucoup d'initiatives de ce genre au Canada. Comme je l'ai dit, l'éducation est, à mon avis, un des principaux moyens d'amener la prochaine génération de Canadiens et de gens du monde entier à changer d'attitude au sujet de l'inclusion et du handicap. Je vous remercie pour votre témoignage d'aujourd'hui.

La présidente : Nous voulons vous remercier tous les deux, madame Ito et monsieur Turpin, pour votre intervention. Je suis certaine que vos observations nous serons utiles pour rédiger notre rapport. Merci d'avoir mis du temps à notre disposition.

Je voudrais accueillir le groupe de témoins suivant, qui représente la Commission canadienne des droits de la personne. Il s'agit de Karen Mosher, secrétaire générale; Harvey Goldberg, chef d'équipe, Initiatives stratégiques, et Philippe Dufresne, avocat-général, Division des services contentieux. Je vous remercie d'avoir pris la peine de venir nous voir.

Karen Mosher, secrétaire générale, Commission canadienne des droits de la personne : Nous apprécions vivement votre invitation. À propos du témoignage précédent, je voudrais vous présenter particulièrement Harvey Goldberg, qui a joué un rôle important dans l'élaboration de la convention et qui a passé beaucoup de temps, pour le compte de la Commission, à New York, où il a travaillé avec les divers intervenants. C'est moi qui vais parler, mais si vous avez des questions très complexes à poser au sujet de l'histoire ou du contexte de la convention, M. Goldberg se fera un plaisir d'y répondre.

[Français]

Je vous remercie de donner à la Commission canadienne des droits de la personne l'occasion de vous parler aujourd'hui alors que vous étudiez les obligations du Canada en vertu du paragraphe 30(5) de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Puisque nous devons être brefs, j'aimerais concentrer mon propos sur la pratique du sport en tant que droits de la personne.

[Traduction]

Je mentionnerais que, par un heureux hasard, nous sommes le 24 octobre, Journée des Nations Unies, un organisme qui fête aujourd'hui le 66e anniversaire de sa fondation.

L'ONU est à l'origine de la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée en 1948. L'article 24 de la Déclaration consacre le droit« au repos et aux loisirs ». Ce droit était au départ considéré comme un droit du travailleur, visant l'amélioration des conditions de travail. Néanmoins, il est entendu aujourd'hui que le droit au repos et aux loisirs a des implications beaucoup plus vastes dans notre société. En permettant à tous les citoyens de participer à la vie culturelle, artistique et sportive de leur communauté, ce droit favorise des sociétés plus créatives, saines et productives.

Cependant, en droit international relatif aux droits de la personne, la situation ne s'est pas améliorée aussi vite, surtout dans le domaine du sport pour les personnes handicapées. D'où l'importance du paragraphe 30(5) de la convention. Pour la première fois, cette disposition prescrit, en droit international, que les États ont l'obligation de prendre des mesures concrètes pour promouvoir la pleine participation des personnes handicapées aux activités sportives.

[Français]

Pour bien comprendre le paragraphe 30(5), il faut considérer la convention dans le contexte global.

[Traduction]

La convention repose sur un nouveau concept fondamental du rôle des personnes handicapées dans la société. Pendant longtemps, les personnes handicapées étaient définies en fonction de leur handicap.

[Français]

Elles étaient considérées un peu comme étant dépendantes de la bienveillance de la société. On peut alors parler du modèle médical et caritatif parce qu'il met l'accent sur les mesures à prendre pour « corriger » le handicap grâce à la médecine ou aux activités de bienfaisance. Aux termes de la convention, les personnes handicapées deviennent plutôt détentrices de droits à plein titre.

[Traduction]

Par conséquent, les personnes handicapées sont des personnes qui ont des droits.

[Français]

Elles peuvent revendiquer ces droits, décider pour elles-mêmes par un consentement libre et éclairé et sont des membres actifs de la société.

[Traduction]

Les personnes handicapées ne sont pas cataloguées en fonction de leur propre handicap — leur pathologie individuelle —, mais elles sont plutôt considérées comme des citoyens à part entière.

Par conséquent, la convention ne cherche pas à trouver des façons de « corriger » leur handicap, mais insiste sur ce qu'il faut faire pour éliminer les obstacles — juridiques, sociaux et culturels — qui limitent leur capacité d'être des citoyens à part entière. Ce changement de paradigme est particulièrement nécessaire quand il est question de déficience et d'activité sportive. Dans les sports, les personnes handicapées ont trop souvent été définies en fonction de ce qu'elles ne pouvaient pas faire plutôt que de ce qu'elles pouvaient faire. Elles ont trop souvent été exclues ou négligées ou jugées seulement capables de chronométrer.

Heureusement, on assiste à un changement de mentalité. Nous l'avons tous constaté — et le comité a entendu les témoignages — quand Chantal Petitclerc est revenue des Jeux paralympiques, en 2008, avec cinq médailles d'or. La plupart des Canadiens ont vu en elle une remarquable athlète de haut niveau qui se trouve à être handicapée, et non l'inverse.

La convention aborde presque tous les aspects de la vie quotidienne, embrassant dans un même traité à la fois les droits politiques et civils et les droits économiques, sociaux et culturels.

Tous ces droits forment un tout par un ensemble de principes fondamentaux. Parfois considérés comme le coeur de la convention, ces principes sont les suivants : le respect de la dignité intrinsèque, de l'autonomie individuelle et de l'indépendance des personnes; la non-discrimination; la participation et l'intégration pleines et effectives à la société; le respect de la différence et l'acceptation des personnes handicapées comme faisant partie de la diversité humaine et de l'humanité; l'égalité des chances; l'accessibilité; l'égalité entre les hommes et les femmes; et le respect du développement des capacités de l'enfant handicapé et le respect du droit des enfants handicapés à préserver leur identité.

Il vaut la peine de s'attarder un instant aux particularités du paragraphe 30(5). Ce paragraphe ne concerne pas seulement le sport. Il cible plutôt les activités récréatives, de loisir et sportives. L'utilisation du terme « activités sportives » au lieu du terme « compétitions sportives » est importante, à notre avis. Conformément au principe de pleine inclusion, ce paragraphe vise à assurer la participation la plus complète possible à tous les aspects du sport.

La compétition de haut niveau en fait certainement partie, mais aussi les activités sportives et récréatives de tout genre. La pleine participation des personnes handicapées passe aussi par le rôle qu'elles jouent en tant qu'amateurs de sports, parents partisans, arbitres, entraîneurs et commentateurs.

Les alinéas a) et b) définissent une double approche. Alors que l'alinéa a) établit que les États doivent encourager et promouvoir la participation des personnes handicapées aux activités sportives ordinaires, l'alinéa b) exige que les États fassent en sorte aussi que les personnes handicapées aient la possibilité de participer à des activités sportives qui leur soient spécifiques. L'alinéa c) se fonde sur les principes d'accessibilité, de pleine participation et de non-discrimination pour exiger que tous les lieux où se déroulent les activités sportives soient accessibles.

Enfin, l'alinéa d) souligne la nécessité de faire en sorte que les enfants handicapés aient accès aux activités sportives, de loisir et récréatives. Bien que l'article 30 ne le dise pas en toutes lettres, il faut porter aussi une attention particulière à la participation des femmes et des filles.

[Français]

L'inclusion de tous ces droits dans la convention constitue une première étape importante. Par contre, ces droits ne vaudront pas grand-chose si le Canada et les autres États qui ont ratifié la convention ne prennent pas de mesures pour les faire respecter intégralement.

[Traduction]

Dans la déclaration qui a été distribuée, nous disons que 104 États ont ratifié la convention. Je peux vous dire aujourd'hui qu'il y en a maintenant 105. Cette convention est en voie de devenir la convention la plus largement ratifiée de l'histoire des Nations Unies et cela à un rythme assez rapide.

[Français]

La convention est unique du fait qu'elle contient à cet égard deux dispositions distinctes, mais interreliées. En ce qui concerne l'importance fondamentale des dispositions, la convention qui porte sur le suivi.

[Traduction]

C'est la surveillance. Il y a d'abord le système traditionnel d'organe de surveillance du traité. Le Comité des droits des personnes handicapées de l'ONU est un groupe d'experts, élu par les États parties à la convention mais qui agit de façon indépendante. Il a notamment pour mandat d'examiner les rapports initiaux et périodiques que les États doivent déposer et de recommander des moyens d'améliorer l'application de la convention.

L'article 33 de la convention prévoit en outre un système national de suivi en parallèle avec le système international. En vertu de l'article 33, les États doivent mettre en place des systèmes de coordination de l'application pangouvernementale de la convention, établir un dispositif de suivi et d'application. Mais surtout, ils doivent faire en sorte que les personnes handicapées et leurs organisations soient consultées et mises à contribution à l'égard de tous les aspects de l'application.

Le paragraphe 33(2) intéresse particulièrement les institutions nationales des droits de la personne telles que la commission. Conformément à l'article 33, les États parties doivent créer des mécanismes indépendants de promotion, de protection et de suivi des obligations de la convention. En créant ces mécanismes, les États doivent tenir compte des normes approuvées par les Nations Unies applicables au fonctionnement approprié des institutions nationales de protection des droits de l'homme. Ces normes portent le nom de Principes de Paris.

Même si la convention n'exige pas précisément que des institutions soumises aux Principes de Paris aient le mandat d'assurer un suivi indépendant, elle sous-entend certainement que les institutions nationales des droits de l'homme seraient parfaitement compétentes dans ce rôle.

La commission en a discuté avec le gouvernement du Canada. Nous avons exprimé notre intérêt à être désignée en vertu du paragraphe 33(2), si le gouvernement décide de suivre cette voie.

[Français]

Je tiens à souligner que même si l'on envisage de confier un rôle aux institutions nationales des droits de l'homme dans le suivi de l'application de la convention, ce rôle doit s'exercer dans le contexte d'un cadre plus large.

[Traduction]

Les comités parlementaires ont certainement un rôle important à jouer sur le plan de la surveillance, de la mise en oeuvre et du suivi.

[Français]

Votre comité peut se féliciter d'être le premier comité parlementaire au Canada à prendre l'initiative d'examiner les programmes et les activités du gouvernement en fonction de la convention.

[Traduction]

Il est à espérer que d'autres comités parlementaires suivront votre exemple, encourageant de ce fait un processus constructif de dialogue et d'examen pour tous les aspects de la convention.

[Français]

Je vous remercie de votre attention. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

[Traduction]

La présidente : Nous apprécions vos observations. Vos collègues désirent-ils ajouter quelque chose à ce que vous avez dit?

Mme Mosher : Je pense qu'ils préféreront attendre vos questions.

Le sénateur Andreychuk : Vous avez répondu à une de mes questions précédentes. Dans le contexte des négociations internationales, cette convention a progressé assez rapidement. Du côté canadien, cela semble avancer dans des délais plus raisonnables compte tenu du fait que nous avons des négociations au niveau fédéral-provincial. Vous avez dit, je crois, que les choses progressaient assez rondement. Est-ce bien ce que vous avez déclaré?

Mme Mosher : Oui, et le Canada mérite d'être félicité pour le rôle de premier plan qu'il a joué dans les négociations et la ratification de la convention.

Pour ce qui est de la mise en oeuvre et de la surveillance, comme nous l'avons dit dans notre communiqué où nous félicitions le gouvernement de la ratification — nous attendons des signaux et des progrès supplémentaires, comme les autres parties prenantes. C'est maintenant que le travail commence vraiment. Il faut s'assurer que les droits inscrits sur papier seront traduits dans la réalité concrète des personnes handicapées au Canada et dans le reste du monde. C'est encore un travail en cours.

Le sénateur Andreychuk : Vous avez dit que vous espériez être chargés de la surveillance et de l'application de cette convention au Canada. Cette désignation n'est pas encore faite, n'est-ce pas?

Mme Mosher : C'est exact.

Le sénateur Andreychuk : Pourquoi pensez-vous être les mieux placés, surtout en ce qui concerne les enfants et les adolescents? Une bonne partie de votre travail a été centrée sur les adultes, dans le secteur de l'emploi, pour assurer l'équité, la justice et l'application de nos lois en milieu de travail. Nous centrons notre attention sur un aspect particulier des enfants dans les sports. Vous pourriez faire un travail satisfaisant, mais j'ai l'impression que d'autres services gouvernementaux seraient peut-être mieux placés pour s'occuper de la question que nous étudions.

Mme Mosher : Je vais répondre à cela. Nous considérons la convention dans son ensemble au lieu de nous attacher à ses différents articles. Plus d'une vingtaine d'articles de la convention se prêtent à une surveillance et à un suivi. Si nous considérons la convention dans une perspective plus universelle ou plus globale, nous devons commencer à travailler avec nos collègues des provinces et des territoires par l'entremise de l'Association canadienne des commissions et conseil des droits de la personne. Nous avons eu des discussions avec les groupes de coordination des organismes de personnes handicapées. Sur cette vingtaine d'articles de la convention, quelles sont, selon les gens, les priorités urgentes? Où voient-ils les lacunes les plus pressantes? Où pouvons-nous nous organiser de façon plus stratégique pour faire avancer les choses?

Je comprends votre point de vue. Nous ne sommes pas des experts en ce qui concerne les enfants ou les sports. Toutefois, nous avons adressé notre proposition au gouvernement en nous basant sur un mécanisme et un cadre d'ensemble, la capacité de faire des recherches et de consulter les parties prenantes.

Le sénateur Andreychuk : Envisageriez-vous de recourir à la persuasion politique pour assurer la mise en oeuvre et le respect de la convention? Pensez-vous que vous proposeriez d'autres mécanismes pour la mise en oeuvre au Canada — autrement dit, des lois ou des projets de loi au niveau provincial ou fédéral — pour que ce soit plus efficace?

Mme Mosher : Comme nous l'avons dit, c'est un instrument complexe comportant de nombreux éléments. Les stratégies et approches différentes seront plus ou moins fructueuses selon l'objectif que nous essaierons d'atteindre. Je ne laisserais de côté aucun instrument susceptible de nous aider à faire progresser les choses.

Le sénateur Nancy Ruth : Veuillez m'excuser de mon arrivée tardive.

Comme je vois que vous représentez la Commission canadienne des droits de la personne, vous devez savoir qu'il y a un projet de loi d'initiative parlementaire à propos de l'article 13 de la Loi sur les droits de la personne. On pouvait lire notamment dans la presse : « Vous savez, comme ces catégories sont déjà couvertes par le Code criminel, nous n'avons pas besoin de nous en soucier. » D'après ce que je peux voir, trois catégories ne sont pas couvertes. Il y a d'une part les femmes, d'autre part les personnes handicapées et enfin, la discrimination en fonction de l'âge. Avez-vous, tous les trois, des observations à formuler au sujet de ce projet de loi d'initiative parlementaire en ce qui concerne les personnes handicapées?

Mme Mosher : Je n'ai rien à dire de particulier au sujet du projet de loi en question, mais il a, bien entendu, fait l'objet d'une certaine attention de la part des parlementaires. Au cours d'une session antérieure du Parlement, nous avons déposé un rapport spécial au Parlement au sujet de l'article 13. Nous nous ferions un plaisir de vous en remettre un exemplaire. Plus récemment, comme notre rapport spécial le soulignait, l'approche du Code criminel présente certains inconvénients car ces questions relèvent alors exclusivement du Code criminel. Nous abordons le sujet plus en détail dans notre rapport spécial.

Le sénateur Nancy Ruth : J'aimerais le voir. Merci.

La présidente : J'ai une question qui fait suite à celle du sénateur Andreychuk au sujet de votre compétence en la matière. Nous devons tous élargir nos compétences, tôt ou tard. Dans le domaine des sports, particulièrement en ce qui concerne les personnes handicapées, si ce rôle vous était confié, comment assureriez-vous la mise en oeuvre du paragraphe 30(5) et de quelles ressources supplémentaires et compétences auriez-vous besoin pour vous acquitter de cette mission si le gouvernement jugeait bon de vous la confier?

Mme Mosher : Si vous le permettez, je préfère répondre dans une optique plus large. Nous avons présenté au gouvernement une analyse de rentabilisation à l'appui de notre demande de désignation. Elle est modeste car nous nous basons sur nos capacités existantes et il n'est donc pas nécessaire de prévoir d'investissement de démarrage. Nous faisons ce genre de travail dans le cadre de nos analyses politiques, de nos recherches, de nos analyses de l'environnement, de nos analyses des lacunes, des politiques et initiatives, et de l'élaboration des propositions. C'est un domaine dans lequel nous sommes experts.

Pour ce qui est des ressources supplémentaires nécessaires pour aborder la question des enfants et des sports, c'est un domaine qui exigera, je pense, un apport extérieur et de la réflexion. Ce ne sont pas des compétences que nous avons à l'interne. J'hésiterais à établir un plan sans avoir l'occasion de consulter les gens et surtout le milieu des personnes handicapées. Le mot d'ordre lors de l'élaboration de la convention était « Rien sur nous sans nous ». Nous avons entamé le dialogue avec les organismes de coordination. Ils n'ont pas fait valoir, jusqu'ici, que c'était une priorité pour eux et nous allons donc certainement nous fier à ce que nous diront ces organismes et les personnes qui sont les plus compétentes dans ce domaine.

Harvey Goldberg, chef d'équipe, Initiatives stratégiques, Commission canadienne des droits de la personne : Je dirais simplement que dans son ensemble, l'article 33 vise à susciter un dialogue constructif au niveau national. Le processus de surveillance du traité est très éloigné de la vie quotidienne des pays et c'est pourquoi le mécanisme de surveillance prévu au paragraphe 33(2) vise à permettre, grâce à un mécanisme qui pourrait être administré par notre commission ou quelqu'un d'autre, de discuter des enjeux importants dans une convention, d'entendre des experts, d'entendre les personnes handicapées et les gouvernements et de tirer des conclusions quant à ce que le Canada a réalisé et ce qu'il doit faire encore à l'égard du sport, des personnes handicapées ou de toute autre question.

La présidente : J'ai toujours pensé que la Commission canadienne des droits de la personne avait pour rôle d'éduquer le public au sujet des droits de la personne. J'ai bien aimé la phrase dans votre discours où vous dites : « La participation des personnes handicapées aux activités sportives est un droit de la personne. »

Il y a, j'en suis sûre, une raison pour laquelle vous avez offert d'assumer cette responsabilité. J'aimerais que vous nous disiez si, au cas où cette responsabilité vous serait confiée, vous feriez valoir que la participation aux activités sportives est un droit de la personne.

Mme Mosher : Je crois que le sénateur Andreychuk a parlé de nos compétences dans les dossiers relatifs à l'emploi et aux organismes sous réglementation fédérale. Nous n'avons pas les mécanismes nous permettant de nous adresser directement aux pistes de curling ou aux entraîneurs de la petite ligue; ce n'est pas notre champ de compétence. Par contre, nous pouvons fournir aux personnes qui ont ces contacts directs des preuves, des recherches et un contexte et travailler avec nos organismes provinciaux et territoriaux dont certains, par exemple, au Manitoba, ont des programmes fantastiques et la formation qui leur permet d'aller dans les écoles secondaires pour accroître la sensibilisation, le respect pour l'inclusivité et la diversité.

Nous avons tendance à travailler au niveau fédéral. C'est généralement auprès des grands employeurs et de la fonction publique. Encore une fois, je pense que nous jouerions davantage le rôle de navigateur, de centre d'expertise, de manieur de chiffres pour pouvoir équiper les gens mieux placés que nous pour agir en première ligne et nous ferions rapport à l'échelle internationale.

Nous pouvons alors faire une synthèse à partir de nos consultations et de notre travail pour présenter une évaluation objective des résultats du Canada par rapport à nos obligations internationales.

La présidente : Mes collègues ne semblent pas avoir d'autres questions. Je tiens à vous remercier d'avoir pris la peine de venir ici. Nous espérons avoir bientôt de vos nouvelles au sujet de cette question.

Je voudrais souhaiter la bienvenue à notre prochain témoin, le sénateur Kochhar.

Sénateur Kochhar, c'est un sujet qui vous passionne. Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne a été choisi pour devenir le premier comité parlementaire à entreprendre cette tâche, mais le mérite vous en revient. C'était votre idée et chacun sait combien vous avez tenu à faire en sorte que chaque Canadien ait le droit de participer à des activités sportives. Nous tenons à remercier le visionnaire que vous êtes et nous avons hâte de vous entendre.

L'honorable Vim Kochhar, ancien sénateur, à titre personnel : Merci, madame la présidente et honorables sénateurs. Je suis très heureux de vous revoir et je vous remercie de m'avoir invité à revenir vous parler. C'est pour moi un grand honneur d'avoir eu l'occasion d'entreprendre cette étude quand j'étais encore sénateur.

Je trouve un peu étrange de siéger comme témoin, mais je suis heureux de savoir que votre rapport jettera la lumière sur une question qui me tient beaucoup à coeur et à laquelle j'ai consacré plus de 35 années de ma vie.

En l'espace de 35 courtes années, les sports pour personnes handicapées sont passés des jeux pour athlètes handicapés à Para-Sports puis aux Paralympiques. Nous sommes passés de l'embarras à la respectabilité.

Le nombre de médailles que nous avons remportées aux Jeux paralympiques de 2010, à Vancouver, a suscité énormément de fierté chez les Canadiens et à tous les niveaux de gouvernement. Le gouvernement fédéral a saisi l'occasion pour relever le financement et la reconnaissance des athlètes handicapés à un niveau respectable.

Malheureusement, on ne peut pas en dire autant des gouvernements provinciaux de l'ensemble du pays. En moyenne, les gouvernements provinciaux consacrent environ 4 p. 100 de leur budget annuel des sports aux handicapés au lieu de 10 p. 100 pour le gouvernement fédéral. Ce manque de financement se traduit par une participation de 3 p. 100 des adolescents handicapés contre 36 p. 100 pour les autres enfants.

Malgré le manque de financement, d'importants progrès ont été réalisés en ce qui concerne la façon dont les Canadiens considèrent le handicap et les sports pour personnes handicapées. Ils ont fortement tendance à accorder la même importance à la médaille d'or paralympique et à la médaille d'or olympique et à considérer le fauteuil roulant non plus comme un symbole d'invalidité, mais comme un symbole de liberté pour les personnes qui ne peuvent pas marcher.

Pour devenir une nation paralympique de premier plan, le principal obstacle à surmonter consiste à améliorer notre système de recrutement en reconnaissant, en encourageant et en formant des enfants handicapés pour qu'ils puissent se surpasser. Quand je vois des institutions de calibre mondial comme Variety Village, à Toronto, qui dessert plus de 19 000 jeunes handicapés, au bord de la faillite, j'estime que les différents niveaux de gouvernement les ont laissés tomber lamentablement.

La meilleure façon d'économiser des millions de dollars sur le budget des soins de santé est de prendre soin de nos enfants et adultes handicapés et de leur donner la possibilité de rester en bonne condition physique. J'exhorte tous les niveaux de gouvernement à faire connaître leurs programmes et les fonds disponibles afin que les gens et les institutions puissent y avoir accès. Il est ridicule d'avoir d'excellents programmes que l'on garde secrets, mais la plupart du temps, c'est un secret bien gardé.

Je me ferais un plaisir de participer à cette étude et de vous aider à mettre la dernière main au rapport.

La présidente : Nous vous remercions, monsieur Kochhar, pour votre témoignage à titre personnel. Le message que vous nous avez transmis ce soir était pratiquement le même que celui que vous nous avez fait entendre au début, quand vous vouliez cette étude. Vous aviez dit que vous vouliez signaler le problème, vous y attaquer et accroître le respect pour les personnes handicapées et leur inclusion, particulièrement dans le cas des enfants, dans les loisirs et les activités sportives de la collectivité. Dites-vous aujourd'hui qu'il faut s'atteler à la tâche et exhorter le gouvernement à tous les niveaux de poursuivre le travail que vous avez accompli?

M. Kochhar : Absolument, vous avez raison de dire que même si le sport relève de la compétence des provinces, le gouvernement va devoir inciter les gouvernements provinciaux à participer. Nous devons surtout faire participer les enfants handicapés physiques à des activités et des exercices physiques. Si nous ne le faisons pas, cela nous coûtera très cher plus tard en soins de santé.

Le sénateur Martin : Merci de nous faire partager votre passion une fois de plus, comme vous l'avez toujours fait.

Dans votre déclaration d'aujourd'hui, vous avez mentionné le niveau de financement respectable, qui est si important. Ma première question concerne les 4 p. 100 que les provinces réservent au sport adapté. Sur la totalité du budget des sports, quelle est la part réservée aux non-handicapés? Je ne pense pas que ce soit 96 p. 100; il doit y avoir d'autres coûts. Pourriez-vous préciser la différence?

D'autre part, au cours de vos 35 années et plus de carrière, y a-t-il certaines initiatives ou mesures positives que le Canada a prises pour mieux sensibiliser le public, améliorer l'accessibilité et l'inclusion des athlètes handicapés et des sports pour handicapés, et cetera? Quels sont les principaux éléments qui nous ont aidés à progresser et qu'est-ce que nous devons continuer de faire? Il s'agit notamment de mieux sensibiliser les esprits, j'en suis certaine.

M. Kochhar : Pour répondre à cette question, il faut considérer les choses dans leur contexte. Par exemple, 10 p. 100 de la population est handicapée. Par conséquent, quand les gouvernements provinciaux et fédéral accordent leur financement, il serait normal que 10 p. 100 de cet argent aille aux enfants handicapés.

Après les Jeux paralympiques de Vancouver, le gouvernement fédéral a, pour la première fois, placé les enfants handicapés sur un pied d'égalité. Dix pour cent du budget a été réservé aux enfants participant aux sports paralympiques. Le gouvernement accorde 5 millions de dollars par année, ce qui représente 10 p. 100 de son budget total de 200 millions de dollars.

Je ne sais pas exactement combien les Jeux olympiques reçoivent, mais je suppose que c'est 90 p. 100 du budget des sports et que les Jeux paralympiques obtiennent 10 p. 100, ce qui me semble très équitable.

Je dois féliciter notre premier ministre d'avoir pris cette initiative. Si vous assistez à une réunion où il est présent, que ce soit un caucus ou une conférence de presse, il ne va pas simplement parler des Jeux olympiques; il mentionne toujours les Jeux paralympiques. C'est un changement positif et qui donnera un bon coup de pouce aux sports pour les personnes handicapées.

Toutefois, comme je l'ai dit, les sports ne relèvent malheureusement pas du gouvernement fédéral mais des gouvernements provinciaux et nous devons donc inciter ces derniers à passer à l'acte.

Nous y travaillons. Pour le moment, nous disposons d'un financement d'un million de dollars par année pour Variety Village, ce qui a été difficile à obtenir. Nous n'avons aucune subvention du gouvernement fédéral. C'est un système de recrutement qui alimentera notre performance sur le podium. Si nous n'avons pas de système de recrutement, ce sera fini pour nous.

Le sénateur Ataullahjan : C'est un plaisir de vous revoir ici, monsieur Kochhar. Vous me manquez comme ancien voisin. Je vous suivais partout afin de ne pas me perdre dans les couloirs. Grâce à vous, je ne me suis jamais perdue.

Je retiens surtout de ce que vous avez dit qu'il faut améliorer le système de recrutement. Comment pouvons-nous l'améliorer?

M. Kochhar : En accordant un financement aux organismes où les gens sont formés. Je vais encore donner l'exemple de Variety Village, car je connais bien cet organisme et je siège à son conseil d'administration. Il s'occupe de 19 000 jeunes. Lorsque les jeunes sont blessés ou qu'ils reviennent de l'hôpital, vous leur apprenez à mener une vie autonome. Pendant que vous les formez, vous repérez ceux qui ont des aptitudes pour le sport. S'ils excellent dans les sports, vous les entraînez et vous pouvez en choisir quelques-uns qui pourront participer aux Jeux paralympiques ou devenir les meilleurs au monde ou les meilleurs au niveau national. Toutefois, si nous n'avons pas d'institutions comme Variety Village, nous n'aurons aucun moyen d'entraîner qui que ce soit pour participer aux Jeux paralympiques.

À Londres, en 2012, l'année prochaine, nous verrons le nombre de médailles que nous obtiendrons diminuer d'au moins 10 à 15 p. 100. C'est parce qu'un grand nombre d'athlètes senior — comme Chantal Petitclerc qui a remporté cinq médailles d'or — abandonnent la compétition. Il n'y a personne pour la remplacer et remporter autant de médailles, parce que nous n'avons pas porté suffisamment attention à notre système de recrutement.

Le sénateur Hubley : Bon retour parmi nous. C'est toujours un plaisir de vous voir. Vous avez bonne mine et vous semblez plein d'énergie.

Pensez-vous que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer pour aider les provinces à mettre en place des meilleurs programmes?

M. Kochhar : Encore une fois, ce ne sont pas les programmes qui posent problème. Pour qu'une institution survive, elle doit avoir des programmes. Si elle n'a pas de bons programmes, elle ne peut pas former et aider les gens. Le problème ne se situe pas au niveau des programmes. C'est au niveau de financement. Pour mettre ces programmes en place, il vous faut de l'argent, des entraîneurs et des instructeurs et vous ne pouvez pas les embaucher à moins d'avoir de l'argent.

Sur le budget de 5,5 millions de dollars de Variety Village, les frais de fonctionnement ont absorbé la totalité. L'institution a dû réduire ses activités de 60 p. 100. Elle était au bord de la faillite jusqu'à ce que le gouvernement provincial vienne à la rescousse. Elle a encore besoin de beaucoup d'aide sur ce plan-là.

Le sénateur Hubley : Certains gouvernements provinciaux sont probablement mieux en mesure de financer leurs programmes. Certaines petites provinces n'ont peut-être pas cette chance. Pensez-vous qu'il faudrait un organisme national pour égaliser la situation?

M. Kochhar : Cela pose aussi un problème sur le plan des droits de la personne si vous ne traitez pas les citoyens de façon égalitaire. Les athlètes olympiques et les athlètes non handicapés ont peu de problèmes. Les programmes ont été réduits dans les écoles à cause du manque d'argent, mais pas autant que pour les personnes handicapées. Tout le monde n'est pas sur un pied d'égalité et c'est là que cela pose un problème de droits de la personne.

La présidente : J'ai un certain nombre de questions. Je vais commencer par vous demander votre avis. Comme vous le savez, le Canada n'a pas signé le protocole facultatif de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Quelle est l'importance de cette non-ratification pour le Canada?

M. Kochhar : J'avoue ne pas pouvoir répondre à cette question. Je ne connais pas très bien le rôle du gouvernement canadien dans ce domaine des droits de la personne.

Le sénateur Brazeau : Bon retour parmi nous. C'est un grand plaisir de vous revoir. Je suis sûr que nous allons poursuivre notre discussion quant à savoir qui de nous deux est le vrai Indien, mais ce n'est pas le sujet de la séance de ce soir.

Vous avez mentionné l'importance de faire faire du sport aux enfants handicapés. Si j'ai bien compris, vous avez dit que les gouvernements provinciaux ne dépensent pas suffisamment ou qu'ils pourraient dépenser plus sur le plan de l'infrastructure.

Si on n'investit pas dans l'infrastructure pour ces enfants handicapés et si on ne la crée pas pour eux, qui devrait s'en charger? Si cela incombe aux gouvernements provinciaux pour une question de compétence, que pouvons-nous faire au niveau fédéral pour donner la poussée qui commencera à faire bouger les choses?

M. Kochhar : C'est aussi une responsabilité fédérale. Le gouvernement fédéral vient d'accorder 5 millions de dollars pour construire un nouveau centre de réadaptation à Oshawa, en Ontario. Il a également financé des centres sportifs en Saskatchewan, en Alberta et dans de nombreuses autres provinces. Je crois que le gouvernement fédéral finance cinq centres sportifs et ces centres constituent des systèmes de recrutement.

Il y a un bon nombre de petits centres qui ne sont pas du tout financés et dans certains cas, la raison à cela ne date pas d'hier. Je n'entrerai pas dans les détails, mais c'est au gouvernement fédéral qu'il revient de créer les incitatifs voulus pour que les personnes handicapées aient les mêmes chances que les autres. Il y a de nombreux centres sportifs pour les personnes non handicapées, mais très peu de centres sportifs ou de centres de conditionnement physique au Canada pour les personnes handicapées. Dans une large mesure, il s'agit d'une responsabilité fédérale.

La présidente : J'ai une autre question à vous poser, si vous le permettez. À votre avis, la participation des personnes handicapées aux activités sportives et récréatives permet-elle de lutter contre la stigmatisation sociale entourant le handicap et de promouvoir l'égalité des droits et, si c'est le cas, comment?

M. Kochhar : C'est certainement le cas. À mes débuts dans ce mouvement, par exemple, il y avait seulement trois endroits où les personnes sourdes et aveugles pouvaient vivre. Elles pouvaient vivre à l'hôpital, dans un établissement ou à la maison. Trente ans plus tard, nous avons construit, pour les personnes sourdes et aveugles, un foyer où elles peuvent vivre en autonomie, dans un environnement sans obstacles. Il y a aussi des centres de formation. Ces services n'étaient pas recherchés. Les parents étaient embarrassés d'avoir des enfants handicapés. Maintenant, ils sortent de leur coquille. Lorsqu'une personne comme Chantal Petitclerc remporte cinq médailles d'or, elle n'est pas handicapée. Elle a peut-être des handicaps physiques, mais nous n'avons pas à regarder ces handicaps; nous regardons les capacités de ces personnes. Elles ne se cachent plus dans leur coquille comme elles le faisaient avant.

Les médias parlent d'elles beaucoup plus qu'avant. En 1995, 35 articles ont été publiés pour tout le pays, dans des petits journaux des localités d'où venaient les athlètes handicapés physiques. En 1996, j'ai organisé un marathon pour les paralympiques et nous avons eu une équipe de 60 personnes qui ont parcouru le pays en fauteuil roulant de Terre- Neuve à Victoria. Aux Jeux paralympiques de 1996, plus de 4 000 articles ont été publiés dans les journaux. C'était un changement phénoménal. Nous vivons maintenant dans un contexte différent et les gens sont respectés. Le handicap physique n'est plus ce qu'il était.

La présidente : Dans cet esprit, sénateur, s'il est une recommandation que nous devrions absolument formuler dans notre rapport, selon vous, surtout en ce qui concerne la stigmatisation, vous ne pouvez peut-être pas le faire aujourd'hui, mais pourriez-vous nous aider en nous disant quelle devrait être cette recommandation?

M. Kochhar : :La stigmatisation disparaît lorsque les Canadiens pensent de façon différente. Maintenant, quand les gens voient un fauteuil roulant, ils pensent toujours au handicap. Quand je vois un fauteuil roulant, je vois seulement un véhicule pour une personne qui ne peut pas marcher. C'est un mode de transport et il n'y a rien de dévalorisant à être assis dans un fauteuil roulant.

Le 14 avril, nous avons eu la course en fauteuil roulant Rolling Rampage sur la Colline. Près de 2 500 jeunes sont venus y assister et ont tenu à obtenir les autographes de ceux qui ont parcouru 10 kilomètres en moins de 23 minutes. Les gens les entouraient. Le sénateur Martin était là, en fauteuil roulant, et a participé à la compétition. C'était une expérience formidable.

L'éducation civique est importante pour faire savoir aux Canadiens qu'ils peuvent voir le handicap d'un autre oeil.

Le sénateur Martin : C'était un événement extrêmement intéressant, je dois dire.

J'ai une question concernant les handicaps intellectuels. Quand nous pensons aux Jeux olympiques, nous parlons des Jeux olympiques et paralympiques en reconnaissant l'importance des deux grâce au leadership du premier ministre, comme vous l'avez dit. Lorsque nous parlons des Jeux olympiques spéciaux, il semble que ce ne soit pas tout à fait la même chose, à certains égards. J'aimerais que vous en parliez. Je sais que vous avez été le champion des athlètes et des personnes handicapées, mais je pense qu'il y a une lacune à combler en ce qui concerne les Jeux olympiques spéciaux.

M. Kochhar : Ce sont deux éléments différents. Dans le cas des paralympiques, les participants vont là pour gagner. La victoire est la seule chose qui compte. Si vous ne gagnez pas, vous perdez, mais pour les personnes qui ont des handicaps intellectuels, il ne s'agit pas de gagner ou de perdre, mais de participer. Si vous gagnez, ce n'est pas l'important. Tout le monde est gagnant lorsque les personnes ayant un handicap mental participent.

Lorsque les personnes handicapées physiques participent, elles doivent gagner. Elles doivent pouvoir monter sur le podium pour recevoir une médaille. C'est leur seul but. Elles n'ont qu'un seul et unique objectif qui est de remporter la médaille d'or. Si elles n'y réussissent pas, elles ont échoué, comme c'est le cas aux Jeux olympiques. Il y a une différence énorme entre les deux sports.

Le sénateur Martin : Je le reconnais certainement, mais pensez-vous qu'en ce qui concerne les Jeux olympiques spéciaux, des progrès notables ont également été réalisés à cet égard?

M. Kochhar : Certainement. Le sénateur Munson a beaucoup fait pour promouvoir la cause des enfants handicapés intellectuels. Il reçoit un financement assez important du gouvernement fédéral et joue un rôle très actif sur ce plan.

En fait, le mouvement a commencé aux États-Unis grâce aux familles Shriver et Kennedy, qui ont joué le rôle de chef de file. Au Canada, des progrès ont été réalisés depuis 30 ans. La stigmatisation a disparu. Le handicap mental n'entraîne pas d'exclusion; il n'y a pas de cruauté; on en parle librement. Les parents sont fiers de leurs enfants et font de leur mieux pour rendre leur vie plus intéressante.

Le ministre des Finances, Jim Flaherty, a eu des triplets dont l'un a un handicap mental. Personnellement, quand je les rencontre, je les vois comme les membres d'une même famille.

Le sénateur Hubley : J'aimerais savoir quels renseignements nous mettons à la disposition des parents qui nous écoutent peut-être et qui ont un enfant handicapé. Vous avez parlé du Variety Village de même que d'un foyer pour les personnes aveugles et sourdes. Où obtient-on ces renseignements? Est-ce par l'entremise des médecins, des associations médicales? Où les gens trouvent-ils des renseignements à ce sujet?

M. Kochhar : Comme je l'ai dit au début, une partie du bon travail que nous faisons reste un secret bien gardé parce que personne n'est au courant. Quand des représentants du ministère des Sports fédéral sont venus ici nous dire qu'il y avait un financement, des installations et d'autres choses, c'était une nouvelle pour moi et j'ai essayé de découvrir tout ce qui est disponible.

En 1984, les athlètes paralympiques ont ramené au Canada 222 médailles. Nous étions au deuxième rang dans le monde, mais cela a été le secret le mieux gardé du pays.

Les institutions doivent elles-mêmes faire plus de publicité. Il y a des associations de parents d'enfants handicapés physiques qui se parlent entre eux des programmes disponibles et qui peuvent alors y participer. C'est pourquoi, quand je mentionne Variety Village, il est très important que lorsque les parents d'enfants handicapés physiques s'adressent à ces institutions, on ne leur ferme pas la porte à cause d'un manque de financement. Variety Village ne peut pas élargir son programme. Il peut desservir 19 000 enfants, mais pourra prendre seulement 10 000 enfants l'année prochaine, ce qui veut dire que 9 000 enfants handicapés n'auront pas la possibilité de participer.

C'est à l'institution qu'il incombe de se faire connaître, de faire de la publicité, de faire parler d'elle dans les journaux, dans les médias. Les médias ont beaucoup tardé à publier des articles positifs à ce sujet. Si vous faites quelque chose de travers, vous avez droit à la manchette des journaux, mais si vous faites quelque chose de bien, cela prend un certain temps avant qu'on en parle.

Nous devons essayer de faire en sorte que toutes les bonnes nouvelles soient diffusées et que les gens qui ont besoin de ressources et d'aide les obtiennent.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Kochhar. Vous nous avez certainement aidés aujourd'hui comme vous l'avez fait en lançant cette étude. Nous tenons à ce que vous sachiez que vous nous manquez beaucoup au comité.

M. Kochhar : Vous me manquez tous également.

La présidente : Nous allons nous réunir à huis clos. Le sénateur Andreychuk propose une motion pour que le personnel puisse rester. M'autorisez-vous aussi à demander au sénateur Kochhar de rester parce que nous allons discuter de l'ébauche de rapport.

Veuillez rester, s'il vous plaît.

(La séance se poursuit à huis clos.)

(La séance publique reprend.)

La présidente : Nous accueillons notre prochain groupe de témoins. Les représentants du gouvernement de l'Alberta sont M. Roger Kramers, directeur, Direction du développement du sport, Tourisme, récréation et parcs et M. Steven Patrick, conseiller. Je tiens à vous remercier de participer à notre séance d'aujourd'hui et de nous faire part de vos réflexions au sujet de cette étude très importante. Je tiens également à vous remercier d'avoir fait preuve de souplesse à l'égard de l'heure, car nous avons eu d'autres questions à régler.

Roger Kramers, directeur, Direction du développement du sport, ministère duTourisme, de la Récréation et des Parcs, Gouvernement de l'Alberta : Nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui. Je vais parler brièvement de quelques orientations politiques générales, après quoi M. Patrick parlera un peu de certains de nos programmes touchant le sport pour athlètes handicapés.

Le ministère du Tourisme, récréation et parcs est responsable du sport amateur en Alberta. Notre province a également la particularité d'avoir une fondation de la Couronne qui relève du ministre, l'Alberta Sport, Recreation, Parks and Wildlife Foundation. Cette fondation est dirigée par un conseil d'administration qui établit son orientation et supervise une bonne partie du financement que le ministère octroie aux groupes de sports et loisirs.

Récemment, le gouvernement de l'Alberta a approuvé la politique Active Alberta pour le sport, les loisirs et l'activité physique. Pour permettre aux Albertains d'avoir une bonne qualité de vie, d'améliorer leur santé et leur bien- être, d'avoir des collectivités solides, un bien-être économique et de réaliser leurs aspirations personnelles grâce aux loisirs, à une vie active et aux sports, cette politique aura des effets dans six grands domaines : les collectivités actives; les Albertains actifs; le plein air actif; l'engagement actif; les systèmes coordonnés actifs ainsi que la poursuite active de l'excellence. Au cours des 10 prochaines années, les décisions concernant la politique et les programmes seront prises dans le contexte d'Active Alberta.

Nous comprenons la vulnérabilité des organismes de sport pour personnes handicapées sur le plan du financement. En 2009, en raison d'une réduction des subventions que le gouvernement albertain accordait à la Alberta Sport, Recreation, Parks and Wildlife Foundation, le financement de toutes les associations sportives et récréatives de la province a été réduit d'environ 18,2 p. 100. Le premier ministre Stelmach a déclaré, lorsque les compressions pangouvernementales ont été annoncées, que les groupes vulnérables ne seraient pas touchés. Les organismes de sport pour personnes handicapées que nous finançons chaque année n'ont donc pas été visés par cette réduction de 18,2 p. 100 du financement.

Je vais céder la parole à M. Patrick qui vous parlera de certaines de nos initiatives.

Steven Patrick, conseiller, Direction du développement du sport, ministère du Tourisme, de la récréation et des parcs, Gouvernement de l'Alberta : Nous avons actuellement de nombreux programmes de financement qui sont principalement dirigés vers les jeunes et qui se répercutent sur les sports et loisirs pour les personnes handicapées. Chaque année, nous finançons les organismes provinciaux de sport pour personnes handicapées dont les noms suivent : Special Olympics Alberta; Alberta Sports and Recreation Association for the Blind; Alberta Amputee Sports and Recreation Association; Wheelchair Sports Alberta; Alberta Cerebral Palsy Sports Association; Alberta Deaf Sports Association; et la Canadian Association for Disabled Skiing Alberta. De plus, nous accordons une subvention annuelle au Steadward Centre for Personal and Physical Achievement.

Pour 2010-2011, le financement de base de ces huit organismes totalise un peu moins de 875 000 $ auxquels s'ajoute le financement d'un projet supplémentaire de plus de 160 000 $. Au cours des trois années précédentes, nous avons accordé plus de 170 000 $ à 17 athlètes paralympiques de haut niveau par l'entremise du programme Podium Alberta. Ce programme s'ajoute au financement des athlètes qui reçoivent une aide par l'entremise du Programme d'aide aux athlètes de Sport Canada.

De plus, des fonds sont accordés par d'autres moyens et à d'autres partenaires. Dans le cadre de la Politique canadienne du sport et des Priorités pour une action concertée, nous obtenons un financement du gouvernement fédéral conformément à un accord bilatéral avec Sport Canada. Depuis 2003, nous avons octroyé chaque année un montant total de 90 000 $ à Hockey Alberta et à l'Alberta Curling Federation pour développer le hockey sur luge et le curling en fauteuil roulant. Deux athlètes ont été désignés pour faire partie de l'équipe paralympique du Canada en 2010 grâce à ce financement.

Dans le cadre de cet accord bilatéral, nous accordons également une subvention ponctuelle à des groupes provinciaux, régionaux ou locaux pour accroître et améliorer la participation à d'autres sports pour personnes handicapées. Parmi les exemples récents, une somme totale de 73 450 $ a été accordée pour mettre des traducteurs à la disposition de l'Alberta Deaf Sports, pour financer une équipe de hockey sur luge, un programme de Tae Kwon Do pour les enfants autistes, des sports tels que l'escrime en fauteuil, le goalball, le paracyclisme, la voile pour personnes handicapées, le ski alpin ou de randonnée adapté, ainsi qu'un financement pour le programme d'activités de plein air de l'Association canadienne des paraplégiques.

Nous apprécions cet accord avec Sport Canada et nous avons accompli d'excellentes choses grâce à ce financement bilatéral. Comme une nouvelle politique canadienne du sport est en cours d'élaboration, cela fournira une occasion supplémentaire d'inclure les personnes handicapées et de financer des programmes intégrés et spécialisés dans l'ensemble du réseau sportif.

D'autres sources de financement fédéral sont offertes par des organismes différents. L'Agence de la santé publique du Canada finance la stratégie provinciale Active Living. En 2010-2011, le Steadward Centre a pu obtenir 65 000 $ pour un programme de transition vers un mode de vie plus actif. Une somme de 20 000 $ supplémentaire a été attribuée, cette année, à un programme pour la saine alimentation des enfants handicapés.

Un facteur important du système de sport amateur est l'intégration de divers éléments comme le développement de l'athlète du terrain de jeux jusqu'au podium, le système d'entraînement, les installations, et cetera.

C'est un système compliqué pour les sportifs non handicapés dont les ressources sont déjà limitées sur le plan du financement, des ressources humaines, et cetera, mais ça l'est encore plus si vous y ajoutez les obstacles relatifs à l'accessibilité, l'équipement spécialisé, le transport et autres problèmes auxquels les personnes handicapées sont confrontées.

En Alberta, nous avons essayé plusieurs méthodes pour faciliter la participation des personnes handicapées. En 2006, nous avons accordé un financement bilatéral de 25 000 $ aux sept organismes provinciaux de sport pour personnes handicapées susmentionnés afin de créer une stratégie de recrutement et un site web pour ces groupes. Nous organisons un sommet du leadership, tous les deux ans, pour les praticiens des sports et loisirs. À notre dernier sommet, qui a eu lieu au début de l'année, nous avons organisé des séances éducatives pour l'inclusion de programmes adaptés et intégrés. Nous continuons de soutenir la participation intégrée des athlètes handicapés dans les jeux multisports.

Nous avons aussi établi un réseau provincial de huit centres de développement sportif pour les nouveaux athlètes de haut niveau. L'un de ces centres est associé au Steadward Centre et conseille les sept autres centres, de Fort McMurray à Medicine Hat, dans le domaine des sports pour personnes handicapées.

L'Alberta est fière de sa contribution au handisport dans la province. Un certain nombre de nos experts ont déjà comparu devant le comité et nous avons l'intention de continuer à travailler avec eux pour offrir davantage de possibilités aux athlètes handicapés de la province.

La présidente : Merci beaucoup pour cet exposé. Je vais commencer par vous poser une question. Quelle aide le gouvernement fédéral devrait-il apporter à vos programmes afin qu'ils puissent s'améliorer? Quelle genre d'aide serait utile, si le gouvernement fédéral pouvait vous l'apporter?

M. Kramers : Nous avons eu beaucoup de succès dans le cadre des accords bilatéraux que nous avons conclus avec Sport Canada sous les auspices de la Politique canadienne du sport ainsi que certains plans de travail particuliers concernant le sport pour handicapés et d'autres domaines ciblés. Les accords bilatéraux permettent à chaque région du pays d'adapter ses programmes en fonction de ce qui lui convient le mieux.

La présidente : Pensez-vous que les systèmes de recrutement fonctionnent? Les organismes provinciaux du pays peuvent-ils former des athlètes qui pourront participer aux compétitions au plus haut niveau? Les systèmes de recrutement fonctionnent-ils et, dans le cas contraire, que faut-il faire pour les améliorer?

M. Patrick : Je pense que le système de recrutement fonctionne assez bien. Toutefois, comme pour tout le reste dans le système sportif, il y a encore des choses à améliorer.

Une de nos difficultés, en Alberta, est que nous devons mettre en place un système plus intégré. Comme je l'ai mentionné, nous finançons huit organismes de sport pour handicapés en plus d'environ 70 organismes sportifs dont certains, mais pas tous, ont une composante « handisport ». Il faudrait que tous nos partenaires travaillent mieux ensemble. S'il s'agit du basket-ball en fauteuil roulant, est-ce Basketball Alberta qui doit s'en occuper ou Wheelchair Sports Alberta? La question peut se poser pour n'importe quel sport. C'est certainement une chose que nous essayons d'élargir et d'améliorer.

M. Kramers : J'ajouterais simplement à ce qu'à dit M. Patrick qu'à mon avis, le système fonctionne bien. Nous voyons des athlètes, qui sont le produit de notre système, participer aux Jeux Western Canada, puis aux Jeux du Canada et se distinguer également aux niveaux national et international. Nous avons des exemples démontrant que le système fonctionne.

Le sénateur Brazeau : J'ai une brève question. Un bon nombre des témoins qui ont comparu devant notre comité ont mentionné que les gouvernements provinciaux ne dépensaient peut-être pas autant qu'ils le devraient ou qu'ils le pourraient pour les activités sportives des personnes handicapées. Cela dit, quelle partie de son budget des sports et loisirs le gouvernement de l'Alberta consacre-t-il actuellement aux personnes handicapées? D'après la liste des organismes que vous financez, il semble que ce soit assez important.

M. Kramers : À l'heure actuelle, sur le budget total que reçoit la fondation, un peu plus de 1 million est consacré aux sports pour personnes handicapées.

Le sénateur Brazeau : Cela représente combien sur le budget total?

M. Kramers : C'est environ 26 millions de dollars. Ce budget est réservé non seulement au sport, mais également aux loisirs, à la vie active et à certaines activités touchant la faune que la fondation est aussi chargée de préserver.

Pour ce qui est du financement des groupes de sports et loisirs, notre financement annuel est d'environ 7 ou 8 millions de dollars. Au total nous consacrons probablement plus de 1 million de dollars aux organismes de sport pour handicapés de la province.

Le sénateur Andreychuk : J'ai deux questions. Vous avez dit que lorsqu'il y a eu des compressions en Alberta, les associations dont vous avez parlé n'ont pas été touchées, ce qui m'amène à ma question. Devez-vous, en partie, votre succès à ce que nous appelons sur la Colline la « volonté politique » que le premier ministre et d'autres ont manifestée de considérer les sports pour personnes handicapées comme faisant partie intégrante de l'idéal sportif et non pas comme quelque chose à part?

M. Kramers : Je crois que c'est le cas dans une certaine mesure. Nous avons certainement l'impression qu'il faut protéger les services offerts à ceux qui n'ont pas les mêmes possibilités que tout le monde, mais qu'il faut également faire en sorte que les deux systèmes fonctionnent mieux ensemble au lieu d'essayer de mettre en place plusieurs systèmes indépendants. Nous devons trouver le moyen de permettre à tout le monde de travailler ensemble, que ce soit le sport pour personnes handicapées, le sport autochtone ou toute autre population ciblée. Nous devons trouver le moyen de tout faire fonctionner dans le même système.

M. Patrick : Un des atouts de la politique dont M. Kramers a parlé tout à l'heure est notre nouvelle politique Active Alberta qui va nous guider au cours des 10 prochaines années. C'est une approche transsectorielle. Cela englobe non seulement les sports et les loisirs, mais aussi les services à l'enfance, l'éducation et la santé.

Nous essayons d'amener d'autres ministères et les autres facettes de la société à participer aux sports et à inciter davantage d'Albertains à être actifs et, du même coup, à amener davantage d'Albertains handicapés à être actifs.

Le sénateur Andreychuk : Plusieurs témoins ont dit au comité que ceux qui vont jusqu'aux Jeux paralympiques, et cetera, sont des sources d'inspiration pour les autres qui voient à quoi ils peuvent aspirer.

D'un autre côté, on a laissé entendre qu'en insistant sur les Jeux paralympiques, on enlève des ressources à ceux qui vivent dans les petites localités et que nous ferions mieux de faciliter l'intégration dans les collectivités, régions rurales, et cetera. Qu'avez-vous constaté vous-même?

M. Kramers : Je vais répondre à la dernière partie de votre question et je laisserais peut-être M. Patrick répondre à la première.

Une des choses que nous constatons pendant qu'on est en train d'élaborer la nouvelle Politique canadienne du sport est qu'il faut insister sur l'éventail complet d'activités sportives. Il y a également toutes les activités sportives qui ont lieu en dehors des sports financés par les gouvernements provinciaux et fédéral ou les organismes nationaux et provinciaux. Il y a tout le sport communautaire qui fait partie intégrante de ce qui se passe au Canada et c'est un aspect auquel non seulement les gouvernements, mais tout le système, les organismes sportifs nationaux ou provinciaux, doivent porter davantage attention. Nous devons tenir compte du sport dans son ensemble.

Cela dit, il y a d'excellents athlètes qui sont allés jusqu'aux Jeux olympiques et paralympiques qui sont des sources d'inspiration dont nous pourrions profiter pour promouvoir la valeur et les avantages du sport en montrant où cela a conduit ces personnes et comment cela peut aider les gens à mener une vie plus riche.

Le sénateur Martin : Ma question porte sur le financement. Ce soir, un témoin précédent, l'ancien sénateur Kochhar, a mentionné le financement des grands organismes — et vous avez donné la liste des organismes qui reçoivent un financement — en supposant qu'il s'agit d'organisations ou d'associations-cadres.

Pourriez-vous nous parler brièvement de votre modèle de financement et de la façon dont les fonds profitent aux petits organismes locaux sans but lucratif ou à ceux qui desservent un sous-groupe, nous dire s'il y a un financement équitable et si ce financement rejoint certains de ces autres groupes?

M. Patrick : Une des difficultés est qu'il y a divers groupes qui ne sont peut-être pas associés à un organisme provincial, mais avec qui nous avons un lien ou un partenariat. Comment reçoivent-ils de l'argent? Comment y ont-ils accès? Les groupes peuvent demander les subventions dont j'ai parlé tout à l'heure et qui sont un financement ponctuel pour un projet. En ce qui concerne l'escrime en fauteuil roulant, par exemple, un club d'Edmonton a demandé et obtenu un financement de 10 000 $.

À part ce dont nous avons parlé, nous avons aussi une subvention générale pour les sports et loisirs. Ces groupes peuvent demander un financement. Cette subvention n'est pas réservée à la population handicapée.

Nous accordons un financement à certains organismes provinciaux, mais il s'agit d'organismes indépendants. Ils ont la possibilité de répartir les fonds comme ils le jugent bon pour élargir leurs programmes. Certains groupes peuvent être oubliés.

Le sénateur Martin : La province a-t-elle cherché, ou lui a-t-on demandé d'étudier des modèles de financement plus efficaces qui pourraient aider davantage de groupes?

M. Patrick : À mon avis, la sensibilisation est primordiale. La subvention du Development Initiatives Program dont je viens de parler fait l'objet de très nombreuses demandes. Nous ne faisons pas beaucoup de publicité parce que les demandeurs sont nombreux. Certains groupes auraient avantage à être informés de l'existence de ce programme et des autres possibilités de financement. Il s'agit de voir si nous voulons faire des efforts de ce côté-là et faire savoir aux groupes que cela existe.

Le sénateur Martin : Avez-vous l'intention d'augmenter le financement des sports, surtout pour les athlètes ayant un handicap physique? La demande a-t-elle augmenté suite à l'accroissement de la participation? Avez-vous l'intention d'augmenter le financement?

M. Kramers : Nous aimerions certainement accorder un financement plus important. Une bonne partie du financement dépend de ce que nous recevons chaque année du gouvernement pour la fondation. Que ce soit pour les groupes de personnes handicapées ou pour les autres, nous commençons par essayer de leur attribuer un montant de base pour financer leurs activités annuelles avant de compléter cela par d'autres subventions. Nous essayons, chaque fois que c'est possible, d'augmenter la capacité de tous les groupes de la province.

M. Patrick : La question de la masse critique représente une partie du problème. Même au niveau provincial, l'Alberta Cerebral Palsy Association compte au total 40 membres. Si vous répartissez ce nombre entre Edmonton et Calgary, l'association a de la difficulté à assurer son propre financement. A-t-elle suffisamment de participants pour qu'il vaille la peine d'engager un entraîneur?

Si vous comparez sa situation avec celle de Hockey Alberta qui compte 93 000 membres, elle n'a pas la masse critique voulue pour offrir des programmes. Il est difficile d'offrir des programmes pour un ou deux enfants.

Le sénateur Martin : Comme c'est de la compétence des provinces, le gouvernement de l'Alberta, certains fonctionnaires ou un bureau spécialement désigné pourrait faciliter une réunion des parties prenantes où l'on examinerait des façons plus efficaces de partager le financement. S'il y a certains frais administratifs que tout le monde doit faire, il y a certaines ressources qui pourraient être partagées.

Je sais qu'aux États-Unis il y a des organismes sans but lucratif qui se réunissent pour voir si leurs mandats se chevauchent et comment ils pourraient dépenser leur argent de façon plus efficace. Je suppose que la province est la mieux placée pour faire ce genre de choses. C'est une simple idée que je partage avec vous.

M. Kramers : C'est une bonne idée et nous avons commencé à réunir certains groupes. M. Patrick a mentionné que nous les avions réunis il y a deux ans, à compter de l'entente bilatérale sur l'avancement de la participation dans le sport. Nous avons réuni un certain nombre de ces groupes et nous leur avons demandé : « Comment pouvons-nous vous amener à travailler davantage ensemble? » L'un des résultats a été la création d'un site web où les personnes handicapées de la province pouvaient dire : « Je veux faire du sport, mais je ne sais pas exactement à quel organisme m'adresser. » Les gens peuvent aller sur ce site qui leur indiquera où aller.

Avec ce genre d'initiatives, nous essayons de trouver des moyens de tirer le maximum des quelques dollars dont les groupes disposent dans chacun de leurs budgets.

La présidente : Comme vous travaillez davantage que les autres avec les groupes sur le terrain — et que vous êtes une fondation du gouvernement provincial —, je voudrais vous poser une question concernant l'intégration. À votre avis, l'intégration des athlètes non handicapés et des athlètes handicapés au sein du même organisme sportif national est-elle bénéfique pour les athlètes et la promotion du sport?

M. Patrick : Parlez-vous d'une intégration au niveau national?

La présidente : Non, au niveau provincial.

M. Patrick : Cela présente assurément certains avantages. Nous devons établir jusqu'où nous devons aller. Je sais qu'au niveau national, par exemple, on a cessé de financer les organismes de sport pour handicapés. Un financement a été accordé à des associations comme Hockey Canada pour s'occuper du hockey sur luge. Nous devons établir si c'est logique pour la province de l'Alberta ou s'il vaut mieux pour nous offrir aux organismes la possibilité de travailler ensemble à l'intégration. Certains sports y réussissent mieux que d'autres. L'adaptation est un bon modèle à suivre. Je dirais que le hockey a été un bon modèle, de même que le ski de fond. Il est certainement possible de faire plus. Plusieurs groupes ne comprennent pas qui a le rôle principal. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure dans mon exemple, s'agit-il de Basketball Alberta ou de Wheelchair Sports Alberta?

Nous pouvons sensibiliser les gens pour faciliter les choses. Je pense que ce serait bénéfique.

M. Kramers : Cela présente certainement de nombreux avantages. Il y a probablement un plus grand nombre d'entraîneurs de haut niveau et d'experts techniques du côté des athlètes non handicapés. Nous pourrions étendre ces connaissances, cette expertise et cette formation technique aux athlètes handicapés. Il y aurait sans doute des avantages à tirer d'une plus grande intégration.

La présidente : Participez-vous à ces efforts d'intégration?

M. Kramers : Oui, à certains égards. Lorsque nous finançons nos programmes pour participer aux jeux interprovinciaux, que ce soit les Jeux du Canada ou les Jeux Western Canada, nous n'accordons pas un financement distinct pour les athlètes handicapés et les athlètes non handicapés. Nous tenons compte des deux éléments pour établir le niveau de financement du sport en question. Nous disons à ces sports qu'ils doivent travailler pour tirer parti au maximum de l'argent disponible.

Nous essayons, dans la mesure du possible, d'inciter les groupes à travailler ensemble.

La présidente : Nous vous remercions d'avoir pris le temps de vous joindre à nous aujourd'hui et nous vous remercions pour votre participation et votre patience.

M. Kramers : Merci à vous.

La présidente : La séance est levée.

(La séance est levée.)


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